Le grand tétras dans le territoire des réserves naturelles catalanes - Synthèse des connaissances après 16 ans d'expérience
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Le grand tétras dans le territoire des réserves naturelles catalanes Synthèse des connaissances après 16 ans d'expérience
Cet document est un travail collectif réalisé par les agents de la Fédération des réserves naturelles catalanes (FRNC). La coordination, synthèse et analyse des données ont été assurées par Raúl Pimenta — référent des projets concernant les galliformes de montagne au sein de la FRNC. La rédaction a été réalisée par Raúl Pimenta, David Mori- chon et Roger Fons. Le résumé a été traduit en català par Carme Ruset Font et in english par Susie Salies. Grand merci à tous les participants. Citation Pimenta, Raúl (coord.), David Morichon, Roger Fons, 2014, « Le grand tétras sur le territoire des réserves naturelles catalanes. Syn- thèse des connaissances après 16 ans d’expérience », Rapport de synthèse, Fédération des réserves naturelles catalanes, Prades, 71 p. Photo de couverture : réserve naturelle de Py, cliché pris avec un piège photographique.
Le grand tétras dans le territoire des réserves naturelles catalanes Synthèse des connaissances après 16 ans d’expérience Raúl Pimenta – coordinateur Fédération des réserves naturelles catalanes décembre 2014
Table des matières Résumé 6 1 Introduction 7 2 Espèce et statuts réglementaires 10 2.1 Description de l’espèce . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 2.2 Distribution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 2.3 Écologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 2.4 Mesures de protection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 2.5 Dispositions particulières liées à la chasse . . . . . . . 13 3 Principales méthodes de suivi 16 3.1 Recensement des mâles chanteurs de grand tétras . . . 16 3.2 Évaluation du succès de la reproduction . . . . . . . . 16 3.3 Suivi des habitats hivernaux . . . . . . . . . . . . . . . 17 4 Synthèse des connaissances 18 4.1 Aire de répartition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 4.1.1 Indice de répartition communale . . . . . . . . 18 4.1.2 Cartographie fine . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 4.2 Indice d’abondance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 4.2.1 Estimations avant 2012 . . . . . . . . . . . . . . 20 4.2.2 Nouvelle méthode « OGM 2012 » . . . . . . . . 20 4.2.3 À l’échelle des réserves naturelles catalanes . . 23 4.3 Tendance des effectifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 4.3.1 À l’échelle des Pyrénées . . . . . . . . . . . . . 24 4.3.2 À l’échelle de la haute chaîne orientale pyrénéenne 24 4.3.3 À l’échelle des réserves catalanes . . . . . . . . 24 4.4 Estimation du succès de reproduction . . . . . . . . . . 27 4.4.1 À l’échelle des Pyrénées-Orientales et des réserves catalanes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 4.4.2 À l’échelle des écorégions . . . . . . . . . . . . 30 2
5 Facteurs limitants, causes de déclin 32 5.1 Inventaire synthétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 5.2 Inventaire commenté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 5.2.1 Taille efficace de la population . . . . . . . . . . 33 5.2.2 Isolement géographique et génétique . . . . . . 33 5.2.3 Modification et fragmentation des habitats . . 34 5.2.4 Perturbation anthropique directe . . . . . . . . 35 5.2.5 Prédateurs et compétiteurs . . . . . . . . . . . . 39 6 Actions réalisées dans les réserves naturelles catalanes 41 6.1 Bref historique des suivis démographiques et de veille écologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 6.2 Mobilisation des agents . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 6.3 Actions inscrites aux plans de gestion écologique des réserves naturelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43 6.3.1 Connaissance de l’espèce . . . . . . . . . . . . . 43 6.3.2 Réduction des activités perturbatrices . . . . . 44 6.3.3 Actions sur les habitats . . . . . . . . . . . . . . 46 6.3.4 Sensibilisation du public . . . . . . . . . . . . . 46 6.3.5 Partenariats et stratégies collectives . . . . . . . 47 7 Conclusion 48 Bibliographie 54 A Données brutes des suivis sur place de chant 67 B Estimation des effectifs de grand tétras 69 C Analyse du sexe-ratio 71 3
Table des figures 4.1 Zones potentiellement favorables au grand tétras dans le secteur du PNR des Pyrénées catalanes . . . . . . . 21 4.2 Indices d’abondance pour la haute chaîne orientale et pour les Pyrénées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 4.3 Évolution du nombre moyen de coqs sur les places de chant des RN de Py et de Mantet . . . . . . . . . . . . 26 4.4 Réussite de la reproduction du grand tétras dans les P.O et dans le territoire des RN catalanes . . . . . . . . 29 4
Liste des tableaux 4.1 Statut communal du grand tétras ventilé par régions . 19 4.2 Estimation des effectifs de grands tétras, ventilés selon différentes échelles géographiques . . . . . . . . . . . . 20 4.3 Estimation du nombre de grand tétras présents dans le territoire des RN catalanes . . . . . . . . . . . . . . . 23 4.4 Tendance des effectifs de grand tétras sur les places de chant situées dans les RN catalanes . . . . . . . . . . . 25 4.5 Description statistique des indices de reproduction moyens à l’échelle des P.O et des RN catalanes . . . . . 29 4.6 Résumé des principales variables décrivant le succès de reproduction à l’échelle des P.O et à l’échelle des RN catalanes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 4.7 Indices de reproduction annuels à l’échelle de la haute chaîne orientale et à l’échelle des Pyrénées . . . . . . . 31 6.1 Nombre de jours consacrés par les agents des RN cata- lanes pour le suivi des galliformes de montagne . . . . 42 A.1 Données brutes des comptages sur place de chant réal- isées dans le territoire des RN catalanes . . . . . . . . 68 B.1 Effectifs de coqs de grand tétras présents dans les unités naturelles de l’OGM . . . . . . . . . . . . . . . . 70 B.2 Effectifs de coqs de grand tétras présents dans les RN catalanes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70 5
Résumé : L’analyse de seize années de suivi du grand tétras dans les réserves naturelles catalanes fait apparaître une diminution générale du nombre des coqs sur les places de chant et un taux moyen de reproduction de 0,82 jeunes par poules, insuffisant pour renouveler et maintenir la population. Ces résultats viennent confirmer le constat réalisé par d’autres observateurs (PNR des Pyrénées catalanes, 2007 ; Canigó Grand Site, 2011b ; Novoa, 2013) à l’échelle des Pyrénées catalanes et plus généralement, à l’échelle nationale (OGM, 2013a). Ce déclin des populations, s’il n’est pas stoppé, conduit à la disparition de l’oiseau des Pyrénées catalanes, comme cela a déjà été vécu dans les Alpes. Il est donc nécessaire de revoir la gestion du grand tétras dans les réserves naturelles catalanes, en s’appuyant sur le contexte favorable créé par la stratégie nationale en faveur du grand tétras (MEDDTL et LPO, 2012) et sur l’initiative déjà menée par le parc naturel régional des Pyrénées catalanes en 2007 (PNR des Pyrénées catalanes, 2007). Resum : L’anàlisis, durant 16 anys, del seguiment del gall fer a les reserves naturals catalanes mostra una disminució general del nombre de galls als cantadors i una taxa mitjana de reproducció de 0,82 polls per gallina, insuficient per renovar i manternir la població. Aquests resultats confirmen els estudis realitzats per altres observadors (ex. PNR des Pyrénées catalanes, 2007 ; Canigó Grand Site, 2011b ; Novoa, 2013) a nivell del Pirineu català i més àmpliament, a escala nacional (OGM, 2013a). Aquesta disminució de les poblacions, si no s’atura, condueix a la desaparició de l’ocell als Pirineus catalans, com ja ha passat als Alps. És necessari, doncs, revisar la gestió del gall fer a les reserves naturals catalanes, recolzant-se en el context favorable creat per l’estratègia nacional en defensa del gall fer (MEDDTL i LPO, 2012) i en l’iniciativa organitzada pel parc natural regional del Pirineu català el 2007 (PNR del Pirineu català, 2007). Summary : The capercaillie has been studied for the last sixteen years in the Catalonian Nature Reserves. These studies show that overall there are fewer cocks present in their courting grounds, and that young hens produce on average 0.82 chicks per year, which is too few a number to renew and maintain their population. These results confirm the observations made by other scientists (e.g. PNR des Pyrénées catalanes, 2007 ; Canigó Grand Site, 2011b ; Novoa, 2013) in the Catalan Pyrenees, and also in mainland France in general (OGM, 2013a) This decline in population, if it cannot be prevented, will lead to the disappearance of this bird in the Catalan Pyrenees, as has already happened in the Alps. So it is necessary to revise the strategy of managing the capercaillie in the Catalan nature reserves, using as a guide the favourable context created by the national strategy in favour of the capercaillie, (MEDDTL and LPO, 2012) and the project already begun by the by the Natural Regional Park of the Catalan Pyrenees (PNR des Pyrénées catalanes, 2007).
Chapitre 1 Introduction Il y a sept ans, la Fédération des réserves naturelles catalanes avait participé à la rédaction d’une Synthèse des connaissances du grand tétras sur le territoire des Pyrénées catalanes, de 1978 à 2007 (PNR des Pyrénées catalanes, 2007), réalisée par le parc naturel régional des Pyrénées catalanes. Deux ans plus tard, en 2009, le ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de l’Aménage- ment du territoire (MEDDTL) a déclenché une Stratégie nationale en faveur du grand tétras (LPO, 2009), réactualisée en 2012 pour une péri- ode de dix ans (MEDDTL et LPO, 2012). Dans chacun des documents cités, la synthèse des connaissances vient appuyer des perspectives et des préconisations de gestion conservatoire. Depuis 1997, dans le cadre de l’observatoire des galliformes de montagne (OGM), grâce à un partenariat avec l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), la fédération de chasse des Pyrénées-Orientales (FDC66) et l’Office national des forêts (ONF), la Fédération des réserves naturelles catalanes (FRNC) appuyée par les gestionnaires locaux collecte en réserve naturelle des observations méthodiques sur la dynamique des populations de grand tétras. Sans cependant ignorer le contexte général, ni de la chaîne pyrénéenne, ni des Pyrénées orientales, l’objectif du présent rapport est de recueillir les fruits de ces seize années de travail dans nos espaces protégés. Après un bref rappel de la biologie de l’espèce et des principales méthodes de suivi (chapitre 2 et 3), nous présentons une synthèse des connaissances enrichie de l’expérience procurée par notre propre ter- ritoire d’étude (chapitre 4) : dans les réserves naturelles catalanes, au cours de la période considérée, l’effectif de coqs chanteurs a diminué et le taux de reproduction de 0,82 jeunes par poule n’assure pas le maintien de la population à son niveau de 1993. Ces constatations inédites viennent s’ajouter à celles de l’effondrement de populations 7
et de la réduction du domaine vital du grand tétras à l’échelle de la France depuis une trentaine d’années, qui a conduit entre autre à l’extinction récente de la population alpine. Les causes de ce déclin ont été largement étudiées et une synthèse bibliographique en est proposée au chapitre 5. Plusieurs d’entre elles désignent, directement ou indirectement, les pratiques humaines, et on doit conclure que l’enraiement du déclin du grand tétras dépen- dra en partie de la modification de ces pratiques et de la certitude préalable qu’il est nécessaire de faire quelque chose. De nombreuses opérations sont déjà inscrites aux plans de gestion écologique de nos réserves (chapitre 6), mais ce rapport nous montre que les mesures prises sont insuffisantes et que nous devons reconsidérer nos actions de gestion. En réponse à la situation préoccupante du grand tétras dans les réserves naturelles catalanes et en nous appuyant sur le contexte favorable créé par la stratégie nationale, nous souhaitons prolonger le partenariat qui a permis de diagnostiquer le mauvais état de santé du grand tétras, de manière à définir aux échelles nécessaires des mesures conservatoires innovantes et plus efficaces. Après diffusion de ce premier rapport et concertation avec les parties intéressées, un second document proposera donc un éventail de mesures de gestion. L’écologie et la biologie complexes du grand tétras, son organisation en méta-population, défient les frontières placées par l’homme et imposent de trouver des solutions que chacun puisse mettre en œuvre et défendre avec conviction. Il faut dire que le grand tétras mérite bien tant de sollicitude et, pour clore cette introduction, il n’est peut-être pas inutile de rappeler quatre faits qui étayent l’enjeu de conservation du grand tétras. Biogéographie Le genre Tetrao est endémique du domaine paléarc- tique. Il est représenté aujourd’hui par deux espèces seulement. Si Tetrao urogallus, le coq de bruyère, a une large aire de répartition, celle-ci est très fragmentée et la souche pyrénéenne provient de po- pulations réfugiées en péninsule Ibérique lors des dernières glacia- tions. Ces informations, livrées par les études actuelles du patrimoine génétique de l’oiseau, nous renseignent sur une histoire complexe, imparfaitement connue, celle du développement de la vie en Europe durant les derniers millions d’années. Génétique Isolées et soumises aux conditions imposées par le domaine pyrénéen, ces populations ont développé des adaptations écologiques et morphologiques qui justifient de distinguer la sous- espèce Tetrao urogallus aquitanus, endémique des Pyrénées. Cette force adaptative s’associe à celles de la dizaine de sous-espèces décrites 8
dans toute l’Eurasie pour composer une diversité génétique consti- tutive de la vigueur de l’espèce. Elle participe également à former le caractère original de la biodiversité pyrénéenne. Écologie L’habitat optimum du grand tétras est un écosystème forestier mature dont la structure complexe répond aux diverses exigences de son développement. En retour, Tetrao urogallus est un élément du fonctionnement et de la stabilité de cet écosystème, à la fois par lui-même, mais plus encore peut-être aujourd’hui par les efforts de conservation dont il peut faire l’objet de notre part, au titre d’espèce-parapluie. Les trois premiers faits se restreignent à l’approche scientifique, le dernier relève de la culture. Il s’agit d’une dimension ethnozo- ologique qui se manifeste de diverses manières, probablement en- tremêlées en chacun de nous, depuis l’intérêt scientifique le plus objectif jusqu’aux nombreuses formes de relations affectives, en pas- sant par des attitudes éthiques variées. La relation construite au fil du temps entre l’homme et la nature laisse une empreinte dans les men- talités, les mots, les attitudes, les objets. Ces traces, le grand tétras, qui accompagne l’homme depuis des milliers d’années, les a égale- ment laissées. Conserver le lien vital qui nous unit à lui est nécessaire pour les entretenir, les redécouvrir ou les comprendre : cela contribue à expliquer l’homme et peut posséder une vertu réconciliatrice. 9
Chapitre 2 Espèce et statuts réglementaires 2.1 Description de l’espèce Le grand tétras (Tetrao urogallus Linnaeus, 1758) est le plus grand des galliformes européens. L’espèce présente un fort dimorphisme sexuel. Le mâle est plus grand et plus lourd que la femelle (pour la sous- espèce pyrénéenne le poids moyen des mâles est d’environ 4 kg contre 2 kg pour les femelles). Le plumage est également très différent : celui du mâle est noirâtre aux reflets cuivrés et verts, le dessus des ailes est roux et une tâche blanche est bien visible au niveau des scapulaires 1 , la femelle et les jeunes sont brun-roux tachetés, ce qui leur permet de passer facilement inaperçus au milieu de la végétation. 2.2 Distribution En France, l’espèce est présente dans les Pyrénées, les Vosges, le Jura et de manière relictuelle dans les Cévennes (mélange de sous-espèces issues de réintroductions). Elle a disparu des Alpes et son aire de répartition a fortement diminué dans les Vosges et le Jura. La sous- espèce aquitanicus (Ingram, 1915) est endémique des Pyrénées et niche sur l’ensemble du massif. 1. Plumes désignant une partie du plumage de l’aile venant recouvrir les épaules de l’oiseau au repos. 10
2.3 Écologie Habitat : milieux forestiers diversifiés, présentant une strate arbus- tive développée, situés entre 1 600 et 2 300 mètres d’altitude, principalement dans les versants froids (N, NE, NW). Dans les Pyrénées la formation végétale la plus utilisée est la forêt de pins à crochets. Il s’agit d’un habitat caractéristique de l’étage subalpin, à la limite altitudinale supérieure des zones fa- vorables pour le grand tétras. La limite inférieure, située dans l’é- tage montagnard, est caractérisée par des formations mélangées de hêtre et de sapin. Alimentation : en hiver le grand tétras se nourrit essentiellement d’aiguilles de pin, son appareil digestif étant spécialement adapté à ce régime. Du printemps à l’automne l’alimentation est plus variée, composée de pousses de végétaux (arbustes et herbacées), ainsi que de baies et d’invertébrés. Adaptations : l’espèce étant homéotherme, avec l’arrivée de l’hiver le grand tétras change de plumage pour mieux résister au froid. Les plumes du corps deviennent plus longues (67 à 71 mm en hiver contre 58 à 62 mm en été) et l’on observe la présence d’un duvet fourni à la base des rectrices. Certaines parties du corps habituellement dégarnies chez les oiseaux, comme les narines et les pattes, sont pourvues de petites plumes. Des bourrelets plantaires permettent une isolation accrue des pattes. Pour mieux se déplacer dans la neige, les pattes sont pourvues de peignes permettant d’augmenter la surface de contact au sol et l’on observe une augmentation de la taille des griffes (en moyenne 9 mm en été contre 17 mm en hiver). Reproduction : la parade commence généralement début mai et peut s’étaler sur un mois. Le nid est aménagé très sommairement, au sol, simplement dissimulé par la végétation. La ponte, composée de 5 à 8 œufs, est généralement déposée fin mai ou début juin. La couvaison, assurée uniquement par la femelle, dure 27 jours. Après l’éclosion les jeunes suivent la femelle pendant plus d’un mois (juillet-août) et gagnent leur indépendance lorqu’ils sont capables de voler. Migration : espèce très sédentaire, ce sont surtout les juvéniles qui se dispersent durant leur phase d’erratisme. Les données de suivi télémétrique font état de déplacements en moyenne de 1 à 2 km, avec des déplacements maximaux pouvant atteindre 25 km. De façon générale les poules se dispersent plus loin que les coqs et 11
tendent ainsi à s’éloigner de leur site de naissance. Á l’inverse les coqs cherchent à se reproduire le plus près de leur site de naissance. Longévité : 10 à 15 ans 2.4 Mesures de protection Les mesures de protection en faveur du grand tétras peuvent être déclinées selon plusieurs échelles 2 . Au niveau européen L’espèce est considérée en déclin (Birdlife inter- national 2004) : – annexe III de la convention de Berne ; – annexes I, II et III de la directive européenne concernant la conservation des oiseaux sauvages ; – en Espagne et en Andorre l’espèce est protégée depuis 1986. Au niveau national L’espèce est considérée vulnérable (UICN-MNHN 2008) : – articles 3 et 5 de l’arrêté ministériel du 17 Avril 1981 fixant la liste des oiseaux protégés sur l’ensemble du territoire ; – fait l’objet d’une stratégie nationale de sauvegarde et de conserva- tion ; – espèce déterminante de la politique nationale Trame verte et bleue prochainement déclinée en région L-R par le schéma ré- gional de cohérence écologique. Au niveau régional L’espèce est considéré vulnérable : – présente dans la liste rouge Languedoc-Roussillon ; – classé parmi les espèces prioritaires (classement 1+) pour la mise en place de nouvelles aires protégées au travers de la SCAP 3 . Au niveau départemental L’espèce est menacée, sont statut est priori- taire : – espèce soumis au plan de chasse validé par arrêté préfectoral (arrêté ministériel du 11/04/1990) ; 2. Cette section découle principalement de la consultation et synthèse des documents suivants : Canigó Grand Site (2012) ; PNR des Pyrénées catalanes (2007, 2009, 2012) ; Ménoni et collab. (2012) ; Principat d’Andorra (2013) ; ONCFS (2012) ; OGM (2010). 3. Stratégie de création des aires protégées. 12
– arrêté préfectoral permanent pour les forêts communales et domaniales (1983) pour limiter le dérangement par chasse pho- tographique et la divagation des chiens pendant la période de reproduction ; – l’ONF a suspendu la chasse dans les territoires domaniaux depuis 1991 ; – le conseil général a interdit la chasse dans la réserve naturelle régionale de Nyer ; – espèce prioritaire de la charte du PNR des Pyrénées catalanes (décret ministériel du 5 mars 2004), en particulier pour ce qui concerne la connectivité des massifs de la Cerdagne ; – état de conservation jugé moyen à défavorable dans les documents d’objectifs des sites Natura 2000 incluant des zones de présence de l’espèce (ZPS Carlit–Capcir–Campcardos et ZPS Canigou– Conques-de-la-Preste) ; – responsabilité forte à très forte dans les documents d’objectifs des sites Natura 2000 incluant des zones de présence de l’espèce : Note de 8/14 pour la ZPS Puigmal–Carança ; note de 10/14 pour la ZPS Carlit–Capcir–Campcardos et note de 10/12 pour la ZPS Canigou–Conques-de-la-Preste. 2.5 Dispositions particulières liées à la chasse En France, le grand tétras n’est plus chassé que dans les Pyrénées : – la sous-espèce Tetrao urogallus major (massifs montagneux de l’Est) est protégée depuis 1985, par la loi no 76-629 sur la pro- tection de la nature (mesure reconduite en 1991 pour une durée indéterminée) ; – chasse suspendue en Haute-Savoie (1967), dans le Jura (1973), les Vosges (1974) et dans les Cévennes (Lozère et départements limitrophes) où l’espèce a été réintroduite ; – chasse autorisée des coqs maillés 4 sur le territoire national (Pyrénées) (arrêté ministériel du 26 juin 1987 fixant la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée). Dans les Pyrénées, la réglementation diffère selon les départements. Dans les Pyrénées-Orientales : – mise en œuvre d’un schéma départemental de gestion cynégé- tique par arrêté préfectoral (code de l’environnement : articles 4. Le coq est maillé lorsqu’il y a apparition du plumage d’adulte. 13
L. 425-1 à L. 425-15 pour la partie législative et articles R. 425-1 à R. 425-20 pour la partie réglementaire) ; – pour la saison, les dates d’ouverture et la clôture de la chasse de façon générale sont précisées par arrêté préfectoral (code de l’environnement : articles L. 425-1 à L. 425-15 pour la par- tie législative et articles R. 425-1 à R. 425-20 pour la partie réglementaire) ; – les modalités et quotas de prélèvement relatifs au grand tétras (plan de chasse légal depuis 1990 ; articles L. 425-1 à L. 425- 15 pour la partie législative et articles R. 425-1 à R. 425-20 pour la partie réglementaire du code de l’environnement) sont fixés ultérieurement, notamment en fonction des indicateurs de suivi : – un indice de reproduction (IR) est estimé pour la saison et le département selon le programme 039 de l’OGM 5 ; – lorsque l’indice de reproduction départemental est inférieur à un jeune par poule, le prélèvement est nul ; – lorsque l’indice de reproduction départemental est au mini- mum d’un jeune par poule, les demandes d’attribution trans- mises par la FDC66 6 sont examinées par la CDCFS 7 présidé par le préfet ; – depuis 2013 sont aussi examinés les indices de reproduc- tion à l’échelle d’unités de gestion (au nombre de 3 dans les Pyrénées-Orientales, le périmètre de ces unités s’appuie sur le découpage du territoire en unités naturelles réalisé par l’OGM) ; – l’OGM et l’ONCFS préconisent un barème maximal admissi- ble de prélèvements : 5 % du stock de mâles adultes pour une reproduction de 1 à 1,4 jeunes par poule et de 10 % au-delà de 1,4 jeunes par poule (DDTM des Pyrénées-Orientales et préfecture des Pyrénées-Orientales, 2013c). – depuis 2013, le projet d’arrêté préfectoral relatif au plan de chasse pour le grand tétras pour la saison cynégétique est soumis à consultation publique (loi no 2012-1460 du 27 décembre 2012) ; – déclaration obligatoire des oiseaux prélevés sur un carnet de prélèvement (circulaire DNP/CFF no 98-5 du 3 juillet 1998 rela- tive au carnet de prélèvement obligatoire pour certains gibiers de montagne) ; 5. Observatoire des galliformes de montagne 6. Fédération départementale des chasseurs des Pyrénées-Orientales 7. Commission départementale de la chasse et de la faune sauvage 14
– dans les réserves naturelles nationales, l’avis du comité consul- tatif est obligatoire : – les décrets ministériels de création des réserves naturelles nationales prévoient que les préfets puissent réglementer la pratique de la chasse après avis des comités consultatifs (dis- position prévue pendant l’acte de classement conformément à l’article L332–3 du code de l’environnement) ; – selon les dispositions prévues dans l’arrêté préfectoral no 2013 263 0006 (DDTM des Pyrénées-Orientales et préfecture des Pyrénées-Orientales, 2013b) 8 . Note : Cette section découle principalement de la consul- tation et synthèse des documents suivants : Secrétariat général du gouvernement (1987, 2000, 2008) ; MEDDE (1998, 2012) ; DDTM des Pyrénées-Orientales et préfec- ture des Pyrénées-Orientales (2011, 2013a,b,c,d). 8. Pour rappel ce même arrêté prévoit que « La chasse du Grand tétras est interdite dans les forêts domaniales, dans les réserves de chasse et de faune sauvage, dans la Réserve naturelle régionale de Nyer ». 15
Chapitre 3 Principales méthodes de suivi 3.1 Recensement des mâles chanteurs de grand tétras L’objectif est de suivre l’évolution démographique des places de chant et plus généralement de la population. Les agents des réserves naturelles réalisent, depuis plus de quinze ans, un suivi annuel et régulier des places de chant situées sur leur territoire. Le protocole utilisé est celui du programme 041 de l’OGM. Le dénombrement est réalisé entre mi-avril et fin mai, moment des parades nuptiales. Les observateurs sont cachés dans des affûts placés la veille au soir du comptage, avant 20 heures. Le comptage démarre à 4 heures et prend fin une demi-heure après l’arrêt de l’activité matinale. Le protocole est répété à une ou deux semaines d’intervalle environ. Seul le meilleur des deux résultats est retenu. 3.2 Évaluation du succès de la reproduction Afin de suivre le succès de reproduction de l’espèce, les réserves catalanes réalisent en partenariat avec l’ONCFS et les ACCA locales un suivi annuel et régulier au chien d’arrêt sur les principaux sites d’élevage des jeunes de grand tétras. Le protocole utilisé est celui du programme 042 de l’OGM. Le dénombrement est réalisé au mois d’août sur la base de comptages au chien d’arrêt. Les secteurs de comptage ont été définies par l’OGM de façon à échantillonner de manière uniforme les différentes unités na- turelles du département. Trente-deux secteurs sont définis à l’échelle des P.O. 16
3.3 Suivi des habitats hivernaux L’objectif premier de cette action est l’établissement d’une cartogra- phie fine des zones d’hivernage du grand tétras. L’actualisation mesurée de cette carte permet d’approcher la fréquentation du grand tétras pendant cette période critique pour l’espèce qu’est l’hiver et, de fait, de veiller au maximum de tranquillité de ces secteurs. Les premières campagnes permettant d’établir l’état initial ont eu lieu essentiellement en réserve naturelle de Py entre 1999 et 2001. La deuxième campagne a été réalisée environ une décennie plus tard, pendant l’hiver 2011–2012. Entre ces deux états, des évaluations ponctuelles plus sommaires ont pu avoir lieu. Les prospections sont effectuées du 15 janvier au 15 avril, entre 1 800 et 2 300 mètres d’altitude et généralement trois jours après un épisode neigeux. Sont privilégiés les peuplements forestiers résineux (essentiellement les pineraies à crochets) exposés en ubac. Le proto- cole consiste à rechercher et localiser géographiquement tout indice de présence de l’espèce (crottes, plumes, empreintes, observations directes, etc.). Pour ce faire, sont constituées des équipe de deux à cinq personnes qui progressent « en battue » le long des courbes de niveau en partant des secteurs les plus bas. Les observateurs sont distants les uns des autres de 10 mètres au plus, ceci afin d’optimiser la recherche d’indices tout en permettant de prospecter des surfaces importantes. 17
Chapitre 4 Synthèse des connaissances 4.1 Aire de répartition 4.1.1 Indice de répartition communale L’évolution du domaine vital est un paramètre difficile à mesurer et le plus souvent on a recours à des indicateurs. Un des indicateurs utilisés, pour évaluer grossièrement l’aire de répartition de l’espèce à l’échelle des Pyrénées, est la présence où l’absence de l’espèce à l’échelle communale. Une enquête à été réalisée auprès de l’ensem- ble des partenaires de l’OGM au cours des l’années 2009–2010. Les résultats ont été publiées en 2011 (cf. tableau 4.1 page 19). Il en découle qu’actuellement, sur l’ensemble des Pyrénées, l’aire de répartition du grand tétras semble se stabiliser. Néanmoins, cette réalité plutôt encourageante ne doit pas faire oublier le recul très important observé pendant la période 1950–1990 au cours de laquelle l’espèce a disparu de vingt-trois communes pyrénéennes. 4.1.2 Cartographie fine L’OGM dispose actuellement d’une cartographie pyrénéenne de l’aire de répartition globale du grand tétras à une échelle relativement fine. Réalisée à dire d’expert avec le concours de l’ensemble des partenaires de l’OGM, cette cartographie a d’abord vu le jour en 2003, puis a été récemment complétée et mise à jour en 2009. Ces zones de présence globale englobent plusieurs unités cartographiques constituant les sites d’hivernage, les sites de nichées ainsi que les places de chant. À l’échelle des Pyrénées-Orientales on peut remarquer la modéli- sation des zones favorables au grand tétras, étude réalisée en 2008 dans le cadre de l’élaboration du Plan d’actions en faveur du grand tétras dans les Pyrénées catalanes, synthèse réalisée pour le PNR des 18
(2011). Rég ion Aqu i Lan taine Dis gue par Mid d 195 itio n i-Py oc-Rou 0–1 Tota r s 990 l Py énées sillon rén 3 200 ées 9 0–2 App 009 arit 11 0 195 ion 1 0–1 23 990 4 0 19 200 0 0–2 spo 5 009 rad Présen 2 0 ique ce 2 1 200 ou ince 0–2 3 009 rtaine Pré se 4 2 régu nce 12 200 lière 0–2 57 009 71 29 61 207 297 représentent un nombre de communes. Sources : Buffet et Dumont-Dayot Table 4.1 – Statut communal du grand tétras ventilé par régions. Les valeurs
Table 4.2 – Estimation des effectifs de Tetrao urogallus aquitanicus en 2011, ventilés selon différentes échelles géographiques. Sources : Canigó Grand Site (2011b). minimum maximum effectifs européens 5 000 6 000 effectifs nationaux 3 500 4 200 effectifs régionaux (L-R) 400 485 effectifs départementaux (P.O) 320 360 Pyrénées catalanes et dans laquelle les réserves naturelles se sont beaucoup investies (cf. figure 4.1). Les travaux à des échelles encore plus fines — de l’ordre d’un massif forestier — sont rares, mais l’on peut citer le suivi diachronique de l’aire de répartition hivernale avérée du grand tétras réalisé en réserve naturelle de Py par son gestionaire (cf. section 3.3 page 17). 4.2 Indice d’abondance 4.2.1 Estimations avant 2012 Actuellement le nombre d’individus pour l’ensemble des Pyrénées est estimé entre 5 000 et 6 000 oiseaux (cf. tableau 4.2 page 20), la grande majorité de la population étant localisée sur le versant nord des Pyrénées, en France. Le statut du grand tétras dans les Pyrénées- Orientales est considéré très précaire : « ... il semble que le nombre moyen de coqs par place de chant soit en diminution de plus de 30 % depuis 1980. Rappelons que ce département abrite 66 à 90 % de la po- pulation régionale. » Canigó Grand Site (2011b) 4.2.2 Nouvelle méthode « OGM 2012 » En 2012 l’OGM fournit pour la première fois une estimation de l’indice d’abondance (cf. figure 4.2). Ce calcul a pu être réalisé grâce à la mise en place d’un nouveau protocole basé sur le suivi des places de chant, l’ancienne méthode ne permettant pas de réaliser un échan- tillonnage suffisant pour obtenir des résultats significatifs. 20
Figure 4.1 – Modélisation des zones potentiellement favorables au grand tétras dans le secteur du PNR des Pyrénées catalanes. Source : PNR des Pyrénées catalanes (2007). 21
Figure 4.2 – Estimation des indices d’abondance pour la région géo- graphique de la haute chaîne orientale et pour l’ensemble des Pyrénées. Sources : OGM (2013a). Ainsi, dans l’unité géographique de la haute chaîne orientale en France, on estime le nombre de coqs présents compris entre 202 et 654 individus, la valeur de plus forte probabilité étant 280 coqs. Les valeurs avancées constituent une fourchette des valeurs les plus probables pour lesquelles le risque de se tromper est de 5 %. Le nombre de poules peut être estimé en considérant un sexe ratio équilibré entre les mâles et les femelles 1 . Il faut remarquer la jeunesse de cette nouvelle méthode. Les pre- miers résultats ont pu être calculés au bout de deux ans de collecte des données. Il est vraisemblable que les estimations évoluent et s’affinent avec le temps et l’accumulation de nouvelles données. 22
Table 4.3 – Estimation du nombre de grand tétras présents dans le territoire des réserves naturelles catalanes. Calculs effectués depuis les données brutes issues des comptages sur place de chant (de 1997 à 2014, cf. tableau A.1 en annexe A page 67). L’optimum est calculé sous l’hypothèse que les coqs restent fidèles à leurs place de chant d’une année sur l’autre. L’estimation 2014 regroupe les données les plus récentes pour chaque place de chant. Sources : données FRNC, OGM (2013c, 2014). Réserve naturelle Optimum Estimation Estimation OGM 1997–2014 2014 2013 Py 33 14 13 [11–16] Mantet 10 4 6 [5–11] Prats-de-Mollo 1 0 2 [0–10] Nohèdes 4 2 3 [2–7] Eyne 3 2 1 [1–3] Total 51 22 25 [19–47] 4.2.3 À l’échelle des réserves naturelles catalanes L’analyse des données brutes des suivis sur place de chant (don- nées disponibles en annexe A) permet d’estimer la variable optimum présentée dans le tableau 4.3. Cet optimum regroupe les valeurs maxi- males constatées sur chacune des places de chant et généralement observées les premières années de suivi 2 . En faisant l’hypothèse que les coqs restent fidèles à leurs places de chant d’une année sur l’autre, on peut estimer à 51 le nombre de coqs potentiellement présents par le passé en territoire des réserves naturelles catalanes. Cet effectif contraste avec les 22 coqs que l’on estime actuellement présents dans ces mêmes territoires. Ces valeurs font état d’une diminution potentielle et globale de plus de 50 % de la population en seulement 17 ans de suivi. Cette diminution est particulièrement perceptible pour les réserves na- turelles de Py et de Mantet qui conservent les effectifs de coqs les 1. Dans la littérature pyrénéenne, le sexe-ratio du grand tétras est généralement considéré équilibré. C’est sous cette hypothèse que sont calculés, entre autre, les indices annuels de l’OGM. Ce rapport fait également cette hypothèse, ceci afin de conserver des données comparables avec les valeurs de référence. Cependant, actuellement, l’hypothèse d’un sexe- ratio équilibré dans le département des P.O peut être contesté, comme démontré par l’analyse en annexe C page 71. Sous l’hypothèse d’un sexe-ratio équilibré alors qu’il serait plutôt déséquilibré en faveur des femelles, on sous-estime le nombre de femelles et on surestime l’indice de reproduction. 2. Pour des raisons historiques, le calendrier de mise en œuvre des suivis sur place de chant diffère d’une réserve à l’autre. Les réserves naturelles de Py et de Mantet ont mis en place les premiers suivis en 1997–1998. La place de chant la plus récemment trouvée et suivie l’a été sur le territoire de Nohèdes en 2008. 23
plus importants, mais, malgré des effectifs plus faibles et les suivis plus récents, le phénomène semble également présent dans les autres réserves naturelles 3 . Le nouveau protocole de suivi mis en place par l’OGM (cf. sec- tion 4.2.2) fournit une approche complémentaire pour l’estimation des effectifs sur un territoire. Les estimations sont davantage robustes à l’échelle des régions naturelles, mais l’OGM fournit également pour la première fois des estimations à l’échelle des unités naturelles. Transposés à l’échelle des réserves naturelles, ces résultats présentés dans le tableau 4.3 fournissent des estimations assez proches de ce qui est observé sur le terrain. Cette approche permet le calcul d’un intervalle de confiance sur les valeurs, calcul qui intègre par exemple les places de chant inconnues. L’annexe B page 69 fournit les données et la méthode utilisées pour le calcul de ces estimations à l’échelle des réserves naturelles catalanes. 4.3 Tendance des effectifs 4.3.1 À l’échelle des Pyrénées Au début des années 1990 le nombre de grands tétras en France est estimé entre 8 000 et 12 000 individus. La population pyrénéenne est quant à elle estimée entre 3 000 et 5 000 individus dans les années 2000 (PNR des Pyrénées catalanes, 2007). Depuis l’OGM observe une diminution globale de la population pyrénéenne. Cet indice est fournit par le suivi temporel d’un réseau de places de chant de référence sur l’ensemble des Pyrénées. Ainsi, pour la chaîne des Pyrénées cet indice est négatif depuis plusieurs années. On estime que les effectifs ont diminué de 21 % à 36 % sur la période allant de 2000 à 2013 (OGM, 2013a). 4.3.2 À l’échelle de la haute chaîne orientale pyrénéenne À l’échelle de la région géographique de la haute chaîne orientale, jusqu’à peu les données ne permettaient pas de conclure en faveur d’une tendance significative des effectifs — les intervalles de confi- ance étant à la fois dans des valeurs négatives et positives. En 2011 les nouvelles tendances permettent de constater pour la première fois une réelle diminution des effectifs — entre -2 % et -35 % pour la période 2000–2011 (OGM, 2011). Malheureusement cette tendance 3. Pour une analyse plus fine des tendances, se reporter à la section 4.3.3. 24
Table 4.4 – Tendance des effectifs de coqs de grand tétras sur 10 places de chant situées dans les réserves naturelles catalanes (seuls les places de chant avec au moins 6 années de suivi ont été prises en compte). Test sur les pentes des droites de régression des distributions observées : l’hypothèse nulle est celle d’une pente non significativement différente de zéro ; R2 est le coefficient de corrélation entre les distributions observées et un modèle linéaire d’écoulement temporel ; lorsque la probabilité est inférieure ou proche de 0,05 alors la pente de la droite de régression est significativement différente de zéro. Commune ID.OGM periode nb.annees moy.coqs coef.deter pente p.value accroissement Py 136 1997-2012 16 10.56 0.24 -0.35 0.05 -35 Py 15 1998-2012 15 4.53 0.36 -0.23 0.02 -23 Py 135 1998-2012 13 1.62 0.52 -0.20 0.01 -20 Py 147 2000-2011 8 0.50 0.22 -0.06 0.24 Mantet 134 2000-2012 12 4.17 0.42 -0.39 0.02 -39 Mantet 337 2002-2012 8 0.12 0.07 0.02 0.54 Prats-de-Mollo 335 2007-2012 6 0.17 0.02 0.03 0.80 Nohèdes 334 2004-2012 9 1.67 0.42 -0.17 0.06 -17 Eyne 328 2007-2012 6 0.67 0.04 -0.06 0.69 est également confirmée en 2013 ou l’on estime que les effectifs on diminué de 6 % à 38 % depuis l’an 2000 (OGM, 2013a). 4.3.3 À l’échelle des réserves catalanes On constate (cf. tableau 4.4 page 25) que pour les places de chant avec des effectifs importants ou moyennement importants — nombre moyen de coqs supérieur à un individu — la droite de régression des distributions observées possède une pente significativement négative, c’est à dire qu’elle confirme des effectifs globalement en baisse. Pour les places de chant à très faibles effectifs on n’observe pas d’évolution significative. Ceci peut facilement s’expliquer du fait d’un nombre de coqs très faible sur ces places de chant — moyenne inférieure à un — ce qui ne favorise pas la mise en évidence de variations surtout lorsque le nombre d’années de suivi est relativement court. Les taux d’accroissement significativement non nuls varient entre -17 et -39 % des effectifs. On peut conclure que ces valeurs, observées sur les places de chant du territoire des réserves catalanes, confirment la décroissance des populations de grand tétras constatée par l’OGM, aussi bien à l’échelle de la région géographique de la haute chaîne orientale, qui nous concerne, qu’à l’échelle des Pyrénées françaises. La tendance des effectifs peut également être approchée en étudiant l’évolution du nombre moyen de coqs sur les places de chant. Pour le calcul de cet indice, seules quatre places de chant, situées dans les 25
7 nb moyen de coqs 6 5 4 3 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 15 nb de coqs 10 5 0 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 années Figure 4.3 – Évolution du nombre moyen de coqs sur un ensemble de 4 places de chant des réserves naturelles de Py et de Mantet, entre 1999 et 2012. réserves de Py et de Mantet, ont été utilisées, ceci afin de disposer d’un lot de données homogène sur la période de temps la plus importante possible. Il faut remarquer qu’il s’agit des places de chant des réserves avec les effectifs les plus importants, les places de chant à faibles effectifs ne disposant pas d’un suivi temporel suffisamment important et constant. La distribution de la figure 4.3 (page 26) suggère également une diminution des effectifs pour la période de temps considérée. Les premières années, entre 1999 et 2003, le nombre moyen de coqs oscille entre six et sept coqs, tandis qu’après 2003 la moyenne ne dépasse pas cinq coqs. 26
Si l’on réalise un test sur la pente de la droite de régression de cette distribution on obtient une pente significativement négative (probabilité égale à 0,003) d’une valeur de -22 %. 4.4 Estimation du succès de reproduction L’indice de reproduction — calculé par le rapport entre le nombre de jeunes et le nombre de femelles observées — permet d’appréhender le succès de reproduction d’une espèce pour une période donnée. Comme tout estimateur cet indice se rapproche d’autant plus de la réalité qu’il est calculé à partir d’un échantillon suffisant. Par un raisonnement purement statistique, on estime la taille d’un échantil- lon représentatif à au moins 30 observations. Pour l’espèce qui nous concerne il s’agirait d’observer au moins 30 poules, accompagnées ou pas de jeunes. Les résultats obtenus à partir d’échantillons de très faibles effectifs — moins de 20 poules — sont considérés comme peu fiables et doivent être utilisés avec beaucoup de précautions, de façon indicatrice. Pour ces raisons et du fait des densités relativement faibles des populations de grand tétras comparées à d’autres espèces, il est plus aisé de travailler à des échelles plus grandes, regroupant plusieurs unités de reproduction. L’échelle la plus pertinente semble être celle de l’écorégion. 4.4.1 À l’échelle des Pyrénées-Orientales et des réserves catalanes Ainsi, à l’échelle des réserves catalanes, les effectifs que l’on peut observer sur un pas de temps annuel sont beaucoup trop faibles pour obtenir des estimations fiables de l’indice de reproduction et il est préférable de raisonner sur des périodes plus longues — par exemple pour l’ensemble de la période 1993–2013. À ce titre les indices annuels de reproduction observés dans les réserves catalanes et représentés figure 4.4 page 29 sont donnés ici uniquement pour faire remarquer la concordance qu’il semble se dégager entre notre distribution et celle observée dans les Pyrénées-Orientales. Sur le territoire des réserves catalanes ont été observés de 1993 à 2013 : 96 poules, 14 adultes indéterminés et 84 jeunes. Sous l’hy- pothèse d’un sexe-ratio équilibré entre les mâles et les femelles 4 , 4. Dans la littérature pyrénéenne, le sexe-ratio du grand tétras est généralement considéré équilibré. C’est sous cette hypothèse que sont calculés, entre autre, les indices annuels de l’OGM. Ce rapport fait également cette hypothèse, ceci afin de conserver des données comparables avec les valeurs de référence. Cependant, actuellement, l’hypothèse d’un sexe- 27
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