Portrait de la communauté de Baie-Trinité
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Portrait de la communauté de Baie-Trinité Dans le cadre du Projet d’accompagnement des communautés face aux risques côtiers Juin 2013
Document réalisé par la Direction de santé publique de l’Agence de la santé et des services sociaux de la Côte-Nord AUTEURE Iseult Séguin Aubé Agente de développement social Projet d’accompagnement des communautés face aux risques côtiers Direction de santé publique Agence de la santé et des services sociaux de la Côte-Nord COLLABORATEURS Raynald Cloutier, directeur de santé publique, Agence de la santé et des services sociaux de la Côte-Nord Steve Plante, co-directeur de l’Alliance de recherche Universités-Communautés - Défis des communautés côtières (ARUC-DCC) RÉALISATION TECHNIQUE Esther Desbiens, technicienne REMERCIEMENTS Nous remercions madame Geneviève Brisson de l’Institut national de santé publique du Québec, ainsi que l’équipe de l’Alliance de recherche Universités-Communautés - Défis des communautés côtières pour leur précieuse collaboration dans le cadre du projet d’accompagnement des communautés face aux risques côtiers. Nous tenons également à souligner l’apport du Comité ZIP rive nord de l’estuaire ainsi que de la municipalité de Baie-Trinité. Le projet d’accompagnement a été rendu possible grâce à l’appui financier et à la collaboration de professionnels du ministère de la Sécurité publique ainsi que de la Conférence régionale des élus de la Côte-Nord. © Agence de la santé et des services sociaux de la Côte-Nord, Baie-Comeau, 2013 Dépôt légal – 2e trimestre Bibliothèque et Archives nationales du Québec ISBN : 978-2-89003-252-1 (version imprimée) ISBN : 978-2-89003-253-8 (pdf)
TABLE DES MATIÈRES 1. MISE EN CONTEXTE .................................................................................. 1 1.1 L’émergence des risques côtiers............................................................ 1 1.2 Le projet d’accompagnement des communautés face aux risques côtiers ........... 1 1.3 Origine des données .......................................................................... 3 1.3.1 Sources primaires de données ...................................................... 3 1.3.2 Sources secondaires de données ................................................... 3 2. PORTRAIT DE LA GÉOGRAPHIE HUMAINE DU TERRITOIRE ...................................... 3 2.1 Réalité socio-économique et démographique............................................. 3 2.1.1 Indices de développement et de défavorisation ................................. 3 2.1.2 Secteurs d’activité ................................................................... 4 2.1.3 Logements ............................................................................. 6 2.1.4 Déclin et vieillissement de la population ......................................... 7 2.1.5 Scolarité et avenir de l’école primaire............................................ 8 2.2 Gouvernance et politique ................................................................... 10 2.3 Synthèse de la section....................................................................... 11 3. PORTRAIT DE LA GÉOGRAPHIE PHYSIQUE DU TERRITOIRE..................................... 11 3.1 Un aperçu du territoire...................................................................... 12 3.2 Géomorphologie de la zone côtière ....................................................... 13 3.3 Historique des tempêtes .................................................................... 14 3.4 Synthèse de la section....................................................................... 15 4. PORTRAIT DES ACTEURS DE LA GESTION DES RISQUES CÔTIERS.............................. 15 4.1 L’État québécois ............................................................................. 16 4.1.1 Prise en compte des changements climatiques ................................. 16 4.1.2 La prévention des risques .......................................................... 17 4.1.3 Intervention en situation d’urgence .............................................. 17 4.1.4 Soutien financier visant à faciliter le rétablissement.......................... 18 4.2 Le monde municipal ......................................................................... 19 4.2.1 Les MRC ............................................................................... 19 4.2.2 Règlements de contrôle intérimaire.............................................. 23 4.2.3 Les municipalités .................................................................... 23 4.3 Les compagnies d’assurances............................................................... 24 4.4 Les citoyennes et citoyens .................................................................. 24 4.5 Synthèse de la section....................................................................... 25 5. PERCEPTIONS CITOYENNES DES RISQUES ET DE LEUR GESTION .............................. 26 5.1 Synthèse de section.......................................................................... 31 6. PISTES DE RÉFLEXIONS ET D’ACTIONS............................................................ 31 6.1 Les suites désirées par les participantes et participants au forum ................... 32 6.1.1 Publication d’un bulletin d’information ......................................... 32 6.1.2 Formations thématiques en groupes restreints ................................. 33 6.2 Recommandation générale ................................................................. 34 BIBLIOGRAPHIE............................................................................................. 35
1. MISE EN CONTEXTE 1.1 L’émergence des risques côtiers Le territoire de la Côte-Nord et ses ressources abondantes étaient exploités bien avant l’arrivée des colons européens. Différentes nations autochtones ont ainsi foulé le sol de cette grande région comme le témoignent bon nombre de sites archéologiques ainsi que l’occupation actuelle du territoire par les nations innue et naskapi (Frenette, 1996 [a]). À Baie-Trinité, ces communautés vivaient de la pêche au saumon l’été et de la chasse au loup marin l’hiver (Frenette, 1999 [b]). La distribution des ressources naturelles, les modes de gestion du territoire ainsi que les contraintes géographiques et topographiques qui s’y trouvent ont favorisé une concentration du développement le long du littoral nord-côtier. Les premiers habitants arrivés dans la région il y a approximativement 8000 ans, après la fonte du glacier laurentien, avaient un mode de vie nomade (Frenette, 1999 [c]). Ce n’est qu’à partir du début du 19e siècle que l’on voit apparaître des établissements permanents dans la région nord-côtière. La colonisation du territoire de l’actuelle municipalité de Baie-Trinité s’est amorcée en 1830 avec la construction d’un phare à la Pointe-des-Monts par le gouvernement fédéral (Frenette, 1999 [b]). Les havres ont offerts aux pêcheurs une forme de protection à l’égard des intempéries tout en permettant un accès rapide aux ressources halieutiques, à l’eau potable ainsi qu’au bois de chauffage. Dans ces conditions, l’implantation de communautés le long des cours d’eau constituait une stratégie de survie en contexte de grande isolation (Frenette, 1996 [a]). Bon nombre de communautés se sont donc installées le long du Saint-Laurent, dans des secteurs aujourd’hui soumis aux aléas côtiers tels qu’à l’érosion des berges, à la submersion ou encore au mouvement de sol. Dans le cadre du projet d’accompagnement des communautés, la Direction de santé publique (DSP) de la Côte-Nord a adopté une approche psychologique et sociologique du risque. Dans le présent document, la notion de risque côtier est conçue comme la combinaison de : - La probabilité d’occurrence d’un aléa1 côtier; - La perception du risque découlant de l’évaluation effectuée par les individus et les groupes à travers un «processus complexe qui englobe des aspects cognitifs et affectifs» (Villa et Bélanger, 2013, p. 1); - Les conséquences sociales, économiques, politiques, culturelles, psychologiques et physiques pouvant en résulter, et ce, tant au plan individuel que collectif. Ce faisant, la gestion des risques côtiers inclut non seulement les interventions visant à réduire les conséquences négatives découlant des aléas côtiers, mais aussi celles pouvant découler de la perception du risque. 1.2 Le projet d’accompagnement des communautés face aux risques côtiers Les risques côtiers et leur gestion posent un ensemble de problèmes aux communautés touchées ainsi qu’aux intervenants appelés à leur venir en aide. Cette problématique implique un système complexe d’acteurs confrontés à un cadre législatif et réglementaire au sein duquel les rôles et responsabilités de tous s’entremêlent. Au fil des ans, diverses initiatives ont cherché à clarifier la situation. Le forum citoyen 2007 sur l’érosion des berges et l’occupation du territoire en Côte-Nord constitue à cet égard un excellent exemple. 1 Nous avons retenu la définition suivante d’un aléa telle qu’elle est proposée par le ministère de la Sécurité publique du Québec (MSP) : «Phénomène, manifestation physique ou activité humaine susceptible d'occasionner des pertes en vies humaines ou des blessures, des dommages aux biens, des perturbations sociales et économiques ou une dégradation de l'environnement» (MSP [d]). -1-
L’analyse des propos tenus par les participantes et participants lors de cet événement a servi de base à l’élaboration du rapport Perception de l’érosion des berges de la Côte-Nord et perspectives de santé publique (Brisson et Richardson, 2009). On retrouve au sein de cette publication un ensemble de recommandations adressées par la DSP de la Côte-Nord aux acteurs concernés par la gestion des risques côtiers. Dans la foulée de la parution de ce rapport, la DSP s’est alliée à l’Alliance de recherche Universités-Communautés - Défis des communautés côtières (ARUC-DCC) ainsi qu’à l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) afin d’élaborer un projet permettant de favoriser la mise en œuvre des recommandations qui y étaient formulées. Cette collaboration a donné lieu au développement du projet d’accompagnement des communautés face aux risques côtiers. Grâce à l’appui financier de l’Agence de la santé et des services sociaux de la Côte-Nord (Agence Côte-Nord), du ministère de la Sécurité publique (MSP) ainsi que de la Conférence régionale des élus de la Côte-Nord (CRÉ), ce projet a pu se dérouler du 31 mars 2011 au 31 mars 2013. Le projet d’accompagnement des communautés face aux risques côtiers comportait deux axes principaux d’intervention. Le premier axe se déroulait au sein de trois municipalités sélectionnées afin de participer à une démarche exploratoire visant à initier un processus de renforcement de la résilience des communautés face aux risques côtiers. Il s’agit des municipalités de Portneuf-sur-Mer, Baie-Trinité et Rivière-au-Tonnerre qui sont localisées dans trois municipalités régionales de comté (MRC) distinctes. Le deuxième axe se déroulait au plan régional et visait quant à lui à favoriser la coordination et l'harmonisation des actions en matière de gestion des risques côtiers. Le présent document s’inscrit dans le premier axe d’intervention du projet. Il découle de la volonté de la DSP de répondre au besoin d’information formulé par des citoyennes et citoyens dans l’ensemble des communautés impliquées dans le projet. L’accès à l’information ainsi que l’accompagnement dans l’interprétation de celle-ci constituent en effet une demande citoyenne récurrente à laquelle il semblait essentiel de répondre. L’expertise de la DSP concerne la santé et le bien-être des individus et des communautés. C’est donc à ce titre que nous avons entamé la rédaction du présent portrait. Nous invitons ainsi le lecteur à considérer ce document non pas comme un rapport technique sur les aléas côtiers, mais plutôt comme un outil d’accompagnement pour la communauté de Baie-Trinité. Dans la mesure où elle trouverait dans ce portrait un outil répondant à ses besoins et aspirations, nous lui suggérons de mettre régulièrement à jour les données qui s’y trouvent. En effet, les connaissances scientifiques tout comme le cadre législatif et réglementaire se transforment au fil du temps. Ce faisant, la synthèse présentée ici ne constitue pas le point d’arrivée, mais plutôt le point de départ d’une démarche d’acquisition de connaissance. Les facteurs influençant la perception du risque ne sont pas universels et varient selon les individus. Nous avons cherché à dresser ici un portrait des différentes facettes d’une communauté pouvant contribuer à la création des perceptions citoyennes en la matière. Ce ne sont donc pas les données individuelles qui doivent retenir l’attention des intervenants appelés à jouer un rôle dans la gestion des risques, mais bien le portrait global émergeant de la combinaison de celles-ci. Pour illustrer notre propos, prenons l’exemple de la discussion portant sur le maintien en activité de l’école primaire de Baie-Trinité. On ne saurait trouver de liens directs entre cet enjeu et les risques côtiers. Toutefois, lorsque combiné à l’ensemble des données présentées dans le portrait de la géographie humaine du territoire, cet enjeu permet de mettre en lumière les défis importants auxquels se trouve confrontée cette communauté. Les intervenants concernés par la gestion des risques sont conséquemment appelés à prendre en considération le contexte social dans l’analyse des -2-
solutions aux enjeux découlant des aléas côtiers, et ce, de manière à éviter de créer des pressions additionnelles sur le milieu. 1.3 Origine des données Le corpus ayant servi à l’élaboration du présent rapport repose sur des sources primaires et secondaires. 1.3.1 Sources primaires de données Il s’agit des sources de données brutes collectées directement par l’agente de développement du projet à travers des rencontres avec les individus ou organismes suivants : o Des citoyennes et citoyens dans le cadre du forum sur les risques côtiers; o Le maire et le secrétaire-trésorier de la municipalité; o Des demandes d’information adressées aux différents ministères impliqués dans la gestion des risques ainsi qu’à la MRC de Manicouagan. 1.3.2 Sources secondaires de données Une variété de sources secondaires a été consultée. Pensons par exemple aux articles scientifiques, aux articles de presse, aux rapports d’études ou encore aux documents de planification. Ces sources, dont une part importante est accessible en ligne au moment de la rédaction, peuvent être retracées en consultant la bibliographie. 2. PORTRAIT DE LA GÉOGRAPHIE HUMAINE DU TERRITOIRE Dans ce premier volet, nous chercherons à cerner les éléments fondamentaux qui contribuent à la spécificité du milieu humain au sein duquel évolue la population de Baie-Trinité. Les caractéristiques sociales, économiques, politiques et culturelles présentées à cette étape serviront ultérieurement de point de référence à l’analyse des perceptions citoyennes en matière de gestion des risques côtiers ainsi que, plus largement, d’adaptation aux changements climatiques. 2.1 Réalité socio-économique et démographique 2.1.1 Indices de développement et de défavorisation Sur les huit municipalités de la MRC de Manicouagan, deux sont considérées dévitalisées par le ministère des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du Territoire (MAMROT), soit Godbout et Baie-Trinité. Avec un indice de développement de – 5,05, Baie-Trinité se classe septième parmi les huit municipalités de la MRC de Manicouagan (Figure 1). Rappelons qu’une municipalité est considérée dévitalisée par le MAMROT à partir du moment où son indice de développement2 est inférieur à - 5. 2 Les indicateurs suivants entrent dans le calcul de cet indice : le taux d’évolution de la population de 2001 à 2006; le taux de chômage; le taux d’emploi de la population de 15 ans et plus; le % du revenu provenant de paiement de transfert gouvernemental; la proportion de la population des ménages à faible revenu; le revenu moyen des ménages. -3-
Figure 1 Indice de développement Manicouagan 7,00 5,00 3,00 Baie-Trinité Godbout 1,00 Indice Franquelin Baie-Comeau -1,00 Pointe-Lebel Ponite-aux-Outardes -3,00 Chute-aux-Outardes Ragueneau -5,00 -7,00 Municipalités (d'ouest en est) Source : «Indice 2006 de développement socio-économique Côte-Nord» MAMROT. Si l’on compare les conditions socio-économiques de Baie-Trinité avec celles prévalant sur l’ensemble de la Côte-Nord, en nous appuyant sur l’indice de défavorisation3 2006 de l’INSPQ, on constate que cette municipalité n’est ni réellement avantagée ni réellement désavantagée du point de vue social et matériel. Ainsi, en 2006, l’ensemble de la population de Baie-Trinité habitait une zone moyennement favorisée à moyennement défavorisée du point de vue matériel et social. Sur la Côte-Nord, 25,5 % de la population se trouvait dans la même situation. Rappelons que l’indice de défavorisation sert à caractériser la réalité socio-économique d’un milieu et non pas celle d’un individu. Ainsi, une personne peut habiter une zone considérée comme très défavorisée matériellement et se trouver en tant qu’individu dans une situation matériellement très favorable et vice versa pour ce qui est du volet social de cet indice. La réalité socio-économique d’une communauté est complexe. Les indices de développement ainsi que de défavorisation présentés ci-haut dépeignent conséquemment un portrait partiel que nous chercherons à affiner à travers la présentation d’un certain nombre d’indicateurs supplémentaires. 2.1.2 Secteurs d’activité En 2006, les emplois des résidentes et résidents de Baie-Trinité se situaient principalement dans deux secteurs d’activité, soit la fabrication et les services (Figure 2). 3 Les indicateurs suivants entrent dans le calcul de cet indice : La proportion de personnes de 15 ans et plus sans certificat ou diplôme d’études secondaires; le ratio emploi/population chez les 15 ans et plus; le revenu moyen des personnes de 15 ans et plus; la proportion de personnes de 15 ans et plus vivant seules dans leur domicile; la proportion de personnes de 15 ans et plus séparées, divorcées ou veuves; la proportion de familles monoparentales. -4-
Figure 2 Nombre d’emplois occupés par secteur d’activités économiques (2006) Fabrication Autres services Services de commerce Construction Commerce de détail 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120 130 Source : Statistique Canada, Recensement 2006. Fabrication Foresterie Avec l’arrivée de la compagnie forestière Saint-Lawrence, en 1927, la population du village de Baie-trinité croît de manière importante. En effet, alors qu’elle était de seulement 25 personnes en 1921, la population bondit à 400 personnes en 1929. Le village de Baie- Trinité se développe ainsi à la manière de nombreuses petites communautés dont l’économie est principalement axée sur la foresterie (Frenette [d]). En 1962, à la suite de l’incendie ayant détruit l’usine d’écorçage de Baie-Trinité, la Saint-Lawrence vend ses installations à la compagnie Domtar qui les cèdera huit ans plus tard, soit en 1970, au gouvernement du Québec. L’industrie forestière éprouve des difficultés importantes depuis quelques années déjà. La Commission Coulombe concluait en 2005 à une surexploitation de la forêt québécoise, conduisant les autorités à réviser les potentiels de coupe à travers la province (Service Canada). Dans un contexte de baisse de la demande et des prix des produits forestiers, la scierie Baie-Trinité a cessé ses activités en 2008 pour être mise sous séquestre en juillet 2011 (Almassa Baie-Trinité inc., 2009; Organisme de bassin versant Manicouagan, 2012). Un projet de relance, axé sur les biocombustibles, a été élaboré afin de maintenir le contrat d’approvisionnement forestier de 260 000 m3 appartenant à la scierie Baie-Trinité. Avec un potentiel de 180 emplois en usine et en forêt, l’intérêt des élus locaux à relancer cette entreprise est compréhensible. Selon le registraire des entreprises du Québec, elle demeure pour l’instant administrée par le syndic de faillite Raymond Chabot Grant Thornton (Registraire des entreprises; Radio-Canada [a]). Pêches En 2001, Baie-Trinité avait un indice de dépendance aux ressources naturelles liées à la pêche de 32 %4. Depuis les années 1970, la municipalité compte une usine de transformation des produits de la mer, Crustacés Baie-Trinité, qui emploie quelque 130 personnes en période de pointe (MRNF, 2010). 4 «Cet indice permet de comparer les revenus d’emploi provenant de l’industrie primaire et secondaire avec le total des revenus» (MPO, Rapport sur les écosystèmes et les facteurs socioéconomiques, p. 38). -5-
Services En s’appuyant sur une riche histoire largement associée au caractère maritime et riverain de la municipalité, on a su développer une offre touristique intéressante dans la région. Le phare de la Pointe-des-Monts, la ZEC Baie-Trinité et le Centre national des naufrages du Saint- Laurent de Baie-Trinité en constituent de bons exemples. Différents services essentiels sont de plus disponibles tels qu’une station service avec petite épicerie, des services de restauration saisonniers, une caisse Desjardins, une école primaire et un CLSC. 2.1.3 Logements Malgré le fait que cet indicateur n’entre pas dans le calcul de l’indice de développement, la figure 3 illustre l’existence d’une corrélation entre le niveau de dévitalisation d’une municipalité et la valeur des propriétés qui s’y trouvent. Seule la municipalité de Franquelin fait exception à cette tendance (Figure 3). Cette situation explique, entre autres, les besoins exprimés par les municipalités dévitalisées d’avoir accès à des fonds d’aide permettant de compenser la faible capacité de financer les services locaux à travers les taxes foncières. Figure 3 Valeur moyenne des immeubles (terrain et bâtiment) par municipalité de la MRC de Manicouagan 2012 100 000 $ 90 000 $ 80 000 $ 70 000 $ 60 000 $ 50 000 $ 40 000 $ 30 000 $ 20 000 $ 10 000 $ 0$ Indice de développement Valeur moyenne 2006 Godbout 33 200 $ -6,53 Baie-Trinité 36 400 $ -5,05 Ragueneau 66 800 $ -2,61 Chute-aux-Outardes 74 300 $ -0,91 Franquelin 33 200 $ 0,85 Pointe-aux-Outardes 90 000 $ 3,79 Baie-Comeau 4,59 Pointe-Lebel 99 100 $ 6,09 Source : Données fournies par la MRC de Manicouagan. La valeur moyenne des immeubles n’était pas disponible pour la municipalité de Baie-Comeau. Les résidences unifamiliales et les résidences secondaires comptent pour 87 % des propriétés foncières localisées sur le territoire de la municipalité (Tableau 1). -6-
Tableau 1 Baie-Trinité : Nombre d’unités d’évaluation et richesse foncière uniformisée Type d’unité Nombre d’unités Résidences unifamiliales 285 2 logements 11 3 logements 2 4 logements 1 Chalets 134 Maisons mobiles 27 Remises, cabanons et garages 19 Total résidentiel 479 Industriel 2 Transport - communications services publics 2 Commercial 30 Services 6 Culturel – récréatif – loisirs 1 Production ressources naturelles 2 Terrrains vagues 136 Total 664 Valeur foncière totale 23 114 400 $ Source : Sénéchal, 2013, données basées sur le rôle d’évaluation 2006. 2.1.4 Déclin et vieillissement de la population Les statistiques relatives aux caractéristiques de la population, issues du recensement 2011, viennent confirmer les tendances démographiques déjà perceptibles lors des derniers recensements, soit le déclin de la population et son vieillissement. La population de Baie- Trinité est ainsi passée de 645 en 1996 à 419 en 2011 ce qui équivaut à une variation de - 35,04 % au cours de la période (Figure 4). À l’échelle de la MRC de Manicouagan, on a pu observer une variation de la population de – 11,74 % au cours de la même période et de 10,70 % à l’échelle de la province. L’évolution de l’âge médian constitue un indicateur régulièrement utilisé dans l’étude du phénomène de vieillissement de la population. L’âge médian à Baie-Trinité est passé de 45,4 ans en 2001 à 57,4 ans en 2011. Comparativement, en 2011, l’âge médian était de 42 ans sur la Côte-Nord et de 41,9 ans à l’échelle de la province. Cette variation de l’âge médian s’explique par le fait que l’on peut constater au cours de la période de 1996 à 2011 une variation de – 75 % de la population âgée de 34 ans et moins ainsi qu’une variation de + 53 % de la population âgée de 65 ans et plus (Figure 4). Une telle réalité démographique influence de diverses manières les conditions socio- économiques des petites communautés. Pensons, par exemple, à l’augmentation de la charge de travail associée à l’accompagnement des personnes âgées par les proches. Selon le schéma d’aménagement et de développement révisé de la MRC de Manicouagan, «Ce vieillissement de la population impose à court terme de considérer les besoins en logements adaptés aux personnes âgées» (MRC de Manicouagan, 2012 [a], p. 164). -7-
Figure 4 Population de Baie-Trinité par groupe d’âge 1996-2011 180 160 140 120 100 1996 80 2001 60 2006 2011 40 20 0 0-14 ans 15-34 ans 35-44 ans 45-54 ans 55-64 ans 65-74 ans 75 + ans 1996 110 170 105 105 80 50 35 2001 80 125 100 100 110 55 45 2006 50 90 55 100 115 80 25 2011 35 35 35 75 110 85 45 Source : Statistique Canada, Recensements 1996, 2001, 2006 et 2011. Néanmoins, selon les contextes, le vieillissement de la population peut entraîner certains effets positifs, particulièrement en ce qui concerne le capital social d’une communauté. Delisle (2002) a d’ailleurs «démontré que les personnes âgées résidant en région rurale participaient davantage à diverses activités sociales comparativement à celles du milieu urbain» (Simard, 2006, p. 38). 2.1.5 Scolarité et avenir de l’école primaire Les préoccupations quant à la relève dans le milieu communautaire ou les entreprises sont courantes dans les milieux touchés par le vieillissement de la population. À Baie-Trinité, ce phénomène implique non seulement l’augmentation de la proportion de personnes âgées au sein de la communauté, mais aussi la diminution de la population active ainsi que le déclin de la population d’âge scolaire (Figure 4). À travers le Québec, les petites écoles sont confrontées à de nombreux défis dont les «Possibilités d’interactions sociales à des fins d’apprentissage limitées pour les élèves, classes multiâges, accès restreint à des ressources spécialisées, longues distances à parcourir pour se rendre à l’école, isolement professionnel des enseignants et lourdes tâches» (Allaire, 2010, p. 70). À Baie-Trinité «la diminution du nombre d’élèves au secondaire et l’apparition de programmes plus pointus comme les parcours de formation axés sur l’emploi et les nouvelles séquences mathématiques, par exemple, rendaient difficile l’organisation de services de qualité pour les élèves du secondaire» (Lavoie, 2013). En vertu d’une entente négociée entre la Commission scolaire de l’Estuaire et la Commission scolaire du Fer, les jeunes de niveau secondaire effectuent depuis l’année scolaire 2008-2009 l’ensemble de leur scolarité à Port- -8-
Cartier. Si les élèves de secondaires 1 à 3 se déplacent dorénavant sur une plus grande distance afin de poursuivre leurs études, cette entente permet de maintenir les jeunes de secondaires 4 et 5 au sein de leur milieu familial tout aux long de leur scolarité. Auparavant, ces derniers devaient vivre en pension à Baie-Comeau afin de terminer leurs études secondaires. Selon la direction des services éducatifs de la Commission scolaire de l’Estuaire, «ce transfert des élèves vers Port-Cartier a permis d’observer une amélioration de la persévérance scolaire et de la réussite chez plusieurs élèves dont certains étaient suivis et considérés comme des décrocheurs potentiels» (Lavoie, 2013). La baisse de la fréquentation de l’école St-Joseph de Baie-Trinité ne peut être attribuée qu’au seul transfert des élèves de secondaires 1 à 3 vers Port-Cartier. En effet, si l’on restreint notre analyse à la fréquentation du préscolaire et du primaire, on constate une baisse de 53,66 % au cours des 11 dernières années (Tableau 2). Tableau 2 Statistiques de fréquentation - École St-Joseph de Baie-Trinité Année Préscolaire - Primaire Secondaire Total 2002-2003 41 25 66 2003-2004 41 21 62 2004-2005 40 20 60 2005-2006 29 17 46 2006-2007 26 9 35 2007-2008 20 11 31 2008-2009 23 0 23 2009-2010 24 0 24 2010-2011 23 0 23 2011-2012 22 0 22 2012-2013 19 0 19 Source : Lavoie, 2013. Le maintien des services publics est au cœur de la lutte menée par les milieux ruraux du Québec afin d’assurer leur survie et dynamisme. La fermeture d’une école marque bien souvent l’imaginaire collectif d’une communauté et peut contribuer au cercle de la dévitalisation (Image 1). En effet, «le milieu scolaire est un important facteur de développement. Et donc, en poursuivant sa mission d’instruire, de qualifier et de socialiser, l’école, de par (sic) sa présence et les activités qu’elle mène dans la communauté, génère des retombées importantes non seulement pour les élèves eux-mêmes, mais aussi pour les milieux» (Prévost et coll., 2007, p. 11). Conformément à la Politique de maintien ou de fermeture d’école et de modification de certains services éducatifs dispensés dans une école de la Commission scolaire de l’Estuaire, un comité d’analyse a été formé le 14 mars 2012. Celui-ci avait le mandat d’effectuer une analyse de la situation menant à la prise d’une décision quant au maintien ou à la fermeture de l’école St-Joseph de Baie-Trinité puisqu’elle compte moins de 30 élèves. De nombreux facteurs sont entrés en ligne de compte dans l’analyse effectuée par les commissaires qui ont adopté le 15 mai 2012 une résolution visant à maintenir l’école St-Joseph à Baie-Trinité (Lavoie, 2013). Selon l’article 5.3 de la Politique de maintien ou de fermeture d’école et de modification de certains services éducatifs dispensés dans une école, une démarche de fermeture de l’école devrait normalement être entreprise si le nombre d’inscriptions est égal ou inférieur à 15 élèves (Commission scolaire de l’Estuaire, 2011 [a]). La commission scolaire -9-
possède toutefois une marge de manœuvre et peut décider, «selon les initiatives du milieu ou pour des raisons jugées exceptionnelles, de ne pas entreprendre la démarche de fermeture» (Commission scolaire de l’Estuaire, 2011 [a], p. 3). Heureusement, le milieu baie-trinitois semble conscient de l’importance de la participation citoyenne dans le maintien des services publics locaux. En effet, «l’implication marquée des parents et de la communauté dans les activités scolaires favorisant ainsi la réussite des élèves» (Commission scolaire de l’Estuaire, 2012 [b]) a joué un rôle favorable dans la décision prise par le comité d’analyse de maintenir sur place les services éducatifs. Image 1 Cercle de la dévitalisation Source : Groupe de travail sur les communautés dévitalisées, 2010. 2.2 Gouvernance et politique La municipalité de Baie-Trinité a été officiellement créée en 1954-1955, et ce, malgré l’opposition de la compagnie forestière locale, la Saint-Lawrence. La municipalité de Baie- Trinité a été constituée en 1955 et fait partie de la MRC de Manicouagan (Frenette [d]). La population est actuellement représentée à la Chambre des communes du Canada par Jonathan Genest-Jourdain, du Nouveau Partie Démocratique, député de la circonscription de Manicouagan. Au plan provincial, Marjolain Dufour, du Partie Québécois, représente la circonscription René-Lévesque à l’Assemblée nationale du Québec. Le conseil municipal de Baie-Trinité est actuellement composé du maire, monsieur Denis Lejeune, ainsi que de six conseillers et conseillères. Les prochaines élections municipales auront lieux en novembre 2013. Le poste de directeur général à la municipalité de Baie- Trinité est actuellement vacant. Monsieur Gérald Jean cumule les poste de greffier et de secrétaire-trésorier alors que madame Caroline Lamarre agit à titre de secrétaire pour la municipalité. - 10 -
2.3 Synthèse de la section À la vue du portrait de la géographie sociale du territoire, force est d’admettre que Baie- Trinité fait face à de nombreux défis. L’économie locale est essentiellement axée sur les ressources naturelles et les emplois saisonniers sont courants. Selon la MRC de Manicouagan, il existe toutefois une volonté de poursuivre le développement local à travers les secteurs récréotouristique, culturel, de la villégiature et de l’énergie (MRC de Manicouagan, 2012 [a]). D’autre part, la démographie est caractérisée par le vieillissement de la population. Dans un contexte de vieillissement de la population, l’initiation des jeunes à l’implication communautaire semble particulièrement pressante. À cet effet, rappelons qu’il peut être utile d’adapter le recrutement et l’encadrement des bénévoles afin de favoriser une participation élargie des jeunes à la vie communautaire5. Si le développement d’une culture de respect et d’ouverture est utile à l’intégration des jeunes à la vie communautaire, il en va de même pour l’intégration des citoyennes et citoyens à la vie démocratique locale. 3. PORTRAIT DE LA GÉOGRAPHIE PHYSIQUE DU TERRITOIRE Les caractéristiques biophysiques d’un territoire influencent le rapport à l’environnement des individus comme des communautés. Ces caractéristiques sont par exemple impliquées dans la construction des représentations mentales du climat et des changements climatiques (Lammel, Dugas et Guillen Gutierrez, 2012). Ces représentations contribuent au processus d’évaluation du risque effectué par les individus et les groupes. Il semblait donc essentiel de présenter ici un portrait global de l’environnement biophysique au sein duquel évolue la population de Baie-Trinité. 5 Pour ce faire, des ressources sont disponibles en ligne. Pensons entre autres au document Composantes fondamentales de l’engagement bénévole des jeunes : Guide à l’intention des parents, des enseignants et des conseillers en orientation disponible en ligne à l’adresse suivante : http://benevoles.ca/content/composantes-fondamentales-de-l-engagement-b-n-vole-des-jeunes. - 11 -
3.1 Un aperçu du territoire Image 2 MRC de Manicouagan Source : MRC de Manicouagan, 2012 [a]. Le territoire de la municipalité couvre une superficie de 536,30 km2 avec une façade maritime de 45 km. Elle fait partie de la province naturelle des Laurentides centrales et de la province géologique de Grenville (MDDEP [b]; MRC de Manicouagan, 2012 [a]). Le village de Baie-Trinité se trouve à 93 km à l’est de la ville de Baie-Comeau et à 140 km à l’ouest de la ville de Sept-Îles, dans la MRC de Manicouagan (Image 2) (MTQ). Le village se situe dans la plaine littorale longeant la rive nord de l’estuaire maritime du Saint-Laurent. Les vents dominants soufflent habituellement du sud-ouest ou du nord-est dans cette région. Les marées y sont du type semi-diurne avec un marnage augmentant de l’aval vers l’amont. À Pointe-des-Monts, le marnage moyen est de 2,5 m, il peut toutefois atteindre 4 m lors des grandes marées (Bergeron et Gagnon, 1999). Au cours de la période allant de 1971 à 2000, les températures annuelles variaient entre - 21,3 C6 et 21,8°C7 avec un minimum extrême atteint de - 45°C et un maximum extrême atteint de 29,5°C. Les précipitations annuelles au cours de cette même période étaient de 881 mm (Environnement Canada [c]). Selon le Centre d'expertise hydrique du Québec (CEHQ), Baie-Trinité fait partie de la région hydrographique du Saint-Laurent nord-est. Longue de 74 km, avec une dénivellation totale de 381 m, la rivière de la Trinité draine un territoire de 562 km² avec un débit de 14 m3/s (Hydro-Québec). 6 Minimum quotidien atteint en janvier. 7 Maximum quotidien atteint en juillet. - 12 -
3.2 Géomorphologie de la zone côtière «Bien que tous les types de matériaux puissent être touchés, qu’ils soient meubles (gravier, sable, argile, etc.) ou consolidés (roc), l’érosion et plus spécifiquement les glissements de terrain se produisent le plus souvent dans les dépôts meubles et plus particulièrement dans les dépôts argileux. La plupart des dépôts meubles constituant le sol québécois ont été mis en place pendant la dernière période glaciaire dite du Wisconsin, lors de laquelle une calotte glaciaire recouvrait une large portion de l’hémisphère nord dont la totalité du Québec, il y a environ 18 000 ans. Mobilisant les eaux terrestres sous forme de glace, ces masses glaciaires à l’échelle planétaire ont eu pour conséquence d’abaisser le niveau des mers et des océans. Sous leur poids, la croûte terrestre s’est enfoncée de plusieurs centaines de mètres. Vers 14 500 ans AA (avant aujourd’hui), la calotte glaciaire a commencé à fondre, entraînant comme conséquence l’élévation graduelle du niveau de l’océan attribuable au retour de l’eau de fonte dans celui-ci. De plus, la lithosphère, soulagée de la surcharge glaciaire, a commencé à reprendre progressivement sa position initiale. Par contre, un retard considérable a subsisté entre le rehaussement du niveau marin et celui du continent, ce qui a eu pour effet de laisser pénétrer l’eau salée des océans sur le continent et d’inonder les terres les plus basses, formant ainsi différentes mers post glaciaires (sic)» (MRC de la Haute-Côte-Nord,2008, p. 3) (Image 3). Image 3 Retrait de la mer de Goldthwaith Source : Comité ZIP Côte-Nord du Golfe, 2007. «Pendant la phase maximale de l’extension des mers post glaciaires (sic) sur les terres graduellement déglacées, l’eau, par endroits, était relativement profonde et calme, favorisant un bassin de sédimentation propice au dépôt des matériaux fins, argileux et silteux. Sur les formations meubles d’origine glaciaire (till) ou au contact de dépôts fluvioglaciaires, l’épaisseur des dépôts argileux peut atteindre plus de 100 mètres. Avec l’abaissement des mers postglaciaires consécutifs (sic) au réajustement de la croûte terrestre soulagée du poids des glaces, des sables littoraux ainsi que des sédiments fluviaux et deltaïques ont été mis en place sur l’argile marine ou à son contact. Au fur et à mesure que la plaine argileuse émergeait, les cours d’eau ont commencé à l’éroder et à l’inciser de plus en plus profondément, générant progressivement des glissements de terrain. - 13 -
Les glissements de terrain et l’érosion des berges font donc partie de l’évolution géomorphologique naturelle des terrains constitués de dépôts meubles. Chaque année, des centaines de ces glissements, généralement de faible superficie, se produisent au Québec dans cet environnement. De plus, les argiles des mers postglaciaires au Québec sont réputées pour être propices à l’apparition de gigantesques glissements, causés par la présence d’argile sensible au remaniement […]. À l’instar des glissements de terrain, l'érosion côtière dans le fleuve et le golfe Saint-Laurent s’explique par la présence de vastes formations de dépôts meubles. Les berges constituées de sédiments tels que l’argile, le limon et le sable (plages, dunes, flèches et cordons littoraux, microfalaises) sont très sensibles à l’érosion» (MRC de la Haute-Côte-Nord, 2008, p. 3). Le littoral baie-trinitois illustre bien ce phénomène alors que 50,98 % des côtes situées sur le territoire de la municipalité sont constituées de formations meubles. Dans le cadre de son Rapport d'évaluation du risque d'érosion du littoral de la Côte-Nord du Saint-Laurent pour la période de 1996-2003, le Comité d’experts de l’érosion des berges de la Côte-Nord soulignait l’existence de quatre types d’aléas affectant certains secteurs du territoire de la municipalité de Baie-Trinité. Il s’agit de la submersion, des mouvements de masse, de l’érosion ainsi que du ravinement. Il est possible de classer les côtes de Baie-Trinité en quatre catégories: Tableau 3 Type de côtes - Baie-Trinité Active (ou vive) Côtes dépourvues de végétation habituellement touchée par l’érosion Semi-active (ou semi-végétalisée) Côtes partiellement végétalisées. Elles sont parfois en voie de stabilisation, mais plus souvent qu’autrement elles sont plutôt en voie de réactivation Stable (ou végétalisée) Côtes entièrement recouvertes d’une végétation qui les protège de l’érosion Artificielle Sections de la côte transformées par l’implantation de structures de protection. L’état de ces structures varie en fonction de critères tels que l’âge ou l’entretien effectué Depuis la publication de ce rapport, de nouvelles cartes ont été produites et mises à la disposition du public à travers le site Internet de la MRC de Manicouagan. Ces cartes, qui accompagnent le RCI 2012-07, présentent les zones de contraintes associées à l’érosion des berges et aux mouvements de masse. 3.3 Historique des tempêtes Avant les événements climatiques extrêmes de l’été 1996 et la Commission Nicolet qui s’en est suivie, l’État québécois n’avait pas de plan de sécurité civile. C’est dire à quel point ces événements ont marqué l’imaginaire collectif. Ceci est particulièrement vrai pour la population de Baie-Trinité où quatre personnes ont trouvé la mort à la suite de l’effondrement de plusieurs tronçons de la route 138 le 21 juillet 1996. Une infirmière qui travaillait à l’époque au Centre de santé de Baie-Trinité affirme qu’il a fallu plus d’une semaine avant de permettre à nouveau à la population de circuler sur la voie routière. Pendant cette période, la population résidant à l’est de Baie-Trinité s’est retrouvée isolée, - 14 -
sans lien routier vers le reste du Québec (Bureau de reconstruction et de relance; Radio- Canada [b]). Dans un contexte de changements climatiques, de tels événements climatiques extrêmes risquent d’être de plus en plus fréquents. On observera de surcroît un «rehaussement du niveau de la mer ainsi qu’une diminution de la période d’englacement et du couvert de glace qui n’assurerait plus une protection des berges contre les vagues en période hivernale. Il est indéniable que ces éléments auront une incidence sur l’érosion des berges» (MRC de la Haute- Côte-Nord, 2008, p. 18). Au fil des ans, de nombreux travaux d’enrochement ainsi que bon nombre de détournements ont été menés à terme par le ministère du Transport du Québec (MTQ) afin de protéger la route 138 des aléas côtiers et la rendre plus sécuritaire. Il n’en demeure pas moins que certaines personnes refusent encore aujourd’hui de prendre la route de nuit de peur de tomber dans des crevasses (Bureau de reconstruction et de relance; Radio-Canada [b]). 3.4 Synthèse de la section La culture joue un rôle de médiateur entre l’humain et son environnement. Si chaque communauté possède un certain nombre de traits culturels qui lui sont propres, c’est que la culture locale émerge d’un contexte bien particulier. Elle est par exemple influencée par les caractéristiques climatiques et géographiques spécifiques à un territoire (Lammel, Dugas et Guillen Gutierrez, 2012). La culture locale sert en quelque sorte de cadre de référence permettant de faire sens du monde qui nous entoure. Elle se modifie à travers le temps afin de s’adapter à diverses mutations (sociales, économiques, environnementales, etc.). Toutefois, lorsque les changements se produisent brusquement, il peut exister un décalage entre les référents culturels et la nouvelle réalité qui s’impose. Dans un contexte de changements climatiques, on pourrait voir une accélération du phénomène de l’érosion des berges (Bernatchez et coll., 2008, p. VII). On ressent d’ores et déjà l’impact de la diminution du couvert de glace dans la région nord-côtière. Dans un tel contexte, l’adaptation de cette communauté repose sur l’intégration de ces modifications environnementales à la culture locale, processus qui gagnerait à être facilité à travers différentes initiatives de sensibilisation. 4. PORTRAIT DES ACTEURS DE LA GESTION DES RISQUES CÔTIERS Tel qu’il est mentionné précédemment, un système complexe d’acteurs est impliqué dans la gestion des risques côtiers. Ceux-ci se trouvent confrontés à un cadre législatif et réglementaire au sein duquel les rôles et responsabilités de chacun gagnent à être clarifiés à travers une démarche de concertation. Compte tenu de l’importance de l’aménagement et de la planification territoriale dans la gestion des risques côtiers, une attention particulière sera portée au sein de la présente section à la présentation des rôles et responsabilités des différents acteurs dans ce domaine. - 15 -
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