Les Aires du Patrimoine communautaire

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Une nouvelle catégorie d'aires protégées pour la liberté
       des collectivités locales à disposer de leur patrimoine naturel et culturel

                               Les Aires
                             du Patrimoine
                            communautaire
                                                   présentée par

               JEAN LARIVIERE                                                  SEYDINA ISSA SYLLA
Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme                             Wetlands International
             Conseiller scientifique                                   Coordonateur pour l’Afrique de l’Ouest

              En application des principes 4, 9, 10, 11, 20, 21 et 22,
                      de la Déclaration de Rio (Action 21)
                        et des articles 6, 7, 8, 10, 12 et 13,
                       de la Convention sur la Biodiversité

           CONTACT AU SENEGAL : SEYDINA ISSA SYLLA - WETLANDS INTERNATIONAL - BP 8060 DAKAR-YOFF - SENEGAL
                     TEL. : 00 221 820 64 78 - FAX : 00 221 820 64 79 - E-MAIL : Issa@telecomplus.sn

  CONTACT INTERNATIONAL : JEAN LARIVIERE - FONDATION NICOLAS HULOT - 52 BOULEVARD MALESHERBES - 75008 PARIS - FRANCE
                   TEL. 00 33 (0)1 44 90 83 09 - FAX : 00 33 (0)1 44 90 83 19 - E-MAIL : j.lariviere@fnh.org
SYMPOSIUM DU 50e ANNIVERSAIRE DE L’UICN
                                Imaginons le monde de demain, divers ou divisé
                                     Fontainebleau 3 - 5 novembre 1998

                     Les Aires du Patrimoine communautaire
                   Communication à l’atelier COMMUNAUTES, sur le thème “Un partage équitable”

                                                       présentée par
                  JEAN LARIVIERE                                              SEYDINA ISSA SYLLA
   Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme                           Wetlands International
                Conseiller scientifique                                 Coordinateur pour l’Afrique de l’Ouest

Depuis leur création et notamment à partir de la fin du XIXe siècle, les Parcs nationaux et autres Réserves ont
toujours été fondés sur des interdits, des obligations, mais surtout une très grande défiance envers les premiers
occupants des lieux, pour ne pas dire au total mépris de leurs intérêts légitimes. De manière générale, les mesures
conservatoires ont toujours été imposées aux communautés locales par des organismes qui leur étaient extérieurs,
souvent même sans qu’elles soient consultées, voire seulement interrogées.

De nos jours, la déprédation du patrimoine naturel mondial est désormais trop importante pour envisager de
poursuivre — et a fortiori intensifier — de telles procédures. Il s’agit tout au contraire de repenser
fondamentalement le système des Aires protégées dont l’efficience et le statut demeurent bien précaires dans de
nombreuses régions du monde, dans les pays du Nord comme dans les pays du Sud.

Il est depuis longtemps question de “gestion intégrée”. Ce terme ambigu — à la limite du péjoratif — révèle bien
les réticences de la plupart des responsables de la conservation à céder une partie de leurs prérogatives. Ils devront
pourtant bien s’y résoudre. En fait, les communautés ne doivent pas être seulement associées, mais devenir de
véritable actrices, pleinement libres de leurs choix, car elles sont le ciment d’une conservation durable.

Des initiatives locales en faveur de l’environnement local se sont manifestées dans tous les pays du monde.
Certaines aboutissent, mais demeurent méconnues, tandis que d’autres, certainement beaucoup plus nombreuses,
avortent faute d’un appui, voire d’une simple reconnaissance.

Ainsi, à l’avenir, les acteurs institutionnels de l’environnement, de la conservation et du développement, devraient
utiliser une large part de leurs moyens et de leurs compétences à l’identification de projets endogènes, afin de
faciliter leur émergence.

Un exemple de réussite : au Sénégal, en 1987, une association d’une centaine de femmes avait entrepris de
restaurer le couvert végétal d’une Réserve naturelle limitrophe de leur village. Dix ans plus tard, elles en ont
obtenu la gestion, par une convention avec le ministère de l’Environnement, tandis que leur action s’étend à
l’ensemble des terroirs villageois périphériques. Ce qui n’était au départ qu’une initiative bénévole est aujourd’hui
un programme de développement durable exemplaire mené par un collectif de plus de 1 500 femmes et concernant
une population de 35 000 personnes. Sous le nom d’Espace naturel communautaire Kër Cupaam, ce mode
d’organisation innovant intègre harmonieusement développement agricole et lutte contre la déforestation.

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Mais l’expérience la plus intéressante et sans doute la plus riche d’avenir est celle de Yoff, un village côtier de la
banlieue de Dakar, proche de l’aéroport international. Devant l’agglomération, à environ 300 m du rivage, se
trouve l’île Teunguène, demeure des génies lebu et longtemps respectée comme telle.

Encore vierge de toute construction, elle était autrefois réservée aux cérémonies rituelles. Mais, depuis quelques
années, elle est visitée par des pêcheurs sous-marins et des enfants qui vont y collecter des coquillages et crustacés.
Cette fréquentation, bien que récente et relativement limitée, a cependant déjà provoqué des phénomènes
d’érosion, d’autant que certaines familles y déposent parfois des moutons dont l’impact sur la végétation est
également sensible.

Afin de sauvegarder ce sanctuaire naturel et culturel, les autorités religieuses, coutumières et civiles, les acteurs
économiques et les habitants de Yoff ont accepté, par consensus, d’ériger l’île en Aire du Patrimoine
communautaire, une autre conception des Aires protégées dont la particularité est que sa création, sa gestion et sa
surveillance sont sous la seule autorité de la population locale. Cette première “réserve populaire” a été proclamée
en juin 1998.

Le principe fondamental des Aires du Patrimoine communautaire est de ne rien interdire, ni de conditionner, a
priori, mais au contraire d’inciter, sans la moindre restriction, toute initiative en faveur d’un site naturel, même
dégradé.

Des systèmes voisins existent déjà. En Guinée, la législation autorise, à leur demande, les communautés locales à
gérer des parcelles forestières. En Côte d’Ivoire, les mêmes directives sont envisagées pour les forêts sacrées.
Cependant, nulle part ailleurs qu’au Sénégal, cette procédure est offerte pour n’importe quel type de sites, quel que
soit son état de dégradation et sur le seul critère d’une volonté collective.

À la suggestion de l’UNESCO, le concept des Aires du Patrimoine communautaire a été diffusé en Afrique de
l’Ouest. En l’espace de deux mois seulement, six pays d’Afrique de l’Ouest (Guinée, Côte d’Ivoire, Mali, Niger,
Tchad, et Togo) se sont déclarés prêts à se joindre au Sénégal pour participer à une conférence inter-états afin de
rédiger des statuts compatibles avec leur juridiction nationale respective en matière de gestion de la nature.

La multiplication des Aires du Patrimoine communautaire permettrait de répondre à la nécessité de gérer
l’environnement global en dehors des aires protégées classiques sans impliquer d’aussi lourds investissements
financiers. Elles n’exigent, en effet, ni personnel, ni logistique, ni moyen de fonctionnement, l’ensemble de ces
services étant assuré par la communauté gestionnaire. Un tel engagement constitue par ailleurs la meilleure
garantie à une aide au développement, un développement sans lequel il ne peut y avoir de développement durable.

Enfin, cette responsabilisation collective suscite d’autres initiatives destinées à résoudre certains problèmes locaux
d’environnement ou de gestion des ressources naturelles. L’Espace naturel communautaire Kër Cupaam et l’Aire
du Patrimoine communautaire de Teunguène en ont déjà donné de nombreuses preuves.

À Yoff, le Khalif général des Layènes est intervenu à plusieurs reprises afin d’inciter les fidèles à participer
activement à la protection de l’Aire du Patrimoine communautaire de Teunguène. Il a également demandé à être
informé de toutes les initiatives prises en faveur de sa conservation. Sa prise de position constitue une assurance
car, dans la communauté lébou, l’influence d’une personnalité de si haut rang est considérable à tous les niveaux de
la société.

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La mairie d’arrondissement de Yoff a intégré immédiatement dans son système d’informations géographiques les
données de base et créé une page consacrée à l’Aire du Patrimoine communautaire de Teunguène sur un site
Internet en cours de constitution. De plus, Teunguène a été proposé comme modèle lors d’une réunion des maires
du Sénégal qui s’est tenue récemment à Yoff.

Suite à la déclaration officielle de l’Aire du Patrimoine communautaire, l’assemblée des signataires a adopté des
mesures de conservation qui ont été publié sous forme de manifeste. Ainsi, aucun mouton n’a plus été débarqué sur
l’île dont l’accès est réglementé, tandis que la pêche est désormais strictement réglementée et la collecte des
coquillages suspendue dans le périmètre de conservation. Des travaux de lutte contre l’érosion ont été entrepris par
les jeunes membres des Clubs Fondation Nicolas Hulot locaux (Yoff, Ngor et Ouakam) qui, par ailleurs, se
chargent d’une campagne d’information et de sensibilisation dans les établissements scolaires et parmi la
population.

En conclusion, les Aires du Patrimoine communautaire ont moins pour vocation de sauvegarder un site
remarquable, ou l’habitat d’espèces menacées, que d’entraîner les populations dans une démarche de protection de
leurs ressources et de leur environnement naturels.

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LES AIRES DU PATRIMOINE COMMUNAUTAIRE

                                         Statuts provisoires

Article 1 - DEFINITION
Une Aire du Patrimoine Communautaire est un espace de conservation durable de la diversité biologique locale,
végétale, animale, et/ou culturelle, ayant valeur de référence pour les générations futures de la communauté qui l'a
créée.

Article 2 - PRINCIPE FONDATEUR
Toute Aire du Patrimoine Communautaire se fonde sur une initiative endogène et consensuelle de conservation
d’un site naturel et/ou culturel.

Article 3 - VOCATION
Une Aire du Patrimoine Communautaire a pour vocation la sauvegarde d’un site du patrimoine naturel et/ou
culturel, jugé d'intérêt majeur par les populations locales.

Article 4 - ÉLIGIBILITE
Le choix du lieu et la superficie mise en sauvegarde sont déterminés par consensus entre les autorités coutumières,
religieuses et administratives, la population et les acteurs socio-économiques locaux.
Les services ou organismes, nationaux et internationaux, de la conservation des ressources naturelles apporteront
leurs appuis techniques, définis aux termes de conventions particulières.

Article 5 - CARACTERISTIQUES
Tout site, continental ou marin, peut être érigé en Aire du Patrimoine Communautaire, quels que soient sa
superficie et son état de conservation au moment de sa mise sous protection.

Article 6 - FONCIER
La création d’une Aire du Patrimoine Communautaire concerne principalement les biens communaux et/ou
coutumiers.
Toutefois, dans le cas où des terrains privés seraient inclus dans le périmètre de conservation, ces terrains pourront
être cédés à la communauté aux termes d’un contrat conclu de gré à gré.
Toute Aire du Patrimoine Communautaire est inaliénable après constitution.

Article 7 - ENREGISTREMENT
Toute Aire du Patrimoine Communautaire doit être déclarée, reconnue et enregistrée, comme telle par les services
compétents de l'État.

Article 8 - GESTION
La gestion et l'intégrité d’une Aire du Patrimoine Communautaire sont assurées et garanties par l’ensemble des
populations périphériques, ou par les responsables qu’elles auront désignés au sein de la communauté concernée.

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Article 9 - INTERVENTIONS
Dans le cas d’un milieu naturel dégradé, une restauration de la flore et de la faune sera entreprise afin de
reconstituer, autant que faire se peut, la biocénose originelle.
Il ne sera donc procédé à aucun prélèvement de faune ou de flore, sous quelle forme que ce soit, à l'exeption de la
collecte de graines ou boutures végétales destinées à la multiplication d'espèces rares ou menacées. Les récoltes
seront toujours effectuées après accord des représentants de la collectivité gestionnaire et sous le contrôle de
l'autorité scientifique qu'elle aura désignée.

Article 10 - FINANCEMENT
La gestion d’une Aire du Patrimoine Communautaire est à la charge de la collectivité qui en a décidé la création,
notamment et après enquête préalable, pour tous les travaux de restauration de la diversité biologique végétale et
animale.
Toutefois, dans le cas d’interventions dépassant le potentiel local telles que les évaluations, les inventaires
floristique et faunistique, la cartographie, etc., la communauté peut introduire des demandes de financements
nationaux ou internationaux.

Article 11 - RESSOURCES
La collectivité gestionnaire d'une Aire du Patrimoine Communautaire a la possibilité d’exploiter ses ressources par
extractivisme (collectes sélectives) et pour son éventuel intérêt touristique (visites guidées), à la condition que ces
activités n’aient pas d’impact notoire sur l'équilibre du milieu naturel.

Article 12 - TRANSMUTATIONS
Lorsque les populations locales se sont largement investies dans la gestion d'une Réserve nationale, celle-ci peut
acquérir la vocation et l'appellation d'Aire du Patrimoine Communautaire sans perdre pour autant son statut initial.
Réciproquement, une aire du Patrimoine Communautaire peut être érigée en Réserve nationale à la demande ou
avec l'accord de l'ensemble des acteurs et partenaires de la communauté gestionnaire.
Ces transmutations sont enregistrées par conventions passées avec les services compétents de l'État.

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COMMUNE D'ARRONDISSEMENT DE YOFF
                              ASSOCIATION POUR LA PROMOTION ECONOMIQUE CULTURELLE ET SOCIALE DE YOFF

                                                 PROGRAMME ECO-COMMUNAUTAIRE DE YOFF
                                                           CLUBS FONDATION NICOLAS HULOT

                                           DECLARATION DE TEUNGUÈNE
                                          5 JUIN 1998 - JOURNEE MONDIALE DE L'ENVIRONNEMENT

"Nous, populations yoffoises, dépositaires d'une grande partie de l'histoire du Peuple lébou, sommes conscientes qu'en cette fin du XXe
siècle, la gestion de notre patrimoine culturel et naturel est plus que capitale.
Sans cette Nature dont nous ne sommes pas maîtres et possesseurs mais de simples éléments, même si ceux-ci s’avèrent déterminant de par
leur impact sur les milieux naturels et l’ensemble des êtres vivants, nous ne saurions obtenir de vie meilleure pour nous-mêmes, ni un avenir
prometteur aux générations futures.
Nous déclarons Teungnéne, l'île de Yoff, symbole de l’attachement du Peuple lébou à la nature terrestre et marine, ainsi qu’à son génie
tutélaire Mame NDiaré,

                                            AIRE DU PATRIMOINE COMMUNAUTAIRE DE TEUNGUÈNE

Teungnéne, lieu de culte, étape pour les oiseaux migrateurs et refuge d'une diversité végétale et marine de plus en plus menacée, doit éveiller
notre conscience à la nécessité de sauvegarder notre patrimoine naturel et culturel. Ce conservatoire de nos valeurs traditionnelles, ouvert sur
la modernité, nous permettra de rester un peuple digne et responsable.
Nous invitons la Communauté lébou, le Peuple sénégalais et, au-delà, la Communauté internationale, à nous rejoindre et nous soutenir dans
cette nouvelle approche des principes de gestion de l'environnement continental et marin à Yoff."
L’infinie variété des milieux naturels, des cultures humaines, des espèces animales et végétales, procède de la même biodiversité. Protéger
les uns sans également protéger les autres serait vain.

                                       ASSEMBLÉE CONSTITUTIVE
                       DE L'AIRE DU PATRIMOINE COMMUNAUTAIRE DE TEUNGUÈNE
                       El Hadj ISSA MBENGUE                                                       El Hadj OUSMANE NDOYE
                        Grand Diaraf de Yoff,                                                 Président de l'Assemblée des Freys
                chef de village et conservateur de l'île
                                                                                                     Adji THIOUME LEYE
                  SEYDINA MAME ALASSANE LAYE                                                              Ndeupkat
                     Khalif général des Layènes
                                                                                                        BINETA NDIR
                       SEYDINA ISSA NDIAYE                                                               Ndeupkat
                          Maire de Yoff
                                                                                                      PAPE FALL DIEYE
                       El Hadj ELIMANE LEYE                                                   Union locale des Pêcheurs de Yoff
                         Imam Ratib de Yoff
                                                                                                        MASS THIAW
                  El Hadj OUMAR NGALLA DIENE                                                        Collectif des Pêcheurs
                Grand Diaraf de Yoff, chef de village
                                                                                                      IBRAHIMA DIENE
                     El Hadj NDIAGA NDOYE                                                       Comité de Surveillance côtière
                Grand Diaraf de Yoff, chef de village
                                                                                                        DIARRA SECK
                      El Hadj ASSAN MBENGUE                                                       Présidente des Mareyeuses
                            Ndiey-ji-rew
                                                                                                       FATIM DIOP
                  El Hadj IBRAHIMA TANOR DIOUF                                               Regroupement des Transformatrices
                            Ndiey-ji-rew
                                                                                                 El Hadj ÉLIMANE MBENGUE
                     El Hadj YOUSSOUPHA NDIR                                                Président de l'Association des Rameurs
                              Saltigué
                                                                                                     MAMADOU SAMBA
                     El Hadj IBRAHIMA NDOYE                                                     Club FNH - Foyer des Jeunes
                              Saltigué
                                                                                                    SERIGNE MBAYE DIENE
                 El Hadj AMADOU LAMINE DIAGNE                                      Président de l'Association pour la Promotion économique,
                            Saltigué                                                               culturelle, et sociale de Yoff

                    El Hadj SOULEYMAN DIAGNE                                                        SEYDINA ISSA SYLLA
                      Président des Maggi-Yoff                                                      Wetlands international

                   El Hadj BABACAR MBENGUE                                                              SIDY DIOUF
              Président de l'Assemblée des Diambours                                              Sous-Préfet des Almadies

                                                                        6
OBJECTIFS ET ACQUIS D’UNE AIRE DU PATRIMOINE COMMUNAUTAIRE
Les Aires du Patrimoine communautaire (A.P.C.) ont été conçues afin d’impliquer les populations locales dans la
gestion de leurs ressources naturelles et de les sensibiliser à leur conservation par une appropriation effective,
reconnue à la fois par l’ensemble des acteurs socio-économiques et les autorités administratives. Elles sont régies
par un règlement intérieur ratifié par les signataires de leur assemblée constitutive.

Contrairement aux réserves nationales, dont l’augmentation est toujours problématique au-delà d’un certain seuil, le
nombre des Aires du Patrimoine communautaire est pratiquement illimité dans une même région, dans la mesure où
la décision de leur création est strictement endogène et consensuelle.

L’ensemble de ces principes s’inscrivent dans la Convention sur la Biodiversité, notamment en application des
articles 6, 7, 8, 10, 12 et 13. Ainsi, les A.P.C. sont plus particulièrement destinées aux Pays du Sud où elles peuvent
être intégrées aux lois sur la décentralisation, si ce n’est déjà le cas, comme au Sénégal. Elles participent au
développement durable dans les domaines agricoles (pêche, chasse et cultures) et des petites et moyennes
entreprises industrielles (artisanat et transformation).

En effet, un autre de leurs avantages est leur valeur d’exemple et la facilité de leur reproductibilité. L’expérience a
montré qu’il suffisait qu’une communauté crée son A.P.C. pour que ses voisines soient tentées de l’imiter. La
multiplication de proche en proche finit par former un réseau particulièrement fiable et sécurisant pour la mise en
œuvre de programmes d’aides économiques sur des financements nationaux ou internationaux.

Hormis l’extrême brièveté de son évolution, due à une longue maturation, l’exemple de l’A.P.C. de Teunguène n’en
demeure pas moins significatif. Créée moins de trois mois après la rédaction des statuts provisoires, des initiatives
collectives se sont très rapidement manifestées. L’arrêt de toute dépose du bétail sur l’île a été facilement acceptée,
dans la mesure où son exiguïté et la pauvreté du pâturage ne pouvaient supporter qu’un nombre limité de bêtes. La
mesure la plus importante a été la suppression effective de la pêche à la dynamite, une pratique clandestine mais
largement répandue qui ne peut être efficacement contrôlée que par autodiscipline entre pêcheurs. Toute capture par
ce procédé est immédiatement reconnue et confisquée.

Par la suite, les usagers de la plage se sont mobilisés et les anciens qui, traditionnellement, passent la journée sous
des abris aux endroits les plus fréquentés, ont exercé une surveillance et exprimé leur avis sur les activités dont ils
étaient jusqu’alors des témoins passifs et silencieux. Leur rôle a été déterminant dans l’arrêt des prélèvements de
sable de mer qui, tout le long du littoral, constitue le matériau de base utilisé pour la fabrication des parpaings en
ciment et d’autant plus demandé que l’urbanisation du cap Vert est en constante expansion.

Enfin, les maîtres-nageurs, chargés par la municipalité de la sécurité des pêcheurs et baigneurs, ont pris une part
active par leurs conseils aux mareyeuses qui, produisant une grande quantité de déchets rapidement putrescibles,
contribuent à une forte pollution de la plage. Par ailleurs, leur contact permanent avec les enfants a permis que cesse
la pêche des sternes contre laquelle les associations de protection des oiseaux luttaient depuis de nombreuses
années.

La rapidité avec laquelle la population s’est mobilisée autour de l’ A.P.C. de Teunguène a certainement beaucoup
contribué à lui donner valeur d’exemple, car les lagunes de la Somone et de Pinthior, puis la forêt de Sessene et la
chute de Dindefelo furent classées quelques mois plus tard.

Ces premières expériences ont conduit la Banque mondiale à expérimenter ce mode de gestion des ressources
naturelles dans son programme de conservation des zones de haute biodiversité, marine et côtière, sur l'ensemble du
littoral sénégalais. L'étude de faisabilité sera réalisée en 2001/2002.

                                                          7
ESPACE NATUREL COMMUNAUTAIRE KËR CUPAAM

                    LES MÈRES-NATURE DE KËR CUPAAM
 Le programme qui a été à l’origine du concept des Aires du Patrimoine communautaire

Ce projet s’est développé autour de la Réserve de Popenguine-Guéréo, située sur la Petite Côte, à 45 km au sud de
Dakar. Il a débuté par la restauration du couvert végétal fortement dégradé de l’aire en défens créée, à l’origine, en
raison de la fréquentation des falaises littorales par certaines espèces rares d’oiseaux migrateurs. Les travaux furent
menés bénévolement, pendant sept ans, par un groupement féminin d’un village limitrophe, le Regroupement des
Femmes de Popenguine pour la Protection de la Nature (RFPPN), créé à l’initiative de l’une d’elle Woulimata
Thiaw. C’est durant cette longue période, au cours de laquelle ces femmes reçurent très peu d’aides, que de plus
amples ambitions prirent naissance.

Leur action ayant été reconnue à l’échelle nationale, le RFPPN suscita des vocations dans les villages, au voisinage
immédiat de la Réserve. Mais, plutôt que d’alourdir les effectifs d’une seule association, il fut préféré d’en créer
une dans chaque communauté. C’est ainsi que le mouvement qui ne comptait, au départ, que 119 femmes de
Popenguine, en mobilise actuellement 1 555 regroupées en huit GIE agissant en synergie sous les directives d’un
comité de coordination composé de représentantes, élues, de chaque GIE..

Aujourd’hui, le projet se développe dans trois domaines distincts qui, pour être différents, n’en sont pas moins
                                                                           2
complémentaires : la Réserve, une zone périphérique d’environ 100 km , et le développement économique des po-
pulations riveraines. Dans la Réserve, la priorité est d’enrayer l’érosion, d'autant plus active que les reliefs y sont
accidentés et les terrains calcaires. La lagune de Popenguine a été consolidée, mais des travaux importants restent à
réaliser au niveau de Guéréo et du littoral. Par ailleurs, le réseau des pistes de vision reste en grande partie à créer
ainsi que des parcours pédagogiques, l’information et la signalisation à l’usage des scolaires et des visiteurs. Ces
interventions dans l’aire protégée ont conduit à compléter le dispositif par des réserves volontaires. Des chantiers
sont en projet sur le secteur nord de l’ancienne forêt classée, à l’exemple de ceux menés dans la mangrove de la
Somone, aujourd'hui largement restaurée là où elle avait été détruite.

Depuis sa création, aucune étude scientifique n’a été menée dans la Réserve à l’exception d’un inventaire de l’avi-
faune qui, ancien, demande à être actualisé. Les reconquêtes de la flore et de la faune ne sont ni quantifiées, ni
évaluées, en dépit de leur très nette amélioration. Toutes ces données sont nécessaires à une pédagogie élémentaire
en matière de gestion et d’éducation à l’environnement. Or, la gestion des terroirs villageois et le développement
des activités économiques nécessitent des connaissances de base indispensables qui, potentielles, ne dema ndent
qu’à être exploitées.

 Ainsi, pour combattre la déforestation, les femmes du collectif ont mis en place des bois de village qu’elles ont
doublé d’un réseau de distribution de combustibles. Elles s’assurent de cette manière le contrôle de la
consommation du bois de feu, avant comme après l’exploitation des bois villageois. De même, l’enlèvement et le
traitement des déchets ménagers résolvent un problème de salubrité publique tout en renforçant les pépinières et
productions maraîchères par leur compostage. Enfin, la création de banques alimentaires et de crédit permet aux
communautés d’échapper aux flambées saisonnières du prix des denrées, relevant ainsi le seuil de pauvreté.

Ces initiatives endogènes méritent d’être modélisées, dans leur ensemble, afin de les reproduire tout d’abord alen-
tour, puis dans d’autres régions du Sénégal et, enfin, dans certains pays voisins tels, notamment, le Mali, la Guinée
et le Burkina Faso, où des mouvements similaires se sont déjà manifestés et sont en quête de programmes. La
création d’un Centre de formation à la gestion communautaire des aires protégées répondrait aux questions posées
par les populations riveraines de réserves ou de parcs nationaux, dont elles ne perçoivent pas toujours l’intérêt, en
les associant à leur gestion, voire en leur permettant certaines formes d’exploitation (extractivisme). Ce Centre
accueillera par ailleurs les stagiaires étrangers qui y trouvent déjà un exemple concret de développement durable.

                                                           8
La lutte contre le chômage des jeunes, diplômés ou déscolarisés, est également une préoccupation du collectif fé-
minin. La gestion des activités communautaires et leur exploitation, la Réserve, le Centre de formation, sont autant
de secteurs d’emplois potentiels. De plus, la congrégation catholique de Popenguine dispense des formations en
couture, tissage et teinture qui n’ont trouvé que peu d’applications professionnelles. La création d’ateliers, ajoutée
à la valorisation des artisanats traditionnels, devrait apporter des ressources importantes au financement du projet
global dont aucun aspect ne peut être négligé.

À partir de 1997 et pour les trois années suivantes, la Commission européenne a accordé un financement qui a
permis d’entreprendre la collecte des déchets ménagers et leur compostage, de développer les pépinières et bois
villageois, de mettre en place un réseau de distribution de combustibles. La seconde année (1998), les réalisations
précédentes furent développées avec la création d’une banque d’épargne et de crédit, ainsi qu’une banque
céréalière. Enfin, la troisième et dernière année (1999-2000), un Centre de formation à la gestion communautaire
des aires protégées et des terroirs périphériques a été ouvert, afin que l’expérience des femmes de Kër Cupaam
profite à d’autres groupements féminins au Sénégal, comme à ceux d’autres pays du Sahel où les contraintes
écologiques sont identiques.

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AVIS SUR L’ADOPTION DU PRINCIPE
                       DES AIRES DU PATRIMOINE COMMUNAUTAIRE

                                             AGREMENT

SENEGAL                      Colonel Mbrareck Diop
Par courrier du 05-08-1998   Conseiller Technique auprès du Président de la République

                                    ACCORDS DE PRINCIPE

COTE D’IVOIRE                Docteur Amani Denis KOUAME
Par courrier du 27-10-1998   Directeur de la Protection de la Nature
                             Ministère de l’Agriculture et des Ressources Animales

GUINEE                       Monsieur Namory KEITA
Par courrier du 12-10-1998   Direction Nationale des Eaux et Forêts
                             Ministère de l’Environnement et de la Forêts

MALI                         Docteur Yafong BERTHE
Par courrier du 30-08-1998   Directeur national de l’Aménagement et de l’Équipement rural
                             Ministère du Développement rural et de l’Eau

NIGER                        Monsieur Seyni SEYDOU
Par courrier du 21-08-1998   Directeur de la Faune, de la pêche et de la Pisciculture
                                            Ministère de l’Hydraulique et de l’Environnement

TCHAD                        Monsieur Ndikibaye Dolmia MALACHIE
Par courrier du 29-10-1998   Direction de la Protection de Faune et des Parcs nationaux
                             Ministère de l’Environnement et de l’Eau

TOGO                         Monsieur Abdou Kérim MOUMOUNI
Par courrier du 01-09-1998   Directeur des Parcs Nationaux, des Réserves de Faune et de Chasse
                             Ministère du Tourisme et des Ressources Forestières

UNESCO                       Bernd von Droste
Par courrier du 02-11-1998   World Heritage Centre

                                                     10
ANNEXE I

       Principes cités en référence du concept des Aires du Patrimoine communautaire

           CONFERENCE DES NATIONS UNIES SUR L'ENVIRONNEMENT
                                            ET LE DEVELOPPEMENT
                                              Rio de Janeiro, 3 - 14 juin 1992

                                                           PRINCIPE 4

Pour parvenir à un développement durable, la protection de l'environnement doit faire partie intégrante du processus de
développement et ne peut être considérée isolément.

                                                           PRINCIPE 9

Les Etats devraient coopérer ou intensifier le renforcement des capacités endogènes en matière de développement durable en
améliorant la compréhension scientifique par des échanges de connaissances scientifiques et techniques et en facilitant la mise
au point, l'adaptation, la diffusion et le transfert de techniques, y compris de techniques nouvelles et novatrices.

                                                           PRINCIPE 10

La meilleure façon de traiter les questions d'environnement est d'assurer la participation de tous les citoyens concernés, au
niveau qui convient. Au niveau national, chaque individu doit avoir dûment accès aux informations relatives à l'environnement
que détiennent les autorités publiques, y compris aux informations relatives aux substances et activités dangereuses dans leurs
collectivités, et avoir la possibilité de participer aux processus de prise de décision. Les Etats doivent faciliter et encourager la
sensibilisation et la participation du public en mettant les informations à la disposition de celui-ci. Un accès effectif à des
actions judiciaires et administratives, notamment des réparations et des recours, doit être assuré.

                                                           PRINCIPE 11

Les Etats doivent promulguer des mesures législatives efficaces en matière d'environnement. Les normes écologiques et les
objectifs et priorités pour la gestion de l'environnement devraient être adaptés à la situation en matière d'environnement et de
développement à laquelle ils s'appliquent. Les normes appliquées par certains pays peuvent ne pas convenir à d'autres pays, en
particulier à des pays en développement, et leur imposer un coût économique et social injustifié.

                                                           PRINCIPE 20

Les femmes ont un rôle vital dans la gestion de l'environnement et le développement. Leur pleine participation est donc
essentielle à la réalisation d'un développement durable.

                                                           PRINCIPE 21

Il faut mobiliser la creativité, les idéaux et le courage des jeunes du monde entier afin de forger un partenariat mondial, de
manière à assurer un développement durable et à garantir à chacun un avenir meilleur.

                                                           PRINCIPE 22

Les populations et communautés autochtones et les autres collectivités locales ont un rôle vital à jouer dans la gestion de
l'environnement et le développement du fait de leurs connaissances du milieu et de leurs pratiques traditionnelles. Les Etats
devraient reconnaître leur identité, leur culture et leurs intérêts, leur accorder tout l'appui nécessaire et leur permetre de
participer efficacement à la réalisation d'un développement durable.

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ANNEXE II

        Articles cités en référence du concept des Aires du Patrimoine communautaire
                       CONVENTION SUR LA DIVERSITE BIOLOGIQUE
                                                          (Extraits)
Article 6. Mesures générales en vue de la conservation et de l'utilisation durable
   Chacune des Parties contractantes, en fonction des conditions et moyens qui lui sont propres :
   a) Elabore des stratégies, plans ou programmes nationaux tendant à assurer la conservation et l'utilisation durable de la
       diversité biologique ou adapte à cette fin ses stratégies, plans ou programmes existants qui tiendront compte, entre
       autres, des mesures énoncées dans la présente Convention qui la concernent;
   b) Intègre, dans toute la mesure possible et comme il convient, la conservation et l'utilisation durable de la diversité
       biologique dans ses plans, programmes et politiques sectoriels ou intersectoriels pertinents.

Article 7. Identification et surveillance
   Chaque Partie contractante, dans la mesure du possible et selon qu'il conviendra, notamment aux fins des articles 8 à 10 :
   a) Identifie les éléments constitutifs de la diversité biologique importants pour sa conservation et son utilisation durable, en
       tenant compte de la liste indicative de catégories figurant à l'annexe I(1).
   b) Surveille par prélèvement d'échantillons et d'autres techniques, les éléments constitutifs de la diversité biologique
       identifiés en application de l'alinéa a) ci-dessus, et prête une attention particulière à ceux qui doivent d'urgence faire
       l'objet de mesures de conservation ainsi qu'à ceux qui offrent le plus de possibilités en matière d'utilisation durable;
   c) Identifie les processus et catégories d'activités qui ont ou risquent d'avoir une influence défavorable sensible sur la
       conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique et surveille leurs effets par prélèvement d'échantillons et
       d'autres techniques.
   d) Conserve et structure à l'aide d'un système les données résultant des activités d'identification et de surveillance
       entreprises conformément aux alinéas a), b) et c) ci-dessus.

Article 8. Conservation in situ
   Chaque Partie contractante, dans la mesure du possible et selon qu'il conviendra :
   a) Etablit un système de zones protégées ou de zones où des mesures spéciales doivent être prises pour conserver la
       diversité biologique;
   b) Elabore, si nécessaire, des lignes directrices pour le choix, la création et la gestion de zones protégées ou de zones où
       des mesures spéciales doivent être prises pour conserver la diversité biologique;
   c) Réglemente ou gère les ressources biologiques présentant une importance pour la conservation de la diversité biologique
       à l'intérieur comme à l'extérieur des zones protégées afin d'assurer leur conservation et leur utilisation durable;
   d) Favorise la protection des écosystèmes et des habitats naturels, ainsi que le maintien de populations viables d'espèces
       dans leur milieu naturel ;
   e) Promeut un développement durable et écologiquement rationnel dans les zones adjacentes aux zones protégées en vue de
       renforcer la protection de ces dernières ;
   f) Remet en état et restaure les écosystèmes dégradés et favorise la reconstitution des espèces menacées moyennant, entre
       autres, l'élaboration et l'application de plans ou autres stratégies de gestion ;
   g) Met en place ou maintient des moyens pour réglementer, gérer ou maîtriser les risques associés à l'utilisation et à la
       libération d'organismes vivants et modifiés résultant de la biotechnologie qui risquent d'avoir sur l'environnement des
       impacts défavorables qui pourraient influer sur la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique, compte
       tenu également des risques pour la santé humaine ;
   h) Empêche d'introduire, contrôle, ou éradique les espèces exotiques qui menacent des écosystèmes, des habitats ou des
       espèces ;
   i) S'efforce d'instaurer les conditions nécessaires pour assurer la compatibilité entre les utilisations actuelles et la
       conservation de la diversité biologique et l'utilisation durable de ses éléments constitutifs ;
   j) Sous réserve des dispositions de sa législation nationale, respecte, préserve et maintient les connaissances, innovations et
       pratiques des communautés autochtones et locales qui incarnent des modes de vie traditionnels présentant un intérêt
       pour la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique et en favorise l'application sur une plus grande
       échelle, avec l'accord et la participation des dépositaires de ces connaissances, innovations et pratiques et encourage le
       partage équitable des avantages découlant de l'utilisation de ces connaissances, innovations et pratiques ;

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k) Formule ou maintient en vigueur les dispositions législatives et autres dispositions réglementaires nécessaires pour
        protéger les espèces et populations menacées ;
    l) Lorsqu'un effet défavorable important sur la diversité biologique a été déterminé conformément à l'article 7, réglemente
        ou gère les processus pertinents ainsi que les catégories d'activités ;
    m) Coopère à l'octroi d'un appui financier et autre pour la conservation in situ visée aux alinéas a) à l) ci-dessus,
        notamment aux pays en développement.

Article 10. Utilisation durable des éléments constitutifs de la diversité biologique
   Chaque Partie contractante, dans la mesure du possible et selon qu'il conviendra :
   a) Intègre les considérations relatives à la conservation et à l'utilisation durable des ressources biologiques dans le
       processus décisionnel national ;
   b) Adopte des mesures concernant l'utilisation des ressources biologiques pour éviter ou atténuer les effets défavorables sur
       la diversité biologique ;
   c) Protège et encourage l'usage coutumier des ressources biologiques conformément aux pratiques culturelles
       traditionnelles compatibles avec les impératifs de leur conservation ou de leur utilisation durable ;
   d) Aide les populations locales à concevoir et à appliquer des mesures correctives dans les zones dégradées où la diversité
       biologique a été appauvrie ;
   e) Encourage ses pouvoirs publics et son secteur privé à coopérer pour mettre au point des méthodes favorisant l'utilisation
       durable des ressources biologiques.

Article 12. Recherche et formation
   Les Parties contractantes, tenant compte des besoins particuliers des pays en développement :
   a) Mettent en place et poursuivent des programmes d'éducation et de formation scientifiques et techniques pour identifier et
       conserver la diversité biologique et ses éléments constitutifs et en assurer l'utilisation durable, et apportent un appui à
       l'éducation et à la formation répondant aux besoins particuliers des pays en développement ;
   b) Favorisent et encouragent la recherche qui contribue à conserver la diversité biologique et à en assurer l'utilisation
       durable, en particulier dans les pays en développement, en se conformant entre autres aux décisions de la Conférence
       des Parties faisant suite aux recommandations de l'organe subsidiaire chargé de fournir des avis scientifiques,
       techniques et technologiques ;
   c) Conformément aux dispositions des articles 16(2), 18(3) et 20(4), encouragent l'exploitation des progrès de la recherche
       scientifique sur la diversité biologique pour mettre au point des méthodes de conservation et d'utilisation durable des
       ressources biologiques, et coopèrent à cet effet.

Article 13. Education et sensibilisation du public
   Les Parties contractantes :
   a) Favorisent et encouragent une prise de conscience de l'importance de la conservation de la diversité biologique et des
       mesures nécessaires à cet effet et en assurent la promotion par les médias, ainsi que la prise en compte de ces questions
       dans les programmes d'enseignement ;
   b) Coopèrent, selon qu'il conviendra, avec d'autres Etats et des organisations internationales, pour mettre au point des
       programmes d'éducation et de sensibilisation du public concernant la conservation et l'utilisation durable de la diversité
       biologique.

1) Annexe I. Identification et surveillance
    1. Ecosystèmes et habitats : comportant une forte diversité, de nombreuses espèces endémiques ou menacées, ou des étendues sauvages; nécessaires pour
        les espèces migratrices; ayant une importance sociale, économique, culturelle ou scientifique; ou qui sont représentatifs, uniques ou associés à des
        processus d'évolution ou d'autres processus biologiques essentiels;
    2. Espèces et communautés qui sont : menacées; des espèces sauvages apparentées à des espèces domestiques ou cultivées; d'intérêt médicinal, agricole
        ou économique; d'importance sociale, scientifique ou culturelle; ou d'un intérêt pour la recherche sur la conservation et l'utilisation durable de la
        diversité biologique, telles que les espèces témoins;
    3. Génomes et gènes décrits revêtant une importance sociale, scientifique ou économique.

2) Article 16. Accès à la technologie et transfert de technologie
    1. Chaque Partie contractante, reconnaissant que la technologie inclut la biotechnologie, et que l'accès à la technologie et le transfert de celle-ci entre
         Parties contractantes sont des éléments essentiels à la réalisation des objectifs de la présente Convention, s'engage, sous réserve des dispositions du
         présent article, à assurer et/ou à faciliter à d'autres Parties contractantes l'accès aux technologies nécessaires à la conservation et à l'utilisation durable
         de la diversité biologique, ou utilisant les ressources génétiques sans causer de dommages sensibles à l'environnement, et le transfert desdites
         technologies.

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2. L'accès à la technologie et le transfert de celle-ci, tels que visés au paragraphe 1 ci-dessus, sont assurés et/ou facilités pour ce qui concerne les pays en
         développement à des conditions justes et les plus favorables, y compris à des conditions de faveur et préférentielles s'il en est ainsi mutuellement
         convenu, et selon que de besoin conformément aux mécanismes financiers établis aux termes des articles 20 et 21. Lorsque les technologies font
         l'objet de brevets et autres droits de propriété intellectuelle, l'accès et le transfert sont assurés selon des modalités qui reconnaissent les droits de
         propriété intellectuelle et sont compatibles avec leur protection adéquate et effective. L'application du présent paragraphe sera conforme aux
         dispositions des paragraphes 3, 4 et 5 ci-après.
    3. Chaque Partie contractante prend, comme il convient, les mesures législatives, administratives ou de politique générale voulues pour que soit assuré
         aux Parties contractantes qui fournissent des ressources génétiques, en particulier celles qui sont des pays en développement, l'accès à la technologie
         utilisant ces ressources et le transfert de ladite technologie selon des modalités mutuellement convenues, y compris à la technologie protégée par des
         brevets et autres droits de propriété intellectuelle, le cas échéant par le biais des dispositions des articles 20 et 21, dans le respect du droit international
         et conformément aux paragraphes 4 et 5 ci-après.
    4. Chaque Partie contractante prend, comme il convient, les mesures législatives, administratives, ou de politique générale, voulues pour que le secteur
         privé facilite l'accès à la technologie visée au paragraphe 1 ci-dessus, sa mise au point conjointe et son transfert au bénéfice tant des institutions
         gouvernementales que du secteur privé des pays en développement et, à cet égard, se conforme aux obligations énoncées aux paragraphes 1, 2 et 3 ci-
         dessus.
    5. Les Parties contractantes, reconnaissant que les brevets et autres droits de propriété intellectuelle peuvent avoir une influence sur l'application de la
         Convention, coopèrent à cet égard sans préjudice des législations nationales et du droit international pour assurer que ces droits s'exercent à l'appui et
         non à l'encontre de ses objectifs.

3) Article 18. Coopération technique et scientifique
    1. Les Parties contractantes encouragent la coopération technique et scientifique internationale dans le domaine de la conservation et de l'utilisation
         durable de la diversité biologique, au besoin par le biais des institutions nationales et internationales compétentes.
    2. Chaque Partie contractante encourage la coopération technique et scientifique avec d'autres Parties contractantes, en particulier les pays en
         développement, pour l'application de la présente Convention, notamment par l'élaboration et l'application de politiques nationales. En encourageant
         cette coopération, il convient d'accorder une attention particulière au développement et au renforcement des moyens nationaux par le biais de la mise
         en valeur des ressources humaines et du renforcement des institutions.
    3. La Conférence des Parties, à sa première réunion, détermine comment créer un centre d'échange pour encourager et faciliter la coopération technique et
         scientifique.
    4. Conformément à la législation et aux politiques nationales, les Parties contractantes encouragent et mettent au point des modalités de coopération aux
         fins de l'élaboration et de l'utilisation de technologies, y compris les technologies autochtones et traditionnelles, conformément aux objectifs de la
         présente Convention. A cette fin, les Parties contractantes encouragent également la coopération en matière de formation de personnel et d'échange
         d'experts.
    5. Les Parties contractantes encouragent, sous réserve d'accords mutuels, l'établissement de programmes de recherche conjoints et de coentreprises pour le
         développement de technologies en rapport avec les objectifs de la présente Convention.

4) Article 20. Ressources financières
     1. Chaque Partie contractante s'engage à fournir, en fonction de ses moyens, un appui et des avantages financiers en ce qui concerne les activités
         nationales tendant à la réalisation des objectifs de la présente Convention, conformément à ses plans, priorités et programmes nationaux.
    2. Les Parties qui sont des pays développés fournissent des ressources financières nouvelles et additionnelles pour permettre aux Parties qui sont des pays
         en développement de faire face à la totalité des surcoûts convenus que leur impose la mise en oeuvre des mesures par lesquelles ils s'acquittent des
         obligations découlant de la présente Convention et de bénéficier de ses dispositions, ces surcoûts étant convenus entre une Partie qui est un pays en
         développement et la structure institutionnelle visée à l'article 21, selon la politique, la stratégie, les priorités du programme et les conditions
         d'attribution ainsi qu'une liste indicative des surcoûts établies par la Conférence des Parties. Les autres Parties, y compris les pays qui se trouvent
         dans une phase de transition vers l'économie de marché, peuvent assumer volontairement les obligations des Parties qui sont des pays développés.
         Aux fins du présent article, la Conférence des Parties dresse à sa première réunion la liste des Parties qui sont des pays développés et des autres
         Parties qui assument volontairement les obligations des Parties qui sont des pays développés. La Conférence des Parties revoit périodiquement cette
         liste et la modifie en cas de besoin. Les autres pays et sources seraient également encouragés à fournir des contributions à titre volontaire. Pour
         traduire ces engagements en actes, on tiendra compte de la nécessité de faire en sorte que le flux des fonds soit adéquat, prévisible et ponctuel et du
         fait qu'il est important de répartir le fardeau entre les Parties contribuantes inscrites sur la liste susmentionnée.
    3. Les Parties qui sont des pays développés peuvent aussi fournir, au bénéfice des Parties qui sont des pays en développement, des ressources financières
         liées à l'application de la présente Convention, par des voies bilatérales, régionales et multilatérales.
    4. Les pays en développement ne pourront s'acquitter effectivement des obligations qui leur incombent en vertu de la Convention que dans la mesure où
         les pays développés s'acquitteront effectivement des obligations qui leur incombent en vertu de la Convention s'agissant des ressources financières et
         du transfert de technologie et où ces derniers tiendront pleinement compte du fait que le développement économique et social et l'élimination de la
         pauvreté sont les priorités premières et absolues des pays en développement.
    5. Les Parties tiennent pleinement compte des besoins spécifiques et de la situation particulière des pays les moins avancés dans les mesures qu'ils
         prennent en matière de financement et de transfert de technologie.
    6. Les Parties contractantes prennent aussi en considération les conditions spéciales résultant de la répartition et de la localisation de la diversité
         biologique sur le territoire des Parties qui sont des pays en développement, et de la dépendance de ces dernières, en particulier de celles qui sont des
         petits Etats insulaires.
    7. Elles prennent également en considération la situation particulière des pays en développement, notamment de ceux qui sont les plus vulnérables du
         point de vue de l'environnement, tels que ceux qui ont des zones arides et semi-arides, des zones côtières et montagneuses.

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