Les Itinéraires Culturels Européens, un " produit touristique " culturel ? Par Eleonora BERTI - Université Paris 1 ...

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Les Conférences de l’IREST – Cycle 2012 – 2013

       Les Itinéraires Culturels Européens, un « produit touristique »
                                  culturel ?
                            Par Eleonora BERTI
                           27 Novembre 2012 – Paris, Office du Tourisme
                                          M1 GSVT
        Eleonora Berti architecte spécialisée dans l'architecture paysagère est responsable depuis quatre
ans des itinéraires culturels européens qui viennent de fêter leurs 25 ans d'existence cette année. Cette
institution européenne sera présentée en faisant une ouverture vers la problématique touristique.
         L’intervenante a constaté que même l'Office de Tourisme de Paris, où se déroule cette
conférence, n'avait pas de brochures sur les Itinéraires Culturels Européens. Cela démontre qu'un vrai
travail doit être effectué sur la visibilité des itinéraires car se sont des produits de tourisme culturel. Ce
lien entre culture et tourisme doit se lire dans le sens où les itinéraires sont depuis le début de ce projet
l'outil de découverte de l'Europe. C'est à travers le tourisme que l'on connaît ces itinéraires et c'est à
travers un tourisme durable, éthique, social et culturel, que les touristes peuvent être mis en relation avec
les différentes sociétés qui font parties des parcours, très étendus parfois, des Itinéraires Culturels.

        Les points clefs de la présentation

            Qu'est ce qu'un Itinéraire Culturel ? On parle beaucoup de ce label mais le définir est très
            complexe. Cela n'a rien d'évident, car il s'agit de prendre en compte de nombreuses
            dimensions : culturelle, historique, etc.
            Sur quels principes de la Résolution 52 (2010) du Conseil de l'Europe et du Comité des
            Ministres du Conseil de l'Europe, se développent les Itinéraires Culturels ?
            Quelles sont les nouvelles politiques de la Commission Européenne, en coopération avec le
            Conseil de l'Europe, afin de développer l'Europe en tant que destination touristique numéro un
            au monde ?
            Au travers de quelques exemples d'Itinéraires Culturels, quelles sont les politiques culturelles
            et touristiques mises en place par les Itinéraires eux-mêmes pour réaliser leurs activités ?

        Chronologie du programme des Itinéraires Culturels Européens
         Le programme des Itinéraires Culturels Européens fête cette année son 25ème anniversaire. Un
forum célébrant cet événement vient de se clore en cette fin novembre à Colmar. Il faisait suite à une
autre célébration qui avait eu lieu à Saint- Jacques de Compostelle le 23 octobre 2012 afin de rappeler le
principe de la Convention de Saint- Jacques qui avait abouti à la Charte de Saint- Jacques lancée par le
Conseil de l'Europe le 23 octobre 1987 à propos des chemins de Compostelle. En effet, les principes de ce
document sont toujours actuels et doivent être régulièrement rappelés.
Lors de ce 25ème anniversaire, des activités ont été créées sur les Itinéraires par la Commission
Européenne et le Conseil de l'Europe qui travaillent ensemble sur ce programme. En effet, ils envisagent

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de créer des bases de plus en plus solides de connaissances mais aussi le renforcement des capacités pour
les porteurs de projets et les responsables des Itinéraires. L’été dernier, à Strasbourg, a été lancé la
première édition d'un séminaire d'une université d'été pour les porteurs de projets et les responsables des
Itinéraires. Cette coopération avec le Conseil de l'Europe pour l’Institut - qui constitue une sorte
d'émanation du Conseil de l'Europe ; en est une agence technique – se voit de plus en plus renforcée par la
mise en place de plusieurs activités. Ces dernières se développent grâce à cet intérêt renouvelé de la
Commission Européenne qui, depuis le Traité de Lisbonne, a la responsabilité des politiques touristiques
en Europe.
         La réflexion sur ce programme des Itinéraires au sein du Conseil de l'Europe nait autour des
années 1960. Dans une Europe où la société de loisirs prend de plus en plus d'importance, il faut donner
aux Européens un moyen pour connaître leur identité commune et pour reconnaître leur patrimoine. Après
une prise de conscience, les européens commencent à voyager pendant leurs congés payés. Les Itinéraires
apparaissent donc comme un outil qui permet et facilite cette découverte réciproque entre les européens.
Le programme des Itinéraires Culturels apparait comme un programme de citoyenneté européenne qui
possède une dimension culturelle et non touristique. C'est pour cela qu'un vrai travail doit être effectué sur
la visibilité des Itinéraires et sur leurs mises en tourisme. En effet, jusqu'à présent, le travail s’est
essentiellement focalisé sur les coopérations culturelles entre les 47 pays du Conseil de l’Europe. Il
apparaît clairement que la mise en place de la convention de Faro avant 1989 et la réunification des deux
blocs de l'Europe suite à la chute du mur de Berlin constitua jusqu'à maintenant la base du programme. Il
s'agit de construire de nouvelles actions culturelles qui seront explorées par le tourisme culturel.
         Le lancement du programme des Itinéraires Culturels a lieu en 1987 avec la certification de
deux premiers itinéraires : celui des chemins de Saint- Jacques de Compostelle qui est le plus connu ainsi
que celui de l'Habitat rural qui traverse la Belgique, le Luxembourg et la France. Pour le premier, le
Conseil de l'Europe donnait ainsi la certification à un itinéraire qui n'en avait, pour ainsi dire, pas besoin.
En effet, l'itinéraire de Saint- Jacques a toujours été fréquenté par des pèlerins, par des personnes en
recherche d'elles –même, mais aussi ayant dans leur voyage une optique paysagère avec une volonté de
redécouvrir des paysages moins connus, quelques fois relativement « pauvres » puisqu'ils concernaient un
habitat vernaculaire.
         La finalité du Conseil de l'Europe était la redécouverte culturelle, pas seulement celle des grands
biens culturels mais aussi celle des biens culturels quotidiens, oubliés, dans des régions moins touristiques
et connues afin de retrouver cette essence, ce fondement de l'identité européenne à travers toutes ses
expressions. C'est un élément assez précurseur par rapport à beaucoup de conventions que le Conseil de
l'Europe a lancé plus tard comme par exemple la convention de Faro sur les droits et expressions du
patrimoine ou la convention du Paysage en 2000 où sont évoqués les cadres de vie des populations. Le
Conseil de l'Europe a pu créer cet Institut Européen des Itinéraires Culturels, agence technique et
scientifique externe, grâce à un accord politique avec le Grand Duché du Luxembourg. Le travail de cet

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institut se réparti sur toutes les phases des itinéraires ainsi que sur l'observation des activités et
l'évaluation de ces itinéraires. Actuellement, 24 Itinéraires Culturels bénéficient de la certification du
Conseil de l'Europe. Il y a deux ans, un accord partiel élargi a été créé au sein du Conseil de l’Europe
pour réunir les pays qui envisagent de soutenir économiquement un programme d’Itinéraire Culturel. Le
concept d’élargissement inclut aussi des pays comme le Maroc ou le Canada qui ont le statut de pays
observateurs.

        L'Institut Européen des Itinéraires Culturels

         L'Institut Européen des Itinéraires Culturels se situe donc au Luxembourg, plus particulièrement
au croisement du programme des Itinéraires Culturels ainsi que sur la liste du Patrimoine Mondiale de
l'UNESCO car le site est inscrit sur la liste.
         Ce centre de documentation accueille les porteurs de nouveaux projets et les accompagne vers la
certification : de nombreux critères doivent être satisfaits afin de pouvoir déposer le dossier. La
bibliothèque sur les Itinéraires Culturels étant unique : toutes les archives sont conservées au
Luxembourg, il y accueille aussi des chercheurs. Observatoire de qualité, l’Institut analyse tous les trois
ans chaque Itinéraire afin de vérifier que les critères sont maintenus.

    1. Qu'est-ce qu'un Itinéraire Culturel du Conseil de l'Europe?

         Il est très difficile de définir ce qu'est un itinéraire, car il peut y en avoir de physiques comme par
exemple Saint- Jacques qui se base sur de la randonnée, d'autres itinéraires comme par exemple le réseau
des Villes thermales ou encore les Routes de l'Olivier qui englobent tous les pays de la Méditerranée.
Chaque itinéraire n'est pas qu'un réseau de biens physiques, une série de coopérations ou un produit
touristique. Toutes ces composantes sont inclues dans chaque itinéraire qui devient ainsi un ensemble de
biens culturels complexes, systémique.
        Lors de l'école d'été qui s'est tenue à Strasbourg, il a été demandé aux Itinéraires Culturels de se
donner une définition. Différentes visions ont émergé :
    -   L'Itinéraire de Saint- Jacques de Compostelle : un Itinéraire Culturel qui constitue un parcours de
        découverte historique, culturelle, patrimoniale, sociale qui relie des territoires transfrontaliers. Il
        doit favoriser les échanges de toutes formes (artistiques, écologique, sociales, etc.) entre les
        territoires et les citoyen. Il favorise le partage et l’inter – culturalité et met en avant la citoyenneté
        européenne par la mise en valeur des biens à travers un tourisme culturel et un réseau de qualité.
    -   Le Réseau Intervitis (chemin des vignobles historiques en Europe) : cet itinéraire est un moyen de
        valorisation, notamment d'une thématique culturelle. Un moyen de revitalisation des thématiques
        religieuses, littéraires, historiques, paysagères dont la valeur est reconnue et partagée comme
        patrimoine commun. Cette définition montre qu'un itinéraire n'est pas que physique, il peut être
        aussi mental puisqu’il trouve une concrétisation dans des lieux précis en Europe.
    -   L’Itinéraire de la Via Rega illustre le fait qu’un itinéraire, chemin à travers différents pays de

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        l'Europe, adopte cette dimension Européenne par sa signification, le développement du paysage et
        de l'identité culturelle européenne qu'il engendre. C'est un réseau qui travaille en coopération de
        manière continue pour revitaliser les chemins dans le domaine historique, la recherche, l'échange.
        Il y a une volonté de rendre plus visible ces thématiques européennes pour motiver le public et
        inciter les personnes à voyager à travers l'Europe afin de faire l'expérience de l'autre mais aussi de
        soi-même.
         Il apparaît donc très difficile de trouver une définition unique pour des biens culturels si
différents et si vastes. Finalement, la définition de la ville selon Aristote semble assez juste, il l’a
considère comme itinéraire qui engendre un système de relations. La ville se définit par « les gens qui la
composent, y naissent, y vivent, y meurent, y travaillent, s'y distraient, y souffrent […] ensemble ». Cette
définition systémique correspond aux itinéraires, qui ont été dessinés à travers l'Histoire et l’Europe, qui
sont aujourd'hui redécouverts et permettent de trouver des clefs de lecture des territoires européens selon
les différentes thématiques choisies.
         Ainsi, l'itinéraire culturel n'est pas une série de biens culturels isolés, protégés et définis de
manière individuelle, mais un réseau. Par exemple, la ville de Cluny fait partie d'une fédération de sites
européens, on découvre son environnement à travers l'Europe. Cette lecture transfrontalière de l'Europe
historique, artistique, à travers les siècles jusqu' à l'époque contemporaine, permet de comprendre ce
qu'est un itinéraire culturel, qui trace dans le temps les paysages des territoires européens. L'effort à faire,
désormais, est de retracer sur le territoire européen les signes produits par ces itinéraires. La Via
Francigena, la route de Saint-Jacques de Compostelle et la Via Regia en constituent des exemples.
D'autres itinéraires constituent des biens culturels quelque peu éparpillés sur le continent, comme par
exemple les églises et abbayes cisterciennes, clunisiennes ou encore les villes thermales. Ces biens
culturels sont des points de repère en Europe qu'il faut relier afin de comprendre pourquoi, dans certaines
régions, certains phénomènes se sont produits et comment, aujourd'hui, on peut relire, dans un paysage,
des territoires complètement changés, évolués. Cette capacité dynamique est fondamentale puisqu’elle
concerne des territoires qui évoluent et des sociétés qui changent elles aussi, donnant par conséquent des
significations différentes à ces biens culturels.
         Saint-Jacques de Compostelle a été certifié en tant qu’Itinéraire Culturel parce qu'il est le chemin
de pèlerinage, qui, à travers toute l'Europe, mène à Santiago de Compostelle (Espagne) où se trouve le
tombeau de Saint-Jacques le Majeur. Mais c'est aussi à partir de ce lieu que les Juifs Séfarades on quitté
l'Espagne durant le règne des Rois Catholiques. Ainsi, il faut toujours donner une interprétation plurielle
des Itinéraires Culturels. Saint- Jacques est le premier itinéraire certifié qui de fait est devenu le porte
drapeau des itinéraires culturels, parce que l'Espagne et le Portugal ont été isolés du reste de l'Europe
pendant un demi-siècle, de fait de leur dictatures respectives. Déclarer la route de Saint-Jacques de
Compostelle Itinéraire Culturel, était aussi le moyen de réactiver la coopération culturelle entre la
presqu'île ibérique et le reste de l'Europe. Cela démontre de nouveau qu'existent plusieurs plans de lecture

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pour chaque itinéraire. Il est important d’expliquer cette dimension aux voyageurs, aux touristes, aux
européens de manière générale, mais surtout aux citoyens résidant sur ou à proximité de ces itinéraires. Il
s'agit pour eux de se réapproprier leur patrimoine identitaire pour qu'ils deviennent les premiers
''ambassadeurs'' de leurs territoires et de leurs histoires.

    2. La Résolution 2010(52)

Critères d'éligibilité des thèmes, par le Conseil de l'Europe, en vue de la certification d'un itinéraire
culturel :
    -   Thématique européenne se déclinant sur au moins trois pays membres du Conseil de l'Europe
    -   Existence d'un réseau porteur : un itinéraire n'est pas porté par un pays, un gouvernement ou un
        ministère, mais plutôt par des porteurs de projet (locaux) faisant partie des territoires concernés.
        Par exemple : des réseaux formés par des villes, des associations, des fédérations d'associations.
        Dans le cas des sites clunisiens, les sites se sont fédérés entre eux.
        La démarche commence à travers la demande du porteur de projet des éléments nécessaires pour
        compléter la candidature. Les États sont ensuite informés, en particulier ceux ayant signé l'accord
        partiel élargi et membres du Conseil de l'Europe. La démarche part du terrain, de la base, pour
        arriver jusqu'au niveau politique.
        Aucune thématique n'est imposée aux porteurs de projet. Même si l'institut des itinéraires culturels
        européens peut souhaiter en voir une développée, il doit attendre qu'elle soit proposée par un
        porteur de projet.
    -   La thématique doit concerner des échanges culturels et étatiques
    -   Le projet doit être pédagogique : au sens scolaire du terme (pour les élèves et les chercheurs),
        mais aussi au sens citoyen : un Itinéraire Culturel, une fois certifié par le Conseil de l'Europe, est
        porteur de toutes les valeurs de ce dernier. L'itinéraire doit les transmettre à son public.
    -   Le thème doit permettre le développement de produits touristiques en partenariat avec des
        opérateurs touristiques, destinés à des publics variés, y compris scolaire (toujours dans un souci
        pédagogique, éducatif).
         Chaque projet doit encourager la recherche et le développement, favoriser la mémoire du
patrimoine européen. Ainsi, chaque itinéraire doit prendre en compte les Chartes, Conventions ou
recommandations d'autres institutions que le Conseil de l'Europe, comme l'ICOMOS ou l'UNESCO,
notamment lorsqu'il s'agit de restaurer des bâtiments, ou que du patrimoine immatériel est concerné. Par
exemple, l'itinéraire culturel des Routes de l'olivier, qui montre l'importance de cette essence tout autour
de la Méditerranée travaille dans le forum du régime méditerranéen, depuis que ce dernier est entré dans
la liste du patrimoine immatériel de l'UNESCO.
         Contribuer au développement d'un tourisme culturel et durable. Il s'agit ici de prendre en compte
la ''base'' des itinéraires, c'est-à-dire les identités locales : faire un projet d'itinéraire culturel, donc un

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projet territorial, entraîne un changement sur les territoires concernés : c'est-à-dire le rapport des habitants
à cet itinéraire. Il est nécessaire d’enraciner le plus profondément possible tout projet d'Itinéraire dans les
communautés locales. Ainsi, une prise de conscience doit se produire chez le porteur de projet même, de
ce patrimoine, afin d'élargir autant que possible sa perception de la thématique proposée. Les populations
vivant sur l'itinéraire culturel doivent prendre conscience de leur identité et de leurs ressources. Il ne faut
pas aboutir à la ''disneyfication'' des territoires, ni à leur réinvention folklorique, mais à une redécouverte
consciente et durable des ressources déjà présentes. Ces acteurs doivent donc réapprendre à lire, à
comprendre les relations entre les différentes parties de l'itinéraire, entre l'itinéraire et ce qu'il y a au-delà
de lui, comprendre comment l'itinéraire a structuré les cultures locales. Les villes thermales, par exemple,
sont à l'origine des loisirs. Cette complexité culturelle est à la base de tout projet culturel, territorial.
          L'Institut essaye d'impliquer activement les médias, de favoriser le dialogue entre les cultures
urbaines et rurales, afin de préparer le terrain pour minimiser les éventuels impacts négatifs que produirait
la certification de l'Itinéraire Culturel, mais aussi pour éviter d'entraîner des flux touristiques de masse. Il
s'agit de donner la possibilité de connaître les territoires marginalisés par le tourisme de masse, ce qui
n'est pas forcément négatif : une fréquentation touristique modérée a parfois permis de maintenir des
caractéristiques revitalisables, redécouvrables de nouveau aujourd'hui à travers un tourisme éthique,
culturel, durable et particulièrement conscient. En effet, un touriste se trouvant sur un produit touristique
négligé par le tourisme de masse se trouve, de fait, plus enclin à connaître les codes culturels du territoire
qu'il va parcourir.
          Il est possible d'ouvrir des possibilités de coopération entre l'Europe et d'autres continents. C'est,
notamment, un moyen de faire connaître la diversité de l'Europe. Entre ici également en jeu la visibilité
de la destination touristique ''Europe''. L'Institut souhaite faciliter la recherche de partenariats touristiques
afin de développer des produits et des outils touristiques culturels et pédagogiques. Lors du Forum de
Colmar 2012, l'Institut a lancé une Charte préconisant une collaboration plus étroite avec l'ICOMOS,
l'UNESCO ou l'OMT sur des problématiques encore peu analysées, comme les impacts touristiques des
Itinéraires. Par exemple, si un voyageur se rend dans une ville appartenant au réseau des voyages de
Mozart, on ne sait s'il s'y rend parce qu'il connaît cet Itinéraire Culturel précis ou non ; et s'il connaîtra cet
itinéraire en repartant de la ville. Cette absence de données doit être comblée dans un souci d'efficacité de
la part de l'institut.
          Les mots clés relatifs aux Itinéraires Culturels sont trouvables dans toute Charte du Conseil de
l'Europe, notamment celui de démocratie participative. Il n'y a pas d'itinéraire s'il n'y a pas de réseau
travaillant démocratiquement. Des membres de l'Institut assistent autant que faire se peut aux assemblées
générales du réseau afin de s'assurer que tous les États concernés par l'Itinéraire Culturel participe de
manière égale aux activités du réseau. D'autres mots clés seraient ceux d'identification, de
réidentification, de redécouverte du patrimoine, de citoyenneté, de connaissance, de réappropriation, de
mémoire, de redécouverte de l'autre.

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                            Carte représentant les Itinéraires Culturels Européens

         Concernant la couverture géographique des itinéraires : on constate une forte concentration des
Itinéraires Culturels dans l'Europe de l'Ouest.
    -   La Via Regia (jaune) traverse toute l'Europe depuis la Galicie ukrainienne jusqu'à la Galice
        espagnole
    -   Les chemins de Saint-Jacques de Compostelle (rouge foncé)
    -   La Via Francigena suit les traces de Sigéric, l'archevêque de Cantorbéry, rentrant de Rome
    -   La Route des Phéniciens, grandes routes maritimes
    -   Les grands territoires comme Les Routes de l'Olivier s'étendant tout autour de la Méditerranée,
        impliquant des pays membres du Conseil de l'Europe mais pas uniquement.
    -   La Route du Fer, en Europe Centrale qui, à l'heure actuelle, a perdu sa certification mais qui
        travaille à la regagner.
    -   Les petits confettis colorés sont des réseaux de villes ou de sites, comme celui des Villes
        Thermales ou des Sites Clunisiens.
         La forme géographique n'est pas qu'une représentation spatiale. Elle implique aussi des
problèmes de gouvernance, de visibilité.
         Créer un réseau représentatif pour un itinéraire, c’est donc, par exemple, constituer un réseau de
communes, comme c’est le cas pour la Via Francigena gérée par une association de communes
européennes. Le réseau de la Via Regia possède, quant à lui un réseau de villes ayant signé des accords de
collaboration. Le réseau peut aussi être une fédération, comme dans le cas des sites clunisiens, des Routes
de l'Olivier. Pour ce dernier cas, les membres du réseau sont des Chambres de commerce, des musées, des
écomusées ayant signé une Convention, et étant membres d'une fondation afin de mettre en avant des

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activités communes de coopération sur la thématique de l'olivier.

         Chaque projet d'itinéraire est territorial. Il doit donc se fonder sur un territoire précis, sans
réinventer une identité n'ayant jamais existé, mais en recherchant les ressources endogènes. Tout ce qui
est déjà présent, peut être oublié ou bien n'étant plus vu, doit être pris en compte, en faisant le lien entre
une tradition, l'histoire, et la culture contemporaine des lieux, dans un souci constant de dynamique. Il
faut protéger les lieux, les bâtiments, mais également comprendre quel est le rapport des habitants actuels
avec ce patrimoine. À travers ces ressources, on peut commencer à faire un projet d'itinéraire à l'échelle
locale puis européenne. Chaque partie de l'itinéraire doit refléter la culture de chaque territoire mais en
même temps se mettre en liaison avec les autres points repères de l'itinéraire afin de donner une lecture
véritablement européenne à chaque lieu de l'itinéraire.
         Quel est le rôle des Itinéraires Culturels du Conseil de l'Europe vis-à-vis des autres organisations,
de la compréhension de l'Histoire, l'Europe, des territoires européens ? Comment les Itinéraires Culturels
peuvent les aider ? À travers des coopérations culturelles, en prenant en compte les Chartes
fondamentales pour chaque thématique. En effet, chaque thématique peut mettre en œuvre certains
principes plutôt que d'autres. Par exemple, pour les Routes de l'Olivier, le paysage est l'une des
préoccupations principales, notamment son interprétation, sa perception, par les populations locales. Il ne
s'agit pas de ''maquiller'' le paysage mais aussi comprendre comment la PAC l'a impacté, parfois
négativement, notamment pour des paysages typiques.
         D’autres sites, itinéraires, comme celui de l’art rupestre par exemple, ont un souci de protection
des lieux. Les grottes ornées sont très fragiles; une étude de restauration et parfois de reproduction
pédagogique sont mises en place.
Dans ce contexte, une problématique autour de l’authenticité émerge : Qu’est ce que l’authenticité ? Que
doit-on visiter ? Comment peut-on réaliser des actions de médiation autour d’un patrimoine fragile ?
Toutes ces questions peuvent être appliquées à l’itinéraire rupestre. Les itinéraires sont aussi des outils de

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narration. Chaque itinéraire développe une thématique, pouvant être une clé de lecture du patrimoine
européen, du patrimoine matériel comme immatériel mais aussi des croyances. Les Routes de l’Olivier
sont un bon exemple car elles sont impliquées dans le forum pour le régime méditerranéen. Il faut noter
que le programme est né d’un souci de liaison entre les différents pays européens.

    3. Une Nouvelle politique pour la Destination Europe

         Il y a deux ans, la commission européenne, suite au traité de Lisbonne, a reçu la charge des
politiques touristiques qui, jusqu’ici, étaient déléguées à chaque Etat, dans lesquels ces politiques avaient
un fonctionnement différents : le tourisme pouvait dépendre d’un ministère du tourisme ou des régions…
         D’après la communication de la Commission Européenne au parlement, la commission prend en
compte différentes expériences de coopération déjà mises en place avec le Conseil de l’Europe ; entre
autres des initiatives transfrontalières telles que la via Francigena ou Saint-Jacques de Compostelle, qui
sont considérées par la Commission comme des moyens touristiques pour donner une visibilité cohérente
à la destination Europe. En effet, les itinéraires du Conseil de l’Europe se fondent sur les identités des
différentes régions d’Europe. Ce sont des projets profondément enracinés dans le territoire et pour cela ils
peuvent donner aux voyageurs venant d’autres continents une nouvelle idée de l’Europe qui n’est plus
l’Europe d’Athènes, Paris, Rome, Venise…mais l’Europe de thématiques plus larges, qui peuvent être
connues grâce à de tels projets.

         On imagine bien ce qu’on entend par tourisme de masse : arriver par exemple à l’Acropole,
prendre des photos, et repartir sans comprendre ce que représente un tel site aujourd’hui. Il s’agit là d’une
caricature mais c’est ce contre quoi la Commission cherche à trouver des outils qui rendent la destination
Europe plus cohérente. Mission qui a aussi pour objectif d’obtenir des retombées économiques qui se
diffusent sur tout le territoire européen et pas seulement sur quelques sites iconiques. Le tourisme est un
moyen pour redynamiser l’économie des régions. Il faut savoir que 90% des régions concernées par ces
itinéraires sont des régions rurales (avec tout ce que cela implique). C’est pourquoi depuis 2010 les

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itinéraires culturels sont au cœur des réflexions de la Commission Européenne. Il faut noter que lors de la
Journée Européenne du Tourisme (le 27 septembre), une journée entière a été consacrée aux itinéraires
culturels les présentant comme d'excellents exemples de mise en place de politiques touristiques
cohérentes et durables.
             L’Institut Européen des Itinéraires Culturels coopère et est membre fondateur de Network of
European Region for a Sustainable and Competitive Tourism, un réseau des régions européennes pour la
mise en place de politiques touristiques durables. Le but de ce partenariat entre NECSTour et l’Institut est
de comprendre ce que les régions européennes connaissent des Itinéraires Culturels, notamment quand
ces derniers font parti d’un plan d’aménagement territorial. Un questionnaire, en phase de test, a été mis
en place. Avec cette enquête l’Institut et le Conseil de l’Europe souhaitent sensibiliser les acteurs
régionaux à ces thématiques d’itinéraires culturels afin orienter vers un aménagement du territoire en
accord avec des politiques de développement territorial durable. Dans un second temps l’objectif est de
sensibiliser les acteurs des itinéraires eux-mêmes afin qu’ils travaillent avec les régions. Cette
collaboration à pour objectif de déléguer les projets d’urbanisme et d’aménagement du territoire pour
accentuer des politiques visant à mettre en place sur chaque territoire les itinéraires plus visibles. Ainsi, il
est possible de distinguer les différentes phases de coopération entre le Conseil de l’Europe et la
Commission Européenne en direction des Itinéraires Culturels et de la destination Europe depuis 2010.
             En 2010, à vu le jour, un premier programme entre le Conseil de l’Europe et la Commission
Européenne pour comprendre et identifier les impacts des Itinéraires Culturels sur les petites et moyennes
entreprises en Europe1. Une conférence organisée par le réseau NECSTour a succédé à cette réflexion. La
conférence portait sur le thème suivant : « tourisme et paysage ». Une partie était consacrée aux
itinéraires et la lecture des paysages traversés par les voyageurs en Europe pouvant dévoiler des facettes
inconnue de l’Europe. Toujours en 2010, l’accord « parcelles élargies » est mis en place pour les
itinéraires culturels. À Florence, la réunion des régions NECSTour a été dédiée aux Itinéraires Culturels
du Conseil de l’Europe.
             Depuis 2011, une décision du Parlement Européen réserve une ligne budgétaire pour les réseaux
transfrontaliers. Par ce biais la Commission Européenne a pu lancer des appels à projet pour des
« produits touristiques transfrontaliers » pouvant bénéficier aux Itinéraires Culturels. Il s’agit là d’une
infime partie des actions menées autour des Itinéraires Culturels car la majeure partie concerne la
Coopération Culturelle. En effet, la Commission Européen réalise de nombreux appels à projets tel que le
« projet culture » ou le « projet interregia » qui sont des projets qui couvrent d’autres actions plus ciblées.
             Un deuxième programme, lancé dans le cadre de l’université d’été des itinéraires a donné
naissance à un « Vademecum pour la gestion des Itinéraires Culturels du Conseil de l’Europe » (en cours
de finalisation). La Commission ayant acquis depuis deux ans la compétence « Tourisme », elle
concrétise une démarche datant de quelques années visant à développer des actions tournées vers le

1
    Etude disponible sur le site du Conseil de l’Europe

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Les Conférences de l’IREST – Cycle 2012 – 2013

tourisme et les itinéraires culturels. Le projet à pour objectif de mettre en place des produits touristiques
en accord avec le tourisme durable.
         Cinq étapes sont fondamentales pour concevoir un Itinéraire Cultuel :
    ●   La définition de la thématique,
    ●   L’identification des objets qui vont faire partie de cet itinéraire,
    ●   La signalisation et la mise en sécurité,
    ●   La cohabitation d’une activité culturelle et pédagogique,
    ●   La question de la visibilité et de la mise en tourisme qui demande qu’on facilite l’accès à
        l’information, qu’on facilite aussi le voyage donc qu’on facilite la connaissance des itinéraires.
Ces cinq étapes pourront être observées dans plusieurs exemples concrets d’Itinéraires Culturels.

    4. Itinéraires Culturels et Tourisme Culturel : quelques exemples

                                   Plan des routes de Saint-Jacques de Compostelle
         Le premier itinéraire présenté fut Le Chemin de Saint-Jacques de Compostelle.
C'est le premier itinéraire certifié qui a développé au cours des années un réseau. Ce réseau est en train
de se formaliser car le Conseil demande, pour en être porteur, que celui-ci soit aussi constitué d’un point
de vue juridique. Dans le cas de cet itinéraire, la certification a été donnée alors qu’il n’y avait pas de
réseau constitué d'où la complexité de cette formalisation.
         En ce moment, une fédération est en train de faire adhérer les villes entre le Puy en Velay et la
Galice (avec des partenaires en Belgique) afin de constituer une association de collectivités locales et de
villes autour du chemin de Saint-Jacques.

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                                                                             relais Europa Compostela 2010

         Saint-Jacques de Compostelle a connu un développement d’activités sans précédent depuis la
certification « Itinéraire Culturel ». On peut citer l'exemple du relais « Europa Compostela 2010 », qui a
été organisé dans toute l’Europe en reliant d’autres itinéraires culturels. Des marcheurs partent de
différents points de l’Europe. Les représentants des différents chemins de Saint-Jacques se sont rencontrés
à Strasbourg pendant une manifestation symbolique au Conseil de l’Europe.
         On voit ici un niveau d’impact : la première édition en 2004 s'est déroulée sur 14 000 km de
parcours, la seconde a vu 20 000 km parcourus avec des marcheurs partis de différents endroits en
Europe. Cette seconde édition a été importante parce que les autres itinéraires de pèlerinage, fondés sur
des voies historiques, y ont participé .Cela a, par conséquent, généré une activité du réseau du chemin de
Saint-Jacques et l'a relié aux autres itinéraires.

                                           Itinéraire de la Via Francigena
         La Via Francigena, qui relie Rome à Canterbury, comprend de nombreux croisements avec le

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Chemin de Saint-Jacques. Cet itinéraire est avant tout une association de villes dont font aussi partie des
régions et des départements. Il y a un collège au sein de l’association qui s’appelle « les amis de
l’association » dans lequel font partie des associations qui prennent soin de ce chemin sur le terrain.

                                     Exemples de balises de la Via Francigena
         En ce qui concerne chaque action, nous pouvons souligner le fait que, même si elles sont menées
à une échelle locale, elles ont un impact au niveau européen. Ainsi, plusieurs questions se posent comme
celle du plan d'aménagement, du plan de gestion des itinéraires. Pour la Via Francigena, on peut observer
l’initiative du gouvernement italien qui a investit pour un balisage cohérent de la route entre Rome et la
frontière suisse. La région de la Toscane a mis en place un master plan sur la Via Francigena. Ce master
plan a identifié les points faibles de la Via Francigena en Toscane et tous les endroits où la route n'était
pas sécurisée ont subi des interventions ponctuelles financées par la région pour la rendre praticable et
accessible. Tout cela rappelle le plan Jacobéo mis en place par la région Galice depuis la certification de
l’itinéraire de Saint-Jacques. En effet, cette région possède un bureau dédié à Saint Jacques de
Compostelle pour gérer toutes les actions possibles vis à vis de ce chemin. Par exemple, ce plan s'occupe
de l'aménagement du chemin ou encore de la gestion des hébergements mis à disposition des pèlerins et
des voyageurs. Il y a bien toute une économie, toute une démarche, au sein de la région Galice qui se
fonde sur l’itinéraire culturel. C'est un exemple presque unique en Europe.

              Exemples de communication autour de la Via del Gusto et de la Via Francigena
         Au-delà de sa thématique, chaque itinéraire est porteur d'autres thématiques. La Via Francigena,
par exemple, contient « la Via del gusto » (le chemin des saveurs) où sont mis en valeur les produits du
terroir certifiés. Cela permet de présenter aux touristes les produits typiques protégés des territoires. Par

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conséquent, l'itinéraire a aussi, comme nous le montre cet exemple, des finalités de connaissance du
territoire et de son authenticité. Ces produits permettent également de mieux comprendre l'histoire de
chaque région traversée. En 2012, grâce à un appel de projet de la Commission Européenne, la Via
Francigena doit travailler avec d'autres itinéraires dont celui de Saint Jacques, Saint Michel, Saint-Martin
ou encore Saint- Olaf pour un projet collectif qui concerne la promotion et la découverte de différentes
activités comme des festivals traditionnels ou encore l'art contemporain. Ce projet, d'abord essayé sur le
chemin italien, a pris une ampleur européenne.

                           Plan de la Transromanica qui a reçu le prix CTW Award

         Un autre exemple d'itinéraire qui a pu développer une stratégie de cross-marketing (Cross-
culture: cross-marketing strategies for culture and tourism) est celui de la Transromanica qui concerne le
patrimoine roman des régions européennes. Pour cet itinéraire, différents partenariats ont été effectués
avec différents secteurs pour permettre l'élaboration de thématiques multiples (architecture, art,
patrimoine culinaire). Grâce à ce projet, l'itinéraire a reçu le prix chinois « Chinese tourists welcoming
award » ce qui prouve la connaissance de l'itinéraire au-delà de l'Europe et permet une visibilité du
tourisme culturel et durable de l'Europe au niveau international. « Summer school » est une activité
organisée par Transromanica sur les symboles et l'architecture ou encore sur le patrimoine culinaire des
différentes régions qui font parties de l'itinéraire.

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                                           Plan des Route de l’Olivier
         Les Routes de l'Olivier sont un itinéraire basé en Grèce et qui est soutenu par un réseau de
chambre de commerce et d’écomusées. C'est un itinéraire de découverte et de dialogue interculturel
réalisé en 1988. L'itinéraire se poursuit autour de la Méditerranée mais rejoint également des villes telles
que Prague, qui n'est pourtant pas une ville reconnue pour ses oliviers. La promotion de l’olivier dans des
villes qui n'ont pas cette culture permet de montrer l'impact que la culture de l’olivier a provoqué dans
les différents pays de l'Europe, de retracer son histoire et de démontrer son importance à l'échelle
européenne, à travers par exemple la consommation très diversifiée de l'olive. Une exposition itinérante a
été mise en place. Son but est pédagogique, il permet de faire comprendre aux différentes collectivités
locales pourquoi l'olivier a cette importance en Europe. Il permet également de mieux connaître l'histoire
de l’olivier ou encore la mythologie qui lui est liée. De plus, diverses activités sont proposées au fil du
parcours. Certaines sont destinées aux enfants et s'inspirent de la philosophie des écomusées. Elles
travaillent avec les collectivités locales sur les biens de leur territoires et proposent des concours comme
« Dessines moi un olivier! ». Nous savons également que l'olivier a de nombreux produits dérivés (huile,
savon...). Ainsi, chaque itinéraire peut être interprété selon des clefs de lecture différentes.
         Les itinéraires sont donc un des volets permettant le développement économique, social et
touristique des territoires concernés. Il y a toutefois un travail important à faire pour concilier l'aspect
culturel et citoyen des itinéraires avec la visibilité touristique. Les itinéraires permettent aussi de faire
prendre conscience aux populations des territoires de l'importance de leur patrimoine afin de ne pas
inventer des produits touristiques sans rapport avec le lieu et la réalité locale. Enfin, ces itinéraires
permettent aussi aux      populations locales d'être toujours impliquées et bénéficiaires des retombées
culturelles et économiques.

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                                                  Questions

-Question Damien Chartier : « Voyez-vous naître des conflits entre des communes, ou plus largement des
   territoires traversés par ces itinéraires culturels ? Si oui, devez-vous gérer ces conflits ? »
-Réponse Eleonora Berti : Oui il existe des conflits. Par exemple, il y a 10 ans la via Francigena était peu
   connue, mais aujourd’hui cet itinéraire est bien plus réputé. Pour ce cas, il existe effectivement un écart,
   car certaines communes qui ne sont pas historiquement concernées par la via Francigena demandent à
   être incluses à ce circuit culturel. Ce chemin est donc tiré d’un côté et de l’autre. Dans ce cas ce sont les
   réseaux en charge de chaque itinéraire qui en sont responsables. C’est pourquoi on demande à tout
   itinéraire de posséder un comité scientifique car si jamais une commune demande à être intégrée à
   l’itinéraire, elle devra être certifiée par le comité. Au niveau local, il est aussi intéressant de développer
   à partir de l’itinéraire reconnu par le Conseil de l’Europe un réseau de chemins historiques, qui sont de
   nouveaux itinéraires locaux. Cette question de vouloir s’inscrire dans un itinéraire, surtout dans le cas
   des chemins continus et linéaires, est fréquente. Il est de plus en plus demandé aux itinéraires d’établir
   des critères stricts pour admettre des communes ou des territoires dans le réseau préalablement certifié.
   C’est pourquoi il faut absolument suivre des critères historiques ou artistiques cohérents avec la
   thématique à développer afin de justifier la réponse à donner à ces communes souhaitant intégrer
   l’itinéraire culturel.
-Question : « Qui finance l’Institut Européen des Itinéraires Culturels ? Les Etats membres de l’Union
   Européenne ? Les régions ? »
-Réponse : L’Institut est surtout financé par le grand duché du Luxembourg. C’est justement ce même
   duché qui assure le fonctionnement de l’Institut, notamment en accueillant ses locaux dans le pays. Par
   contre, chaque itinéraire se finance différemment puisque chaque itinéraire a une gouvernance différente
   selon la thématique, selon l’ampleur, etc. Chaque réseau a une manière différente de fonctionner et des
   financements divers. Par exemple, les associations de villes demandent souvent une cotisation des villes
   faisant parti du réseau : soit une cotisation réelle, soit une cotisation en nature (en travail). En effet,
   selon la ville concernée, certains habitants travaillent à mi-temps sur l’itinéraire. Donc cela dépend
   notamment de chaque réseau.
-Question M. Tiard : « N’y a-t-il pas des itinéraires culturels s’étant développés sur des territoires où il y a
   eu des conflits plus ou moins violents et récents (Exemple : Ex-Yougoslavie, Turquie) Y a-t-il des
   itinéraires qui amènent à des échanges parmi des populations anciennement en guerre ou en conflit ? »
-Réponse : Premièrement, nous pouvons dire que le programme est né dans le but de mettre en relation les
   pays européens à une période où régnait encore la Guerre Froide. Le but était d’établir des coopérations
   avant même que cette barrière (le rideau de fer, les divisions européennes) soit achevée. La via Regia est
   d’ailleurs un bon exemple de mise en relation de l’Est et l’Ouest de l’Europe. Elle est aujourd’hui une
   large voie, qui fut notamment utilisée au moment de la réunification entre l’Est et l’Ouest de
   l’Allemagne pour reconstituer des liaisons réelles entre les deux parties du pays. Donc ce ne sont pas

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   seulement des coopérations culturelles, mais il s’agit d’un échange réel. C’est vrai aussi pour la Turquie,
   qui n’est pas membre de l’Union Européenne mais qui est membre du Conseil de l’Europe : on a de plus
   en plus d’échanges avec ce pays concernant des thématiques d’itinéraires. Par exemple, la route des
   villes céramiques le concerne. L’Azerbaïdjan est aussi impliqué dans l’itinéraire Inter-Vitis (les chemins
   de la vigne). Donc il est vrai que la grande concentration des itinéraires culturels concerne surtout
   l’Europe de l’Ouest, mais il y a une nécessité de reprendre ce volet de coopération culturelle avec les
   autres pays membres de l’Europe qui étaient à la base du programme, et qu’il faudrait parfois mettre en
   avant. C’est pour cette raison également que l’Institut coopère depuis des années avec la Lituanie : il
   existe des projets de coopération qui sont nés autour de la thématique des parcs et jardins, en particulier
   les parcs d’Edouard André, un célèbre architecte paysagiste qui a beaucoup travaillé en Lituanie. C’est
   dans ce souci de dialogue que l’Institut a travaillé et travaille encore. C’est pour cela que Pénélope
   Denu, directrice de l’Institut, se rendra prochainement en Lituanie afin d’expliquer aux porteurs de
   projets comment mettre en place des itinéraires culturels, comment développer des coopérations avec le
   reste de l’Europe, sur quelles thématiques, etc. De plus, il sera tenté à l’avenir de trouver des
   thématiques présentes en Lituanie afin que les villes lituaniennes puissent intégrer des réseaux déjà
   existants, pour faciliter cette mise en œuvre d’itinéraires et cette coopération avec d’autres pays qui pour
   l’instant sont peu impliqués.
-Question : « Est-ce que la question des transports compte dans la mise en place d’un itinéraire ? »
-Réponse : Cela dépend des itinéraires. Certains itinéraires (Saint-Jacques, via Francigena, chemins de
   Saint-Olav) prévoient une marche, et d’autres itinéraires (projet d’itinéraire : la route de Saint-Vincent)
   prévoient différents moyens de transports comme des trains anciens, des canoës, des ânes qui peuvent
   faire partie du patrimoine. Donc la question du transport est bien présente. Par exemple, dans le cas des
   voies de Mozart, différentes villes sont impliquées mais probablement personne ne parcours cet
   itinéraire en prenant l’avion d’une ville à l’autre. Ce sont plutôt des itinéraires où on arrive par hasard,
   sachant qu’il y a des activités puisque les voies de Mozart organisent beaucoup d’activités en réseaux
   (festivals avec de jeunes interprètes, de jeunes compositeurs). Mais ce n’est pas un itinéraire physique,
   donc le souci du transport est assez différent pour ce qui concerne les itinéraires fonctionnant avec un
   réseau de villes. Pour le cas de l’itinéraire de la route du fer dans les Pyrénées, là aussi plusieurs sites
   sont reliés entre eux par des trajets en voiture, mais après ce sont des chemins qui traversent des
   territoires plus petits. En général, quand il y a des chemins continus, l’Institut essaye surtout de travailler
   sur l’accessibilité continue. Cependant, en ce qui concerne les itinéraires qui sont des sites en réseaux, le
   problème n’est pas le même, puisqu’ il n’y a pas de chemin physique, il est difficile de planifier un
   transport qui relie tous les sites. Donc au niveau local on peut travailler sur cette question de viabilité
   continue, mais à l’échelle européenne cela devient plus délicat.
-Question Marion Renault : « L’Institut Européen des Itinéraires Culturels travaille-t-il en lien avec le
   label patrimoine européen ? »

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