" Les médicaments, un luxe ? " - INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE PRESENTATION - Unil

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L’industrie pharmaceutique                                         Economie nationale (02/03)

            INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE
                   PRESENTATION

                        Cours d’Economie Nationale – Professeur J-C Lambelet

                  « Les médicaments, un luxe ? »

                                                     Réalisé par

                                                   Zeggani Zahra
                                                  Sörensen Anouk
                                                Augsburger Dominique

http://www.hec.unil.ch/jlambelet/econat4.html

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1. Introduction

Nous avons délibérément choisi de traiter dans notre rapport principalement de la fixation
des prix dans les pays industrialisés étant donné que ceux-ci représente le 80% des ventes
de produits pharmaceutiques dans le monde. Cependant pour notre présentation, nous
avons décidé de traiter de la problématique des ventes des médicaments dans les pays en
voie de développement.

2. Particularités des marchés des produits pharmaceutiques dans les PVD

Les PVD représentent environ le 75% de la population mondiale pourtant ces marchés ne
consomment que le 12 % de la production totale de médicaments : 7% en Amérique Latine,
4% en Asie (excepté Japon) et enfin 1% en Afrique. Alors que le 80 % des ventes de
médicaments se font principalement dans les pays industrialisés : en Europe, en Amérique
du Nord et au Japon qui ne représentent cependant que le 15% de la population mondiale.

                                              Source : Médecins sans frontières, institut national d’étude
                                              démographique, 1999

En terme de chiffre d’affaires, en 2001, le marché pharmaceutique mondial est évalué à 406
milliards de dollars. Pourtant le chiffre d’affaires réalisé dans les PVD ne se monte qu’à 48.7
milliards de dollars.

Nous remarquons donc que les marchés des PVD, malgré qu’ils représentent les ¾ de la
population mondiale, les entreprises pharmaceutiques réalisent sur ces marchés moins du
1/6 de leurs chiffres d’affaires total. La faible importance des marchés des PVD ne provient
pas d’un manque de demande de médicaments de leur part au contraire la demande de
médicaments dans les PVD est très importante étant donné l’état précaire de santé de ces

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populations. A titre indicatif, il y a 25 millions de personnes atteintes du SIDA en Afrique ce
qui équivaut au 65% de la totalité des personnes atteintes dans le monde. Actuellement, la
malaria touche plus 400 millions de personnes à travers le monde dont le 90 % se trouve en
Afrique. Le bas niveau de consommation de médicaments s’explique par le fait que ces pays
rencontrent des difficultés financières pour les acquérir.

3. Industrie pharmaceutique face à ces marchés

Bien que la demande potentielle de médicaments dans les PVD soit très importante, elle
n’est pas solvable. C’est pourquoi, les entreprises pharmaceutiques ne portent que peu
d’intérêt à ces marchés. En effet, l’industrie pharmaceutique est composée d’entreprises
privées. Et comme toute entreprise privée son but premier est la recherche du profit ceci afin
d’assurer sa pérennité. De ce fait, elle se concentre sur les marchés rentables. De plus, la
forte concurrence sur ce marché oblige les entreprises pharmaceutiques à assurer un haut
degré de rentabilité afin d’attirer et de conserver les actionnaires et échapper à une
absorption. Pour assurer cette rentabilité, les entreprises pharmaceutiques doivent lancer
simultanément chaque année sur des marchés rentables, les USA, l’Europe et le Japon deux
ou trois molécules susceptibles de dépasser un milliards de dollars de ventes. Ces impératifs
de rentabilité induisent que les entreprises pharmaceutiques se concentrent sur des marchés
voir des créneaux de marché très rentables. Tout cela explique son désintérêt pour les
marchés des PVD.

Ce désintérêt pour ces marchés a deux principales conséquences :

a. Les entreprises qui possèdent des médicaments susceptibles de soigner des maladies
présentes dans les PVD ne les exportent pas sur ces marchés car le prix auquel elles
devraient vendre ces médicaments serait trop bas. Donc les entreprises pharmaceutiques
n’exportent que peu de médicaments sur ces marchés pour cause de trop faible rentabilité.

b. Les entreprises pharmaceutiques n’effectuent que peu de recherche et de développement
pour les maladies qui ne concernent que les PVD. Selon l’OMS, sur 1’233 médicaments de
synthèse mis sur le marché entre 1975 et 1997, 11 seulement sont destinés à lutter contre
les maladies tropicales, parmi ces derniers, plus de la moitié ont été élaborés à l’origine pour
un usage vétérinaire. Actuellement, le fléau de la malaria est principalement dû au fait qu’il
existe un médicament contre celle-ci qui est de moins en moins efficace. Ce qui a pour
conséquence de ne plus guérir les malades et favorise la propagation de cette maladie.
Malgré l’urgence de trouver un nouveau médicament pour combattre ce fléau, les
entreprises pharmaceutiques n’effectuent que peu de R&D dans ce domaine étant donné
qu’elles n’ont aucun intérêt économique.

En effet, seul le 0.2% des travaux de recherche est consacré à la malaria. A titre illustratif, en
1999, alors que les dépenses globales investies dans la recherche sur la malaria
représentaient 65 dollars par victime, elles s'élevaient à 3’’274 dollars dans celui du sida.
Typiquement la malaria est une maladie qui ne touche que des personnes insolvables
(400 millions de personnes) dans les PVD alors que le SIDA concerne tout aussi bien les
pays industrialisés que les pays en voie de développement.

Actuellement, la tuberculose, une maladie que l'on croyait disparue, revient plus virulente
que jamais. Les anciens médicaments ne sont plus toujours efficaces car il existe de plus en
plus de bacilles résistants, tandis que les nouveaux remèdes seraient hors de prix. Ainsi,
aucune recherche sérieuse n'est menée sur un vaccin apté à remplacer l’ancien médicament
alors que l'on compte 8 millions de personnes supplémentaires contaminées chaque année.
Parmi elles, le nombre de patients solvables est estimé à 400’000. Ce qui est très en
dessous du seuil requis pour lancer un investissement.

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En effet, pour qu'un médicament soit commercialisé, il faut que deux conditions soient
remplies. Le marché doit être solvable et d’une certaine taille. Si ces deux conditions sont
remplies, les entreprises pharmaceutiques s’intéressent à ce marché sinon elles n’en jugent
pas l’intérêt pour cause de manque de rentabilité.

Selon un magasine américain, The nation: «un homme riche, vieux, gros souffrant
d’impuissance sexuelle compte plus que 400 millions de personnes menacées part la
malaria». Sans jugement éthique, il s’agit d’une personne solvable face à 400 millions de
personnes non solvables. Cette citation montre bien la tendance actuelle des entreprises
pharmaceutique à axer leurs R&D sur des créneaux de marché prometteurs destinés aux
besoins des personnes solvables que d’essayer de découvrir des remèdes pour des
maladies mortelles qui ne concernent que les PVD.

4. Conséquences du manque d’accessibilité des médicaments dans les PVD

Des millions de personnes meurent chaque année dû au manque de médicaments:

8’000 personnes meurent chaque jour du SIDA en Afrique
 104 enfants âgés de moins de 5 ans meurt chaque heure de la malaria en Afrique
    1 personne meurt toutes les dix secondes de la tuberculose dans les PVD

Nous constatons en déséquilibre humanitaire entre les pays industrialisés et les PVD. En
effet, dans les pays industrialisées, les médicaments essentiels sont accessibles à presque
tous et de plus en plus de médicaments destinés à l’amélioration du bien-être (ex :Viagra,
anti-cellulite,…) voient le jour. Alors que dans les PVD, les médicaments essentiels ne sont
souvent pas accessibles à la population.

Comme le constate l'Organisation mondiale de la santé: « Plus d'un milliard de personnes
vont aborder le 21e siècle sans avoir profité de la révolution sanitaire ».

5. Renforcement du déséquilibre humanitaire entre les pays industrialisés et
les PVD

Les PVD n’ont clairement pas les moyens financiers de se fournir en médicaments en les
important depuis les principaux pays producteurs de produits pharmaceutiques qui sont les
pays industrialisés car les entreprises pharmaceutiques pratiquent des prix trop élevés pour
ces pays. L’alternative pour ces pays est qu’ils produisent eux-mêmes les médicaments ou
qu’ils s’approvisionnent auprès d’autres PVD ayant une infrastructure permettant la
production de médicaments comme l’Inde, le Brésil et la Chine qui fabriquent actuellement
des médicaments dans leur pays à des prix très bas ceci dans le but d’approvisionner leur
population voir d’autres marchés.

Par exemple, la firme pharmaceutique Indienne « Cipla » peut actuellement produire une
trithérapie pour moins de 1$ pour jour, soit 40 fois moins que les grandes entreprises
pharmaceutiques. En effet, d’après la loi indienne les brevets ne couvrent que les procédés
de fabrication et non les produits eux-mêmes. Les laboratoires indiens peuvent donc en
toute légalité commercialiser des copies à bas prix de médicaments même si ceux-ci sont
encore sous l’effet d’un brevet déposé en Inde par les grandes entreprises pharmaceutiques.
Cette société indienne est considérée comme l’ennemi numéro 1 des géants de l’industrie
pharmaceutique.

Les entreprises pharmaceutiques s’inquiètent de ces nouveaux producteurs de médicaments
établit dans les PVD. Elles souhaitent interdire ces pratiques en argumentant qu’elles

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investissent des montants colossaux dans la R&D et que leur seul moyen de rentabiliser ces
investissements est d’assurer la protection de la propriété intellectuelle au niveau mondial.

C’est pourquoi, dans le cadre de l’OMC , une grande pression a été exercée par les
gouvernements qui protégent leur industrie pharmaceutique pour qu’un accord concernant la
propriété intellectuelle soit instauré.

En effet, il faut savoir qu’avant l’ADPIC (Aspects des Droits de Propriété Intellectuelle qui
touchent au Commerce), signé à la fin de l’Uruguay Round, en 1995, chaque pays était libre
de décider de sa législation sur les brevets en matière de médicaments. Dans certains pays,
le brevet n’était pas applicable qu’à certains médicaments, dans d’autres sa durée était
limitée à 5 ou 10 ans et ailleurs, il n’y avait pas de législation du tout dans ce domaine. Avec
l’ADPIC, rédigé sous la pression de l’industrie pharmaceutique et imposé par les
gouvernements des pays industrialisés, tous les pays membres de l’OMC sont obligés
d’adopter une législation imposant un brevet sur tous les médicaments pour une durée de 20
ans.

L'accord sur les ADPIC dispose que des brevets doivent pouvoir être obtenus dans les pays
membres pour toute invention, de produit ou de procédé, dans tous les domaines
technologiques sans discrimination, à condition de satisfaire aux critères habituels de
nouveauté, d'inventivité et d'applicabilité industrielle. Il prévoit également que des brevets
peuvent être obtenus et qu'il est possible de jouir de droits de brevet sans discrimination
quant au lieu d'origine de l'invention et au fait que les produits sont importés ou sont d'origine
nationale (article 27.1).

Ainsi, ces brevets garantissent les droits de propriété des grandes sociétés
pharmaceutiques, au niveau mondial. Pour les défenseurs de la santé publique, la
brevetabilité risque fort de devenir synonyme de la mainmise d’intérêts privés sur le secteur
et de l’indifférence morale.

Cet accord est au cœur des débats sur l’accès aux médicam ents essentiels. En effet,
l’accord lui-même est ambigu quant à sa valeur contraignante. Les 144 pays, adhérents à
l’OMC sont tenus de mettre en place d’ici à 2006 un droit de la propriété intellectuelle qui
garantira un monopole de 20 ans aux créateurs de nouveaux médicaments sur la base des
produits et des procédés brevetés. Toutefois, plusieurs articles du texte offrent des
échappatoires: il est possible d’obtenir une licence pour une version locale d’un médicament
breveté ou d’importer des médicaments achetés au meilleur prix à un fournisseur étranger
en cas d’urgence sanitaire selon l’article 31 des ADPIC.

Grâce à ces échappatoires, l'Afrique du Sud s'est dotée en 1997 d'une loi flexible sur les
médicaments , donnant au gouvernement au moins deux voies pour envisager un accès
abordable aux médicaments. La première par les « importations parallèles » : si des
médicaments de marque peuvent être obtenus moins cher à l'étranger (par exemple parce
que les lois sur les brevets y sont plus souples), l'Etat peut les importer contre l'avis de la
firme qui a déposé le brevet en Afrique du Sud. La seconde, c'est la licence obligatoire : si le
gouvernement estime qu’un médicament de marque est trop coûteux, il peut donner une
licence à une firme indigène pour le produire moins cher, ou bien il peut importer une version
générique de ce médicament à prix plus bas depuis un autre pays.

Face à cette loi, en 1998, 39 firmes pharmaceutiques, dont les filiales sud-africaines de
Novartis et Roche ont attaqué cette nouvelle loi devant l’OMC sur la base d’un litige
d’interprétation de l’article 31 des ADPIC. L'enjeu est considérable. D'un côté, le système du
brevet est essentiel à l'industrie pharmaceutique pour récupérer les sommes considérables
de la recherche. De l'autre, une partie de la population d'un pays meurt faute d'accès aux

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traitements. L'OMC sur les « aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au
commerce » a pour but de soumettre tous les pays au système des brevets. Toutefois,
l’OMC accorde des exceptions à ce principe de base avec une provision (art.31) qui permet
la licence obligatoire en cas d'urgence. Le litige se situe dans l’interprétation de cet article
car cette provision a un caractère ambigu. Comment déterminer le cas d’urgence ?

En 2001 débute le procès médiatisé. Le scandale provoqué par la plainte des 39 firmes
pharmaceutiques contre l’Afrique du Sud a suscité une émotion considérable dans le monde
entier. Informées par les ONG, les opinions publiques ont très massivement exprimé leur
refus de voir le profit passer avant la santé. L’opinion publique est choquée, d’une part, des
marges bénéficiaires des fabricants de médicaments. Effectivement quand le prix annuel
d’un même traitement du SIDA peut varier de 400 à 12’000 dollars, l’opinion dispose d’une
indication claire quand aux marges pratiquées par les grandes entreprises pharmaceutiques.
Et d’autre part, l’argument d’amortissement des coûts de R&D de l’industrie pharmaceutique
pour justifier les brevets ne tient plus car le grand public apprend que seul le 0,2 % des
travaux de recherche sont consacrés à combattre les infections respiratoires, la malaria et la
tuberculose, à l’origine de 18% des décès chaque année (soit 17 millions de personnes dont
90% vivent dans des pays en développement).

En avril 2001, sous la pression de l'opinion publique internationale, les compagnies
pharmaceutiques retirent leur plainte contre le gouvernement sud africain.

En novembre 2001, l’OMC se réunit à Doha, Qatar. Les 144 pays membres de l'OMC ont
signé un accord, la déclaration ministérielle sur l'ADPIC et la santé publique (appelée aussi
déclaration de Doha) reconnaissant le droit des pays a passé outre les brevets des
compagnies pharmaceutiques afin de promouvoir la santé publique et d'accroître l'accès aux
médicaments pour tous . La réglementation de l'OMC permet, par le recours aux licences
obligatoires, la production locale (la déclaration de Doha a réaffirmé ce droit) en cas
d’urgence sanitaire.

Toutefois, la déclaration de Doha a laissé une question en suspens celle des pays pauvres
ne pouvant pas produire eux-mêmes. Les pays pauvres qui ne produiront pas eux-mêmes
de médicaments et qui ont besoin de génériques bon marché où trouveront-ils des sources
d'approvisionnement ?

En l'état, la déclaration de Doha empêche l'exportation des médicaments produits sous
licence obligatoire vers d'autres pays. Il s'agit d'un problème majeur puisque la plupart des
pays pauvres ne disposent pas à l'heure actuelle de la capacité de produire des versions
génériques des médicaments essentiels dont ils ont besoin ou auraient besoin à l'avenir.

A Doha, l'OMC a mandaté les Etats membres de résoudre le problème avant la fin 2002.
Pendant plus d'un an, les États-Unis et l'Union européenne ont tenté de revenir sur les
acquis de Doha. Et les pays en développement, en particulier les pays africains, ont subis
d'énormes pressions pour valider un accord désastreux concernant l'exportation de
génériques. Ainsi, le risque est grand de voir la déclaration de Doha vidée de son contenu et
incapable de limiter les effets pervers de la globalisation sur la santé publique.

A l'issue d'une année de négociations et à force de pressions directes sur de nombreux pays
en développement, les pays industrialisés sont parvenus à faire accepter par une majorité
des Etats membres de l'OMC un texte, dit « de Motta », inadapté pour répondre aux besoins
des pays pauvres. En outre, si ce texte est ratifié, il soumettrait les pays à des procédures
administratives complexes et nécessitant d'importants délais de mise en oeuvre, il serait
difficile à utiliser, voir impossible à appliquer. Enfin, il exclurait les vaccins et autres outils de

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santé publique du secteur pharmaceutique autre que les médicaments et pourrait être limité
à un nombre restreint de pathologies.

En décembre 2002, les Etats-Unis, ont soutenu leurs compagnies pharmaceutiques et se
sont opposées à l'obtention d'un consensus sur la base de ce texte en exigeant qu'il ne
s'applique qu'à certaines maladies. Cette liste se restreignait selon l'Union européenne aux
« maladies africaines » (sida, tuberculose, paludisme et quelques autres), excluant les
pathologies aussi graves que le cancer ou le diabète pourtant courante dans les pays en
développement. L'Union européenne, le Japon, la Suisse et le Canada ont soutenu cette
position. Les pays en développement, de leur côté, ont insisté sur le fait que la déclaration
de Doha ne se limitait pas à une liste de maladies et ont rejeté cette proposition. De plus,
aucune solution permettant l'exportation de génériques n'a pu être obtenue au terme du
mandat conféré par l'OMC.

A l'heure actuelle les négociations sont dans l'impasse. Les pays en développement
subissent toujours une incroyable pression des Etats -Unis et de l'Union européenne pour
ratifier un texte inadapté à leurs besoins. En l'absence de toute solution dans les mois à
venir, le débat sera renvoyé à la réunion ministérielle de l'OMC à Cancun en septembre
2003. Ce conflit sur les médicaments cristallise les oppositions entre pays du Nord et du
Sud. S'il se concluait sur une victoire de l'industrie pharmaceutique pour maintenir ses
monopoles cela renforcerait encore le déséquilibre humanitaire entre les pays industrialisés
et les PVD.

On constate donc que les enjeux pour les PVD sont considérables. En effet, si l’accord à
Cancun sur le texte de Motta est ratifié cela signifiera pour les PVD qu’ils n’auront qu’un droit
de production au niveau national restreint. La question des PVD qui n’ont pas les moyens de
produire localement n’est toujours pas résolue.

Et le comble des droits des brevets est que l’OMC ne reconnaît pas la validité de la science
non occidentale. L’un des        problèmes actuels est que les grandes entreprises
pharmaceutiques brevettent des médicaments à base de plantes médicinales originaires des
PVD. Alors que les PVD connaissent et utilisent ces plantes médicinales depuis des siècles
pour l’élaboration de remèdes de guérison. Contre cela, l’espoir des PVD réside dans des
adaptions des lois sur la propriété intellectuelle avec de nouveaux outils permettant de
protéger le savoir ancestral.

6. Solutions envisagées pour pallier au déséquilibre humanitaire

Les seules lois du marché ne peuvent en principe pas résoudre le problème de biens tels
que les médicaments. Les marchés pourvoient généralement aux besoins des personnes
riches et non des personnes pauvres. C’est pourquoi, il faut l’intervention d’institutions
publiques.

A ce stade, il est donc du rôle de la communauté internationale de réagir. Il appartient aux
gouvernements de donner la priorité à la santé publique par une rigoureuse législation en
faveur de la santé. Les organisations comme l’organisation de la santé, la banque mondiale,
les Nations Unis et d’autres devraient adopter et promouvoir des politiques de protection de
la santé publique. Il appartient aussi au secteur privé, aux entreprises pharmaceutiques, de
collaborer à la mise en œuvre de solutions à long terme.

En plus des problèmes liés à la propriété intellectuelle, Il est reconnu qu'un large éventail
d'obstacles entrave l'accès aux médicaments essentiels dans les pays pauvres. Il s’agit du
financement, des prix, de l’approvisionnement et de la distribution. Le prix des médicaments
à lui seul ne dicte pas qui a accès aux soins. Néanmoins, les dépenses de santé des

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personnes pauvres dans le monde entier passent surtout dans les achats de médicaments,
bien souvent dans des points de vente privés. Le prix des médicaments essentiels est
important pour les pays pauvres. Cependant, même si des médicaments à bas prix étaient
proposés, cela ne suffirait pas à assurer l’accès aux médicaments pour tous. Effectivement,
d’autres facteurs influencent l'accès aux médicaments sur la base des besoins médicaux :
les services de santé locaux adéquatement dotés en personnel, bien équipés, gérés,
financés et centrés sur les priorités et les besoins locaux, des systèmes de distribution
efficaces et l'exemption de tarifs douaniers et de taxes pour les médicaments. L’accès des
médicaments est un problème complexe et variable d’une situation à l’autre.

Pour pallier au problème actuel d’accès des médicaments pour tous la communauté
internationale devrait collaborer et agir simultanément à 3 niveaux :

   •   Proposer à l'échelle internationale un système équitable de fixation des prix,
       rendant les médicaments essentiels, sûrs, accessibles et abordables pour tous les
       pays. Il s’agit de permettre aux pays pauvres d’utiliser tous les moyens dont ils
       peuvent disposer pour s’approvisionner en médicaments essentiels

   •   S’engager à augmenter le financement public destiné à la recherche et au
       développement de traitements de maladies « non solvables » mais prioritaires à
       l'échelle mondiale telles que la tuberculose, le sida et la malaria. Les bailleurs de
       fonds internationaux devraient financer des programmes d'achat de médicaments
       ainsi que des programmes thérapeutiques et de prévention des maladies.

   •   S’engager à demander l’amendement de l’accord ADPIC afin que les
       gouvernements des pays en voie de développement puissent disposer de
       médicaments génériques à prix abordable.

Système équitable de fixation des prix

En premier lieu, la fixation différenciée des prix pourrait et devrait jouer un rôle important
dans l'accès aux médicaments es sentiels à des prix abordables, surtout dans les pays
pauvres, tout en permettant au système de brevets de jouer son rôle dans l'incitation à la
recherche et la mise au point de nouveaux médicaments.

Le système des prix différentiels permettrait aux sociétés pharmaceutiques qui fabriquent
des médicaments brevetés de récupérer la majeure partie des coûts de recherche-
développement sur les marchés riches et parallèlement, de vendre leurs produits et les faire
fabriquer sous licence à des prix inférieurs dans les pays à revenu plus faible.

Pour que le système fonctionne, il faudrait trouver les moyens de prévenir le retour sur les
marchés des pays riches des médicaments vendus à un prix plus bas. Il faut de plus, veiller
à ce que les prix plus bas pratiqués dans les pays en développement ne soient pas utilisés
comme points de référence pour les contrôles des prix dans les pays industrialisés.

Pratiquement, quelles seraient les mesures envisageables ?

- Rabais négociés au niveau bilatéral entre les sociétés et les acheteurs (y compris pour des
  achats effectués en grandes quantités pour le compte d'un grand nombre de clients)

- licences concédées par accord mutuel entre les titulaires de brevets et les fabricants de

médicaments génériques, et systèmes globaux de marchés publics et de distribution.

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Financem ent public

Même lorsque les prix des médicaments baissent rien ne garantit que les populations
pauvres aient les moyens de les acheter. Cela est particulièrement vrai pour les
médicaments contre le SIDA. Même si les coûts sont ramenés à 500 dollars par personne et
par an, ils sont bien au-delà de ce que peuvent se permettre de nombreux pays dont le
montant total des dépenses de santé est inférieur à 10 ou 20 dollars par personne et par an.
En pareil cas, un financement de la part de la communauté internationale important est
nécessaire, afin d’augmenter sensiblement l'accès aux médicaments essentiels. Le
financement des médicaments ne devrait pas être considéré isolément. Une augmentation
massive des crédits est préconisée pour la mise en place d'une manière générale de
systèmes de santé efficaces, y compris la formation, l'éducation et les prestations, ainsi que
pour l'achat des médicaments.

Selon Jeffreys Sachs, économiste de l’université de Harvard, président de la commission
macroéconomique et santé de l’OMS, de nouvelles institutions de financement devraient être
adoptées comme par exemple :

           -   Partenariats public-privé,
           -   Fonds mondial pour la recherche sur la santé afin de financer la recherche
               fondamentale sur les maladies des populations pauvres

Exemple : Epidémie du sida

L’épidémie du SIDA a donné lieu ces derniers temps a une profusion d’alliance, coalisations,
partenariats et financement transnationaux.

Amendement (=modification) de l’accord ADPIC

Pour promouvoir l’accès des médicaments dans les PVD à la population, la communauté
internationale devrait modifier l’accord ADPIC. Et ne surtout pas ratifier le texte « Motta » lors
de la réunion de l’OMC à Caucun en septembre 2003.

7. Conclusion

Les entreprises pharmaceutiques sont des sociétés privées donc comme tous les agents
économiques rationnels, elles s’intéressent uniquement aux marchés rentables pour assurer
leur pérennité. Nous considérons cela tout à fait normal. Par contre, nous trouvons que
celles-ci ont tout de même une part de responsabilité par rapport à la situation actuelle dans
certains PVD car ces entreprises font pression sur leur gouvernement pour que leurs
produits brevetés soient protégés au niveau international. Dans le cadre de l’OMC, les pays
industrialisés protégeant leur industrie pharmaceutique ont fait pression sur les PVD pour
adopter un accord sur les droits de la propriété intellectuelle. Avec cet accord, les PVD
voient encore leur situation sanitaire déjà précaire se détériorer. Nous considérons que
l’OMC ne devraient pas imposer ces règles de commerce à des pays qui n’ont pas du tout
des conditions sanitaires comparables. De ce fait, les gouvernements qui protégent les
intérêts de leur industrie pharmaceutique ainsi que ces entreprises pharmaceutiques elles-
mêmes qui font du lobbying sont en partie responsable de la situation sanitaire précaire des
PVD. Ce problème d’accessibilité des médicaments ne peut être résolu qu’avec une
collaboration étroite de tous les acteurs du marché : organismes internationaux (OMS,
banque mondial,…), les différents gouvernements, les entreprises pharmaceutiques et la
population des PVD.

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