LES PORTS DE COMMERCE EN CRISE - DU LANGUEDOC ROUSSILLON Etude économique, technique et environnementale
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LES PORTS DE COMMERCE DU LANGUEDOC ROUSSILLON EN CRISE Etude économique, technique et environnementale Jean-Claude Bisconte de Saint-Julien Mars 2016 Version avec annexes l
Cette Etude a été réalisée à la demande des associations du Collectif de la Côte Vermeille dont font partie Port-Vendres et Port-Vendrais et FRENE 66, membre de France Nature Environnement Son but : dresser un bilan sur la situation réelle des ports de commerce de la Nouvelle Région Midi- Pyrénées-Languedoc-Roussillon. Sa justification : communiquer des chiffres et des données officielles pour compenser la désinformation qui prévaut depuis quinze ans. Son utilité : créer les conditions objectives et apolitiques d’un vrai débat sur l’avenir des ports de commerce. La protection de l’environnement est un enjeu important des actions associatives, mais il n’est pas le seul. Tout citoyen doit refuser la gestion opaque et autoritaire des projets littoraux et portuaires qui entraînent, dans notre Région plus qu’ailleurs, une débauche d’études et de dépenses inutiles. Cette gabegie impacte les impôts, aggrave le déficit en emplois durables et affaiblit l’économie régionale en réduisant l’investissement en faveur des productions manufacturées et agricoles. Il s’y ajoute parfois - nous en donnons en annexe quelques exemples - des situations de privilèges qui sortent du cadre de l’intérêt général et du service public. Il est difficile de « fermer les yeux » sur ces manquements surtout au vu du bilan globalement catastrophique que révèle l’Etude. Comme cela est réclamé auprès du Ministère et des Préfets depuis des années, il serait de l’intérêt de tous de clarifier les interrogations qui résultent de ce constat par un audit réalisé par la Cour des Comptes. Tout élu peut prendre l’initiative de le solliciter… Mes remerciements vont à ceux qui agissent pour préserver le bien public maritime face aux projets nuisibles comme ceux des Cages à Thons de Paulilles ou du 3ème quai de Port-Vendres, inutiles comme le terminal fruitier de Sète, ou « pharaonique» comme le projet de Port La Nouvelle. J-C Bisconte de Saint Julien Professeur des Universités, Président de Port-Vendres et Port-vendrais, Délégué aux questions portuaires du Collectif de la Côte Vermeille. L’étude est réservée aux membres associatifs et aux autorités. Elle ne peut être utilisée sans autorisation explicite du rédacteur. Les analyses concernant les marchés, les aspects techniques, l’économie et l’environnement des ports de Port La Nouvelle et de Port-Vendres ainsi que des informations juridiques et un dossier medias figurent dans des annexes indépendantes du présent document. 2
Une alerte adressée aux élus et aux autorités Cette Etude est un état des lieux établi à partir de documents ministériels, européens et de ceux communiqués par les ports de référence comme Barcelone et Marseille qui a été engagé début 2015, dès que le projet de loi territoriale NOTRe montrait qu’un changement fondamental les règles de la gouvernance portuaire était à prévoir. C’est pourquoi ce travail s’appuie sur les recommandations gouvernementales concernant les règles futures d’administration territoriale, publiées en 2014 dans le rapport Herviaux/Sandrin ( dit ici le Rapport) Ce document essentiel - pour qui s’intéresse à la politique portuaire - a été demandé par le premier ministre dans le but d’éclairer les nouvelles régions sur les perspectives et les enjeux des ports décentralisés. Le Rapport démontre que le législateur était conscient du fait que les préoccupations locorégionales et clientélistes faisaient passer les questions géostratégiques au second plan dans plusieurs régions. C’est spécialement le cas en Languedoc-Roussillon qui, manifestement, a été « dans le collimateur ». Les recommandations sont particulièrement pertinentes sur le point crucial de la gouvernance. Concernant la situation des ports de la Région, il est notamment dit « les projets d’extensions des ports alors qu’ils sont déjà en surcapacité (…) le projet complexe de Port La Nouvelle (…) des projets de quais en eau profonde insuffisamment étudiés etc… » et au passage, le Rapport « épingle » la DREAL du Languedoc-Roussillon, rejoignant le point de vue associatif sur les déficiences de cet organisme gouvernemental. L’Etude, est en accord complet avec le Rapport mais elle élargit la problématique en considérant les aspects concurrentiels et internationaux de l’environnement des quatre ports de commerce de Sète, Port La Nouvelle, Port-Vendres et de Laudun. Globalement l’Etude met en évidence de graves défauts de gouvernance, une absence largement partagée de compétence et de vision géostratégique. Ce qui explique en grande partie pourquoi la nouvelle Région se trouve en situation très difficile, car elle se base sur les appréciations lénifiantes des élus sortants, des services de collectivités, des CCI et de la CRCI. Tous restent attachés aux projets « décidés, votés et budgétés », espérant ainsi éviter toute remise en cause de leur gestion. Pourtant le constat est que la situation de crise des ports a été dissimulée et que les deux projets « résiduels » de Port La Nouvelle et de Port-Vendres reposent sur des données économiques, techniques et environnementales fausses. On comprend mal qu’aucun élu n’ait sollicité un audit de la Cour des Comptes, alors que 500 millions d’euros ont été dépensés en argent public en une douzaine d’années, sans résultat et que le bilan est alarmant. L’emploi, soi-disant priorité de nos élus, a chuté de 30 % dans le secteur portuaire. Le record est détenu à Port-Vendres avec 200 emplois détruits sur 300, ce qui place cette ville en tête du chômage pour le Département des PO. 3
L’autre indicateur qui est le tonnage global a « plongé » de 20 % en vingt ans ! Les 5.3 millions de tonnes de 2014 ne représentent plus qu’un et demi pourcent (1.5 %) du total des régions maritimes métropolitaines… La nouvelle Région Occitane hérite de la lanterne rouge nationale, très loin des autres, en pesant quatre fois moins que sa voisine Aquitaine (avant dernière) et vingt fois moins que PACA ou la Catalogne. Car c’est dans ce contexte de compétition interrégionale qu’il faut dorénavant apprécier la situation. On peut donc affirmer que la situation est globalement catastrophique et qu’à l’exception de Laudun, petit port fluvial qui tire son épingle du jeu, les trois ports maritimes sont menacés à plus ou moins long terme. C’est leur existence comme ports de commerce qui est jeu. Une situation d’urgence : deux ports sont en danger immédiat Port-Vendres qui a perdu la quasi-totalité de ses activités : la pêche a rejoint Port La Nouvelle, les lignes de passagers et de rouliers (Comanav et IMTC) ont été fermées avant 2010 et la croisière est limitée à une dizaine de petits navires, faute de quai adapté. La plaisance, limitée à quelques appontements palliatifs, est menacée de transfert au vu du non-respect des normes d’agitation. Il ne reste qu’une activité d’importation fruitière dont le niveau fluctue autour de 230.000 tonnes, le niveau d’il y a vingt ans, et qui ne survit que par le financement public. Port La Nouvelle connaît des difficultés très comparables. La pêche est en fort recul, la plaisance marginale, il n’existe pas d’activité passagers ou de croisière. Quant aux vracs solides, ils sont en effondrement et le tonnage a été divisé par trois. Ils ne représentaient plus que 600.000 tonnes en 2015 car le volume d’un million de tonnes de vracs pétroliers transite en dehors du port par sealine (offshore). Sète a bénéficié d’investissements lourds et on ne peut parler d’urgence. Néanmoins, la situation est difficile car le port a perdu l’activité conteneurs alors que c’était sa priorité. Le tonnage global est en fort recul et sa situation de concurrence avec les deux autres ports régionaux ainsi que la pression de Marseille et de Barcelone sont autant d’éléments défavorables à son développement. Certains, conscients du problème, voudraient « jeter le bébé avec l’eau du port » et proposent de tenter une aventure en créant ab initio un Très Grand Port à Port La Nouvelle. Ce sont les mêmes qui en 2002 ont refusé nos propositions de regrouper sur ce port tout ce qui pouvait l’être, dont le fruitier, afin de créer une dynamique. « Ils se réveillent » quinze ans plus tard en proposant des solutions du siècle dernier. La Région doit se prononcer sur un éventuel statut de Grand Port Maritime Régional pour Sète. Cela se discute en terme géostratégique et politique, c’est pourquoi on a placé cette question au chapitre I. 4
Identifier les causes du fiasco L’Etude détaille, au chapitre II, le bilan en comparaison avec des régions, des ports nationaux ou internationaux. On verra que la Région est un cas unique, car la crise économique et la restructuration du trafic maritime l’ont touchée plus que toute autre en France, voire en Europe. Le chapitre III est consacré à l’analyse des causes, en soulignant les failles structurelles de ports trop proches, trop nombreux, en eaux peu profondes avec des hinterlands solidement tenus par les ports voisins de Barcelone et de Marseille. La seconde question clé est celle de l’activité conteneurisée, la seule en croissance continue dans le monde et spécialement en Europe. L’activité conteneur est dorénavant concentrée dans les grands hubs maritimes, les seuls capables d’accueillir les porte-conteneurs géants actuels et en construction. Des projets qui seraient ruineux et inefficaces Les chapitres IV et V examinent les perspectives et pour chacun des ports leur potentiel d’évolution selon une grille multicritères incluant les paramètres géostratégiques, structurels et de communication. Il n‘existe que deux projets si on considère qu’à Sète la restructuration est pratiquement achevée. Les deux ports de Port-Vendres et Port La Nouvelle ont des projets d’extension ruineux et d’ores et déjà dépassés. Le premier pour des navires de 155 m et 8 m de tirant d’eau, le second pour des navires de 225 m et de 12 m de tirant d’eau, alors que les normes fonctionnelles aujourd’hui sont pour des navires de 400 m et 20 m de tirant d’eau. Les annexes 1 et 2 analysent les deux projets et traitent des questions juridiques, des marchés et des graves problèmes d’environnement, aucun des deux dossiers n’ayant fait l’objet d’une étude d’impact. Le manque de vigilance chronique de la DREAL en est d’autant plus caricatural. L’Etude met en évidence leurs incohérences et de graves irrégularités dans le montage des dossiers. Il est urgent d’étudier des solutions alternatives pour ces deux ports et de prévoir des budgets. Les répercussions environnementales ont été dissimulées alors qu’elles sont démontrées par des publications scientifiques. L’incidence budgétaire a été intentionnellement sous-évaluée. L’enveloppe réelle pour la Région dépasserait largement un milliard d’euros, au lieu des 350 millions annoncés pour les deux projets, si l’on persistait à vouloir installer à PLN un terminal à conteneurs, comme celui d’Hutchison à Barcelone ou celui de CMA-CGM à Marseille. Un tel investissement ne changerait d’ailleurs pas la situation et ne profiterait qu’aux BTP et aux cabinets d’études habituels… L’Etude démontre qu’il n’y a pas de demande et que les marchés sont marginaux. 5
Au vu de ces incohérences, aucun des deux projets n’a la moindre chance d’être validé, sauf si des décisions autoritaires étaient prises pour des raisons politiciennes... mais dans ce cas, et sans préjuger des recours inévitables, il faut savoir que les délais de réalisation sont de dix à douze ans (comme à Fos/Mer ou à Barcelone) et que les projections portuaires devraient alors tenir compte des marchés et du contexte économique et environnemental des années 2025/2030… D’autres scénarios sont possibles. Ils sont évalués dans l’Etude en terme de ratios coût/efficacité, et en tenant compte de la dynamique des ports voisins de Barcelone, Marseille et Bordeaux/La Rochelle. La nouvelle Région peut profiter de sa position de plaque tournante entre ses trois voisines pour proposer un schéma coopératif, de loin préférable à une politique « indépendantiste » promise à un échec ruineux. Il appartiendra aux élus d’en débattre et de décider d’une politique portuaire à mettre en œuvre dans le cadre d’un Schéma Directeur Portuaire, sous la responsabilité directe de La Région. 6
Trafic maritime des quatre Région mitoyennes En millions de tonnes (Mt), chiffres de 2014 et cercles proportionnels PACA = 82 Aquitaine = 5LRMP = 5 22 5 5 5 5 Catalogne = 5 93 7
Résumé de l’Etude 1 - Bilan La situation est très dégradée dans les trois ports de commerce maritime (hors Laudun, port fluvial qui garde un bon potentiel). Depuis 1995, le déclin est de 20 % en tonnage et de 30 % en poids économique. La Région hérite d’un volume global qui, en 2014, ne représente plus que 5,3 millions de tonnes, soit 1,5 % du tonnage national, un volume non significatif. Pour le futur, la quasi disparition de l’activité marchandises diverses sous conteneurs (hors fruits), alors que c’est le seul secteur en croissance dans le monde et surtout en Europe, laisse peu d’espoir de redressement. Pourtant l’effort public censé soutenir l’emploi a été considérable, sans doute plus de 500 millions en dix /quinze ans. Des centaines d’emplois ont été perdus en particulier à Port-Vendres (200 sur les 300 emplois directs présents en 1995). Les deux ports, Port La Nouvelle et Port-Vendres, en situation très critique, appellent à des solutions urgentes. 2 - Causes a) Les trois ports sont soumis à la forte concurrence des grands ports voisins (Barcelone, Tarragone, Marseille, Bordeaux et La Rochelle) et sont trop proches entre eux. La densité de neuf ports sur 450 km dont sept ports secondaires (entre Tarragone et Toulon) est défavorable. b) Le littoral du Languedoc-Roussillon peu profond rend difficile et coûteuse toute extension pour s’adapter au besoin en fort tirant d’eau. c) L’Hinterland est globalement faible, peu exportateur et dépendant des régions voisines. d) Des erreurs de gouvernance ont été faites notamment en dispersant les efforts, en ne tenant pas compte de la concurrence externe et en suscitant des concurrences internes. 3 - Perspectives Elles sont globalement défavorables, même si l’agrandissement de la Région peut théoriquement corriger partiellement le déficit d’activité économique du LR.Le facteur clé intangible est la monopolisation de l’activité des marchandises conteneurisées par les Grands Ports des trois régions PACA, Catalogne et Aquitaine. Ce phénomène est irréversible à l’horizon de quinze ans. Aucune croissance significative n’est à attendre hormis quelques niches, comme les passagers à Sète. Les autres marchés comme les céréales à Port La Nouvelle, le pétrolier, les vracs seront au mieux stables et probablement en décroissance voire en disparition. 8
Sète (3.5 Mt) est le seul port dont la polyvalence laisse espérer une croissance faible ou modérée. Il sera handicapé par un tirant d’eau (TE) de 12/14 m insuffisant et des surfaces internes trop limitées pour attirer l’investissement privé sur des terminaux à conteneurs. De ce fait, le projet de zone logistique à Poussan n’est pas justifié. L’espoir de devenir le GPM régional est théoriquement possible si toutes les activités pondéreuses dispersées étaient regroupées et qu’un ou deux accords de collaboration étaient passés avec Marseille et Barcelone. Le seuil de 7 à 8 millions de tonnes pourrait alors être atteint en trois à quatre ans. Port La Nouvelle (1.5 Mt dont 1 Mt de vrac pétrolier est traité hors du port). Sa faible hauteur d’eau (HE 8 m) n’est pas seule en cause. Bien que ce site dispose de réserves de surfaces relativement importantes (80 ha), sa situation, à la fois proche de Barcelone et dans la partie sud des flux routiers, est défavorable et s’oppose à l’idée de Grand Port. L’impact environnemental d’un projet avançant loin en mer serait catastrophique. La seule option réaliste serait l’amélioration du port actuel et sa réorientation vers des activités comme l’offshore éolien. Port-Vendres (0.2 à 0.3 Mt) est en « survie » depuis quinze/vingt ans. L’unique activité d’importation de fruits est maintenue par le financement public. Sans aucun potentiel d’agrandissement pour l’activité de fret, le port est condamné à végéter ou à disparaître. Comme pour PLN, il faut envisager de le reconvertir vers les croisières, les passagers et la grande plaisance, les grands yachts n’ayant aucune solution d’entretien et de réparation entre La Ciotat et Tarragone. Dans tous les cas, il faut protéger le port et les riverains par des digues internes car le risque de submersion s’accentue. 4 - Impact Environnemental La prise en compte de l’impact écologique et environnemental est indispensable comme le souligne le Rapport Herviaux et avant lui le Grenelle de la Mer. Il est urgent de clore le projet d’extension de Port-Vendres, d’annuler le projet de Poussan et de revoir techniquement et budgétairement le projet PLN en fonction d’une étude approfondie de l’impact sur le littoral. 5 – Gouvernance stratégique Face à ce fiasco et aux dérives budgétaires incontrôlées, la Région doit avoir l’autorité et être chef de file sur les trois ports, au moins de façon transitoire, pour une remise en ordre. Le respect des recommandations du Rapport Herviaux est indispensable, avec en perspective l’élaboration d’un schéma directeur portuaire établi de façon concertée notamment avec les associations. L’Etude démontre que l’investissement massif se ferait à fonds perdus car le nouveau projet de PLN envisagé et réclamé par la CRCI est complètement utopique… Le marché est en décroissance globale pour les secteurs d’activité de ces ports. Quant au seul marché en croissance, celui des conteneurs il restera le monopole des grands Hubs voisins qui récupéreront aussi les trafics massifiés, par exemple entre le Maroc et Marseille pour les fruits et légumes. Il faut trouver des voies de diversification pour les ports et rechercher des accords de partenariat avec les ports voisins de Bordeaux, Barcelone et Marseille. 9
Recommandations Celles qui sont en italiques sont celles du Rapport Herviaux (dit le Rapport). Les autres, en caractères gras, sont spécifiques à l’étude (dite L’Etude). 1 - Gouvernance Le Rapport constate « alors que les grands ports maritimes GPM ont, depuis 2008, défini leurs plans stratégiques, les ports décentralisés doivent faire ce travail de réflexion au service d’aménagement du territoire en intégrant les relations avec les agglomérations, siège des ports ». Il recommande et indique que la Région doit : n° 1 a) « Nommer un haut responsable auprès du Préfet de Région pour coordonner les instructions et autorisations de l’Etat et de la Commission Européenne s’agissant des projets portuaires les plus complexes » (deux ports sont visés Port La Nouvelle et Brest). b) «Elaborer et formaliser avec les parties prenantes une stratégie portuaire (dite aussi Schéma Directeur Portuaire Régional - SDPR -) comprenant un état des lieux, un projet de développement et une analyse des impacts socio-économiques locaux, régionaux et environnementaux en résultant. Elle sera mise à jour régulièrement ». c) « Etudier l’opportunité de rattacher certains ports départementaux à la Région ou à la Métropole au titre du rôle de chef de file chargé du développement économique ». NDR : un tel schéma directeur n’existe pas en LR, la structure Port Sud de France n’agit pas sur la gouvernance, la répartition des missions et la répartition des crédits. C’est une structure de « marketing commercial». Ce groupe de recommandations rejoint les demandes récurrentes associatives en matière d’arbitrage pour apurer les situations de conflits, comme à Port-Vendres, de concurrence pour les trois ports spécialement entre Sète et Port La Nouvelle ou encore de prise en compte du risque environnemental. Le Rapport précise «les opérations lourdes et complexes comme Port La Nouvelle » justifient l’intervention d’un arbitre préfectoral et gouvernemental. Le niveau régional et préfectoral doit s’appuyer sur un Conseil Portuaire Régional « apolitique » intégrant les associations compétentes. 2 – Mesures environnementales par Port Le critère environnemental est décisif alors qu’il a été systématiquement oublié, minoré voir truqué, comme c’est le cas à Port-Vendres. Pourtant tous les projets portuaires de France et de l’étranger placent les études d’impact en frontispice, sachant que, sur le long terme, les courants, les tempêtes et les submersions peuvent avoir raison des projets les plus ambitieux. 10
Les trois ports ont des projets d’extension périmés et en souffrance car ils auraient des impacts forts, voire très forts sur l’environnement. Le plus caricatural étant celui de Port-Vendres qui prévoit de combler une anse naturelle intra urbaine, alors qu’elle a des fonctions d’amortissement vitales des houles qui, périodiquement, détruisent en partie les appontement et submergent, les quais et les riverains. PLN menace moins les habitants mais son projet démesuré pourrait déstabiliser une partie du littoral avoisinant. Tableau 1 : impact environnemental des projets d’extensions (peu d’impact : +, beaucoup : ++++) Port La Nouvelle Port-Vendres Sète Littoral ++++ ++ + Risque naturel/population + ++++ + Risque technologique /population +++ ++++ ++ Nuisances /population + ++++ + _________________________________________________________________________ Dans l’hypothèse d’un nouveau projet (norme Suezmax) pour créer un GPM à Sète, l’impact serait très significatif sur le littoral. Pour le port de Port-Vendres, les conséquences sont mécaniquement augmentées du fait de son positionnement intra urbain et de l’élévation des eaux. Il y a donc des mesures urgentes à prendre. Il faut organiser une conférence à l’initiative du Préfet de région avec les parties prenantes pour traiter le problème des risques de toutes natures qui se posent à Port-Vendres et à PLN. n° 2 a) annuler définitivement le dossier du 3ème quai de Port-Vendres en raison de son impact environnemental. Lancer les études pour fermer partiellement les darses, raser le quai Dezoums afin de protéger les riverains. b) annuler le projet de la zone logistique de Poussan. c) étudier pour PLN l’impact de tout projet sur le littoral. Le Rapport précise « La maîtrise domaniale, dans les ports décentralisés, est plus marquée que dans les GPM, du fait de la proximité avec la ville et la présence de la pêche et de la plaisance. Ces activités pèsent de façon significative, directement ou indirectement, dans l’emploi de l’agglomération-siège et sont souvent au cœur de l’image de la ville- siège. De façon globale, la maîtrise domaniale recouvre le juste équilibre entre cinq exigences : la qualité de la vie, la sécurité et la santé des riverains (relation ville/port), la protection de la biodiversité et des espaces naturels remarquables, l’indispensable développement économique tant local que dans l’hinterland et les problématiques d’aménagement dans/ou à proximité de zones à valeur écologique (et urbain ) ». 11
Le Rapport recommande : n° 3 a) « La gouvernance associant l’autorité portuaire et les collectivités locales doit être améliorée » « Il sera de la responsabilité de la Région de mettre en place des instances d’élaboration de consensus en s’appuyant sur les disposition de la loi du 14 janvier 2013 et le rapport d’avril 2013 (N°498) sur le rôle de chef de file de la Région en matière de développement économique » b) « Il faut renforcer l’expertise environnementale des autorités portuaires, intégrer des associations dans les instances ad hoc et de façon générale décliner les propositions du rapport CGEDD/ CGEIET d’octobre 2013 sur la mise en œuvre des projets portuaires pour y développer durablement des activités logistiques et industrielles en les adaptant au contexte des ports décentralisés » Le Rapport traite aussi de la Relation public/privé notée comme « sujet délicat » et « non stabilisé », ajoutant que « c’est particulièrement le cas quand un acteur privé, notamment s’il est présent dans plusieurs port, peut avoir des intérêts divergents de ceux du port » (p 18). NDR : c’est typiquement le cas à Port-Vendres et à Port La Nouvelle. Pour le premier l’essentiel des coûts d’investissement a été supporté sur fonds publics depuis vingt ans au bénéfice d’un seul exploitant privé de manutention (CLTM), dont le propriétaire est l’ancien président de la CCI de Narbonne et également propriétaire du CLTM de Port La Nouvelle. L’entreprise se retrouve aujourd’hui, de facto, la seule bénéficiaire de la Délégation de Service Public (DSP) de Port- Vendres. Son dirigeant a été aussi l’initiateur, avec l’ancien président de la CCI des PO du projet de 3ème quai. Le Rapport Herviaux ne propose pas de solution concrète à ces situations de conflit d’intérêts sauf la recommandation de contrôler le respect des contrats de DSP et les amodiations des terrains publics. Ajoutons que les DSP de Port-Vendres et de PLN venant à échéance en 2016, ces questions sensibles doivent être spécifiquement examinées et traitées, sous contrôle du Préfet de Région. 3 - Organisation du développement portuaire et investissements lourds Il n’a pas échappé au Rapport Herviaux les incertitudes du projet de PLN dit Très Grand Port (cf. document CNDP du maître d’ouvrage régional), pas plus que l’incohérence de ses prétentions réelles qui ne peuvent qu’être antagonistes avec celles du port de Sète. Ce projet, au budget voté de 310 millions, serait aujourd’hui de 500 millions selon les CCI. Selon nos calculs, le coût serait plutôt de 800 millions pour le projet « non rendu public » que nous désignons 3-C X. Ce projet diffère fondamentalement par les coûts, le dessin et les ambitions en termes de profondeur, du projet initial présenté au débat. Ce qui obligerait à un nouveau débat public. 12
En effet quand des modifications substantielles sont apportées à un projet, en vertu de l’article L 121-12 du code de l'environnement « la CNDP a tout pouvoir pour relancer soit un nouveau débat public soit une concertation et un débat avec le public ». D’autant plus qu’il implique une orientation vers les conteneurs alors que la Région s’était engagée au contraire à réserver cette activité à Sète. Ce contexte est d’ores et déjà dommageable et sera inévitablement générateur de conflits. Si une activité de commerce doit être préservée à PLN, il faudrait s’orienter vers un projet d’amélioration du port actuel. Ce qui permettrait de donner suite à la demande de Saint-Charles et du CLTM d’y regrouper le fruitier issu de Port-Vendres et cela seulement dans l’hypothèse où l’utilisation du terminal fruitier de Sète serait récusée, bien qu’il s’agisse de la seule solution cohérente en termes de rapidité, d’économie budgétaire et de perspectives de croissance. Les évaluations techniques et financières en annexes ont quantifié trois hypothèses en utilisant les ratios internationaux en matière de création d’emplois notamment. Le tableau qui suit en donne la synthèse. 13
Tableau 2 : synthèse de l’impact économique selon trois options d’investissements Port La Nouvelle Port-Vendres Sète Total Investissement semi- massif (*) Coût pour le contribuable en M€ 800 40 500 1340 Tonnage projet à + 15 ans en Mt 3 0,3 7 10 Emplois durables supplémentaires 50 2 200 252 Pas d’investissement Coût pour le contribuable en M€ 0 0 0 0 Tonnage projet à + 15 ans en Mt 1 0 4 5 Emplois perdus 82 40 0 122 Investissement sélectif Coût pour le contribuable en M€ 100 50 50 200 Tonnage projet à + 15 ans en Mt 2 0 6 8 Emplois durables supplémentaires 50** 200 ** 80 330 (*) Cette option implique des investissements mesurés pour les trois ports (tout projet conteneurs à la norme Suezmax nécessiterait entre 1 et 2 milliards par port, ce qui a été écarté). On intègre dans cette option la mise à une norme moyenne de 15 à 16 m de TE pour PLN et Sète, ce qui implique des extensions en mer pour Sète (50 ha de terre-pleins). Les délais de réalisation pour des extensions de PLN et Sète sont de douze ans ce qui explique l’impact économique faible à quinze ans. (**) En supposant une reconversion vers l’industrie nautique à PV et l’éolien à PLN. 14
n° 4 L’Etude démontre qu’il n’y a aucune demande de marché pour la première option « investissement semi-massif » et que la seconde « pas d’investissement » serait intenable politiquement et socialement. En conséquence, seule une option « d’investissement sélectif » est acceptable. n° 5 a) Port La Nouvelle : élaborer un projet dans une enveloppe de 100 millions, soumise le plus rapidement possible à l’enquête publique. b) Sète/Port La Nouvelle : clarifier la situation de concurrence entre ces deux ports. Sète doit être confirmé dans son rôle de premier port régional. c) Port-Vendres : restructurer le port vers un profil d’activités différent, axé sur le Parc Marin dont il doit être le siège ; relancer la pêche de proximité par des récifs artificiels ; miser sur la grande plaisance et un parc d’activité associé pour attirer vingt à trente entreprises. Une enveloppe de 50 millions serait à prévoir dont 20 au titre des mesures de sécurité et de prévention des submersions. Gérer le port avec la Région comme chef de file en associant PV et les villes voisines de Collioure et de Banyuls dans le cadre de la communauté « Côte Vermeille » avec la mise en place d’un comité d’éthique permanent pour éviter la spéculation foncière des terrains en cœur de ville. 15
I - La question du Grand Port Régional Sources : rapport Herviaux, bilans publiés des ports ; bilan annuel des ports du ministère de l’écologie (contact Jérôme Meyer) ; statistiques selon les sources CMF. La question récurrente qui s’est posée depuis vingt ans en Languedoc Roussillon a été celle de l’émergence d’un grand port dans une petite région économique ou, exprimée autrement, comment agir pour ne pas être écrasé par Marseille et Barcelone. La bonne réponse aurait été, sans doute, de miser sur Sète dont la polyvalence assurait une certaine capacité d’adaptation. Mais à l’époque Port La Nouvelle n’était pas très loin de Sète en tonnage, aussi un tel choix était politiquement difficile. Il faut dire que Sète n’avait pas le statut de port autonome ce qui, a priori, lui interdisait d’obtenir automatiquement le statut de GPM (Grand Port Maritime). Aujourd’hui, la Région Occitane est la seule des sept régions maritimes à ne pas posséder de GPM, ce qui est un handicap pour obtenir des soutiens de l’Etat et de l’Europe. Cette question du statut des ports est loin d’être anodine, sachant que suite à de multiples analyses (cf. rapport de la Cour des Comptes sur la réforme des ports), le choix de l’Etat a été clairement de donner la priorité absolue aux GPM. 1 - Les statuts variés des ports. Les ports sous statut de GPM et « tutelle » de l’Etat (grands ports maritimes, ex ports autonomes) sont au nombre de onze : sept sont métropolitains Marseille, le Havre, Rouen, Dunkerque, Nantes/Saint Nazaire, La Rochelle, Bordeaux et quatre sont ultramarins : Guyane, Réunion, Martinique, Guadeloupe. En métropole, il y a un lien entre le statut du port et son niveau d’activité (Calais et la Rochelle sont des contre exemples). On peut dire que les GPM réalisent, au minimum, 7 à 10 millions de tonnes. Il en découle que Sète et, à fortiori, PLN sont loin de ce seuil et que, sauf décision politique, un tel statut est inenvisageable à court ou moyen terme. Les ports décentralisés (ex ports d’intérêt national) sont plus nombreux et gérés selon des formules variées : - par des syndicats mixtes regroupant la région, la commune, la communauté d’agglomérations et le département (ex : ports de Dieppe, Caen, Cherbourg, Toulon). - par les régions : Calais, Boulogne, Sète, Port La Nouvelle, Bayonne, Brest, Lorient, Bastia, Ajaccio. - onze ports de départements, non transférés par l’Etat, sont en attente de statut final depuis 2003. Il s’agit des plus petits ports : Tréport, Fécamp, Saint Brieuc, Roscoff, Quimper, Sables d’Olonnes, Rochefort, l’île Rousse, Propriano, Porto Vecchio et Port-Vendres. Il n’existe que trois ports militaires : Brest, Toulon et Cherbourg (Port-Vendres, contrairement à ce qui est souvent prétendu, n’est plus depuis longtemps un port militaire même si sa localisation frontalière fait que les militaires « gardent un œil » sur son devenir). 16
2 - La gestion des ports de la Région La gestion des ports a été confiée le plus souvent à des CCI concessionnaires, dans le cadre d’une DSP, sauf Dieppe qui est une régie. Le délégataire s’engage à réaliser des investissements qui, en général, sont amortis dans la durée de la DSP. A l’issue de la DSP, des négociations doivent apurer les comptes, le déléguant (l’Etat à Port-Vendres) reprenant le service de la dette ou à l’inverse le remboursement de la valeur nette comptable. Sète : port régional fait partie de l’EPR dit Port Sud de France-Sète dont le terme est en 2020. Port La Nouvelle, port régional dispose d’une DSP confiée à la CCI de Narbonne Aude qui s’achève en 2016. Port-Vendres est présenté comme un port départemental concédé, mais en réalité la convention de cession par l’Etat n’a jamais été conclue et signée. La concession CCI se terminerait en 2016 selon le Rapport Herviaux (cf. tableau p. 62) au vu d’informations écrites par le Conseil Général, mais ce serait en 2019 selon les déclarations orales de la Présidente des PO devant les élus (5 octobre 2015). Une ambiguïté, traduisant des conflits et des manœuvres, qui ne permet pas de connaître les raisons de l’abandon de la CCI, la réalité des comptes d’exploitation du port, le passif accumulé du fait des engagements de la CCI qui, il faut le souligner, est aux commandes depuis 1966. La situation du port est donc largement inconnue. La Loi NOTRe a changé la donne et la ville s’est portée candidate pour au moins conserver son domaine patrimonial en pleine propriété. La gestion est réclamée par le département mais de nombreuses voix sollicitent une reprise en main par la Région, au moins de façon transitoire, tellement les efforts de remise en ordre et les nouveaux investissements nécessaires pour la sécurisation du port seront importants. 3 - L’absence de GPM Régional est-elle un handicap ? Les nouvelles grandes régions ont des façades en méditerranée (PACA et LRMP) ou en atlantique (Aquitaine et Pays de Loire + Bretagne qui se partagent Nantes/Saint Nazaire) ou en manche/mer du nord (Normandie et Nord PC). A l’exception de LRMP, dont la façade maritime est de 230 km, sept grandes régions maritimes continentales ont un, voire deux Grands Ports Maritimes. Ces ports ont été créés par le décret Fillon de 2008 par conversion des anciens ports autonomes, sauf La Rochelle qui était un PIN, port d’intérêt national comme l’étaient Sète et Port La Nouvelle. Aujourd’hui, le différentiel entre régions est considérable puisque nos ports ne totalisent plus que 1.5 % du tonnage national (tableau 3), alors qu’en 1995 les quatre ports du LR pesaient 2.5 %. L’essentiel du recul est lié à l’activité conteneurs, alors que c’est le seul secteur qui, en France et partout ailleurs, est en croissance régulière depuis 1980 (plus 5 à 8 %). Ce phénomène est imputable à l’aspiration des conteneurs vers les GPM. Tous les autres secteurs, comme le pétrolier, les vracs liquides et solides, sont en recul ou stables. C’est un phénomène général qui a été souligné dans le rapport gouvernemental Herviaux «les ports décentralisés ont vu une baisse de leur trafic marchandises diverses qui, devenues conteneurisées, transitent soit par les Grands Ports Maritimes soit par les ports étrangers » (p 11). 17
Ce diagnostic est totalement confirmé par nos chiffres. Dans notre région, c’est un phénomène amplifié par un effet de proximité à courte portée des GPM de Marseille et de Barcelone. La nature des GPM explique en partie ce décalage. Ce sont des ports nationaux dans lesquels l’Etat intervient directement dans la gouvernance et indirectement dans le financement (contrats de Plans E/R). Ils ont des missions régaliennes en matière d’aménagement du territoire, de promotion commerciale et de sureté portuaire. Ils ont un effet d’entrainement sur les ports décentralisés voisins, sauf dans le domaine des conteneurs qu’ils monopolisent. Les GPM étrangers bénéficient d’aides, parfois publiques, directes mais le plus souvent ces ports « autonomes » investissent eux-mêmes (emprunt) en partenariat avec le privé : 3 milliards pour Rotterdam, 1 milliard additif récemment pour Hambourg, 4 milliards pour Barcelone. L’enjeu pour chaque pays est d’assurer la place de ces ports comme grands Hubs des lignes maritimes internationales d’où les apports des Etats en matière d’infrastructures synergiques, routes, rail aéroports etc… Selon la loi de 2008, l’état coordonne les GPM dans leur rôle d’ensemblier du développement économique et inscrit leur développement dans des schémas type SNIT. Pour citer les textes : « ces actions concernant les GPM s’inscrivent dans un politique plus large d’aménagement du territoire, de la mobilisation de l’hinterland à la mise en place de sillons prioritaires pour acheminer le fret débarqué dans les ports (extrait loi de finances 2013) ». Chaque GPM est doté d’une gouvernance avec conseil de surveillance, directoire, conseil de développement et d’un plan d’investissement à cinq ans. Un point essentiel qui est apparu lors de l’Etude est le poids d’une certaine visibilité à long terme pour attirer l’investissement privé. Le tableau qui suit répond à la question posée dans ce chapitre et souligne la prévalence des GMP sur les ports décentralisés. Ce qui n’est pas favorable à notre Région, d’autant que dans les autres régions le GPM joue un rôle de centre organisateur pour les ports « satellites » d’une même région. Le meilleur exemple d’un tel schéma de fonctionnement est la Catalogne qui autour de Barcelone dispose de Tarragone, Castellon et Palamos. Barcelone pèse 46 millions et les autres ports autant, soit un total Catalogne de 94 Mt. PACA est proche en volume (81 Mt) mais déséquilibrée, Marseille pesant 78 Mt, Toulon, Arles et Nice se partageant le reste. 18
Tableau 3 : Les ports de commerces des sept nouvelles régions maritimes (en millions de tonnes) _________________________________________________________________________________ GPM Ports décentralisés Total PACA Marseille 85 2 87 Haute Normandie Le Havre 70 Rouen 22 5 97 Nord Pas de Calais et Picardie Dunkerque 44 36 80 Pays de Loire et Bretagne Nantes + St Nazaire 30 10 40 Aquitaine Bordeaux 9 ------------------------------------ La Rochelle 8 4 21 Languedoc Roussillon MP 0 5 5 _________________________________________________________________________________ Total 268 62 330 NDR - Le trafic national global s’élevait à 340 Mt en 2012 dont 140 Mt en vracs liquides (secteur pétrolier surtout), 74 Mt en vracs solides (minerais, soja etc..) et 118 Mt en marchandises variées. - La différence, entre les 330 Mt du tableau et les 340 Mt nationaux donnés par le ministère de tutelle, s’explique par les tonnages de petits ports réalisant moins de 100.000 t, non pris en compte dans le Rapport gouvernemental Herviaux. - Les ports décentralisés sont une trentaine. En LRMP ce sont les trois ports de Sète, PLN et PV. Laudun, port fluvial, n’entre pas dans cette catégorie. On peut affirmer que l’absence de GPM est un handicap certain. Mais on peut dire à l’inverse que si la Région en est privée, c’est que son niveau de commerce maritime ne le justife pas ! 19
4 - Les conditions pour avoir un GPM régional sont-elles remplies ? Sources Cetmef, Ministère de l’Ecologie, Productivité des terminaux à conteneurs et Isemar. La réponse est donnée par les exemples précédents mais il faut la nuancer. Aujourd’hui on assimile GPM à hub international, mais dans certains cas, comme à La Rochelle, le « label GPM » a été conféré à ce port spécialisé, vu son importance économique, ou en Outre-Mer pour l’image régionale. Le cas de La Rochelle, port Aquitain, est exemplaire : il a ce statut parce que les céréales en font le second port national céréalier derrière Rouen. Aujourd’hui, dans notre Région, en l’absence de toute activité spécifique massive existante ou en perspective, la seule activité qui pourrait, en théorie, être visée reste les conteneurs massifiés. Or ces derniers seront transportés par les porte-conteneurs de dernière génération de la classe Suez max dont les limites sont 420 mètres de long, 24 mètres de fond en entrée et en approche de port et 20 m de tirant d’eau. C’est le standard qui est déjà fonctionnel aujourd’hui à Fos, Barcelone, Valence, Gênes etc… Tous ces ports sont organisés selon différents terminaux spécialisés et ce sont ces terminaux à conteneurs qui sont les plus importants en coût d’investissement et en outillage. Ils sont toujours détenus, en totalité ou en partie, par de grands armateurs privés (Maersk, CMA-CGM, etc…) ou des investisseurs comme Hutchison (présent depuis 2012 à Barcelone) sur la base de locations de longue durée. Les investissements privés peuvent atteindre plusieurs centaines de millions. Hutchison Port Holding est un géant chinois, premier mondial dans le développement de la conteneurisation en eau profonde, propriétaire de nombreux terminaux dont les quatre plus grands ports chinois (Singapour, Hong Kong…). Hutchison traite 65 millions d’EVP (conteneurs de 20 pieds) dans le monde, loin devant Le français CMA –CGM (8 Millions d’EVP). Hutchison a investi 450 millions d’€ dans le terminal automatisé Best de Barcelone. Le port a financé lui-même (par emprunt) les infrastructures lourdes : jetées, chenaux et dragages routes, rail etc… Depuis 2000, les surfaces du port ont doublé pour atteindre 1300 hectares, le total de l‘investissement se monte à 4 milliards, dont la moitié venant du secteur privé. De tels niveaux sont courants comme à Rotterdam, Anvers, Tangermed etc… En contrepartie, il est exigé du port que, durant cette période, il garantisse l’accès sans attente par tous les temps, le maintien de la profondeur d’eau et qu’il anticipe l’évolution des flottes et ouvre des surfaces à conteneurs. En général, les outils de manutention sont à la charge de l’exploitant. Il faut savoir que c’est un poste lourd, puisque chaque navire peut être traité simultanément par dix voire douze portiques géants, au coût unitaire de 6 à 8 millions d’euros ; soit pour un port capable de traiter deux ou trois navires un investissement de 200 millions ! 20
On constate donc qu’un terminal à conteneurs de GPM nécessite un investissement en infrastructures de l’ordre de 400 à 500 millions d’euros, par exemple à Fos et à Barcelone, non comprises les jetées et les voies d’accès. D’après les armateurs et investisseurs, le statut de GPM Français ou Européen, dans lequel les Etats sont investisseurs et maîtres du jeu, est le seul qui apporte une visibilité à vingt/trente ans car « c’est le seul cadre possible quand on met des centaines de millions sur la table » et ajoutent «les petits ports de LR ne sont pas crédibles pour de tels investissements privés». Quant aux projets futuristes « ils n’investissent jamais sur du papier ». Au plan économique, la faiblesse de l’hinterland du Languedoc Roussillon est un handicap difficilement corrigeable. On peut espérer à long terme une modification des canaux d’échanges qui sont utilisés par MP. Aujourd’hui cette région utilise très peu les ports de LR et s’adresse depuis longtemps à Marseille, Barcelone, Bilbao, Bordeaux ou Nantes. Une réorientation est sans doute souhaitable, mais les effets seront lents. C’est pourquoi un schéma directeur portuaire de la Région qui définira le rôle des ports à long terme est indispensable. En conclusion A court/moyen terme, le statut de GPM est inaccessible, si on se réfère aux critères économiques « normaux » : a) aucun des trois ports n’a bénéficié du statut de port autonome, b) leur déclin d’activité depuis vingt ans ne laisse aucun espoir de regain significatif, c) une « solution politique » homologuant Sète ou PLN est utopique. A plus long terme, si le port de Sète montrait un redressement sensible (8 millions de tonnes environ), un tel statut pourrait être envisagé. 21
II - Bilan d’activités des ports Les considérations géostratégiques du chapitre précédent doivent être resituées dans le cadre du bilan de santé des ports. On peut toujours être optimiste pour un port en croissance. C’est plus difficile dans des ports en déclin et « cliniquement » privés de marchés. Pour établir un tel diagnostic il faut comparer les ports entre eux, sans oublier les voisins en très bonne santé. Il faut naturellement prendre en compte les dépenses publiques et privées, sachant que le soutien public, s’il devient massif et constant, cache des situations de non viabilité économique qui s’aggravent inéluctablement. On a rencontré des difficultés pour obtenir ces chiffres, certains ports refusant de les communiquer, y compris pour les dépenses publiques. 1 - Comparaison au plan national Il existe soixante et un ports maritimes avec les onze GPM. Les cinquante ports décentralisés pèsent pour 80 % du trafic passagers et, comme on l’a vu, 20 % pour les marchandises. Entre 2000 et 2014 le trafic de l’ensemble des ports français est resté à peu près stable en volume. En revanche, le trafic conteneurs a connu une forte croissance de l’ordre de 55 %. Seuls 2 % de la partie conteneurisée sont traités par les ports décentralisés. L’attirance des GPM implique sans doute des investissements lourds, mais ouvre la voie aux accords entre états qui favorisent ce statut (ex : accords France/Maroc dans le fruitier en faveur de Marseille). Les ports décentralisés de plus de 100.000 tonnes (dont Calais est n° 1 et Sète n° 2) gardent l’avantage dans le trafic passagers. L’avantage est, du fait de leur polyvalence et de l’absence de conteneurisation automatisée, qu’ils génèrent plus d’emplois proportionnellement que les GPM. La croissance des conteneurs compense un recul généralisé dans les vracs liquides et solides. Les ports décentralisés n’ont pas pu en bénéficier, mais comme ils sont pratiquement tous polyvalents et mélangent des activités de commerce, industrialo-portuaires, de pêche et de plaisance ils ont tiré leur épingle du jeu chacun à leur manière. Par exemple, Calais affiche un tonnage élevé qui est uniquement dû au transport « transmanche en voitures », assuré par les ferries. Boulogne vit de la pêche qui représente 10% de l’emploi de la ville. Bayonne, et son activité liée au port, représente autant que tout le tourisme de la région de Biarritz/Anglet/Bayonne etc… 2 - Comparaison avec Marseille et Barcelone On a dit que l’économie portuaire du LR représentait 1.5 % du volume national. Le tableau n° 4 souligne l’énorme décalage entre le poids économique de nos quatre ports qui, en tonnage global (5 Mt), pèsent moins de 3 % du tonnage des deux ports géants voisins et leurs satellites. L’activité la plus touchée est celle des marchandises sous conteneurs, qui ne représente que 0.5 % par rapport aux deux voisins puisque les quatre ports totalisent 20.000 conteneurs (EVP) contre 3.200.000 EVP. 22
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