Les prix de transfert dans l'industrie minière, avec focalisation sur l'Afrique - Banque ...
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Public Disclosure Authorized Les prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique Public Disclosure Authorized Note de synthèse Version abrégée par Pietro Guj, Stéphanie Martin et Alexandra Readhead Public Disclosure Authorized Janvier 2017 Public Disclosure Authorized
NOTES : 1 – Cette publication est une synthèse du manuel intitulé « Les prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique : guide de référence pour les fiscalistes » qui doit être publié conjointement à la fin de l’année 2017 par : • le Groupe de la Banque mondiale (GBM), • le Centre for Exploration Targeting (CET) et • le Centre international de l’industrie minière pour le développement (IM4DC). 2 – Le Guide a été co-rédigé par un groupe international d’experts en fiscalité des industries minières, dont : • le professeur Pietro Guj, CET — Université d’Australie-Occidentale (auteur principal) ; • Mme Stéphanie Martin — Consultant fiscal ; • M. Bryan Maybee, CET – Curtin University ; • le professeur Frederick Cawood — Université de Witwatersrand ; • M. Boubacar Bocoum — Groupe de la Banque mondiale ; • Mme Nishana Gosai — Administration fiscale sud-africaine (South African Revenue Service) et • M. Steef Huibregtse — (Transfert Pricing Associates (Global)), Pays-Bas. 3 – Cette synthèse a été rédigée par le professeur Pietro Guj, Mme Stéphanie Martin et Mme Alexandra Readhead. 4 – La rédaction de la présente note de synthèse a été facilitée par la Deutsche Gesellschaft für internationale Zusammenarbeit GmbH (GIZ).
Note de synthèse sur les prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique Version abrégée par Pietro Guj1, Stéphanie Martin2 et Alexandra Readhead3 Résumé analytique Cette note de synthèse résume les résultats des recherches sur les prix de transfert menées dans le cadre spécifique de l’industrie minière en Afrique. L’étude a été commanditée en 2015-2016 par le Groupe de la Banque mondiale (GBM) en coopération avec le Centre international de l’industrie minière pour le développement (IM4DC)4 et réalisée par une équipe internationale d’experts en fiscalité et dans les industries minières5 dirigée par le Centre for Exploration Targeting (CET)6. Les résultats de cette étude seront publiés dans un manuel intitulé « Les prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique : Guide de référence pour les fiscalistes », accompagné d’un matériel pédagogique pratique, actuellement en cours d’élaboration, qui servira de support à une série d’ateliers sur les prix de transfert destinés aux agents des administrations fiscales africaines pour le début de l’année 2017. Ce guide de référence constitue également un complément, spécifique à l’industrie minière, d’une boîte à outils générale sur les prix de transfert intitulée « Transfert Pricing and Developing Economies » (en anglais) réalisée par l’équipe internationale sur la fiscalité du Groupe de la Banque mondiale. Importance de l’activité minière pour l’Afrique Au cours des dernières années, la contribution du secteur minier à l’économie de nombreux pays africains a augmenté bien plus rapidement que celle d’autres secteurs, accentuant ainsi l’importance de cette industrie comme mécanisme de développement et de croissance économiques. Les ressources minérales de l’Afrique sont devenues un pôle d’attraction pour les investissements directs étrangers (IDE) dans les domaines de l’exploration et du développement minier. En 20137, l’Afrique a attiré 2,9 milliards USD, soit 17 % des investissements mondiaux en matière de prospection minière, et était le principal producteur mondial de cobalt, de platine, de diamants et de chrome ainsi qu’un important producteur d’or, d’uranium et de cuivre. Bien que l’investissement dans les industries minières ait diminué au cours des deux dernières années en raison de la chute des prix des matières premières, il va inévitablement reprendre à plus long terme. Les 301 mines en production, les 333 projets en développement aux stades de conception ou d’étude de faisabilité et les 938 projets8 d’exploration en Afrique pourraient stimuler davantage la collecte de recettes nationales sur un continent où plusieurs pays luttent 1 Professeur chercheur (auteur principal), The Centre for Exploration Targeting (CET), e-mail : pietro.guj@ uwa. edu.au 2 Consultante, précédemment commissaire adjointe en charge de la fiscalité, Administration fiscale australienne (Australian Tax Office) 3 Consultante en gouvernance des ressources naturelles, GIZ/NRGI. 4 Financé par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce d’Australie. 5 Avec aux côtés de Prof. P. Guj et Mme S. Martin, M. B. Maybee, Prof. F. Cawood (Université de Witwatersrand), M. B. Bocoum (GBM), Mme M. Gosai (Administration fiscale sud-africaine) et M. S. Huibregtse (Transfer Pric- ing Associates). 6 CET est une initiative conjointe de l’Université d’Australie-Occidentale, de la Curtin University et de l’industrie minière. 7 Metals and Mining de SNL, 2014 (en anglais). 8 Nombre provenant du RIU, 2014. iii
iv Les prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique pour atteindre un ratio de recettes fiscales par rapport au PIB de 15 %, alors que ce ratio est de plus de 33,6 % en moyenne pour les pays de l’OCDE depuis 2000. Il est donc essentiel que les juridictions africaines continuent à élaborer des réglementations et régimes fiscaux miniers qui, tout en attirant les investissements directs étrangers, puissent être appliqués par leur administration, en veillant à ce que l’industrie minière soit sûre et responsable sur le plan social et écologique, et qu’elle paye un montant équitable d’impôt sur les bénéfices générés dans le pays producteur. Structures d’entreprise utilisées par les multinationales minières et leurs éventuelles conséquences sur le plan fiscal La plupart des pays africains exigent que les projets miniers appliquent des mesures de séparation, c.-à-d., qu’ils soient détenus et exploités par la filiale d’une entreprise multinationale (EMN) qui les contrôle, et que cette filiale soit dûment enregistrée et imposable dans le pays hôte. Les EMN ont eu tendance à structurer leurs activités en consolidant des fonctions à forte valeur et des actifs incorporels y associés au sein de centres qui fournissent des produits et des services à leurs exploitations à l’échelle mondiale, et en les situant dans des juridictions à faible imposition ou dans des juridictions où il est possible d’établir des entités à but spécial imposées à des taux préférentiels. Les EMN soutiennent que la consolidation de la fourniture de services au sein de ces centres est déterminée principalement par l’objectif consistant à maximiser la valeur pour l’actionnaire grâce à l’atteinte d’une masse critique à travers la gestion centralisée de ressources spécialisées, la proximité avec la clientèle, les centres de services de commercialisation et de transport ou de recherche. Cependant, l’extrême complexité et l’artificialité de certaines de ces structures à plusieurs niveaux et les preuves que certaines sociétés relais ne sont effectivement que des « boîtes postales » sans aucune finalité commerciale et qu’elles n’ajoutent que peu ou pas de valeur, indiquent qu’elles sont probablement conçues principalement pour minimiser l’impôt des EMN au niveau consolidé. Ce point de vue est corroboré par le chalandage fiscal9 et la rapidité avec laquelle certaines EMN modifient leurs structures afin de lutter contre la clôture par les gouvernements de certains vides juridiques en matière fiscale. Bien que ces pratiques fiscales puissent être techniquement légales, on peut affirmer qu’elles sont discutables d’un point de vue déontologique. Les conséquences de l’utilisation des structures d’entreprise globales par les EMN en Afrique sont les suivantes : ■■ l’assiette fiscale du pays accueillant l’activité minière peut être érodée, car les profits sont transférés à l’étranger ; ■■ les fonctions des filiales minières des EMN sont le plus souvent réduites à des activités de routine utilisant principalement du personnel moins qualifié et des actifs corporels ; ■■ peu de sociétés minières sont entièrement intégrées verticalement et exportent souvent du minerai concassé et criblé (par ex., du minerai de fer et du charbon) ou des métaux de base et autres concentrés ou des produits intermédiaires, après une transformation limitée dans leurs fonderies ou leurs centres de services de commercialisation et ■■ les sociétés minières concluent de plus en plus de transactions transfrontalières pour la fourniture de services et d’actifs spécialisés à forte valeur ou des financements, dont nombre sont effectuées par des entités liées faisant partie de la même EMN. Les autorités fiscales doivent déterminer si les bénéfices des filiales minières et leurs clients ou prestataires de service à l’étranger correspondent à la valeur effectivement ajoutée par chaque entité, tout au long de la chaîne de valeur de l’industrie minière. Un redressement fiscal peut être justifié lorsque l’aspect économique ne correspond pas au type d’arrangement relatif aux prestations. Des réseaux complexes des sociétés relais liées établies dans des juridictions soigneusement sélectionnées pour 9 des raisons fiscales qui n’auraient pas autrement été possibles en raison d’un réseau limité de conventions préventives de la double imposition (CPDI) en Afrique.
Les prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique v Les cas extrêmes peuvent justifier une requalification des transactions entre parties liées pour refléter les conditions qui auraient été convenues entre parties non liées dans des transactions sur le marché libre. Logiquement, si les sociétés minières agissaient selon le principe de la pleine concurrence, elles ne concluraient aucun accord dont les dispositions signifieraient un taux de rentabilité inacceptable ou même une perte à long terme. Elles n’accepteraient pas non plus d’accorder de gros escomptes sur les ventes de produits miniers ou de payer des prix exagérément supérieurs au marché pour des biens et services de commercialisation, de financement, techniques, de R&D et autres. De même, elles ne cèderaient pas d’actifs, parfois bien au-dessous de leurs valeurs de marché, à une entité, pour ensuite payer des frais de traitement ou des redevances pour leur utilisation. Les contribuables affirment que la requalification est faite en raison du risque de double taxation. Toutefois, cette objection pourrait être exagérée, car la plupart des juridictions proposent des crédits d’impôt étrangers ou des exemptions. Pour traiter plus efficacement ces problèmes, le Royaume-Uni a déjà introduit un « impôt sur les bénéfices détournés » et l’Australie a récemment annoncé l’introduction d’un impôt similaire. Prix de transfert et application du principe de pleine concurrence Le principe de pleine concurrence est la pierre angulaire des règles internationales qui permettent de définir les prix de transfert dans le cadre d’opérations contrôlées ou entre parties liées. Il exige que les prix de transfert soient établis comme si les parties étaient indépendantes, fonctionnant en pleine concurrence et s’engageant dans des transactions comparables dans des conditions et une situation économique similaires. Bien que les EMN soient censées fixer leurs prix de transfert en appliquant le principe de la pleine concurrence, là où ce ne serait pas le cas, il pourrait être nécessaire d’ajuster les impôts. Cinq méthodes sont présentées pour l’application du principe de pleine concurrence dans les « Principes de l’OCDE en matière de prix de transfert »10 de l’OCDE (un texte qui doit être mis à jour conformément aux recommandations des Rapports finaux BEPS 2015 de l’OCDE/G20). L’étude a confirmé que l’abus des prix de transfert représente un risque fiscal majeur dans le cadre des opérations des filiales minières des EMN en Afrique, parce que ce secteur représente souvent une source importante de recettes et que les transactions individuelles peuvent comporter des flux de trésorerie et des complexités importants. Cela a été confirmé par une analyse détaillée de la composition des revenus et des coûts des opérations minières en cours (classés par matière première, taille et type d’exploitation minière, à ciel ouvert ou souterraine) pour les principaux minerais extraits en Afrique. Le transfert de bénéfices au moyen de manipulation frauduleuse des prix peut provenir : ■■ d’une sous-facturation des produits miniers exportés transférés à des parties liées et ■■ d’une surfacturation pour la fourniture de biens et services de routine (par ex., la plupart des services d’entreprise) et pour la fourniture de biens et de services spécialisés (par ex., commercialisation, trésorerie, financement, assurances, logistique, services techniques et de R&D), ce qui vient réduire le bénéfice de la filiale minière et donc l’impôt perçu dans le pays hôte. La CEA11 a estimé que la fuite illicite de capitaux en provenance d’Afrique en raison de la manipulation frauduleuse des prix s’élevait à 50 milliards USD par an, la BAD ayant identifié « … l’imposition inefficace des activités extractives et l’incapacité de lutter contre les abus constatés concernant les prix de transfert dont bénéficient les sociétés multinationales »12 comme une cause importante de l’érosion de l’assiette fiscale dans les pays en développement. Les abus en matière de prix de transfert ne sont pas limités aux pays en développement, comme 10 Principes de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert à l’intention des entreprises EMN et des administrations fiscales, 2012. 11 Rapport 2014 du Groupe de haut niveau des Nations Unies sur les flux financiers illicites en provenance d’Afrique intitulé « Localisez-les ! Neutralisez-les ! Recouvrez-les ! ». 12 Groupe de la Banque africaine de développement, Mobilisation des ressources intérieures à travers l’Afrique : tendances, défis et possibilités d’action, Washington D.C., 2010
vi Les prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique l’on montré les récents ajustements d’impôts sur le revenu et de redevances de plusieurs millions de dollars payés par une société minière australienne qui vendait ses produits par le biais d’un centre de services de commercialisation basé à Singapour. Étant donné le risque encouru par rapport aux recettes, il est essentiel que les administrations fiscales africaines aient les pouvoirs et la capacité de s’assurer que les prix de transfert sont vraiment établis selon le principe de la pleine concurrence, au moyen du respect systématique des processus de gestion des risques pour les prix de transfert. Les discussions à propos des prix de transfert tournent souvent autour de l’audit d’un cas particulier, qui n’est qu’un aspect du vaste processus permettant d’aborder efficacement les risques sur les prix de transfert, avec entre autres : ■■ Phase 1 : la sélection des cas — sélectionner qui doit être examiné et dans quel ordre ; ■■ Phase 2 : l’évaluation des risques — sélectionner les problèmes à examiner dans les EMN identifiées ; ■■ Phase 3 : l’audit — identifier et prendre les mesures nécessaires pour gérer les risques spécifiques au contribuable par l’intermédiaire d’un éventuel ajustement fiscal et ■■ Phase 4 : la résolution tant des problèmes passés que des risques futurs. Il ne faut pas non plus sous-estimer le rôle des organisations non gouvernementales (ONG) et autres organisations de la société civile (OSC) dans la sensibilisation de l’opinion publique aux abus possibles des règles de prix de transfert par les EMN. Leurs allégations, généralement très directes, mais la plupart du temps basées sur des éléments circonstanciés, ont souvent pour effet de précipiter les enquêtes et les interventions gouvernementales. La plupart des pays africains n’ont pas la capacité d’entreprendre des audits efficaces sur les prix de transfert Malgré la présence d’une législation sur les prix de transfert généralement adéquate, les pays africains ont été incapables – à quelques exceptions près – de l’appliquer de manière efficace. Par conséquent, peu d’audits sur les prix de transfert sont effectués et ceux spécifiques à l’industrie minière sont encore plus rares. Cela est dû à un certain nombre de raisons dont : ■■ l’insuffisance générale de ressources des administrations fiscales et le manque d’expertise en prix de transfert en particulier, auxquels vient s’ajouter un niveau de connaissances inadéquat de l’industrie minière, de ses activités et de ses processus ; ■■ la complexité inhérente de certaines transactions liées à l’exploitation minière (ce qui crée de l’opacité et des occasions de manipulation) qui peuvent être dû au fait que : • la plupart des produits miniers d’un groupe transférés vers des fonderies ou des centres de services de commercialisation partenaires sont des produits intermédiaires pour lesquels il n’existe pas de normes spécifiques rigoureuses et de prix du marché facilement disponibles. Même dans le cas de métaux négociés dans les marchés finaux, les modalités de détermination des prix dans les conventions d’écoulement de la production (« off-take agreement ») peuvent présenter des difficultés lors des ajustements effectués pour atteindre une comparabilité aux prix de référence (par ex., ceux de la LME) ; • certaines transactions (particulièrement celles impliquant les savoir-faire spécialisés de commercialisation, techniques et de R&D, de gestion et juridiques et les actifs incorporels et propriétés intellectuelles difficiles à valoriser) sont souvent difficiles à vérifier étant donné que les administrations fiscales peuvent se voir refuser l’accès aux informations financières spécifiques concernant les prestataires de services associés à l’étranger ; • comme certains services miniers ne sont pas disponibles dans le pays, les autorités fiscales n’ont pas accès à des prix comparables sur le marché libre local et elles sont contraintes d’ajuster des éléments de comparaison étrangers, qui dans la plupart des cas sont sans rapport avec l’industrie minière et l’Afrique ; • les difficultés à accéder aux renseignements financiers pertinents concernant les parties liées à l’étranger à propos des opérations impliquant les prix de transfert, en dépit d’une législation nationale qui exige la mise à jour et la divulgation sur demande de la documentation contemporaine y relative et
Les prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique vii • les montants importants de capitaux reçus par les entreprises minières, qui génèrent des questions complexes sur les prix de transfert, telles que la détermination des primes de risque adéquates relative aux intérêts sur les prêts et les commissions de garantie intragroupe, celles-ci n’étant pas suffisamment prises en compte par les dispositions trop élémentaires des règles de sous-capitalisation ; ■■ compte tenu des antécédents en matière d’évasion fiscale et d’accords parfois défavorables dans le secteur minier, les administrations fiscales ont eu tendance à adopter des attitudes menant à des confrontations et des litiges avec les contribuables. Ceci en dépit du fait que, dans de nombreux cas, il peut être plus efficace de parvenir à une solution par le biais d’approches et de négociations faisant appel à un esprit de coopération, en évitant de gaspiller des ressources et du temps en actions judiciaires pouvant conduire à des résultats défavorables. Pour surmonter certaines de ces complexités, les gouvernements africains ont eu tendance à s’approprier une plus grande proportion des bénéfices en appliquant des niveaux relativement élevés de retenues à la source sur les paiements à l’étranger de dividendes, d’intérêts, de redevances, de frais de service, etc. Recommandations sur la marche à suivre Les gouvernements africains doivent répondre au grand besoin de renforcement des capacités dans le domaine de l’administration fiscale en général et des prix de transfert en particulier, ainsi qu’en matière d’amélioration de leurs connaissances des structures, des caractéristiques des chaînes de valeur et des processus de l’industrie minière. Bien que la plupart des juridictions aient déjà une législation adéquate en matière de prix de transfert, l’enjeu est d’en assurer maintenant une application efficace par la mise en place de règlements d’application, de structures et de capacités administratives adéquates. Sur la base de notre étude, nous proposons la mise en œuvre des recommandations suivantes : Administrations fiscales africaines 1 Poursuite de l’élaboration et de l’affinage des dispositions législatives relatives aux prix de transfert, en particulier leurs règlements d’application favorisant un respect et une conformité accrus à la loi, y compris concernant les documents appropriés. 2 En fonction de l’assiette fiscale du pays, détermination des meilleurs arrangements de structure institutionnelle relatifs aux prix de transfert : • par la mise en place de départements chargés des gros contribuables (comme c’est souvent le cas actuellement) avec des sections fonctionnelles spécifiques (y compris pour les prix de transfert) apportant des bénéfices, notamment en termes d’efficacité, mais en évitant autant que possible le risque d’isolement culturel du reste de l’organisation et la duplication des fonctions internes et des efforts ou • une structure basée sur les types de taxe ou les fonctions (en particulier si les ressources spécialisées sont rares) qui pourrait traiter des problèmes relatifs aux prix de transfert dans le cadre d’audits généraux ou avec l’appui de spécialistes internes en prix de transfert ou • à la limite, une unité spécialisée autonome pour effectuer certains audits sur les prix de transfert. Cette approche est actuellement rare en Afrique, mais peut être plus justifiable à l’avenir. 3 Prise en considération de l’établissement d’une équipe d’audit spécifique au secteur minier. Cela dépendra de l’importance des recettes que ce secteur génère. En ce qui concerne les prix de transfert, l’équipe d’audit spécialisée dans l’industrie minière interagira soit avec l’unité autonome, soit avec certains spécialistes qui lui seront adjoints. 4 Développement d’une meilleure compréhension des caractéristiques de l’industrie et, en particulier, de la chaîne de valeur des industries minières en ce qui concerne les produits minéraux extraits dans le pays, ainsi que les recettes potentielles et les principaux éléments de coût pour chaque exploitation minière. 5 Négociation de conventions d’échange de renseignements avec les principales juridictions fiscales de résidence des prestataires de services liés. 6 Évaluation de la pertinence de l’utilisation de la « sixième » méthode pour le transfert de produits miniers vers les centres de services de commercialisation liés.
viii Les prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique Administrations fiscales africaines 7 Examen de la pertinence de l’utilisation de mesures de simplification comme les « régimes de protection » pour les fonctions routinières et négociation d’accords préalables en matière de prix de transfert (APP) avec les principaux producteurs, en particulier pour le prix d’exportation de minerais, si nécessaire avec l’aide de consultants extérieurs spécialisés. 8 Adoption des recommandations du Rapport final BEPS 2015 sur l’Action 4 de l’OCDE, en vue de plafonner les intérêts déductibles à un pourcentage fixe de l’EBIT (de l’ordre de 10 % à 30 %) d’une entité individuelle (règle du taux fixe) ou attribution de la déduction des intérêts à diverses filiales en proportion de leur contribution aux comptes consolidés de l’EMN (règle du taux de groupe). Organisations internationales 9 Mise à disposition d’un éventail de possibilités de formation et de renforcement des capacités aux administrations fiscales africaines pour la constitution d’un inventaire de compétences approprié sur les prix de transfert comprenant : • des ateliers internationaux axés sur les problèmes relatifs aux prix de transfert dans le secteur minier qui sont actuellement organisés par le GBM, en coopération avec un certain nombre d’institutions internationales, notamment la CEA, la GIZ et la MEfDA, et qui doivent être mis en œuvre à partir de du début de l’année 2017. Ces ateliers pourraient également être ouverts aux OSC et aux ONG ; • une participation, possiblement cautionnée, à des cours universitaires diplômants ou non diplômants appropriés ; • des affectations de court et moyen terme vers des juridictions fiscales plus avancées ; • l’utilisation temporaire de spécialistes fiscaux externes provenant d’autres juridictions fiscales ou du secteur privé pour travailler aux côtés des ressources internes en mettant l’accent sur le transfert de connaissances et • la mise en place d’un suivi efficace des programmes de parrainage et plans de développement de carrière clairement définis. 10 Focalisation sur la formation pour communiquer, s’engager et négocier efficacement avec les contribuables, en promouvant une meilleure compréhension des règles d’imposition et le respect volontaire de celles-ci, et réduisant ainsi les contentieux, ce qui nécessite : • une amélioration des relations avec les contribuables grâce à une meilleure communication et consultation ; • une réduction de la tendance actuelle de prise de positions conflictuelles et • un renforcement significatif des compétences en matière de communication et de négociation des administrateurs fiscaux. 11 Création et soutien d’initiatives de coopération entre juridictions comme solution pragmatique provisoire aux contraintes actuelles de capacité pour les prix de transfert. Parmi celles-ci figurent : • la création d’Unités Multinationales de Prix de Transfert (UMPT) ponctuelles ou régionales mettant en commun l’expertise de divers pays en fonction de règles de hiérarchisation et de partage des coûts convenues ; • le soutien de la mise en œuvre de l’initiative « Inspecteurs des impôts sans frontières » de l’OCDE ; • l’acquisition en commun et le partage de bases de données comparables clés et de plates-formes de partage des connaissances et d’apprentissage en ligne, qui seraient autrement hors de prix pour les administrations fiscales individuelles au travers d’une institution de coordination (par exemple, le Forum africain sur l’Administration fiscale (ATAF)) ; • l’élargissement du réseau d’accords bilatéraux et multilatéraux internationaux d’échanges de renseignements avec les pays africains, à l’aide de capacités informatiques améliorées et de la mise en œuvre de l’initiative de déclaration pays par pays du projet BEPS. 12 Soutien et systématisation des efforts actuels consentis en faveur de la reconnaissance de l’affectation des bénéfices provenant des avantages compétitifs liés à la localisation dans les pays producteurs, qui dans le secteur minier comprendrait la valeur des « ressources minérales prêtes à l’accès » en Afrique. En substance, les améliorations importantes à apporter à l’effectivité et à l’efficacité de l’administration des règles relatives aux prix de transfert, qui pourront garantir que les pays africains recueillent leur juste part de rentes tirées des ressources minérales provenant d’une rapide expansion de l’industrie minière mondiale, nécessiteront beaucoup de temps et de ressources financières, ainsi que des efforts concertés au niveau national, soutenus par une aide internationale continue.
Table des matières Résumé analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . iii 1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 2. L’industrie minière et les prix de transfert en Afrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 2.1 Profil de l’industrie minière en Afrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 2.2 Analyse fonctionnelle : la chaîne de valeur minière et ses fonctions, actifs et risques 8 2.2.1 La chaîne de valeur minière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 2.2.2 Les fonctions réalisées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 2.2.3 Les actifs utilisés dans l’exercice des fonctions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 2.2.4 Les risques pris dans l’exécution des fonctions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 2.3 Les quatre phases de conformité aux prix de transfert et les processus d’audit . . . . . 15 3. Les risques pour les recettes de l’État découlant de la structure des EMN et des abus de prix de transfert entre parties liées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 3.1 Structures organisationnelles utilisées par les EMN du secteur minier et leurs conséquences fiscales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 3.2 Centres de services intégrés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 3.3 Matrice des risques sur les recettes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 3.4 Centres de services de commercialisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 3.5 Centres de services financiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 3.5.1 Détermination des taux d’intérêt appropriés pour l’industrie minière . . . . . . . . . . . . . 28 3.5.2 Questions relatives à la sous-capitalisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 3.5.3 Requalification de transactions d’emprunt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 4. Développement et mise en œuvre de législations en matière de prix de transfert en Afrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 4.1 Difficultés dans l’application de la législation sur les prix de transfert en Afrique . . . 34 4.2 Accès à des bases de données comparables et autres informations essentielles d’audit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 4.3 Nécessité d’améliorer la communication et la coopération avec les parties prenantes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 4.3.1 Traiter et négocier efficacement avec les contribuables du secteur . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 4.3.2 Traiter avec les organisations de la société civile et les communautés . . . . . . . . . . . . . . 37 4.4 Stratégies de simplification possibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 4.4.1 Régimes de protection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 4.4.2 Accords préalables en matière de prix de transfert (APP) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 4.5 Problèmes découlant des conventions préventives de la double imposition (CPDI) et du chalandage fiscal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40 5. Recommandations sur la marche à suivre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 Annexe A. Sources principales de conseils dans les phases de vérification et d’audit en matière de prix de transfert . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45 ix
1 Introduction L a contribution du secteur minier à l’économie de nombreux pays africains a augmenté bien plus rapidement ces dernières années que celle d’autres secteurs, accentuant ainsi la dépendance de leur développement et de leur croissance économiques à cette l’industrie. L’activité économique de l’Afrique associée aux industries minières est estimée à environ 20 pour cent13. Cet état de fait n’est pas surprenant, étant donné la richesse, la variété en minéraux et compte tenu du potentiel indiscutable du continent, qui, au cours du dernier boom minier, a fortement attiré l’investissement direct étranger (IDE) axé sur l’exploration et le développement minier. On estime qu’en 201314, l’Afrique a attiré 2,9 milliards USD, soit 17 % des investissements mondiaux en matière de prospection minière, principalement pour l’or, les métaux de base et le fer. Lors du dernier décompte15 en 2013, à l’exclusion des mines artisanales, 301 mines en exploitation en Afrique dominaient la production mondiale en cobalt (70,9 %), en platine (63,5 %), en diamants (53,8 %) et en chrome (48,2 %), et représentaient une part importante de la production mondiale en or (18,9 %), en uranium (17,2 %) et en cuivre (10,5 %). Bien que l’investissement dans l’industrie minière ait diminué au cours des deux dernières années en raison d’importantes baisses des prix des matières premières, ceci semble s’être maintenant stabilisé, ou même dans le cas de certaines matières premières semble avoir augmenté. La réduction de la production et les retards dans le développement de nouveaux projets (y compris les 333 projets africains au stade de l’étude de faisabilité et d’étude approfondie) pourraient conduire à moyen terme à des pénuries d’approvisionnement qui devraient aider à la remontée des prix et à ce que l’IDE dans le secteur minier puisse reprendre sa tendance à la hausse. Il est donc essentiel que les juridictions africaines continuent à élaborer un cadre réglementaire pour le secteur minier et des régimes fiscaux suffisamment efficaces pour attirer les investissements directs étrangers dans l’exploration et le développement miniers. De plus, il faudrait que ces régimes soient à même d’être appliqués sur le plan administratif, ce qui garantirait que l’industrie minière des pays concernés soit sûre, responsable sur le plan social et environnemental et qu’elles s’acquittent d’un montant équitable d’impôt sur les bénéfices générés dans le pays producteur. La nature globale de l’industrie minière, son appétit pour le capital-développement et la pénurie générale en capitaux locaux et en expertise spécialisée font que la plupart des projets miniers africains sont détenus et exploités par les filiales minières d’entreprises multinationales (EMN) intégrées verticalement, couvrant la totalité de la chaîne de valeur minière et opérant dans de nombreux pays, souvent par l’intermédiaire de différentes entités du groupe. Leurs filiales minières exportent généralement la majorité de leurs produits minéraux et importent des capitaux ainsi que d’autres biens et services. Le plus souvent, cela est rendu possible par des transactions transfrontalières avec des compagnies associées qui font partie d’un 13 Mining in Africa - Towards 2020, KPMG 2012 (en anglais). 14 Metals and Mining de SNL, 2014 (en anglais). 15 Resource Information Unit, 2014 Register of African Mines (en anglais). 1
2 Les prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique même groupe multinational, souvent établi dans les juridictions à faible imposition, ou permettant la création d’entités à but spécial. La CNUCED16 (2015) estime qu’environ 30 % de l’investissement transfrontalier à l’échelle mondiale passe par l’intermédiaire de ces centres de services internationaux qui créent des possibilités d’évasion fiscale sur les revenus provenant de ces investissements. Le prix de transfert est le processus de détermination du prix des produits, des services et des biens vendus entre parties liées au sein d’une EMN. Par exemple, si une filiale minière vend des produits minéraux à une société mère, le prix payé pour ces marchandises à la filiale s’appelle le prix de transfert. Le prix de transfert est une pratique normale dans le domaine de la comptabilité d’entreprise. Cependant, certaines EMN peuvent utiliser les opérations de transfert pour faire passer les bénéfices dans des juridictions à faible imposition afin de réduire leur charge fiscale dans le pays où se trouvent les exploitations minières. Ceci est considéré comme une manipulation et donc désigné sous le terme de « abus des prix de transferts ». Dans le secteur minier, l’abus des prix de transfert est généralement dû à : ■■ une sous-facturation des produits miniers exportés à des parties liées et ■■ une surfacturation des transferts intrants (et une sous-facturation des transferts extrants) pour des biens et des services de l’étranger fournis par des parties liées, notamment pour des services de commercialisation et des services financiers, des services aux entreprises et de soutien, des actifs corporels et incorporels, en particulier le savoir-faire exclusif, les droits de propriété intellectuelle et la recherche et le développement (R&D). Dans cet ensemble de circonstances, il est essentiel pour les autorités fiscales d’être en mesure de déterminer si les prix de transfert utilisés sont définis en conformité avec le « principe de la pleine concurrence ». Ce principe est la pierre angulaire des règles internationales d’examen des prix de transfert dans les transactions contrôlées entre des parties liées ou associées1718. Ce principe requiert que le prix des transactions soit établi comme si les parties étaient indépendantes, dans une situation de pleine concurrence, et s’engageaient dans des transactions comparables dans des conditions et circonstances économiques semblables. Pour appliquer le principe de pleine concurrence, il est nécessaire d’identifier une transaction entre parties non liées suffisamment similaire, à partir de laquelle il est possible de dégager des données comparables sur les prix et de les comparer aux prix de transfert appliqués dans la transaction concernée avec une partie liée. Il peut être nécessaire de procéder à un ajustement fiscal, là où le prix de transfert s’écarte de celui utilisé comme référence. Cependant, il est souvent difficile de déterminer si une transaction a été évaluée selon le principe de la pleine concurrence, dans les cas où les caractéristiques du produit minéral transféré à des parties liées à l’étranger diffèrent sensiblement du produit finalement vendu à une tierce partie indépendant ou sur le marché libre et que la transaction porte sur des actifs incorporels difficiles à valoriser pour lesquels des données comparables, des connaissances et l’expérience spécifiques à l’industrie pourraient ne pas être facilement disponibles au sein des administrations fiscales. 16 Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), Rapport sur l’investissement dans le monde 2015, Réformer la gouvernance de l’investissement international. 17 Pour de plus amples détails sur les actifs corporels et incorporels, consulter la publication « Prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique : Guide de référence pour les fiscalistes ». 18 Deux entreprises sont associées (ou liées) l’une à l’autre si l’une des entreprises répond aux conditions figurant dans l’article 9 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE, c.-à-d., si elle participe directement ou indirectement à la gestion, au contrôle ou au capital de l’autre entreprise.
Les prix de transfert dans l’industrie minière, avec focalisation sur l’Afrique 3 Le principe de pleine concurrence est utilisé dans les modèles de conventions fiscales élaborés par l’OCDE et l’ONU, et il est maintenant présent dans la législation nationale de la plupart des pays en développement. Une conformité cohérente et appropriée au principe de pleine concurrence corrobore les résultats en concordance avec les activités créatrices de valeur des différents membres du groupe multinational, tout en réduisant le risque de double imposition. L’ouvrage « Principes de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert à l’intention des entreprises multinationales et des administrations fiscales » de l’OCDE, actuellement en cours de mise à jour pour tenir compte du Rapport final 2015 BEPS sur les actions 8 à 10, présente cinq méthodes qui peuvent être utilisées pour appliquer le principe de la pleine concurrence, dont : ■■ la méthode du prix comparable sur le marché libre, ■■ la méthode du prix de revente, ■■ la méthode du prix du coût majoré, ■■ la méthode transactionnelle de marge nette (MTMN) et ■■ la méthode transactionnelle de partage des bénéfices (MTPB). Certains pays en développement utilisent également de ce qu’on appelle la « sixième méthode » qui implique l’utilisation obligatoire du cours des minerais cotés à leur date d’expédition à une partie liée. Bien que cette méthode ait l’avantage de fournir des points de repère clairs et certains, elle n’exige pas la considération des circonstances précises entourant la transaction proprement dite, ce qui la rend moins compatible avec le prix de pleine concurrence. Cependant, l’OCDE a indiqué que cette méthode peut être considérée comme une approche anti-abus appropriée pour les pays en développement, en raison de difficultés à obtenir des données comparables ainsi que pour sa simplicité administrative. Les entités d’une EMN qui suivent l’approche énoncée dans les « Principes applicables en matière de prix de transfert » de l’OCDE seraient tenues d’appliquer le principe de la pleine concurrence dans la détermination des prix pour leurs transactions avec les parties liées. Il serait également attendu qu’elles mettent à jour et à disposition leur documentation sur les prix de transfert, en démontrant la manière dont elles ont choisi la méthode la plus appropriée, la façon dont le prix de transfert a été calculé et la façon dont les résultats des diverses entités de l’EMN concernées sont conformes aux activités de création de valeur. Cependant, dans la pratique, cela pourrait ne pas être le cas, car les informations pourraient parfois ne pas exister, ou ne pas avoir été mises à la disposition des administrations fiscales. Sans cette documentation, il est presque impossible pour les administrations fiscales d’évaluer si les filiales sont parvenues à dégager une estimation fiable du prix de transfert, selon le principe de la pleine concurrence. Certains pays ont donc resserré leurs exigences législatives de façon à ce que les contribuables tiennent à jour leurs documentations sur les prix de transfert et les fournissent automatiquement ou sur demande. Dans le Rapport final 2015 BEPS, l’Action 13 sur la déclaration pays par pays de l’OCDE recommande l’adoption par les administrations fiscales d’une approche à plusieurs niveaux à la documentation relative aux prix de transfert : un fichier principal contenant des informations sur l’ensemble de l’EMN et un fichier local qui se rapporte précisément aux opérations entre parties liées qui ont lieu dans le pays hôte. La négociation d’accords d’échange de renseignements avec les pays de résidence des filiales concernées des EMN et, à défaut, des règles de présomption à appliquer lorsque les renseignements ne sont pas fournis peuvent être des moyens efficaces de régler certaines de ces difficultés.
2 L’industrie minière et les prix de transfert en Afrique 2.1 Profil de l’industrie minière en Afrique De nombreuses économies africaines riches en minéraux ne sont pas bien diversifiées et sont, dans de nombreux cas, fortement tributaires des industries minières. L’« indice de dépendance des pays au secteur minier »19 du PNUD (sur la base de trois indicateurs : (i) la part du revenu total des exportations provenant des industries extractives ; (ii) la part des industries extractives dans le total des recettes publiques ; et (iii) la valeur ajoutée des industries extractives exprimée en pourcentage du total) indique clairement la façon dont la plupart des pays d’Afrique subsaharienne (par ex., la Namibie, la République centrafricaine, la RDC, la Zambie, le Mali, etc.) sont fortement tributaires des activités minières. Cette conclusion est étayée par une série d’indicateurs additionnels, y compris les recettes et les exportations de produits miniers représentant au moins 20 % du total des recettes fiscales et des exportations (FMI), les recettes moyennes sur 5 ans de ces ressources qui représentent plus de 20 % des recettes fiscales, et des bénéfices tirés des rentes s’élevant à plus de 10 % du PIB (McKinsey Global Institute). L’évasion fiscale par les sociétés minières dans les pays riches en ressources pourrait avoir un effet désastreux sur les recettes générées et elle nécessite, par conséquent, une attention particulière des administrations fiscales, qui doivent régulièrement évaluer les risques posés par les prix de transfert dans le secteur minier et examiner leur stratégie de conformité et l’affectation ultérieure des ressources, de façon à rester dynamiques en cas de modification de la situation de l’industrie. Il est essentiel que l’expertise fort restreinte à la disposition des audits sur les prix de transfert soit dirigée vers des transactions à risque élevé, tout en favorisant le maintien d’une conformité générale par l’amélioration de la communication et le développement de procédures simplifiées dans le traitement des transactions de routine. Pour ce faire, les administrations fiscales doivent rechercher et analyser des renseignements pertinents sur les opérations en se servant de critères fondés sur le risque pour identifier les entreprises minières qui pourraient justifier une attention particulière. Les administrations fiscales doivent, par conséquent, comprendre les caractéristiques de l’industrie et, en particulier, le rôle spécifique que leur pays joue dans l’industrie à l’échelle mondiale, ainsi que la chaîne de valeur pour certaines matières minérales extraites dans leur pays. Cela implique l’obtention d’informations sur les éléments suivants : ■■ les EMN effectuant des opérations minières dans le pays, y compris le type de minéraux extraits avec la forme et le volume des exportations, ainsi qu’une comparaison du chiffre d’affaires et des flux de trésorerie ; 19 Hailu, D. et Kipgen, C., 2015. The Extractives Dependency Index, Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) (en anglais). 4
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