Éloge de la singularité - La matière des livres - 100 livres pour éveiller le désir Ombres Blanches décembre 2020
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Éloge de la singularité. La matière des livres Collage de Max Ernst. 100 livres pour éveiller le désir Ombres Blanches décembre 2020 ☞
Éloge de Des masques. Des portraits. Les arts des visages la singularité. La matière des livres François Nayt • Kifwebe. Un siècle de masques Songye • 5 Continents Éditions • Les masques kifwebe sont animés d’une « vie surnaturelle » liée à leur hybridité unique où se fondent l’homme, l’animal et l’esprit ; un mélange qui reflète l’essence mystique des Songye et des Luba de la région sud-est de l’actuelle République démocratique du Congo. Conjuguant la pulsation d’un réseau linéaire de motifs striés avec l’expression puissante d’émotions multiples, leur Entre sourires et masques, les derniers mois à Ombres blanches nous auront regard fixe impose une présence inflexible. Ils sont cependant bien plus que leur apparence — leur marqué par l’attachement aux livres si fortement exprimé par nos lecteurs. Lors essence s’accomplit dans les rites et la danse. Depuis quelque temps, les historiens de l’art et les 100 e du confinement de novembre, si les ventes en ligne ont maintenu une certaine anthropologues leur accordent un intérêt croissant. activité économique, celle-ci s’est concentrée sur un nombre beaucoup plus restreint de titres qu’à l’accoutumée. Il est vrai que c’est en librairie que se réa- lise la découverte de nos lectures à venir… et nulle part ailleurs. Faute de public, Pascal Bonafoux • Autoportraits cachés • Éditions du Seuil • bien des livres que nous aimons ont ainsi plutôt « disparu des radars », durant Les titres affichés de certaines œuvres ne disent pas tout du sujet. Ils passent sous silence que, ces semaines où il était… impossible de les voir. Ainsi ne trouvera-t-on désormais parfois, le peintre s’est glissé dans la scène qu’il a représentée. C’est ainsi que, par exemple, rien de plus expressif que ce trou d’air dans les ventes du secteur de l’édition, et Botticelli « assiste » à l’Adoration des Mages, qu’El Greco est présent lors de l’Enterrement du notamment chez les éditeurs les plus « indépendants », s’il fallait prouver que la comte d’Orgaz, comme Vélasquez l’est à Breda le 5 juin 1625 lorsque la ville capitule… Les œuvres diversité de la production des livres tient à la présence de nos librairies et à l’ac- de Michel-Ange et de James Ensor, de Memling et de Véronèse, de Rembrandt et de Masaccio, cueil de leurs publics. de Dürer et de Raphaël, de Ghirlandaio et de Dalí, et d’autres encore rassemblées dans ce livre 39 e Car c’est cela, cette obsession de la diversité, ce goût pour la multitude, qui est invitent à s’interroger sans cesse sur les raisons qui ont conduit les uns et les autres à faire le choix le cœur de notre activité professionnelle… Mais comment en rendre compte ail- d’un tel jeu. leurs que dans nos magasins, ailleurs que dans nos espaces, entre nos tables et nos rayonnages… Mais surtout, comment dessiner la « commune des esprits sin- guliers » que sont les librairies et aussi les bibliothèques ? En cette fin d’une année si particulière, marquée par une lumière si altérée et un Yves Peyré • Francis Bacon ou la mesure de l’excès • Gallimard • horizon si imprécis, nous avons voulu donner à voir des livres inattendus, soit par […] À propos de son travail, dans ses entretiens, Francis Bacon reste constant pour ce qui est du le choix de leur univers, soit par celui de leur fabrication, de leur conception édi- processus de création. Il dépeint son travail comme un acharnement à aboutir, il confie invariable- ment le même désespoir de ne pouvoir y parvenir qu’exceptionnellement. Ses propos sont plus toriale (maquette, typographie, illustration), soit encore par l’originalité de leur ou moins resserrés, elliptiques, ils tiennent compte de certaines différences propres aux périodes : projet littéraire ou leur caractère insolite (taille, volume, format). ainsi, longtemps, le fond est peint en premier, il accueille le sujet, avant de l’être après, il cerne alors Nous aurions pu montrer un très grand nombre de publications, tant les ca- la figure, faisant office de mandorle […]. Souvent Bacon, s’il se trouve dans l’embarras, conclut qu’il talogues de nos nombreux éditeurs sont riches d’intentions et de convic- 49 e ne sait pas voir, que le sujet est trop loin de ses centres d’intérêt. Yves Peyré tions, mais il fallait choisir… Aussi avons-nous limité et choisi la « contrainte » : nous présentons donc dans ce document, « feuilletable en ligne », 100 titres, classés par groupes de 4, et donc présentés sous 25 rubriques. Nous espérons que vous serez séduits par cette flânerie, qui n’a pour buts que le plaisir Coline Chaptal • Studio Zgorecki • Éditions Filigranes • de la découverte d’un livre et la découverte du plaisir d’un travail d’édition… Archives photographiques de l’immigration polonaise dans le bassin houiller du nord de la France, Nous profitons de cette page pour souhaiter tout ce qu’il est pos- dans les années 1920/1930. Né en 1904 dans la Ruhr, de parents originaires de Pologne, Kasimir sible de souhaiter pour les mois qui commencent dans quelques jours… Zgorecki émigre dans le Nord de la France à l’âge de 18 ans. Mineur de fond pendant quelque six Éloigner l’épidémie, rapprocher les êtres, les garder en vie. Leur donner à lire. mois, il se tourne ensuite vers la photographie professionnelle et reprend en 1924 le studio de son beau-frère à Rouvroy (Pas-de-Calais). Zgorecki s’investit notamment dans la photographie d’iden- tité, devenue obligatoire sur les cartes des étrangers travaillant en France en 1917. il recourt stra- tégiquement à un unique négatif-verre pour plusieurs portraits, faisant poser ses sujets devant un 35 e fond neutre. À la différence, le style de ses portraits de famille est souvent davantage mis en scène. Œuvrant dans son studio, en extérieur ou au domicile de ses clients, Zgorecki photographie Catalogue réalisé par la librairie Ombres blanches. Édition : Christian Thorel. Création de la maquette et mise en page : Pascale Marange Petits Papiers. Impression : Cazaux Imprimerie Muret. ☞ •3• ☞
Encre et mine de plomb. Mine de plomb et encre. Visionnaires et engagés Usages du noir et du blanc Gérard Audinet • Victor Hugo. Dessins • Maison de Victor Hugo/Paris Musées • Stephen Calloway, Caroline Corbeau-Parsons • Aubrey Beardsley au Musée d’Orsay Si Hugo n’a guère voulu montrer ses dessins de son vivant, des artistes phares ont depuis reconnu • Réunion des Musées Nationaux • son audace, tel André Breton, qui y vit « des tableaux où la plus puissante imagination se donne Aubrey Beardsley (1872-1898) disparaît à l’âge de vingt-cinq ans, en pleine ascension. La grande cours ». Les Maisons de Victor Hugo, Paris/Guernesey, conservent aujourd’hui plus de sept cents diffusion de l’œuvre de cet artiste prolifique en a fait un acteur incontournable de la scène londo- feuilles. Gérard Audinet, leur directeur, s’attache ici à suivre pas à pas, année après année, l’intense nienne des années 1890. Les illustrations qu’il réalise pour Salomé d’Oscar Wilde figurent parmi fièvre graphique du poète, faisant de cette étude une véritable monographie. Cet ouvrage dévoile les plus célèbres de l’artiste. Les dessins de cette figure originale de l’Angleterre fin-de-siècle, des- l’incroyable fécondité et la pleine liberté d’un écrivain dessinateur dont les yeux et la plume ne sins vifs et virtuoses, en noir et blanc, mettent en scène un univers étrange, érotique, audacieux et 49 e cessèrent de fouiller l’obscurité. anticonformiste. 39 e Laurent Baridon, Jean-Philippe Garric (Dir.) • Jean-Jacques Lequeu. Bâtisseur de Lynd Ward • L’éclaireur : Récits gravés • Coffret de trois livres • Éditions Monsieur fantasmes • Éditions Norma • Toussaint Louverture • Quel lien y a-t-il entre L’Origine du monde de Gustave Courbet et le « Palais idéal » du facteur En seulement six livres, Lynd Ward [1905-1985] s’est imposé comme l’un des précurseurs du roman Cheval ? Selon Annie Le Brun, « il y a Jean-Jacques Lequeu, qui, sans en être conscient, pressent graphique. Ses histoires, de l’artiste qui vend son âme, aux amants pris dans les tourments de leur que l’origine du rêve architectural a quelque chose à voir avec cette origine du monde ». « Archi- temps, en passant par l’homme maudit de ses péchés ou l’ouvrier rebelle à la psyché précaire, ont tecte de papier », Lequeu rêve de monuments somptueux, de fabriques fictives et de paysages su capturer un monde plein de contradictions dans des images d’une époustouflante modernité. imaginaires ; au-delà de l’architecture, sa galerie s’enrichit de multiples dessins, d’une suite trou- Sur les pas de Frans Masereel et d’Otto Nückel, ces récits en gravures sur bois, ou romans sans 39 e blante d’autoportraits, de portraits grimaçants, de tableaux érotiques et de détails anatomiques paroles, dessinent les contours d’une œuvre riche et exaltée. 65 e sans complaisance. Jacques Armand Cardon • Cathédrale • Éditions Super Loto • Hannelore Fischer, Alexandra von dem Knesebeck • Käthe Kollwitz, Je veux agir Synthèse graphique et symbolique du fameux style Cardon, ce livre crée un pont entre son travail dans ce temps : dessins, estampes, sculptures •. Musées de Strasbourg • d’auteur de bandes dessinées que les lecteurs ont pu découvrir dans les pages de L’Humanité Alors que Käthe Kollwitz est unanimement reconnue en Allemagne comme une des artistes les Dimanche dans les années 1970, ses dessins de presse paraissant chaque semaine pendant plus plus importantes de la première moitié du xxe siècle, elle reste méconnue en France. Son œuvre 30 e de 40 ans au Canard Enchaîné, ou encore ses grands formats publiés au compte-goutte dans gravé et sculpté frappe par son éloquence formelle, sa puissance narrative et sa virtuosité tech- les différentes revues de Frédéric Pajak. Les dessins et l’enchaînement des scènes de Cathédrale nique, mais aussi par la constance de son engagement en faveur des plus démunis, en particulier reprennent symboliquement les grandes étapes de la vie de Cardon, de sa plus tendre – et pas si des femmes. Rares sont les œuvres qui avec autant de sincérité et de force racontent à la fois la tendre – enfance jusqu’à aujourd’hui. 35 e joie intime de la maternité et la douleur infinie du deuil, le joug de la misère et l’espoir de la révolte. Frédéric Pajak • Manifeste incertain # 9 • Avec Pessoa, souvenirs I, II, III, l’horizon des Joris Van Parys, Samuel Dégardin (Dir.). Frans Masereel. l’empreinte du monde • événements I, II, l’absence, épilogue • Éditions Noir sur Blanc • Éditions Martin de Halleux • C’est une sorte de miracle si l’on a pu exhumer les écrits de Fernando Pessoa, retrouvés dans une Tout au fil de son œuvre, Masereel nous propose sans relâche sa vision du monde. Un monde an- malle. Désormais l’un des écrivains les plus célèbres de son siècle, Pessoa n’avait presque pas été cré dans le quotidien, sans filtre et sans effet inutiles, dans lequel les fracas de la guerre font trem- publié de son vivant, ni ses principaux « hétéronymes » — Ricardo Reis, Álvaro de Campos, Alberto bler l’air saturé d’effrois. Un monde où la révolte gronde et où les hommes se lèvent et tombent. Caeiro et Bernardo Soares —, dont il avait soigneusement créé l’œuvre et la biographie. Nous le Mais aussi, un monde où le souffle de l’amour et de la passion conduit à croire en un monde découvrons en Afrique du Sud, durant sa jeunesse, puis à Lisbonne sous les traits d’un modeste meilleur. Car Masereel a foi en l’homme. Il fait le pari de l’intelligence et de la créativité, de la 23 e employé de bureau. Mais qui donc se cache derrière ce personnage effacé, qui n’aura connu 65 e justice sociale et de la liberté individuelle. Il est persuadé que l’art et la littérature ont le pouvoir qu’un seul amour, platonique et malheureux ? Unissant des voix distinctes, ce dernier Manifeste de changer le monde. Alors, il se bat, il dénonce et vit pleinement sa vie d’artiste engagé dans le incertain explore biographie et autobiographie, narration et introspection, rêves et réalités, dans tumulte du monde. un récit délibérément labyrinthique jalonné de plus de deux cents dessins. ☞ •4• •5• ☞
Qui a peur des femmes I l s f o n t l e p o i n t. photographes ? Photographie française Luce Lebart, Marie Robert • Une histoire mondiale des femmes photographes • Michel Poivert • 50 ans de Photographie française • Éditions Textuel • Éditions Textuel • Inclure les différentes pratiques photographiques allant de l’information à l’art contemporain est Rares sont celles dont les noms sont parvenus jusqu’à nous, disparaissant du récit de la création le pari de ce livre. Le renouvellement du reportage, la passion pour le paysage ou encore le té- au profit des « grands maîtres ». L’effacement des femmes dans l’histoire de la photographie moignage social, reconstituent ici la diversité d’une scène française. Du journal au musée, du récit résulte d’une longue tradition de discrédit. Créatrices originales et autonomes, elles n’ont pourtant de soi à l’ambition documentaire, du regard militant à l’expérimentation plastique, près de trois cessé de documenter, d’interroger et de transfigurer le monde, démontrant que l’appareil photo générations sont ici rassemblées au travers de 250 images. Au-delà des photographes humanistes 69 e peut être un fantastique outil d’émancipation. Aucune expérimentation ni aucun fracas des xixe qui ont caractérisé la photographie française jusqu’à la fin des Trente Glorieuses, la réalité d’une 59 e et xxe siècles ne leur ont ainsi échappé. Pour restituer la diversité des parcours de ces femmes photographie « en France » apparaît comme un fait artistique et social majeur. photographes, Luce Lebart et Marie Robert ont invité 160 autrices de différents points du globe à nourrir cet ouvrage manifeste. David Chandler, Muriel Enjalran • Tendance Floue. Villes du monde • Fondation Louis Vuitton • Marwan T. Assaf • Le sujet photographique au-delà de la mort : dans les Œuvres de Paris, Shanghai, New York, Tokyo, Rome… en trente villes et neuf atmosphères, les deux cent vingt- Nan Goldin et Julia Margaret Cameron • Eyes Publishing • cinq photographies du collectif Tendance Floue réunies dans cet ouvrage tracent les contours Est-ce vrai, comme beaucoup le croient, qu’une photographie capture l’aura d’une personne ? d’une ville contemporaine archétypale. Au-delà de chaque écriture singulière, on trouve une ville Marwan T. Assaf étudie les photographies de défunts dans les œuvres des artistes Nan Goldin et globale, une ville-monde dans laquelle le lecteur est convié à un voyage fulgurant, mystérieux et Julia Margaret Cameron. Les sujets de leurs photographies sont physiquement décédés, mais il y stimulant, à une déambulation sensible et poétique. Et on découvre combien les images de ces a une différence. Dans les années 1970 et 80, Goldin photographiait ses amis gravement malades 75 e quatorze photographes de Tendance Floue entrent en résonance avec les utopies littéraires, et avec pour but de les garder « vivants dans la mémoire ». Plus d’un siècle auparavant, Cameron notamment Les Villes invisibles d’Italo Calvino. 39 e photographiait son cercle d’amis pour leur donner une vie après la mort en rassemblant un « pan- théon de têtes victoriennes ». Catherine Riboud, Olivier Rolin • Marc Riboud. Histoires possibles • Réunion des Musées Nationaux • Adeline Souverain • Sarah Moon. Passé Présent • Paris-Musées • « Je photographie comme le musicien chantonne. Regarder est une respiration et, quand le hasard Passé Présent a été imaginé par Sarah Moon comme une installation faisant dialoguer les photo- est avec moi et qu’une bonne photo m’est donnée, le bonheur n’est pas loin ». Ce photographe, graphies, les films et les livres que l’artiste réalise depuis le début de son parcours. D’abord man- c’est Marc Riboud, qui nous a emmenés avec lui pendant toute la seconde moitié du xxe siècle, nequin dans les années 1960, Sarah Moon pratique la photographie en autodidacte, et conçoit là où l’entraînaient sa curiosité et sa recherche de surprises et de beauté. On le suit d’abord sur la ses premières campagnes pour la mode, qui rencontrent un écho international. Elle façonne un route qui le mène d’Istanbul à Calcutta, puis en Chine, alors terra incognita, en Afrique et en Al- univers fictionnel où affleurent les références littéraires et cinématographiques. Au milieu des an- 35 e gérie au moment des indépendances, mais aussi au Vietnam pendant la guerre, au Cambodge…, 39,90 e nées 1980, elle initie une pratique plus personnelle, qui prolonge ses recherches sur la fabrication captant ici et là des images qui se fixent dans notre mémoire comme cette Jeune Fille à la fleur des récits, sur les illusions photographiques et leur disparition dans la fuite du temps. (1967), symbole de l’aspiration à la paix. Marie-Laure Bernadac, Marie Darrieussecq • Cindy Sherman : exposition, Paris, Fon- Bernard Perrone, Jeanne Fouchet • Bernard Plossu. Tirages Fresson • Éditions Textuel • dation Louis Vuitton • Éditions Hazan • Des années 1970 à nos jours, depuis les paysages du grand Ouest américain jusqu’à la gare de Du milieu des années 1970 à nos jours, Cindy Sherman a produit une œuvre photographique La Ciotat ou aux jardins de Giverny, Bernard Plossu propose une vision intime et sensorielle du quasi intégralement consacrée au portrait, sans jamais recourir à d’autres modèles qu’elle-même. monde, où l’homme et l’organique se juxtaposent. Cette vision dirigée par la sensation, il la traduit Paradoxalement, c’est en disparaissant derrière ses masques et ses costumes que Cindy Sherman grâce à la technique de tirage Fresson. La texture particulière et le rendu très subtil de ce procé- est devenue une icône, bousculant l’idée même d’identité et les frontières entre réalité et fiction, dé pigmentaire, inventé au dix-neuvième siècle par la famille du même nom basée désormais à 35 e initiant le développement d’une œuvre considérée comme capitale dans l’histoire de l’art de ces Savigny-sur-Orge, répondent à merveille à la focale sans esbroufe du photographe, soucieux de cinquante dernières années. mettre à distance le spectaculaire et le grandiloquent. La longévité de la collaboration de Piossu 49 e avec la famille Fresson sur trois générations est partie prenante de l’œuvre elle-même. ☞ •6• •7• ☞
De la paillasse à la tombe. L e C i n é m a s ’é c r i t. Anatomie de la mort Du celluloïd au papier Dominique Le Nen • Léonard de Vinci : l’aventure anatomique • EPA Éditions • Ozu Yazujiro • Carnets 1933-1963 • Éditions Carlotta • Quand Léonard de Vinci pratique ses premières dissections à Milan vers 1487, avec l’idée de ré- Yasujirô Ozu est un des plus grands cinéastes au monde. Son œuvre est unique et touche, comme diger un traité général d’anatomie, il est loin d’imaginer combien ses découvertes seront encore certains le disent, à un « au-delà » du cinéma. Comment cet homme en est-il venu à créer une pertinentes aujourd’hui. À travers les planches exceptionnelles de la collection de la Royal Library, œuvre cinématographique si forte à la portée si universelle ? La réponse est peut-être dans le mises en parallèle avec l’imagerie médicale la plus récente, on découvre ici l’œuvre du plus grand journal quotidien qu’il a tenu toute sa vie, où, entre notations laconiques, inspiration poétique et artiste et scientifique de la Renaissance, et sa vision avant-gardiste du corps humain. expression de ses émotions et pensées le plus souvent sarcastiques, se révèle un être de chair et 50 e de sang d’une rare sensibilité et intelligence. 45 e Joanna Ebenstein • Anatomica. L’art exquis et dérangeant de l’anatomie • Éditions du Seuil • John Cassavetes • Cassavetes par Cassavetes • Éditions Capricci • Cette anthologie présente des planches illustrées d’anatomie, révélant comment les secrets du Suivant un fil chronologique, John Cassavetes y raconte son enfance et sa jeunesse, ses études corps ont fasciné les savants, les artistes, mais aussi les profanes. De la Renaissance jusqu’au d’art dramatique, ses débuts d’acteur fauché à New York, ses combats permanents contre les stu- xxe siècle, les croyances et les savoirs sur le sujet ont évolué de manière spectaculaire Tous les dios d’Hollywood et les automatismes du cinéma commercial. Il expose en détail les étapes de artistes ont étudié l’anatomie afin de toucher de plus près la vraisemblance de leurs personnages. réalisation de chacun de ses films, de Shadows (1959) à Love Streams (1984). Tournages épiques, Elles sont présentées non pas par ordre chronologique, mais organisées en fonction des parties souvent interrompus faute d’argent, montages sans cesse repris, communication et plans de sortie 29 e du corps ou de ses systèmes, pour mieux souligner la richesse des approches métaphoriques ou menés par le cinéaste lui-même… Toute sa vie, Cassavetes restera fidèle à sa vision radicale de l’art artistiques, et les différents styles utilisés pour comprendre et représenter le corps humain. 45 e et du cinéma, parfois même contre l’avis de ses collaborateurs les plus fidèles, tels que les acteurs Peter Falk, Ben Gazzara, ou sa femme et actrice Gena Rowlands. Joanna Ebenstein (Dir.) • Macabre : Traité illustré de la mort • Cernunnos Éditions • Depuis toujours, dans le monde entier, les hommes ont établi des rituels pour célébrer leur fini- Marx Brothers (Éd. Chantal Knecht) • Les Marx Brothers par eux-mêmes • tude, tout comme les artistes ont figuré la mort pour mieux l’appréhender. Aujourd’hui, ces repré- Bouquins-Laffont • sentations ont presque disparu, cachées, tues, par une société qui veut oublier sa mortalité. Cet C’est l’histoire d’une fratrie, issue d’une famille pour le moins originale, qui, au début du xxe siècle, ouvrage rassemble pour la première fois plus de mille œuvres d’art, objets ou photos sur le thème a semé le désordre et la folie dans une Amérique bien-pensante et dont les membres sont les de la mort. Cette collection de Richard Harris, unique, est éclairée par les essais inédits de spécia- plus grands comédiens du cinéma burlesque parlant : Chico (Leonard), l’aîné, reconnaissable à sa listes, collectionneurs ou scientifiques. technique du « doigt revolver », Harpo (Adolph), muet comme Harpocrate, le dieu grec du silence, 34,90 e et toujours vêtu d’un manteau bourré d’ustensiles de cuisine, Groucho (Julius), le plus célèbre, ob- 30 e sédé sexuel et textuel (autobiographie, correspondance, etc.), Gummo (Milton), imprésario de ses frères, et Zeppo (Herbert), qui était « comme tout le monde ». Laetitia Bianchi • Posada, génie de la gravure • Éditions L’Association • 45 José Guadalupe Posada (1852-1913). Une œuvre unique, culte, un trait immédiatement reconnais- sable, qui continue d’influencer les dessinateurs du monde entier. « Aussi grand que Goya », disait de lui Diego Rivera. Les inoubliables calaveras de Posada, squelettes qui rient, dansent, boivent et Federico Fellini • Le Livre de mes rêves • Flammarion • chantent, traduisent une conception mexicaine du rapport aux morts. Les images de Posada nous Le Livre de mes rêves invite le lecteur à un voyage merveilleux à travers les espaces les plus secrets font voyager dans le Mexico des années 1900, celui des injustices politiques, de la modernisation et les plus intimes de la créativité de Federico Fellini, dans une « cosmographie personnelle où de la ville, des crimes et des tremblements de terre, et des petits livres vendus par les colporteurs. des parcours émotionnels, sentimentaux, culturels, érotiques et affectifs entrecroisent des itiné- La Révolution, Dieu, le diable, l’enfance, la mort, la vie légère et insouciante de la haute société, la raires géographiques, architecturaux, mémoriels, imaginaires et fantasmagoriques ». Cet ouvrage 45 e misère : aucun sujet n’aura échappé à Posada, qui a dépeint la vie et la mort avec une compassion du cinéaste reproduit l’intégralité des fac-similés de ses carnets dans lesquels il notait, au réveil, et un humour inégalés. ses visions nocturnes. L’appareil critique regroupe leur traduction, ainsi que les contributions de 75 e spécialistes et d’amis de Fellini. ☞ •8• •9• ☞
D e l ’é v i d e n c e Lanternes magiques, dans la singularité machines, surréalisme et autres curiosités Andrea Bellini • Écrire en dessinant • Skira Éditions • Massimo Listri • Cabinet of curiosities. Cabinets des merveilles • Taschen • « Scrivere Disegnando n’est pas, dans le sens strict du terme, une exposition sur l’écriture, mais plu- C’est dans leur Wunderkammer, ou « cabinet de curiosités » que les collectionneurs exposent tôt une exposition sur son ombre, sur une idée d’écriture qui abandonne sa fonction de communi- des bribes de découvertes artistiques, scientifiques, intellectuelles, avec l’ambitieuse volonté de cation pour s’aventurer sur le chemin de l’illisible et de l’indicible. Notre recherche entend explorer condenser en un lieu toutes les connaissances humaines. Ces merveilleux cabinets de curiosités, cette tension intrinsèque à la graphie qui oscille entre l’écriture, dans sa dimension proprement recomposés par des passionnés, ouvrent désormais leurs portes grâce à ce recueil format XXL, sémantique, et la terra incognita de la simple arabesque, de l’automatisme, du signe répété et du fruit des efforts déployés par Massimo Listri, qui pour accomplir cette tâche immense a sillonné gribouillage. » sept pays européens sur plusieurs décennies. 75 e 100 e Lucienne Peiry • Écrits d’art brut. Graphomanes extravagants • Éditions du Seuil • Camille Morando, Radu Stern • Victor Brauner : je suis le rêve, je suis l’inspiration • Lettres d’amour ou de rage, poèmes, prières, messages érotiques et plaidoyers, journaux intimes et Paris-Musées • récits utopiques, les écrits d’Art Brut, fort peu connus, provoquent saisissement et fascination. Créés à La perte de son œil en 1938 fait de l’autoportrait, peint sept ans auparavant, une œuvre prémo- huis clos pour la plupart, dans le secret-et le silence, ils sont souvent privés d’adresse ou sont réservés nitoire pour Brauner : illustration des théories surréalistes, sa peinture revêt alors un caractère ma- à quelque destinataire onirique ou spirituel. Étrangement calligraphiés, rédigés à la hâte ou griffon- gique. La guerre va le contraindre, de par son statut de juif, à entrer dans la clandestinité dans le nés avec ferveur, quelquefois patiemment brodés ou gravés dans la pierre, accompagnés de pein- sud de la France. Brauner invoque alors les doctrines les plus secrètes (tarot, alchimie, spiritisme, tures ou de dessins, ces écrits relèvent d’un besoin impérieux d’expression et révèlent une créativité kabbale) pour se protéger de la France occupée en se réfugiant dans ce monde de rêve, donnant 31 e stupéfiante. Ils constituent une forme de résistance sourde. Tous donnent corps et chair aux lettres. 45 e à ses œuvres une dimension mystérieuse. L’après-guerre est marquée par une traversée de styles Réconciliant le verbe et l’image, ces écrits déploient une poésie forte et troublante. due à sa liberté recouvrée. D’autres influences se font sentir de la psychanalyse à la pensée sau- vage à travers des cycles. Il crée un langage nouveau pour donner à voir non pas le réel, mais les ressorts invisibles du monde. Ce livre permet de mieux saisir la belle exposition de l’été au Musée Bemberg. Charles Perrault • Les Contes illustrés par l’art brut • Diane de Selliers Éditions • Lus dans l’obscurité de la nuit, ces contes tracent un chemin et poussent le lecteur à quitter une réalité sombre et angoissante pour l’inviter à se dépasser, à atteindre la lumière. La peur, l’inquié- tude, la douleur, mais aussi l’insouciance, la joie et toutes les émotions racontées par Perrault sont Laurent Mannoni • Méliès. La Magie du cinéma • Flammarion • sublimées ici par la pulsion créatrice des artistes dits « bruts ». Ces femmes et ces hommes, éloi- « Méliès ne pouvait que commencer par perdre, pour finalement devenir une figure romantique, gnés de toutes les conventions académiques et peu soucieux de reconnaissance, expriment dans donc cinéaste maudit, piraté et spolié d’une histoire qui en comptera d’autres… Cette histoire, son leurs œuvres spontanées les angoisses et les rêves qui habitent l’être humain. Les artistes accom- histoire, des heures glorieuses du Théâtre Robert-Houdin à son pauvre stand de jouets et confi- 230 e pagnent ici ces récits, ils y manifestent la fragilité, la colère, l’espoir, la liberté, le désir d’amour et series de la gare Montparnasse, n’a jamais été racontée que dans cet ouvrage qui embrasse les bien d’autres sensations qui les habitent. Nées dans l’esprit de personnalités singulières à l’imagi- multiples facettes du premier cinéaste arpenteur de l’imaginaire. On descend tous de Méliès ! » nation sans bornes et animées par la nécessité de créer, ces œuvres sont un cri. Martin Scorsese 45 e Ophélie Ferlier-Bouat • Léopold Chauveau. Au pays des monstres • Réunion des Marco Bussagli • Jheronimus Bosch • La Martinère Éditions • Musées Nationaux/Musée d’Orsay • Les compositions du peintre flamand Jheronimus Bosch (vers 1453-1516) regorgent d’allégories Personnalité atypique, Chauveau s’initie à la sculpture vers 1905 alors qu’il exerce la médecine savantes, de bestiaires fantastiques et d’êtres énigmatiques ; elles ont donné lieu à bien des inter- depuis plusieurs années. Dès 1907, les monstres deviennent un leitmotiv de sa production, en prétations. Partant des recherches les plus récentes, cet ouvrage apporte un éclairage nouveau sculpture comme en dessin. Hybrides, ses créatures sont souvent attachantes, voire maladroites. sur l’artiste et sur son œuvre. On y apprend que sa peinture s’inspire de proverbes flamands et Semblant sortir de son inconscient, elles constituent pour Chauveau de véritables compagnons, le témoigne d’une profonde dévotion religieuse. Elle influença Raphaël, Dalí, Magritte ou Escher. peuple d’un monde imaginaire dans lequel il trouverait refuge. Malgré leur singularité, les monstres Des détails très agrandis mettent en lumière la portée symbolique de scènes où le Mal et le péché, sculptés ou les récits dessinés de l’artiste peuvent s’inscrire dans une généalogie de l’histoire de 45 e obsessions de la fin du Moyen-Âge, ne sont jamais loin. 40 e l’art, on pense notamment aux gargouilles médiévales et aux influences des images japonaises du xixe siècle. ☞ • 10 • • 11 • ☞
Admirable critique ! Ve s t i g e s , e m b l è m e s , t r a c e s . D e s v é r i t é s d e l ’a r t Mémoires au présent Mica Gherghescu, Laurence Gueye-Parmentier et alii (Dir.) • La fabrique de l’histoire Alain Schnapp • Une histoire universelle des ruines • Éditions du Seuil • de l’art : 200 revues : 1903-1969 • Éditions Textuel • Il n’existe pas plus d’hommes sans mémoire que de sociétés sans ruines. Cette Histoire universelle des Ce magnifique corpus éditorial demeure très peu connu, c’est pourquoi les auteurs ont choisi de ruines vise à élucider le rapport indissoluble que chaque civilisation entretient avec elles. Les Grecs et les raconter ici une histoire de l’art subjective, vivante et accessible, à travers 200 revues. Près de 400 Romains considèrent les ruines comme un mal nécessaire qu’il faut apprendre à interpréter pour les maî- fac-similés incarnent la diversité des registres : de la virulence pleine d’humour des revues Dada triser. Le monde médiéval occidental affrontera l’héritage antique avec une admiration fortement teintée à la poésie contestataire de la revue martiniquaise Tropiques d’Aimé Césaire jusqu’à l’énergie de de répulsion. Face à cette tradition, la Renaissance entreprend un retour d’un type nouveau à l’Antiquité, Provoke, revue de photographie expérimentale japonaise. Les textes restituent ces aventures édi- considérée comme un modèle du présent qu’il faut imiter pour mieux le dépasser. Les Lumières enfin 59 e toriales d’exception et mettent en lumière les parcours biographiques uniques d’éditeurs-passeurs. 49 e bâtissent une conscience universelle des ruines qui s’est imposée à nous comme le « culte moderne des monuments » : un dialogue avec les ruines qui se veut universel et dont ce livre porte témoignage. John Berger • Portraits. John Berger à vol d’oiseau • Éditions L’Écarquillé • « Lorsque j’ai vu une œuvre d’art, je quitte le musée ou la galerie où elle est exposée, et j’entre Krzysztof Pomian • Le Musée, une histoire mondiale. Tome 1 : Du trésor au musée • humblement dans l’atelier où elle a été fabriquée. Et là j’attends en espérant apprendre quelque Gallimard • chose sur l’histoire de sa fabrication. Des espoirs, des choix, des erreurs, des découvertes impli- Des accumulations des tombeaux égyptiens ou chinois et des trésors royaux jusqu’à notre Louvre au- cites. Je me parle à moi-même, je me rappelle le monde hors de l’atelier, et je m’adresse à l’artiste jourd’hui, il faudra du temps pour que le musée trouve sa forme et sa fonction de conservation, d’étude que je connais peut-être, ou qui est mort il y a quelques siècles. Il n’y a jamais de conclusion. Par- et d’exposition des objets. Le premier volume (deux à venir) de cette Histoire part d’un passé lointain pour fois un nouvel espace nous laisse tous les deux perplexes. Parfois une vision nous coupe le souffle, arriver à la création de l’institution appelée « musée » inventée en Italie à la fin du xve siècle, gagnant toute 49 e comme avant une révélation. Ce que cette approche et cette pratique apportent, c’est au lecteur l’Europe au xviiie siècle. Une histoire faite de dons et de marchandises, de vols et de pillages, de guerres et de mes textes d’en juger. » J. Berger 35 e de diplomatie. Et aussi d’architecture, de manières de contempler et de manier les objets, de problèmes juridiques et d’organisation. Une histoire d’art, et aussi de commerce, de savoirs et de techniques. Steffen Stiegel • 1839 : Daguerre, Talbot et la publication de la photographie : une anthologie • Éditions Macula • Alain Ruscio • Quand les civilisateurs croquaient les indigènes : dessins et caricatures Paris, 7 janvier 1839. François Arago fait une communication devant l’Académie des sciences à au temps des colonies • Cercle d’art • propos d’un nouveau procédé, inventé par Louis Daguerre, qui permet de fixer les images se for- Il fut un temps où la France exerçait son autorité sur des millions de femmes et d’hommes, désignés mant au foyer d’une chambre obscure. À partir de cette date, de nombreux acteurs, qu’ils soient pour l’occasion indigènes et catalogués noirs, jaunes, bruns, basanés… Sûr de la supériorité de ses savants, journalistes, artistes ou voyageurs, contribuent à inventer des métaphores, forger des valeurs, l’homme blanc imposa sa domination à ceux qu’il considérait physiologiquement et intel- concepts et élaborer des raisonnements – donc à instituer les cadres de référence du discours sur lectuellement inférieurs, et qu’il lui revenait donc d’humaniser (la fameuse mission civilisatrice)… Pour la photographie. Cette anthologie se concentre sur les écrits provenant des deux pays d’origine emporter l’indispensable adhésion des Français moyens en imposant les certitudes raciales — en fait, 38 e des premiers procédés photographiques, la France et la Grande-Bretagne, et rédigés en cette 39 e racistes — le dessin et la caricature envahirent tous les supports : la presse, mais aussi les affiches, les année 1839 ou juste avant. Des textes parus dans l’espace germanophone et aux États-Unis les vignettes publicitaires, les images de catéchisme ou des écoles, les cartes postales, etc. En perma- complètent, attestant ainsi la rapide diffusion de la photographie et de son discours. nence entre le sourire crispé et un sentiment de révolte face à cette imagerie coloniale, le lecteur pourra nourrir sa réflexion sur les racines d’un certain regard contemporain sur les autres. Hervé Joubert-Laurencin (Dir.) • André Bazin. Les écrits complets • Éditions Macula • Les Écrits complets d’André Bazin (1918-1958), 3 000 pages !!, rassemblent tous les articles écrits Mehdi Ben Cheikh • Boulevard Paris 13. Le Musée du street art à ciel ouvert • Albin-Michel • par celui qui fut l’un des plus importants critiques de cinéma mondiaux. Cofondateur des Cahiers Après Tour Paris 13, un nouveau projet spectaculaire a vu le jour à Paris où la ligne de métro aérien du cinéma, figure tutélaire de la Nouvelle Vague, ce théoricien majeur de l’après-guerre aux mul- n° 6 traverse désormais un « musée à ciel ouvert », le long du boulevard Vincent Auriol : Boulevard tiples apports n’a jamais cessé d’être passionnément discuté jusqu’à aujourd’hui. Face à l’animateur Paris 13 et ses fresques monumentales, réalisées par les plus grands artistes internationaux, et se de ciné-clubs, l’envoyé spécial, l’interviewer et le théoricien, celui-ci jugera toute l’étendue d’une succédant comme dans une galerie muséale géante. Ce livre permet de vivre ou de re-vivre cette écriture éprise d’ouverture, diversement adressée au public populaire des quotidiens et aux érudits expérience unique, s’y raconte la genèse et le making of du projet, accompagné de dix planches des grandes revues intellectuelles de son époque. recto-verso permettant d’accrocher ses 20 murs préférés… chez soi ! 149 e 49 e ☞ • 12 • • 13 • ☞
Des animaux et des hommes. De feuille en feuilles. Les seconds représentent L’a r b r e , l ’a r t i s t e , l e l i v r e les premiers Laura Bossi (Dir.) • Les origines du monde : l’invention de la nature au xixe siècle • Emanuele Coccia, Francis Hallé, etc. (Dir.) • Nous les arbres • Fondation Cartier • Musée d’Orsay/Gallimard • Après avoir été longtemps sous-évalués par la biologie, les arbres — comme l’ensemble du règne Le xixe siècle a connu un développement sans précédent des sciences naturelles. Si les grands végétal — ont fait l’objet, ces dernières décennies, de découvertes scientifiques qui permettent de voyages d’exploration témoignent de la diversité du monde et de la variété des espèces vivantes, porter un nouveau regard sur ces plus anciens membres de la communauté des vivants. Capa- la géologie dévoile l’inimaginable antiquité de la terre, et l’étude des fossiles révèle les prémices cités sensorielles, aptitude à la communication, développement d’une mémoire, symbiose avec de la vie et l’existence d’espèces disparues, dont les dinosaures. Dans la seconde moitié du siècle, d’autres espèces et influence climatique : la révélation de ces facultés invite à émettre l’hypothèse Darwin et ses adeptes interrogent les origines de l’homme, sa place dans la Nature, ses liens avec fascinante d’une « intelligence végétale » qui pourrait apporter des éléments de réponse à bien 45 e les animaux ainsi que sa propre animalité dans un monde désormais compris comme un écosys- 45 e des défis environnementaux actuels. tème. Ce bouleversement dans les sciences, ainsi que les débats publics qui traversent le siècle, influencent profondément les artistes. Thomas Ott • La Forêt • Éditions Martin de Halleux • Thomas Ott travaille principalement avec la technique de la carte à gratter. Avec un cutter japo- Benedikt Taschen, Bill Buford • Walton Ford : Pancha Tantra • Taschen • nais, il gratte des lignes et des formes dans une couche noire qui recouvre un carton blanc. L’artiste À première vue, les aquarelles d’animaux en grand format extrêmement détaillées de Walton crée donc son dessin en le traçant en blanc sur un fond noir par petites touches de grattages suc- Ford, né en 1960, rappellent les planches d’histoire naturelle illustrées au xixe siècle par John James cessifs. Un travail extrêmement minutieux pour lequel il n’a pratiquement pas droit à l’erreur. Il livre Audubon et Edward Lear. Mais en les regardant de plus près, on découvre un univers complexe ici une histoire courte, sans paroles, en 25 grandes images qui conduisent un jeune garçon à fuir à l’anthropomorphisme troublant. Dans cet univers visuel fascinant mais sinistre, bêtes et oiseaux au plus profond d’une forêt pour y trouver un refuge, mais aussi se confronter aux grandes terreurs ne sont jamais représentés comme de simples objets, mais plutôt comme les acteurs dynamiques 22 e des hommes et finalement faire l’expérience de suivre, sans peur, son propre chemin. de luttes symboliques : une dinde sauvage écrase une petite perruche entre ses serres, une tribu 60 e de singes met à sac une table de dîner dressée avec soin, un bison est encerclé par une meute de loups blancs ensanglantés. Henry-Claude Cousseau • Arbres : Giuseppe Penone : exposition, Chaumont-sur-Loire • Éditions Couleurs Contemporaines • L’arbre jalonne, depuis plus de cinquante ans, la recherche de Giuseppe Penone, centrée, entre Brigitte Koyama-Richard • Animaux dans la peinture japonaise • Nouvelles Éditions autres, sur une exégèse des origines séculaires de l’acte sculptural. En révélant la part cachée de Scala • l’arbre, en exhumant son cœur par un procédé spectaculaire, celui de la suppression successive Dans la peinture japonaise, dragons, grues, renards, singes, tigres et libellules déambulent ou volent des cernes de croissance, en mettant ainsi au jour sa vie antérieure, en le montrant dans sa nudité au milieu d’une végétation luxuriante, décorant ainsi les rouleaux enluminés, les paravents ou les hivernale, en le fondant en bronze, en faisant de l’arbre une structure porteuse de significations 28 e estampes. Du plus petit insecte à l’éléphant, ils ornent également les temples, les sanctuaires, les cosmiques, Giuseppe Penone met en scène un véritable protocole mythographique. Au-delà de palais et les jardins. Au-delà de leur fonction décorative ou propitiatoire, ces représentations portent la théâtralité dont il est porteur, dans ses formes comme dans les cycles de sa vie, l’arbre, sous des significations. Pour pouvoir les comprendre et les apprécier, il faut connaître la place de chaque couvert d’allégorie, questionne la pratique de la sculpture. 39,90 e animal dans la culture, c’est-à-dire dans l’histoire, la spiritualité, la littérature et la vie quotidienne. Lionel Hignard, Camille Renversade • L’herbier fantastique • Éditions Plume de Rudyard Kipling • (Illustrations MinaLima). Le Livre de la jungle • Flammarion- carotte • Jeunesse • Dans le journal L’Aurore daté du 25 juillet 1914, nous apprenons la disparition d’Irénée Dubois, Situé dans les profondeurs mystiques de la jungle indienne, où les tigres parcourent la terre et les « l’employé du Museum d’Histoire naturelle n’a pas reparu depuis trois semaines. » Voilà le point singes se balancent des arbres, Le Livre de la jungle de Rudyard Kipling est réinventé comme jamais de départ de l’aventure de ce livre étonnant. Cet ouvrage, composée de 27 dossiers fac similés, auparavant dans cette nouvelle édition intégrale époustouflante. Publié à l’origine en 1894, l’en- illustrés de nombreuses coupures de presse, correspondances, annotations, expériences scienti- semble d’histoires imaginaires comprend des épisodes colorés tels que l’histoire de l’homme-petit fiques, dessins, photos… est le fruit des recherches de ce botaniste du début du xxe siècle sur les Mowgli contre le féroce tigre Shere Khan, la courageuse mangouste Rikki-Tikki-Tavi et tant encore. phénomènes étranges (et néanmoins véritables) de la botanique. Certains verront ses thèses se Enrichi de nouvelles illustrations luxuriantes du studio de design MinaLima, ce nouveau Kipling 24 e valider, d’autres non… mais qu’importe ! Des plantes carnivores aux haricots magiques, des plantes 29 e pourrait devenir un objet de collection et sera apprécié par les lecteurs de tous âges. qui donnent du lait aux plantes vampires, de l’arbre aux dragons aux arbres géants. ☞ • 14 • • 15 • ☞
La ca r te n’e s t pas l e territoire. R e v o i r Pa r i s . E x p l o r e r. D e s s i n e r. I m a g i n e r Empreintes et fantômes d ’u n e v i l l e Laurent Maréchaux • Les défricheurs du monde. Ces géographes qui ont dessiné la Laure Godineau, Marc César (Dir.) • La Commune de 1871. Une relecture • Éditions Créaphis • Terre • Éditions du Cherche-Midi • Le 18 mars et la Semaine sanglante sont des points de repère parisiens, marqueurs mémoriels qui Les Défricheurs du monde propose de se pencher sur les théories et découvertes marquantes de fa- cachent en partie sa grande complexité comme sa dimension nationale ou transnationale. Fertile en çon chronologique, pour suivre pas à pas la pensée de ceux qui ont façonné notre représentation initiatives de tous types, elle constitue a posteriori un extraordinaire et fascinant laboratoire du poli- graphique de l’endroit que nous habitons. Une approche qui célèbre le terme mot « géographie », soit tique. C’est à une relecture collective qu’invitent ici les plus grands spécialistes et de jeunes chercheurs. « écrire et dessiner la Terre » (« geo-graphein ») dans tout ce qu’elle a connu et connaît encore de va- Quel fut le quotidien de 1871, localement ? Que se joua-t-il sur l’ensemble du territoire, marqué par riantes et lectures. Car il a fallu des siècles entiers pour que le fait de « dessiner, décrire et se représenter une grande diversité des espaces et des lieux ? Quelles furent les réceptions à l’échelle internationale. 38 e le monde » soit une science nommée et reconnue. Et c’est auprès des illustres Homère, Aristote, puis Al 27 e Qu’est-ce que la Commune ? Ce livre montre la dimension capitale de l’expérience communaliste pour Idrissi et Mercator, mais aussi Turgot et Humboldt que l’on visite l’histoire fascinante des cartes. décrypter le xixe siècle et pour nourrir nos questionnements les plus contemporains. Anne de Mondenard, Agnès Sire (Dir.) • Atget : voir Paris • EXB/Fondation Cartier- Huw Lewis-Jones • Atlas des mondes imaginaires • Éditions E/P/A • Bresson • Les écrivains sont des créateurs de mondes. Le Pays imaginaire, la Terre du Milieu, Narnia, la forêt Vers 1897, Atget commence à photographier Paris de manière systématique. L’époque s’intéresse des Rêves bleus, l’île de Robinson… Cet atlas présente les cartes de ces lieux familiers des lecteurs. au patrimoine de la capitale et la commission du Vieux Paris commande à Atget plusieurs séries qu’il Vingt-trois auteurs évoquent les territoires qu’ils ont fait naître dans leurs œuvres à travers les plans nomme Paris pittoresque, L’art dans le vieux Paris, Environs… Doté d’une chambre à soufflet avec un qu’ils ont imaginés. Ils racontent également les lieux littéraires ou réels qui les ont fait rêver et ceux châssis chargé de plaques de verre, le photographe saisit la topographie d’une ville qui change. Petits qui furent à la source de leur propre inspiration. Un magnifique voyage de carte en carte à travers 42 e métiers, étalages, cours d’immeubles, heurtoirs, charrettes, ruelles, cafés, chiffonniers de la zone, jardins la littérature : une inépuisable source de rêverie et d’aventure ! urbains, parcs abandonnés, quais de la Seine, cette obsessionnelle recherche fixe le détail de l’imprévu ; 35 e il en émane un sentiment de nostalgie, mais aussi une grande poésie. Préférant les lumières du petit ma- tin, son cheminement montre des rues souvent désertes, des façades impénétrables, des fenêtres ou- vertes sur de sombres intérieurs : le monde est comme endormi. L’absence humaine dramatise le réel. Jacques Abeille • Le Cycle des contrées. La Vie de l’explorateur perdu • Le Tripode • Au milieu les années 70, à la manière d’un rêve, Jacques Abeille s’engageait dans l’exploration d’un monde imaginaire en écrivant un roman : Les Jardins statuaires. Depuis, de livre en livre, s’élabore Léon-Paul Fargue • L’esprit de Paris : chroniques parisiennes. 1934-1947 • Éditions du l’univers extraordinaire des Contrées, avec ses règles, ses fantasmagories… et ses vices. La Vie de Sandre • l’explorateur perdu clôture ce vaste cycle, il est le roman des origines et celui de la fin. C’est l’heure Il y a de l’esprit de Paris dans certains dialogues, reparties, scies ou mots historiques. Il y en a des dernières étreintes et de l’ultime révolte, de l’ultime énigme et des derniers témoins. Adieu le sur des chapeaux. Il y eu a aussi tout le long de nos quais, dans les petits caboulots, chez les Haut Plateau, Terrèbre, les Jardins statuaires et les enfants d’Inilo. Nous voilà quittant l’immensité prud’hommes, sur la plate-forme des autobus et dans le métro, dans l’escalier, sur les toits, sous 19 e des contrées, courant derrière les fantômes de Barthélémy Lécriveur et de Léo Barthe, faisant nos les toits où nichent les philosophes, au milieu des squares, et jusque dans les nuits camouflées de adieux à Ludovic Lindien, cet être inépuisable qui toute sa vie n’a pu respirer qu’en dehors du lieu la guerre. L.P. Fargue. Par ses chroniques parisiennes, nourries d’une vie de noctambulisme et de étroit où sa vie l’a confiné. Désormais, sur ce monde, la lumière s’éteint. 35 e rencontres, Léon-Paul Fargue n’aura cessé de célébrer sa ville, élaborant une mythologie fondée sur une connaissance érudite et vécue avec intensité. Il dresse le portrait de toute une génération, de la fin du xixe siècle à l’après-guerre, des salons de Mallarmé et de Rachilde au cercle des Amis du Livre d’Adrienne Monnier. Colette, Crevel, Larbaud, Miomandre, Cendrars… Jean-Philippe Jaworski • Matière de Leomance : récits du vieux royaume • Les Moutons électriques • L’auteur à propos de cette « performance » littéraire et éditoriale de 1 300 pages : Au sein du Vieux Robert Bober • Par instants, la vie n’est pas sûre • Éditions POL • Royaume, c’est surtout la république de Ciudalia qui est Renaissance. La Marche Franche, le duché Ce livre est celui d’une mémoire de l’Europe amputée après le désastre, celui du souvenir du monde de Bromael et la principauté du Sacre sont toujours des contrées médiévales. Je puise mon inspi- yiddish, mais plus encore ce livre est celui de la vie retrouvée dans ce que Paris constituait après la ration à trois sources : clichés rôlistes, documentation historique, littérature générale ou de genre… guerre, une capitale du cosmopolite et de l’espoir retrouvé. Dans l’amitié de Pierre Dumayet et celle Quand je créais le Vieux Royaume, il m’est vite apparu que, pour générer de l’intrigue, j’avais besoin de Georges Perec. J’appelle des visages, des souvenirs, et ce ne sont pas toujours ceux que j’appelle d’un pôle culturel et économique qui soit aussi facteur d’instabilité politique ; c’est cette nécessité qui qui se présentent. Et comme s’ils n’attendaient que ça, ils affluent, en vrac, se donnant la main. Je les ac- a produit la république de Ciudalia et qui m’a orienté vers une cité Renaissance sur le modèle des cueille sans savoir où ils vont me conduire, ni ce qu’ils vont produire. Répartis dans des dossiers étique- 79 e grandes cités italiennes. J.-P. Jaworski (Actu SF) tés, descendus de leurs étagères, sortis de leurs tiroirs, les souvenirs sont là, déposés sur mon bureau, 21,90 e attendant avec impatience ? espoir ? que je prenne le temps de m’y arrêter. Robert Bober. ☞ • 16 • • 17 • ☞
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