Mettre la relance verte au service de l'emploi, des revenus et de la croissance - OECD

 
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 Mettre la relance verte au service de
 l’emploi, des revenus et de la croissance

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             Cette synthèse s’intéresse à la manière dont les pays peuvent tirer parti de
             la pandémie de COVID-19 pour mettre en œuvre une reprise économique à
             la fois verte et inclusive. Une relance verte renforcerait sensiblement la
             résilience de nos économies et de nos sociétés face à la forte récession et
             aux enjeux environnementaux en pleine expansion. Ce document dresse
             également un premier bilan des politiques de relance annoncées dans les
             pays membres de l’OCDE et dans les pays partenaires clés. Beaucoup de
             pays concentrent leurs mesures sur la durabilité environnementale tout en
             promouvant l’emploi, les revenus et la croissance, cependant d’autres pays
             proposent des mesures en faveur d’activités nocives pour l’environnement.
             Mesurer et évaluer dans le temps l’incidence sur l’environnement des
             politiques de relance est essentiel. Un jeu d’indicateurs couvrant l’ensemble
             des dimensions critiques pour l’environnement est donc proposé à cette fin.
             Cette synthèse a été initialement publie le 14 Septembre 2020. Celle-ci est
             une version révisée qui intègre une correction à la page 8. Le montant des
             subventions aux combustibles fossiles s’élevait à 478 milliards USD
             en 2019 et non pas à 582 milliards USD.

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Introduction

       La pandémie de COVID-19 est passée du stade de crise majeure de santé
       publique à celui de crise économique et crise de l’emploi dont on ignore encore
       l’ampleur. L’impact économique est considérable : il s’agit de la plus forte
       récession depuis près d’un siècle, dont les répercussions se font durablement
       sentir à tous les niveaux (individus, entreprises et gouvernements). La pandémie
       est aussi inextricablement liée aux problèmes environnementaux mondiaux,
       comme la perte de biodiversité, le changement climatique, la pollution de l’air et
       de l’eau ou la gestion des déchets, tant en ce qui concerne son origine que ses
       implications sur les résultats environnementaux et le bien-être futur des sociétés
       partout dans le monde.
       Les programmes de relance économique actuellement mis en œuvre par les
       gouvernements pourraient favoriser une relance à la fois verte et inclusive. La
       relance peut être génératrice de revenus, d’emplois et de croissance, et peut
       stimuler la mise en œuvre d’actions à moyen et long terme conformes aux objectifs
       environnementaux nationaux et mondiaux. La résilience de nos économies et de
       nos sociétés s’en trouvera sensiblement renforcée face aux enjeux
       environnementaux en pleine expansion, en raison du renforcement des boucles
       de rétroaction et de la probabilité croissante de points de basculement en cascade.
       Autre considération importante : le fait de placer l’humain au centre des plans de
       reprise verte peut jeter les bases d’un bien-être durable.1

Les conséquences environnementales du COVID-19

       Les impacts environnementaux à court terme de la pandémie (positifs
       comme négatifs) ont été très importants. Beaucoup seront sans doute
       passagers, mais certains pourraient perdurer sous forme d’évolutions structurelles
       ou comportementales à plus long terme :
             On s’attend à une baisse globale des émissions mondiales de CO2 de
              8 % en 2020, pour revenir aux niveaux enregistrés il y a une dizaine
              d’années.2 Cette baisse prévisionnelle ponctuelle n’aura cependant aucune
              incidence à long terme sur les niveaux de CO2 présent dans l’atmosphère,
              la concentration atmosphérique en CO2 (principal responsable du
              changement climatique) continuant d’augmenter rapidement.3 À défaut de
              changements structurels permettant de maintenir les émissions en deçà
              des niveaux antérieurs à la pandémie, la situation restera inchangée.
             La pollution de l’air a également diminué temporairement en raison du
              ralentissement sévère de l’activité industrielle, du transport terrestre et du
              transport aérien pendant plusieurs mois. Divers pays ont toutefois signalé
              un retour rapide à la hausse des niveaux de pollution d’air.4 La pandémie a
              mis en exergue le lien étroit entre pollution de l’air et mortalité par COVID-
              19, une pollution de l’air plus importante en intérieur comme en extérieur
              exacerbant l’impact sanitaire du virus. Plusieurs études ont montré qu’une
              faible augmentation de particules (PM2,5) est liée à une hausse du taux de
              décès par COVID-19 allant de 8 à 16 %, selon la région.5 Il apparaît en
              outre clairement que la pollution de l’air augmente très sensiblement la
              transmission du SARS-CoV-2 par les voies aériennes.6 Dans la mesure où
              il est prouvé que les catégories sociales défavorisées sont déjà davantage

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       exposées et vulnérables à la pollution de l’air, cela les rend donc
       potentiellement plus sensibles aux effets cardiovasculaires et respiratoires.
      Le recul de l’activité économique s’est traduit par une amélioration de la
       qualité de l’eau de nombreux cours d’eau et zones côtières. Plusieurs pays
       et régions ont d’ailleurs fait état d’une réduction des concentrations de
       particules en suspension et autres polluants des milieux aquatiques. Il s’agit
       toutefois, là encore, d’un phénomène temporaire puisque la pollution de
       l’eau devrait augmenter lorsque l’activité économique reprendra. Les
       répercussions sur les segments les plus vulnérables de la société doivent
       être prises en compte, notamment les personnes exposées aux sites
       contaminés ou à des conditions de logement inadéquates.
      Les problèmes de gestion des déchets se sont considérablement accrus en
       raison de la pandémie, les gouvernements étant confrontés à une hausse
       importante des déchets médicaux (notamment les équipements personnels de
       protection), une demande accrue en plastiques à usage unique (pour les produits
       alimentaires, médicaux ou pharmaceutiques, les livraisons de repas ou les
       emballages du e-commerce), une capacité de recyclage réduite et un effondrement
       des prix des plastiques recyclés. Compte tenu de l’obligation du port du masque
       imposée par de nombreux gouvernements à de larges pans de la population,
       l’usage des masques médicaux jetables explose et, avec lui, les problèmes de
       gestion des déchets et autres problèmes environnementaux.
      La pandémie a aussi mis en évidence le problème de l’interférence de
       l’homme sur la biodiversité, celle-ci contribuant à créer les conditions
       d’une transmission de pathogènes de l’animal à l’homme. La déforestation,
       la dégradation et la fragmentation des habitats, l’intensification de
       l’agriculture, le commerce d’espèces sauvages et le changement
       climatique… tous ces phénomènes ont joué un rôle dans les maladies
       zoonotiques. Outre le COVID-19, de nombreux pathogènes mortels inscrits
       dans l’histoire récente (Ebola, HIV, dengue, SARS, MERS, Zika, West Nile)
       sont le fruit de cette transmission interespèces. Certains pays ont
       également signalé une augmentation du braconnage et de l’extraction
       illégale des ressources. Ces activités causent la disparition de certains
       moyens de subsistance en milieux ruraux et affaiblissent la capacité à
       surveiller ces zones et y faire respecter la loi.
La pandémie et la crise économique qui en découle ont souligné le rôle
important joué par la santé et la résilience environnementales dans la santé
publique. Une meilleure qualité d’air et d’eau, une gestion efficace des déchets et
une protection renforcée de la biodiversité permettront non seulement de réduire
la vulnérabilité des communautés aux pandémies, mais aussi d’améliorer le bien-
être et la résilience de la société dans son ensemble. Une bonne qualité de l’air
est bénéfique sur le plan de la santé publique et du bien-être, mais elle procure
aussi des avantages économiques significatifs dans la mesure où le nombre de
maladies liées à la pollution diminue, tout comme leur impact sur la productivité
des travailleurs. De même, un meilleur accès à des services d’assainissement et
de distribution d’eau potable correctement gérés sera très bénéfique aux plus
défavorisés, aussi bien dans les pays membres de l’OCDE que dans les autres.
Dans les pays membres de l’OCDE, un meilleur accès peut améliorer
sensiblement l’inclusivité pour les catégories défavorisées (personnes souffrant de
problèmes de santé, mal-logés, migrants et sans-abri). Dans de nombreux pays
en développement, la collecte de l’eau incombe souvent aux femmes et aux jeunes
filles et ce sont elles qui souffrent le plus du manque d’accès aux services

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       d’assainissement. La préservation de la biodiversité et son utilisation durable sont
       également des facteurs essentiels, dans la mesure où la biodiversité et les services
       écosystémiques procurent des avantages évalués à 125 à 140 000 milliards USD
       par an (c.-à-d. plus d’une fois et demie le PIB mondial). La préservation efficace
       de la biodiversité et son utilisation durable (impliquant la nécessité de résoudre le
       problème de la déforestation) limiteront le risque de transmission zoonotique tout
       en contribuant à maintenir les services écosystémiques existants.7

Le suivi des mesures de relance

       Dans ce contexte, il est clair que la prise en compte des questions
       environnementales comme le changement climatique, la pollution de l’air et
       de l’eau, la perte de biodiversité, la dégradation des océans et l’utilisation
       inefficace des ressources s’impose à l’heure où les pays cherchent à
       reconstruire leur économie et à améliorer leur résilience aux chocs futurs.
       Les études suggèrent qu’en dépit de la souffrance économique généralisée, la
       pandémie a fait naître une prise de conscience collective de la fragilité des
       systèmes naturels et de leur importance pour le bien-être humain. En intégrant
       l’environnement et l’inclusivité dans leurs mesures de relance, les gouvernements
       seraient donc gagnants sur tous les fronts : ils pourraient se rapprocher plus
       rapidement de leurs objectifs environnementaux, stimuler l’activité économique à
       court terme et réduire les inégalités. Lorsqu’elles sont correctement élaborées et
       mises en œuvre, les mesures de relance verte peuvent générer des revenus, créer
       de l’emploi, améliorer le bien-être et renforcer la résilience. C’est l’un des
       principaux enseignements tirés de l’examen des mesures déployées après la crise
       financière mondiale de 2008.8 Intégrer la viabilité environnementale et l’équité
       socioéconomique dans les politiques publiques est important pour atténuer les
       effets régressifs des politiques environnementales, pour offrir à tous des chances
       équitables de contribuer à la croissance économique et d’en cueillir les fruits.9
       De nombreux gouvernements ont inclus dans leur plan des mesures de
       relance « verte » dont la finalité est de combattre les effets
       socioéconomiques à court et moyen termes de la crise du Coronavirus. Ces
       plans comportent aussi un certain nombre de mesures qui n’ont pas pour cible des
       secteurs verts ou des activités vertes, mais peuvent néanmoins avoir une
       incidence positive ou négative sur les résultats environnementaux. Certains
       gouvernements ont également planifié ou mis en œuvre des mesures qui se
       répercuteront négativement sur l’environnement (comme les aides accordées aux
       industries utilisant des combustibles fossiles).
       Selon une analyse préliminaire réalisée par le Secrétariat de l’OCDE en août 2020,
       au moins 30 pays membres de l’OCDE et pays partenaires clés10 ont intégré
       dans leurs programmes ou stratégies de relance des mesures visant à
       soutenir la transition vers une économie plus verte (voir encadré p.7). Ces
       mesures sont notamment :
              des subventions, des prêts et des allégements fiscaux en faveur du
               transport vert, de l’économie circulaire et de la recherche, du
               développement et du déploiement d’énergies propres ;
              une aide financière aux ménages et aux entreprises pour l’amélioration de
               la performance énergétique et les installations d’énergies renouvelables ;

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                    de nouveaux types de financement et de programmes de création
                     d’emplois et de stimulation de l’activité économique par la restauration de
                     l’écosystème ;
                    le contrôle des espèces étrangères invasives et la préservation des forêts.
          D’après les premières analyses, jusqu’à présent les mesures vertes des
          gouvernements ont porté principalement sur les secteurs de l’énergie et des
          transports terrestres ou maritimes (voir tableau p.6). D’autres secteurs importants
          pour une relance verte et résiliente ont été relativement délaissés, tels que
          l’industrie, l’agriculture, la foresterie et la gestion des déchets. Les types de
          mesures incitatives les plus fréquents ont été l’allégement de taxes et les primes
          ou prêts, suivis par les subventions à la recherche et développement (R-D).
          Jusqu’à présent, peu de mesures ont ciblé l’acquisition de compétences.
          Dans le cas du transport urbain, par exemple, certains pays ont choisi d’intensifier
          les efforts et les financements pour rendre l’espace habituellement réservé aux
          voitures à des modes de transport doux (piétons, vélos, micromobilité, transport
          public) ou lui donner d’autres fonctions urbaines. Certains pays ont aussi
          conditionné au respect de principes et critères environnementaux le versement
          d’aides publiques à des entreprises de secteurs clés, comme le transport aérien,
          et subordonné l’aide à l’industrie automobile à la promotion de technologies plus
          propres.

Note : les nuances de couleur indiquent le nombre total de mesures prises dont l’incidence environnementale attendue est nettement positive,
dans l’ensemble des pays membres de l’OCDE et pays partenaires clés, en août 2020.

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 Encadré 1. Le temps des pactes verts
 Le pacte vert pour l’Europe proposé fin 2019 par la Commission européenne (CE) est une nouvelle
 stratégie de croissance visant à faire de l’Union européenne une société juste et prospère, dotée d’une
 économie moderne, compétitive et économe en ressources, qui atteindrait le zéro émission nette de
 gaz à effet de serre en 2050 et où la croissance économique ne rimerait pas avec une consommation
 accrue de ressources.
 Le pacte vert pour l’Europe est au centre de la stratégie de reprise de l’UE après la pandémie de
 COVID-19, notamment grâce à l’instrument Next Generation EU de la CE, annoncé en mai 2020 et
 doté d’un budget de 750 milliards d’euros. Les États membres de l’UE ont également commencé à
 annoncer des plans de relance nationaux qui s’ajoutent aux aides de l’UE et dont certains prennent
 fortement en compte l’écologie.
 Pour atteindre les objectifs du pacte vert pour l’Europe, tous les secteurs de l’économie doivent être
 mis à contribution :
                     décarboner le secteur de l’énergie au moyen de projets valorisant les énergies
                      renouvelables, en particulier l’éolien et le solaire, et donner le coup d’envoi de
                      l’hydrogène vert ;
                     investir dans des technologies respectueuses de l’environnement ;
                     soutenir l’innovation dans l’industrie ;
                     déployer des moyens de transport privé et public plus propres, plus abordables
                      et plus sains ;
                     améliorer l’isolation thermique des bâtiments et promouvoir l’économie
                      circulaire ;
                     travailler avec des partenaires internationaux pour améliorer les normes
                      environnementales mondiales.
 L’UE fournira également un soutien financier et une assistance technique pour aider ceux qui sont les
 plus touchés par la transition vers une économie verte, grâce au mécanisme pour une transition juste.
 Le nouveau pacte vert de la Corée du Sud, présenté en juillet 2020, fait partie d’une stratégie
 nationale visant à créer 659 000 emplois et à aider le pays à surmonter la crise tout en répondant aux
 enjeux climatiques et environnementaux.
 La Corée du Sud consacrera environ 61 milliards USD sur cinq ans (2020-25) pour accroître la
 production énergétique renouvelable (de 12,7 GW en 2019 à 42,7 GW en 2025) et pour renforcer la
 mobilité verte en atteignant 1,33 million de véhicules électriques ou à hydrogène. Le plan prévoit
 également la rénovation du parc locatif social et des écoles publiques pour en faire des bâtiments à
 énergie zéro, ainsi que la transformation de zones urbaines en villes vertes et connectées.
 Sources : CE (2020), site du pacte vert pour l’Europe, https://ec.europa.eu/info/strategy/priorities-2019-2024/european-green-deal_en ;
 https://www.forbes.com/sites/donaldkirk/2020/07/14/koreas-reveals-new-deal-designed-to-boost-jobs-revive-sagging-
 economy/#7b17f8423250.

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     Parallèlement, l’analyse initiale de l’OCDE réalisée à l’échelle des pays révèle que
     24 gouvernements nationaux ont annoncé des mesures susceptibles d’avoir
     un impact négatif direct ou indirect sur les résultats environnementaux.
     Celles-ci incluent la possibilité d’assouplir les règlementations environnementales
     existantes (notamment concernant la qualité de l’eau, l’émission de polluants
     atmosphériques et les plastiques à usage unique), de réduire voire supprimer les
     taxes, droits et redevances environnementaux, le sauvetage inconditionnel
     d’industries ou entreprises produisant beaucoup d’émissions (comme les
     compagnies aériennes ou les industries impliquées dans l’extraction de
     combustibles fossiles) et l’augmentation des subventions accordées aux
     infrastructures utilisant une quantité importante de combustibles fossiles
     (notamment les transports routiers) et aux consommateurs d’électricité. En ce qui
     concerne les consommateurs, beaucoup de pays ont pris des mesures de soutien
     aux ménages en assouplissant les conditions de paiement (allongement du délai
     de grâce, absence d’interruption du service, etc.) et en réduisant ou en
     subventionnant directement les factures d’électricité. Si certaines de ces mesures
     pourraient être limitées aux plans d’aide d’urgence, d’autres risquent d’avoir des
     répercussions environnementales, économiques et sociales à long terme.
     Malheureusement, l’équilibre entre les dépenses vertes et les dépenses non
     vertes ne joue pas en faveur du volume des résultats environnementaux.
     Selon plusieurs études, le montant du financement alloué aux mesures non vertes
     l’emporte sur celui accordé aux mesures vertes. Dans le cas du secteur
     énergétique, par exemple, l’Institut international du développement durable (IISD)
     estime que les pays du G20 fournissent un soutien à différents types d’énergie par
     le biais de nouvelles politiques ou de modification des politiques existantes, dont
     47 % sont destinés aux combustibles fossiles et 39 % aux énergies propres11. Plus
     généralement, un indice mesurant le degré de « vertitude » de la relance
     (Greenness of Stimulus Index) développé par Vivid Economics a identifié des
     mesures de relance dans 17 pays qui permettront d’injecter quelque
     3 500 milliards USD dans des secteurs ayant un impact durable et significatif sur
     la nature et dont les effets potentiellement dommageables sur l’environnement
     l’emporteront sur les effets positifs dans 14 des 17 pays en question.12 Selon une
     étude de Rhodium Group, basée sur une définition assez restrictive des dépenses
     de relance dans les principales économies, l’UE a consacré 20 % de ses dépenses
     à des priorités vertes ou climatiques, mais ce pourcentage est bien plus faible
     ailleurs.13

Opportunités d’une relance verte

     La crise actuelle pose des défis aux gouvernements dans leurs efforts pour veiller
     à ce que les mesures de relance impactent positivement (et non négativement) la
     viabilité environnementale et le bien-être. En définitive, cependant, la reprise est
     une occasion de « reconstruire en mieux », en combinant l’accent mis sur le
     rétablissement de la croissance et la création d’emplois avec la réalisation des
     buts et objectifs environnementaux.
     Combattre l’inertie et les effets boomerang. La priorité des gouvernements est
     de remettre rapidement sur pied l’économie. Cela passe souvent par les
     investissements, technologies et plans d’investissement habituels, révélateurs
     d’une certaine inertie du système, d’un manque de compréhension des facteurs
     de croissance durable et d’une carence d’informations sur les alternatives de

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       développement durable. L’expérience tirée des mesures de relance prises au
       lendemain des précédentes récessions économiques montre que les effets
       négatifs sur l’environnement peuvent être considérables, voire atteindre des
       niveaux supérieurs à ceux enregistrés avant la récession. Pour s’assurer que les
       mesures d’urgence n’entrainent pas un assouplissement des normes et
       réglementations environnementales (ce qui aurait pour effet d’exacerber les défis
       environnementaux actuels), l’administration doit adopter une approche globale de
       l’évaluation de l’impact des mesures de relance.
       Soutenir la restructuration des secteurs vers une économie plus juste et plus
       verte. La relance verte est l’occasion d’entreprendre une restructuration profonde
       des secteurs et des activités essentiels afin de soutenir, de manière socialement
       inclusive, la transition vers une économie à faibles émissions, climatiquement
       résiliente et économe en ressources, et d’améliorer la résilience de l’économie.
       Non seulement cette approche serait conforme aux engagements nationaux et
       internationaux pris dans le cadre de l’Accord de Paris, aux objectifs de
       développement durable et aux autres accords internationaux sur l’environnement,
       comme les Objectifs d’Aichi, mais elle permettrait aussi d’améliorer le bien-être
       des communautés et sociétés à court et moyen comme à plus long termes. Des
       investissements sociaux sont en outre nécessaires pour éviter que certaines
       communautés ne deviennent les laissés-pour-compte de la transition verte, y
       compris des mesures ciblées pour renforcer la protection et le dialogue social. Les
       droits à la sécurité sociale pourraient aussi avoir besoin d’être adaptés dans le
       contexte de transition vers de nouveaux types d’emploi et de contrats.
       Accélérer les plans existants. La première analyse des mesures de relance verte
       réalisée par l’OCDE révèle que plusieurs gouvernements utilisent les mesures
       post-COVID pour accélérer la mise en œuvre d’actions pour l’environnement déjà
       envisagées dans le cadre de plans et de propositions existants. Pour tirer profit de
       cet effet d’accélération, il est important que ces plans soient accompagnés de
       cadres réglementaires et stratégiques clairs relatifs à la transition vers une
       économie sobre en carbone sur le long terme, au-delà des programmes de relance
       spécifiques annoncés. L’investissement dans les énergies renouvelables, sur
       lesquelles les gouvernements de certains pays ont intensifié leur aide, notamment
       dans les secteurs où les combustibles fossiles sont progressivement abandonnés,
       est un parfait exemple de cette accélération. On peut citer comme autre exemple
       l’accélération des programmes destinés à améliorer l’efficacité énergétique dans
       le parc immobilier existant. Ces projets, relativement gourmands en main-d’œuvre,
       peuvent prendre facilement et rapidement de l’envergure, car ils exigent une main-
       d’œuvre peu qualifiée. Il est important toutefois de noter que si les rétrofits sont de
       faible qualité, le bénéfice sur l’environnement à moyen et plus long termes sera
       limité. La crise économique a également accentué la nécessité de fournir une aide
       appropriée aux communautés pénalisées par la transition vers une économie
       sobre en carbone, en proposant par exemple des formations ou des
       reconversions, ainsi que des mesures permettant d’améliorer la mobilité et de
       soutenir le développement et l’implantation d’industries alternatives dans ces
       régions.
       Mettre en œuvre la réforme des subventions aux combustibles fossiles et la
       tarification du carbone, en tenant pleinement compte des effets répartitifs.
       Les prix peu élevés de l’énergie provenant de combustibles fossiles incitent peu à
       investir dans les technologies à faible intensité de carbone et haut rendement
       énergétique à tous les niveaux, de la R-D à la diffusion commerciale.14 La
       possibilité d’un prolongement de cette période de forte incertitude et le niveau de

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prix des combustibles fossiles considérablement inférieur aux prévisions
augmentent l’urgence d’introduire des mesures incitatives en faveur des
entreprises pour l’investissement dans des technologies à fort rendement
énergétique. D’où l’importance de la tarification du carbone et de la réforme des
subventions aux combustibles fossiles.
Une période de prix du pétrole relativement bas est l’occasion idéale de poursuivre
les efforts en faveur de l’introduction de la tarification du carbone ou de son
renforcement. L’abaissement des taxes sur la main-d’œuvre et le capital, au profit
d’un impôt sur la production et la consommation préjudiciables à l’environnement,
peut stimuler la création d’emplois et l’investissement et améliorer ainsi l’efficience
économique. Il est impératif que les réformes de la fiscalité de l’énergie soient
pensées en évitant d’augmenter le nombre des « pauvres en énergie » et les
inégalités, un accès approprié aux services énergétiques étant essentiel pour
garantir des conditions de vie décentes. Il conviendra également de s’attaquer aux
effets répartitifs d’autres instruments de tarification, tels ceux mis en place pour
décourager l’utilisation des véhicules et la consommation de carburant. De même,
la réforme des subventions aux combustibles fossiles, dont le montant s’élevait à
478 milliards USD en 2019 (données de l’OCDE et de l’AIE), est plus facile à
mettre en œuvre dans un contexte de faible prix du pétrole et devrait
s’accompagner d’une aide à la transition ciblée et limitée dans le temps en faveur
des industries, des communautés, des régions et des consommateurs vulnérables.
Éviter la cristallisation d’infrastructures non viables et l’enlisement dans les
activités d’extraction des ressources. L’OCDE a démontré le rôle moteur de
l’infrastructure dans la transition et l’importance de cette dernière pour éviter la
cristallisation des industries polluantes et à fortes émissions. Le niveau très élevé
des budgets alloués à l’infrastructure dans les plans de relance montre qu’il faut
exploiter cette occasion pour mettre en phase les plans d’infrastructure avec les
objectifs à plus long terme en matière de climat, de biodiversité, de gestion de l’eau
et des déchets et d’efficacité des ressources. C’est tout particulièrement le cas
pour les investissements dans les grandes infrastructures de transport, comme les
systèmes routiers, le transport public, les chemins de fer et les ports, dans la
mesure où ces derniers auront des conséquences majeures sur les résultats
environnementaux à venir.
La relance verte pose un défi particulier pour les pays en développement riches
en ressources non renouvelables, notamment en minéraux et combustibles
fossiles. Pour les pays exportateurs de combustibles fossiles, la faible demande
en sources de combustible et la pression en faveur d’une réduction des émissions
de GES rendraient plus urgente encore la nécessité de diversifier les exportations,
en abandonnant les combustibles fossiles au profit d’énergies plus propres. En ce
qui concerne les pays en développement riches en minéraux, la réduction des
émissions provenant de ce secteur pourrait contribuer sensiblement à la réduction
globale des émissions. Pour atteindre ces objectifs, les pays riches en ressources
non renouvelables devront développer des politiques ciblées dans des domaines
tels que la politique fiscale, la réglementation des secteurs financier, de l’énergie
et minier, et les technologies à faible intensité en carbone, tout en accordant une
importance particulière aux aspects d’équité dans la transition.
Développer une agriculture plus durable et résiliente. Le secteur agricole et
alimentaire, parmi les plus vulnérables au changement climatique, est un important
producteur d’émissions de GES, un gros consommateur d’eau et une source
majeure de pollution. Alors que les pays membres de l’OCDE et les pays

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       émergents injectent chaque année 356 milliards USD d’aide en faveur de ces
       producteurs, plus de la moitié de ces dépenses (345 milliards USD) ont un effet
       contre-productif sur l’amélioration de la viabilité du secteur, le reste étant utilisé de
       façon guère plus utile. Seuls 26 milliards USD sont utilisés pour soutenir les
       systèmes d’innovation agricole (SIA) et les systèmes de connaissances agricoles
       (SCA). La relance verte offre une chance d’améliorer la productivité, la viabilité et
       la résilience à long terme des systèmes alimentaires mondiaux en supprimant les
       mesures favorisant la hausse des prix et faussant les échanges - des mesures qui
       découragent les changements dans la production, encouragent une surexploitation
       des ressources naturelles, augmentent potentiellement les émissions de GES et
       ralentissent l’adaptation au changement climatique. Les fonds publics peuvent être
       réorientés vers des investissements dans l’innovation, l’utilisation durable des sols,
       de l’eau et des ressources de la biodiversité, l’atténuation du changement
       climatique et l’adaptation à ses effets et l’amélioration de la résilience des ménages
       agricoles. Ces mesures pourraient englober, notamment, le recours plus
       systématique à des paiements ciblés destinés à encourager les bonnes pratiques
       de gestion agricole.
       Libérer l’innovation. La création et la diffusion de nouveaux produits, processus
       et méthodes sont les clés de la création de nouvelles filières et de nouveaux
       emplois, de l’accroissement de la productivité et du passage à une relance verte.
       Les possibilités d’innovation écologique sont nombreuses, par exemple dans les
       domaines des technologies pour les énergies renouvelables, du stockage de
       l’énergie, du confort thermique des bâtiments, des véhicules électriques, hybrides
       et économes en carburant, ou encore des technologies de séquestration, stockage
       et utilisation du carbone. Malgré quelques avancées, l’innovation actuelle ne suffira
       pas à atteindre les objectifs environnementaux et climatiques ambitieux. Les
       mesures de relance sont une occasion inespérée de renforcer le financement de
       l’innovation, bien que l’action gouvernementale en faveur de l’innovation dépasse
       le seul financement de la R-D. Les barrières fréquentes à l’innovation sont l’accès
       aux financements, l’accès asymétrique à l’information, l’incertitude face aux futures
       stratégies politiques et les barrières commerciales.15

La création d’emplois dans le cadre d’une relance verte

       L’atténuation de l’impact de la pandémie sur l’emploi a été jusqu’à présent
       un élément clé des mesures gouvernementales de relance. Il est clair que les
       mesures de relance verte devront aussi traiter en priorité la question des emplois,
       à la fois directement et indirectement. Les avis sont partagés quant à l’impact
       macroéconomique de la croissance verte sur l’emploi en général.16 Toutefois, les
       impacts sectoriels et régionaux peuvent être importants pour certaines industries
       et les mesures visant à faciliter le reclassement des salariés doivent tenir compte
       de la nature et de la « transférabilité » des compétences, ainsi que de la qualité
       des emplois.
       Divers secteurs verts et activités vertes offrent des perspectives
       intéressantes pour la création d’emplois. Ainsi, les énergies renouvelables,
       notamment l’énergie solaire photovoltaïque, sont porteuses de plus d’emplois par
       unité d’investissement et d’énergie que la génération de combustibles fossiles.17
       L’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) estime que plus
       de 40 millions de personnes pourraient être employées dans les énergies
       renouvelables d’ici 2050 et que le nombre de personnes employées dans le

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secteur de l’énergie dans sa globalité pourrait atteindre 100 millions au même
horizon, contre environ 58 millions aujourd’hui, si la communauté internationale
exploite tout le potentiel des énergies renouvelables. L’efficacité énergétique est
également synonyme de création rapide d’emplois. L’AIE estime le potentiel à
2,5 millions de nouveaux emplois créés par an dans le cadre des efforts de
relance. Toutefois, il existe des disparités régionales considérables dans la
création d’emplois liés à l’énergie, les emplois créés dans certaines parties du
monde étant plus nombreux que les emplois perdus ailleurs. De plus, certains
groupes de population, notamment les minorités ethniques et les femmes,
bénéficient moins de la création d’emplois que d’autres. L’identification de
politiques permettant d’équilibrer l’impact de la transition tout en optimisant les
opportunités socioéconomiques est capitale pour garantir une transition plus
inclusive, notamment à l’égard des groupes plus vulnérables.
Les emplois liés à la nature sont aussi potentiellement importants dans le contexte
de la relance verte. La restauration de l’écosystème aux États-Unis offre
126 000 emplois directs et représente un apport annuel de 9,5 milliards USD à la
production économique. Elle génère par ailleurs 95 000 emplois indirects et
15 milliards USD de dépenses des ménages. Une autre étude a recensé près de
11 emplois directs par investissement de 1 million USD dans les projets de
restauration de l’écosystème, le nombre total d’emplois directs et indirects liés à
ce type de projet par investissement de 1 million USD s’élevant à 31,5.18
L’agriculture biologique présente, elle aussi, un potentiel pour la création
d’emplois. Plusieurs études ont montré que les besoins en main-d’œuvre par
hectare des exploitations biologiques sont plus élevés que ceux des exploitations
traditionnelles, notamment parce qu’elles ont des activités de production exigeant
davantage de main-d’œuvre (par exemple, des systèmes de rotation complexes,
une agriculture mixte), qu’il existe une proportion plus importante de cultures à
forte intensité de main-d’œuvre (par exemple, les fruits et légumes), moins de
mécanisation, davantage de transformation et de commerce à la ferme et des
exigences plus strictes en matière d’information. Il est cependant précisé que les
besoins en main-d’œuvre dans l’agriculture biologique sont fonction des
caractéristiques du secteur et du pays. Ainsi, les exploitations horticoles
biologiques ont besoin de beaucoup plus de main-d’œuvre, tandis que les
exploitations céréalières et laitières biologiques n’ont sans doute pas besoin de
plus de main-d’œuvre que les exploitations traditionnelles.19 Il convient en outre de
prendre en compte certains arbitrages importants. Par exemple, l’agriculture
biologique implique une utilisation intensive des terres et les émissions de GES
par unité de production peuvent être plus élevées que pour son homologue
conventionnelle. Par ailleurs, les rendements par hectare sont plus faibles et les
coûts fixes par unité de production sont généralement plus élevés dans
l’agriculture biologique.
La transition vers une économie plus verte requiert aussi de nouvelles
compétences, pour les nouveaux emplois comme pour les emplois actuels
contraints d’évoluer. Cette transition sera impossible sans main-d’œuvre
correctement formée. La pénurie de compétences est déjà identifiée comme un
obstacle majeur dans plusieurs secteurs, notamment les énergies renouvelables,
l’efficacité énergétique et l’utilisation efficace des ressources, la rénovation des
bâtiments, la construction, les services environnementaux et la production. La
pénurie de compétences liée à la transition vers une économie sobre en carbone
est particulièrement prononcée dans les pays en développement. La disponibilité
de travailleurs et d’entreprises possédant les compétences requises pour les

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       emplois verts est indispensable non seulement pour engager la transition vers une
       économie verte, mais aussi faire en sorte qu’elle soit juste, c’est-à-dire qu’elle
       garantisse l’inclusion sociale et un travail décent. Dans la mesure où tous les
       ménages et tous les individus doivent avoir les mêmes chances de s’adapter à la
       transition verte et d’en bénéficier, l’investissement dans la formation et l’accès aux
       compétences devraient faire partie intégrante des plans de relance. Des mesures
       complètes de formation professionnelle et de reconversion peuvent améliorer la
       transférabilité des travailleurs et donc leur capacité à retrouver un emploi dans un
       autre secteur ou une autre entreprise, si nécessaire. Bien que les activités de
       transformation de l’énergie aient sans doute globalement un effet net positif sur
       l’emploi, des millions de travailleurs du secteur des combustibles fossiles devront
       trouver un nouvel emploi.20 Les politiques publiques pour une transition juste
       peuvent aussi faciliter le processus de reconversion de ces derniers. La création
       de partenariats entre gouvernements et industries peut être envisagée pour
       financer cette reconversion et garantir que le contenu des formations demeure
       conforme aux attentes du secteur, à mesure que celles-ci évoluent.

Le rôle d’une finance durable

       Les gouvernements ont engagé des ressources publiques importantes dans
       la relance verte, à savoir au moins 312 milliards USD selon une estimation
       préliminaire découlant d’une analyse de l’OCDE pays par pays (estimation qui
       sera affinée et détaillée dans les prochains mois). Si on y ajoute la série complète
       des mesures proposées par l’UE, ce chiffre passe à plus de 1000 milliards USD
       (en précisant que certains chiffres pourraient être comptés deux fois en
       considérant les totaux des pays de l’UE déjà annoncés). Cependant, comme
       précisé ci-avant, davantage de ressources ont jusqu’à présent été attribuées à des
       moteurs de reprise économique moins durables, par exemple pour faciliter les
       investissements dans les énergies fossiles. Une relance verte et génératrice
       d’emplois exige des ressources financières supplémentaires.
       Pour financer pleinement la transition vers une économie bas carbone, il est
       impératif d’utiliser stratégiquement les ressources publiques dédiées aux
       mesures vertes en vue de mobiliser du capital de ressources privées. À cette
       fin, le système financier doit estimer à sa juste valeur et incorporer le risque
       climatique et lié à la biodiversité. Les marchés financiers doivent également être
       transparents et efficaces pour garantir l’intégrité du marché et conserver la
       confiance des investisseurs, ce qui renforcera alors la résilience du marché. Ces
       dernières années, des milliers de milliards de dollars de capital ont été dédiés à
       des investissements évalués sur la base de critères environnementaux, sociaux et
       de gouvernance (ESG). Dans le contexte du COVID-19, porter une plus grande
       attention à des risques ESG non financiers est plus important que jamais, tant pour
       la durabilité qu’en tant que facteur concurrentiel permettant de remporter des parts
       de marché et des investissements. Les critères ESG ont contribué à sensibiliser
       les entreprises et les investisseurs et à renforcer leurs engagements, mais il est
       urgent de continuer dans cette voie pour garantir que les notations d’ESG sont
       adaptées aux objectifs. Les marchés ESG comptent aujourd’hui une grande
       variété (et parfois des divergences) de méthodologies, d’indicateurs de
       performance et de structures de produits. Une étude de l’OCDE à paraître sur ces
       notations conclut par exemple qu’une notation élevée au sein du pilier
       « Environnement » des critères ESG ne se traduit pas nécessairement en une
       réduction des émissions de carbone.21 Un nouveau travail de l’OCDE aidera à

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 13

répondre à ces problèmes, par un cadre et une orientation politique visant à des
pratiques ESG efficaces.
Une exploitation de l’investissement privé pour les infrastructures constitue
un pilier critique de la transition vers une économie bas carbone, comme le
montre l’initiative à l’échelle de l’OCDE sur des infrastructures durables. Ce
sont près de 6 300 milliards USD d’investissements annuels dans les
infrastructures qui sont nécessaires d’ici 2030 pour soutenir la croissance et
augmenter le bien-être, à savoir dans des infrastructures d’énergie, de transport,
d’eau et de télécommunications. Mais 10 % de plus seulement, à savoir
600 milliards USD par an, seraient indispensables pour que ces nouvelles
infrastructures soient en phase avec un objectif climatique bien inférieur à
2 degrés.22 L’investissement dans des infrastructures durables est aussi une belle
opportunité de relance verte attendu que 60 % de l’infrastructure urbaine qui
existera en 2030 restent à construire. L’investissement dans les infrastructures a
été une composante essentielle d’un stimulus fiscal après la crise financière
de 2007-08, de 21 % dans les économies avancées et de 40 % dans les autres
pays.23
Ces dernières années, les émissions obligataires sont de plus en plus devenues
un moyen pour mobiliser des finances privées dans des projets d’infrastructures
faiblement émettrices de carbone. Celles-ci totalisent près de 800 milliards USD.
Malgré la crise, la demande d’investissements responsables a continué à favoriser
les émissions obligataires vertes en 2020, avec 77,7 milliards USD émis, bien que
ce chiffre soit de 13 % inférieur à celui couvrant une même période en 2019.24
Cependant, si des progrès significatifs ont été réalisés pour mettre en place des
normes en matière d’émissions obligataires vertes, le risque du « green washing »,
selon lequel des produits sont investis dans des solutions moins durables,
subsiste.
La mobilisation d’investissements privés dans le cadre de la relance verte se
heurte aussi au manque de projets d’infrastructures assortis d’une « qualité
d’investissement » suffisante. Une plus grande certitude sur un ensemble de
projets potentiels permettrait aux investisseurs de prendre des risques calculés,
d’investir dans un renforcement des capacités et de contribuer à favoriser un
marché de l’investissement dans les infrastructures. Pour faciliter cette éventualité,
les gouvernements peuvent soutenir la création de tels flux de projets, notamment
sur la base de partenariats entre investisseurs et gouvernements, et par la mise
en place de définitions plus précises et homogènes de ce que sont des
investissements « verts ». Car une compréhension commune de ce que sont les
critères d’une infrastructure « verte » et « durable » accélérerait les flux
d’investissement en simplifiant le devoir de diligence et en autorisant une
architecture de type « prête à l’emploi ». La taxonomie de l’UE concernant la
finance durable devient à cet égard une composante importante.25
Les banques multilatérales de développement et les institutions financières
de développement ont joué un rôle crucial en soutenant la réponse des
gouvernements à la pandémie. Maintenant que la réponse passe de la mise à
disposition de liquidités d’urgence au financement de la relance, les prestataires
financiers du développement devraient accorder la priorité à la durabilité et
chercher à mobiliser du capital privé pour réaliser une relance verte via un partage
stratégique des risques.

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L’importance d’une coopération mondiale pour la relance verte

       Le COVID-19 a déclenché une crise sanitaire et économique mondiale, qui exige
       une meilleure coopération internationale dans différents domaines, du
       développement de vaccins et traitements au renforcement de la robustesse et de
       la résilience des chaînes d’approvisionnement, et jusqu’à la coordination des
       politiques fiscales et monétaires et au soutien des pays en développement.
       Les problèmes environnementaux les plus urgents étant également en
       grande partie de nature transnationale, la réponse aux défis
       environnementaux mondiaux passe par une coopération multinationale,
       notamment pour réaliser à moindre coût les actions de transformation
       significatives indispensables. Cette approche est essentielle pour renforcer la
       résilience et le bien-être, notamment pour consolider les moyens de défense
       contre de futures pandémies, mais aussi pour concrétiser le potentiel de création
       d’emploi, de revenus et de croissance des secteurs verts. La relance verte devient
       à cet égard un élément central, tant au plan national qu’international. Les politiques
       actuelles se concentrent sur des mesures nationales soutenues par des initiatives
       internationales de suivi telles que « Platform for Redesign 2020 », initiative
       japonaise soutenue par la CCNUCC.26 Cependant, un assouplissement du
       commerce international des biens et services environnementaux, une meilleure
       coopération en matière d’innovation et de flux accrus de finance durable, et un
       soutien technique entre pays développés et en développement seront aussi
       essentiels. Ils ne peuvent être obtenus sans accroître la coopération à l’échelle du
       monde. Il est important de relever que le prochain cycle, en 2021, de négociations
       internationales majeures sur le climat, la biodiversité et les produits chimiques
       s’inscrira comme une étape critique pour susciter une action multilatérale et
       atteindre les objectifs environnementaux convenus à l’échelle de la planète.
       Comme elle l’a déjà fait par le passé, l’OCDE soutiendra ces initiatives par
       des témoignages, des données et une analyse des meilleures pratiques.
       Dans les mois qui viennent, l’OCDE améliorera et affinera sa surveillance des
       mesures de relance verte au sein des pays membres et de ses partenaires clés,
       et continuera à mettre au point une analyse visant à soutenir les prochaines
       grandes négociations internationales sur le climat et la biodiversité de 2021.
       L’OCDE envisage aussi pour 2021-22 un grand projet horizontal consacré au
       climat et à la résilience économique, qui abordera les problèmes stratégiques que
       doivent résoudre les économies et les sociétés pour répondre aux défis
       climatiques et environnementaux associés dans une époque de perturbations
       économiques et technologiques.

Suivi et évaluation de la relance verte : indicateurs clés

       Le suivi de l’impact des mesures de relance sur les résultats environnementaux,
       au moyen d’indicateurs quantifiables, comparables et opportuns, est indispensable
       pour garantir une mise en œuvre ciblée et efficace de la relance verte. De plus,
       lorsqu’ils conçoivent et mettent en œuvre des mesures de relance vertes, les pays
       devraient systématiquement concevoir des cadres d’évaluation assortis de critères
       clairs et de méthodologies robustes visant à évaluer l’efficacité environnementale
       et économique desdites mesures. Une telle évaluation permettra également aux
       gouvernements d’adapter les programmes et les politiques en fonction de
       nouvelles circonstances et de nouvelles données et connaissances.

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