MONDE - Scénario macro-économique 2018-2019 - La date de péremption n'approche pas dangereusement
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Trimestriel – N°18/149 – 10 juillet 2018 MONDE – Scénario macro-économique 2018-2019 La date de péremption n’approche pas dangereusement Malgré le resserrement des conditions financières américaines et une possible exacerbation des tensions commerciales, le retournement du cycle n’est pas imminent. Mais la belle accélération synchrone est désormais bien dépassée. La croissance est encore insolente aux États-Unis, vigoureuse en zone euro après un essoufflement temporaire, destinée à se replier dans la mosaïque émergente. Les pays émergents sont les premières victimes de la combinaison « appréciation du dollar, montée des taux américains et intensification des craintes liées au protectionnisme ». Sommaire Zoom vidéo Les menaces américaines Pays développés – Encore du ressort .......................................3 Malgré le resserrement moné- Pays émergents – Léger recul de la croissance, intensification taire américain et les menaces des risques ............................................................................. 11 d’escalade protectionniste, la Pétrole – L’Arabie saoudite garante de l’équilibre pétrolier ...... 16 croissance américaine est inso- Politique monétaire – Resserrements divers ........................... 17 lente et la zone euro résiste bien. Taux d’intérêt – Remontée très douce .................................... 20 Jusqu’en 2020… Taux de change – L’appétit pour le dollar ............................... 22 Prévisions économiques et financières ................................... 24 Les États-Unis continuent d’afficher une santé octobre 2009…) soit inférieur à son niveau économique insolente. Une croissance dont le « d’équilibre » (selon la Federal Reserve, avec un rythme ne s’infléchit pas, tirée par la consommation taux de chômage à 4,5%, l’économie est au plein des ménages et par la reprise de l’investissement, emploi), l’inflation se redresse lentement. Mais son mais aussi « sur-stimulée » par un plan budgétaire accélération pointe. De plus, la Federal Reserve aussi substantiel qu’inopportun. Aussi mûr soit-il, le veille et cherchera évidemment à promouvoir un cycle, dopé par des économies d’impôts interve- ralentissement ordonné. Le cycle américain se nues alors que l’économie fonctionnait déjà à pleine révèle d’une longévité impressionnante. Le cycle capacité, voit son pic différé. Et les déséquilibres qui actuel comptabilise déjà 107 mois de croissance en annoncent généralement la fin ne sont pas ininterrompus à rapprocher des records de 106 et encore exacerbés. Bien que la croissance excède 119 mois enregistrés – respectivement – au tout son rythme potentiel (1,8-2%) et que le taux de début des années 60 puis 90. Si la croissance se chômage (3,8% à rapprocher d’un pic à 10% en maintient jusqu’en juin 2019, le cycle d’expansion Études Économiques Groupe http://etudes-economiques.credit-agricole.com
Monde – Scénario macro-économique 2018-2019 La date de péremption n’approche pas dangereusement actuel, en place depuis juin 2009, se révélera alors Ainsi, après 2,6% en 2017, notre scénario révise le plus long jamais enregistré. la croissance de la zone euro légèrement à la baisse (2,2% en 2018, puis 2% en 2019) pour Mais ce cycle va se heurter au durcissement des incorporer l’à-coup du premier trimestre et un conditions financières. Il va être confronté aux environnement plus risqué sans inscrire un resserrements monétaires réguliers qui devraient retournement du cycle européen. conduire le taux des Fed Funds au-dessus de son niveau « naturel » (2,9%) fin 2019. Une politique L’Europe n’est encore pas réellement affectée par monétaire restrictive, puis une courbe des taux les troubles américains qui se manifestent, pour d’intérêt plate : un symptôme censé nous signaler l’instant encore, sous une forme financière. En que la récession est un risque substantiel. La revanche, le cocktail « appréciation du dollar, croissance s’infléchira, en outre, mécanique- montée des taux américains et intensification ment lorsque le stimulus fiscal va s’évaporer La des craintes liées au protectionnisme » a renfor- contribution à la croissance des « lois » budgétaires cé les pressions financières sur la sphère estimée à 0,8 et 0,6 point de pourcentage en 2018 émergente. et 2019, respectivement, devrait être quasiment nulle en 2020. Après avoir atteint 3% en 2018 et Au sein de la mosaïque émergente, la plupart des 2,9% en 2019, le taux de croissance repasserait devises ont reculé, les taux d’intérêt ont connu des sous son rythme potentiel en 2020. pressions haussières et les spreads de crédit se sont écartés. Et même si la croissance a géné- 2020 : année au cours de laquelle intervient le ralement fait preuve d’une bonne résistance dans la retournement cyclique, année au cours de plupart des pays émergents et joué un rôle laquelle une récession américaine ne peut être d’amortisseur face aux pressions issues des mar- exclue. chés, elle est globalement en légère perte de vites- se. Nous tablons sur un ralentissement très graduel, En zone euro, le ralentissement du premier de 4,6% en 2018 et 4,5% en 2019. trimestre a suscité de nombreuses questions auxquelles des réponses exagérément pessi- Maintien d’une croissance très soutenue en 2018 et mistes, voire alarmistes, ont été fréquemment 2019 aux États-Unis, léger essoufflement en zone apportées. Expliqué par des exportations moins euro, ralentissement modéré dans l’univers émer- dynamiques, cet à-coup ne signale pas la fin gents : une « histoire » encore sereine, bien prématurée du cycle de croissance. Ce dernier ne qu’entourée de risques substantiels, qui suppo- bute pas sur des contraintes d’offre rédhibitoires, se que le prix du pétrole reste élevé et volatil, notamment en termes de travail. Ce ne sont pas les mais ne se redresse pas violemment si l’Arabie tensions sur la main-d’œuvre qui risquent de faire saoudite se montre garante de l’équilibre dérailler la croissance. Cette dernière s’assagit et pétrolier. Un scénario qui repose également sur se voit menacée par des facteurs extérieurs : plus une remontée lente et ordonnée des taux que le resserrement monétaire américain, c’est bien d’intérêt. le risque d’escalade dans la guerre commerciale qu’il convient de craindre. Compte tenu des repré- Déterminée, la Fed poursuit son resserrement sailles probables (mais supposées modérées, par monétaire en vue de promouvoir un atterrissage en nécessité, compte tenu des pertes qu’elles occa- douceur et reconstitue ses marges de manœuvre. sionneraient pour les belligérants hors États-Unis), La BCE s’engage dans la voie d’une politique il serait exagérément ambitieux de chiffrer le coût lentement, très lentement, moins souple. À l’aune potentiel d’une guerre dont on ne connaît pas les de la vigueur de la croissance, les taux longs contours. Une guerre commerciale pénaliserait américains sont faibles. Mais de puissantes forces évidemment la croissance. Cependant, avant de rappel préviennent actuellement une correction même que l’escalade n’intervienne, ce sont les violente. Un constat de même nature convient à la dommages sur la confiance pouvant altérer les zone euro. Les taux d’intérêt core ne peuvent que décisions d’investissement qu’il y a dès à présent se redresser très lentement. lieu de redouter. N°18/149 – 10 juillet 2018 2
Monde – Scénario macro-économique 2018-2019 La date de péremption n’approche pas dangereusement Pays développés – Encore du ressort Les États-Unis affichent une santé insolente. Si un retournement cyclique violent ne peut être exclu, il ne constitue pas une menace imminente. En dépit de l’accumulation de risques extérieurs, le retournement du cycle européen ne se profile pas encore et le Japon poursuit sa lente reprise. États-Unis : aidée par le stimulus budgétaire financé par le Etats-Unis : marché du travail déficit, la croissance reste forte à court terme 350 5,5 cvs, '000 cvs, % La croissance demeurera supérieure au potentiel en 2018 et 2019. 300 5,0 La solidité du marché du travail soutient la confiance des ménages 250 et la consommation. À 3,8% et se dirigeant vers 3,5%, le taux de 200 4,5 chômage est inférieur de 1 point de pourcentage au taux de chômage naturel estimé par la Fed. Alors que la croissance du salaire horaire 150 4,0 moyen a été relativement faible, à moins de 3% en glissement annuel, 100 une accélération graduelle des salaires se profile sous l'effet de la 3,5 poursuite du resserrement du marché du travail. Le nombre d'offres 50 d'emplois dépasse, en effet, actuellement le nombre de chômeurs. La 0 3,0 situation financière des ménages est confortable, avec un service de la 2015 2016 2017 dette faible (quoiqu'en hausse). Le patrimoine net agrégé des ménages Évolution de l’emploi total non agricole a continué de progresser rapidement : il entretient un effet de richesse Taux de chômage (dr.) Sources : BLS, Haver, CA CIB positif qui soutient les dépenses. Simultanément, la tendance baissière du taux d'épargne se poursuit. Stimulé par une croissance domestique solide et les attitudes pro- Etats-Unis : inflation business en cours à Washington (moins de contraintes réglementaires 2,5 a/a, % pour les entreprises, moins d'impôts, incitations à l'investissement), l'investissement des entreprises reste vigoureux : c’est précisé- 2,0 ment sa vigueur qui introduit un risque haussier sur notre scénario. Les mesures protectionnistes soulèvent en revanche des 1,5 inquiétudes. S'ils anticipent une montée des difficultés pour maintenir ou faire progresser leurs ventes à l'étranger, les industriels pourraient 1,0 hésiter avant d’accroître leur capacité de production domestique, malgré les avantages fiscaux et le faible coût du capital. 0,5 Outre leur impact incertain sur le comportement d’investissement 0,0 des entreprises exportatrices, les mesures protectionnistes 13 T1 15 T1 17 T1 19 T1 augmentent les risques d’un choc négatif lié aux échanges Inflation PCE commerciaux. Une guerre commerciale à grande échelle aurait, en Source : CA CIB Inflation PCE s/s-jacente effet, probablement des effets positifs de courte durée sur la production et les ventes domestiques aux États-Unis. Mais les hausses de droits de douane adoptées en représailles auraient pour effet d’abaisser la Etats-Unis : croissance croissance mondiale à moyen terme par le biais de la hausse du prix liée aux lois budgétaires des importations et de l’érosion du pouvoir d’achat des ménages. Sans 3,5% même envisager de guerre commerciale de grande ampleur, la 3,0% 0,2% 0,0% dégradation des exportations nettes en volume pèsera sur la 2,5% 0,3% 0,8% 0,3% croissance réelle en 2018 et 2019. Si le dollar s’est récemment 0,3% 0,6% 0,3% apprécié (en termes effectifs nominaux), il reste inférieur à ses niveaux 2,0% de début 2017 et contribue à la compétitivité des exportations 1,5% américaines. En revanche, dynamisme de la consommation et 2,2% 2,2% augmentation des dépenses d’investissement des entreprises sont 1,0% générateurs d’importations élevées : la contribution nette des échanges 0,5% à la croissance sera négative. 0,0% 2018 2019 Le stimulus budgétaire financé par le déficit (baisse des impôts et Autres textes Dépenses augmentation des dépenses) n’arrive pas au meilleur moment du Loi fiscale Croissance avt lois budg. cycle économique actuel. Il donne un coup de pouce à la croissance Sources : CFRB, CBO à court terme, mais le Congressional Budget Office (CBO) estime son impact cumulé sur dix ans (totalité de l’horizon budgétaire) à seulement N°18/149 – 10 juillet 2018 3
Monde – Scénario macro-économique 2018-2019 La date de péremption n’approche pas dangereusement 0,7% de PIB supplémentaire. Les baisses d’impôts et les autres mesures de la réforme fiscale de Donald Trump adoptée fin 2017 (Tax Cuts and Job Act ou TCJA) devraient se traduire par un surcroît de croissance de 0,3 à 0,5 point de pourcentage en 2018 et 2019. De plus, le Bipartisan Budget Act (l’équivalent de la loi de finances) de 2018 a relevé le plafond de dépenses du gouvernement d’environ 300 milliards Etats-Unis : confiance des cvs, de dollars, ce qui pourrait ajouter 0,3 point de croissance supplé- cvs, entreprises & dépenses annualisé, mentaire en 2018 et en 2019, selon les estimations du CBO. La 1986=100 d'investissement % 108 1,5 politique budgétaire des républicains suggère des déficits supérieurs à 106 1 000 milliards de dollars pour les années fiscales 2019 et 2020. Le 104 1,0 financement pourrait exercer des pressions haussières sur les taux 102 d’intérêt et se traduire, in fine, par un effet d’éviction pénalisant 100 0,5 98 l’investissement privé. 96 0,0 94 Le maintien de la croissance au-dessus de son niveau potentiel 92 -0,5 90 (1,9%) continue de faire reculer les ressources inemployées et 88 -1,0 entraîne le taux de chômage bien en dessous de son niveau 2013 2014 2015 2016 2017 2018 naturel. Ceci devrait susciter une accélération graduelle de la Contrib. investissement privé non croissance des salaires, puis des pressions haussières sur les prix. Sources: NFIB, résidentiel à la croissance (dr.) L’inflation PCE1 sous-jacente (1,9% sur un an en mai) se situe juste BEA, Haver Indice NFIB de confiance des PME sous l’objectif de 2% de la Fed et devrait progressivement remonter légèrement au-dessus de ce seuil. À cet égard, l’impact des droits de douane sur le prix des importations américaines reste une grande inconnue. Mais la guerre commerciale, tout comme les perturbations des chaînes d’approvisionnement, constitue un facteur d’augmentation des prix et d’érosion du pouvoir d’achat du consommateur final. Politique commerciale et autres mesures économiques seront annoncées à l’approche des élections de mi-mandat de novembre. Le parti du président en exercice perd habituellement des sièges lors des élections de mi-mandat. Un gain net de vingt-trois sièges pour les démocrates leur donnerait la majorité à la Chambre des représentants et limiterait le programme législatif du président Trump. Focus – Toute bonne chose a une fin : scénario alternatif expansion-récession Si la croissance se maintient au-delà de juin 2019, le cycle d’expansion actuel sera alors le plus long jamais enregistré. On dit cependant que les cycles économiques « font rarement de vieux os ». Les cycles d’expansion se terminent généralement parce que la Fed durcit sa politique en relevant les taux directeurs pour ralentir la croissance ou faire baisser l’inflation ou parce que l’économie subit un choc (prix du pétrole, guerre, etc.). Or, plusieurs trajectoires sont actuellement susceptibles de mener à une récession aux États-Unis en 2020 : l’épuisement du stimulus budgétaire, la tournure restrictive de la politique monétaire, le risque d’inversion de la courbe des taux et les tensions internationales complexifiant la tâche de la Fed. Nous assignons une probabilité subjective de 40% à un tel scénario, contre 60% au scénario de ralentissement de fin de cycle qui constitue notre scénario central. Comme l’indique le graphique ci-dessous, l’impact du stimulus fiscal généré par les baisses d’impôts et les hausses de dépenses se concentre sur les premières années. Avec la dissipation du stimulus, une croissance inférieure au potentiel est ensuite attendue (en 2020 et dans les années qui suivent). Un scénario alternatif de type expansion-récession, financé par le déficit, constitue un réel risque. Or, bien que 2020 soit une année électorale, il serait difficile d’atténuer le ralentissement avec davantage de soutien budgétaire : la perspective d’une augmentation du déficit fédéral vers les mille milliards de dollars exercera une force de rappel. 1 Indice de prix des dépenses de consommation personnelle (Personal Consumption Expenditure). N°18/149 – 10 juillet 2018 4
Monde – Scénario macro-économique 2018-2019 La date de péremption n’approche pas dangereusement Le FOMC aura pour difficile tâche de promouvoir un a/a, %, atterrissage en douceur, en orientant graduellement la cvs, base Etats-Unis : l’effet positif des 2009 premières mesures de soutien politique accommodante actuelle vers une politique budgétaire va s’estomper légèrement restrictive d’ici la fin de l’année prochaine. Un 3,0 atterrissage en douceur suppose habituellement une hausse du taux de chômage. Celle-ci n’a pas besoin 2,5 d’être considérable. Ainsi, comme le rappelle l’ancien 2,0 président de la Fed de New York, William Dudley : « historiquement, l’économie est toujours tombée en 1,5 pleine récession dès que le taux de chômage a augmenté de plus de 0,3 ou 0,4 point de pourcentage ». 1,0 De plus, les membres de la Fed seront confrontés au 0,5 risque de voir les hausses de taux projetées conduire à 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 une inversion de la courbe des taux. Certes, la faiblesse Prévisions de croissance (CBO) de la prime de terme, la faiblesse des taux souverains et Croissance potentielle (CBO) les pressions haussières sur les taux courts américains Sources : CBO, Haver (liées à une augmentation des émissions du Trésor afin de financer un déficit en forte hausse) sont désormais autant de Le protectionnisme est raisons de croire que « cette fois, c’est différent ». Il est cependant un jeu dangereux difficile d’ignorer la régularité historique avec laquelle une courbe Importations des taux inversée a précédé une récession. Pays depuis début % du total 2018 (Mds USD) Enfin, la montée des tensions internationales, provoquées par les Chine 161 20% mesures de l’administration Trump sur les droits de douane et Mexique 110 14% autres, pourrait exacerber la situation. Elle risque d’aggraver Canada 104 13% l’inflation, rendant plus difficile la tâche de la Fed tout en pesant sur la croissance. Profitons donc des bons moments tant qu’ils durent ; Japon 47 6% on ne peut guère espérer mieux. Source : Census department données 2018 Zone euro : ce ne sont pas les tensions sur la main- d’œuvre qui feront dérailler la croissance L’économie de la zone euro a connu un ralentissement au premier trimestre 2018, après une nette accélération depuis l’été 2017. Il y a encore quelques mois, notre scénario était caractérisé par un risque Zone euro : la croissance haussier et une révision à la hausse des anticipations sur fond de signalée par les enquêtes surprises positives en provenance de la sphère réelle. Les questions 60 sont aujourd’hui multiples : ce ralentissement est-il temporaire ou plutôt indice annonciateur d’une fin de cycle ? L’économie de la zone bute-t-elle déjà sur des contraintes de production ? Ce ralentissement est-il généralisé 55 et annonciateur d’un retournement du cycle mondial ? Notre scénario de croissance de 2,2% en 2018, puis 2% en 2019 (après 2,6% en 2017) répond à ces questions : il révise la croissance légèrement 50 à la baisse pour incorporer l’à-coup du premier trimestre et un environnement plus risqué, sans inscrire un retournement du cycle européen. 45 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 PMI Composite > potentiel Un scénario d’infléchissement léger de la croissance sans > potentiel, < scénario > scénario retournement du cycle suppose de cerner les raisons du coup de frein Sources : Markit, AMECO, Crédit Agricole S.A. et de s’interroger sur les déterminants de l’accélération de fin 2017. Celle-ci est entièrement due à la dynamique particulièrement soutenue des exportations ; a contrario, le ralentissement de la croissance au premier trimestre est principalement dû à une chute des exportations. La vigueur de la demande adressée à la zone euro fin 2017 était justifiée par celle du cycle mondial de biens d’investissement. Les enquêtes suggéraient alors un taux de croissance du PIB de 3%. Or, non seulement la croissance du PIB fin 2017 s’est révélée plus modeste (à 2,8% en rythme annuel au quatrième trimestre 2017), mais surtout N°18/149 – 10 juillet 2018 5
Monde – Scénario macro-économique 2018-2019 La date de péremption n’approche pas dangereusement son rythme s’est infléchi au premier trimestre (2,5%). La production industrielle a fléchi sur fond de déstockage, lorsque le processus de reconstitution des stocks qui avait commencé à se mettre en place s’est rapidement révélé excessif. Les enquêtes se sont repliées pour s’ajuster à un rythme plus modéré d’évolution de l’activité. D’autres facteurs temporaires ont perturbé l’activité au premier trimestre (grèves, météo et calendrier des vacances en Allemagne, réforme fiscale en France). Mais, après cinq mois de dégradation, alors que le cycle mondial semble se redresser et qu’une croissance soutenue est UEM : stock de capital attendue aux États-Unis, le climat des affaires se stabilise au mois de 200 Indice juin dans la zone euro. Le niveau des enquêtes reste cohérent avec 2000=100 une croissance supérieure au potentiel, voire supérieure à notre 150 prévision de croissance en moyenne annuelle pour 2018 (2,2%). Cependant, l’ajustement à la baisse des stocks pèsera encore sur l’activité au deuxième trimestre dans la zone euro et la propagation de 100 l’amélioration du cycle mondial ne se manifestera que modérément dans les chiffres. 50 Au-delà du dynamisme retrouvé du cycle mondial au deuxième trimestre, pourquoi cet à-coup nous semble-t-il temporaire ? 0 Signale-t-il le ralentissement d’une économie qui buterait sur des 1995 2000 2005 2010 2015 contraintes physiques et, notamment, sur la disponibilité de main- Zone euro Allemagne France Italie d’œuvre ? Sources : Eurostat, Crédit Agricole S.A. Les données d’enquête ont récemment fait état, d’une part, d’une remontée importante du taux d’utilisation des capacités dans la zone euro, qui retrouve le niveau des pics des cycles précédents et, d’autre part, d’un nombre croissant d’entreprises dont la production est contrainte par les équipements. La faiblesse de l’investissement au cours de la récente phase de reprise a, en effet, produit une rupture dans la croissance du stock de capital dans les pays de la zone à l’exception de l’Allemagne. L’investissement est désormais reparti ; un UEM : nombre d'heures travaillées 6 nombre croissant d’entreprises affirment réviser à la hausse leurs plans d’investissement et vouloir investir pour étendre les capacités de 4 production. Le délai moyen d’ajustement du stock de capital est 2 cependant très long (de quatre à cinq ans). Lors d’une reprise de 0 l’activité, les délais élevés entre la commande et la mise en place de nouveaux équipements peuvent ainsi conduire à une forte inertie des -2 capacités de production. À court terme, les capacités de production -4 sont moins rigides qu'un raisonnement mené exclusivement en termes de stock ne le suggère. La complémentarité (même imparfaite) entre le -6 capital et le travail vient, en effet, réduire cette contrainte à court terme, %, t/t-4 -8 en mobilisant plus les travailleurs en poste et en augmentant les heures T1 00 T1 03 T1 06 T1 09 T1 12 T1 15 T1 18 travaillées. Zone euro Allemagne Espagne France Italie Sources : Eurostat, Crédit Agricole S.A. Or, l’évolution des heures travaillées, encore très modérée par rapport aux pics d’activité passés, ne signale pas une très forte mobilisation de l’emploi pour réduire ces tensions. Elle conduit aussi à relativiser la remontée du nombre d’emplois vacants et les enquêtes sur les goulets de production qui signalent des contraintes croissantes sur le facteur travail. Si le manque de main-d’œuvre est de plus en plus ressenti dans certains pays (Allemagne, Pays-Bas et dans une moindre mesure en France), globalement (à l’exception probable de l’Allemagne) il s’agit d’un phénomène frictionnel (lié à un problème temporaire d’appa- riement) et non caractéristique d’un point haut du cycle. En effet, les capacités excédentaires sur le marché du travail restent im- portantes et l’offre de travail restera soutenue notamment grâce à la remontée de la population active déjà observée à ce jour (le taux d’activité augmente quand le chômage diminue). N°18/149 – 10 juillet 2018 6
Monde – Scénario macro-économique 2018-2019 La date de péremption n’approche pas dangereusement Le desserrement de ces contraintes est donc possible et le point où la concurrence accrue sur des ressources raréfiées en élève les prix est encore loin. Les ressources physiques et financières sont loin d’être rares et de générer des phénomènes d’éviction ou une nette déformation du partage de la valeur qui marquent la fin du processus d’accumulation. Facteurs contraignant la production manufacturière : main d'oeuvre Au-delà du trou d’air du premier trimestre et alors qu’il ne bute pas 30 encore sur des contraintes d’offre, le cycle de la zone euro a donc % 25 entreprises encore quelques beaux jours devant lui. Il peut s’appuyer sur une demande intérieure solide. La consommation privée profitera encore de 20 créations d’emplois, d’une reprise des salaires modeste mais 15 inévitable, de conditions de financement favorables et d’une inflation 10 modérée. La remontée des prix du pétrole jouera négativement sur le pouvoir d’achat jusqu’à la fin de l’année. Les pays de la périphérie ont 5 moins de marges de manœuvre pour amortir cette baisse du pouvoir 0 d’achat par une réduction du taux d’épargne. Mais ils sont aussi ceux -5 dans lesquels une énergie chère s’ajoute à une inflation sous-jacente 00 02 04 06 08 10 12 14 16 18 encore très modérée. Le cycle d’investissement restera soutenu par Zone euro Allemagne France une profitabilité en voie d’amélioration, des conditions financières Sources : Commission européenne, Crédit Agricole S.A. encore très accommodantes, une moindre prudence bilancielle, une demande soutenue et par un taux d’utilisation des équipements en hausse. Les menaces qui planent sur la zone euro trouvent donc leur origine à l’extérieur. La croissance s’appuie peu sur la contribution des échanges extérieurs, mais un choc important sur la croissance américaine ou sur le commerce mondial pourrait amputer la contribution positive de la demande intérieure. Ces chocs pourraient avoir des conséquences réelles transitant par le canal des échanges extérieurs. Cependant, aujourd’hui, ce sont les dommages sur la confiance pouvant altérer les décisions d’investissement qu’il y a surtout lieu de redouter. Focus – Réforme de la zone euro : la grande frustration La plupart des observateurs ne croyaient plus que soient encore possibles des avancées dans la réforme de la gouvernance européenne. Ils pensaient que, finalement, Emmanuel Macron avait capitulé devant ce qu’il avait appelé la « génération de somnambules ». Et pourtant, le dernier sommet franco-allemand nous a renvoyé une volonté bien plus concrète et ambitieuse des deux pays, notamment en matière d’Union économique et monétaire. Car les deux pays se sont accordés sur la proposition d’un budget de la zone euro, opérationnel dès 2021, et visant à promouvoir la compétitivité, la convergence et la stabilisation macro-économique. Ce budget financerait l’investissement en innovation et capital humain. Il soutiendrait aussi les réformes structurelles, selon la proposition récente de la Commission européenne. Enfin, la fonction de stabilisation macro-économique pour les pays touchés par un choc pourrait se traduire soit par une suspension temporaire de la contribution au budget de la zone euro, soit par un fonds européen de réassurance chômage. Le budget serait financé par une taxe sur les transactions financières sur le modèle français, par la taxation de l’économie numérique et par une part des recettes de l’assiette commune consolidée pour l'impôt des sociétés, concernant les grands groupes exerçant des activités transfrontalières. S’agissant du Mécanisme européen de stabilité, la France obtient en principe l’acceptation de l’Allemagne à son inscription dans le droit de l’UE et un filet de sécurité commun pour le Fonds de résolution unique. Elle doit, en revanche, concéder un rôle accru du MES dans la conception et le suivi des programmes dans le cadre d’un compromis avec la Commission européenne, qui jusqu’ici en avait la prérogative. Elle accepte aussi une conditionnalité (ex-ante) plus forte pour la ligne de crédit de précaution. Mais France et Allemagne ne font pas l’Europe à elles toutes seules. Face à l’opposition des pays du nord, emmenés par les Pays-Bas, la discussion du budget commun de la zone euro n’était pas à l’ordre du jour du sommet de la zone euro du 29 juin, mais renvoyée au sommet de décembre. Deux priorités y ont cependant été discutées : l’achèvement de l’Union bancaire et le nouveau rôle du MES. N°18/149 – 10 juillet 2018 7
Monde – Scénario macro-économique 2018-2019 La date de péremption n’approche pas dangereusement Un consensus s’est formé sur l’utilisation du MES comme filet de sécurité pour le Fonds de résolution unique (FRU) à mettre en place avant 2024 sous condition d’une réduction avérée des risques dans les bilans bancaires, qui sera évaluée à partir de 2020 sur la base d’indicateurs sur lesquels un accord a été trouvé. La taille du back- stop serait alignée à la cible du FRU, soit 60 milliards d’euros. Il s’agit là du seul point sur lequel un accord précis a été trouvé, y compris en terme d’Union bancaire. Sur l’EDIS, l’assurance commune sur les dépôts bancaires, les délais seront très longs, puisqu’il s’agit tout simplement de commencer à travailler sur une feuille de route pour les négociations. Concernant l’assistance financière aux pays en crise octroyée par le MES, le veto italien à la plupart des propositions contenues dans l’accord de Meseberg a bloqué toute décision et renvoyé les discussions à décembre. Si un accord large avait été trouvé sur l’introduction de critères d’éligibilité ex-ante (respect des traités européens et situation macro-économique et financière solide) pour l’accès à l’assistance financière et si la majorité des États membres s’est dite favorable à l’introduction d’une ligne de crédit de précaution non conditionnée à la signature d’un programme de réformes (memorandum of understanding), les autres aspects étaient plus controversés. Certains pays ont appuyé un rôle accru du MES dans la conception et la surveillance des programmes de réformes qui conditionnent l’assistance financière. D’autres sont aussi allés plus loin, souhaitant attribuer au MES le rôle d’évaluation de la situation économique et financière d’un pays (avec une analyse sur la soutenabilité de la dette publique), tâche aujourd’hui attribuée à la Commission européenne. Mais d’autres pays ont souligné leur inquiétude face à la proposition d’introduire des clauses d’action collective avec clauses d’agrégation simple, permettant l’agrégation de créances d’émissions différentes, pour faciliter la restructuration de la totalité de la dette publique d’un pays. La même appréhension a été exprimée à l’égard de la proposition d’attribution au MES du rôle de facilitateur du dialogue entre ses membres et les investisseurs privés. Il a été jugé opportun d’éviter d’introduire, dans la déclaration officielle du sommet de la zone euro, toute référence à un quelconque projet d’encadrement et simplification de la restructuration des dettes souveraines. Le potentiel de dislocation de tels projets serait important dans un contexte où le haut niveau d’endettement hérité de la crise est encore en phase de résorption. De tels projets augmenteraient l’anticipation d’une matérialisation d’un scénario de restructuration (frontloading) reproduisant ainsi le mauvais équilibre dont la zone euro s’est difficilement extraite depuis 2010. C’était bien l’objectif des différentes institutions construites depuis : éviter une nouvelle accumulation des risques, mais aussi réduire le rôle des prophéties auto-réalisatrices, qui alimentent le cercle vicieux conduisant à des crises de liquidité et de solvabilité. Sur ce point, le changement de la position française a été remarquable pour aboutir à la feuille de route franco- allemande de Meseberg. En février 2017, la direction générale du Trésor affirmait encore que « en raison de l’incapacité des marchés à évaluer correctement les risques souverains, renforcer le rôle de la discipline de marché vis-à-vis des dettes publiques nationales conduirait probablement à une forte instabilité financière en zone euro en faisant peser sur les pays un risque permanent de défaut, voire de sortie de la zone euro. En particulier, les propositions visant à la restructuration automatique des dettes publiques dépassant un certain niveau créeraient un terrain particulièrement propice aux crises de confiance, empêchant les États membres concernés de mettre en œuvre des politiques suffisamment contracycliques et obérant la transmission de la politique monétaire ». Les concessions consenties par la France paraissent excessives à l’égard des avancées limitées en termes de mutualisation des risques. C’est ainsi que d’autres pays ont dû les évaluer, puisque le sommet de la zone euro n’aboutit pas à des avancées sur le nouveau rôle du MES et en remet la discussion à décembre. Ainsi, des deux logiques de partage et de réduction des risques, c’est la deuxième qui a clairement prévalu. Tout engagement à partager plus de ressources (back-stop pour le FRU, ligne de crédit de précaution sans programme ou budget commun) dans un avenir non immédiat est lié à une conditionnalité plus stricte, à la promotion des forces de marché pour imposer la discipline sous la menace d’une restructuration des dettes souveraines. Si l’objectif de la création d’un budget commun était de mettre définitivement fin au risque de redénomination et d’évacuer les doutes des investisseurs sur la monnaie unique, les concessions demandées par les pays du nord de la zone risquent de réduire à néant le rôle stabilisateur de cet instrument. N°18/149 – 10 juillet 2018 8
Monde – Scénario macro-économique 2018-2019 La date de péremption n’approche pas dangereusement Royaume-Uni : ralentissement temporaire, mais risques croissants à moyen terme La croissance du PIB a probablement accéléré au deuxième trimestre grâce à une forte progression de la consommation des ménages. Après une contre-performance au premier trimestre, liée aux perturbations provoquées par la neige, les indicateurs avancés disponibles sur le deuxième trimestre ont été mitigés. Les données R-U : confiance des ménages d'activité dans le secteur manufacturier et la construction font état d'une et ventes au détail forte contraction sur la période. La croissance des exportations a ralenti 10 8 de manière significative. En revanche, les indicateurs liés à la solde d'opinions 0 6 consommation se sont nettement redressés. Les ventes au détail, probablement soutenues par les célébrations du mariage royal et des -10 4 températures supérieures à la moyenne, ont fortement progressé en volume en avril et en mai. Les consommateurs, devenus plus confiants, -20 2 ont également augmenté leurs recours au crédit au début du deuxième -30 0 trimestre. Les prêts à la consommation ont enregistré un important rebond en avril, après un mois de mars affecté par les conditions -40 -2 mm3m météorologiques et l’arrivée à échéance de nombreux contrats PCP2 de a/a, % -50 -4 financement de véhicules. Une croissance de 0,4% se profile au 08 09 10 11 12 13 14 15 16 17 18 deuxième trimestre, grâce à un rebond du secteur des services. Les Sources : Gfk, ONS, Indice de confiance Gfk, CVS risques autour de ce scénario de reprise soutenue sont toutefois Crédit Agricole SA ventes au détail, éch.dr. baissiers. Les perspectives d’activité à moyen terme restent assombries par les incertitudes liées au Brexit, sur fond de montée des risques extérieurs. La partie la plus difficile des négociations est sur le point de commencer. À l’automne, le Parlement britannique devra voter une motion indiquant s’il approuve ou s’il rejette l’accord de retrait et le cadre des relations futures avec l’UE. La probabilité d’un scénario dans lequel aucun accord ne serait conclu a diminué. Elle n’a cependant pas totalement disparu, après la véritable partie de ping-pong à laquelle se R-U : exportations de biens sont livrés les parlementaires à propos du meaningful vote sur l’accord 50 mm3, a/a, % de retrait. Le meaningful vote donnerait à la Chambre des communes la 40 possibilité d’influencer les décisions du gouvernement en cas d’absence 30 d’accord et de renvoyer le gouvernement à Bruxelles pour renégocier. 20 Dès lors, le risque d’un scénario catastrophe n’a pas entièrement disparu, compte tenu du calendrier extrêmement serré et de l’incertitude 10 sur la volonté de l’UE de rallonger le délai prévu dans l’article 50. 0 Un scénario dans lequel le Royaume-Uni reste dans l’union -10 douanière avec l’UE semble encore probable dans la mesure où, -20 d’une part, les avantages économiques l’emportent sur les inconvénients 10 11 12 13 14 15 16 17 18 et, d’autre part, une majorité de parlementaires britanniques y est Amérique du Nord UE 27 Asie, Pacifique Exportations totales favorable. Ce scénario pourrait se matérialiser dès le mois de juillet Sources : ONS, Crédit Agricole S.A. quand le texte sur le commerce international (Trade and Customs Bills) retournera au Parlement. Malgré d’importants obstacles politiques, la probabilité d’un scénario où le Royaume-Uni resterait dans le marché unique à long terme a augmenté. Il ne semble cependant pas qu’une majorité parlementaire se dégage en faveur d’une adhésion pure et simple à l’Espace économique européen à ce stade, notamment parce que cela n’est pas la position officielle du parti travailliste. Les incertitudes autour du Brexit vont probablement continuer à peser sur l’investis- sement des entreprises. De plus, les inquiétudes sur l’intensification de la guerre commerciale constituent un frein supplémentaire pour les entreprises exportatrices, alors que la demande extérieure est déjà en train de s’affaiblir. Handicapée par la piètre performance du premier 2 Ou Personal Contract Purchase : formule de financement comparable à la location- vente. N°18/149 – 10 juillet 2018 9
Monde – Scénario macro-économique 2018-2019 La date de péremption n’approche pas dangereusement trimestre, la croissance n’atteindrait que 1,2% en 2018, pour légèrement accélérer (1,4%) en 2019. Japon : PIB réel & composantes de la demande Japon : poursuite de la reprise lente et risques sur les 140 exportations T4 12=100 130 Les derniers chiffres du PIB signalent la première contraction en Abenomics neuf trimestres (recul du PIB réel de 0,6% en rythme annualisé au 120 premier trimestre). Toutefois, cette contraction est transitoire : la reprise de l’économie japonaise va se poursuivre, quoiqu’à un 110 rythme lent. 100 Paradoxalement, c’est la lenteur de cette reprise qui lui permet de 90 durer, aucun des trois types d’excès (de stocks, de main d’œuvre 12 13 PIB réel 14 15 16 Exportations 17 18 ou de capacité de production) n’étant apparu. L’absence de ces Investissement privé Investissement public excès « empêche » l’économie de tomber dans une récession à Conso. privée Immo. résidentiel privé caractère endogène. La reprise actuelle peut ainsi se prolonger au Sources : Cabinet Office, Crédit Agricole CIB moins jusque vers le troisième trimestre 2019, au moment du relèvement du taux de TVA de 8% (son niveau actuel) à 10%. Ceci rend alors probable une contraction de l’économie pendant plusieurs trimestres à partir du quatrième trimestre 2019. Dans un tel scénario, la reprise actuelle dépassera la période de reprise la plus longue de l’après-guerre (soixante-treize mois) en janvier 2019. Signe de ralentissement des Les Abenomics ‒ un ensemble de mesures économiques combinant volumes du commerce mondial politique monétaire, politique budgétaire et stratégie de croissance ‒ 8 sont entrés dans leur sixième année. Or, ce sont les exportations qui a/a, % ont progressé le plus rapidement au cours de cette période. Le 6 principal risque pesant sur notre scénario de poursuite de la reprise est bien celui d’un nouveau ralentissement du commerce 4 mondial. 2 D’après le Netherlands Bureau for Economic Policy Analysis, en mars, 0 le commerce mondial n’a progressé en volume que de 1,1% en glissement annuel. Il s’agit du taux le plus bas depuis novembre 2016. -2 Les exportations japonaises étant désormais plus axées sur les 12 13 14 15 16 17 18 biens d’équipement et moins sur les biens de consommation, le Monde Moy. mobile s/ 6 mois PIB mondial est un déterminant de la tendance des exportations Sources : CPB, Crédit Agricole CIB mondiales plus important que la valeur du yen. Les signes (même parcellaires) d’infléchissement (même temporaire) du commerce mondial suggèrent un risque de ralentissement des exportations japonaises. N°18/149 – 10 juillet 2018 10
Monde – Scénario macro-économique 2018-2019 La date de péremption n’approche pas dangereusement Pays émergents – Léger recul de la croissance, intensification des risques La croissance émergente est en légère perte de vitesse, sous l'effet de la modération de la croissance des exportations et de la montée des incertitudes mondiales (craintes liées au protectionnisme, pressions sur les cours de change et sur les taux d'intérêt des pays endettés). La sphère émergente, les BRIC en particulier, devrait cependant continuer d’afficher des résultats relativement satisfaisants. Croissance émergente : légère perte de vitesse Au cours du deuxième trimestre 2018, l’appréciation du dollar, la montée des taux américains et l’intensification des craintes liées au protectionnisme ont renforcé les pressions sur la sphère Pays émergents : émergente. Les pressions ont cependant été presque circonscrites aux indice PMI moyen pondéré marchés. Au sein de la mosaïque émergente, la plupart des devises 60 Indice PMI (manufacturier) ont reculé, les taux d’intérêt ont connu des pressions haussières et les 55 spreads de crédit se sont écartés. À l’inverse, la croissance a généralement fait preuve d’une bonne résilience dans la plupart 50 des pays émergents, ce qui a probablement joué un rôle d’amortisseur face aux pressions issues des marchés. 45 Cela peut-il et va-t-il durer ? La croissance des pays émergents reste 40 correcte, en moyenne, mais des signes de ralentissement sont 35 apparus. Au cours des dix-huit derniers mois, le principal facteur d’amélioration de la croissance émergente a été l’accélération des 30 exportations. En effet, après quatre années assez décevantes, les 07 09 11 13 15 17 exportations émergentes ont commencé à accélérer à la toute fin de Pays émergents Pays développés l’année 2016. En 2017 et jusqu’à récemment, elles ont progressé à leur Sources : Bloomberg, Crédit Agricole CIB rythme le plus élevé (en dollar) depuis 2011. Ceci s’explique en partie par le prix des matières premières, mais pas seulement : les exportations chinoises et celles des pays non exportateurs de matières premières ont également accéléré. Au deuxième trimestre 2018, la croissance des exportations émergentes est restée satisfaisante, mais elle a légèrement ralenti, une Pays émergents : exportations évolution cohérente avec la baisse de la moyenne des indices PMI 0,4 a/a, %, manufacturiers émergents au cours des derniers mois. Cela suggère 0,3 mm3m que la dynamique de la sphère émergente connaît un repli graduel reflétant probablement une montée des incertitudes liée à la 0,2 volatilité des marchés, mais aussi (sur un plan plus macro- 0,1 économique) à une détérioration de la coordination au niveau mondial, en partie en raison de la politique protectionniste des 0,0 États-Unis. Dans un tel contexte, l’investissement des entreprises -0,1 dans les pays émergents a peu de chances d’accélérer dans les trimestres à venir, ce qui pourrait également freiner la croissance -0,2 émergente au second semestre 2018 et en 2019. -0,3 Le récent affaiblissement de la dynamique émergente est également lié -0,4 à la décélération synchrone qui a touché les économies du G3 au 06 08 10 12 14 16 18 Source : Crédit Agricole CIB premier trimestre. Ce ralentissement s’explique en partie par des facteurs temporaires parmi lesquels : la correction de la forte hausse de la consommation privée aux États-Unis au cours du trimestre précédent, les grèves et une moindre contribution extérieure de l’Europe, ainsi que des ajustements de stocks au Japon. Pour les pays dits industrialisés, notre scénario central table sur une croissance à peu près identique à celle de l’année dernière cette année et l’année prochaine. Ceci suggère que les pays émergents devraient bénéficier d’une demande externe assez robuste dans les trimestres à venir. N°18/149 – 10 juillet 2018 11
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