MONDE - Scénario macro-économique 2019-2020 - Prévenir plutôt que guérir
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rimestriel – N°19/066 – 12 avril 2019 MONDE – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir Le cycle de croissance mondiale, forte et synchrone, a pris fin. En espérant que les négociations sino- américaines débouchent sur un accord et que la croissance chinoise accélère, sans se bercer d’illusions sur sa capacité à tracter le reste du monde, un essoufflement (mais pas un effondrement) se dessine. Il faudra essentiellement compter sur la vigueur des demandes domestiques pour atterrir en douceur autour de taux de croissance proches de leur potentiel. Et, dans le doute, préférant prévenir plutôt que guérir, les Banques centrales ont opté pour des politiques monétaires plus accommodantes qu’anticipé. Zoom vidéo Prévenir plutôt que guérir Sommaire Sous réserve d’un accord sino- Pays développés – Compter sur ses propres forces ?...................3 américain et de l’accélération de Pays émergents – Le plus dur bientôt passé ?..........................9 la croissance chinoise, la fin du cycle mondial s’annonce encore Pétrole – Stabilité dans un chaos grandissant......................... 13 « ordonnée ». Les Banques cen- Politique monétaire – Prévenir plutôt que guérir ...................... 14 trales, se montrant plus accom- Taux d’intérêt – Entre politique monétaire et politique (tout modantes qu’anticipé, ont cepen- court) ...................................................................................... 17 dant préféré prévenir plutôt que Taux de change – Tout est là et pourtant… ............................ 19 guérir. Prévisions économiques et financières ................................... 21 Fin d’un cycle de forte croissance dont Les économies sont, évidemment, très inégalement l’inflation aura été absente. Fin de la vigueur affectées selon leur exposition au commerce mon- synchrone des grandes économies : si, globa- dial et la place qu’y occupe encore le secteur lement, les fondamentaux d’une croissance industriel1 : aux États-Unis, fermés et peu indus- essentiellement domestique résistent, le ralen- triels, s’oppose l’Allemagne, largement ouverte et tissement du secteur manufacturier et l’érosion toujours industrielle. de la contribution des échanges extérieurs nets pèsent déjà sur la croissance. 1 Italie 50%, France 45%) ; Industrie (y compris énergie) en Échanges extérieurs (exportations + importations de biens) en pourcentage du PIB (source : Banque mondiale) : États-Unis 20%, pourcentage du PIB (source : OCDE) : Allemagne 26%, Japon Japon 28%, Chine 34%, zone euro 70% (dont Allemagne 71%, 24%, zone euro 20%, Italie 19%, États-Unis 16%, France 14,5%. Études Économiques Groupe http://etudes-economiques.credit-agricole.com
Monde – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir Les États-Unis, la zone euro (tout comme le Japon) Il ne faut cependant pas compter abusivement connaissent donc des fortunes diverses et, même sur la capacité de la Chine à entraîner dans son en supposant un règlement du conflit commercial sillage le reste du monde. Une accélération de la sino-américain et une accélération de la croissance croissance chinoise se dessine et suggère qu’elle chinoise (sans se bercer d’illusions sur sa capacité pourrait n’être en 2019 que très légèrement infé- à tracter le reste du monde), n’emprunteront pas le rieure à 6,5%. Mais, si le rythme de croissance même sentier de croissance. importe, sa forme importe tout autant. Or, le plan de relance dessiné par les autorités chinoises n’est Aux États-Unis, la solidité du marché du travail pas aussi « rustique » que les précédents (investis- (taux de chômage historiquement faible alors même sements publics, infrastructures, aides aux entre- que le taux de participation ne se replie pas) finit par prises d’État). Outre l’assouplissement monétaire, il conduire à une hausse du salaire moyen qui, en vise en effet notamment à stimuler la demande l’absence d’accélération de l’inflation, viendra mor- privée (ménages et entreprises de petite taille) au dre sur les marges des entreprises et sur l’investis- travers de baisses d’impôts et de TVA. Il peut donc sement productif. La contribution de la demande se révéler efficace, mais à « infusion » plus lente et extérieure nette ne devrait être que très légè- éventuellement moins gourmand en importations à rement négative, permettant ainsi à la crois- brève échéance. sance de se replier « en douceur » vers son niveau potentiel (2%). À défaut de compter sur une reprise du commerce mondial, on peut en revanche être assuré que les En zone euro, le repli marqué de la demande conditions monétaires resteront accommo- extérieure est responsable de la forte décélération dantes : il s’agit d’éviter l’erreur monétaire de fin de de la croissance. Ce freinage a fait craindre que la cycle qui en précipite justement la fin. Arguant du zone euro, entrée tardivement dans la phase de ralentissement mondial, la Federal Reserve « a forte expansion, n’en sorte prématurément et ouvert le bal » et infléchit son discours avec une violemment. Mais, les salaires prenant le relais de rapidité étonnante redoutant, implicitement, que ne l’emploi, la demande émanant des ménages se reproduisent les tensions financières violentes (consommation et investissement logement) résis- de fin 2018. Elle se déclare désormais encline à la te. Un taux de marge des entreprises toujours élevé patience et ne sera pas allée au terme de la et un accès encore facile aux financements dans normalisation anticipée. Quant à la BCE, elle met un des conditions accommodantes sont propices à terme prématuré à la « normalisation » qu’elle avait l’investissement. En revanche, les perspectives de seulement timidement entreprise. redressement de la demande extérieure sont obscures et c’est l’incitation à investir qui cède. En Ralentissement économique et inflation quasi l’absence de reprise des exportations, la crois- inexistante, Banques centrales déterminées à pilo- sance pourrait ne pas excéder 1,2% en 2019. ter l’atterrissage pour en promouvoir la douceur, à ne pas heurter les marchés financiers en se mon- Sous les auspices de Banques centrales (pres- trant bienveillantes, climat politique et économique qu’étonnamment « bienveillantes » en particulier en international encore incertain et propice à des bouf- ce qui concerne la Federal Reserve), la résistance fées d’aversion au risque : les taux longs sans des demandes domestiques permet donc encore de risque resteront prisés et leur remontée très brosser un scénario de repli « ordonné » des ryth- limitée tout comme le sera l’appréciation de mes de croissance vers le taux potentiel sous l’euro contre dollar. réserve, toutefois, qu’une double condition soit respectée : les négociations sino-américaines débouchent sur un accord et la croissance chinoise se redresse. N°19/066 – 12 avril 2019 2
Monde – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir Pays développés – Compter sur ses propres forces ? Fin d’un cycle de forte croissance dont l’inflation aura été absente ; fin de la vigueur synchrone des grandes économies. Le constat est général : les fondamentaux d’une croissance essentiellement domestique résistent. En revanche, l’érosion de la contribution des échanges extérieurs contraint la croissance au ralentissement vers son rythme potentiel. États-Unis : ralentissement de la croissance vers son niveau potentiel en 2019 Après avoir été fin 2018 à 3% en glissement annuel2, la croissance devrait ralentir vers son rythme potentiel (2%) fin 2019 puis se USA : un marché du travail replier vers 1,4% fin 2020. L’inflation sous-jacente devrait approcher porteur soutient la consommation 2% ; elle reste assortie d’un risque légèrement baissier, les 12 67 cvs, % cvs, % anticipations d’inflation étant bien ancrées. 10 66 Les mesures budgétaires, incluant des baisses d’impôts et une hausse des dépenses, ont contribué à doper la croissance en 2018. Or, les 8 65 effets de ce stimulus budgétaire (financé par le déficit) vont s’estomper cette année. En 2018, la croissance a également bénéficié de la 6 64 vigueur synchrone de l’économie mondiale, vigueur qui s’est depuis lors infléchie avec le ralentissement en Chine, en Europe et dans de 4 63 nombreux pays émergents. 2 62 04 06 08 10 12 14 16 18 Les données économiques du début d'année ont été affaiblies en raison des effets transitoires liés à la fermeture du gouvernement Taux de chômage Source : BLS fédéral. Les risques sur la croissance américaine sont actuellement Taux de participation (dr.) plutôt baissiers. La croissance, soutenue par des fondamentaux macro- économiques solides, devrait toutefois être proche de 2,4% en moyenne annuelle. La solidité du marché du travail devrait continuer à soutenir la consommation. Le nombre d'offres d'emplois dépasse actuellement le USA : croissance modérée des nombre de chômeurs. Les créations nettes d’emplois ont atteint un salaires, pas de risque d’inflation 4,0 rythme mensuel de près de 180 000 au cours des trois derniers mois ; a/a, % un ralentissement est toutefois attendu en 2019. Mais le taux de 3,5 chômage (3,8% en mars) est inférieur au taux prévalant en période de 3,0 plein emploi estimé par la Fed (4,3%) ; alors même que les tensions sur le marché du travail ont conduit à une hausse du taux de 2,5 participation, de nombreux travailleurs se présentant de nouveau sur le 2,0 marché. Le marché de l’emploi devrait donc rester tendu et la croissance des salaires accélérer cette année, contribuant ainsi à 1,5 soutenir les dépenses de consommation. 1,0 12 13 14 15 16 17 18 19 Différentes mesures indiquent en effet que la hausse du salaire horaire Salaire horaire moy. dans le moyen tend à accélérer. L’économie devrait certes continuer d’évoluer secteur privé Sources : BLS, dans la partie relativement plate de la courbe de Phillips 3 : une évolution Indice reflétant l’évolution des Atlanta Fed, Haver salaires (tous secteurs, mm3m) vers des rémunérations globales plus « généreuses » peut cependant créer des pressions haussières sur le coût du travail. Or, la capacité des entreprises à fixer les prix reste limitée en raison de la globalisation et de changements structurels imposés par la recherche de compétitivité. En conséquence, les marges bénéficiaires des sociétés devraient se contracter. Cela est susceptible de nuire aux dépenses d'investissement jusqu'en 2020 et de peser ainsi sur la 2 Il s’agit de glissements annuels au dernier trimestre de chacune des années. En variation trimestrielle annualisée, la croissance a culminé à près de 4,2% au 2e trimestre 2018. En moyenne annuelle, la croissance a atteint 2,9% en 2018 et atteindrait 2,4% en 2019 puis 1,7% en 2020. 3 Relation inverse entre le taux de chômage et la progression des salaires. N°19/066 – 12 avril 2019 3
Monde – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir croissance, croissance s’affaissant progressivement pour se situer sous son potentiel. À court terme, l'optimisme des entreprises reste relativement élevé. Elles prévoient un rythme satisfaisant (quoiqu’un peu plus lent) de croissance de la demande intérieure cette année, ainsi qu’une baisse des contraintes réglementaires et le maintien des incitations fiscales à l'investissement. Mais l'impact des droits de douane et des négociations commerciales sur les chaînes d'approvisionnement USA : maintien de l'investissement, suscite des inquiétudes. inquiétudes s/ la politique commerciale 2,0 Les négociations entre la Chine et les États-Unis semblent progresser, 108 1,5 ce qui réduit le risque d’escalade dans la guerre commerciale. Les exportations de produits agricoles sont à l’origine de la bonne 103 1,0 performance commerciale des États-Unis au premier semestre 2018. 98 0,5 La détérioration du commerce extérieur au second semestre s’explique 0,0 par la progression des importations et par une baisse des exportations 93 liée aux droits de douane. À moins d'une guerre commerciale étendue, -0,5 la contribution des exportations nettes à la croissance réelle en 2019 88 -1,0 sera seulement légèrement négative. 13 14 15 16 17 18 Contrib. investis. privé non Le récent ralentissement synchronisé de l’économie mondiale a résidentiel à la croissance (dr.) conduit les dirigeants mondiaux (à commencer par les Banques Sources : NFIB, Indice NFIB de confiance des centrales) à prendre des mesures de soutien à la croissance. BEA, Haver PME L'analyse de la Federal Reserve sur l'évolution de la situation intérieure et internationale l'a conduite à un changement important de sa politique monétaire : celle-ci est passée d’un « resserrement graduel » à la « patience ». En effet, les membres de la Fed estiment désormais que les données économiques ne suggèrent plus ni hausse ni baisse des USA : résorption des tensions taux directeurs cette année. -0,3 sur les marchés financiers -0,3 La Fed n'est pas la seule à adopter une approche plus prudente : -0,5 -0,4 d'autres Banques centrales, au premier rang desquelles figure la BCE, -0,7 ont décidé de repousser toute hausse des taux directeurs. Quant aux -0,9 -0,5 autorités chinoises, elles ont réagi au ralentissement en adoptant des mesures de relance budgétaires et monétaires qui devraient permettre -1,1 -0,6 une baisse contrôlée et plus équilibrée de la croissance tant cette -1,3 année que l'année prochaine. -0,7 -1,5 Bien qu'elles se soient généralement améliorées depuis le -1,7 -0,8 resserrement observé en décembre, les conditions sur les juil.-17 nov.-17 mars-18 juil.-18 nov.-18 mars-19 Indice de tension fin. Fed de St L ouis (>0 : marchés financiers sont moins favorables qu'à l'automne 2018. Sources : St. Louis tensions > moy.) L'inversion de certains segments de la courbe des taux américaine est Fed, Chicago Fed, Hav er Indice ajusté des co nditions fin. n atio nales historiquement considérée comme un indicateur avancé de ralentis- (dr., + : tension s > moy.) sement économique. Compte tenu des mesures (liées au QE en particulier) qui ont délibérément eu pour effet d’abaisser les taux longs, le risque de récession traditionnellement annoncé par l’inversion de la courbe n’est peut-être pas aussi significatif aujourd’hui. L'évolution de la courbe des taux devra néanmoins être suivie de très près. Zone euro : l’autarcie ne suffit pas La zone euro est rentrée tardivement dans ce cycle de croissance et les signaux récents pourraient laisser penser qu’elle est en train d’en sortir plus précocement aussi. Le rythme de croissance s’est infléchi très rapidement : le taux de croissance du PIB a été divisé par deux en un an (en glissement annuel, il est passé de 2,7% fin 2017 à 1,1% fin 2018). Peut-on d’ores et déjà conclure que le dernier cycle de croissance mondiale a été gâché ? Et, si tel est le cas, qui doit-on blâmer ? On savait qu’en présence d’un décalage cyclique, des asymétries entre pays leader (les États-Unis) et pays suiveur (zone N°19/066 – 12 avril 2019 4
Monde – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir euro) font que le second importe la politique monétaire du premier engendrant une fin de cycle prématurée due à des conditions monétaires trop restrictives et injustifiées pour sa propre position cyclique. Mais on sait aussi désormais que la BCE a réussi à dissocier les évolutions des taux dans la zone euro de celles des États-Unis : le durcissement des conditions financières qui aurait pu être importé des États-Unis n’a pas imprimé sa marque dans la zone. Cette contagion a cependant joué ailleurs, notamment dans certains pays émergents et les tensions subies n’ont pas été sans consé- quences pour les exportations et la croissance de la zone euro. UEM : perte de la contribution Au cours de l’année 2018, la demande intérieure n’a montré que des des exportations signes limités d’affaiblissement, passant de 1,7% sur un an fin 2017 à 3,0 a/a, % 1,4% en fin 2018. C’est donc surtout l’érosion marquée de la 2,0 contribution des exportations nettes qui a causé la décélération (expliquant 0,8 point de croissance en 2017 et seulement 0,2 en 2018). 1,0 Le rythme de croissance des exportations a été divisé par quatre depuis la fin 2017 du fait de la baisse progressive des exportations hors zone 0,0 euro. Ce repli est principalement imputable à la baisse des exportations vers le Royaume-Uni, la Russie et la Turquie, ainsi qu’au ralentisse- ment des importations chinoises. On peut donc espérer que le -1,0 2016 2017 2018 2019 2020 redressement attendu de ces économies (à l’exception du Royaume- Consommation Investissement Uni) et que les mesures de relance des autorités chinoises, inscrites Exportations nettes Variations des stocks dans notre scénario, conduiront à stimuler les exportations de la zone à destination de ces partenaires importants. PIB Sources : Eurostat, CA S.A. Cependant, les coupables ne sont pas encore tous identifiés, car on a également assisté à un effondrement des exportations à l’intérieur de la zone euro au quatrième trimestre 2018. Lors de notre dernier exercice de prévision, le rôle important joué par des facteurs temporaires a été largement évoqué : les nouvelles normes environnementales sur les véhicules et le bas niveau du Rhin ont impacté très négativement la production automobile, chimique et pharmaceutique allemande4. La production industrielle dans la zone UEM : le relais des salaires euro a subi une importante dislocation. Les dernières données sur l'emploi disponibles sur la production de janvier montrent un rebond dans tous 6 a/a, % les pays à l’exception de l’Allemagne : une normalisation est visible 4 dans la chimie et la pharmacie, mais l’activité est encore en baisse dans l’automobile. Des retards dans les tests d’homologation sont signalés 2 et des stocks de produits finis ont été cumulés au cours des derniers mois. Ces facteurs semblent retarder la reprise de l’activité dans le 0 secteur et vont peser sur la performance économique au premier trimestre 2019. -2 Une question mérite alors d’être posée : le bruit apporté par ces -4 perturbations n’a-t-il pas occulté une faiblesse plus profonde et 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 17 18 tendancielle du cycle européen ? Masse salariale Salaire par tête emploi Sources : Eurostat, CA S.A. Des éléments spécifiques pèsent certes sur la dynamique de croissance de certains pays (aux difficultés allemandes s’adjoignent la politique économique du gouvernement italien et la crise des gilets jaunes en France). Cependant, globalement, la demande intérieure est restée vive et a progressé à un rythme toujours soutenu (y compris en Italie) au quatrième trimestre 2018. Le revenu disponible des ménages n’a pas perdu de sa vigueur en 2018 ; en termes réels, il s’est redressé en fin d’année avec le ralentissement des prix à la consommation. La nette accélération des salaires négociés (de 1,7% sur un an au premier trimestre 2018 à 2,2% au quatrième trimestre 4 Les instituts de conjoncture allemands en ont estimé l’impact négatif sur la croissance du PIB d’outre-Rhin à 0,5 et à 0,3 point aux 3e et 4e trimestres, respectivement. N°19/066 – 12 avril 2019 5
Monde – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir 2018) a plus que compensé la perte de vitalité progressive des créations d’emplois (de 1,7% sur un an au quatrième trimestre 2017 à 1,3% au quatrième trimestre 2018). Pourtant, tout au long de l’année, la consommation a continué de croître à un rythme inférieur à celui du pouvoir d’achat. La remontée du taux d’épargne, en cours depuis le printemps 2018, s’est en effet poursuivie et le taux d’épargne a quitté le palier sur lequel il s’était installé depuis la mi-2016. La « collusion » d’un cycle de consommation de biens durables qui arrive à lente UEM : contribution à la croissance des exportations maturation est évidente, ainsi que celle de la hausse des prix de 12 l'immobilier qui rend plus onéreuse chaque acquisition et plus important 10 l'effort préalable d'épargne. Cet effet ne remet cependant pas en cause 8 le dynamisme de l’investissement logement : il retrouve une 6 nouvelle vigueur en fin d’année et stabilise le taux d’investissement des ménages sur l’année à son plus haut niveau depuis 2012 (9%). La 4 richesse immobilière a encore crû au rythme de 5% en fin d’année, 2 compensant ainsi la perte de valorisation des actifs financiers, liée à la 0 baisse des cours des actions intervenue au cours du dernier trimestre. a/a, % -2 La baisse de la richesse nette en pourcentage du PIB peut avoir justifié une remontée du taux d’épargne dans le but de reconstituer les encaisses réelles. Cette baisse n’est pas préoccupante dans un Intra Zone euro Hors Zone euro contexte où, d’une part, notre scénario ne prévoit pas un ajustement Total exportations Sources : Eurostat, CA S.A. massif des cours boursiers et où, d’autre part, le taux d’endettement des ménages de la zone euro baisse et reste globalement faible. La consommation des ménages continuera d’être soutenue par des fondamentaux solides. Le ralentissement naturel des créations d’emplois n’entravera pas la poursuite de la baisse du taux de chômage ; le revenu disponible continuera d’être soutenu par la progression des salaires (même si la forte accélération de ceux-ci observée au milieu de l’année 2018 ne pourra pas être reproduite). Mais, c’est surtout la faiblesse de l’inflation qui contribuera aux gains de pouvoir d’achat. Dans plusieurs pays, une réorientation – non UEM : contribution à la croissance concertée et non coordonnée – de la politique budgétaire dans une a/a, % des exportations hors zone direction plus expansionniste apportera un soutien important au revenu 10 des ménages. Tout ne sera cependant pas consommé : nous 8 prévoyons une nouvelle remontée du taux d’épargne propre à satisfaire 6 une demande d’investissement logement qui, grâce à des conditions 4 monétaires toujours très accommodantes, ne se tarira pas. 2 0 Le maillon faible de la demande intérieure reste l’investissement -2 productif et les interrogations portent sur sa vigueur et sa longévité. Malgré son départ tardif (en 2014), la faiblesse de l’activité place le taux d’investissement à un niveau élevé (le plus haut depuis Chine US UK Turquie 2008). Les perspectives de rentabilité (le taux de marge est en baisse Russie Japon depuis la mi-2017, mais reste encore élevé) ou les conditions de Autres Total hors zone euro financement (toujours accommodantes) ne constituent pas des sources Sources : Eurostat, Crédit Agricole S.A. de préoccupation : celles-ci émanent surtout des interrogations sur la solidité de la demande (notamment étrangère) adressée aux entreprises et sur la réaction de la confiance aux révisions à la baisse des perspectives de production, révisions récentes et répétées. Le ralentissement modéré de l’investissement à l’horizon de la prévision se justifie par le maintien des échanges intra-zone et par une très modeste reprise des exportations hors zone euro. Sans contribution plus substantielle des importations du reste du monde, la zone euro reste encore incapable de produire une dynamique endogène apte à fournir une croissance supérieure au rythme potentiel. Sans l’indis- pensable soutien de la contribution extérieure, notre prévision de croissance plafonne à 1,2% en 2019 et 1,4% en 2020. N°19/066 – 12 avril 2019 6
Monde – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir Royaume-Uni : Brexit décalé une fois de plus ! Le Royaume-Uni et l'UE ont convenu de reporter le Brexit au 31 octobre 2019, avec la possibilité pour le Royaume-Uni de partir plus tôt si l'accord de retrait est ratifié par le Parlement britannique. La date du Brexit a donc été décalée deux fois cette année, ce qui confirme que l’UE et le Royaume-Uni ont tous deux pour objectif d’éviter un « no- deal » (bien qu’un retard du Brexit crée des problèmes pour les élections européennes), scénario auquel nous avons toujours accordé une probabilité relativement faible. Cela dit, une sortie sèche sans accord ne peut toujours pas être totalement exclue, et reste l'option par défaut, en l’absence de ratification par le Parlement britannique. R-U : le climat des affaires s’améliore dans l’industrie, grâce aux créations de stocks L'accord de retrait étant impossible à renégocier avec l'UE, une 70 modification de la déclaration politique sur la relation à long terme Solde en vue par exemple d’une union douanière (ou une version plus soft d'opinions 65 du Brexit) est probablement le seul moyen de sortir de l'impasse parlementaire. Theresa May est actuellement à la recherche d'un 60 consensus avec l’opposition, mais cela n'a pas encore donné de 55 résultat. La demande du parti Travailliste de créer une union douanière entre le Royaume-Uni et l’UE nécessite de renoncer à l’ambition de la 50 souveraineté des Conservateurs en matière de politique commerciale, 45 compromis qui semble très difficile, voire impossible, à accorder par la Première ministre sans risquer de nouvelles démissions au sein de son 40 parti. Le risque d'élections anticipées et/ou de deuxième référendum 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 Sources : Markit, est particulièrement élevé dans le contexte actuel d'impasse politique. Indice PMI des stocks des achats CA S.A. Indice PMI de l’activité globale Il n’est clairement pas certain que de nouvelles élections aideraient à sortir de l'impasse actuelle, dans la mesure où elles pourraient à nouveau conduire à un Parlement sans majorité. Un deuxième référendum est également très problématique, car il ne devrait que confirmer la division de la société britannique sur la question du Brexit. Le climat des affaires a fortement baissé en réaction aux fortes R-U : pouvoir d’achat & incertitudes politiques. Même si une reprise est probable dans les consommation des ménages prochains jours, une sortie sans accord ayant été évitée pour le 8 a/a, % prév. moment, l'incertitude entourant la date exacte et les termes précis du 6 départ du Royaume-Uni de l'UE devrait continuer d'exercer une 4 pression à la baisse sur la confiance et les intentions d'investissement. 2 L’indice PMI composite du Royaume-Uni est tombé à 50 en mars : ce 0 niveau est le plus bas depuis le référendum sur l’adhésion à l’UE et est -2 a priori synonyme de stagnation de l'activité. Cette faiblesse est liée au -4 secteur des services dont l’indice a plongé sous la barre des 50, ce qui -6 suggère une récession. Le climat s'est à l’inverse nettement amélioré 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 dans le secteur manufacturier, grâce à une forte reprise de la demande * Revenu brut des ménages déflaté par le déflateur des intérieure provoquée par une reconstitution des stocks. Nous avons dépenses des ménages Revenu disponible réel brut* abaissé notre prévision de croissance à 1,2% cette année, mais Sources : ONS, CAS.A. Conso. ménages continuons de tabler sur 1,4% l'an prochain, sur la base de notre scénario de Brexit ordonné et sans heurt. La consommation des ménages devrait se montrer « résiliente » (soutenue par le resserrement du marché du travail et l'accélération de la croissance des revenus réels). En revanche, l’investissement des entreprises devrait rester faible à court et moyen termes, en raison des incertitudes liées aux futures relations avec l'UE, incertitudes auxquelles s'ajoutent les inquiétudes sur le ralentissement de la croissance mondiale. Le commerce extérieur devrait continuer à contribuer négativement à la croissance. Le policy mix restera accommodant : la politique budgétaire a été assouplie et le resserrement de la politique monétaire devrait être revu à la baisse. N°19/066 – 12 avril 2019 7
Monde – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir Japon : attention à la faiblesse passagère des exportations Japon : la trajectoire de la L’année 2018 s’est achevée sur une croissance du PIB en volume de croissance reste fragile 1,9% (en variation trimestrielle annualisée). Au quatrième trimestre 4 2018, l’économie s’est donc remise partiellement de la contraction de prévisions 3 2,4% enregistrée au cours du trimestre précédent. Cette reprise n’est 2 toutefois pas le résultat d’une nouvelle dynamique de l’économie : elle n’est en réalité qu’un rebond technique, normal après les catastrophes 1 naturelles qui ont frappé le pays au cours du troisième trimestre. Ce 0 manque de dynamisme se reflète sur les principales composantes de -1 la demande : en variation trimestrielle au quatrième trimestre, la t/t consommation privée et l’investissement ont respectivement progressé -2 annualisé, de 0,4% et de 2,7%, après des reculs respectifs de 0,2% et de 2,6% au % -3 troisième. T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 2017 2018 2019 La dynamique de l’économie restera faible au cours des prochains Sources : Cabinet Office, CA CIB mois : au premier trimestre 2019, le PIB en volume pourrait reculer de 0,4% (en variation trimestrielle annualisée). En 2019, la croissance pourrait reproduire le schéma observé depuis le quatrième trimestre 2017, marqué par une alternance de chiffres positifs et négatifs et, in fine, une trajectoire demeurant fragile. Après avoir atteint 0,8% (en Japon : attention à la faiblesse des exportations réelles moyenne annuelle) en 2018, la croissance est ainsi susceptible de se 120 5 replier vers 0,5%, tant en 2019 qu’en 2020. 2015=100 115 0 Côté demande, parmi les facteurs qui freineront le plus sévèrement 110 -5 l’activité au premier trimestre, figure la faiblesse des exportations 105 -10 réelles. En effet, l’indice de diffusion de l’offre et de la demande 100 -15 étrangères (qui est l’une des composantes de l’enquête Tankan de la 95 -20 Banque du Japon) présente une forte corrélation avec les exportations réelles et suggère clairement un passage à vide à court terme. Bien 90 -25 que nous prévoyions une stabilisation (voire un fort rebond) des 85 -30 fondamentaux macro-économiques mondiaux, principalement grâce au 11 12 13 14 15 16 17 18 19 plan de relance budgétaire chinois, la faiblesse des exportations Exportations réelles japonaises en volume observée au cours des derniers trimestres Indice diffusion offre & demande étrangères (dr.) indique que l’impact des tensions affectant le commerce mondial Sources : BoJ, CA CIB ne doit pas être sous-estimé. La dernière phase de reprise économique, entamée après le point bas de novembre 2012, devait atteindre un record de longévité en janvier Japon : indice composite coïncident 110 2019. Il existe toutefois un risque que cette phase d'expansion soit 2015=100 considérée comme ayant pris fin vers octobre 2018, en raison de la 105 perte de dynamisme de la production industrielle, elle-même provoquée par la faiblesse des exportations. 100 Techniquement, le Cabinet Office utilise l’indice composite des indicateurs coïncidents comme un outil permettant d'évaluer les phases 95 du cycle économique. Or, les principales mesures de cet indice (les moyennes mobiles sur trois et sept mois) sont toutes orientées à la 90 baisse. Si le Cabinet Office estime officiellement que la dernière phase d'expansion économique a pris fin avant janvier 2019, il 85 11 12 13 14 15 16 17 18 19 aura manqué quelques mois à celle-ci pour être la plus longue de l'après-guerre. Bien que cette estimation intervienne a posteriori et Sources : Indice composite indic. coïncidents Cabinet Office, Moy.mobile 3 mois n'ait pas d'impact économique, elle risque tout de même d’avoir des CA CIB Moy.mobile 7 mois conséquences politiques non négligeables dans la mesure où les élections municipales auront lieu en avril et, point plus important, que les élections sénatoriales auront lieu en juillet. N°19/066 – 12 avril 2019 8
Monde – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir Pays émergents – Le plus dur bientôt passé ? Le ralentissement provoqué par les exportations a été plus marqué que prévu au premier trimestre, mais la stabilisation en Chine, une croissance américaine satisfaisante et le maintien de conditions monétaires relativement favorables devraient permettre une stabilisation au second semestre. Des points faibles demeurent, au premier rang desquels la Turquie. Le printemps arrive Trois changements importants sont intervenus dans la sphère émergente depuis la fin de l'année dernière, dont deux ont été favorables. Tout d'abord, la Fed est devenue nettement plus dovish, comme en atteste le dot plot qui montre que les membres de Émergents : prévisions de la Fed n’envisagent plus de hausse des taux cette année. Cela devrait croissance pour 2019 être favorable aux pays émergents qui ont besoin de financements 8 extérieurs. Par ailleurs, le ton des négociations commerciales entre % 7,4 7 6,2 les États-Unis et la Chine s'est adouci et les deux parties semblent 6 à présent déterminées à trouver un compromis. Il nous semble que les dirigeants chinois ont compris que la détermination des États-Unis à 5 redéfinir leurs relations avec la Chine n’est pas un phénomène 4 passager lié à la seule administration Trump, mais qu’elle est durable, 3 2,4 d'où une volonté plus forte de conclure un accord. On peut 2 1,8 raisonnablement s’attendre à ce que des discussions constructives se poursuivent entre les États-Unis et la Chine et qu’un compromis 1 commercial soit trouvé plus tard cette année, dans quelques semaines 0 ou quelques mois. Russie Brésil Chine Inde Source Persp. de l’économie mondiale du FMI PIB, prix constants Enfin, le troisième facteur qui, pour sa part, a été négatif : le passage à vide de l’activité manufacturière et du commerce mondial a été plus prononcé que prévu. Les exportations des économies émer- gentes ont reculé par rapport à l’année précédente. La baisse des exportations au premier trimestre a été accentuée par des facteurs ponctuels (comme les changements réglementaires dans le secteur automobile ou le gonflement par anticipation des importations chinoises Émergents : prévisions fin 2018 au détriment des chiffres du premier trimestre). Le résultat n’en d’inflation pour 2019 reste pas moins une décélération des exportations plus marquée que 6 prévu au cours des derniers mois, ce qui a alimenté les craintes d'un % atterrissage économique plus douloureux que prévu. 5 4 Le pire de la détérioration est cependant probablement passé et le commerce extérieur des économies émergentes devrait se 3 stabiliser à partir du deuxième trimestre ou de la mi-2019. En 5,1 4,9 4,2 Chine, les récentes mesures de relance (parmi lesquelles l'aug- 2 mentation des financements depuis le début de l'année et des mesures 2,4 budgétaires) contribuent progressivement à la stabilisation de l'écono- 1 mie. Du côté de l'économie américaine, un ralentissement est certes en 0 cours, mais notre scénario table sur une poursuite de la croissance à Brésil Russie Inde Chine un niveau proche du potentiel. Au total, cela constitue un contexte Source Persp. de l’économie Inflation (prix moy. à la raisonnablement favorable pour la sphère émergente : la demande en mondiale du FMI conso.) provenance des États-Unis devrait se maintenir à des niveaux satisfaisants alors que la Fed devrait simultanément prendre son temps avant de relever les taux. Les enquêtes PMI de février et mars dans l'industrie manufacturière émergente suggèrent également qu'une stabilisation de la dynamique économique est une hypothèse réaliste. N°19/066 – 12 avril 2019 9
Monde – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir Sur le plan des économies domestiques, les pressions inflation- nistes sont le plus souvent limitées dans les pays émergents, ce qui suggère qu’il n’existe aucune urgence à relever les taux directeurs dans la plupart des cas. C’est plus des taux de change que de l'inflation que pourraient venir des pressions susceptibles de mettre certaines Banques centrales émergentes sur leur garde. À cet égard, la situation reste précaire en Turquie, par exemple. Si le gouvernement Erdogan réagit aux résultats mitigés des dernières élections en soutenant la croissance économique, la progression de la demande intérieure pourrait favoriser un retour des déficits extérieurs, ce qui maintiendrait probablement la livre turque sous pression. Exportations de 21 pays émergents 40% Les élections générales au deuxième trimestre en Inde seront a/a, mm3m également un événement-clé. Les sondages récents suggèrent que la 30% coalition dirigée par le BJP (Bharatiya Janata Party, Parti du peuple 20% indien, droite nationaliste) pourrait rester au pouvoir, mais l'élection pourrait également conduire à un parlement sans majorité, ce qui 10% rendrait la mise en œuvre d’une politique et la conduite de réformes plus difficiles. 0% Nous ne prévoyons qu’une baisse marginale de la croissance des -10% pays émergents, de 4,4% en 2018 à 4,2% en 2019. L’Asie restera la -20% région la plus performante avec une croissance de 5,9% selon nos prévisions (6,4% pour la Chine). La croissance serait inférieure à ce -30% niveau de plus de moitié en Amérique latine, en Europe émergente et 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 au Moyen-Orient. Source : Bloomberg Chine : dans l’attente d’un rebond de l’activité en milieu d’année Le plan de relance et les progrès dans les négociations commerciales sont porteurs d’espoir. L’activité économique reste 24 Chine : nouveau social financing sous pression et cette situation devrait perdurer jusqu’en milieu 12m d’année, période à laquelle les mesures de relance du crédit devraient 20 glissants faire sentir leurs effets, lesquels seront renforcés par le maintien de 16 000' Mds CNY politiques monétaire et budgétaire accommodantes. Autre facteur 12 positif, les discussions constructives avec les États-Unis sur les 8 questions commerciales devraient se poursuivre et ouvrir la voie à la 4 conclusion d’un accord plus tard dans l’année. De telles perspectives sont de nature à stabiliser la confiance des agents économiques au 0 cours du printemps, puis à susciter un redémarrage de l’activité -4 économique pendant l’été. Nous tablons en conséquence sur une 08 09 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 Crédit bancaire Trust loans croissance proche de 6,4%. Le prix à payer pour un tel résultat sera Entrusted loans Oblig. entreprises une augmentation des ratios d’endettement, augmentation qui restera Obligations coll. loc. Actions toutefois modérée. ABS Autres Total Source : Crédit Agricole CIB Ce contexte est favorable aux entrées de capitaux en Chine, et ce d’autant plus que les obligations chinoises ont fait leur entrée dans l’indice obligataire Bloomberg Barclays et que le poids des actions chinoises dans l’indice MSCI s’est renforcé. Ces flux sont favorables à une baisse des taux d’intérêt des obligations d’État chinoises (le taux à dix ans devrait terminer l’année à 2,75%) ainsi qu’au yuan, qui devrait s’apprécier à 6,65 contre le dollar. N°19/066 – 12 avril 2019 10
Monde – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir Brésil : la réalité frappe de nouveau Alors que le 100e jour de l’administration Bolsonaro vient juste d’être franchi, les difficultés de mise en œuvre du programme ambitieux de son équipe économique (clairement libérale) commencent à apparaître. La température monte à Brasilia : l'ancien président Michel Temer a été arrêté et les relations entre l'exécutif et le Congrès deviennent moins prévisibles. Alors que l’élément central du programme économique est la réforme du système de retraites, la fragilité des relations entre le pouvoir exécutif, le ministère des Finances et le Congrès se traduit par des retards et une révision à la baisse des attentes sur l’ampleur de la réforme. Alors que l'on s'attendait initialement à ce que cette réforme franchisse les trois étapes habituelles de validation à la Chambre basse d'ici fin juin, les marchés parlent désormais de septembre. Le processus se révélant moins simple qu'initialement attendu, les marchés révisent à la baisse leurs prévisions de croissance et la probabilité d'un choc de confiance positif lié à la réforme dès 2019 est désormais réduite. Brésil : nouvelle baisse de la croissance Notre scénario central table sur l'adoption d'une réforme des 2,5 1,5 2,0 retraites légèrement « édulcorée », mais encore favorable : non 1,0 une réforme qui éliminera complètement les déséquilibres du système 1,5 1,0 0,5 de retraites, mais une réforme qui rendra le système viable dans un 0,5 avenir prévisible. En termes de chiffres, la proposition initiale du 0,0 gouvernement prévoyait des économies allant jusqu’à 1 000 milliards 0,0 de réais brésiliens en dix ans. En réalité, le gouvernement sera en -0,5 -0,5 mesure de faire passer une réforme qui permettra d'économiser entre -1,0 -1,0 650 et 750 milliards de réais. Par ailleurs, plusieurs autres réformes -1,5 importantes mais de moindre envergure, telles que la simplification de -2,0 -1,5 janv.-17 juin-17 nov.-17 avr.-18 sept.-18 la fiscalité et du Code du travail, ainsi que des privatisations et le lancement de partenariats public-privé devront attendre : les retards m/m mm3m (dr.) a/a mm3m pris par la réforme des retraites retardent l'ensemble de l’agenda Source : INGE, CA CIB, IBC-Br PIB mensuel proxy % économique du gouvernement. Au-delà des difficultés liées aux procédures politiques nécessaires pour réformer le système de retraites, notre scénario est très modérément positif. Notre scénario central table, en effet, sur l'adoption d'une réforme des retraites suffisamment satisfaisante pour conduire à la stabilité des marchés, condition essentielle au maintien de conditions monétaires et financières un tant soit peu favorables à un rebond de la croissance. Début 2019, en raison d'éléments essen- tiellement cycliques, une croissance plus forte semblait se dessiner. Bien que les conditions restent favorables (taux d'intérêt et inflation faibles, importantes capacités inemployées dans l'économie), l'activité est encore assez faible et nous conduit à anticiper une croissance de seulement 1,8% en 2019, contre 2,4% précédemment. Plusieurs années d'investissements insuffisants ont vraisemblablement entraîné une forte baisse de la croissance potentielle du Brésil qui serait désormais proche de 2%. Avec une croissance encore poussive et malgré le niveau vraisemblablement plus faible de la croissance potentielle, il est peu probable que la BCB (Banque centrale du Brésil) relève ses taux directeurs avant le premier trimestre 2020. L’échec de l'équipe de Bolsonaro dans la mise en place des réformes structurelles annoncées constitue le principal risque : en suscitant une chute des marchés, un tel échec pourrait amener la BCB à agir plus tôt. Sous réserve que les conditions de marché le permettent, d’éventuelles nouvelles déceptions sur la croissance pourraient en revanche conduire à de nouvelles baisses des taux directeurs. N°19/066 – 12 avril 2019 11
Monde – Scénario macro-économique 2019-2020 Prévenir plutôt que guérir Inde : des élections très incertaines Les élections législatives vont se tenir (avril-mai) dans un contexte géopolitique tendu. Un scénario dans lequel N. Modi perdrait le pouvoir – au profit du parti du Congrès ou d’un leader régional – serait une surprise pour les marchés et une source de volatilité du change. Inde : contributions à la croissance 15 Les sondages pointent une remontée de la popularité de Modi grâce 10 aux frappes contre le Pakistan. Mais sa cote personnelle est supérieure à celle de son parti, qui paie le prix des réformes. Certes, ces dernières ont stimulé la digitalisation de la classe moyenne urbaine et une plus 5 grande inclusion financière de la population. Mais elles sont douloureuses pour l’Inde rurale, où les agriculteurs surendettés 0 souffrent de la baisse des prix agricoles. Les réformes ont aussi accru les différences de richesse entre États et les difficultés des PME. Au -5 final, elles ont accéléré la fragmentation économique et donc T1 14 T1 15 T1 16 T1 17 T1 18 T1 19 politique du pays. Imports biens & services Exports biens & services Stocks Investissement Si l’Inde n’entre pas dans une phase d’instabilité politique, elle a Conso. publique Conso. ménages de fortes chances de connaître une reprise de l’investissement, PIB Sources : nationales favorisée par des taux d’utilisation élevés et par le désendettement des entreprises. Elle sera, de plus, peu touchée par la faiblesse du cycle manufacturier mondial, sa croissance étant plus liée à celle de sa demande intérieure. Au total, la croissance est susceptible de s’établir à 7,3% en 2019 (après 6,7% en 2018). Russie : macro-économie contre sanctions Cours du Brent en roubles/baril 6 000 L'économie russe bénéficie de cours du pétrole relativement favorables, en particulier si on exprime ces cours en rouble. Cela 5 000 soutient l'économie, le budget de l’État et le compte courant. L'économie russe n'a certes pas échappé au trou d’air qu’a connu 4 000 l’économie mondiale au cours des derniers mois, mais nous prévoyons cependant une croissance satisfaisante pour 2019, à 1,6%, un chiffre 3 000 proche de la croissance potentielle du pays. 2 000 L'inflation a accéléré au cours des derniers mois, en partie à cause de la hausse de la TVA intervenue en janvier. La CBR (la Banque 1 000 centrale russe) a toutefois déjà resserré sa politique monétaire à titre préventif l'an dernier et n'aura peut-être pas besoin de le faire à 0 nouveau cette année pour des raisons purement macro-économiques. 00 02 04 06 08 10 12 14 16 18 Source : Bloomberg Le facteur géopolitique n’a cependant pas disparu : le Sénat américain a présenté un nouveau projet de loi visant à introduire de nouvelles sanctions contre la Russie. Il n'est pas certain que cette loi aboutisse à des sanctions effectives, mais si tel était le cas et si la loi était adoptée dans une version dure (touchant certaines banques, certaines entreprises du secteur de l'énergie et le marché des obligations d’État, les OFZ), elle pourrait mettre les marchés russes sous pression et pousser la CBR à relever ses taux de manière défensive. L'impact macro-économique resterait toutefois limité. N°19/066 – 12 avril 2019 12
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