NOTIONS DE PHARMACOCINETIQUE VETERINAIRE - PHARMACIE & TOXICOLOGIE ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE

 
CONTINUER À LIRE
NOTIONS DE PHARMACOCINETIQUE VETERINAIRE - PHARMACIE & TOXICOLOGIE ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE
1

ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE
            DE SIDI THABET

    PHARMACIE & TOXICOLOGIE

       NOTIONS
DE PHARMACOCINETIQUE
     VETERINAIRE

       Professeur Agrégé Samir BEN YOUSSEF

                    2013-2014
NOTIONS DE PHARMACOCINETIQUE VETERINAIRE - PHARMACIE & TOXICOLOGIE ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE
2

         CINETIQUE DES XENOBIOTIQUES
              DANS L'ORGANISME

Introduction – Importance                                             4

PREMIERE PARTIE :
BIODISPONIBILITE, BIOEQUIVALENCE,
MECANISMES DE PASSAGE TRANSMEMBRANAIRE
DES XENOBIOTIQUES

I.       BIODISPONIBILITE, BIOEQUIVALENCE                             7
1.       Définitions                                                  7
1.1      Biodisponibilité absolue                                     7
1.2      Biodisponibilité relative                                    8
2.       Evaluation de la biodisponibilité                            8
3.       Facteurs de variation de la biodisponibilité                10
3.1.     Facteurs pharmaceutiques                                    10
3.1.1.   Facteurs liés au principe actif                             10
3.1.2.   Facteurs liés à la forme pharmaceutique                     11
3.1.3.   Interactions médicamenteuses                                12
3.2.     Facteurs physiopathologiques                                13
II.      MECANISMES DE PASSAGE TRANSMEMBRANAIRE                      13
1.       La membrane cellulaire                                      13
2.       Les processus de passage transmembranaire                   14
2.1.     La diffusion passive                                        14
2.2.     La filtration                                               18
2.3.     Le transfert par l'intermédiaire de systèmes de transport   19
2.4.     La pinocytose                                               20
3.       Facteurs influençant le passage transmembranaire            20

DEUXIEME PARTIE : DEVENIR DES XENOBIOTIQUES
DANS L'ORGANISME

I.       LA RESORPTION                                               25
1.       La résorption digestive                                     26
1.1.     La résorption gastrique                                     26
1.1.1.   Monogastriques                                              26
1.1.2.   Polygastriques                                              26
1.1.3.   Oiseaux                                                     27
1.2.     La résorption intestinale                                   27
        Avantages et inconvénients de la voie digestive             28
        Facteurs de variation de la résorption digestive            29
2.       Résorption transcutanée et muqueuse                         29
2.1.     Voie transcutanée                                           29
2.2.     Résorption par les muqueuses                                29
NOTIONS DE PHARMACOCINETIQUE VETERINAIRE - PHARMACIE & TOXICOLOGIE ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE
3

3.       Résorption pulmonaire                          31
4.       Résorption parentérale                         32
4.1.     Voie intraveineuse                             32
4.2.     Voie intra-péritonéale                         33
4.3.     Voies intramusculaire et sous cutanée          33
II.      LA DISTRIBUTION                                36
 1.      Transport sanguin                              36
 1.1.    Fixation sur les protéines plasmatiques        36
 1.2.    Fixation sur les éléments figurés du sang      39
2.       Diffusion tissulaire et cellulaire             39
3.       Particularités d'organes                       42
3.1.     Pénétration dans le système nerveux central    42
3.2.     Passage transplacentaire                       43
III.     BIOTRANSFORMATIONS                             46
1.       Réactions de biotransformations                46
1.1.     Lieu des réactions                             46
1.2.     Principales réactions                          47
1.2.1.   Réactions de dégradation                       47
1.2.2.   Réactions de conjugaison                       53
2.       Facteurs de variation des biotransformations   57
2.2.     Facteurs intrinsèques                          57
2.3.     Facteurs extrinsèques                          59
2.3.1.   L’induction enzymatique                        59
2.3.2.   L’inhibition enzymatique                       61
IV.      ELIMINATION                                    62
1.       Elimination rénale                             62
1.1.     Filtration glomérulaire                        62
1.2.     Sécrétion tubulaire                            63
1.3.     Réabsorption tubulaire                         64
2.       Elimination digestive                          66
2.1.     Excrétion biliaire                             66
2.2.     Excrétion salivaire                            68
2.3.     Excrétion par la muqueuse digestive            69
3.       Autres voies d'élimination                     69
3.1.     Elimination mammaire                           69
3.2.     Elimination par les œufs                       72
3.3.     Elimination pulmonaire                         73
3.4.     Elimination par la peau et les larmes          73

         CONCLUSION
NOTIONS DE PHARMACOCINETIQUE VETERINAIRE - PHARMACIE & TOXICOLOGIE ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE
4

              CINETIQUE DES XENOBIOTIQUES
                   DANS L'ORGANISME

INTRODUCTION

On entend par cinétique des médicaments et des toxiques ou
pharmacocinétique (toxicocinétique pour les toxiques), l'étude quantitative et
qualitative du devenir d'un xénobiotique dans l'organisme en fonction du temps
après son introduction par l'une des voies d’administration.

Lorsqu'un xénobiotique est introduit dans l’organisme, après une phase de
contact dite phase galénique, il subit un cheminement qui se résume en quatre
étapes fondamentales (Figure 1).

       La résorption (Absorption*) : c’est à dire le passage du site
        d'application dans la circulation générale
       La distribution à partir de la circulation générale dans les différents
        tissus et organes.
       Les biotransformations qui correspondent à des modifications
        biochimiques que subit le xénobiotique dans l'organisme
       L'élimination du xénobiotique par les différentes voies d'excrétion

Le terme de xénobiotique (du grec xénos = étranger), désigne toute substance
chimique etrangère à l’organisme, qu'elle soit médicamenteuse ou toxique.

                             Figure 1 : Place de la pharmacocinétique
                                                    (Pr. Jean-Dominique PUYT, ONIRIS)

Le terme d'absorption, synonyme d'ingestion en français est consacré par l’usage employé ; c’est le terme
anglais ; il, s’agit en fait de résorption.
Le terme de métabolisme était autrefois synonyme de pharmacocinétique, à une époque où les
biotransformations étaient pratiquement la seule étape pharmacocinétique que l'on connaissait.
NOTIONS DE PHARMACOCINETIQUE VETERINAIRE - PHARMACIE & TOXICOLOGIE ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE
5

IMPORTANCE

L'étude de la pharmacocinétique et de la toxicocinétique des xénobiotiques est
importante à plus d'un titre.

Elle conditionne le choix des formes pharmaceutiques,                    de   la   voie
d'administration et de la posologie chez les différentes espèces.

A ce titre, les études pharmacocinétiques constituent une partie importante du
dossier pharmaco-toxicologique nécessaire l'obtention de l’autorisation de mise
sur le marché (AMM) d'un médicament vétérinaire.

Par ailleurs, elles permettent la connaissance du niveau en résidus dans les
denrées alimentaires d’origine animale, lequel est nécessaire pour la
détermination du temps d’attente afin de garantir l’innocuité de ces denrées
pour le consommateur.

Pour qu’un médicament agisse, il faut qu’il soit libéré de sa forme
pharmaceutique et qu’il puisse traverser les barrières cellulaires pour atteindre
son site d’action (Fig. 1bis), aussi le présent polycopié est divisé en deux
parties :

      La première partie est consacrée à l’étude de la biodisponibilité des
       xénobiotiques ainsi qu’à l’étude du passage transmembranaire des
       substances chimiques.

      La deuxième partie, traite des quatre étapes du devenir d’un
       xénobiotique dans l’organisme à savoir : la résorption, la distribution,
       les biotransformation et l’élimination.

               Figure 1bis : Phase galénique et phase pharmacocinétique
                                              (Pr. Jean-Dominique PUYT, ONIRIS)
NOTIONS DE PHARMACOCINETIQUE VETERINAIRE - PHARMACIE & TOXICOLOGIE ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE
6

       PREMIERE PARTIE

BIODISPONIBILITE ET BIOEQUIVALENCE,

      MECANISMES DE PASSAGE
TRANSMEMBRANAIRE DES XENOBIOTIQUES
NOTIONS DE PHARMACOCINETIQUE VETERINAIRE - PHARMACIE & TOXICOLOGIE ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE
7

       Afin de mieux comprendre les quatre grandes étapes du devenir d’un
       médicament ou d’un toxique dans l’organisme, il est intéressant d’étudier dans
       un premier temps la notion de biodisponibilité et les mécanismes de passage
       transmembranaire.

I.     BIODISPONIBILITE, BIOEQUIVALENCE

1.     Définitions

       La biodisponibilité d’un xénobiotique correspond à la quantité de principe actif
       libérée de la forme pharmaceutique administrée qui parvient dans la circulation
       générale et à la vitesse avec laquelle elle y parvient.

       Avant le développement de la pharmacocinétique, on admettait le concept
       ancien « dose administrée = dose résorbée ». Les études pharmacocinétiques
       ont prouvé que seulement une fraction de la quantité administrée est résorbée
       et atteint les sites d’action biologiques ou toxiques.

       Par ailleurs, on a démontré que cette fraction résorbée dépend de la
       présentation du médicament, c’est à dire de la forme pharmaceutique.

       Le concept de biodisponibilité s’est développé initialement pour évaluer
       l’efficacité thérapeutique de spécialités pharmaceutiques différentes, renferment
       les mêmes quantités de principe actif après administration par la même voie.

       La biodisponibilité s’intéresse essentiellement aux évènements qui précèdent la
       résorption ; c'est-à-dire à la phase galénique.

       Il s’agit pour un comprimé de son délitement et de la dissolution du principe
       actif dans le contenu du tube digestif, pour une suspension de sa dispersion
       dans le tissu conjonctif sous cutané ou intermusculaire puis de la dissolution du
       principe actif.

       On définit deux types de biodisponibilité : la biodisponibilité relative et la
       biodisponibilité absolue.

             Biodisponibilité absolue
             Biodisponibilité relative

1.1.   Biodisponibilité absolue

       C’est la biodisponibilité d’un même principe actif administré par des voies
       différentes, elle permet de définir le rapport de la quantité de principe actif
       résorbé par une voie quelconque par comparaison à la voie intraveineuse
NOTIONS DE PHARMACOCINETIQUE VETERINAIRE - PHARMACIE & TOXICOLOGIE ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE
8

1.2.   Biodisponibilité relative

       C’est la biodisponibilité d’un principe actif sous des formes pharmaceutiques
       différentes administrés par la même voie.
       Elle permet de comparer deux spécialités pharmaceutiques et d’évaluer l’intérêt
       de l’une sur l’autre. Elle permet également d’évaluer le rôle que jouent les
       excipients et les techniques de fabrication (pulvérisation, micronisation…etc.).
       La biodisponibilité relative a pour but de comparer les différences de résorption
       par une même voie d’administration entre des spécialités pharmaceutiques
       différentes de même composition qualitative et quantitative et présentées sous
       des formes galéniques identiques.

       Deux spécialités pharmaceutiques seront dites bioéquivalentes si elles
       procurent dans l'organisme des courbes d'évolution des concentrations dans le
       temps similaires.

       La bioéquivalence s'applique à un principe actif dans une forme galénique
       donnée et ne vaut que pour une voie d'administration précise.
       Elle est surtout étudiée pour les spécialités pharmaceutiques destinées à la
       voie orale. On peut également comparer la bioéquivalence de lots de fabrication
       successifs d'une même spécialité.

       On peut enfin évaluer la bioéquivalence de spécialités pharmaceutiques dans
       des formes galéniques différentes et apprécier l'intérêt d'une forme galénique
       sur une autre. On peut à partir de là établir le rôle possible des excipients ou de
       la technique de fabrication.

2.     Evaluation de la biodisponibilité

       La biodisponibilité est évaluée essentiellement à partir des courbes
       pharmacocinétiques d’évolution des concentrations sanguines en fonction du
       temps (Fig 2)

             Figure 2 : Evolution des concentrations sanguines en fonction du temps
NOTIONS DE PHARMACOCINETIQUE VETERINAIRE - PHARMACIE & TOXICOLOGIE ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE
9

La surface sous la courbe est directement proportionnelle à la quantité de
principe actif qui atteint la circulation générale. Le temps qui sépare
l’administration, du temps de pic de concentration plasmatique (Cmax.) est
appelé : Tmax. Il permet d’apprécier la vitesse de résorption.

La voie intraveineuse présente une biodisponibilité de 100% puisque toute la
dose administrée parvient à la circulation générale.
Le coefficient de biodisponibilité : F, se calcule par rapport à la voie
intraveineuse selon la formule suivante :

                    F = (Surface sous la courbe IM / dose IM)
                        (Surface sous la courbe IV / dose IV)

On procède de la même manière pour la détermination du coefficient de
biodisponibilité par les autres voies (orale, sous cutanée…etc.)

Cependant, le coefficient de biodisponibilité, s’il apporte une bonne indication
sur la quantité de principe actif résorbée, n’apporte aucune information sur la
vitesse du phénomène .Il est alors important de l’accompagner de Tmax.et Cmax.

Ceci est d’autant plus important que des spécialités ayant des coefficients de
biodisponibilité identiques, peuvent avoir des effets biologiques ou toxiques
différents.

Le coefficient de biodisponibilité absolue permet de comparer la résorption par
différentes voies d’administration.

Le coefficient de biodisponibilité relative déterminé selon le même principe,
permet quant à lui de comparer la résorption par la même voie d'un principe
actif à partir de formes pharmaceutiques différentes spécialités.

La valeur du coefficient de biodisponibilité est insuffisante à elle seule pour
comparer valablement des spécialités pharmaceutiques différentes. Si elle est
une bonne indication de la quantité de principe actif résorbée, elle n'apporte
aucune information sur la vitesse du phénomène.
On peut très bien obtenir avec deux spécialités pharmaceutiques différentes des
courbes délimitant des surfaces identiques ; les coefficients de biodisponibilité
sont alors identiques. Ces médicaments peuvent pourtant exercer des effets
biologiques très différents. C'est pourquoi il faut prendre en compte
simultanément le pic de concentration Cmax et le temps au bout duquel il est
atteint c.-à-d. Tmax. On apprécie ainsi la vitesse de résorption du principe actif.
NOTIONS DE PHARMACOCINETIQUE VETERINAIRE - PHARMACIE & TOXICOLOGIE ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE
10

       En pratique, on admet que des spécialités pharmaceutiques (formulations
       galéniques identiques) sont bioéquivalentes et donc interchangeables s'il y a
       moins de 20 % de différences entre :

             leur AUC (surface        sous   la    courbe)   ou   leur   coefficient   de
              biodisponibilité F,
             leur Tmax
             leur Cmax

       Pour compléter les études de bioéquivalence réalisées in vivo, on a mis au point
       des tests in vitro simples et rapides, susceptibles de donner une information
       complémentaire sur des différences éventuelles de biodisponibilité et donc
       garantir une bioéquivalence.
       Les différences de biodisponibilité sont liées essentiellement à des différences
       de vitesse de dissolution dans l'eau du principe actif à partir de sa forme
       galénique. C'est en partie dans ce but qu'ont été mis au point des tests de
       désagrégation (délitement) pour les comprimés ainsi que des tests de
       dissolution. En effet les différences de biodisponibilité ont principalement pour
       origine des différences de mise en solution aqueuse des principes actifs avant
       leur résorption dans la circulation générale, condition préalable et nécessaire à
       tout passage transmembranaire.

3.     Facteurs de variation de la biodisponibilité

       La libération du principe actif à partir de la forme pharmaceutique, étape
       préalable à la résorption dépend de plusieurs facteurs à savoir des facteurs
       pharmaceutiques et des facteurs biologiques.

3.1.   Facteurs pharmaceutiques

       Ce sont des facteurs liés à la forme pharmaceutique, à ses caractéristiques
       physiques et chimiques.

3.1.1. Facteurs liés au principe actif

       a. Taille des particules

       La biodisponibilité est inversement proportionnelle à la taille des particules , ce
       sont les particules les plus petites offrant le plus de surface de contact avec le
       milieu aqueux de l'organisme qui se dissolvent le mieux dans le tube digestif ,
       dans le conjonctif sous cutané ou intramusculaire (cas des suspensions).

       L'acétylsalicylate de lysine (ASPEGIC®) est une forme micronisée qui illustre
       bien ce cas. Sa biodisponibilité est supérieure à celle des comprimés d'acide
       acétylsalicylique.
11

      b. Etat d'hydratation

      Les formes hydratées sont souvent moins solubles que les formes anhydres.
      Pour l'ampicilline par exemple, la biodisponibilité croit avec la croissance du
      taux d'hydratation de la forme pharmaceutique.

      c. Etat cristallin

      Les poudres amorphes sont en général plus hydrosolubles que les formes
      cristallines.

      d. Forme chimique

      Les esters et les sels d'un même principe actif n'ont pas la même solubilité d'où
      une biodisponibilité différente et des comportements pharmacocinétiques
      différents.

3.1.2. Facteurs liés à la forme pharmaceutique

      Les excipients et les adjuvants des formes pharmaceutiques influent sur la
      dissolution du principe actif et par conséquent sur la biodisponibilité, le
      développement de "nouveaux systèmes d'administration " est à ce titre
      important à considérer.

    a. Excipients

      Les excipients aqueux sont ceux qui retiennent le moins le principe actif, leur
      dissolution est immédiate dans le contenu du tube digestif dans le liquide sous
      cutané ou intermusculaire.
      Les solutions aqueuses sont mieux résorbées que les solutions huileuses qui
      sont en général des formes retards.
      L'effet retard maximal est obtenu avec les formes solides ou implants sous
      cutanés (cas des anabolisants) permettant une libération continue et durable du
      principe actif.

    b. Liants et désintégrants

      Les liants des comprimés ralentissent la vitesse de leur désintégration
      diminuent la biodisponibilité. Les désintégrants ont un effet inverse

    c. Nouveaux systèmes d'administration (NSA)

            Voie orale

      Les innovations les plus élaborées, concernent la voie digestive et la voie
      percutanée. Les formes pharmaceutiques développées visent la présence du
      principe actif pendant la période de risque durant laquelle on veut protéger
      l'animal et sont dites "longue durée d'action".
12

      Pour la prévention de la météorisation spumeuse chez les bovins au moment de
      la mise en herbe, on utilise des bolus de 165mm/38mm refermant un gel
      tensioactif.
      La taille du bolus empêche son passage à travers l'orifice réticulo-omasal ou le
      rejet à travers le cardia d'où une localisation réticulo-ruminale stricte.
      La libération du gel tensioactif s'étale sur 3 mois à partir cette forme.
      D'autres formes pharmaceutiques sont développées pour les antiparasitaires,
      les anti-infectieux systémiques, les antibiotiques ionophores et les oligo-
      éléments.

      Le système à l'origine de toute une famille est le PARATECT® (bolus qui libère
      du morantel) à action préventive stricte.
      Pour les anthelminthiques chez les bovins, des systèmes de "Pulse Release
      Bolus" sont développés. Ils assurent une libération de principes actifs
      systémiques à doses thérapeutiques sans intervention humaine.
      Ces bolus sont administrés par la voie orale lors de la mise en pâturage des
      veaux. Ils se localisent alors dans le réseau. La première dose thérapeutique est
      libérée en 21-23 jours pour le SYNTHEX® puis les suivantes tous les 21-31
      jours, la cinquième et dernière dose étant libérée au 115è - 120è jour après
      l'administration.
      Pour l'électronic bolus " : VALBAZEN E BOLUS® constitué de " tubes collés sur
      un socle commun et lourd, son arrivée dans l'humidité rumen-réseau déclenche
      un système électronique. Exactement 31jours plus tard, il y'a libération d'une
      dose d'anthelminthique, aussitôt s'enclenche la libération de la deuxième
      charge qui se produit 31 jours après, puis la 3ème et dernière dose
      thérapeutique est libérée 93 jours après l'ingestion avec une erreur de plus ou
      moins 15 secondes.

            Voie percutanée

      Pour la voie percutanée, les techniques dites "pour on" ou "spot on" (lorsque
      la quantité appliquée est faible) permettent la résorption de principes actifs
      appliqués le long de la région dorsolombaire avec une excellente
      biodisponibilité. Ces techniques seront développées dans l'étude de la
      résorption des médicaments et des toxiques.

3.1.3. Interactions médicamenteuses

      L'association de plusieurs médicaments peut être à l'origine de modifications
      de la biodisponibilité par suite d'incompatibilités physico-chimiques ou de
      phénomènes de compétition lors de la résorption.

            Incompatibilités physico-chimiques

             Les cas des tétracyclines qui forment des chélates insolubles avec le
             calcium illustre bien les incompatibilités physico-chimiques à l'origine
             d'une mauvaise résorption. C’est le cas également du charbon actif
             absorbant n'importe quel médicament, couramment utilisé dans le
13

              traitement des intoxications pour réduire la résorption des toxiques par
              la voie digestive.

3.2.   Facteurs physio-pathologiques

       Ce sont des facteurs liés à l'individu qui reçoit la forme pharmaceutique.
       La vacuité, le pH du tube digestif, une accélération du transit lors de diarrhée
       sont autant des facteurs biologiques qui modifient la biodisponibilité.

II.    Mécanismes de passage transmembranaire des xénobiotiques

       Le cheminement d’un xénobiotique dans l’organisme repose sur la traversé de
       nombreuses membranes cellulaires : épithélium gastro-intestinal, paroi
       vasculaire, cellules de différents organes, épithélium des tubules rénaux…etc.
       Cette diversité des barrières membranaires recouvre cependant une unité
       structurale commune : la membrane cellulaire.

1.     La membrane cellulaire

       La membrane cellulaire est de nature lipoprotéique. Sa conception la plus
       récente est celle dite en « mosaïque fluide » de SINGER et NICHOLSON (1972).
       Elle apparait constituée par une double couche de phospholipides discontinue
       dans laquelle sont intercalés des protéines globulaires occupant la totalité ou
       partie de l’épaisseur de la membrane (Fig. 3).

             Les molécules lipidiques sont faites d’un pôle hydrophobe dirigé vers
              l’intérieur et d’un pôle hydrophile dirigé vers l’extérieur (milieu
              extracellulaire ou intracellulaire).

             La membrane cellulaire comporte des pores situés au niveau des axes
              centraux des protéines globulaires.

               Figure 3 : La membrane cellulaire (d’après SINGER et NICHOLSON)
14

       Ce modèle, met en évidence le caractère lipidique prédominant de la membrane
       cellulaire et l’existence de pores protéiques. Ces deux caractéristiques sont
       fondamentales        pour   comprendre    les    mécanismes    de     passage
       transmembranaire.

2.     Les processus de passage transmembranaire

       Le passage transmembranaire des xénobiotiques se fait selon les substances
       par 4 processus principaux (Fig. 4 & 4bis).

           i.   Diffusion passive
          ii.   Filtration
         iii.   Transfert par l’intermédiaire de système transporteurs
         iv.    Pinocytose (Fig.4bis)

                               1                     2                      3
                  D iffus ion à travers des   Filtration par des pores   M éc anis mes
                  membranes lipidiques            ou entre c ellules         ac tifs

                Figure 4 : Processus de passage transmembranaire des xénobiotiques.

                                    Figure 4bis : La pinocytose

2.1.   Diffusion passive

       C’est le processus le plus fréquent, les substances en solution traversent la
       membrane par simple dissolution dans les phospholipides membranaires.
       C’est un transport passif ne nécessitant aucune dépense d’énergie de la part de
       la cellule.
15

  Les substances dissoutes migrent du milieu le plus concentré vers le milieu le
  moins concentré jusqu'à équilibre de part et d’autre de la membrane (notion de
  gradient de concentration). La vitesse de diffusion est donnée par la loi de
  FICK :

                               Figure 5 : La loi de FICK

  Du fait du caractère lipidique marqué de la membrane cellulaire, ce sont les
  molécules liposolubles, peu ionisées qui diffusent le plus facilement.

  La liposolubilité est le principal facteur limitant de la résorption des
  xénobiotiques par diffusion passive.
  Ceci nous amène à considérer deux paramètres importants, jouant un rôle
  essentiel dans la diffusion à savoir le pH du milieu qui influe sur le degré
  d’ionisation d’une molécule et le coefficient de partage octanol/eau de
  cette molécule renseignent sur sa liposolubilité.

a. pH du milieu

  On distingue d’une manière générale deux catégories de xénobiotiques :

    - Des molécules neutres non ionisables,
    - Des molécules ionisables qui sont soit des acides soit des bases définies par leur
      pKa ou logarithme négatif de leur constante de dissociation Ka.

                                pKa = - log Ka = log 1/ka

    - Une substance acide possède un pka d’autant plus faible que le milieu est acide.
    - Une substance basique, possède un pka d’autant plus élevé que le milieu est
      basique.

  L’équation d’HENDERSON-HASSELBACH permet de déterminer la concentration
  relative de la forme ionisée (fi) et de la forme non ionisée (fni) d’une substance
  en fonction du pH du milieu de dissolution :

                               log fni/fi = pH – pKa
16

Lorsque le pH est égal au pKa ; il ya équilibre entre les deux formes (log 1 = 0).
En pratique, dans le tube digestif, dans le milieu extracellulaire ou dans le
milieu intracellulaire, ces substances se trouvent sous forme non ionisée et sous
forme ionisée. C’est sous la forme non ionisée (liposoluble) que les
xénobiotiques diffusent bien à travers les membranes cellulaires, sous
forme ionisée ils pénètrent très peu.

Les molécules neutres, ne subissent aucune influence du pH.

      Cas d’un acide faible

L’équation de dissolution d’un acide faible est la suivante :

                             AH              A- + H+

L’équation d’HENDERSON-HASSELBACH donne les concentrations en fni et fi
selon la formule suivante :

                     pH - pKa = Log [AH]/A- = log fni/fi

En conséquence,

   Un acide faible sera d’autant moins ionisé que le milieu est acide

Ceci explique la très bonne résorption gastrique des acides faibles (Pénicilline G,
salicylés, anticoagulants coumariniques et dérivés de l’indane-dione … etc.)

      Cas d’une base faible

                             BH              B + H+

L’équation d’HENDERSON-HASSELBACH donne les concentrations en fni et fi
selon la formule suivante :

                     pH - pKa = Log [B]/BH+ = log fni/fi

En conséquence,

Une base faible sera d’autant moins ionisée que le milieu est basique

Ceci explique la résorption duodénale des bases faibles (tétracyclines,
alcaloïdes...).
17

  Le pH étant variable d’un compartiment à l’autre dans l’organisme, c'est-à-dire
  de part et d’autre d’une barrière membranaire, ceci entraine des déplacements
  des molécules chaque fois qu’elles se trouvent dans un milieu favorisant la fni
  (Fig 5).

  Une différence d'une unité de pH entre les deux compartiments entraîne à
  l'équilibre environ 10 fois plus de molécules dans un compartiment que
  dans l'autre.

  On comprend alors le déplacement des molécules ionisables par suite de
  différences de pH entre des secteurs différents de l'organisme.

              Figure 5 : Diffusion passive d’un xenobiotique acide faible
                                 du sang vers un tissu

b. Coefficient de portage octanol-eau (huile-eau)

  Le coefficient de partage octanol-eau permet de déterminer le degré de
  liposolubilité d’une substance. Celle-ci jouant un rôle fondamental dans le
  passage transmembranaire.

  Ce coefficient est mesuré par évaluation de la distribution d’une substance
  entre l’octanol et l’eau (ou le chloroforme et l’eau).

  Plus sa valeur est grande, plus la substance est liposoluble et plus elle
  traversera facilement la membrane cellulaire.

  L’exemple des barbituriques, montre la relation parallèle entre le coefficient
  octanol-eau du composé et l’intensité de l’activité pharmacologique traduisant
  une meilleure traversée transmembranaire (Tableau I).

  Cependant, ce coefficient de partage octanol-eau ne doit pas avoir des valeurs
  très élevées. En effet, lors de la diffusion passive, la substance passe
18

       obligatoirement dans le milieu aqueux pour atteindre la membrane, de ce fait
       elle doit posséder un certain degré d’hydrosolubilité pour pouvoir se déplacer.

       Les substances exclusivement liposolubles sont incapables de franchir les
       barrières cellulaires (Vaseline, paraffine, …etc.) et sont utilisés pour leurs effets
       locaux (laxatifs).

                                             Tableau I

                Liposolubilité et activité pharmacologique de quelques barbituriques

                                        COEFFICIENT
                 BARBITURIQUE            DE PARTAGE               ACTIVITE
                                        OCTANOL-EAU

                    Phénobarbital              3              Sédatif-hypnotique
                                                                  action lente

                    Pentobarbital              39            Anesthésique général
                                                                 action rapide

                    Penthiobarbital           580            Anesthésique général
                                                               action très rapide

       Au bilan, ce sont les molécules liposolubles et légèrement hydrophiles qui sont
       les mieux diffusibles. Les composés exclusivement liposolubles ou insolubles
       dans l’eau comme de nombreux métaux ne traversent pas les membranes par
       diffusion passive.

2.2.   Filtration

       La filtration constitue le passage des substances chimiques à travers les pores
       membranaires ou les espaces intercellulaires.

       Par conséquent, seules les substances hydrosolubles ou à un moindre degré
       hydrosolubles, de faible poids moléculaire sont intéressés par ce processus.

       Etant donné la nature protéique des pores et leur dimension, les deux facteurs
       qui conditionnent la filtration sont l’hydrosolubilité du composé et son
       poids moléculaire.

       Le processus de filtration est un processus passif qui dépend du diamètre des
       pores, de leur nombre ainsi que du gradient de concentration de part et d’autre
       de la membrane.
19

       En pratique, dans la plupart des cas le diamètre de ces pores est compris entre
          et     A (1 A = 10-10 mètre), ce qui laisse filtrer uniquement les petites
       molécules de PM ‹        D environ. Il ne s’agit que d’ions minéraux (Na+,
       k+, Ca++, …etc.), les molécules organiques sont toutes de taille plus importante.

       La majorité des xénobiotiques a une masse relative comprise entre 200 et 500
       D, ce qui interdit habituellement leur passage par transport par les canaux
       ioniques.

       On note cependant deux exceptions anatomiques : les capillaires sanguins des
       territoires hépatique, rénaux et ceux musculaires, au niveau desquels le
       diamètre des pores est plus important. Au niveau des reins, le diamètre est de
           A permettant la filtration de molécules jusqu’à un PM voisin de 69
       Daltons.

2.3.   Transfert par l’intermédiaire de systèmes de transport

       Contrairement aux deux mécanismes précédents, le transfert par l’intermédiaire
       de systèmes de transport constitue un mécanisme actif nécessitant de l’énergie.

       Il fait intervenir des molécules transporteuses spécifiques et peut se faire contre
       un gradient de concentration.

       Les transports actifs nécessitent une participation active de la part des cellules
       sous forme d'énergie. Ils impliquent également des transporteurs
       spécifiques et agissent contre le gradient de concentration.

       On distingue des transporteurs d’efflux et d’influx ; parmi les plus importants
       figurent :

          des glycoprotéines P qui sont surtout des transporteurs d’efflux, encore
           appelées pompes à efflux,
          des transporteurs d’anions organiques (OAT), spécialisés dans le transport
           de xénobiotiques acides,
          des transporteurs de cations organiques (OCT), spécialisés dans le
           transport de xénobiotiques basiques.

       Les molécules transporteuses se caractérisent par :

          Leur spécificité pour certaines structures.
          Leur saturation, leur nombre étant fixe, Au-delà de certaines teneurs,
           leurs capacités de transport, en particulier pour les substances acides,
           peuvent être dépassées
          La possibilité de compétition de deux composés pour le même
           transporteur (Pénicilline G et probénicide).
          La possibilité d’une inhibition par combinaison irréversible avec une
           substance inhibitrice.
20

         Deux mécanismes de transport actif existent ; le transfert actif et la diffusion
         facilitée.

       a. Le transfert actif

         Le transfert actif est un mécanisme se faisant contre un gradient de
         concentration c'est-à-dire du milieu le moins concentré vers le milieu le plus
         concentré. Il nécessite de l’énergie fournie par hydrolyse de l’ATP.

         Ce transfert intervient principalement au niveau du rein (sécrétion tubulaire
         active), des hépatocytes (excrétion biliaire) et des plexus choroïdes.

         Les pompes à efflux jouent un rôle majeur dans la barrière hémato-méningée
         au niveau des plexus choroïdes du cerveau pour l'élimination des
         xénobiotiques présents dans le système nerveux central.

         Les teneurs en xénobiotiques dans l’urine ou la bile peuvent atteindre 100 fois
         et plus les teneurs sanguines.

         il existe des glycoprotéines membranaires P (P-gp) rejettent dans la lumière
         intestinale les molécules qui ont diffusé passivement dans les entérocytes. Ainsi
         ces pompes vont à l'encontre de la résorption intestinale de certaines
         molécules.

       b. Diffusion facilitée

         Elle diffère du transfert actif dans le fait qu’elle s’effectue dans le sens du
         gradient de concentration, mais à une vitesse supérieure à celle d’un simple
         phénomène de diffusion passive. Le glucose, la vitamine B12 pénètre par ce
         mécanisme.

2.4.     La pinocytose

         La pinocytose est un processus analogue à la phagocytose qui se produit pour
         des éléments solides.

         Elle correspond à une invagination de la membrane cellulaire pour englober une
         gouttelette lipidique du milieu extérieur, former une vésicule qui traverse toute
         la membrane pour libérer son contenu dans le cytoplasme ou le milieu intérieur.
         Elle intéresse des molécules liposolubles (vitamines A, D, E, et K) et elle est
         particulièrement développée chez le jeune.

3.       Facteurs biologiques influençant le passage transmembranaire

         Des facteurs biologiques liés à l'organisme animal interviennent surtout dans les
         transports passifs mais aussi, pour certains, dans les transports actifs.
21

     Ils sont variés. Les plus importants sont la surface d'échange, le temps de
     contact, le gradient de concentration et les interférences avec des constituants
     endogènes.

a.   Surface d'échange

     L'intensité des échanges de substances au travers des membranes biologiques
     entre deux territoires (compartiments) est proportionnelle à la surface de
     cette membrane.

     Plus la surface membranaire qui sépare deux compartiments est importante,
     plus les échanges sont favorisés. Le contact est en effet ainsi facilité.

     Cette différence de surface entre la paroi stomacale et celle de l'intestin grêle
     avec ses microvillosités contribue à ce que l'intestin soit le principal site de
     résorption des médicaments administrés par voie orale, tout comme des
     aliments. La très grande surface d’échange représentée par l’épithélium
     pulmonaire adapté pour l’oxygénation du sang permet des échanges gazeux
     très intenses.

b.   Temps de contact

     L'intensité des échanges de substances au travers des membranes biologiques
     entre deux territoires (compartiments) est également proportionnelle au
     temps de contact des molécules avec la membrane qui sépare les deux
     compartiments.
     Ainsi l'accélération du transit digestif lors de diarrhée est défavorable à la
     résorption aussi bien des nutriments que des xénobiotiques.

c.   Gradient de concentration

     L'intensité des échanges de substances au travers des membranes biologiques
     est enfin proportionnelle au gradient de concentration, c'est-à dire à la
     différence de concentrations de xénobiotique de part et d'autre de la
     membrane. Ce gradient a une importance prépondérante dans les transports
     passifs car les échanges s'opèrent conformément à la loi de FICK, du milieu le
     plus concentré vers le moins concentré, et ce jusqu'à équilibre de concentration
     de part et d'autre de la membrane.

     Tout facteur qui tend à diminuer ce gradient contribue à réduire les passages
     transmembranaires. Ainsi les médicaments pris en cours de repas subissent une
     dilution dans le contenu alimentaire, ce qui abaisse le gradient de concentration
     et, de là, réduit la résorption digestive des principes actifs.

     Ainsi, le contenu ruminal entraîne une dilution très importante des médicaments
     par voie orale, d'où le faible recours à cette voie d'administration
     médicamenteuse chez les ruminants.
22

     Inversement, la présence d'une vascularisation importante au niveau de
     l'intestin grêle au cours de la digestion favorise l'entraînement immédiat des
     nutriments et des xénobiotiques qui viennent de franchir la barrière digestive
     dans le courant sanguin, ce qui tend à maintenir un gradient de concentration
     élevé.

d.   Interférences avec des constituants endogènes

     Un certain nombre de constituants endogènes peuvent interférer avec les
     xénobiotiques et avoir une influence directe sur le taux de passages
     transmembranaires. C'est le cas notamment des lipides, des protéines et du
     calcium.

       •   Interférences avec les lipides

     Certains organes sont particulièrement riches en lipides ; c’est le cas
     notamment du système nerveux et du foie. Les xénobiotiques liposolubles
     présentent une très forte affinité pour les lipides et s’y concentrent. Ainsi tous
     les médicaments psychotropes sont liposolubles ; leurs teneurs dans le système
     nerveux qui conditionne directement leur puissance d’action est proportionnelle
     à leur liposolubilité.

       •   Interférences avec les protéines

     Les protéines sont des constituants importants du sang (albumine, globulines)
     et de nombreux tissus et liquides biologiques. Beaucoup de molécules
     présentent une affinité pour les protéines.

     Cette propriété peut exercer une influence sur la distribution tissulaire des
     xénobiotiques. Cette influence est connue sous le nom d'effet DONNAN.

     En fonction de l'affinité pour les protéines et des différences de concentrations
     en protéines de part et d'autre de la membrane biologique, le passage
     transmembranaire des xénobiotiques peut être facilité ou retardé.

     Ce phénomène est bien connu pour les pénicillines qui, dans les conditions
     normales, ne sont pas présentes dans le liquide céphalorachidien ; mais lors de
     méningite le liquide céphalo-rachidien contient des protéines d'origine
     inflammatoire sur lesquelles elles se fixent, ce qui permet d'atteindre des
     teneurs assez importantes.

     Certaines protéines à groupements thiols tels que la cystine des phanères ou
     les métallothionéines, localisées notamment dans le foie et le rein,
     présentent une affinité élevée pour les métaux et métalloïdes thioloprives
     (arsenic, plomb, mercure, cuivre,…). Ceci explique la concentration dans ces
     organes de ces métaux lors d'intoxication.
23

  •   Interférences avec le calcium

Une affinité de certains xénobiotiques pour le calcium endogène des dents ou
des os explique leur distribution particulière dans ces tissus, voire leur
accumulation préférentielle. Ils forment avec le calcium des chélates insolubles
qui précipitent. C'est le cas de certains antibiotiques comme les tétracyclines qui
forment des complexes avec les métaux divalents ; c'est le cas encore du fluor
qui est à l'origine de lésions osseuses et dentaires lors de fluorose en rapport
avec son affinité pour le tissu osseux.

De même, la présence de calcium non endogène, mais alimentaire (lait) peut
limiter la résorption de certains xénobiotiques administrés par voie orale ; ils
forment également des chélates insolubles qui sont directement éliminés par
voie fécale sans pouvoir être résorbés.

      L’étude de la biodisponibilité d’une part et des mécanismes de
      passage transmembranaire d’autre part nous permet de mieux
      comprendre les différentes étapes du devenir d’un xénobiotique dans
      l’organisme objet de la deuxième partie de ce polycopié.
24

    DEUXIEME PARTIE

CINETIQUE DES XENOBIOTIQUES
     DANS L’ORGANISME
25

I.   LA RESORPTION DES XENOBIOTIQUES

     La résorption correspond à l’étape par laquelle un xénobiotique passe de son
     site d’application dans la circulation générale.

     Selon le mode d’administration, on distingue deux types de résorption :

           La résorption médiate : le médicament est administré à l’extérieur de
            l’organisme ou dans une lumière (administration cutanée ou muqueuse
            ou par la voie digestive).

           La résorption immédiate : le médicament est directement introduit
            dans le liquide extracellulaire au sein d’un tissu (administration
            parentérale).

     Lors d’administration intraveineuse où le médicament est introduit directement
     dans le sang, la phase de résorption est supprimée (shuntée).

     La vitesse de résorption est variable selon les différentes voies d’administration.
     Le choix de celle-ci dépend souvent de l’indication d’urgence de l’intervention
     (Fig. 6).

              Concentration
              (µg/ml)

                   IV
                          IP

                           IM

                               VO

                                     SC

                                                                               temps

                        Figure 6 : Vitesse de résorption d’un xénobiotique
                                   selon différentes voies d’administration.
26

1.   LA RESORPTION DIGESTIVE

     Après ingestion d'un xénobiotique, la résorption digestive, dite encore orale ou
     entérale, peut s'effectuer à tous les étages du tractus digestif mais en pratique
     surtout dans l’intestin grêle et l’estomac. La voie rectale est moins utilisée en
     médecine vétérinaire.

     La résorption digestive des xénobiotiques s'opère surtout par diffusion
     simple, ce qui suppose une liposolubilité marquée du principe actif.

     Afin de gagner la circulation générale, un xénobiotique administré per os est
     appelé à franchir la muqueuse digestive. Celle-ci peut être considérée comme
     une membrane lipidique à pores favorable à la résorption des substances
     liposolubles.

        La résorption gastrique

     En regard des particularités anatomo-physiologiques des différentes espèces, la
     résorption gastrique est différente chez les monogastriques, les polygastriques
     et les oiseaux.

           Monogastriques

     Les monogastriques présentent les particularités suivantes :

              Un pH très acide du milieu stomacal, voisin de 1 à 2 chez le cheval et
               le veau.
              Un faible volume : 0,1 à 1 litre chez les carnivores, 8 à 15 litres chez
               le cheval.
              Une vidange complète de l’estomac entre les repas chez les
               carnivores et le porc. Chez le cheval, l’estomac n’est jamais vide.

     Il en résulte qu’au niveau stomacal chez les monogastriques, ce sont les acides
     faibles qui vont se trouver sous la forme non ionisée qui seront les résorbés.

     Leur résorption est moins bonne chez le cheval et veau dont le pH du contenu
     stomacal est relativement plus élevé.

     Le faible volume de l’estomac, limite par ailleurs le phénomène de dilution
     stomacale des principes actifs phénomène défavorable à la résorption.

     La connaissance de la vidange stomacale permet de connaitre le moment
     propice d’administration du médicament per os sachant que la résorption est
     meilleure dans un estomac vide.
27

      Polygastriques

Les particularités anatomo-physiologiques des polygastriques sont :

         Un réservoir gastrique de 150 litres environ chez le bovin et de 50
          litres chez les ovins et les caprins ce qui représente un facteur
          important de dilution.
         Un pH de 5,5 à 6,5
         La présence d’une µ-flore ruminale importante exerçant une activité
          enzymatique de dégradation sur de nombreux médicaments.

Ces particularités expliquent la résorption souvent médiocre des médicaments
par la voie orale chez les poly gastriques qui est peu utilisée pour obtenir une
action générale.

      Oiseaux

Les particularités anatomo-physiologiques des oiseaux sont :

         Un jabot à activité motrice irrégulière, à pH acide.
         Un système lymphatique intestinal peu développé.

Il en résulte que la résorption des acides faibles se fait au niveau du jabot par
diffusion passive avec toutefois une possibilité de stockage de certains
médicaments auquel fait suite une libération prolongée dans le temps.

Le système lymphatique intestinal peu développé, ne permet pas une bonne
résorption des composés liposolubles et les concentrations plasmatiques
efficaces ne sont parfois pas atteintes (chlorotétracycline … etc.)

Il existe des différences de résorption importantes entre les mammifères et les
oiseaux. Pour l’ampicilline par exemple, des doses 2 à fois plus importantes
sont nécessaires pour atteindre chez les oiseaux des concentrations sanguines
équivalentes à celles des mammifères.

   La résorption intestinale

La résorption intestinale se fait surtout dans l’intestin grêle et particulièrement
au niveau du duodénum (pH 5-6).

La muqueuse intestinale représente une surface d’échange considérable,
intensément vascularisée, grâce aux villosités et microvillosités. Ces villosités
augmentent cette surface de 10 à 20 fois.

Les bases faibles, présentent une résorption intestinale excellente, la forme non
ionisée prédominant dans l’intestin.
28

Par ailleurs, si théoriquement les acides faibles doivent être moins bien résorbés
qu’au niveau de l’estomac, en pratique leur résorption intestinale est meilleure
du fait de l’importance de la surface d’échange.

La vascularisation importante en drainant rapidement tout ce qui est résorbé,
concourt au maintien du gradient de concentration favorable à la résorption.
L'intestin grêle possède une vascularisation porte très importante. Cette
irrigation sanguine facilite l'entraînement des xénobiotiques qui viennent de
franchir la barrière digestive pour arriver dans la circulation générale. Ceci
concourt au maintien d'un gradient de concentration élevé, propice à leur
résorption intestinale. La fraction qui franchit la barrière digestive est
immédiatement entraînée dans le courant sanguin.

     Au bilan, les xénobiotiques qui arrivent dans le tube digestif sont
     résorbés par diffusion passive au niveau de l’estomac et surtout de
     l’intestin grêle.

     Les autres mécanismes sont moins fréquents. Pour arriver au niveau
     du sang, la plupart des xénobiotiques filtrent à travers la paroi
     capillaire sanguine, les grosses molécules lipidiques et protéiques
     empruntent la voie lymphatique.

   Avantages et inconvénients de la voie digestive :

Le principal avantage est la facilité d’administration des médicaments chez les
petits animaux (comprimés, gélules, sirops…) et les grands animaux (aliments
médicamenteux, additifs, …etc.).

Les inconvénients en revanche sont nombreux :

     - Certains composés sont dégradés au niveau de l’estomac par l’acidité
       importante (ce qui est gênant quand il s’agit de médicaments :
       pénicilline G, hormones naturelles,…etc.).

     - Certains médicaments forment des complexes insolubles             non
                                                                 ++    ++
       résorbables avec les cations divalents (tétracyclines – Ca ou Mg ) ce
       qui diminue leur biodisponibilité.

     - Tous les composés résorbés par la muqueuse digestive empruntent la
       veine porte, passent obligatoirement par le foie ou ils subissent l’action
       d’enzymes de biotransformation, ce processus en général diminue
       notablement la quantité de médicament actif et donc l’activité
       biologique. Ce processus est connu sous le nom de ‘‘first past effect’’
       = ‘‘effet de premier passage hépatique’’.

        Ceci n’est pas le cas pour la voie rectale, qui présente l’avantage d’acheminer
        directement dans la circulation générale le médicament en évitant l’effet de premier
        passage hépatique par la traversée initiale du foie.
29

               La voie rectale peut être intéressante chez les carnivores domestiques en cas
               d'urgence du fait de sa facilité d'accès, notamment pour l’administration
               d’anticonvulsivants tels que le diazépam lors d'intoxication par des convulsivants.

          - En toxicologie la voie digestive constitue la voie la plus fréquemment
            empruntée dans laquelle on observe des fois une activation des
            toxiques ingérés (réduction des nitrates en nitrites, plus toxiques).

        Facteurs de variation de la résorption digestive :

          - La résorption digestive est meilleure dans un tractus digestif vide qu’en
            présence d’aliments qui diluent le composé.

          - Les aliments gras facilitent la résorption des médicaments mais aussi
            des toxiques (ne jamais administrer de lait ou d’huile lors d’intoxication
            par la voie orale).

          - L’accélération du transit intestinal lors de diarrhée est défavorable à la
            résorption.

2.   LA RESORPTION TRANSCUTANEE ET MUQUEUSE

        Voie Transcutanée

     La peau constitue une barrière naturelle protectrice constituée du derme et de
     l’épiderme lesqquels sont formés par un ensemble de couches cellulaires,
     l’épiderme comprend une couche cornée de cellules mortes à l’extérieur très
     peu perméable.

     D’une manière générale, l’application cutanée a pour but un effet purement
     local. En effet, la structure de la peau est telle que seules les substances très
     liposolubles peuvent franchir la barrière cutanée.

     Chez l’animal, la résorption peut se faire au niveau de l’appareil pilo-sébacé très
     développé (2000 follicules pileux /cm²).

     En dehors de la liposolubilité       du principe actif,     la résorption transcutanée
     dépend d’autres facteurs :

          o Nature des excipients : le rôle des excipients est très important .Ce
            sont les excipients huileux qui favorisent la pénétration. Le diméthyl-
            sulfoxyde (DMSO), entraine une augmentation considérable de la
            résorption, il constitue l’excipient des formes « pour on » et « spot on »
            qui permettent le traitement de parasitoses internes en versant le
            produit le long de la région dorsolombaire de l’animal.
            Ainsi, le traitement des strongyloses digestives et pulmonaires et de
            l’hypodermose bovine s’effectuent par cette méthode.
Vous pouvez aussi lire