Royaume-Uni - Panorama des biotechnologies au Royaume-Uni - Janvier-Février 2011
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Ambassade de France au Royaume-Uni Service Science et Technologie Royaume-Uni Science & Technologie au Janvier-Février 2011 Panorama des biotechnologies au Royaume-Uni
Panorama des biotechnologies au Royaume-Uni Dossier Ayant bénéficié d’une stratégie gouvernementale forte en matière de R&D pen- dant les années Blair et de la confiance des marchés d’avant 2008, les entreprises de biotechnologies médicales se sont développées autour des centres universi- taires d’excellence qui leur fournissaient le combustible nécessaire à l’élaboration de produits innovants. Le gouvernement a su mettre en place de nombreuses mesures incitatives, notamment au niveau fiscal, venant faciliter et accompagner l’essor de ce secteur économiquement très prometteur. Les régions du Sud-est et du Nord-ouest de l’Angleterre et l’Écosse se sont rapidement imposées comme les régions fortes du domaine et ont drainé la plupart des entreprises britan- niques. Si les biotechnologies médicales ont été la priorité des gouvernements depuis les années 90 (2ème place mondiale du marché derrière les États-Unis), les biotechnologies industrielles ont été longtemps délaissées (moins de 1 % du marché international) et sont encore trop peu compétitives économiquement par rapport au pétrole. Le Royaume-Uni se concentre donc sur quelques niches d’ex- cellence à forte valeur ajoutée. Malgré la crise de 2008, le gouvernement britan- nique s’attèle à maintenir son rang en créant les mesures incitatives les plus adaptées possibles aux nouveaux modèles économiques en train de naître dans le secteur des biotechnologies. Introduction quelques chiffres, ce secteur britannique compte 4 000 sociétés totalisant un chiffre d’affaires de 19 Md£ et L’industrie des sciences du vivant est indispensable employant 93 500 personnes, comparé à des estima- à la prospérité économique et la croissance du Royau- tions mondiales comprises entre 200 et 220 Md£. Il a me-Uni. Ses caractéristiques de haute technologie et montré sa force au cours des deux dernières années de d’innovation permettront notamment de répondre aux récession, avec une faible diminution du nombre de grands défis de notre temps tels que le vieillissement sociétés actives et un accroissement du nombre d’em- de la population, grâce au développement de tests de ployés de près de 3 %, notamment dans les biotechno- diagnostics avancés et de nouveaux médicaments plus logies industrielles. adaptés. Le secteur pharmaceutique traditionnel est en Vous trouverez dans ce dossier une brève définition mouvance et son utilisation des biotechnologies est en des différentes biotechnologies et leur place au Royau- constante progression depuis plus de dix ans, toujours me-Uni, l’identification des parties prenantes jouant un avec pour objectif d’accélérer les découvertes, les déve- rôle incontournable dans ce secteur, la place de la R&D loppements et les essais de nouveaux produits médica- en biotechnologie au sein d’un secteur de R&D plus menteux tels que ceux contenant des anticorps, de large, et les mesures et rouages publics mis en œuvre l’ADN ou encore les cellules souches. Ce dossier, qui pour encourager et renforcer ce secteur ainsi que les cherche à établir un état de l’art du secteur des biotech- collaborations. Enfin, une discussion d’ordre général nologies au Royaume-Uni, inclut donc la partie de l’in- vient nuancer les discours parfois très optimistes des dustrie pharmaceutique utilisant ces dernières. En pouvoirs publics britanniques. 2 Science et Technologie au Royaume-Uni Janvier-Février 2011 www.ambascience.co.uk
Dossier 1. Les biotechnologies approvisionneurs spécialisés par exemple en génomi- que ou protéomique. Parmi ces sociétés de soutien, on Les biotechnologies résultent du rapprochement retrouve trois domaines de pointe : traitements médi- entre la biologie et un ensemble de techniques récentes camenteux (dont les thérapies cellulaires et géniques), incluant l'informatique, la microbiologie, la biophysi- vaccins et diagnostics. que, la génétique, etc. On retrouve la biotechnologie traditionnelle incluant les processus de fermentation 1.1.2 Les biotechnologies blanches connus empiriquement depuis plusieurs milliers d’an- Les biotechnologies blanches (ou génie biologique) nées (formation des alcools, du pain, des laitages ou « consistent à appliquer des procédés naturels à la produc- des vinaigres) et les biotechnologies contemporaines tion industrielle ». Leurs principales applications in- qui apparaissent à la fin du XXe siècle suite aux progrès cluent la biocatalyse, la fermentation, la valorisation de effectués en microbiologie, nanotechnologies et bio- la biomasse, etc. et leur utilisation s’insère dans les do- informatique, et sont fondées essentiellement sur la maines de l’agroalimentaire, de la chimie, ou de la transgenèse. bioénergie. Ce dernier secteur est le moins développé à l’échelle mondiale mais, tout comme ses voisins euro- 1.1 La classification des biotechnologies péens, le Royaume-Uni commence à s’intéresser de Au Royaume-Uni, les biotechnologies sont généra- très près à ces technologies et à mettre en place des lement réparties en trois catégories principales, rou- mesures et des programmes de recherche incitatifs. ges, blanches et vertes, ces couleurs référant à des Dans ce dossier, les entreprises spécialisées dans la technologies d’intérêts « médical ou biomédical », prestation de services comme, par exemple, une exper- « industriel », et « agricole ou agroalimentaire », res- tise juridique ou en management, ont également été pectivement. Cette classification reste toutefois un ou- inclues. til de travail d’autant plus flexible que de nouvelles ramifications émergent : les biotechnologies bleues 1.1.3 Les biotechnologies vertes exploitent la matière première biologique marine et les La biotechnologie verte est à l’origine de la création biotechnologies jaunes présentent des applications d’organismes génétiquement modifiés (OGM) à voca- environnementales. Notons une distinction importante tion agricole. D’autres applications incluent la fabrica- entre les groupes rouge, blanc et vert qui se définissent tion de vaccins pour les animaux, la sélection de plan- par l’intérêt des produits finals développés et les grou- tes utilisables par l’industrie ou la lutte contre des pa- pes bleu et jaune, définis par l’origine de la matière rasites (stérilisation massive d’insectes nuisibles pour première. les cultures via une modification de leur métabolisme). Le secteur des biotechnologies montre cependant La biotechnologie verte est essentielle pour le dévelop- un visage transversal et les technologies et les services pement de la biotechnologie blanche dont les procédés développés ou utilisés au sein de marchés spécifiques sont extrêmement proches. se recouvrent. Dans le reste du dossier, le terme de biotechnologies industrielles (indiquées comme telles 1.2 De l’industrie pharmaceutique au secteur des ou sous l’appellation « IB ») inclura donc ces trois biotechnologies groupes de couleurs, et ces groupes pourront égale- Le secteur des biotechnologies modernes continue ment être mentionnés de manière séparée. d’évoluer, les disciplines sur lesquelles il s’appuie pré- sentant chaque jour de nouvelles avancées technologi- 1.1.1 Les technologies d’intérêt médical ou biomédi- ques et de connaissances. Si les politiques courantes cal (ou rouges) fondent de grands espoirs sur l’avènement de ce sec- On distingue dans cette catégorie, les technologies teur en pleine expansion en termes économiques et médicales, dont les quatre segments de marché les d’innovation, la situation actuelle montre qu’il ne plus forts correspondent aux technologies à usage uni- contribue que pour moins de 1 % du PIB dans les pays que, aux technologies de diagnostic in-vitro, aux appa- membres de l’OCDE. L'Union Européenne (UE), quant reils orthopédiques et à la gestion des soins de blessu- à elle, investit 1,9 Md€ dans la création d'une bioéco- res, des technologies biomédicales dont les produits nomie européenne au titre du thème « Alimentation, s’annoncent comme les successeurs des produits chi- agriculture et pêche, et biotechnologie » inclus dans le miques mis sur le marché par l’industrie pharmaceuti- 7ème programme cadre de recherche et développement que malgré des périodes de développement supérieu- européen (PCRD), soit 3,6 % du budget total. res (10-20 ans). Parmi les technologies biomédicales, Historiquement, l’industrie pharmaceutique a gé- citons par exemple l’utilisation des cellules souches néré des revenus importants grâce a quelques grands pour le développement de produits médicinaux ou de succès commerciaux (blockbusters), dont les brevets thérapies visant à combattre les maladies chroniques arrivent à expiration. La situation, connue sous le ter- telles les cancers, les pathologies du système nerveux me de « patent cliff » (littéralement « falaise des bre- central ou encore des infections. Le plus gros segment vets »), explique les mouvances du marché actuel où de marché parmi les technologies biomédicales est l’on observe la mise en place de mécanismes de fusion- composé des sociétés de services spécialisés incluant acquisition et l’importance croissante des biotechnolo- les Contract Research Organisations, les fabricants ou les gies. www.ambascience.co.uk Science et Technologie au Royaume-Uni Janvier-Février 2011 3
Dossier L’émergence des IB, bien que différente, repose nétiques, incluant les OGM, et est impliqué dans la principalement sur la nécessité des États de s’affran- politique de minimisation de l’empreinte carbone. Il chir des énergies fossiles, d’où un engouement récent est l’interlocuteur britannique pour les questions de vers la transformation de matières premières renouve- biotechnologie dans le cadre du 7ème PCRD. lables come la biomasse. Le Department of Energy and Climate Change (DECC, Ministère de l’énergie et du changement cli- 2. Les parties prenantes matique) a pour mission la lutte contre le change- ment climatique. 2.1 L’Union Européenne Au niveau européen, notons quatre directives: i) 2.2.2 Les organismes publics non gouvernementaux 98/44/CE concerne la protection juridique des inven- Les conseils de recherche britanniques : le plus im- tions biotechnologiques ; ii) 98/81/EC détermine les portant dans le domaine des biotechnologies est, conditions dans lesquelles des expériences en milieu comme son nom l’indique, le Biotechnological and Bio- confiné sur des OGM peuvent être effectuées ; iii) logical Sciences Research Council (BBSRC, Conseil de 2001/18/EC réglemente la dissémination volontaire recherche pour les sciences biologiques et biotechno- d’organismes génétiquement modifiés, incluant les logiques), qui a dépensé 108,5 M£ (35 % de son bud- cultures en plein champs ; iv) 86/609/EEC, mise à jour get global) sur l’année fiscale 2008-09, pour la recher- en 2009, réglemente l’utilisation des animaux pour la che dans le secteur des biotechnologies, dont 26 M£ recherche. Une cinquième, proposant aux États Mem- dans le développement des biotechnologies indus- bres d’être souverains en termes de prise de décision trielles (en étroite collaboration avec l’Engineering eu égard à la culture d’OGM à des fins industrielles ou and Physical Sciences Research Council (EPSRC, Conseil alimentaires, parmi la liste des OGM autorisés par pour la recherche en sciences de l'ingénieur et scien- l’UE, est actuellement à l’étude. ces physiques)) ; pour le Medical Research Council Au-delà des textes régulateurs, il existe deux orga- (MRC, Conseil de recherche pour les sciences médi- nismes européens dont la tâche consiste à maintenir la cales), équivalent britannique de l’Inserm, les bio- sûreté et la sécurité des citoyens, que nous ne ferons technologies constituent un outil fréquent des re- que citer : la European Food Safety Authority (Autorité cherches financées. Les investissements effectués européenne de sécurité des aliments) et la European dans ce secteur ne constituent cependant pas une Medicines Agency (Agence européenne des médica- ligne budgétaire particulière et il n’a donc pas été ments). Dans le domaine des biotechnologies, la première feuille de route européenne s’étalait sur la période 2002-10, et suivait une stratégie visant à faire de l’Eu- rope le leader dans ce domaine, et à atteindre les objec- tifs de Lisbonne en termes d’emplois et de croissance. Enfin, l’étude Bio4eu, menée par l’European Joint Re- search Center (Centre européen commun de recherche), a pour objectif d’examiner les conséquences économi- ques, sociales et environnementales des biotechnolo- gies. 2.2 Les pouvoirs publics britanniques Depuis 1997 et l’accession de Tony Blair au pou- voir, le soutien au développement des biotechnologies est devenu un leitmotiv dans les discours des gouver- nements (travailliste et de coalition) abordant l’avenir de l’innovation britannique. 2.2.1 Les ministères Le Department of Business Innovation and Skills (BIS, Ministère des entreprises, de l’innovation et des compétences) finance la recherche publique au sein des universités et centres de recherche d’une part, et une recherche effectuée plus en aval et davantage (a) orientée vers le secteur privé, d’autre part. Le Department for Environment, Food and Rural Affairs (DEFRA, Ministère pour l’environnement, l’alimentation et les affaires rurales) est chargé de la politique nationale concernant les modifications gé- 4 Science et Technologie au Royaume-Uni Janvier-Février 2011 www.ambascience.co.uk
Dossier possible de chiffrer précisément son engagement ness Angels. En 2008, le NESTA dépensait 50 M£ (soit dans ce domaine. Enfin, le Natural Environment re- 12 % de son budget global) destinés à des startups search Council (NERC, Conseil de recherche pour spécialisées en sciences du vivant, high-tech et bio- l’environnement naturel) finance, au sein de thémati- technologie. ques larges, des recherches en biotechnologies ayant La Health Protection Agency (HPA, Agence de pro- trait à l’environnement. tection de la santé) a pour mission de sensibiliser et Le Technology Strategy Board (TSB, Comité stratégi- d’informer les citoyens britanniques, les profession- que pour la technologie), dont la mission consiste à nels de la santé et les dirigeants politiques sur les valoriser l’innovation, investit dans une large gam- maladies infectieuses et les risques environnemen- me de projets et programmes détaillés plus loin. taux. Elle finance par ailleurs des travaux de recher- Dans le secteur des biotechnologies, notons l’existen- che externes et effectue des travaux de recherche en ce des trois réseaux thématiques de transfert de interne. Notons par exemple que la HPA est à l’origi- connaissances (Knowledge Transfer Network, voir ne de la commercialisation de plusieurs produits §5.2.3), HealthTech and Medicines ; Biosciences: Agri- comme Dysport® (produit similaire au Botox®) ou culture, Food and Industrial Biosciences sectors ; et Che- encore un vaccin contre la grippe pandémique. mistry Innovation. Le UK Trade and Investment (UKTI, équivalent de 2.3 Les regions dévoluées UbiFrance et Invest In France) est sous la double tutel- Chaque région britannique (Angleterre, Écosse, le du BIS et du Foreign Commonwealth Office Pays de Galle et Irlande du Nord) est souveraine en (Ministère des affaires étrangères). Ses actions visent termes de stratégies, initiatives et réglementation dans à démontrer et faire connaître l’excellence britanni- un certain nombre de secteurs, en particulier celui de que sur le territoire et à l’étranger. l’enseignement supérieur et de la recherche. Chacune Le National Endowment for Science, Technology and possède un organisme de valorisation chargé de pro- the Arts (NESTA, Fondation nationale pour la scien- mouvoir leurs entreprises à l’étranger et d’attirer les ce, la technologie et les arts) promeut l’innovation en entreprises étrangères sur leur territoire. aidant les jeunes entreprises par des financements L’Angleterre : les Regional Departmental Agencies lors des phases précoces de développement, en colla- (RDA, Agences régionales de développement), au boration avec les associations britanniques de capital nombre de neuf, ont pour objectif de consolider l’é- -risque (British Venture Capital Association) et de Busi- conomie locale en dynamisant le tissu industriel et (b) (c) Fig. 1 : Répartition des universités et des centres de recher- che en biotechnologies rouges (a), industrielles (b), et su- perposition des deux (c). Crédits : SST www.ambascience.co.uk Science et Technologie au Royaume-Uni Janvier-Février 2011 5
Dossier les services. Elles travaillent pour cela en étroite col- la BioIndustry Association (BIA, Association pour les laboration avec l’ensemble des acteurs locaux et sont bioindustries), regroupe les industriels du secteur à donc impliquées dans de nombreux programmes et l’échelon national. Elle rassemble plus de 300 mem- dans la création de clusters dans le secteur des bio- bres, tous, à une exception près, impliqués dans le technologies. Les RDA des régions Nord de l’Angle- secteur rouge. La principale action du BIA est l’orga- terre s’investissent davantage dans la promotion des nisation d’événements pour permettre aux membres biotechnologies industrielles que ne le sont des ré- de l’association de pouvoir se rencontrer ; gions comme l’Écosse et le Sud de l’Angleterre, plus l’Association of the British Pharmaceutical Industry impliquées dans les biotechnologies rouges. Dans le (ABPI, Association de l’industrie pharmaceutique cadre de la révision générale des politiques publi- britannique) représente plus de 75 entreprises au ques, les RDA devraient être remplacées à l’horizon Royaume-Uni ; 2012 par des Local Enterprise Partnerships (LEP, Parte- la Chemical Industries Association (CIA, Association nariats d’entreprises locales), dont les contours sont pour l’industrie chimique) représente les industriels encore très flous, ce qui inquiète de nombreux ac- du secteur et les encourage à développer des activi- teurs publics régionaux et locaux. tés utilisant des produits végétaux ; L’Écosse : l’administration écossaise (Scottish Executi- l’ABCinformation a un rôle informatif auprès du gou- ve) finance de nombreux programmes au sein des vernement et de la population britannique lors des universités et des entreprises de biotechnologies, qui débats publics. Elle rassemble les acteurs du secteur seront développés dans les chapitres suivants. L’É- privé sur le sujet des OGM. cosse est très dynamique en sciences du vivant et possède une forte concentration d’organismes opéra- 2.6 Le secteur des charities (fondations ou associa- teurs de recherche d’excellence sur son territoire. tions à but non lucratif) Le Pays de Galles : l’administration galloise (Welsh Très ancrées dans le paysage scientifique britanni- Assembly Government) a également mis en place des que et en particulier dans le secteur de la recherche dispositifs incitatifs pour stimuler l’économie locale médicale, les charities contribuent de manière significa- et travaille en collaboration sur de nombreux pro- tive au financement de la recherche. Parmi les quel- grammes avec le DEFRA et le BIS. Région moins dé- ques 125 charities, notons les deux plus importantes en veloppée en termes de tissu industriel dans le secteur termes de dépenses pour la recherche médicale : des sciences du vivant, il reste déterminant dans l’é- le Wellcome Trust est largement impliqué dans de conomie du pays. nombreux programmes et initiatives mis en œuvre L’Irlande du Nord : bien que le tissu industriel soit au niveau national. Son histoire, tout autant que sa peu développé aujourd’hui dans cette région, le stratégie actuelle, en font un acteur déterminant dans gouvernement nord-irlandais (Northern Ireland Exe- le secteur des biotechnologies. À titre d’exemple, il a cutive) a fait des sciences du vivant, incluant les bio- signé un accord avec le Ministère indien des biotech- technologies médicales, une priorité. nologies où les deux acteurs se sont engagés à finan- cer la recherche en biotechnologie à hauteur de 22,5 2.4 Les sociétés savantes M£ chacun pour développer des médicaments à prix La Royal Society (RS, Académie des sciences), la raisonnables ; Royal Society of Chemistry (RSC, Académie de chimie) et Cancer Research UK (CRUK), dont le budget de re- l’Academy of Engineering (RAEng, Académie des Scien- cherche annuel approche 350 M£ provenant de legs ces de l’Ingénieur), sont les trois sociétés savantes bri- et dons privés, se focalise comme son nom l’indique tanniques impliquées dans le domaine des biotechno- sur la recherche contre le cancer. À ce titre, il finance logies. La RSC a notamment formé, en 1987, un groupe des projets de biotechnologies. Les dépenses spécifi- spécifique qui travaille au développement industriel et ques à ce secteur ne sont toutefois pas connues. académique de la biotechnologie. L’implication de la RAEng est, quant à elle, moindre, mais elle suit de très 2.7 Le secteur universitaire près la biologie synthétique. 2.7.1 Une tradition d’excellence 2.5 Le secteur associatif Malgré une légère baisse dans le classement de Il existe des associations d’entreprises spécialisées Shanghai 2010 par rapport à 2009, l’excellence des uni- en biotechnologie aux niveaux européen et national, versités britanniques reste d’actualité : 11 institutions dont les missions sont de représenter et de défendre britanniques parmi les 100 meilleures mondiales (dont les intérêts de leurs membres. Elles ont souvent un fort Cambridge et Oxford en 5ème et 10ème positions). À no- pouvoir de lobbying. Les associations notables sont : ter également que 51 scientifiques britanniques ou ba- la European Association for Bioindustries (EuropaBio, sés au Royaume-Uni ont reçu un Prix Nobel. Association européenne des biotechnologies), qui Le secteur de l’enseignement supérieur est l’un des accompagne 1 800 entreprises, organise des événe- secteurs clefs de l’économie britannique avec des reve- ments entre acteurs européens et accroît la communi- nus s’élevant à 25,4 Md£ en 2008-09, et étant à l’origine cation du secteur auprès des citoyens, des milieux de recettes de 59 Md£ par an. En particulier, le domai- financiers et des institutions européennes ; ne des sciences du vivant est le véritable fer de lance 6 Science et Technologie au Royaume-Uni Janvier-Février 2011 www.ambascience.co.uk
Dossier de l’innovation britannique, et les budgets, politiques 2.8.1 Les biotechnologies rouges et stratégies ont été la priorité britannique de cette der- Quelques chiffres illustrent l’important développe- nière décennie. ment du secteur des biotechnologies rouges dans le monde : 50 % des médicaments nouvellement dévelop- 2.7.2 Répartition des pôles universitaires d’excel- pés font appel aux biotechnologies et 40 % des pro- lence en biotechnologies duits brevetés sont des produits biotechnologiques. En raison de la transversalité du domaine des bio- Par ailleurs, si le marché mondial des biotechnologies technologies, l’écrasante majorité des universités bri- ne s’élève aujourd’hui qu’à 45-48 Md£, une croissance tanniques enseignent et effectuent des recherches s’y de 20 % a été enregistrée entre 2002 et 2007 (soit le rapportant. Leur répartition géographique varie cepen- double de celle du marché pharmaceutique). dant en fonction des types de biotechnologies, comme Le Royaume-Uni possède le deuxième marché le montre les figures 1a et 1b, qui illustrent les centres mondial en termes de biotechnologies médicales (9 % d’excellence et les universités les plus actives en bio- en valeur), en deuxième position derrière les États- technologies rouges et industrielles, respectivement. À Unis (65 % du marché), et la place de leader européen noter que la taille des points représente les institutions avec 30 % du chiffre d’affaires, 25 % des emplois et les plus actives dans leurs domaines respectifs, et n’est 35 % des entreprises du secteur. On estime à plus de pas révélatrice des dépenses effectuées par celles-ci. 4 000 le nombre d’entreprises britanniques de biotech- nologies médicales, services inclus. Elles emploient 2.8 Le secteur privé environ 91 000 personnes et dégagent un chiffre d’af- Dans un rapport commun publié en 2009, « Strength faires cumulé de 18,6 Md£. La plupart sont des jeunes and Opportunity », le BIS, les RDA, UKTI et le Depart- PME, avec 60 % et 90 % d’entre elles ayant moins de 10 ment of Heath (DH, Ministère de la santé) dressent le et moins de 50 employés, respectivement. La prédomi- paysage des biotechnologies au Royaume-Uni. Les nance des PME dans ce secteur s’explique en partie par grandes sociétés pharmaceutiques produisant des mé- la jeunesse du secteur (17 % et 59 % des entreprises ont dicaments à partir de petites molécules n’y sont pas moins de 3 et 10 ans, respectivement), mais aussi du comptabilisées. Leurs divisions utilisant la biotechno- fait que la plupart des startups font appel à des entre- logie pour leurs produits ont cependant été inclues. prises extérieures pour développer leurs produits, li- Comme l’illustre la figure 2a,b, il existe un fort désé- mitant ainsi le nombre d’employés. La figure 3 illustre quilibre économique et géographique au sein du sec- la répartition régionale du chiffre d’affaires, du nom- teur privé entre les biotechnologies rouges et les autres bre d’entreprises et du nombre d’employés dans le catégories de biotechnologies. secteur des biotechnologies rouges. (a) (b) Fig. 2 : Répartition des entreprises de biotechnologie rouges (a) et industrielles (b) au Royaume-Uni Crédits : SST www.ambascience.co.uk Science et Technologie au Royaume-Uni Janvier-Février 2011 7
Dossier Les points forts des biotechnologies rouges Les régions fortes des biotechnologies rouges Trois segments dominent le marché des biotechno- Trois régions britanniques totalisent 79 % du chiffre logies rouges au Royaume-Uni, services spécialisés d’affaires des entreprises de biotechnologies rouges, à exclus. Il s’agit des petites molécules, des anticorps et savoir l’Écosse, le Sud-est (Cambridge, Oxford, Sou- des protéines thérapeutiques, qui, à eux seuls, repré- thampton) et le Nord-ouest (Manchester, Liverpool) de sentent 53 % du chiffre d’affaire total et emploient l’Angleterre. L’addition de la région de Londres fait 44 % de la main d’œuvre. Le Royaume-Uni est à l’ori- atteindre 87 % du chiffre d’affaires global britannique, gine de 20 % des produits médicamenteux sortant des 73 % des emplois et 74 % des entreprises du secteur. compagnies de biotechnologies à travers l’Europe. L’Écosse se démarque particulièrement en se focali- Les petites molécules, composés organiques dont le sant sur les cellules souches, les diagnostics médicaux poids moléculaire ne dépasse pas 800 kDa et présen- et le développement de phases cliniques. Une préva- tant des fonctions biologiques variées, peuvent être lence forte des maladies chroniques telles que le diabè- des molécules ayant une fonction dans la signalisation te, les cancers ou les maladies cardio-vasculaires, un cellulaire, être utilisées comme outils de biologie molé- suivi centralisé de l’historique de chaque patient et une culaire ou encore comme agent médicamenteux contre population stable génétiquement en font une région une pathologie donnée (par exemple les statines (anti- particulièrement intéressante pour mener à bien des cholestérolémiques) ou les anti-inflammatoires). Le essais cliniques. Par ailleurs, si l’Écosse recense une plus souvent, ces petites molécules se lient avec de importante proportion du nombre d’entreprises de hautes affinités à des biopolymères tels que protéines, biotechnologies au Royaume-Uni, cette proportion acides nucléiques ou polysaccharides, et par là-même n’est pas reflétée en termes de chiffre d’affaires car un modifient l’activité ou la fonction de ceux-ci. Leur peti- certain nombre de ces sociétés ont des difficultés à se te taille leur permet de diffuser à travers les membra- développer. Enfin, les investissements privés sont rela- nes et d’infiltrer rapidement les milieux intracellulai- tivement faibles dans la région, ce qui pourrait s’expli- res. quer par la grande distance géographique avec les Ven- Les protéines thérapeutiques, par opposition, sont ture Capitalists (VC, Capitaux risqueurs) et Business développées et fabriquées par les compagnies de bio- Angels, plus nombreux dans la région du Sud-est de technologies, en utilisant la machinerie cellulaire des l’Angleterre et l’absence de géants pharmaceutiques cellules vivantes avant d’être purifiées. Il en existe plus sur son territoire. de 200 commercialisées, et plusieurs centaines sont en cours d’essais cliniques. Ces protéines thérapeutiques 2.8.2 Les biotechnologies industrielles ciblent directement les mécanismes de la maladie à Comme de nombreux autres gouvernements à tra- traiter. vers le monde, le gouvernement britannique cherche Bien que le marché des petites molécules, souvent des alternatives aux énergies fossiles et le développe- synthétisées par voies chimiques par l’industrie tradi- ment des agrocarburants est devenu une priorité. Avec tionnelle, prédomine sur celui des protéines thérapeu- un chiffre d’affaires de 308 M£, le Royaume-Uni repré- tiques, ce dernier est le plus dynamique avec une sente moins de 1 % du marché mondial. hausse de 17 % des ventes mondiales Par ailleurs, la La grande proportion de sociétés de plus de 10 ans majorité des investissements est dirigée vers le marché (41 %) s’explique en partie par une prise en considéra- des petites molécules, celui où le nombre d’entreprises tion du secteur assez tardive, malgré l’existence de est le plus important. certains procédés connus depuis longtemps dans l’in- Chiffre d’affaires Nombre d’employés Nombre de sociétés Fig. 3 : Répartition régionale du nombre d'employés, du chiffre d'affaires et du nombre d'entreprises en biotechnologies rouges Source : « Strength and opportunity », BIS, 2010 8 Science et Technologie au Royaume-Uni Janvier-Février 2011 www.ambascience.co.uk
Dossier Chiffre d’affaires Nombre d’employés Nombre de sociétés Fig. 4 : Répartition régionale du chiffre d'affaires, du nombre d'employés et du nombre d'entreprises en biotechnologies blanches Source : « Strength and opportunity », BIS, 2010 dustrie pharmaceutique. C’est la nécessité de dévelop- dans quatre régions fortes, à savoir le Pays de Galles, per une économie pauvre en carbone qui a récemment le Nord-est (Newcastle et Teesside), le Nord-ouest encouragé le secteur des biotechnologies blanches à se (Manchester et Liverpool) et le Sud-est (Cambridge) de développer, parmi lesquelles on compte également des l’Angleterre. La place prépondérante de Londres dans entreprises rouges ayant diversifié leur activité. Il exis- le chiffre d’affaires est due à quelques grosses entrepri- te actuellement 64 entreprises sur l’ensemble du terri- ses mais ne traduit ni une spécialisation ni un dyna- toire britannique, dont 63 PME, qui emploient 1 600 misme particulier. personnes. Parmi elles, 43 ont des activités de R&D, et 32 parmi ces dernières se chargent de l’ensemble des Les entreprises de biotechnologies bleues étapes de fabrication. Les grandes entreprises, princi- En 2005, les résultats d’une étude Foresight réalisée palement des compagnies de chimie et d’agroalimen- sur les biotechnologies marines ont sensibilisé l’indus- taire, qui ont une activité en rapport à la biotechnolo- trie chimique sur les possibilités qu’elles offrent. Si le gie industrielle mais secondaire par rapport à leur chiffre d’affaires de ce secteur au Royaume-Uni reste fond de commerce, n’ont pas été comptabilisées. La près de 20 fois moins important que celui des biotech- figure 4 illustre la répartition régionale du chiffre d’af- nologies médicales, ce secteur croît progressivement faires, du nombre d’entreprises et du nombre d’em- (5 % par an) au sein du marché mondial de détection ployés dans le secteur des biotechnologies rouges. des pollutions diverses et pèse près de 5 Md$. Les ré- gions britanniques fortes dans ce secteur sont l’Écosse Les entreprises de biotechnologies blanches et le Sud-ouest de l’Angleterre. Le secteur des biotechnologies blanches bénéficie Les biotechnologies marines, n’étant pas définies des mêmes infrastructures que les biotechnologies mé- par le marché ou le type de technologie mais par l’ori- dicales et l’industrie chimique, ce qui a longtemps été gine de l’organisme utilisé, s’ancrent dans des marchés un obstacle à l’affirmation de sa singularité. En effet, variés. Le Royaume-Uni se concentre sur la mise au les entreprises en biotechnologies blanches recher- point de médicaments issus de molécules d’organis- chent, développent et fournissent les procédés et les mes marins, l’amélioration de l’aquaculture ou encore technologies pour les produits des compagnies phar- la mise en place de processus de détection de la pollu- maceutiques et ceux de l’industrie chimique. Les trois tion. segments de marché les plus importants sont : les pro- duits pharmaceutiques intermédiaires, les agrocarbu- Les entreprises de biotechnologies vertes rants et les fine and speciality chimiques (en particu- Les États-Unis sont les plus grands producteurs lier les biomatériaux, la fermentation et la biocatalyse). d’OGM avec 65 millions d’hectares (MHa) par an, sui- Ainsi, comme dans de nombreux autres secteurs in- vis de l’Argentine (20,1 MHa) et du Brésil (15,8 MHa). dustriels, le Royaume-Uni se concentre sur la produc- Comme en France, la culture des OGM sur le territoire tion de produits à forte valeur ajoutée (fine and speciali- britannique va à l’encontre de l’opinion publique, de la ty et intermédiaires pharmaceutiques), même si la pro- législation britannique, et des réglementations euro- duction d’agrocarburants reste non négligeable. péennes contraignantes. De ce fait, les biotechnologies Ces trois segments rassemblent à eux seuls 77 % du vertes ne participent que très faiblement à l’économie chiffre d’affaires total et 71 % des emplois, répartis britannique. www.ambascience.co.uk Science et Technologie au Royaume-Uni Janvier-Février 2011 9
Dossier Les grosses sociétés internationales, BASF, Monsan- leurs différentes étapes de développement proviennent to, Syngenta et Bayer Crop Science, sont implantées sur également d’un fort tissu de Business Angels, de prêts le territoire britannique mais aucune n’effectue de re- bancaires ou encore d’aides publiques. Les grandes cherches sur le territoire. entreprises pharmaceutiques investissent également dans les biotechnologies par l’intermédiaire de fonds 3. La R&D britannique en biotechnologies corporatifs, s’assurant une priorité sur les découvertes réalisées sous la forme de License in. 3.1 Quelques éléments de contexte de R&D britan- Le secteur pharmaceutique britannique domine nique l’ensemble des secteurs industriels européens en ter- Si la recherche britannique est considérée comme mes d’investissements étrangers attirés sur le territoire. l’une des plus productives au monde (7,9 % des articles Suite à la crise financière de 2008, 11 % des entreprises scientifiques mondiaux, et 11,8 % des citations à travers de biotechnologies dans le monde ont mis la clef sous le monde font référence à des travaux britanniques), les la porte, et, en Europe, près de 60 % des entreprises de dépenses en R&D des secteurs privé et public ne repré- biotechnologies ont diminué leur budget de R&D de sentaient en 2008 que 1,1 % et 0,7 % du PIB, respective- 2 % en moyenne, et ont connu la plus difficile levée de ment, la participation du secteur privé ayant chuté au VC en dix ans. Par ailleurs, les fonds levés ont égale- cours des dix dernières années (de 50 % à 47 %), en- ment été très inégalement reçus : 20 % des sociétés deçà de la moyenne des pays de l’OCDE (57 %). Par ayant touché 80 % des fonds alors que 20 autres pour- ailleurs, une caractéristique de la recherche privée bri- cent n’ont touché que 0,6 % des fonds totaux. Les par- tannique est que la part des financements étrangers est ties prenantes du secteur estiment que le temps de forte et s’élève à 23 %. Le gel, en valeur, des crédits pu- l’« easy money » est maintenant révolu, et que nous blics de la recherche civile durant les quatre prochaines sommes entrés dans celui du « new normal », où l’argent années à leur niveau actuel de 4,6 Md£, l’annonce par n’est pas plus rare mais est plus prudemment investit. le géant pharmaceutique Pfizer de fermer son site de R&D basé au Royaume-Uni et les difficultés économi- 3.4 Le cycle de financement d’une entreprise de ques du pays ne poussent pas à un optimisme fort de la biotechnologies part des acteurs de la R&D britannique. Le financement d’une entreprise de biotechnologies au Royaume-Uni comporte cinq étapes, décrites ci- 3.2 Présentation du secteur de la R&D en biotech- dessous et illustrées par la figure. 5. nologies Les secteurs pharmaceutiques et biotechnologiques 3.4.1 Pre Seed Funding (Fonds de pré-amorçage) sont souvent rassemblés sous la même dénomination, Les fonds de pré-amorçage (entre 50 000 et pharma/biotech, leurs recherches et thématiques étant 100 000 £), déterminants dans le processus de création très similaires et leurs interactions importantes. d’entreprise, proviennent le plus souvent de subven- En 2008, les entreprises de pharma/biotech oc- tions publiques, de love money (dons faits par la famille cupaient la première position en termes de dépenses de ou les amis) ou de charities. R&D des 1000 premières entreprises du Royaume-Uni (UK1000) avec un montant de 9,5 Md£ (+8,4 % par rap- 3.4.2 Seed Funding (Fonds d’amorçage) port à 2007). GlaxoSmithKline et Astrazeneca étaient Les fonds d’amorçage, compris entre 1 et 10 M£, 1ère et 2ème avec 3,7 et 3,5 Md£ dépensées, respective- proviennent de Business Angels, de love money, de sub- ment, devançant 134 autres pharma/biotech classées ventions publiques, de charities ou encore de VC spécia- dans le UK1000. Dans le G1000 en 2008, qui répertorie lisés. Ils permettent à l’entreprise de protéger sa pro- les 1000 premières entreprises mondiales en termes de priété intellectuelle, d’établir son business plan ou la dépenses de R&D, GlaxoSmithKline prenait la 21 ème preuve de concept. place. Concernant les brevets, le Royaume-Uni prenait en 3.4.3 Early Stage (Phase précoce) 2007 la 4ème place mondiale avec 4,2 % de brevets, de- Estimée à environ 10 M£, la phase précoce consiste à vant la France (4 %). Finalement, la proportion des mé- consolider les acquis obtenus : acquisition d’infrastruc- dicaments issus des biotechnologies a fortement aug- tures propres, intensification des recherches et élargis- menté, passant de 10 % à 40 % en 10 ans. sement de la propriété intellectuelle. Les principaux financeurs sollicités sont les VC, les venture funds des 3.3 Le financement de la R&D en biotechnologie entreprises pharmaceutiques, les hedge funds, les ban- Le Royaume-Uni, en 2008, levait 10 % des VC dispo- ques, les juniors stocks markets et les Business Angels. Il nibles dans la zone OCDE, faisant de lui le 2 ème bénéfi- s’agit d’une phase délicate car l’entreprise ne dégage ciaire derrière les États-Unis (49 % à eux seuls). L’in- toujours aucun revenu. fluence de Londres, 1ère place boursière européenne, et le fort tissu d’entreprises de biotechnologies dans le 3.4.4 Late Stage (Phase avancée) Sud-est de l’Angleterre sont deux bonnes raisons pour Dans la phase avancée, une entreprise possède un expliquer la suprématie du Royaume-Uni. Les finance- ou plusieurs produits dont le développement est pro- ments des entreprises de biotechnologies au cours de che de la commercialisation, cherche de nouveaux in- 10 Science et Technologie au Royaume-Uni Janvier-Février 2011 www.ambascience.co.uk
Dossier vestisseurs intéressés par ces produits presque matures, entre 20 et 40 % de la R&D des compagnies pharma- notamment en ouvrant son capital sur les marchés euro- ceutiques est sous-traitée par les entreprises de bio- péen et mondial. Cette phase est également le témoin technologie. des phénomènes d’alliances et de fusions, les droits À contrario, on recense deux contraintes : d’exploitation des produits développés étant souvent en raison des longues périodes de développement vendus à des compagnies pharmaceutiques. d’un produit avant retour sur investissement (entre 10 et 20 ans) et des risques encourus pour les financeurs 3.4.5 Growth stage (Période de croissance) que le produit n’arrive jamais sur le marché, l’accès à La période de croissance voit l’entreprise vivre de des financements reste un facteur crucial ; ses propres revenus et se diversifier. Une telle entrepri- pour entrer sur le marché britannique, un produit se fait l’objet de fusion-acquisition si une autre entrepri- médicamenteux doit obtenir l’approbation de l’EMA, se de même taille souhaite faire des économies d’échelle de la Medicines and Healthcare products Regulatory ou éliminer un concurrent, ou si une plus grosse entre- Agency (MHRA, Agence britannique de réglementa- prise simplement achète l’entreprise plus petite pour tion des médicaments et des produits de santé) et du disposer de sa propriété intellectuelle. À titre d’exem- National Institute for Health and Clinical Excellence ple, Cambridge Antibody Technology et Neutec Phar- (NICE, Institut national pour la santé et l’excellence ma ont été achetées respectivement par AstraZeneca et clinique). Novartis, qui voulaient acquérir la technologie des anti- corps monoclonaux. 3.6 Catalyseurs et barrières pour les entreprises de biotechnologies industrielles 3.5 Catalyseurs et barrières pour les entreprises de Contrairement au secteur biomédical, l’équilibre biotechnologies rouges entre catalyseurs et barrières est inversé dans le secteur Notons trois catalyseurs majeurs dans le secteur des des biotechnologies industrielles : biotechnologies rouges : les entreprises spécialisées dans la biotechnologie in- le marché de la santé reste stable dans les pays déve- dustrielle se diversifient de manière plus naturelle et loppés, et est en pleine expansion dans les pays émer- s’inscrivent de ce fait dans plusieurs marchés distinc- gents ; ts, à l’inverse du secteur biomédical où les entreprises le marché britannique occupe une place intermédiaire se diversifient pour contrecarrer les risques financiers et stratégique au carrefour des marchés européen et liés à l’échec d’une de leurs technologies ; américain, avec un biais pour une accréditation FDA les biotechnologies industrielles apparaissent comme (Food & Drug Administration) plutôt que EMA ; une façon de participer à l’effort national de réduction Fig. 5 : Répartition des investisseurs aux stades de développement d’une entreprise de biotechnologie Source : Rapport INNOVA Europe, 2008 www.ambascience.co.uk Science et Technologie au Royaume-Uni Janvier-Février 2011 11
Dossier des émissions de CO2, en se présentant comme une 4.1.2 Les mesures de la Direction Générale des En- alternative aux énergies fossiles. treprises et des Industries À contrario, on recense quatre contraintes : La DGEI encourage le développement des entrepri- la prise en compte tardive des enjeux du secteur, en ses européennes qui essaient de diminuer leur impact termes de bénéfices apportés par ces nouvelles tech- sur l’environnement. Pour cela, deux mesures ont été nologies ; mises en place : i) le Small and Business Act (SBA) dont l’exploitation industrielle d’un nouveau procédé né- l’objectif est d’aider le développement des PME euro- cessite des infrastructures d’envergure, coûteuses, péennes, et ii) le plan d’action pour une production et permettant d’obtenir la preuve de concept du procé- une consommation durable, et la politique industrielle dé, ce qui ralentit fortement le développement des durable. procédés industriels. Ce problème semble s’atténuer aujourd’hui grâce au développement d’infrastructu- 4.2 Au plan national : les mesures fiscales res à utilisation unique ; Le Royaume-Uni a mis en place un environnement la plupart des activités de biotechnologies industriel- fiscal favorable pour faciliter le développement de l’in- les se trouvent au Nord de l’Angleterre, éloignées de novation et les investissements de R&D. Les pharma/ Londres. Ceci complique la recherche de financement, biotech bénéficient donc pleinement des mesures mi- les investisseurs préférant être proches physiquement ses en œuvre. des entreprises dans lesquelles ils investissent ; par contraste avec la politique incitative européenne 4.2.1 Le crédit impôt recherche de renforcement des énergies alternatives, il n’existe La déduction d’impôts dont bénéficient les entre- pas de politique d’envergure au niveau européen prises effectuant pour plus de 10 000 £ de R&D par an ayant pour objectif d’accroître la production de maté- dépend de la taille de celles-ci et atteint 175 % pour les riaux fabriqués à partir de la biomasse. PME et 130 % pour les autres, dans la limite de 7,5 M£ par projet de recherche. 4. Les mesures d’aide à la consolidation des secteurs high-tech 4.2.2 Les aides fiscales au capital risque Trois dispositifs d’incitation fiscale au Royaume- À notre connaissance, il n’existe aucune mesure ou Uni encouragent les investisseurs à financer des PME initiative visant à renforcer le secteur des biotechnolo- non-cotées en bourse pour un total de 250 M£ par an et gies de manière spécifique, que ce soit au plan euro- un plafond limité à 2 M£ par PME : péen ou national. En revanche, l’ensemble des mesures l’Enterprise Investment Scheme (Plan d’investissement mises en œuvre par les pouvoirs publics, qui visent les pour les entreprises) a pour objectif de soutenir les industries de haute technologie et celles à forte valeur investissements risqués dans les PME, en proposant ajoutée, peuvent inclure des sections spécifiques aux un allègement fiscal pour l’investisseur possédant entreprises de biotechnologies. moins de 30 % de la société (l’impôt sur ses plus- values sont réduits de 20 % du montant investi) ; 4.1 Au plan européen le Venture Capital Trust (Sociétés de capital risque) L’Union Européenne, en 2007, examinait à mi- permet à des individus, depuis 1995, d’investir dans parcours un plan d’action mis en place 5 ans plus tôt et des PME à fort potentiel de croissance et de devenir suggérait un renforcement du secteur, à savoir : i) pro- actionnaire du Trust. En contrepartie, ils profitent mouvoir la R&D en biotechnologie et sa valorisation d’avantages fiscaux sur les gains obtenus ; commerciale ; ii) faciliter l’accès au financement et l’ac- le Corporate Venturing Scheme (Plan de coopération croissement des relations entre entreprises et universi- inter-entreprises) implique le capital risque indus- tés ; iii) encourager les débats publics pour informer triel par les grandes entreprises, qui leur permet en les citoyens du bien fondé de ces nouvelles technolo- retour une réduction de 20 % sur les taxes issues de gies ; iv) s’assurer de la sûreté et de la durabilité des leurs investissements dans des startups indépendan- technologies liées à l’agriculture ; et v) s’assurer que le tes. cadre législatif ne soit pas une barrière à l’essor de ce secteur d’avenir. 4.2.3 L’Enterprise Management Incentive Cette mesure donne l’option aux salariés d’acheter 4.1.1 Le 7ème PCRD des actions de l’entreprise à hauteur annuelle de Le Royaume-Uni est, à l’heure actuelle, l’État qui a 120 000 £ par an et dans la limite de 3 M£ pour l’en- reçu le plus de fonds du 7ème PCRD. Les universités et semble des employés. centres de recherche publiques profitent le plus de ces fonds (60,8 %), contre seulement 15 % perçus par les 4.2.4 La Patent Box PME. Les biotechnologies industrielles sont considé- Pour répondre à une compétition internationale rées au sein d’un seul volet du 7ème PCRD, toujours plus difficile eu égard aux régimes de taxation « Alimentation, agriculture, pêche et biotechnologie ». favorables sur les revenus dérivant de la propriété in- À noter que les biotechnologies médicales entrent dans tellectuelle et des brevets, la taxe corporative sera ré- le volet « Santé ». duite à 10 % à partir d’avril 2013. Cette mesure vise à 12 Science et Technologie au Royaume-Uni Janvier-Février 2011 www.ambascience.co.uk
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