LAC DE REMORAY - Réserves Naturelles de France
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LAC DE REMORAY
Illustrations - Première de couverture : La RNN du lac de Remoray en été depuis le belvédère des 2 lacs. © Claude, 2012 - Quatrième de couverture (de haut en bas) : Femelle de Cheilosia illustrata sur apiacée. © Claude, 2010 Mâle de Merodon equestris sur Filipendula ulmaria. © Claude, 2012 Femelle de Parhelophilus consimilis sur Potentilla palustris. © Claude, 2012 Mâle de Chrysotoxum bicinctum sur Filipendula ulmaria. © Claude, 2012 Coordination Déterminations 1 . Réserve Naturelle Nationale du lac de Remoray – Jocelyn CLAUDE 1 Bruno TISSOT Maison de la Réserve, 28, rue de Mouthe -25 160 Labergement-Sainte-Marie, France Martin C. D SPEIGHT 5 2 Jocelyn CLAUDE . Université de Toulouse, INPT-ENSAT, UMR1248 Rédaction : AGIR, F-31 326 Castanet-Tolosan, France 3 Jocelyn CLAUDE . INRA, UMR1248 AGIR, F-31 326 Castanet-Tolosan, Crédits photographiques France Bruno TISSOT 1 (Sauf mention contraire) 4 Céline MAZUEZ 1 . Office National des Forêts, Unité Territoriale de Laurent BESCHET Labergement-Sainte-Marie, 28, rue de la Gare, 25 160 Gérard VIONNET 1 Jocelyn CLAUDE Labergement-Sainte-Marie, France Jean-Pierre SARTHOU 2,3 Céline MAZUEZ 5 . Dept. of Zoologie, Trinity college, Dublin 2, Irlande François CHANAL 4 Bruno TISSOT Citation bibliographique CLAUDE J., TISSOT B., MAZUEZ C., VIONNET G., SARTHOU J.P. & CHANAL F., 2012. Diagnostic écologique des principaux habitats de la Réserve Naturelle Nationale du lac de Remoray (25) par la méthode ‘‘Syrph the Net’’, Les amis de la réserve naturelle du lac de Remoray, Labergement-Sainte-Marie, 44 p et annexes. Ce document est destiné à une large diffusion, toute reproduction est libre en l’état.
« Alors quelle nécessité pour la Volucelle de se déguiser en Guêpe ? Gris ou bariolé, tout diptère est admis dans le terrier du moment qu'il est utile à la communauté. Le mimétisme de la Volucelle, l'un des plus concluants, dit-on, est, en somme, une puérilité. L'observation patiente, en continuel tête-à-tête avec les faits, n'en veut pas ; elle l'abandonne aux naturalistes de cabinet, trop enclins à voir le monde des bêtes à travers l'illusion des théories. » Souvenirs entomologiques, Jean-Henri FABRE, 1903, VIIIème Série, Chapitre 21 Volucelle zonée (Volucella zonaria)
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés Sommaire REMERCIEMENTS ....................................................................................... 1 RÉSUMÉ, ABSTRACT, ZUSAMMENFASSUNG & SAMENVATTING ............. 2 INTRODUCTION ........................................................................................... 4 1 MATERIEL & METHODES ...................................................................... 5 1.1 Les Diptères syrphidés : de fins bio-indicateurs.......................................... 5 1.2 Le protocole d’étude syrphes dans la Réserve Naturelle Nationale du lac de Remoray ..................................................................................................... 5 1.2.1 L’échantillonnage par tente Malaise .......................................................... 6 1.2.1.1 Fonctionnement et efficacité ........................................................................ 6 1.2.1.2 Installation des tentes Malaise ..................................................................... 6 1.2.1.3 Relevés .......................................................................................................... 6 1.2.1.4 Tris et déterminations ................................................................................... 6 1.2.2 Description et définition des habitats ......................................................... 7 1.2.3 L’analyse des données : la démarche innovante du système expert "Syrph the Net" .......................................................................................... 7 1.2.3.1 La base de données européenne StN ............................................................ 7 1.2.3.2 Liste des espèces prédites pour le site .......................................................... 8 1.2.3.3 Comparaison de la liste prédite avec la liste observée ................................ 9 1.3 La Réserve Naturelle Nationale du lac de Remoray : une mosaïque d’habitats complexes et imbriqués …......................................................... 10 1.4 … avec 210 espèces de syrphidés observées ............................................... 12 2 RESULTATS & ANALYSES .................................................................... 13 2.1 Valeur patrimoniale et enjeux de conservation ......................................... 13 2.2 Analyse écologique globale de la RNN ....................................................... 13 2.2.1 Espèces au rendez-vous et qualité écologique ......................................... 13 2.2.2 Espèces expliquées et qualité de la description ........................................ 14 2.2.3 Espèces inattendues, influences et représentativité .................................. 14 2.2.4 Espèces manquantes et micro-habitats ..................................................... 16 2012
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés 2.3 Recherche des dysfonctionnements à l’échelle du macro-habitat ........... 18 2.3.1 La forêt de la Grand’Côte ......................................................................... 19 2.3.1.1 La sapinière ................................................................................................ 20 2.3.1.2 La pessière calcicole .................................................................................. 21 2.3.1.3 La hêtraie humide ....................................................................................... 22 2.3.1.4 La tourbière boisée de la Grand’Côte ....................................................... 22 2.3.1.5 Conclusion sur la forêt et préconisations de gestion ................................. 23 2.3.2 Les prairies agricoles ................................................................................ 24 2.3.2.1 Des prairies amendées ............................................................................... 24 2.3.2.2 Simulation : vers des prairies extensives ................................................... 25 2.3.2.3 Bilan et préconisations de gestion.............................................................. 28 2.3.3 Les zones humides .................................................................................... 29 2.3.3.1 Le complexe sylvotourbeux du Crossat ...................................................... 29 2.3.3.2 La saulaie en zone tourbeuse ..................................................................... 31 2.3.3.3 Le marais de transition ............................................................................... 31 2.3.3.4 La saulaie en marais .................................................................................. 31 2.3.3.5 La magnocariçaie ....................................................................................... 32 2.3.3.6 Le bas marais alcalin ................................................................................. 33 2.3.3.7 Les phragmitaies ........................................................................................ 34 2.3.3.8 Les mégaphorbiaies .................................................................................... 34 2.3.3.9 Les prairies humides non amendées ........................................................... 34 2.3.3.10 Bilan et préconisations de gestion pour les zones humides ....................... 35 CONCLUSION ............................................................................................. 36 TABLE DES ILLUSTRATIONS ..................................................................... 37 BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................ 39 ANNEXES ................................................................................................... 44 Syrphe ceinturé mâle (Episyrphus balteatus) 2012
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés Remerciements Dans l’ordre alphabétique, nous tenons à remercier et à témoigner toute notre reconnaissance aux personnes suivantes, pour leurs apports enrichissants et l’intérêt qu’elles ont porté à notre étude : Eve AFONSO (Maître de conférences -Université de Franche-Comté) pour sa disponibilité et ses conseils nous ayant permis de nous concentrer sur l’essentiel. Yann BAILLET (Entomologiste -FLAVIA ADE) pour les riches échanges que nous avons eus et ses précieux conseils avisés de spécialiste. Rémi COLLAUD (Botaniste-phytosociologue -Société Botanique de Franche-Comté) pour ses précieux apports de connaissances phytosociologiques et ses corrections dans la partie sur les prairies agricoles. François CHANAL (ONF - Chef de l’Unité Territoriale de Labergement Sainte Marie) pour ses conseils éclairés et son intervention dans la partie forestière. Gabriel SAGET (Agent patrimonial ONF en charge de la gestion courante de la forêt domaniale de la Grand’Côte) pour sa fine connaissance de la forêt de la Gand’Côte et sa relecture de la partie forestière. Véronique SARTHOU (Agronome et écologue -SYRPHYS Agro-environnement) de nous avoir conseillés et encouragé, même dans les moments les plus difficiles, à poursuivre l’analyse. Sa pédagogie et ses ‘tuyaux’ nous ont permis de comprendre et de gagner en efficacité dans le maniement des fichiers StN. Jean-Pierre SARTHOU (Enseignant-chercheur -Agro-Toulouse/INRA) d’avoir posé la première pierre de ce rapport et de nous avoir soutenus tout au long de ces quatre années d’études. Tout particulièrement, merci au Docteur Martin C.D SPEIGHT pour ses excellents conseils, ses encouragements, sa disponibilité, ses intarissables connaissances de spécialiste européen sur les syrphes et sa patience malgré nos difficultés de compréhension linguistique. Merci à Joseph GARRIGUE et Laurent BESCHET pour leurs crédits photographiques. Aussi un grand merci à Cédric SCHMITT pour son aide graphique et à Mireille et Marie-Rose SELO pour leur traduction en anglais, allemand et néerlandais. Enfin, merci à tous les membres du Groupe Inter-réseaux Syrphes (GIS), animé par le dynamique Cédric VANAPPELGHEM, pour tous ces échanges fructueux que nous avons pu avoir lors de nos réunions afin de tester, améliorer et promouvoir la méthode StN en France. Femelle de Parhelophilus consimilis sur Potentilla palustris Femelle de Syritta pipiens sur Verbascum nigrum 2012 -1-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés Résumé, Abstract, Zusammenfassung & Samenvatting Résumé : Depuis 2009, l’association gestionnaire de la Réserve Naturelle Nationale du lac de Remoray (RNNLR) a mis en place un diagnostic basé sur l’inventaire des Diptères syrphidés avec des tentes Malaise. Grâce aux caractères bio-indicateurs de ces insectes, l'interprétation des résultats, à l'aide de la méthode " Syrph the Net ", a permis d'évaluer l'intégrité écologique des habitats du site. Au total, 210 espèces de syrphes ont ainsi été déterminées. Trois sont des nouvelles mentions pour la syrphidofaune française, treize pour la région et près de la moitié sont menacées ou en déclin à diverses échelles. Comme en témoignent les espèces inattendues, la Réserve Naturelle est une mosaïque d’habitats riches et complexes. Malgré des espèces manquantes indiquant d’importantes carences dans les micro-habitats du bois mort et sénescent, la hêtraie-sapinière de la Grand’Côte présente une bonne intégrité écologique. Conséquence logique de l’intensification agricole, l’intégrité écologique des prairies est plutôt moyenne, voire mauvaise. La gestion en place limite considérablement la faune syrphidologique. Les récentes restaurations des fosses d’exploitation dans la tourbière du Crossat et de ses zones humides associées expliquent les taux d’intégrité écologique élevés. Cependant les espèces manquantes illustrent des perturbations irrémédiables ayant altéré la typicité de ces habitats. Ainsi, même si de fortes altérations existent dans les écosystèmes, la RNNLR possède globalement une très forte fonction de réservoir de biodiversité à l’échelle régionale et nationale, démontrant la nécessité de tels espaces protégés. Mots clé : Syrphe, bio-indicateur, diagnostic écologique, intégrité écologique, Syrph the Net, hêtraie- sapinière, prairie agricole, tourbière, zone humide. ------------ Abstract : During the period 2009-2011, personnel of the Remoray Lake NNR have carried out Malaise trap survey of the syrphids (Diptera: Syrphidae) of the reserve and applied the “Syrph the Net” (StN) methodology to the survey results, to investigate the degree of ecological integrity of the habitats represented. 210 syrphid species have been recorded from the Remoray reserve during course of the survey, three of them additions to the French syrphid fauna and thirteen are new to the region. Close to half of the collected species are recognised as either under threat or in decline at one or another geographic scale. This substantial representation of infrequent species shows, of itself, that the reserve is a combination of rich and complex habitats. Comparison between observed and predicted faunas for the various habitats of the reserve highlights differences between them. Thus the Beech-Fir forests of the “Grand Côte” show a generally high integrity, but lack species associated with dead wood/sensescent tree microhabitats, whereas open habitats subject to agricultural intensification show mediocre or poor integrity. Wetland habitats exhibit a generally high ecological integrity, indicating the success of the recent restoration of the Crossat peat bog and associated wetlands. At the same time, there is evidence of potentially irreversible impact, that has affected the typical character of these habitats, manifested by absent species. Overall, the survey has demonstrated a high level of functionality in the habitats of the Remoray RN, demonstrating that it has an important role as a resevoir of biodiversity at both national and regional scales. The need for such protected areas is clear from these results. Key words : Hoverflies, bio-indicator, ecological diagnostic, ecological integrity, Syrph the Net, Beech- Fir forest, agricultural meadow, peat bog, wetland. 2012 -2-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés Zusammenfassung : Seit 2009, hat die Vereinigung, die die Nationale Natürliche Reserve von der Remoray-See (RNNLR) verwaltet, eine Diagnose gestellt mit Malaisefallen, begründet auf das Inventar von Schwebfliegen. Dank der Bioindikatoren von diesen Insekten, hat man wegen der Interpretation der Ergebnisse, mit Hilfe von der „Syrph the net” Methode, die ökologische Integrität der Lebensräume der Umgebung beurteilen können. Insgesamt sind so 210 Arten festgestellt. Drei von diesen sind neuen Erwähnungen für die französische Syrphidofauna, dreizehn für die Provinz und fast die Hälfte wird bedroht oder nimmt ab in verschiedenen Maßstäben. Wie die unvorhergesehenen Arten zeigen, ist die Natürliche Reserve ein Mosaik von verschiedenen reichen und komplexen Arten. Trotz der fehlenden Arten, die bedeutenden Mängel in die Mikrolebensräumen von toten und alternden Holz deuten, hat der Buchen- und Fichtenwald von „Grand’Côte“ eine gute ökologische Integrität. Eine logische Auswirkung der landwirtschaftlichen Intensivierung, ist eine eher durchschnittliche oder sogar schlechte ökologische Integrität der Weiden. Die eingeführte Verwaltung begrenzt die Syrphidofauna ansehnlich. Die aktuellen Restaurierungen der Urbarmachungsbrunnen im Crossatmoor und seine assoziierten Feuchtgebieten erklären die hohen Gehalte der ökologischen Integrität. Doch illustrieren die fehlenden Arten irreparablen Beeinträchtigungen die die typischen Merkmale der Lebensräume geschädigt haben. Somit besitzt die RNNLR, selbst mit den starken Verschlechterungen in den Ökosystemen, global eine sehr wichtige Funktion für die Biodiversitätbehälter in einem regionalen und nationalen Maßstab, die die Notwendigkeit von gleichartigen geschützten Gebieten zeigt. Schlüsselwörter : Schwebfliegen, Bioindikator, ökologische Diagnose, ökologische Integrität, Syrph the Net, Buchen- und Fichtenwald, landwirtschaftliche Weiden, Moor, Feuchtgebieten. ------------ Samenvatting : Sinds 2009, heeft de vereniging die het Nationale Natuurlijke Reservaat van het Remoray-meer (RNNLR) beheert, een diagnose gesteld met malaisevallen, gebaseerd op de inventaris van zweefvliegen. Dankzij de bio-indicatoren van deze insecten, heeft men door de interpretatie van de resultaten, met behulp van de “Syrph the net” methode, de ecologische integriteit van de leefgebieden van de omgeving kunnen evalueren. In totaal zijn er zo 210 soorten vastgesteld. Drie hiervan zijn nieuwe vermeldingen voor de Franse syrphidofauna, dertien voor de provincie en bijna de helft wordt bedreigd of neemt af op verschillende schalen. Zoals de onverwachte soorten laten zien, is het Natuurlijke Reservaat een mozaïek van verschillende rijke en complexe leefgebieden. Ondanks de missende soorten, die belangrijke tekortkomingen in de microleefgebieden van dood en verouderend hout aanwijzen, heeft het beuken- en sparrenbos van “Grand’Côte” een goede ecologische integriteit. Een logisch gevolg van de agrarische intensivering, is een vrij gemiddelde, of zelfs slechte ecologische integriteit van de weiden. Het ingestelde beheer beperkt de syrphidologische fauna aanzienlijk. De recente restauraties van de ontginningsputten in het Crossat-veen en zijn geassocieerde draslanden verklaren de hoge gehaltes van de ecologische integriteit. Toch illustreren de missende soorten onherstelbare verontrustingen die de typische kenmerken van deze leefgebieden hebben aangetast. Zodoende bezit de RNNLR, zelfs met de sterke verslechteringen in de ecosystemen, globaal een zeer belangrijke functie voor het biodiversiteit reservoir op een regionale en nationale schaal, die de noodzaak van dergelijke beschermde gebieden aantoont. Sleutelwoorden : Zweefvliegen, bio-indicator, ecologische diagnose, ecologische integriteit, Syrph the Net, beuken- en sparrenbos, agrarische weiden, veen, draslanden. 2012 -3-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés Introduction a biodiversité connaît de nos jours un déclin d’une rapidité et d’une ampleur sans L précédent dans toute l’histoire de notre planète, et les conséquences à long terme n’en sont pas précisément connues. Une façon relativement simpliste de les prédire dans les très grandes lignes est d’avancer que si la nature n’est pas fragile (« la vie ne disparaîtra pas sur Terre demain »), ce sont tous les services écosystémiques qu’elle rend à nos sociétés qui le sont. Il faut entendre par là les bénéfices que nous tirons de la présence et du bon fonctionnement des communautés d’espèces dans les divers écosystèmes qui composent nos paysages sous diverses latitudes. Ces bénéfices vont par exemple du simple plaisir d’observer ou d’étudier ces communautés, à la mitigation des événements climatiques extrêmes (via le stockage de carbone et de l’eau, le ralentissement du vent par la rugosité du paysage…), à l’épuration de l’air, à la fourniture de biomasse alimentaire ou énergétique, ou encore à la pollinisation et protection des cultures contre leurs bioagresseurs. Ainsi, s’il en était besoin, il est important de réaliser que la préservation de la biodiversité n’est pas seulement une question d’éthique. Elle est aussi une question économique, qui représente plusieurs milliers de milliards de dollars US au niveau mondial, mais aussi, de façon plus appréhendable, plusieurs dizaines de milliers d’euros au niveau d’une exploitation agricole française. Tous ces éléments nous permettent de clairement saisir l’importance extrême du défi que nous avons à relever au cours de ce siècle : préserver la biodiversité aux diverses échelles de son organisation, à savoir du gène au paysage en passant par les espèces et leurs habitats. Les espèces représentent l’échelon le plus classiquement retenu dans les études sur la biodiversité, notamment dans celles relatives à leurs liens aux habitats, souvent réalisées à grands renforts d’analyses statistiques puissantes sur jeux de données importants mais dont le degré de sophistication et le volume respectivement ne garantissent nullement la pertinence et l’exactitude écologiques, et encore moins l’opérationnalité en termes de gestion conservatoire des espaces naturels ou anthropisés. Il est alors à considérer une autre approche, basée sur l’expertise et donc l’expérience de terrain, et mettant ainsi en avant la capacité d’un cerveau humain à organiser et analyser les données observées pendant des années afin d’en dégager les tendances et corrélations générales. Cette approche, que d’aucuns qualifieraient d’empirique, commence à intéresser le monde de la recherche scientifique, et elle a été employée à quelques reprises et avec succès dans l’exploration ou l’utilisation des relations espèces-habitats pour la prédiction des changements de structure de communautés d’insectes notamment, suite à une évolution du paysage. La base de données/système expert « Syrph the Net » permet justement cette ‘autre approche’, réellement pertinente et tellement adaptée à la gestion conservatoire d’espaces d’intérêt écologique, et les agroécosystèmes en font partie, ne nous y trompons pas. Cette base de données, utilisable comme modèle mécaniste pour prédire des structures de communautés de Syrphes en fonction d’habitats constitutifs d’écosystèmes et de paysages, doit son existence à un entomologiste hors norme, visionnaire en quelque sorte en matière d’écologie et de biologie de la conservation, je veux parler de Martin C.D. Speight. Il met depuis près de quatre décennies sa passion, son talent et son temps au service d’une meilleure connaissance de cette famille de Diptères, désormais pleinement utilisable dans sa dimension bio- indicatrice, dimension encore inégalée chez les autres arthropodes terrestres. Merci à Bruno Tissot et son équipe, initiateur de la présente étude, d’avoir choisi ce groupe pour révéler le caractère également hors norme, en tant que réservoir de biodiversité, de la Réserve Naturelle Nationale du lac de Remoray, le plus important ‘hot-spot’ de diversité syrphidologique actuellement connu en France. Cette RNN sert de ce fait de référence vivante en matière de niveau d’intégrité écologique réalisable, niveau que « Syrph the Net » invite et aide à atteindre, pour le bénéfice, au-delà des seuls insectes et entomologistes passionnés, des services écosystémiques et donc des générations futures. Jean-Pierre SARTHOU, enseignant-chercheur, Agro-Toulouse/INRA 2012 -4-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés 1 Matériel & Méthodes 1.1 Les Diptères syrphidés : de fins bio-indicateurs Les Syrphidés sont une famille de l’ordre des diptères (Lecointre & Guyader, 2006). En Europe, la faune syrphidologique compte approximativement 850 espèces (Sarthou & Sarthou, 2010 ; Speight 2012a), 532 en France (Speight et Dussaix, comm. pers.) et 332 dans le Massif Jurassien (Franche-Comté et Jura Vaudois –Tissot Figure 1 : Myathropa florea femelle et al., 2011). Si la plupart des imagos participent activement à la pollinisation en se nourrissant de nectar et de pollen (Dussaix, 2010 ; Speight, 2012a), leur principale caractéristique morphologique est l’aspect mimétique emprunté majoritairement aux hyménoptères (Vespidés, Bombidés, Apidés…), ainsi qu’à d’autres groupes d’insectes (Conopidés…) ou encore à des fleurs comme Microdon mutabilis avec Ophrys fuciflora et O. sphegodes (Speight, 2012a). A l’état larvaire, les syrphes utilisent des niches écologiques restreintes et ont des exigences strictes, ce qui fait d’eux d’excellents bio-indicateurs1 (Speight, 1986 & 1989 ; Sarthou, 1996 ; Good & Speight, 1996 ; Sommaggio, 1999 ; Burgo & Sommagio, 2007 ; Sarthou & Sarthou, 2010 ; Bettinelli et al, 2010). En France, les habitats, les micro-habitats et les traits de vie de plus de 95% des espèces de syrphes sont connus (Sarthou & Sarthou, 2010). Ainsi, il est possible à l’aide de ce taxon de couvrir Figure 2 : Eristalis tenax femelle à la fois la quasi-totalité des habitats naturels, une grande variété de leurs niches écologiques et les trois niveaux trophiques principaux : zoophage, microphage et phytophage (Castella et al., 2008). En comparaison avec d'autres groupes d'insectes, cette conjonction semble actuellement unique (Godelin et al., 3003 ; Sarthou & Speight, 2005 ; Fayt et al., 2006 ; Redon, 2009). 1.2 Le protocole d’étude syrphes dans la Réserve Naturelle Nationale du lac de Remoray La récente constitution d’un groupe de travail inter-réseaux (Réserves Naturelles de France et la Fédération des Conservatoires d’Espaces Naturels) dans le cadre de la commission scientifique de RNF2 a fortement motivé ce travail. Ce groupe (le GIS - Groupe Inter-réseaux Syrphes) développe la méthodologie novatrice de Syrph the Net (StN) dans toute la France. Dans le cadre du 3 ème plan de gestion de la réserve naturelle (2010-2014 : opération prioritaire SE 49), cette étude a pour principaux objectifs : Etablir un inventaire initial des syrphes de la Réserve Naturelle Nationale du lac de Remoray et plus globalement du site Natura 2000. Evaluer la qualité écologique et apporter de nouveaux éléments sur l’état de conservation des habitats de la réserve naturelle. Contribuer à l’amélioration des connaissances (régionales et nationales) des syrphes. 1 Organisme vivant qui par ses exigences écologiques nous renseigne sur la qualité des milieux 2 Réserves Naturelles de France 2012 -5-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés 1.2.1 L’échantillonnage par tente Malaise 1.2.1.1 Fonctionnement et efficacité L’échantillonnage des syrphes a été réalisé à l’aide de tentes Malaise (TM). Ce type de piège a été inventé par l'entomologiste suédois René Malaise en 1934. Standardisée, cette méthode de piégeage est passive (donc non attractive), non sélective (Fiers, 2004) et particulièrement efficace dans l’interception des insectes volants ayant un géotropisme négatif 3 (Sarthou J-P. & Vallet in Bourget & Nageleisen, 2009). 1.2.1.2 Installation des tentes Malaise D’avril à septembre, durant trois années (2009 à 2011), quatre pièges à interception de type ‘‘Malaise’’ ont été placés dans différents habitats de la Réserve Naturelle, ce qui constitue un effort d’échantillonnage conséquent. Dans chacun des 12 emplacements (4 x 3), les habitats inventoriés et les coordonnées GPS ont été saisies (Cf annexe 1). Figure 3 : TM 1 Figure 4 : TM 2 Figure 5 : TM 3 1.2.1.3 Relevés Toutes les 2 semaines, les flacons d’échantillonnage, contenant les insectes dans l’alcool dénaturé à 70°, sont récoltés par le personnel de la Réserve Naturelle. Dans certains cas, ces relevés sont plus fréquents (Cf. annexe 1) du fait de captures d’insectes plus importantes. 1.2.1.4 Tris et déterminations Les récoltes sont triées en laboratoire, étiquetées selon leur provenance et la date de prélèvement puis stockées dans de l’alcool dénaturé à 70°. Une fois isolés, les syrphes ont été identifiés par Martin C.D. Speight et par Bruno Tissot (conservateur de la réserve naturelle). Martin C.D. Speight a réalisé la validation et les déterminations complexes comme les Cheilosia sp., Pipiza sp., Pipizella sp., Platycheirus sp. ... Saisi dans SERENA4, ce travail a permis d’établir une liste des espèces observées dans la réserve naturelle (§1.4). Une collection de référence a été constituée et validée par Martin C.D. Speight. Elle est à ce jour stockée en alcool dans les locaux de la Maison de la Réserve à Labergement-Sainte-Marie. Figure 6 : Tri d’un échantillon de la TM 7 Figure 7 : Déterminations au laboratoire 3 Insecte ayant une tendance prononcée à s’élever en hauteur lors de la rencontre avec un obstacle. 4 Logiciel de gestion de bases de données naturalistes développé par RNF. 2012 -6-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés 1.2.2 Description et définition des habitats Dans un rayon de 500 m autour de chaque tente Malaise, tous les habitats ont été décrits selon le système de codification de la base StN décrit dans l’ouvrage Content & Glossary (Speight et Castella, 2010). Cette codification repose sur une classification des habitats européens CORINE- Biotope (Devillers et al., 1991), aujourd’hui intégrée au système EUNIS (Davies et al., 2004). Dans StN, ces catégories d’habitats sont dénommées ‘‘macro-habitats’’. Cela permet de les dissocier de la catégorie des ‘‘micro-habitats’’, par ailleurs aussi codés dans la base de données StN. D’après StN, un macro-habitat équivaut à un ‘habitat’ EUNIS. Les micro-habitats correspondent à des caractéristiques structurales identifiables des macro-habitats, auxquels les stades de développement des syrphes sont associés (Speight et al., 2007). Le macro-habitat correspond à l’espace vital d’un syrphe utilisé au stade adulte alors que le micro-habitat est utilisé au stade larvaire. Une larve peut être associée à un ou plusieurs micro-habitats d’un même macro-habitat, en fonction de son degré de sténoécie5. 1.2.3 L’analyse des données : la démarche innovante du système expert "Syrph the Net" L’accessibilité, gratuite sur simple demande adressée à Martin C.D. Speight (speightm@gmail.com), est un grand atout de Stn. 1.2.3.1 La base de données européenne StN La base de données de StN est la traduction numérique de l’ouvrage Species Account of European Syrphidae (Speight, 2010), qui est actualisée tous les deux ans. La base de données centralise notamment les traits de vie des espèces, en fonction de leurs habitats fréquentés (definis dans Speight & Castella, 2010b) au cours de leur cycle de développement. Sous forme d’un tableur Excel StN_2010 (Speight et al., 2010), les associations habitats/espèces sont encodées (notion de fuzzy coded – Castella et Speight, 1996) en fonction de leur typicité : 0 : pas d’association, 1 : association minimale (l’habitat est seulement utilisé de façon marginale par l’espèce), 2 : association moyenne (l’habitat fait partie de la gamme normale utilisée par l’espèce), 3 : association maximale (l’habitat est préférentiel pour l’espèce). Figure 8 : Extrait de la base StN Cette base de données s’alimente constamment grâce aux nouvelles études syrphidologiques locales, la rendant réactive et percutante. 5 Sténoèce (espèce) : spécialiste, autrement dit dont la niche écologique est étroite. S’oppose à eurièce. 2012 -7-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés 1.2.3.2 Liste des espèces prédites pour le site Une fois la liste des habitats présents obtenue (§1.2.2.), le classeur Excel SelectionTool_2010 (Monteil, 2010) permet de constituer une liste des espèces européennes Filtre : Macro et micro attendues dans les macro et micro-habitats constitutifs du site, habitats présents à Remoray cet outil fonctionnant de pair avec les associations espèces/habitats du classeur StN_2010. Il convient ensuite de filtrer cette première liste S obtenue avec la liste des espèces de la liste régionale. On obtient alors une liste régionale des espèces attendues pour les habitats du site décrit. Filtre : Liste régionale Pour la présente étude, la liste régionale retenue (Massif Jura Suisse et Français correspond à la région administrative de Franche-Comté. Compte tenu de la proximité avec la Suisse, le Canton de Vaud est ajouté à cette liste. Arrêtée au 26/06/2012, celle-ci regroupe 20 contributions qui n’étaient pas prises en compte à ce jour dans la base de données interactive Syrphid (Sarthou et Sarthou & Sarthou, 2010 modifié al., 2010) soient : 15 pour le Doubs, 8 pour le Jura, 2 pour la Figure 9 : Principe de l’élaboration de la liste des Haute-Saône et 2 pour le Jura Vaudois (Cf annexe 2). espèces prédites Contrairement à d’autres régions, ce nombre important de contributions à la liste régionale est un véritable atout. Au total, la liste recense 332 espèces de syrphes (dont 316 pour la Franche-Comté et 200 dans le Canton de Vaud), ce qui est remarquable. D’après Martin C.D. Speight (comm. pers.), une liste régionale, prise comme référence pour une telle analyse, doit comporter un minimum de 200 espèces. Dans la procédure suivante, cela permet d’éviter à la RNNLR de se comparer à elle- même. Figure 10 : Myatropa florea femelle Source : Joseph GARRIGUE, RNN Forêt de la Massane 2012 -8-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés 1.2.3.3 Comparaison de la liste prédite avec la liste observée Liste régionale Echantillonnage par tentes Malaise + Macro habitats présents + prospections complémentaires + Associations Micro-habitats / espèces Espèces prédites Espèces observées Comparaison Espèces prédites Espèces prédites et Espèces non prédites non observées observées mais observées Espèces Espèces au Espèces manquantes rendez-vous inattendues Sarthou & Sarthou, 2010 modifié Figure 11 : Principe de la comparaison des listes d’espèces En comparant la liste régionale des espèces prédites avec celle des espèces observées localement (Figure 11), trois types de listes sont obtenues : les espèces “au rendez-vous” (prédites et observées), les espèces “inattendues” (observées et non prédites), et les espèces “absentes” (prédites et non observées). Les espèces au rendez-vous, exprimées en Intervalle Intégrité Description pourcentage des espèces prédites, indiquent [0-20%] Très faible Très insuffisante l’intégrité écologique6 de l’habitat ou de la station [21-40%] Faible Insuffisante étudiée selon les seuils détaillés ci-contre [41-50%] Moyenne Moyenne (tableau 1). Les espèces expliquées (pourcentage [51-75%] Bonne Bonne des espèces au rendez-vous sur les prédites) [76-85%] Très bonne Très bonne [86-100%] Excellente Excellente renseignent sur la qualité de la description des Tableau 1 : Seuils d’appréciation des différents critères habitats et micro-habitats associés. En fonction de l’influence ou non des habitats connexes au site étudié, les espèces inattendues permettent aussi de conclure sur la représentativité des habitats du site à l’échelle du paysage environnant. Cette méthode repose donc sur une analyse comparative simple et une bonne connaissance de la biologie des espèces de syrphes. StN est donc à la fois une méthode synthétique et analytique. 6 Notion exprimant la capacité d’accueil du milieu (synonyme de capacité biogène) et qui rend compte de sa fonctionnalité ; revue par Hobbs et al. (2009). 2012 -9-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés 1.3 La Réserve Naturelle Nationale du lac de Remoray : une mosaïque d’habitats complexes et imbriqués … Figure 12 : Le lac de Remoray et ses milieux associés au printemps Dans le Parc Naturel Régional du Haut Jura (PNRHJ), la Réserve Naturelle Nationale du lac de Remoray (RNNLR) se situe dans le département du Doubs (25) à 20 km au sud de la sous- préfecture de Pontarlier. A la limite entre le deuxième plateau et la haute chaîne du Jura, la réserve naturelle repose dans un synclinal entre 850 et 980 mètres d’altitude. De ce fait, elle bénéficie d’un climat de type montagnard sous influence océanique et appartient à l’étage de végétation montagnard. Quatre zonages règlementaires (cf tableau 2) s’appliquent sur le site étudié : une réserve naturelle nationale (RNN par décret ministériel), une réserve biologique domaniale dirigée (RBDD), un site Natura 2000 au titre des directives ‘‘oiseaux’’ et ‘‘habitats faune flore’’ et un Arrêté Préfectoral de Protection de Biotope (APPB). Tous les quatre justifient des écosystèmes remarquables en association avec des espèces patrimoniales7 emblématiques dans un territoire de caractère. Du point de vue botanique, l’inventaire des Trachéophytes (Ptéridophytes et Spermatophytes) compte 623 espèces, soit près de 28 % des espèces franc-comtoises. 5 espèces sont protégées au niveau national, 11 au niveau régional et 19 sont inscrites sur la liste rouge régionale (Ferrez et al., 2008). Statut Désignation Création Superficie 8 Natura ZPS « Lac de Remoray » (FR 431002) 23/12/2003 425 ha 9 2000 ZSC « Tourbières, lac de Remoray et zones environnantes » (FR 4301283) 7/12/2004 788, 7 ha RNN Réserve Naturelle Nationale Lac de Remoray (FR 3600046) 15/04/1980 346, 5 ha RBDD Réserve Biologique Domaniale Dirigée de la Grand'Côte (FR 2300016) 10/08/1977 54, 9 ha Arrêté Préfectoral de Protection de Biotope de l’écrevisse à pattes blanches et des APPB 19/08/2009 30, 8 ha espèces patrimoniales associées Tableau 2 : Statuts juridiques en application sur site Une des grandes particularités de la RNNLR est la grande diversité des habitats présents sur une faible superficie (346,5 ha). 17 macro-habitats et 19 types de macro-habitats associés (Annexe n°3) ont été décrits, ce qui est peu commun au regard de tous les autres sites déjà étudiés avec la méthode StN. Cela démontre une grande hétérogénéité des habitats disponibles dans la réserve naturelle. On obtient alors une remarquable liste d’espèces prédites composée de 234 taxons. Définis sur une base phytosociologique (d’après Mazuez 2009 in Tissot et al, 2009), tous ces ‘habitats’ sont cartographiés en page suivante. 7 Figure 13 : Mâle d’Eupeodes sp. Au sens juridique et des critères UICN 8 Zone de Protection Spéciale (Directive Oiseaux, 1979) 9 Zone Spéciale de conservation (Directive Habitats Faune Flore, 1992) 2012 -10-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés Figure 14 : Cartographie des habitats (typologie StN) et localisation des tentes Malaise 2012 -11-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés 1.4 … avec 210 espèces de syrphidés observées 12 550 individus de syrphes ont été déterminés (Tissot et al., 2011 -Cf annexe n° 4), sur les 2020 jours de piégeage avec 12 tentes Malaise, concernant 201 espèces. Des prospections complémentaires au filet entomologique par Martin C.D. Speight et Bruno Tissot ont permis de contacter 9 espèces supplémentaires : Anasymia lineata, Cheilosia orthotricha, Epistrophe glossulariae, Leucozona glaucia, L. laternaria, Melanogaster parumplicata, Sphaerophoria virgata, Vollucela zonaria et V. inanis. Au final 21010 espèces ont pu être inventoriées dans le site (Cf tableau 3). Parmi elles, 13 étaient encore inconnues de la liste de référence locale, 16 sont nouvelles pour la faune franc- comtoise, 68 pour le département du Doubs et 3 sont les premières mentions pour la faune Française : Pipizella mongolorum, Platycheirus amplus et P. jaerensis (Tissot et al., in press.). D'autres espèces ne sont pas nouvelles pour la France, mais extrêmement rares : Neoascia unifasciata (découverte en Lorraine en 2008 –Vallet, 2010), Platycheirus perpallidus (Naal, 2007), Sphegina montana, mais aussi Anasymia lunulata, Chrysogaster rondanii, Eupeodes goeldlini, Melanogaster parumplicata, Sphaerophoria shirchan, Cheilosia clama, Ch. cynocephala, Ch. lasiopa... La liste de certains genres est tout à fait remarquable, voire exceptionnelle : 41 espèces de Cheilosia, 18 de Platycheirus, 8 d’Eristalis, 8 de Chrysotoxum, 7 de Sphaerophoria, 7 d’Eupeodes... Anasimyia lineata Cheilosia personata Eristalis nemorum Microdon myrmicae Psilota anthracina Anasimyia lunulata Cheilosia proxima Eristalis pertinax Myathropa florea Rhingia borealis Arctophila bombiforme Cheilosia psilophthalma Eristalis piceus Neoascia annexa Rhingia campestris Baccha elongata Cheilosia pubera Eristalis rupium Neoascia meticulosa Rhingia rostrata Blera fallax Cheilosia rufimana Eristalis similis Neoascia obliqua Scaeva dignota Brachyopa dorsata Cheilosia scutellata Eristalis tenax Neoascia podagrica Scaeva pyrastri Brachyopa panzeri Cheilosia soror Eumerus flavitarsis Neoascia tenur Scaeva selenitica Brachyopa scutellaris Cheilosia subpictipennis Eumerus tarsalis Neoascia unifasciata Sericomyia lappona Brachyopa testacea Cheilosia urbana Eupeodes bucculatus Orthonevra geniculata Sericomyia silentis Brachyopa vittata Cheilosia uviformis Eupeodes corollae Orthonevra nobilis Sphaerophoria batava Brachypalpoides lentus Cheilosia variabilis Eupeodes flaviceps Paragus flammeus11 Sphaerophoria infuscata Brachypalpus laphriformis Cheilosia vernalis Eupeodes goeldlini Paragus haemorrhous Sphaerophoria interrupta Caliprobola speciosa Cheilosia vicina Eupeodes latifasciatus Paragus pecchiolii Sphaerophoria scripta Callicera aurata Cheilosia vulpina Eupeodes luniger Parasyrphus annulatus Sphaerophoria shirchan Chalcosyrphus valgus Chrysogaster rondanii Eupeodes nitens Parasyrphus lineolus Sphaerophoria taeniata Cheilosia albipila Chrysogaster virescens Ferdinandea cuprea Parasyrphus macularis Sphaerophoria virgata Cheilosia albitarsis Chrysotoxum bicinctum Ferdinandea ruficornis Parasyrphus malinellus Sphegina clunipes Cheilosia antiqua Chrysotoxum cautum Helophilus pendulus Parasyrphus nigritarsis Sphegina latifrons Cheilosia barbata Chrysotoxum elegans Helophilus trivittatus Parasyrphus punctulatus Sphegina montana Cheilosia bergenstammi Chrysotoxum fasciatum Heringia pubescens Pipiza austriaca Sphegina sibirica Cheilosia canicularis Chrysotoxum fasciolatum Heringia vitripennis Pipiza noctiluca Sphegina verecunda Cheilosia carbonaria Chrysotoxum festivum Lapposyrphus lapponicus Pipiza quadrimaculata Syritta pipiens Cheilosia chloris Chrysotoxum intermedium Lejogaster metallina Pipizella mongolorum Syrphus auberti Cheilosia chrysocoma Chrysotoxum verralli Leucozona glaucia Pipizella viduata Syrphus nitidifrons Cheilosia clama Criorhina berberina Leucozona laternaria Platycheirus albimanus Syrphus ribesii Cheilosia cynocephala Dasysyrphus albostriatus Leucozona lucorum Platycheirus amplus Syrphus torvus Cheilosia flavipes Dasysyrphus pinastri Megasyrphus erraticus Platycheirus angustatus Syrphus vitripennis Cheilosia fraterna Dasysyrphus tricinctus Melangyna lasiophthalma Platycheirus clypeatus Temnostoma bombylans Cheilosia frontalis Dasysyrphus venustus Melangyna umbellatarum Platycheirus europaeus Temnostoma vespiforme Cheilosia himantopa Didea alneti Melanogaster aerosa Platycheirus fulviventris Trichopsomyia flavitarsis Cheilosia illustrata Didea fasciata Melanogaster hirtella Platycheirus granditarsus Volucella bombylans Cheilosia impudens Didea intermedia Melanogaster nuda Platycheirus immaculatus Volucella inanis Cheilosia lasiopa Doros profuges Melanogaster parumplicata Platycheirus jaerensis Volucella pellucens Cheilosia latifrons Epistrophe eligans Melanostoma mellinum Platycheirus manicatus Volucella zonaria Cheilosia lenis Epistrophe flava Melanostoma scalare Platycheirus nielseni Xanthandrus comtus Cheilosia melanopa Epistrophe grossulariae Meligramma cincta Platycheirus occultus Xanthogramma laetum Cheilosia melanura Epistrophe melanostoma Meligramma cingulata Platycheirus parmatus Xanthogramma pedissequum Cheilosia mutabilis Epistrophe nitidicollis Meligramma euchroma Platycheirus peltatus Xylota jakutorum Cheilosia nigripes Episyrphus balteatus Meligramma triangulifera Platycheirus perpallidus Xylota segnis Cheilosia nivalis Eristalis arbustorum Meliscaeva auricollis Platycheirus rosarum Xylota sylvarum Cheilosia orthotricha Eristalis jugorum Meliscaeva cinctella Platycheirus scambus Xylota tarda Cheilosia pagana Eristalis horticola Microdon analis Platycheirus scutatus Xylota xanthocnema Tableau 3 : Liste des espèces observées dans la RNN Les nouvelles espèces Régionales10 : en orange ; Françaises : en gras 10 Le 30 mai 2011, un individu de Parhelophilus sp. est vu au bord du plan d'eau de la gravière de la base de loisirs lors de prospections au filet par Martin C.D. Speight. Non capturé, cet individu est la première mention de ce genre dans la réserve et constitue donc une potentielle 211 ème espèce pour la RNNLR. 11 Espèce restant à confirmer (une seule femelle actuellement récoltée) 2012 -12-
CLAUDE et al., 2012 Diagnostic écologique à l’aide des syrphidés 2 Résultats & Analyses Dans la liste globale obtenue, la part des espèces capturées au filet entomologique est de 4% (8 espèces). Ce chiffre, relativement faible, démontre l’efficacité des tentes Malaise. 2.1 Valeur patrimoniale et enjeux de conservation Lors de cette étude, 100 espèces menacées ou en déclin à diverses échelles ont été contactées, soient 48 % du total des espèces observées (cf annexe n°5). Sur ces 100 espèces, 2 espèces sont fortement menacées à l’échelle européenne (degré 3) : Melanogaster parumplicata et Pipizella mongolorum. A l’échelle suisse et française, 35 sont fortement menacées et 13 sont menacées (degré 2). Sur ces 35 espèces, 2 sont strictement endémiques d’Europe : Syrphus auberti (espèce de milieux ouverts montagnards) et Chrysogaster rondanii (inféodé aux hêtraies-sapinières et aux frênaies-hêtraies humides). Dans la région, cette dernière n’est actuellement connue que dans la RNN du lac de Remoray. Au regard d’autres études (Speight & Castella, 2001 et 2010a ; Larrieu, 2005 ; Gharet, 2009 ; Redon, 2009 ; Lair, 2010 ; Darby, 2011 ; Sarthou & Sarthou, 2010 ; Treiber, 2011 ; Vallet, 2012), le ratio de 48 % d’espèces menacées ou en déclin est important et peu commun. La RNNLR joue un rôle très important dans la conservation des espèces considérées comme menacées et patrimoniales. A l’échelle européenne, c’est surtout le cas pour Pipizella mongolorum (espèce des bas-marais alcalins de l’étage montagnard). Enfin, plus localement (France et Suisse), c’est également le cas pour Melanogaster aerosa, Xylota xanthocnema, Chalcosyrphus valgus ou Anasimyia lunulata. Du fait de son endémisme européen conjugué à sa forte valeur patrimoniale, la réserve naturelle présente un fort enjeu pour la conservation de Chrysogaster rondanii. 2.2 Analyse écologique globale de la RNN A l’échelle du site, le nombre d’espèces contactées est exceptionnel (210). Cela représente 63 % de la liste régionale (composée de 332 espèces), et près de 40 % de la faune syrphidologique française ! Espèces ∑ Comparaison % Prédites 234 Expliquées (rdv/observées) 83 Observées 210 Intégrité écologique (rdv/prédites) 74 Au ‘’rendez-vous’’ 175 Inattendues (inatt./observées) 17 « Manquantes » 59 Manquantes (manquantes/prédites) 26 « Inattendues » 35 Tableau 4 : Résultats globaux et comparatifs Figure 15 : Sphaerophoria sp. 2.2.1 Espèces au rendez-vous et qualité écologique La notion d’intégrité écologique (espèces au RDV/prédites exprimé en pourcentage) mesure la fonctionnalité de l’habitat ; il ne s’agit ni de son fonctionnement ni de son état de conservation. « Fonctionnement » et « fonctionnalité » sont deux notions différentes. La première identifie les facteurs clés expliquant la présence d’un écosystème ou d’un habitat (proche de « processus », terme qui pourrait être utilisé préférentiellement), la seconde cherche à caractériser l’état d’altération de ces processus et intègre également la notion de « services rendus par l’habitat ou l’éco-complexe » (Champion et al., 2011). D’où aussi la notion de fonction de réservoir de biodiversité (FRBD) mesurable à l’échelle d’un site (ensemble de macro-habitats imbriqués) et cela grâce aux caractères bio-indicateurs des syrphes (Sarthou & Sarthou, 2010). 2012 -13-
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