Transfert des savoir-faire d'expérience - ETUDES ET DOCUMENTS
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JUILLET 2009 Transfert des savoir-faire d’expérience E n s e i g n e m e n t s l i é s a u s u i v i e t à l ’ é va l u at i o n d ’u n p ro j e t F S E d e l ’O P C A F O RC E M AT Pat r i c k C o n j a rd Fa b i e n n e C a s e r COMPÉTENCES Avec le soutien du Fonds social européen
EDITIONS réseau TABLE DES MATIÈRES M AT I È R E S DES TA B L E Préambule. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 04 1 - Le processus de suivi-évaluation du projet TSE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 05 La demande de FORCEMAT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 05 Le processus de capitalisation proposé par l’ANACT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 05 2 - Le transfert des savoir-faire d’expérience en général. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 07 La formation dans les TPE/PME . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 07 Le transfert des savoir-faire d’expérience. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 09 3 - La méthodologie TSE développée dans le cadre du projet de FORCEMAT . . . . . . . . . p. 11 Les grands principes méthodologiques et points de passage de la démarche . . . . . . p. 11 Les conditions de déploiement du projet TSE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 13 4 - Un regard sur 11 expériences spécifiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 14 Les investigations conduites par l’ANACT. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 14 Présentation des 11 expériences évaluées. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 15 5 - Les constats et enseignements relatifs à la démarche TSE et à son développement. . . p. 20 Facteurs déclenchants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 20 Regard sur les enjeux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 21 Ingénierie globale du TSE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 22 Résultats et effets . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 33 6 - Les préconisations. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 37 Pour l’OPCA FORCEMAT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 37 Pour l’entreprise . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 39 Pour les consultants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 40 En guise de conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 41 Annexe 1. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 42 Plaquette de présentation de la démarche TSE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 42 Annexe 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 46 Comment accompagner l’acquisition et la transmission des savoir-faire d’expérience : enseignements du projet TSE FORCEMAT (diaporama). . . . . . . . . . . . . . p. 46 Annexe 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 54 Fiches descriptives des 11 actions évaluées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 54 Lexique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 70 Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 72 3
EDITIONS réseau Préambule Ce rapport est lié à la convention n° 2007CTE22R relative au suivi et à l’évaluation du projet « transfert des savoir-faire d’expérience » initié par l’OPCA FORCEMAT dans le cadre d’un finance- ment du Fond Social Européen (FSE). En ce qui concerne les moyens à notre disposition pour la réalisation de ce bilan final, nous nous sommes appuyés sur : • l’analyse de 30 fiches de suivi-capitalisation rédigées par les consultants ayant accompagné des projets de TSE auprès d’entreprises adhérentes à FORCEMAT ; • les investigations spécifiques réalisées par le réseau ANACT auprès de 11 projets de « TSE » sélec- tionnés préalablement avec les commanditaires. Chacun de ces projets a donné lieu à la réalisation d’un document de capitalisation spécifique, restitué aux délégués régionaux et consultants concer- nés par le TSE ; • les éléments de suivi, de capitalisation et d’animation élaborés par l’ANACT tout au long du pro- cessus de capitalisation. (séminaires DRF/consultants, séminaires de capitalisation ANACT/ARACT) ; • à des études et travaux de recherche liés au développement des compétences en situation de travail, aux processus de professionnalisation et à la valorisation des compétences acquises par l’expérience. Notre rapport s’articule autour de 6 points, chacun pouvant être lu de manière indépendante : • le processus de suivi-évaluation du projet TSE ; • le transfert des savoir-faire d’expérience en général ; • la méthodologie TSE développée par FORCEMAT ; • un regard sur 11 expériences spécifiques ; • les constats et enseignements relatifs à la démarche TSE et à son développement ; • les préconisations à l’OPCA, aux consultants, aux entreprises, pour accompagner et développer des démarches de ce type. Enfin, les annexes permettront aux lecteurs d’aller un peu plus loin avec : • la fiche de présentation de la démarche « transfert des savoir-faire d’expérience » initiée par l’OPCA FORCEMAT (annexe 1) ; • un diaporama de synthèse des enseignements liés à la capitalisation de ces démarches. Ce diapo- rama donne des points de repères pour l’action (annexe 2) ; • les 11 fiches descriptives des expériences évaluées (annexe 3). Christine Martin Cocher et François Jutras (Aravis), Vincent Maurage (ARACT Languedoc-Roussillon), Bernard Devin (ARACT Pays de la Loire), Béatrice Gagné (ANACT) Claude Damm (ARACT Lorraine), Arnaud Coulon (ARACT Picardie), Serife Turhan (stagiaire Master 2 CRF Lyon2) ont contribué à la réalisation de ce travail de capitalisation. 4
EDITIONS réseau 1 Le processus de suivi-évaluation du projet TSE La demande de FORCEMAT Les entreprises des secteurs carrières et matériaux, tuiles et briques, industries du béton, céramique (5 000 entreprises pour près de 100 000 salariés) sont, au même titre que bien d’autres entreprises françaises, confrontées à la convergence d’enjeux démographiques, économiques, organisationnels et sociaux importants. Ces entreprises, essentiellement des TPE/PME, verront plus de 30 % de leurs salariés en production quitter l’entreprise dans les 10 ans à venir. Dans ce contexte, elles vont devoir, à court et moyen termes : • organiser le passage de relais entre les salariés de plus de 50 ans et les nouveaux entrants et/ou salariés en milieu de vie professionnelle ; • faire face à des difficultés de recrutement pour certains métiers industriels ; • augmenter les qualifications de leurs salariés, y compris pour la population sensible des plus de 50 ans, dans un contexte d’évolution technologique des process de production. Dans la poursuite du projet Équal « Compétence quinquas » conduit en région PACA, FORCEMAT, OPCA de ces branches, pilote en collaboration avec le cabinet ITAQUE Conseil, un projet européen intitulé « Transfert des Savoir-faire d’Expérience (TSE) » susceptible de répondre à ces enjeux. La fiche descriptive du projet « TSE » met l’accent sur deux axes spécifiques : • la mise en place d’un réseau de veille à destination des consultants et des entreprises autour des démarches de transfert de compétences avec l’animation d’un espace collaboratif par FORCEMAT (outil de type « groupware ») ; • l’évaluation des actions en fin de convention au niveau des processus mis en place, résultats opérationnels pour les entreprises, évolution des pratiques professionnelles et des carrières pour les transférants et les transférés. Dans le cadre de sa demande d’appui au processus de capitalisation du projet « TSE », FORCEMAT a souhaité que l’ANACT apporte un regard qualitatif sur le processus d’intervention et la méthodolo- gie développée par les consultants sur le terrain, de l’étape de prescription jusqu’à la mise en œuvre du plan d’action. Parallèlement, il a été initialement convenu de travailler en collaboration avec : • le groupe des consultants formés à la méthodologie par ITAQUE Conseil et chargés de mettre en œuvre la démarche de transfert de compétences dans les entreprises concernées ; • l’ensemble des délégués régionaux de FORCEMAT, ainsi que le responsable des études. Le processus de capitalisation proposé par l’ANACT Deux modalités d’actions complémentaires ont structuré notre processus d’appui à la capitalisation du projet « TSE » : • l’analyse et le suivi « au fil de l’eau » du projet : l’animation de deux séminaires de capitalisation avec les délégués régionaux FORCEMAT et les consultants du réseau, la rédaction pour chaque TSE d’une fiche de capitalisation dans une perspective d’analyse transversale (30 fiches ont été analysées). Les grandes étapes du processus de capitalisation ainsi que les contributions attendues dans le cadre de ce travail ont été précisées à l’occasion du 1er séminaire qui a contribué à lancer 5
EDITIONS réseau ce travail. Il s’agissait notamment d’installer un cadre propice à la coopération afin de dépasser les éventuelles réticences à partager ses expériences d’intervenant1 ; • la réalisation d’investigations spécifiques réalisées par le réseau ANACT auprès de 11 projets de « TSE » sélectionnés préalablement avec les commanditaires. Chacun de ces projets a donné lieu à la réalisation d’un document de capitalisation spécifique restitué aux délégués régionaux et consultants concernés par le TSE et d’une fiche descriptive2. À partir de cette méthodologie, des matériaux de capitalisation et d’évaluation du projet FORCEMAT ont été produits ; la plupart de ces livrables sont repris dans ce document. Cette approche a également contribué à professionnaliser les DRF et consultants mobilisés dans les différents TSE, et ce de façon complémentaire aux actions de transfert méthodologique réalisées par le cabinet ITAQUE Conseil et à l’animation d’un réseau Extranet pilotée par FORCEMAT. L’échange de pratiques entre consultants et DRF initié par ce projet a largement contribué à ce travail de capitalisation. La volonté de FORCEMAT d’installer durablement des pratiques de capitalisation relatives à des actions engagées auprès de leurs entreprises adhérentes contribuera, comme nous le suggérerons plus loin, à améliorer les moda- lités d’action de l’OPCA et de son réseau de consultants. Le schéma ci-dessous reprend les grands principes ainsi que les principales étapes du processus de capitalisation mis en place dans le cadre du projet TSE. Étape préalable de calage et de structuration du projet Suivi-capitalisation pour chaque action 28 grilles de 1 suivi - capitalisation Enquêtes de terrain sur un panel 11 fiches d'évaluation : 2 de 11 actions Diaporama/banque de cas Restitution entreprise Capitalisation transversale 3 Bilan final Transfert méthodologique Actions de 4 transferts Juin 07 Sept. 07 Déc. 07 Mars 08 Mai 08 Sept. 08 DRF Consultants DRF Consultants DRF Consultants Entreprises Entreprises Copil Copil Copil Copil 1 - Nous avons notamment travaillé sur la distinction entre « évaluation » et « capitalisation » afin de préciser que la démarche de FORCEMAT ne visait pas à évaluer la qualité du travail des consultants engagés dans des TSE. 2 - voir en annexe 1. 6
EDITIONS réseau 2 Le transfert des savoir-faire d’expérience en général La formation dans les TPE/PME 60 % des entreprises adhérentes à FORCEMAT sont des Très Petites Entreprises (TPE), c’est-à- dire des entreprises de moins de 10 salariés, et 40 % que l’on peut classer, pour la plupart, dans la catégorie des PME (moins de 250 salariés). Au regard de cette particularité, il nous a semblé intéressant d’appréhender quelques caractéristiques inhérentes aux TPE/PME en considérant plus particulièrement la question de leur rapport à la formation. Qu’est-ce qui caractérise une TPE/PME ? Quelles sont ses pratiques de formation ? Ses difficultés et contraintes par rapport à l’offre classique de formation ? L’article 2 des statuts de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) circonscrit son champ par la définition suivante : « Les petites et moyennes entreprises sont celles dans lesquelles les chefs d’entreprise assument personnellement et directement les responsabilités financières, techniques, sociales et morales de l’entreprise, quelle que soit la forme juridique de celle-ci » (cité par Bizaguet, 1993). Cette définition, qui est très politique, fait de la responsabilité du chef d’entreprise l’élément distinctif. Il constitue le point de convergence et de rayonnement de l’ensemble de la structure, ce qui se traduit par : une personnalisation de la gestion, une centralisa- tion du fonctionnement, une concentration des pouvoirs de décision. Il marque profondément les comportements de l’entreprise et son développement. À ces deux critères de taille et de personnalisation, Julien (in GREPME, 1997) ajoute quatre autres caractéristiques : • une « faible spécialisation » dans la répartition des tâches, tant pour ce qui est du dirigeant qui, tour à tour, oriente, organise, décide, réalise, qu’en ce qui concerne les salariés, voire les équipe- ments. Selon une représentation classique (Mintzberg, 1982), la spécialisation vient avec la taille par la « création d’une hiérarchie qui puisse effectuer la coordination », puis par la « standardisation pour coordonner ses activités » ; • une « stratégie intuitive ou peu formalisée ». Les objectifs de base à long terme, les plans d’exécu- tion, les raisons des choix restent, le plus souvent, implicites, dans « la tête du patron » et ne font que rarement l’objet de communication et d’explications autres que celles qui sont nécessitées par l’action immédiate. La synthèse que nous avons réalisée sur une cinquantaine de diagnostics courts conduits à la demande du Medef dans des PME souhaitant s’engager dans une gestion par les com- pétences, a bien montré que l’une des attentes les plus fortes des salariés et de l’encadrement intermédiaire était, précisément, une meilleure vision des orientations de l’entreprise ; • un « système d’information interne peu complexe ou peu organisé » : les informations, souvent partielles, sont échangées dans l’action, par contacts directs ; • un « système d’information externe simple », pas d’étude marketing, mais des rencontres du diri- geant avec ses clients, des échanges avec ses pairs ; l’accès au marché pouvant même être entravé par des groupements d’achats qui masquent les informations venant des consommateurs. 7
EDITIONS réseau La distinction des caractéristiques communes à toute TPE est tout aussi difficile ; cependant, le CEREQ, dans un rapport sur la formation des TPE3, nous fournit une liste de caractéristiques-clés pour une définition qualitative de la TPE. Une TPE devrait répondre à ces cinq critères : • critère dimensionnel : un très petit nombre de personnes travaille au sein de l’entreprise (le chiffre de 10 personnes semble refléter une certaine réalité économique plus qu’une convention) ; • critère de gestion : la gestion est centralisée, voire personnalisée ; • critère fonctionnel : le fonctionnement est organique, dans le sens où le dirigeant maîtrise quasi tout (association de la stratégie et des opérations) et les salariés sont polyvalents ; • critère d’information : le système d’information est riche mais informel, dépendant de l’équipe et de l’environnement local ; • critère stratégique : la stratégie est intuitive et peu formalisée, ce qui permet, à moyen terme, de suivre un objectif global en réagissant localement. Les études et les témoignages relatifs aux pratiques de gestion des compétences dans les PME/TPE mettent en évidence que la fonction RH n’est qu’exceptionnellement assurée dans sa totalité. Le plus souvent, elle est portée, dans l’action, et quasiment en temps masqué, par le chef d’entreprise. Le recrutement, la mobilité, la formation, la rémunération, font peu l’objet « d’investissement de forme » et restent largement non codifiés. Enfin, la négociation sociale est d’autant plus réduite que les organisations syndicales ne sont pas ou peu représentées. Nombre de petites entreprises n’ont pas les moyens4 de recruter les niveaux de qualification qu’elles souhaiteraient, elles « font sans » et s’en accommodent plus ou moins. Enfin, l’intérêt au travail, la motivation se manifestent générale- ment de façon spécifique dans les TPE/PME : la proximité du dirigeant, le climat social, l’indispen- sable polyvalence, la vision des résultats de son activité… constituent souvent autant de raisons, pour les salariés, de rester attachés à leur entreprise. Se pose aussi la question de la capacité de celle-ci à piloter des projets. Les attentes de « sur mesure » régulièrement exprimées par les dirigeants de petites entreprises, renvoient à un besoin réel qu’il faudra systématiquement prendre en compte. Plus qu’ailleurs, le plaquage de démarches standardisées s’imagine mal. Même si elle n’emprunte que rarement les formes classiques5, la construction des compétences n’est pas pour autant absente des TPE/PME, avec notamment le rôle prééminent de la pratique de formations informelles du type : tutorat, compagnonnage en doublon ou en binôme, formation en situation de travail. La formation continue formalisée concerne essentiellement la dimension tech- nique. On est avant tout sur des logiques d’adaptation au poste : « l’observation des pratiques effec- tives conduit à réaffirmer l’importance de la formation sur le tas, de l’auto-formation et des appren- tissages collectifs ». Les spécificités des TPE/PME entraînent des pratiques de formation particu- lières hors du marché de la formation professionnelle classique. Une telle carence peut s’expliquer, soit alternativement, soit simultanément, par l’inadéquation de l’offre et l’insuffisance de la demande. Les institutions de formation restent encore très éloignées de ces petites entreprises, tant dans leurs systèmes de valeurs que dans leurs logiques de fonctionnement. Les deux grandes caractéristiques des formations dites classiques qui entrent en conflit avec les caractéristiques des TPE PME sont l’espace-temps de formation et la codification des formations. Le stage inter-entreprises oblige généralement les apprenants à se déplacer et à consacrer du temps pour leurs formations. Or pour une petite structure, le départ d’un salarié en formation est d’autant plus perturbateur que l’effectif est réduit. La formation traditionnelle est, par ailleurs, souvent centrée sur une pédagogie par objectif, une pédagogie de l’objet. Les TPE/PME utilisent au contraire couramment une pédago- gie du sujet, basée sur la relation qui se développe avec la personne avec qui l’on apprend. Plusieurs caractéristiques inhérentes à ces entreprises expliquent les spécificités, mais aussi les limites observées dans la prise en compte de la gestion des compétences. Le développement de pratiques de GRH formalisées ne va donc pas de soi, et les difficultés observées dans le déploiement de certains TSE sont, en partie, liées aux particularités des entreprises adhérentes à FORCEMAT. Pour autant le TSE, comme nous le développerons plus tard, repose sur des logiques d’action et des modalités de fonctionnement spécifiques (ancrage sur le travail, approche par les individus, apport d’outils méthodologiques…) plus en phase avec les particula- rités et contraintes des TPE/PME. 3 - Bentabet (E.), Michun (S.), Trouvé (P.), Gestion des hommes et formation dans les très petites entreprises, Étude n° 72 du Centre d’Étude et de Recherche sur les Qualifications, 1999. 4 - Les raisons en sont multiples : niveau de rémunération, espérance d’évolution professionnelle, nature des responsabilités confiées mais aussi pénuries croissantes du marché du travail… 5 - En 2005, les dépenses formation des entreprises de 10 à 19 salariés sont de 1,4 % contre 3,4 % pour les entreprises de 500 à 1999 salariés. 8
EDITIONS réseau Le transfert des savoir-faire d’expérience Les industries du secteur des matériaux de construction et de la céramique font partie, avec le secteur des banques et de l’assurance, des plus touchées par le vieillissement de leurs salariés. Dans ce contexte, le projet de transfert des savoir-faire d’expérience initié par FORCEMAT invi- te les entreprises à « valoriser les salariés expérimentés » et à « organiser le renouvellement des générations ». Au-delà de questions relevant du comment et des moyens d’action, il appa- raît opportun, pour convaincre du bien-fondé de ce type d’approche, d’aborder préalablement les questions relatives au pourquoi et à l’opportunité de miser sur les savoir-faire d’expérience. Une meilleure compréhension des conditions d’acquisition de l’expérience — processus ô com- bien complexe et long — renforce ces enjeux et permet également de mieux comprendre les difficultés rencontrées par de nombreux dispositifs de professionnalisation en général, et de transfert des savoir-faire d’expérience en particulier. Pour faire face aux enjeux de préservation ou de transmission des compétences qui vont progressi- vement s’accentuer avec les difficultés de recrutement déjà ressenties dans certaines branches ou certains territoires6, l’État et les partenaires sociaux ont engagé un certain nombre de mesures. C’est ainsi que l’on retrouve dans l’accord national interprofessionnel de décembre 2003, sur la formation tout au long de la vie, puis dans celui du 13 octobre 2005, sur l’emploi des seniors, des préconisations relatives au tutorat comme modalité de transmission des savoirs et des savoir-faire. Ils recomman- dent que ces pratiques soient « conçues et mises en œuvre de façon à permettre un échange réci- proque d’expériences et de connaissances entre le (ou les) salarié(s) chargé(s) de cette mission et le salarié concerné »… « Pour faciliter le développement du tutorat, du parrainage ou de toute autre modalité de transmission des savoirs et des savoir-faire, et veiller à son intérêt tant pour le (ou les) salarié(s) chargé(s) de cette mission que pour le salarié concerné, les entreprises pourront confier cette mission à des salariés volontaires, ayant une légitimité professionnelle fondée sur une expé- rience reconnue en se référant, lorsqu’elles existent, aux dispositions conventionnelles de branches en vigueur ». Enfin, le « plan emploi seniors 2006-2010 » va jusqu’à proposer des mesures pour le retour dans l’entreprise de salariés ayant pris leur retraite afin d’assurer des missions de tutorat7. Pour autant, « tuteur » ne rime pas nécessairement avec « senior ». Dans les faits, ces derniers ne sont pas les plus mobilisés sur les fonctions de tuteurs, qui sont majoritairement confiées à des sala- riés d’un âge médian (quadragénaires). Pour Bernard Masingue8, plusieurs raisons expliquent cette difficulté. Des raisons liées à la transformation du travail, à l’évolution des modes d’organisation et de la nature de l’activité (« économie moderne »), peuvent rendre obsolètes les savoir-faire déve- loppés par les seniors au cours de leur vie professionnelle. Des raisons liées aux apprenants, qui ne voient pas nécessairement d’un bon œil le fait d’être « tutorés » par un senior qui n’est pas toujours légitime à leurs yeux. Enfin, des raisons liées aux seniors eux-mêmes et à leur motivation à trans- mettre. S’ajoute à cela le risque que chez ces salariés très expérimentés, les savoir-faire soient telle- ment intégrés, du fait d’une longue pratique, qu’ils sont d’autant plus difficiles à identifier. Plus glo- balement, ces réflexions nous conduisent à être attentif à ne pas confier systématiquement, en écho aux politiques de maintien dans l’emploi des seniors, des missions de tutorat aux plus de 55 ans. Les critères de choix des tuteurs ne peuvent pas être exclusivement liés à l’âge. Le projet TSE FORCE- MAT nous apporte cependant des enseignements sur les conditions d’engagement des seniors dans des missions de tutorat, et elles seront très largement développées dans ce rapport. Pour les entreprises, l’enjeu d’optimisation des processus de transfert est essentiel. Dans le cas le plus simple, on confie au senior la responsabilité de transmettre son « métier » directement à son rem- plaçant. On parie alors sur un effet d’osmose, qui fonctionne d’autant mieux qu’il s’inscrit dans la durée. À l’inverse si ce compagnonnage est trop court, ou s’il ne permet pas de traiter toutes les situations à fort enjeu, le risque d’une transmission insuffisante ou incomplète augmente rapidement. 6 - À titre d’exemple, pour les industries des carrières et matériaux de construction plus de 20 000 emplois sont à pourvoir dans les 5 ans à venir dans la seule industrie des granulats. (source CEFICEM). 7 - Cf Action n° 25 du Plan emploi senior : http://www.cohesionsociale.gouv.fr/IMG/pdf/Plan_seniors.pdf 8 - Cf Rapport B. Masingue sur l’identification des pratiques de tutorat [« Seniors tuteurs, comment faire mieux ? » - Rapport au secrétariat d’État chargé de l’emploi, La Documentaion française, mars 2009, 59 pages], réalisé à la demande de Laurent Wauquiez, secrétaire d’État chargé de l’Emploi. 9
EDITIONS réseau Cet enjeu de préservation des savoir-faire conduit généralement à un travail d’identification de ces compétences peu ou pas formalisées, et à la mise en place d’un processus de transmission que l’on qualifiera ici de dispositif de professionnalisation. Lorsque les risques deviennent vraiment impor- tants, il est fortement recommandé d’identifier préalablement les compétences critiques, celles que l’on cherche à préserver. Cette identification s’avère parfois d’autant plus difficile que l’expertise des professionnels en partance est opaque tant aux organisations qu’aux acteurs eux-mêmes. On sait en effet que l’expérience nous amène parfois à faire spontanément le bon geste ou à prendre la déci- sion pertinente sans en mesurer la complexité. Comment dès lors penser à transmettre ce que l’on ressent comme évident ? Ainsi, le cas échéant, il est préférable de confier à d’autres la responsabili- té du transfert. Ce dernier cas de figure ne doit pas être considéré comme exceptionnel. Car, d’une part, tout le monde n’est pas pédagogue, et d’autre part, la parfaite maîtrise d’un sujet est fréquem- ment un obstacle à une transmission réussie. Pour l’expert, « les choses vont de soi », il ne pense donc pas à les expliquer. De même, du point de vue du formé, la perspective de développement de ses compétences est a priori réjouissante. Cependant, toutes les conditions sont-elles toujours réunies pour aller dans ce sens ? Ainsi, la précarité qui caractérise de plus en plus les débuts de carrière9 conduit à une fragilisation de la relation d’emploi et a une incidence sur les processus de transmission. La situation précaire du salarié entrant, son statut (intérimaire CDD…) n’incite pas forcément les acteurs concernés (tuteur et tuteuré) à s’investir. Pour le « partant », se joue la reconnaissance de l’utilité sociale de son travail, la possibilité de « partir en paix », avec le sentiment du devoir accompli et de la relève assurée. Ce qui n’est pas rien. Mais la question est moins de savoir comment transmettre les compétences (au sens où il s’agirait de les « déverser ») que de savoir comment favoriser leur production ou leur transformation (au sens où c’est finalement à l’apprenant de construire ses compétences). Si, par raccourci de langage, nous utilisons parfois le terme de « transmission des compétences », c’est bien de construction dont il est question. Cela semble d’autant plus vrai lorsqu’il s’agit du développement de savoir-faire dits « d’ex- périence ». En effet, l’expérience est à la fois un acquis (« j’ai de l’expérience »), un moment vécu (« je fais l’expérience de ») et un mode d’acquisition (« tirer les leçons de l’expérience »). Elle est une ressource souvent centrale, une variable explicative de la compétence. C’est par une analyse réflexi- ve de la situation vécue que l’on consolide « l’expérience ». On pourra alors, à la suite de différents processus de « mise en mémoire », la mobiliser dans un autre contexte. Les travaux récents en didactique professionnelle sur le développement des compétences dans et par le travail nous apportent un éclairage complémentaire sur ces questions. Pour Pierre Pastré10, « on ne peut pas agir sans construire de l’expérience, donc sans apprendre », pour autant il distingue les « apprentissages incidents », non voulus et dont on n’a pas nécessairement conscience, des « apprentissages intentionnels » qui renvoient à des actions à visée formative. Cette intentionnalité conduit à différencier des situations « non didactiques » et des situations « didactiques ». Si le fait d’apprendre sur le tas, au hasard des situations, renvoie à la première catégorie, la mise en place d’un dispositif de tutorat peut, sous certaines conditions (intentionnalité, médiation, temps de réflexivi- té…), correspondre à la seconde. La synthèse construite par Guy Le Boterf à partir des travaux de Kolb et de Piaget fait écho aux approches que nous suggérons en matière de processus de profes- sionnalisation dans les organisations11. Il propose une boucle d’apprentissage expérientielle qui met en avant la nécessaire prise de distance et l’analyse réflexive à opérer par le sujet sur sa pratique. Cette réflexivité, qu’il présente comme « la troisième dimension de la compétence », vient complé- ter les deux premières que sont l’action et le recours à des ressources. Elle passe par une phase d’ex- plicitation et de mise en récit de l’expérience. L’individu peut difficilement conduire ce travail seul, et il est nécessaire qu’un médiateur puisse le guider. Ainsi, les enjeux de transfert des savoir-faire d’expérience ouvrent sur des questions sensibles et complexes tant pour les entreprises que pour les OPCA et les organismes de formation. Des réponses formation sont à construire avec les intéressés au plus près du travail et des conditions de réalisation des activités complexes dans lesquelles sont mobilisés ces savoir-faire d’expé- riences. En fait, il s’agit d’abord d’organiser des temps d’échanges et de prise de recul sur le tra- vail, de proposer un cadre sécurisant et de construire un environnement favorable à l’élaboration des compétences. 9 - Thébaud-Mony (A.), Construction de l’expérience des jeunes et santé au travail, quelques résultats sur les rapports entre les générations, Cahiers du CREAPT, 2001. 10 - Pastré (P.), « La deuxième vie de la didactique professionnelle », Éducation permanente, n°165, 12/2005. 11 - Conjard (P.), Devin (B.), Agir sur la professionnalisation, ANACT, 2007, 159 p. 10
EDITIONS EDITIONS réseau réseau 3 La méthodologie TSE développée dans le cadre du projet de FORCEMAT Les grands principes méthodologiques et points de passage de la démarche Le volet PME du projet ÉQUAL QUINQUA conduit en région PACA en collaboration entre FORCE- MAT et le cabinet ITAQUE Conseil s’est centré sur la transmission de compétences par les salariés seniors vers les nouveaux entrants ou les salariés en milieu de vie professionnelle. Il ciblait les com- pétences acquises par l’expérience (comme le tour de main, la sensibilité au produit…), difficiles à prendre en compte dans les systèmes de référentiels d’activités et de compétences. Il a permis au cabinet Itaque d’élaborer un cadre méthodologique d’accompagnement et de formalisation du transfert de ce type de compétences. Les grands principes Le transfert des savoir-faire doit s’inscrire dans le management de l’entreprise, ce doit être un des moyens au service de son développement stratégique pour : • pérenniser des savoir-faire spécifiques ; • décloisonner des équipes ; • augmenter la productivité, la qualité ; • favoriser la mobilité ; • éviter les risques liés à une expertise unique. Il est donc important de s’assurer, avant de mette en œuvre une démarche de TSE, que ce type d’enjeux est bien présent au sein de l’entreprise. Plusieurs grands principes ont guidé l’élaboration de la démarche de TSE elle-même : • « Transférer, ce n’est pas cloner » : il ne s’agira donc pas de formaliser a priori, de transcrire des compétences pour viser une appropriation à travers un document passif. Ce principe marque aussi le fait que le transfert des compétences ne s’effectue pas nécessairement vers une seule personne avec le cas échéant des réorganisations à la suite du départ du transférant. • « Transférer, c’est faire ensemble », ce n’est pas faire faire ou montrer comment faire. Pour que le transfert puisse s’opérer entre « le transférant » et la « cible », il faudra qu’ils soient mis en situa- tion de résoudre ensemble des difficultés pour construire des réponses pertinentes. Ce principe marque la nécessité d’organiser des temps de travail en commun dans le cadre du TSE. • « Repérer des situations de travail », qui à la fois mettent en jeu les savoir-faire d’expérience, et apparaissent propices à l’apprentissage. Ce principe conduit à passer par l’identification de situa- tions de travail qui seront ensuite mobilisées dans le cadre du TSE. « C’est la situation qui fait médiation », tout autant sinon plus que la relation propice à la transmission qui peut s’établir entre le transférant et la personne qui bénéficie de ce transfert. Il découle de ces principes qu’il ne suffit pas de mettre côte à côte le transférant et la personne bénéficiaire du transfert pour que le transfert, comme par magie, s’opère. Une ingénierie, un accom- pagnement de l’action de transfert en amont par un tiers est nécessaire, notamment pour aider à comprendre comment le transférant a progressivement appris à maîtriser les savoir-faire qu’il détient. L’ambition de la méthode est en fait d’accélérer un processus d’acquisition qui, sans cet accompagnement, pourrait mettre plusieurs années à s’accomplir, en particulier parce qu’il relève- 11
EDITIONS réseau rait en partie du « hasard ». Il s’agit de gagner du temps, en faisant en sorte que la personne bénéfi- ciaire du transfert franchisse plus rapidement les étapes qui ont permis au transférant d’acquérir ses savoir-faire d’expérience. Les étapes-clés Étape 1 : un diagnostic d’opportunité Il s’agit de vérifier l’existence de compétences liées Moyens mis en œuvre : cette étape à l’expérience au sein de l’entreprise, et d’un enjeu consiste pour l’essentiel à conduire stratégique de maintien et de transfert de ces des entretiens avec plusieurs acteurs compétences. Ce diagnostic permet également de l’entreprise : le dirigeant, le DRH de mesurer la faisabilité d’engager une démarche le cas échéant, l’encadrement, de TSE, notamment en s’assurant d’un certain le(s) futur(s) transférant(s) et les cibles nombre de pré-requis : le projet est-il porté du transfert s’ils sont déjà repérés. par les opérationnels ?, le climat social est-il Durée indicative : 1 à 2 j (à moduler en favorable (notamment, comment le management fonction de la situation de l’entreprise). a t-il jusqu’à présent considéré et valorisé l’apport Livrable : un rapport de diagnostic des salariés les plus expérimentés ?) d’opportunité. Étape 2 : l’identification des savoir-faire d’expérience critiques Il s’agit d’identifier les activités dont la maîtrise Moyens mis en œuvre : utilisation est liée à des savoir-faire d’expérience et d’analyser d’une grille de criticité complétée leur criticité au travers de 4 critères (valeur ajoutée à l’issue du diagnostic et validée avec stratégique, rôle de l’expérience, risque de perte, pas différents acteurs internes (direction de possibilité d’acquisition par une autre formation). et éventuellement transférants). Cette « pesée » permet, le cas échéant, d’écarter Durée indicative : 2 j (à moduler en certains savoir-faire du transfert (par exemple ceux fonction de la situation de l’entreprise). qui ne relèveraient de l’expérience que dans Livrable : une proposition de mise les représentations de l’entreprise). en œuvre des transferts avec le résultat Il s’agit également, dès lors, de préciser ou de la pesée de chaque savoir-faire, de confirmer le choix du(es) transférant(s) (qui sait le transférant et la(les) cible(s) choisie(s). réaliser telle activité jugée critique ?) et des cibles du transfert (qui a les pré-requis pour acquérir les compétences liées à cette activité ?). Cela permet d’appréhender la question de ce choix par les activités et non par les individus. Étape 3 et 4 : la formation des transférants et la mobilisation des cibles Il s’agit de deux étapes essentielles de la démarche. Moyens mis en œuvre : entretiens Le travail avec le transférant consiste à le préparer avec le transférant, avec la cible. à transférer ses savoir-faire : repérer avec lui Durée indicative : 3 à 4 j (à moduler en comment il les a construits, selon quel jalonnement, fonction de la situation de l’entreprise). dans quelles situations et comment ils se sont Livrable : un plan d’action de transfert. stabilisés et, à partir de là, imaginer comment la cible du transfert pourrait être mise dans la même situation d’apprentissage. Ce travail avec le transférant doit aboutir à l’élaboration d’un plan d’action de transfert, véritable feuille de route qui prévoit, pour chaque savoir-faire à transférer : les situations favorables, les modalités de transfert retenues, les délais, les modalités d’évaluation de l’acquisition des savoir-faire… En parallèle, il faudra s’assurer des conditions, en particulier d’organisation, qui permettront le bon déroulement du transfert. Cette étape comprend aussi un travail de préparation avec les cibles : expliciter les enjeux du transfert, vérifier les pré-requis, sécuriser, rassurer… 12
EDITIONS réseau Étape 5 : la mise en œuvre du transfert et l’évaluation des acquis Moyens mis en œuvre : temps Il s’agit pour le consultant de suivre le transfert, de briefing ou de suivi des actions pour identifier les difficultés et aider à construire de transfert réalisées en situation les réponses pertinentes éventuelles, puis de faire de travail en l’absence du consultant. le point sur les compétences acquises à l’issue Durée indicative : 1 à 2 j (à moduler en de la démarche. fonction de la situation de l’entreprise). Étape 6 : la formalisation des bonnes pratiques Cette étape consiste à formaliser, pour l’entreprise, Durée indicative : 1 à 2 j (à moduler en les savoir faire-critiques transférés et leurs fonction de la situation de l’entreprise). modalités de transfert, afin de permettre Livrable : un document de à l’entreprise de capitaliser, de garder en mémoire « capitalisation » propre à l’entreprise. sa démarche. Les conditions de déploiement du projet TSE L’objectif initial était de réaliser, pour l’ensemble des branches travaillant avec FORCEMAT, une centai- ne d’actions de transfert dans le cadre du projet TSE. Initiateur de la démarche en PACA, le cabinet Itaque a été chargé d’animer un réseau de consultants, choisi dans les réseaux « démarche compétence » pilotés par les organismes de formation des branches Céramique (ICF), Carrières et matériaux (CEFICEM) et Tuiles et briques (CTTB), pour permettre des interventions sur l’ensemble du territoire national. Un groupe d’une dizaine d’inter- venants a été progressivement constitué. Avec les consultants Itaque, c’est environ une quinzaine de personnes qui, au final, sont aujourd’hui susceptibles d’intervenir sur des actions TSE. Par ailleurs, FORCEMAT a assuré, par l’intermédiaire de ses DRF, l’information des entreprises sur l’existence, les finalités et les modalités de la démarche, ainsi que sur le cofinancement FSE : pla- quette de présentation12, réalisation de films, visites d’entreprises, organisation de petits déjeuners… Le déploiement de la démarche à grande échelle a été favorisé par l’adhésion à la démarche de groupes TSE (Lafarge, KP1, Imérys…) qui, à la suite d’une première expérience réussie de TSE, ont décidé de l’étendre à tout ou partie de leurs sites. À l’issue d’un contact ayant mis en évidence des besoins de transfert de compétences dans l’entre- prise, les DRF étaient en mesure de proposer, le cas échéant en lien avec l’organisme de formation de la branche concernée, la réalisation d’un diagnostic d’opportunité par un consultant. Par la suite, le DRF participait, en principe, à des phases-clés de l’intervention : réunion de restitution du diagnostic d’opportunité (marquant l’engagement définitif de l’entreprise dans la démarche), et réunion de bilan final ; il pouvait avoir d’autres contacts entre-temps avec le consultant pour faire le point sur l’intervention en cours. Il nous paraît important de noter l’importance d’un temps de contractualisation d’une part avec l’entreprise, d’autre part avec le consultant. La rédaction d’une proposition d’intervention permet de : • clarifier l’objet du projet ; • savoir qui fait quoi ; • préciser sur quoi s’engagent l’entreprise et le consultant. Reste la question de l’utilisation ultérieure de ces documents de formalisation dans une optique de suivi-évaluation, peu activée, a priori, dans les cas rencontrés. 12 - voir en annexe 1, page 42 13
EDITIONS réseau 1 4 Un regard sur 11 expériences spécifiques Les investigations conduites par l’ANACT La méthodologie d’étude prévoyait qu’une dizaine d’actions de transfert puisse être investiguée de manière qualitative, par le biais d’enquêtes conduites par le réseau ANACT sur le terrain. L’échantillon, à déterminer en collaboration avec les différents niveaux d’acteurs concernés, devait permettre d’appréhender l’ensemble des configurations possibles, tant au niveau des secteurs d’activité, des enjeux, des publics visés, que du type de compétences à transférer. Modalités de choix des terrains Chaque délégué régional a fait, souvent en lien avec les consultants concernés, des propositions de cas de transferts leur paraissant intéressantes à investiguer, dans des entreprises susceptibles d’accueillir favorablement une demande d’enquête. À partir de cette première sélection, nous avons retenu en priorité les actions terminées, sur lesquelles il était possible d’avoir un certain recul, sans toutefois exclure, compte tenu de leur intérêt, certaines actions en cours. Nous avons aussi cherché à nous assurer qu’un des principaux acteurs de la démarche, en l’occurrence le transférant, serait encore présent dans l’entreprise au moment de l’enquête. Enfin, nous avons collectivement veillé à ce que le panel de 11 cas ainsi dégagé soit représentatif de la diversité des secteurs d’activité et des démarches TSE conduites dans le cadre du projet, tout en couvrant si possible l’ensemble des délégations régionales de FORCEMAT, ce qui a été le cas à une exception près, la délégation de Midi-Pyrénées. Les délégués régionaux se sont ensuite assurés auprès des entreprises de leur accord pour que nous intervenions chez elles et rencontrions les principaux acteurs de la démarche en interne. Modalités d’enquête En accord avec FORCEMAT, l’ANACT et cinq associations régionales ont réalisé les onze enquêtes de terrain. Une fois l’accord de l’entreprise obtenu, chaque intervenant a pris contact avec le délégué régional concerné et le consultant ayant réalisé l’intervention, afin de recueillir les documents produits dans le cadre de l’intervention et de pré-identifier avec eux les modalités d’investigation et les acteurs à rencontrer ; puis, fort de ces premiers repères, il a pris contact avec le correspondant indiqué par le délégué régional au sein de l’entreprise pour convenir avec lui des modalités concrètes d’organisation de l’enquête. Au-delà d’éléments caractéristiques de l’entreprise et de son organisation, l’objectif était d’appré- hender, par le biais d’entretiens, d’analyses documentaires et d’observations directes : • les enjeux et facteurs qui ont sous-tendu l’engagement de l’entreprise dans un projet ; • les conditions de déploiement de la méthodologie et les réajustements éventuels ; • les effets directs et indirects, attendus ou pas de l’action ; • les conditions ou facteurs favorables à la réussite du projet ; • les difficultés ou contraintes rencontrées ; • les enseignements dans une perspective de transfert. Concrètement, les enquêtes se sont déroulées sur une ou deux journées, avec : • des entretiens avec l’ensemble des acteurs internes et externes ayant contribué de près ou de loin à la démarche TSE : 14
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