Une rentrée inédite et masquée - Les centres de données et leur empreinte carbone - EPFL
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N° 36 Octobre 2020 Les centres de données et leur empreinte carbone DOSSIER P. 4 Une rentrée La restauration inédite et de l’EPFL s’engage pour masquée la durabilité ALIMENTATION P. 14 L’EPFL décerne cette année 1072 diplômes de Master EPFL MAGAZINE N°36 — OCTOBRE 2020 1 DIPLÔMÉS P. 21
ÉDITO Gisou van der Goot Journal de l’EPFL Future vice-présidente pour Editeur responsable la transformation responsable Mediacom Mirko Bischofberger Relevons ensemble le défi Together we can Contact de la rédaction epflmagazine@epfl.ch de la durabilité et achieve sustainability magazine.epfl.ch 021 693 21 09 de l’inclusion and inclusion Suzanne Setz, secrétariat de rédaction, mise en page et production Commencer ses études en passant la plus It’s not easy to kick off your college years Anne-Muriel Brouet, responsable éditoriale grande partie du temps chez soi devant stuck at home in front of the computer. et cheffe d’édition un ordi, c’est extrêmement déroutant. La And this situation is just as frustrating for Sarah Aubort, rédactrice en chef situation n’est pas beaucoup plus aisée pour other undergraduates, Master’s students, Rédacteurs les étudiant.e.s des années suivantes, les PhD students, new parents, faculty Rémi Carlier Cécilia Carron « thésard.e.s », les jeunes parents, le corps members – pretty much everyone. But we Sandy Evangelista enseignant ou qui que ce soit. Pour autant, shouldn’t get discouraged: the Earth is still Valérie Geneux Julie Haffner il n’y a pas lieu de baisser les bras : le spinning and life does go on. Including on Nathalie Jollien monde et la vie ne s’arrêtent pas. Y compris the EPFL campus, which is teeming with Celia Luterbacher Nik Papageorgiou sur le campus de l’EPFL qui pullule ideas and new initiatives, as you’ll see in this Sarah Perrin d’initiatives et de nouveautés, comme en issue of EPFL Magazine. Tanya Petersen Frédéric Rauss témoigne ce numéro d’EPFL Magazine. What I find particularly inspiring in all this Hillary Sanctuary Ce qui me ravit particulièrement, c’est is that people are clearly becoming more Correction Marco Di Biase ce clair éveil d’une conscience sur la aware of core values like sustainability, Photographies durabilité, la diversité, le partage et diversity, sharing and inclusion. The Alain Herzog, Jamani Caillet, l’inclusion. Ça tombe bien, c’est la timing couldn’t be better, since EPFL Murielle Gerber préoccupation d’une nouvelle Vice- has just created the Vice Presidency for Infographies Pascal Coderay, présidence à l’EPFL : la Transformation Responsible Transformation, which I look Laura Cipriano Responsable que j’aurai le plaisir de diriger forward to leading starting on 1 January. Comic Nik Papageorgiou dès le 1er janvier prochain. EPFL is one of the driving forces behind Adresse L’EPFL est un des fers de lance de la Switzerland’s digital transformation. EPFL Magazine Mediacom – Station 10 digitalisation en Suisse; c’est magnifique, We’re both excited about and proud CH-1015 Lausanne nous en sommes fiers. Mais nous nous of this role – but we’re also concerned Contributions Ce journal est ouvert aux préoccupons aussi de son empreinte about Switzerland’s digital-related carbon membres actifs de l’EPFL. Les carbone (voir pages 4-9). Idem quand footprint (pages 4–9). We’d similarly like propositions d’articles doivent être discutées avec la rédaction il s’agit de besoins plus fondamentaux : to see a more responsible approach to une semaine au plus tard avant l’alimentation. La restauration de society’s most fundamental need: food. In les délais rédactionnels. La rédaction fixe le lignage. l’EPFL montre aujourd’hui le chemin du this, our campus restaurants are forging a Merci de nous faire parvenir changement (voir page 14-15). Nos campus path forward (pages 14–15). ensuite les articles avec un titre et signés (nom, prénom, sont de bouillonnants écosystèmes où une Our campuses are vibrant ecosystems fonction, unité, section) éducation d’exception et une recherche where students receive an exceptional dans les délais rédactionnels ci-dessus. hors pair peuvent se développer. Mais education and scientists perform cutting- La rédaction se réserve le ces campus doivent intégrer, sous tous edge research. But that’s not enough. EPFL droit de raccourcir les articles trop longs. Elle assume la ses aspects, la durabilité et agir comme needs to better incorporate sustainability in responsabilité des titres laboratoires vivants, où étudiant.e.s, all its facets and serve as a living laboratory et de la mise en page. Conception graphique chercheur.e.s et employé.e.s innovent where students, scientists and staff can Bontron & Co, Genève et testent ensemble de nouvelles idées. innovate and test new solutions. Over Marc Borboën, Mediacom Impression Pendant trois semaines, l’équipe Durabilité three weeks this fall, our Sustainability PCL Presses Centrales SA, nous offre cette occasion pour contribuer team will collect your ideas in order to Renens Papier à un environnement plus durable, divers, identify and showcase tangible steps we can Cyclus Print, 80 g, altruiste et inclusif (voir page 16). Plus take towards a more sustainable, diverse, 100% recyclé la participation sera importante, plus altruistic and inclusive world (page 16). nos campus seront des lieux de vie The more of you who participate, the more épanouissants. campus life will be an enriching experience Le défi qui nous attend est immense. Mais for everyone. le plus beau côté de la durabilité et de Formidable challenges lie ahead. But what’s Image de couverture l’inclusion, est qu’on ne peut les réaliser so gratifying about achieving sustainability d’EPFL Magazine : © Alain Herzog qu’ensemble. and inclusion is that it will be a team effort. 2
SOMMAIRE ALIMENTATION > P. 14 LA RESTAURATION DE L’EPFL S’ENGAGE POUR LA DURABILITÉ POINT FORT > P. 4 LES CENTRES DE DONNÉES CONTRAINTS DE PENSER LEUR YOUTUBE > P. 23 UN SHOW POUR EMPREINTE CARBONE DÉCOUVRIR LA FACE CACHÉE DE LA PLANÈTE EPFL ACTUALITÉS SCIENTIFIQUES > P. 10 P. 10 – Une nouvelle méthode pour imprimer des organes miniatures P. 13 – La riche activité de la moelle épinière révélée CAMPUS > P. 14 P. 25 – New program to train leaders of a more sustainable world SCIENTASTIC > P. 27 LIBRAIRIE > P. 29 P. 33 – Emmanuelle David s’engage (encore) AU CŒUR « L’INTÉGRALE », pour l’égalité VU ET ENTENDU SUR LE CAMPUS > P. 19 DU FESTIVAL DES LIVRES LECTURE > P. 35 DES SCIENCES ET DU CAFÉ CULTURE > P. 39 EPFL MAGAZINE N°36 — OCTOBRE 2020 3
POINT FORT Les centres de données contraints de penser leur empreinte carbone gourmands en données et en énergie, résume le respon- sable. Les gens ne réalisent pas ce que ça représente de regarder un film en 8k en termes de traitement, de trans- port de données et donc de consommation électrique. C’est gigantesque ! » La technologie numérique est près d’atteindre ses limites Une demande en pleine explosion physiques. La voie de sortie passe Et ce n’est pas près d’être terminé. Le développement par davantage de centres de d’un vaccin prendra des semaines voire des mois, sans données, mais aussi par la maîtrise compter la deuxième vague. Nombre d’organisations, no- tamment dans le domaine de l’éducation, ont déjà annon- de leur empreinte carbone. cé que le virtuel allait continuer, au moins dans un format Par Anne-Muriel Brouet et Julie Haffner hybride pour les cours par exemple. L’enjeu est phénoménal. Il l’était déjà avant la crise sani- taire. « L’Internet des objets, la prolifération de l’intelli- gence artificielle, l’arrivée de la 5G ou encore les poussées technologiques – comme le passage des téléviseurs de Presque du jour au lendemain, à cause de qui vous savez, résolution 4k à 8k – vont faire exploser la demande. Et tout ce qui pouvait passer en virtuel a quitté le monde donc la consommation énergétique », rappelle Babak Fal- physique. D’un point de vue énergétique, les conséquences safi. Entraîner un seul modèle d’intelligence artificielle du ne se sont pas fait attendre : les émissions de CO2 liées à type « Transformer » pourrait émettre autant de CO2 que l’industrie et aux transports ont drastiquement chuté. Mais cinq voitures américaines au cours de toute leur vie, titrait qu’en est-il de la demande énergétique liée à l’explosion de la MIT Technology Review il y a un an. Autre exemple, Net- l’utilisation des services numériques ? Les chiffres manquent flix a annoncé qu’en 2019 sa consommation énergétique encore pour que l’on puisse en mesurer l’impact, mais une avait augmenté de 84%, atteignant 451’000 mégawatts/ chose est certaine, et Babak Falsafi, directeur du centre heure soit autant que pour alimenter 40’000 foyers amé- EcoCloud de l’EPFL, ne manque pas de la mentionner : ricains durant une année. «Derrière tout ce qui est numérique, il y a un centre de Certaines projections avancent que d’ici à la fin de la dé- données. Nous nous dirigeons vers un monde où tout est cennie 8% de la consommation d’électricité mondiale numérisé. Toutes les activités, de tous les secteurs. » proviendront du numérique, provoquant 4% des émissions « La pandémie a transféré beaucoup d’activités profes- de CO2. Selon les estimations, la facture électrique se sionnelles en ligne, provoquant une augmentation de la situe aujourd’hui entre 3 et 5% de l’énergie mondiale. Cela demande, essentiellement pour de la vidéo. En outre, la comprend, d’une part, les centres de données, dont les demande pour du streaming de loisir a explosé. Et de sur- plus gigantesques atteignent déjà plusieurs centaines de croît sur des supports de haute résolution et donc plus mégawatts. Ces infrastructures physiques abritent des EPFL MAGAZINE N°36 — OCTOBRE 2020 5
POINT FORT serveurs qui traitent, analysent, stockent et distri- gle n’existerait pas sans centres de données. Beau- buent nos données, accessibles par le cloud. Et, coup de recherches à l’EPFL n’auraient pas fonc- d’autre part, dans une proportion équivalente, les tionné non plus. » réseaux qui les transportent. Dans une moindre mesure, on ajoute les appareils grand public et la Vers des centres plus durables construction. Depuis 2011, le centre EcoCloud de l’EPFL travaille à sortir de l’impasse physique du silicium en misant La fin de la loi de Moore sur la technologie pour rendre les centres de don- Parallèlement à l’explosion de la demande, l’offre nées plus efficaces et réduire leur empreinte éner- fait face à une limite physique. La loi de Moore, qui gétique. A l’époque personne ne se préoccupait de énonce que le nombre de transistors contenus dans cet aspect. Aujourd’hui le vent a tourné. « Il y a trois les microprocesseurs double tous les deux ans, at- aspects à prendre en compte dans l’équation, ré- teint ses limites. On ne peut plus rendre le silicium sume Edouard Bugnion. D’abord, l’efficacité éner- plus dense comme on l’a fait au cours de 50 der- gétique du centre afin de l’améliorer. Ensuite, la nières années. La solution consiste donc à construire quantité de carbone émise pour le faire fonctionner de nouveaux centres de données ou à agrandir les afin de se tourner vers des sources durables ou re- existants. D’ici à cinq ans, le marché de la construc- nouvelables. Enfin, l’utilisation de l’énergie produite tion des centres de données est estimé à 57 milliards par les machines qui se transforme en chaleur. Peut- de dollars. on en faire quelque chose de plus que d’ouvrir les Qui paie la facture «climatique » ? « Personne ! ré- fenêtres pour chauffer le parking ? » pond Babak Falsafi. Personne n’est responsable des En lançant leur label énergétique au début de l’an- émissions carbone. L’utilisation d’une connexion née, EcoCloud et les membres de la Swiss Data- Internet est facturée par un opérateur mais les ser- center Efficiency Association (SDEA) entendent vices des fournisseurs, comme la recherche Google maintenant quantifier combien de CO2 par kWh est ou Facebook, sont gratuits. Ces géants du numé- généré par les centres de données (voir texte label). rique veulent récolter des données et les utiliser Avec le label, ils espèrent encourager l’adoption des pour améliorer leurs services. Ce modèle ne tient énergies renouvelables dans les technologies de donc pas compte de l’empreinte carbone puisque l’information. Parallèlement, EcoCloud génère des l’analyse énergétique se fait sur les centres de don- projets menés par des laboratoires de l’EPFL avec nées et non pas sur les réseaux. » Edouard Bugnion, des partenaires privés sur les technologies de refroi- vice-président pour les systèmes d’information à dissement, la gestion de l’énergie, le stockage de l’EPFL, renchérit: « Les centres de données sont le l’énergie, ainsi que la production d’électricité, le conditionnement des changements technologiques tout faisant partie d’un écosystème qui peut contri- sous une forme consommable. Ils sont le véhicule buer à améliorer les émissions de carbone des qui permet au cyberespace de se développer. Goo- centres de données. 6
POINT FORT Un label pour des centres de données plus «green» En janvier dernier, l’EPFL a lancé avec différents partenaires le premier label d’efficacité énergétique destiné aux centres de données. « En 2011, lorsque l’on a fondé EcoCloud, le but était de travail de celle-ci. « Le label est unique car, en INFRASTRUCTURES de réduire la consommation électrique et les émis- plus des critères de base, il prend en compte la Un nouveau centre de sions carbone des centres de données, alors qu’à source de l’électricité et l’efficacité du recyclage de données pour l’EPFL cette époque les grandes groupes IT n’accordaient la chaleur émise, explique Babak Falsafi. Cela fonc- L’EPFL profite de la modernisation de sa de l’importance qu’aux aspects économiques et tionne comme un ensemble: si on utilise des énergies centrale thermique pour commerciaux, déclare Babak Falsafi, directeur du renouvelables, on obtient de meilleurs résultats. » construire un nouveau centre de recherche. Nous avons développé des Grâce aux trois labels (bronze, silver et gold), la centre de données. De technologies pionnières qui ont introduit les éner- SDEA veut inciter les exploitants à rendre leurs haute densité, il aura gies renouvelables dans l’écosystème des centres centres de données moins gourmands en énergie. à terme une capacité de 3 MW. Il servira à de données. » EcoCloud a pour mission de relever D’après des tests menés dans dix centres en Suisse, stocker, gérer et traiter les défis majeurs du secteur ICT en stimulant l’in- la « boîte à outils » élaborée par la SDEA permet essentiellement les novation dans ce domaine, des algorithmes aux in- d’intégrer des mesures qui peuvent déplacer les données acquises par frastructures. besoins en électricité vers des énergies renouve- les chercheurs au cours Alors que la planète se tourne chaque jour un peu lables jusqu’à 100%. de leurs expériences scientifiques. Ses plus vers le numérique, les centres de données sont façades et son toit de plus en plus sollicités, ce qui induit une augmen- Arrivé au bon moment seront entièrement tation de leur consommation d’électricité. On es- Alors que le matériel informatique atteint ses li- recouverts de panneaux time que leur consommation énergétique pourrait mites, la seule option pour faire face à la demande solaires, et la chaleur atteindre 8% de l’électricité mondiale d’ici 2030. croissante est de construire plus de centres de don- produite par les serveurs sera récupérée et utilisée nées. « Ce label arrive donc à point nommé, se ré- par la nouvelle centrale Décarboner les centres de données jouit Babak Falsafi. On espère encourager l’intégra- de chauffe. Sa mise Face à ce constat, acteurs académiques et indus- tion des énergies renouvelables dans les futures en service est prévue triels ont uni leurs forces pour créer l’alliance Swiss infrastructures et, par la même occasion, stimuler au deuxième semestre Datacenter Efficiency Association (SDEA). Initiée l’activité économique et l’innovation dans ce do- 2021. par digitalswitzerland and Hewlett Packard Enter- maine. » prise (HPE), l’association regroupe EcoCloud, HPE, Green IT Switzerland, la HES de Lucerne, l’Asso- ciation suisse des centres de données (Vigiswiss) et l’Association suisse des télécommunications (ASUT). Le projet est également soutenu par le programme SuisseEnergie de l’Office fédéral de l’énergie (OFEN). « Il n’existe aucun moyen de mesurer la responsabi- lité des centres de données dans les émissions de CO2 », souligne Babak Falsafi. En janvier dernier, la SDEA a donc lancé un label qui permet de calculer l’empreinte carbone des centres de données en se © EPFL basant sur l’efficacité énergétique de l’infrastructure hôte, de l’infrastructure informatique et de la charge EPFL MAGAZINE N°36 — OCTOBRE 2020 7
POINT FORT Faire fonctionner un serveur comme un être humain L’idée de David Atienza est que tout ce qui peut être fait localement le soit. Traiter les données là où elles sont générées permet de réduire ainsi considérablement leur empreinte énergétique. Le Laboratoire de systèmes embarqués (ESL) s’at- crofluidiques, d’à peine 50 à 100 microns de hau- taque à deux problèmes énergétiques majeurs des teur. Pris en sandwich entre des couches, les canaux serveurs. Le premier est le fait que les serveurs sont ont un double objectif : le fluide qui les traverse loin d’être utilisés au maximum de leurs capacités. refroidit le système, tandis que des petites piles à Soixante pour cent, estime son directeur David combustible microfluidique convertissent la chaleur Atienza. « Les serveurs sont conçus pour des tâches en énergie électrique. L’idée est de réintroduire qui nécessitent beaucoup de puissance de calcul, cette énergie dans le système du serveur pour le comme les réseaux de neurones, mais ils sont es- faire fonctionner et réduire la facture énergétique sentiellement utilisés pour regarder des vidéos ou des centres de données. envoyer des photos de chats », résume David Atien- za. Conséquence : ils chauffent. « C’est comme faire Une gestion locale rouler une Ferrari à 40 km/h, elle consommera « Le cerveau utilise le même système, rappelle Da- beaucoup si les gens l’utilisent comme une Twingo. » vid Atienza. Le sang apporte à la fois les nutriments Or quand une partie des éléments d’un centre de et refroidit le cerveau. C’est la même idée, même données chauffe beaucoup, en l’occurrence les ser- si pour les serveurs c’est un peu plus compliqué ! » veurs, c’est l’entier du centre de données qu’il faut Si le refroidissement des serveurs à l’eau est au- refroidir. Le projet Compusapien, qui a valu en 2016 jourd’hui largement utilisé, la génération d’énergie une bourse ERC Consolidator au professeur, a dé- pour les serveurs avec des piles à combustible mi- montré que le refroidissement local des serveurs crofluidique est complètement nouvelle. Un proto- permet d’économiser 40% de l’énergie habituelle- type a été réalisé avec IBM et a démontré la faisa- ment utilisée. Au lieu d’avoir des ventilateurs dans bilité de cette technologie baptisée « sang toute la pièce, en collaboration avec IBM, les cher- électronique ». Aujourd’hui, l’ESL est en train de cheurs ont utilisé de l’eau à proximité des serveurs construire une version en 3D du système intégré, non seulement pour les refroidir, mais aussi pour et compte mettre au point, à l’avenir, un serveur récupérer de l’énergie. Les plaques de refroidisse- complet avec un autre partenaire industriel. ment sont constituées de minuscules canaux mi- La deuxième voie empruntée par le laboratoire est David Atienza, directeur du le fait de traiter localement ce qui peut l’être, car Laboratoire de l’envoi de données consomme beaucoup d’énergie. systèmes embarqués. © Alain Herzog Spécialistes des systèmes embarqués, les scienti- fiques de l’ESL ont par exemple développé une machine à café avec Nespresso qui inclut l’intelli- gence artificielle embarquée afin d’être indépen- dante dans la gestion de sa maintenance et de son approvisionnement. « De plus en plus d’apps, dans les smartphones notamment, fonctionnent locale- ment et ne passent plus par les centres de données, précise le chercheur. Le corps humain fonctionne sur le même principe. Plein de petits modules sont capables de faire deux ou trois opérations très simples et, quand on en a besoin, on les utilise. Ce n’est que quand il y a une décision importante à prendre que le cerveau entre en jeu. Tandis que dans les datacenters tout est en permanence en fonc- tionnement. » 8
POINT FORT Les mathématiques au service de la gestion des données massives L’hétérogénéité du matériel et des logiciels rend les opérations informatiques de plus en plus lourdes et mène au gaspillage énergétique. Anastasia Ailamaki leur fournit un langage commun. « Si l’on peut repenser la solution à un problème de manière plus efficace, et en consommant moins de ressources, on est durable. C’est ainsi que l’on peut dire que notre recherche est directement reliée à la question de la durabilité », avance Anastasia Ailama- ki, professeure du Laboratoire de systèmes et appli- cations de traitement de données massives (DIAS) Anastasia Ailamaki, et fondatrice de la start-up RAW Labs SA. Le DIAS directrice du Laboratoire construit des systèmes de gestion de données qui de systèmes et applications de traitement de données visent à exploiter au maximum le hardware et le soft- massives. © EPFL ware à disposition. Un véritable défi étant donné l’hétérogénéité de l’un comme de l’autre. « Du hardware sous tension qui n’est pas utilisé, c’est fonction de la requête, nous leur donnons une forme du gaspillage énergétique », rappelle la professeure. mathématique. Le programme va alors générer du Les humains consomment l’énergie de manière pro- code pour exécuter la requête. En temps réel », dé- portionnelle à leur activité, mais ils consomment de taille la chercheuse. Reste le problème de la perfor- l’énergie aussi sans rien faire. C’est le cas aussi pour mance. Si les données avaient été préchargées et la les ordinateurs : même quand ils ont une activité question posée à la base de données, l’exécution faible, ils restent de gros consommateurs d’énergie. aurait été beaucoup plus rapide. « Notre solution « Or, les machines sont en moyenne utilisées à 20% consiste à utiliser l’intelligence artificielle et l’ap- de leur potentiel, poursuit la chercheuse. C’est prentissage automatique pour se souvenir et ap- comme si on remplissait le frigo, laissait pourrir la prendre le style des questions posées. Nous gardons nourriture et se plaignait ensuite de ne pas avoir à tout le travail réalisé lors des précédentes requêtes manger. » Idem pour les logiciels. « Aujourd’hui, on à disposition. C’est comme un cache qui permet de n’utilise que 10% des données que l’on stocke et pour répondre beaucoup plus vite à la prochaine question les utiliser il faut d’abord les charger, les homogénéi- posée sur les mêmes données. » ser et savoir a priori ce que l’on veut en faire », dé- La philosophie de conception du système, appelée plore-t-elle. Just-In-Time (JIT), permet de poser tout type de Anastasia Ailamaki explique ceci par un exemple. question sur tout type de données, de marier des « Prenons d’un côté une liste d’interviews de toutes données de n’importe quelle source et, finalement, sortes sous forme de fichiers Word et de l’autre un de créer un cache avec les données les plus fréquem- tableau Excel des entreprises qui investissent dans ment utilisées. C’est comme payer à la carte. En les start-ups de l’EPFL. Si je veux chercher dans mes outre, si les applications, les données, les infrastruc- interviews le nom des personnes qui ont parlé de tures changent, le système reste valable, car ce n’est durabilité et qui investissent à l’EPFL, c’est impos- pas du code, mais des mathématiques. La start-up sible. Si les données brutes ne sont pas chargées dans RAW Labs SA applique cette philosophie en déve- une base de données, on ne peut pas répondre à loppant RAW, une solution qui combine des données cette requête. Et, du fait que ce sont deux sortes de diverses en temps réel et apporte ainsi les informa- données différentes, à savoir du texte et un tableau, tions importantes prêtes à l’emploi aux entreprises il faut les homogénéiser pour les charger dans une et au grand public. base de données. » Et le hardware ? Idem. Le mécanisme de génération de code sert à concevoir un logiciel qui cartographie Un service à la carte les propriétés du hardware en temps réel et optimise La solution que propose son laboratoire se trouve en son utilisation. « Avec notre système, l’utilisation des amont de ces processus. « Au lieu d’homogénéiser machines atteint 80% de leur potentiel », avance la les données, nous reconnaissons leur nature et, en chercheuse. EPFL MAGAZINE N°36 — OCTOBRE 2020 9
ACTUALITÉS SCIENTIFIQUES La bio-impression permet de déposer des cellules n’importe où dans l’espace 3D. © EPFL IN VITRO l’Institut de bio-ingénierie, et ganoïdes du tractus gastro-in- Une nouvelle méthode son équipe se sont tournés vers testinal, les chercheurs ont pour imprimer des organes la bio-impression. Une techno- logie semblable aux imprimantes généré des portions de l’estomac, de l’intestin grêle et du côlon, miniatures 3D utilisées pour créer des ob- jets du quotidien peut permettre pour former ensuite des versions miniatures interconnectées de L’apparence et le fonctionnement aux bio-ingénieurs d’assembler leurs organes parents. Avec les des tissus miniatures sont pratiquement des tissus vivants. A la place méthodes traditionnelles, « vous similaires à ceux de leurs homologues des plastiques ou poudres uti- pouvez faire croître des orga- lisés dans les imprimantes 3D noïdes d’estomac ou d’intestin, de taille réelle. traditionnelles, les bio-impri- alors qu’avec la bio-impression meurs utilisent des bio-encres, vous pouvez combiner différents D epuis quelques années, c’est-à-dire des liquides ou gels types de cellules et les agencer de des versions miniatures qui encapsulent des cellules différentes manières », affirme d’organes tels que le cer- vivantes. « La bio-impression Matthias Lütolf. veau, les reins et les poumons est très intéressante, car elle Parallèlement à cette re- - connus sous le nom d’orga- permet de déposer des cellules cherche, les scientif iques du noïdes - sont développées à n’importe où dans un espace groupe de Matthias Lütolf ont partir de cellules souches. Les 3D. Vous pouvez ainsi agencer trouvé un moyen de « guider » organoïdes présentent une al- des cellules dans une configura- les cellules souches pour qu’elles ternative pour réduire les tests tion de type organe comme un forment un organoïde intestinal sur les animaux et améliorer tube », déclare Matthias Lütolf, qui ressemble au tissu réel et se les modèles permettant d’étu- qui a dirigé l’étude publiée dans comporte à l’identique. Publiée dier comment se forment les Nature Materials. dans Nature, cette méthode organes humains et comment exploite la capacité des cellules certains processus dégénèrent Plus près de la réalité souches à croître et à s’organiser en cas de maladie. Avec les La spécificité de cette ap- le long d’une structure en tube approches conventionnelles, proche et sa réussite par rapport qui imite la surface du tissu na- les cellules souches fusionnent aux méthodes préexistantes tif, lorsqu’elles sont placées dans et se développent en formant s’expliquent par le fait qu’elle une puce microfluidique (puce des sphères de quelques micro- combine la flexibilité et la pré- dotée de petits canaux dans les- mètres à quelques millimètres cision de l’impression 3D avec quels de petites quantités de li- de diamètre. la capacité des cellules souches quides peuvent être précisément Pour développer de plus des organoïdes à se développer manipulées). grands organoïdes similaires et s’organiser. Giorgia Guglielmi et Nik Papageorgiou > RETROUVEZ LES ACTUALITÉS COMPLÈTES aux tissus qu’ils modélisent, En bio-impr ima nt des SUR : actu.epfl.ch Matthias Lütolf, professeur à cellules souches dérivées d’or- 10
ÉNERGIE ACTUALITÉS SCIENTIFIQUES La collaboration des microbes optimise la conversion de la biomasse Les plantes non comestibles BRÈVE sont une alternative ÉLECTRONIQUE prometteuse au pétrole brut. Des puces plus puissantes Un projet du Laboratoire des procédés durables et — La gestion de catalytiques (LPDC), mené par Robert Shahab la chaleur dans © iStock l’électronique est un L énorme problème. es plantes constituent l’un des can- Notamment à cause didats les plus prometteurs pour de la recherche remplacer le pétrole brut. En parti- l’acide butyrique, qui peut être utilisé dans constante pour culier, la lignocellulose – biomasse issue des bioplastiques, tandis que le LPDC a réduire la taille et des plantes non comestibles telles que montré récemment qu’il peut même être pour assembler un maximum de l’herbe, les feuilles et le bois qui n’entrent transformé en carburant pour avions. transistors dans une pas en compétition avec les cultures ali- « Le but ultime est de reconstruire un même puce. Toute la mentaires – est abondante et renouve- secteur de fabrication renouvelable pour en difficulté est de gérer lable et elle offre une formidable source remplacer celui qu’on utilise actuellement efficacement des alternative au pétrole pour toute une sé- qui génère de nombreux produits à partir flux de chaleur aussi élevés. rie de produits chimiques. L’innovation du pétrole brut. Une méthode qui introduit Habituellement, introduite par Robert Shahab est dans la de la flexibilité et de la modularité représente les technologies dernière étape. En utilisant divers micro- une étape importante dans cette direction », électroniques et organismes qui font fermenter l’acide lac- précise Jeremy Luterbacher, directeur du les systèmes de tique, il a pu produire une multitude de LPDC. refroidissement sont réalisés produits chimiques utiles. Un exemple a été Nik Papageorgiou indépendamment et séparément. Le Laboratoire de dispositifs semi- conducteurs de puissance apporte une petite révolution PROBABILITÉS Au cours des six années écoulées, les dans le domaine chercheurs de l’INDY ont utilisé la modé- en combinant les Prédire les résultats lisation probabiliste, l’analyse de données à deux approches, électoraux grâce grande échelle et l’apprentissage automa- développant une technologie à l’apprentissage tique pour développer Predikon. L’objectif microfluidique de de cet outil est de mieux prédire les résultats automatique finaux des élections et des référendums à refroidissement intégré à Predikon est capable de prédire partir d’un dépouillement partiel et anticipé. l’électronique qui peut gérer un résultat final quelques Le modèle de base est général et a été efficacement les appliqué avec succès pour prédire, outre les minutes après la publication des référendums suisses, les résultats des élec- grands flux de chaleur générés premiers résultats partiels. tions parlementaires allemandes et du vote par les transistors, populaire de l’élection aux Etats-Unis en permettant Un projet de l’Information and Network Dynamics Lab (INDY), développé par Victor Kristof 2016. Concernant les futures applications, encore plus de et Alexander Immer miniaturisation et on peut imaginer une évolution de Predikon, l’intégration de notamment pour que les données de sondage T convertisseurs de rès souvent, les sondages préélec- avant un vote deviennent de meilleures pré- puissance, avec toraux et les premiers dépouille- visions des résultats. plusieurs appareils à ments s’avèrent peu fiables. Les deux Tanya Petersen haute tension, dans une seule puce. exemples récents sont sans doute le vote en faveur du Brexit au Royaume-Uni et l’élec- tion de Donald Trump à la présidence des > www.predikon.ch Etats-Unis. Dans les deux cas, il a fallu at- tendre le lendemain pour avoir les résultats > RETROUVEZ LES ACTUALITÉS COMPLÈTES définitifs. SUR : actu.epfl.ch EPFL MAGAZINE N°36 — OCTOBRE 2020 11
Le modem optique sous-marin LUMA ACTUALITÉS communique avec de la lumière bleue. SCIENTIFIQUES © Alain Herzog Tamar Kohn et la scientifique Anna Carratalà mènent des expériences sur les entérovirus humains. © Alain Herzog CHIMIE MODEM BRÈVE Les virus risquent Un wi-fi optique permet SANTÉ de devenir plus difficiles une communication Détecter les maladies virales à éliminer subaquatique ultrarapide — L’aggravation Avec le réchauffement et Une spin-off de l’EPFL d’une maladie virale comme la grippe l’augmentation des longues a développé un modem wi-fi ou le COVID-19 est précédée par vagues de chaleur, il deviendra optique miniaturisé qui peut une augmentation plus difficile de lutter contre la plonger jusqu’à 6000 mètres des marqueurs inflammatoires dans prolifération de certains virus de profondeur. les fluides corporels. pathogènes. Un projet d’Hydromea, développé par Analyser en continu Alexander Bahr et Felix Schill les biofluides à Un projet du Laboratoire de chimie environnementale la surface de la (LCE), développé par Tamar Kohn C L peau permettrait onséquence indirecte du réchauffe- orsque l’on veut connecter des disposi- de détecter ce ment climatique et de la récurrence tifs sous l’eau, peu d’options existent. pic et d’intervenir très rapidement des pics et vagues de chaleur, cer- Les ondes radio fonctionnent mal. La afin d’éviter des tains virus pathogènes présents à la surface connexion filaire n’est pas pratique, car il complications et ainsi des lacs pourraient évoluer et devenir plus faut retirer les appareils de l’eau pour ré- sauver des vies. résistants, augmentant les risques de conta- cupérer leurs données. La communication Xsensio, spin- mination. Dans la nature, ils sont norma- acoustique est très lente et peu fiable. Ces off de l’EPFL, vient d’obtenir lement rendus inoffensifs par la lumière du obstacles importants entravent les com- un financement soleil et la température, ou par des bacté- munications lorsqu’il s’agit d’activités de européen de 1,8 ries présentes dans les eaux lacustres. Mais construction, d’inspection, de surveillance million de francs des chercheurs du LCE ont découvert que et de réparations sous-marines, par exemple pour adapter les entérovirus humains, causes d’infec- dans le secteur de l’énergie offshore. aux marqueurs spécifiques de ces tions gastro-intestinales, de méningites ou Hydromea, une spin-off de l’EPFL, pro- inflammations de problèmes cardiaques, issus des selles et pose une autre solution : utiliser la lumière son système de rejetés dans l’environnement par les eaux pour transmettre des données sous la sur- minuscules capteurs usées, peuvent développer une adaptation face de l’océan ou du lac. Appelé LUMA, intégrés sur patch. à la température de l’eau. le modem sous-marin utilise pour la com- Sur les 1400 candidatures, seuls Pour parvenir à ce résultat, l’équipe a munication subaquatique une lumière bleue 36 projets ont créé quatre populations d’entérovirus hu- qui clignote très rapidement. Comment ? été retenus par le mains en faisant incuber des échantillons LUMA convertit les données en impulsions Conseil européen d’entérovirus dans des fioles d’eau de lac à lumineuses et, de l’autre côté, convertit les de l’innovation pour 10 et 30 degrés, exposées ou non à la lumière impulsions lumineuses en données, et cela ce programme de financement sur deux du soleil. Ils ont alors constaté que les virus en un clin d’œil. ans, destiné à la lutte ayant survécu dans l’eau chaude devenaient « Avec le modem optique, vous avez contre le COVID-19. de plus en plus résistants à la température, une connexion sans fil. Il suffit d’être sur la contrairement à ceux incubés dans l’eau même longueur d’onde et vous pouvez com- froide. Ils ont aussi exposé les virus survi- muniquer à distance à très grande vitesse », vants à la chlorine et constaté qu’ils étaient précise Alexander Bahr, directeur général aussi devenus plus résistants à la désinfection d’Hydromea. > RETROUVEZ LES ACTUALITÉS COMPLÈTES aux produits chlorés. Sandy Evangelista SUR : actu.epfl.ch Rémi Carlier 12
ACTUALITÉS SCIENTIFIQUES BRÈVE ©EPFL ©EPFL PHOTONIQUE Filtre photonique ESPACE NEUROSCIENCES à micro-ondes — Plus rapides et L’hydrogène des planètes La riche activité de la moins gourmands en géantes expliqué par l’IA moelle épinière révélée énergie, les photons pourraient remplacer Des simulations informatiques Une technique non invasive les électrons dans d’innombrables alimentées par des algorithmes dévoile la dynamique des circuits tâches. Mais le d’apprentissage automatique spinaux avec une précision véritable essor des systèmes ont pu révéler le comportement sans précédent. photoniques à micro- de l’hydrogène en transition Un projet de la Chaire de la Fondation Bertarelli ondes attend encore en neuroingénierie translationnelle et du Laboratoire qu’on les génère sur sur Saturne et Jupiter. de traitement d’images médicales, des puces afin d’en mené par Nawal Kinany rendre l’utilisation Un projet du Laboratoire de science computationnelle et de modélisation (COSMO), écologique, peu onéreuse et surtout L mené par Michele Ceriotti a moelle épinière ressemble schéma- pratique. L’ Le Laboratoire de hydrogène est le principal composant tiquement à un long tube, avec un systèmes photoniques des planètes géantes, où il se trouve diamètre d’à peine 1,5 cm. Pourtant vient de passer une la plupart du temps à l’état liquide. il s’agit d’un élément crucial du système étape importante Près de la surface, il existe sous une forme nerveux : il permet le contrôle de nos mou- dans cette optique: isolante moléculaire : les atomes sont liés vements et nous confère le sens du toucher produire des filtres photoniques à micro- en molécules d’H 2 . Alors que vers le centre ainsi qu’une notion de la position de notre ondes reconfigurables de la planète il prend une forme métal- corps dans l’espace. sur la puce elle- lique, dans laquelle les atomes individuels Comment une structure d’apparence si même, éliminant au peuvent se déplacer librement. COSMO, simple contribue-t-elle à des comportements passage un appareil en collaboration avec des scientifiques de complexes ? Pour répondre à cette question, externe volumineux, tout en gardant la l’Université de Cambridge et Zurich IBM, les scientifiques espèrent depuis longtemps même qualité d’onde. a utilisé des simulations informatiques pouvoir observer in vivo les fonctions de la En créant une pour comprendre la nature de cette tran- moelle épinière. L’avènement de l’imagerie interférence entre sition. par résonance magnétique fonctionnelle deux impulsions dans Plutôt que d’essayer de reproduire les (IRMf) a ouvert une nouvelle fenêtre sur la une microcavité, les chercheurs ont conditions des planètes géantes dans un richesse des signaux de la moelle épinière, également rendu laboratoire, les scientifiques ont tenté de les directement chez l’humain. possible le choix des reproduire sur un ordinateur, en utilisant des Les scientifiques de l’EPFL ont conju- radiofréquences à la simulations très précises. Spécialisés dans le gué des protocoles spécialement adaptés à sortie, uniquement développement de méthodes de simulations l’IRMf de la moelle épinière à des tech- grâce à la position relative des impulsions informatiques et de modélisation aidé par niques d’analyse de pointe, ce afin de dé- des lasers qui peut l’apprentissage automatique, les chercheurs mêler ces signaux et de pouvoir clairement être précisément ont pu agrandir la taille et la durée de leurs observer la moelle épinière en action. Des contrôlée. simulations, afin d’expliquer le comporte- tests sur 19 sujets sains ont permis d’obtenir ment de l’hydrogène en transition. Tous les des images sans précédent de son architec- modèles postulent que la transition entre les ture fonctionnelle. Pour la première fois, phases isolante et métallique est nette. Or les les scientifiques ont montré à quel point la > RETROUVEZ LES modélisations des chercheurs ont révélé que moelle épinière est dynamique, même chez ACTUALITÉS COMPLÈTES la transformation s’avère graduelle. des sujets au repos. SUR : actu.epfl.ch Valérie Geneux Hillary Sanctuary EPFL MAGAZINE N°36 — OCTOBRE 2020 13
CAMPUS Depuis la rentrée académique, 50% des menus sont végétariens. © Alain Herzog ALIMENTATION La restauration de l’EPFL s’engage pour la durabilité Depuis la rentrée, la composition des assiettes servies sur le campus a changé. Et ce n’est pas fini… L a révolution verte par l’assiette ! Lorsqu’il prend ses fonctions de responsable de la restauration et des commerces (RESCO) de l’EPFL en avril 2019, Bruno Rossignol arrive avec une idée folle: repenser toute la chaîne de valeur entre le produit et le consommateur. C’est- à-dire de revoir l’offre culinaire, cultiver les parcelles de l’EPFL disponibles, réduire voire anéantir le gaspillage de nourriture, mesurer l’impact CO2 de notre alimentation, bannir les ustensiles à usage unique, reconstruire un réseau de fournisseurs et d’agriculteurs en circuit salés, trop gras ou trop sucrés. De plus, les vont alimenter les sites de restauration du court, avec les restaurateurs, et renouer restaurants ont mis sur pied un nouveau campus. Des discussions sont en cours avec avec la saisonnalité des produits. En calendrier des saisons afin de proposer des les maraîchers. janvier 2020, Bruno Rossignol donne ainsi produits qui le sont. le coup d’envoi à cette stratégie ambitieuse Bilan carbone pour les 10 prochaines années. Elle a Restauration 30% des émissions mondiales de gaz à fait l’objet d’une charte d’engagement de L’EPFL compte actuellement plus de 30 effet de serre proviennent de l’alimentation. l’Ecole, cosignée par son président, Martin lieux de restauration sur le campus lausan- L’EPFL a pris l’engagement de réduire son Vetterli. nois. Afin de renouveler l’offre et les exploi- empreinte carbone. Premier en Suisse, le Ce qui a changé depuis le printemps et tants ainsi que d’implémenter sa stratégie, Laboratoire de la durabilité alimentaire de ce qui vous attend : l’unité RESCO a lancé une série d’appels l’Ecole a conçu une plateforme d’étude de la d’offres qui s’étalent de juin 2020 à 2022. restauration, de l’alimentation, de l’eau et de Alimentation Les nouveaux restaurateurs sélectionnés la gestion des déchets culinaires. En colla- Depuis le printemps 2020, les sites de prendront leurs fonctions à partir de 2021. boration avec les partenaires Beelong (achats restauration du campus ont abandonné Le constat que 26% de l’impact carbone de alimentaires), Quantis (bilan carbone, l’huile de palme, le glutamate, que l’on notre alimentation est dû à la consommation fluides) et Kitro (gaspillage alimentaire), retrouve notamment dans les sauces, les de viande et de poisson a poussé RESCO à elle vise à fournir des analyses régulières bouillons et les soupes, ainsi que les mono- prendre les mesures suivantes: outre l’offre sur le bilan carbone de la restauration et de sodiques dans les produits. Bruno Rossignol de 50% de repas végétariens, l’unité va inau- l’alimentation. a également banni l’importation de volaille gurer un restaurant exclusivement végan et Les premiers résultats sont tombés en du Brésil. Toutes les viandes proviennent végétarien en 2021. juin 2020. Des résultats affinés et basés sur dorénavant de Suisse. La moitié de l’offre un campus en pleine capacité sont attendus en fruits et légumes est désormais nationale, Agriculture en février 2021. L’analyse est planifiée sur de saison et certifiée. En étroite collaboration avec l’unité Du- quatre ans. Elle permettra à RESCO de En outre, depuis la rentrée académique, rabilité EPFL et les agriculteurs, RESCO revoir la liste des produits qui nourrissent le les restaurants proposent 50% de menus va renforcer sa collaboration avec la Ferme campus. Par ailleurs, depuis le mois de sep- végétariens. Fin septembre, les chefs de de Bassenges. Située face au SwissTech tembre, le programme Kitro sur le gaspillage cuisine ont adopté le label nutriMenu (voir Convention Center, cette ferme en recon- alimentaire fait l’objet d’un Master proposé ci-contre). Cet outil scientifique évalue et version biologique propose un marché sur parmi les nombreux cursus de l’Ecole. corrige au quotidien la qualité nutrition- le site de l’exploitation depuis le 21 juillet. nelle des repas selon les recommandations Outre ce service, la ferme vient de termi- Services à la communauté nationales, en privilégiant le bon dosage ner ses premières récoltes. Dès le mois de Depuis la rentrée 2020, les restaurants des ingrédients afin de limiter les plats trop novembre, les produits de cette agriculture proposent des plats (trois composants) à un 14
CAMPUS prix entre 5,50 et 7,50 francs pour la com- produits sont en cours de sélection. Parmi C’est quoi nutriMenu ? munauté étudiante. Afin de lutter contre le eux, ont déjà été choisis « Léguriviera » qui Un label nutritionnel Est-il possible de manger sain et gaspillage alimentaire, responsable de 8% propose 80% de produits vaudois, Kambu- durable au quotidien ? La réponse des émissions de gaz à effet de serre dans cha et Vivi Kola, un cola entièrement suisse. est oui ! L’EPFL s’engage à équilibrer le monde, le campus généralise l’application Les « Localomates » proposeront de la bou- vos menus. Depuis le 28 septembre Too Good To Go. Par le biais de cet outil, langerie, des produits laitiers, des plats à 2020, la quasi-totalité des lieux tous les sites de restauration peuvent mettre l’emporter et des boissons, mais pas d’eau de restauration du campus adopte le label nutriMenu. Cet outil leurs invendus à la disposition de la commu- en bouteille. Davantage de fontaines à eau scientifique évalue et corrige au nauté EPFL. seront à disposition sur le campus. quotidien la qualité nutritionnelle de Par ailleurs, tous les distributeurs auto- Unité Restauration et commerces vos repas selon les recommandations matiques proposant des boissons sucrées et nationales. des barres chocolatées vont disparaître du Objectif ? Vous offrir des plats sains et équilibrés, ainsi qu’une information campus à l’horizon 2023. Un projet pilote de transparente sur la qualité de vos « Localomates » verra le jour en janvier 2021. > RESCO menus. Cet outil pédagogique assiste Ces distributeurs automatiques proposeront POUR PLUS D’INFORMATION : les professionnels de la restauration des produits locaux, sains, frais, labélisés et go.epfl.ch/restauration-durable du campus pour composer le bon durables au Rolex Learning Center. C’est-à- profil nutritionnel des menus. Pour innover aussi, en diversifiant dire des produits alimentaires viables sur le l’offre des repas quotidiens par un plan économique et social, préservant l’envi- meilleur équilibre des ingrédients ronnement, la santé et la diversité culturelle. et des aliments de saison. Avec le Projet conjoint de RESCO, de l’asso- label nutriMenu, les restaurateurs ciation Prométerre et du Canton de Vaud, s’engagent ainsi à améliorer la qualité des menus tout en réduisant leur il sera mis en œuvre par le spécialiste en impact sur l’environnement. Cet épicerie fine Dallmayr. Les fournisseurs de effort est collectif, pour le bien de toutes et tous. Maryam Yepes, nutriMenu.ch EPFL MAGAZINE N°36 — OCTOBRE 2020 15
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