Votre enfant est-il TDAH? Probablement pas et voici pourquoi - J.-C. ST-ONGE, AVRIL 2014
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TABLE DES MATIÈRES ¢ Introduction ¢ Un diagnostic de plus en plus répandu ¢ Des preuves de surdiagnostic et de surtraitement ¢ Principaux moteurs de surdiagnostic ¢ Manque d’efficacité à long terme des médicaments contre le TDAH ¢ Effets indésirables des médicaments sous-estimés ¢ De quelques alternatives ¢ Résumé et conclusion 2
Le trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) est un des diagnostics ayant connu une expansion foudroyante au cours des dernières années et c’est également l’un des plus controversés. De nombreux experts liés à l’industrie pharmaceutique croient que le TDAH existe bel et bien et qu’il est sous- diagnostiqué. Selon ce point de vue, il doit être traité avec des médicaments puissants tels que les psychostimulants, qui font partie de la liste des médicaments réglementés au même titre que la morphine. À l’opposé, d’autres experts remettent en question l’existence même du diagnostic et croient que l’inattention et l’hyperactivité sont une partie intégrante de l’enfance. Ces comportements sont soit normaux et sont transformées en trouble mental afin de vendre des médicaments; ou découlent d’autres problèmes vécus par les enfants et les adolescents. 4
UN DIAGNOSTIC DE TDAH On ne diagnostique un TDAH à partir d’un scan ou d’un test sanguin. En effet, il n’existe aucune mesure objective pour identifier un TDAH. C’est dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, mieux connu sous son acronyme anglais DSM, qu’on retrouve les critères diagnostiques du TDAH. Ce grand livre de plus de 1000 pages, publié par l’Association américaine de psychiatrie (APA), est aussi connu sous l’appellation de «bible» des psychiatres. En 2013, la cinquième édition du 5 DSM voyait le jour.
¢ Jusqu’en 2013, un diagnostic de TDAH devait être posé avant l’âge de sept ans. ¢ La publication du Le DSM distingue trois DSM-5, a élargi les formes de TDAH: 1. la critères diagnostiques forme inattentive ou en reportant l’âge TDA; 2. la forme limite à 12 ans. hyperactive-impulsive 3. ¢ Dans les prochaines la forme mixte. années on doit s’attendre à voir plus d’enfants recevoir un diagnostic de TDAH. 6
LA CADDRA (CANADIAN ADHD RESOURCE ALLIANCE) Les 12 membres du comité de La CADDRA émet les rédaction des lignes directrices lignes directrices sur le ont reçu des fonds des TDAH au Canada. fabricants de médicaments contre le TDAH. Ils sont tous en conflit d’intérêt dans la Les recommandations mesure où Ils recommandent de cet organisme les produits des fabricants établissent les normes dont ils reçoivent de l’argent. de soins pour le TDAH; elles orientent les Leurs conflits d’intérêts médecins et autres prennent les formes suivantes: Ils participent aux bureaux de professionnels de la conférenciers des santé sur la façon de le multinationales du diagnostiquer et le médicament, reçoivent des traiter. subventions de recherche ou (http://www.caddra.ca/cms4/pdfs/ font partie de leurs comités 7 caddraGuidelines2011.pdf) consultatifs.
DEUX GRANDS TYPES DE MÉDICAMENTS Il existe deux grands types Le deuxième grand type de de médicaments pour traiter médicament est représenté le TDAH. par le Strattera. ¢ Le premier groupe est ¢ Il s’agit d’un constitué des antidépresseur qui a psychostimulants. Ce sont échoué et qui fut recyclé des amphétamines ou des dans le traitement du dérivés d’amphétamines, TDAH. dont le plus connu est le Ritalin. Le principe actif ¢ À ce sujet voir: Strattera - du Ritalin est le From Failed méthyphénidate. Antidepressant to New Drug for ADHD (http:// pharmacorruption.blogspot .ca/2006/09/strattera-from- failed- 8 antidepressant.html).
UN DIAGNOSTIC DE PLUS EN PLUS RÉPANDU 9
D’après L’Enquête québécoise sur la santé des jeunes, auprès de 63 000 élèves du secondaire : ¢ près de 13% d’entre eux ont reçu un diagnostic de TDAH confirmé par un médecin, soit 16% des garçons et 9% des filles*; ¢ le Québec, qui représente 22,3% de la population du Canada, est responsable de 35% de la consommation de médicaments contre le TDAH (IMS Brogan). Le nombre d’ordonnances a presque quintuplé en 10 ans -- 2000-2009 (Dimanche Magazine, 18 sept. 2011). *L’Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire, Tome 2. Le visage des jeunes d’aujourd’hui : leur santé mentale 10 et leur adaptation sociale 2010-2011, Institut de la statistique du Québec, 2013.
Le nombre de diagnostics de TDAH a littéralement explosé aux États-Unis : Prévalence du TDAH aux États-Unis 1980 : 3% 2000 : 7% 2013 : 11% Cette augmentation rapide et inattendue a été suivie par l’expansion fabuleuse du marché américain pour les médicaments contre le TDAH. Ce marché est passé de 15 millions $ début 1990 à 9 milliards $ en 2012*. C’est un commerce très lucratif. Il n’est pas inusité de voir des familles s’entredéchirer autour d’un héritage de quelques dizaines de milliers de dollars. Les enjeux sont d’autant plus importants lorsqu’il s’agit de milliards de dollars. 11 *DSM diverses années; Allen Frances, Conférence, Hôpital général juif de Montréal, Automne 2013.
À la lecture de ces quelques faits, il se dégage l’impression que nous serions en pleine épidémie de TDAH. Pourtant, de nombreuses raisons justifient la remise en question d’une telle impression et militent en faveur de l’idée que le TDAH est largement surdiagnostiqué et surtraité. 12
DES PREUVES DE SURDIAGNOSTIC ET SURTRAITEMENT DU TDAH 13
1. UNE QUESTION DE TDAH OU DE MATURITÉ? Les enfants d’une même classe peuvent avoir près d’un an de différence. Les plus jeunes n’ont pas le même degré de maturité que les plus vieux. Aux États-Unis, deux études ont démontré que chez les 5-6 ans, les plus jeunes sont 60% plus susceptibles de recevoir le diagnostic que les plus vieux. Ceci représente près d’un million d’enfants qui reçoivent un diagnostic potentiellement faux. C’est près du quart des 4,5 millions d’enfants diagnostiqués TDAH*. * William N. Evans et al., Measuring Inappropriate Medical Diagnosis and Treatment in Survey Data: The Case of ADHD among School-Age Children, http://www4.ncsu.edu/~msmorril/EvansMorrill_ADHD.pdf, 4 août 2010; voir également, Liz Szabo, «Youngest in class get ADHD label», USA Today, http:// 14 usatoday30.usatoday.com/news/health/2010-08-17-1Aadhd17_ST_N.htm, 17 août 2010.
En Colombie-Britannique, parmi les 6-12 ans chez les garçons, les plus jeunes sont 30% plus susceptibles d’être diagnostiqués et 41% plus à même d’être médicamentés. Chez les filles, ces chiffres sont respectivement de 70% et 77%. (Journal de l’Association médicale canadienne, http://www.cmaj.ca/content/184/7/755.full? sid=a6ee87d7-b245-49e2-b885-8a3041baa32b). À mesure que les enfants vieillissent, le risque d’être diagnostiqué avec un TDAH diminue. Au Québec, 14% à 15% des élèves des niveaux secondaires 1 à 3 ont reçu le diagnostic, contre 9 à 11% pour les secondaires 4 et 5. (L’Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire…, 2013). C’est l’indication que des facteurs, tels que le rythme de développement différent des enfants entrent en ligne de compte quand vient le temps d’évaluer leurs attitudes et leurs comportements. 15
2. DES TAUX VARIABLES SELON LES CULTURES La prévalence du TDAH varie selon les pays et l’outil utilisé pour le diagnostiquer. La Classification internationale des maladies (CIM) de l’Organisation Mondiale de la Santé, produit des taux variant entre 0,4 % à 4,2%. La CIM est beaucoup plus utilisée en Europe que le DSM, bien que ce dernier commence à supplanter la CIM dans certains pays européens*. En Amérique du Nord, nous utilisons le DSM. En général, il produit des taux, pour la période d’âge scolaire, le plus souvent compris entre 5 % et 10 %, soit 2,5 à 13 fois plus pour le DSM que pour la CIM. *(Haute Autorité de Santé, Conduite à tenir devant un enfant ou un adolescent ayant un déficit de l’attention et/ou un problème d’agitation, 16 http://www.afpssu.com/wp-content/uploads/2013/07/trouble-de-lattention-de- lenfant_note_de_cadrage.pdf, décembre 2012)
Aucune étude épidémiologique établit avec certitude la prévalence du TDAH en France. Cependant, la Haute Autorité de Santé l’estime à 2%. C’est respectivement 5,5 fois moins qu’aux États-Unis et 6,5 fois moins qu’au Québec. Ces variations sont énormes. Certains facteurs culturels peuvent expliquer ces différences. Rappelons seulement que nos cousins n’utilisent pas le DSM mais la Classification française des troubles mentaux de l’enfant et de l’adolescent. En outre, les pédopsychiatres français voient généralement le TDAH comme un problème affectif ou relationnel et s’opposent à la conception anglo- 17 saxonne qui y voit un origine exclusivement organique.
3. POSSIBILITÉ DE CONFUSION AVEC DES PROBLÈMES PHYSIQUES ET SOCIAUX Plusieurs études D’après une étude ont lié les américaine, les problèmes enfants des d’inattention à quartiers pauvres divers troubles du sont 75% plus sommeil causés par susceptibles de l’apnée ou les recevoir le amygdales diagnostic que la (Vatsal G. Thakkar, «Diagnosing the Wrong Deficit», The New York Times Sunday Review, 27 avril 2013,). moyenne (Alan Sroufe, «Ritalin Gone Wrong», The New York Times Sunday Review, 28 janvier 2012). 18
4. EST-CE UN TDAH, OU UN PROBLÈME LIÉ AU DÉVELOPPEMENT? Tous les enfants n’ont pas le même rythme de Le TDAH peut facilement développement. Ils différent les uns des être confondu avec la autres. Si certains dyslexie ou tout autre prennent davantage de problème du temps avant d’atteindre développement. une certaine maturité, cela ne veut pas dire qu’ils sont malades ou anormaux et qu’ils ont besoin de médicaments. 19
5. EST-CE UN TDAH OU AUTRE CHOSE? La Caddra évalue que Le TDAH vient-il en premier 87% des enfants ou un autre problème n’est-il reçoivent au moins pas à la source des difficultés d’attention et deux diagnostics, 67% d’hyperactivité? au moins trois (p. 10); un certain nombre en reçoit trois et quatre: Si un enfant est anxieux ou rebelle il faut se demander pourquoi? Il ne suffit pas de l’évaluer sur la base des ¢ anxiété symptômes, mais il faut ¢ trouble des connaître toute son histoire conduites médicale, familiale, sociale, personnelle. Bref, une bonne ¢ trouble connaissance du contexte est oppositionnel nécessaire pour comprendre ¢ dépression. ses difficultés et trouver la 20 bonne solution.
Les enfants qui reçoivent plusieurs diagnostics souffrent-ils de deux¸ trois ou quatre maladies ou sont-ce trois ou quatre différentes expressions d’une même souffrance? ¢ Ceux et celles qui reçoivent trois ou quatre diagnostics sont susceptibles d’être traités avec plusieurs médicaments et les risques d’effets secondaires augmentent avec l’augmentation du nombre de médicaments consommés. ¢ Il arrive fréquemment que les effets indésirables d’un médicament soient traités en ajoutant un autre produit, ce qui peut entraîner des effets en cascade. 21
6. UN TDAH LÉGER? Le Center for Disease Control and Prevention des États-Unis, estime que 86% des enfants exhibent un TDAH léger ou modéré. À l’hôpital de Rivière- Qu’est-ce qu’un TDAH léger ou des-Prairies, 60% des modéré? Il n’existe aucun critère dans le DSM pour les distinguer. enfants se voient retirer leur diagnostic Un TDAH léger ne serait-il pas de TDAH. l’effet des difficultés et caractéristiques normales liées à l’enfance et à l’adolescence? (Joël Monzée, docteur en neurosciences et thérapeute, communication personnelle). Certains de ces enfants auront sans doute besoin d’une aide particulière. Mais leurs difficultés sont-elles causées par une «maladie» devant être traitée 22 avec des médicaments?
Comme le TDAH est censé être un problème inné de nature génétique, les différences d’âge et de pays ne devraient pas donner des taux de prévalence différents. Ceci tend à démontrer que le TDAH est en grande partie une construction artificielle qui dépend de tout un ensemble de facteurs culturels et sociaux. 23
PRINCIPAUX MOTEURS DE SURDIAGNOSTIC? 24
Dans ce segment nous tenterons de comprendre les raisons qui expliquent un tel surdiagnostic. On peut en identifier trois principales: ¢ A. Les critères diagnostiques sont subjectifs et manquent de validité, ¢ B. La nouvelle définition élargie du DSM facilite le verdict, ¢ C. les campagnes de promotion de l’industrie pharmaceutique qui tente de nous convaincre que ce diagnostic est très répandu. 25
Selon le DSM, un diagnostic exige la présence de 6 critères sur 9. Voici cinq des critères du DSM pour la forme inattentive ou TDA: ¢ «ne parvient pas à prêter attention aux détails… ¢ adu mal à soutenir son attention au travail ou dans les jeux… ¢ semble ne pas écouter quand on lui parle… ¢ selaisse facilement distraire par des stimulus externes… ¢ adu mal à organiser ses travaux ou ses activités…» 26
La lecture attentive de ces critères fait ressortir une chose. Les quatre premiers critères n’en font qu’un; c’est essentiellement le même critère qui se répète et le cinquième n’est que la conséquence des quatre premiers. Affirmer que vous ne prêtez pas attention aux détails, que vous avez du mal à soutenir votre attention, que vous n’écoutez pas et vous êtes facilement distrait, c’est essentiellement répéter la même chose avec des mots différents. C’est dire que vous êtes inattentif parce que vous manquez d’attention. ¢ Comme plusieurs de ces critères se répètent sous des vocables différents, cela donne un semblant de validité au diagnostic. 27 On observe le même phénomène pour le diagnostic d’hyperactivité-impulsivité, où les critères se répètent.
B. DIMINUTION DU NOMBRE DE CRITÈRES En diminuant le nombre de critères de huit à six en 1994, il devenait plus facile de poser un diagnostic de TDAH. ¢ C’est une des raisons qui explique pourquoi le nombre de diagnostics a plus que doublé entre 1980 et 2000 et presque quadruplé entre 1980 et 2013. 28
C. COMMENT VENDRE DES MALADIES Depuis quelques années les sociétés pharmaceutiques utilisent différents moyens pour convaincre les médecins et les parents que leur enfant est TDAH. Elles organisent à coups de millions des campagnes de «sensibilisation», qu’on devrait plutôt appeler des campagnes de marketing ou de mise en marché du diagnostic. ¢ Au Canada, le TDAH est à l’honneur durant la semaine du TDAH en octobre. ¢ Des médecins nommés «leaders d’opinion» sont recrutés par l’industrie pharmaceutique pour faire la 29 promotion du traitement médicamenteux du TDAH;
¢ Des conférences et séminaires sont organisés auprès des médecins, des éducateurs et des parents pour les sensibiliser au diagnostic; ¢ Début 1990, un journal pédiatrique important ne contenait aucune annonce pour les médicaments anti-TDAH; 10 ans plus tard, au cours d’une même année, 100 pages de publicités y faisaient leur apparition, pour promouvoir le traitement médicamenteux. (Martin T. Stein, Promoting ADHD Diagnoses and Stimulant Prescriptions, NEJM Journal Watch). 30
Le TDAH est également vendu par le biais des questionnaires en ligne, commandités par les sociétés pharmaceutiques qui popularisent et encouragent l’autodiagnostic. Les questions sont tellement générales que la plupart des gens peuvent s’identifier aux 31 comportements décrits.
Voici un exemple de question utilisée pour diagnostiquer le TDAH adulte: «À quelle fréquence vous arrive-t-il d’avoir des difficultés à vous rappeler de vos rendez-vous ou vos obligations?» Vous avez quatre choix de réponses: rarement, parfois, souvent, très souvent. (Pour les questions voir les deux prochaines diapositives. Les questions en français et en anglais sont les mêmes. Elles ont été conçues par l’Organisation mondiale de la santé). 32
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DES DIAGNOSTICS POUR VENDRE DES PILULES 34
Dans un sondage commandité par le New York Times, les six questions figurant sur le site du fabricant de psychostimulants Shire, ont été posées à 1100 adultes américains. D’après leurs réponses, près de la moitié d’entre eux s’avéraient «possiblement» ou «probablement» TDAH : ¢ 33% «TDAH possible», ¢ 16% «TDAH probable». (Amy Goodman, Democracy Now, http://www.democracynow.org/2013/12/17/the_selling_of_adhd_diagnoses_prescriptions, 17 décembre 2013). En croyant que le diagnostic est fondé sur des critères rigoureux, la personne qui lit ces résultats est susceptible de se convaincre qu’elle souffre de ce problème et elle ira consulter un professionnel comme le recommande le quizz. Les sociétés pharmaceutiques ne vendent pas que des pilules, elles vendent des maladies. En effet, pour vendre des 35 médicaments, il faut convaincre les gens qu’ils sont malades et qu’il existe une pilule pour tous les maux possibles et imaginables.
L’auteur de ce blog a rempli le questionnaire et a reçu le verdict suivant: ¢ «À partir de vos réponses…vous pourriez être TDAH. Les gens qui ont répondu comme vous se qualifient normalement pour un diagnostic de TDAH ou TDA et sont allés chercher de l’aide chez un professionnel». http://www.everydayhealth.com/ownyouradhd. Or, qu’est-ce qu’un TDAH possible ou probable? Ce type de diagnostic ne fait pas sens. Par ailleurs, dans un premier temps on affirme que vous «pourriez» être TDAH; dans un deuxième temps on confirme que vous l’êtes en vous assimilant à ceux et celles qui ont reçu le diagnostic et on vous conseille de consulter un professionnel de la santé. 36
VENDRE LE TDAH DANS LES ÉCOLES Une autre façon de propager l’idée que le TDAH serait un phénomène largement répandu, est la distribution de brochures simplifiées à l’intention des enseignants. À partir des critères du DSM, dont la validité avoisine le 0, ces brochures leur apprennent à reconnaître les symptômes de différents problèmes tels que le TDAH, la dépression, l’anxiété. 37
En guise de conclusion à ce segment, si le nombre de diagnostics de TDAH a explosé ce n’est pas parce nous sommes mieux équipés pour le dépister et que nous disposons de meilleurs outils. Ce sont toujours les mêmes outils dont nous disposons et aucun marqueur biologique (un gène, une substance dans le cerveau) n’a été découvert pour confirmer la présence d’un tel trouble. En outre, aucun test ni aucune machine n’ont été inventés qui permettraient de mieux l’identifier. L’augmentation du nombre de diagnostics s’explique plutôt par les raisons suivantes: ¢ Les critères du DSM sont subjectifs, ne sont pas scientifiques et donnent un semblant de validité au diagnostic, ¢ Le DSM a élargi la définition en réduisant le nombre de critères, ¢ Le marketing agressif de l’industrie pharmaceutique a 38 contribué à multiplier le nombre de diagnostics pour vendre plus de pilules.
EFFICACITÉ DES MÉDICAMENTS CONTRE LE TDAH 39
Le marketing de l’industrie pharmaceutique (voir la prochaine diapositive), soutient que les médicaments contre le TDAH améliorent les résultats scolaires, éliminent les comportements indésirables, par exemple l’agressivité, et permettent aux enfants de briser leur isolement. Un TDAH non traité présente un risque accru de toxicomanie et de délinquance. 40
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L’EFFICACITÉ À COURT TERME L’expérience nous enseigne que les psychostimulants augmentent la capacité de concentration de tout le Soulignons qu’en 2008, monde, ce que confirment les études commanditées par les l’agence américaine de fabricants. Ce sont presque surveillance des toutes des études à très court médicaments, la Food terme, d’une durée de 3-4 and Drug semaines. Administration (FDA) demandait à 5 Ces études ont révélé que les fabricants de psychostimulants augmentent médicaments contre le la mémoire, l’attention, la prise de notes, le parachèvement des TDAH de retirer ces devoirs. publicités car elles étaient fausses ou À partir de ces résultats on a trompeuses. présumé que cela se traduirait 42 par l’amélioration des résultats scolaires et du comportement.
LETTRE DE LA FDA AU FABRICANT DU CONCERTA (SEPTEMBRE 2008) Johnson & Johnson Pharmaceutical Research and Development, L.L.C. 25- La FDA reproche au Sep-08. fabricant du Concerta RE: NDA # 21-121 CONCERTA® (methylphenidate HCI) d’exagérer l’efficacité de Extended-release Tablets [CII] MACMIS ID # 15567 son produit et de faire de la promotion ¢ Overstatement of Efficacy trompeuse en The convention panels claim, prétendant que son médicament améliore la ¢ "CONCERTA® helps children improve academic performance throughout the day." This presentation is misleading performance because it implies that use of Concerta will lead to an improvement in académique. Il n’a pas academic performance throughout the day when this has not been shown by «été démontré au moyen substantial evidence or substantial de preuves clinical experience. (http://www.fda.gov/iceci/enforcementactions/ substantielles ou à warningletters/2008/ucm1048119.htm) partir de l’expérience clinique» que tel est le cas. 43
EFFICACITÉ AU LONG COURS : ÉTUDES INDÉPENDANTES Toutes les études indépendantes à long terme réalisées au cours des dernières années sont éloquentes: au long cours, les médicaments contre le TDAH ne sont pas efficaces. Voici en résumé les résultats d’une étude parue en 2013, à partir des données de l’enquête longitudinale sur les enfants et les jeunes. Cette enquête a suivi, depuis 1997, 15 871 enfants du Québec et du Canada qui sont évalués à tous les deux ans. Avec un suivi de 14 ans, c’est la plus longue étude à date. Les sujets médicamentés: ¢ Accusent davantage de redoublements ¢ Obtiennent des résultats inférieurs en math, particulièrement ceux dont le TDAH est sévère, ¢ Connaissent une détérioration des relations avec les parents, ¢ Éprouvent davantage d’anxiété, de dépression, de tristesse (surtout les filles). 44 (Janet Currie, Do stimulant medications improve educational and behavioral outcomes in children with ADHD? Princeton, 2013).
Étude Raine du gouvernement d’Australie occidentale (2010, suivi de 8 ans). ¢ Les stimulants augmentent par 9 la probabilité qu’un enfant tire de l’arrière à l’école. Les enfants médicamentés présentaient une légère tendance à la détérioration en ce qui a trait à: ¢ la dépression ¢ l’estime de soi ¢ le fonctionnement social Par ailleurs, cette étude a documenté une augmentation de la pression systolique de 10,79 mmGH chez les sujets médicamentés sur une base régulière, ce qui est énorme (Grant Smith et al., Raine ADHD Study: Long-term outcomes associated with stimulant 45 medication in the treatment of ADHD in children, Government of Western Australia, Department of Health, 2010).
Les études que nous venons de citer répliquent les conclusions de la première grande étude à long terme, la Multimodal Treatment (MTA) de l’Institut national de santé mentale (NIMH) débutée en 1999. Après trois ans, les enfants qui avaient interrompu leur médication fonctionnaient aussi bien que ceux qui étaient toujours médicamentés. Ces résultats se sont maintenus sur huit ans. (Peter S. Jensen et coll., «3-Year Follow-up of the NIMH MTA Study», J Am Acad Child Adoles Psychiatry, 46:8). La dernière étude du NIMH a suivi pendant six ans des enfants d’âge préscolaire. C’est la «Preschool ADHD Treatment Study» (PATS), publiée en 2013: ¢ l'utilisation au long cours ne fonctionne pas chez 89% des sujets. Après 6 ans, les enfants sous psychostimulants exhibaient un peu plus de symptômes que les enfants non médicamentés. («The Preschool Attention-Deficit/Hyperactivity Disorder Treatment Study (PATS) 6-Year Follow-Up». Journal of the American Academy of Child & Adolescent Psychiatry, 2013; DOI: 46 10.1016/j.jaac.2012.12.007).
¢ EFFETS INDÉSIRABLES DES MÉDICAMENTS 47
Selon Roger Griggs, le président de la société qui a mis au point l’Adderall, vendu à Shire, les stimulants sont des «bombes nucléaires». (Alan Schwarz, « A.D.H.D. Experts Re-evaluate Study’s Zeal for Drugs », NYT, http:// www.nytimes.com/2013/12/30/health/adhd-experts-re-evaluate-studys-zeal-for-drugs.html?_r=0, 29 décembre 2013). Sur 10 ans, Santé Canada a reçu près de 600 notifications d’effets indésirables sérieux où les médicaments sont le suspect numéro 1. Or, de 1% à 10% des effets indésirables sont signalés aux agences de réglementation. Au-delà des effets largement reconnus tels que perte d’appétit, insomnie, ralentissement de la croissance, on note les 48 effets suivants:
¢ 7 suicides ¢ 76 tentatives de suicide ¢ 24 convulsions ¢ 48 hallucinations ¢ 28 problèmes cardiaques ¢ 23 atteintes au foie ……. «C’est principalement la responsabilité [de la compagnie pharmaceutique] de surveiller l’utilisation sécuritaire de ses produits». (Porte parole de Santé Canada au Toronto Star). (J.C. St-Onge, Tous fous? L’influence de l’industrie pharmaceutique sur la psychiatrie, 49 Éditions Écosociété, 2013).
Dans le plupart des pays, les psychostimulants, appelés «kiddy coke», faisant partie de la famille des amphétamines, sont des substances réglementées, au même titre que la morphine. Le crystal meth et l’ectasy sont dérivés des amphétamines. 50
¢ En 2006, 10% des usagers de 12-25 ans développent une dépendance les amenant à se procurer illégalement des psychostimulants sans compter ceux dont la dépendance est cachée par la prise régulière dans le cadre d’un traitement. (Drug and Alcohol Dependence, vol. 84). ¢ Effet rebond: à l’arrêt du psychostimulant, les symptômes reviennent avec plus d’intensité. (Long-Term Stimulant Treatment… PLoS, 2013). 51
VISITES AUX URGENCES, 2005-2010: ÉU 52
Un consortium de fabricants de psychostimulants s’est opposé aux recommandations de l’Agence européenne du médicament de tester leur sécurité au long cours (Documents d’un tribunal suédois: Janne Larsson, Trans WorldNews, 3/04/10). Si les effets indésirables des médicaments sont banals, et si le profil bénéfices/risques des psychostimulants est positif pourquoi s’objecter à une étude sur le sujet? 53
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DE QUELQUES ALTERNATIVES 55
Les recommandations pour le traitement de ce qu’on appelle le TDAH varient énormément selon les pays. En Grande-Bretagne, le traitement pharmacologique doit être réservé aux cas les plus graves. Aux États-Unis, la pratique consiste à commencer par les médicaments, quitte à ajouter d’autres types d’intervention, et ceci bien que l’Académie américaine de pédiatrie recommande l’utilisation des interventions psychosociales comme traitement de première ligne. La Caddra soutient que le traitement doit être multimodal, mais il implique nécessairement l’utilisation des médicaments (p. vi). Si votre enfant présente certains signes persistants légers ou modérés d’inattention ou d’hyperactivité il pourrait bénéficier de certaines interventions psychosociales. Une demi heure de sommeil de plus Une étude de la faculté de médecine de l’université du Kansas estime qu’environ le quart des enfants ayant reçu un diagnostic de TDAH, dorment moins que leurs pairs. Une étude réalisée à l’université McGill a démontré qu’une demi heure de 56 plus de sommeil peut faire une différence énorme et venir à bout des problèmes de concentration et d’hyperactivité.
Un peu plus d’activité physique On conseille quelques minutes d’activité physique par jour. Dans certaines écoles, quand l’élève est dans la lune ou trop agité, un préposé lui fait faire quelques minutes d’activité physique. Malheureusement, les écoles ont rarement les ressources nécessaires pour ce type d’intervention. Des moyens pour les écoles et les professeurs S’il n’est pas simple d’être parent, il n’est pas plus simple d’être enseignant. Les classes sont souvent surchargées, il y a manque de spécialistes pour prendre en charge les cas particuliers, et les enseignants sont dépassés. Quant aux écoles des quartiers défavorisés, elles sont moins bien dotées de moyens en tous genres pour répondre aux besoins des élèves. Une diète appropriée Les colorants ont été liés à l’hyperactivité; leur élimination est donc souhaitable. Il n’y a pas de preuves probantes que les boissons sucrées et les aliments industrialisés soient à l’origine de l’hyperactivité. Cependant, le contrôle des quantités de sucre absorbées est une excellente idée et cela pour bien d’autres raisons ayant trait à la santé. Certaines études rapportent que les omégas-3 peuvent aider. 57
Habiletés sociales Plusieurs études ont démontré que les interventions pour développer les habiletés sociales des enfants et adolescents sont efficaces: apprendre à gérer sa colère, à contrôler ses émotions, gérer son temps, etc… Formation des parents Il est difficile d’être parent, d’autant plus que l’éclatement de la famille élargie a compliqué la tâche. Le travail empiète sur le temps passé en famille et certains parents sont simplement dépassés et démunis devant les difficultés vécues par leurs enfants. Ils ont besoin d’aide. La formation des parents donne de bons résultats et permet de les outiller pour aider leurs enfants. Dans certains cas l’attitude des parents est problématique. Un article de Clinical Pediatrics montrait que certains parents d’enfants TDAH avaient tendance à être plus contrôlants, les réprimandaient plus souvent, leur apportaient moins de soutien et récompensaient les comportements positifs moins souvent. (Rebecca A. Clay, «Easing ADHD without meds», American Psychological Association, http://www.apa.org/monitor/2013/02/easing-adhd.aspx, février 2013; Megan Johnson, 9-drug free approaches to managing ADHD, août 2009). 58
¢ L’étude de Charach de l’université de Toronto montre que la formation des parents est plus efficace que la médication pour les enfants d’âge préscolaire. (Alice Charach et coll., «Interventions for Preschool Children at High Risk for ADHD: A Comparative Effectiveness Review», Pediatrics, 1er avril 2013, article payant) . 59
RÉSUMÉ 60
¢ LE TDAH PEUT FACILEMENT ÊTRE CONFONDU AVEC DE NOMBREUX AUTRES PROBLÈMES. ¢ POUR CES RAISONS IL EST TRÈS LARGEMENT SURDIAGNOSTIQUÉ ET SURTRAITÉ. ¢ LA PUBLICITÉ DES FABRICANTS EST TROMPEUSE QUAND ELLE SOUTIENT QUE LES MÉDICAMENTS AMÉLIORENT LES RÉSULTATS SCOLAIRES, CE QUI EST CONTREDIT PAR LES ÉTUDES À LONG TERME. ¢ AU LONG COURS, LES MÉDICAMENTS PEUVENT CAUSER DES TORTS IMPORTANTS 61 ET LEURS EFFETS SECONDAIRES SONT TRÈS LARGEMENT SOUS-ESTIMÉS.
¢ SI CERTAINS ENFANTS ONT DE LA DIFFICULTÉ À SE CONCENTRER ET SONT HYPERACTIFS, CELA NE SIGNIFIE PAS QU’ILS SONT ATTEINTS DE MALADIE MENTALE. ¢ CES RÉACTIONS SONT SOUVENT NORMALES ET S’EXPLIQUENT PAR DES NOMBREUX FACTEURS ENVIRONMENTAUX: MALADIES OU DIFFICULTÉS PHYSIQUES, MANQUE DE MATURITÉ PAR RAPPORT AUX PLUS ÂGÉS DE LEUR CLASSE, PAUVRETÉ, FAMILLES DYSFONCTIONNELLES, INTIMIDATION, ETC. ¢ LES INTERVENTIONS PSYCHOSOCIALES SONT 62 PLUS EFFICACES QUE LES MÉDICAMENTS.
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