Le Carnet du Forum des Cooperatives - Comptes rendus des workshops Charleroi 16 novembre Bois du Cazier 2017 - Step Entreprendre
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Le Carnet du Forum des Cooperatives 16 novembre Charleroi 2017 Comptes rendus des workshops Bois du Cazier L E R E N D E Z- V O U S D E L’ E N T R E P R E N E U R I AT C O O P E R AT I F ÉCONOMIE SOCIALE, COOPÉRATIVE ET SOLIDAIRE
TABLE DES MATIÈRES AVANT-PROPOS 5 COMMENT CE FORUM A-T-IL ÉTÉ CONSTRUIT ? 7 L’ÉCONOMIE SOCIALE ET COOPÉRATIVE, DE QUOI PARLE-T-ON ? 8 WORKSHOP 1 10 COMMENT FAVORISER L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL ET COOPÉRATIF CHEZ LES JEUNES ? WORKSHOP 2 14 Y A-T-IL MATCH ENTRE L‘ÉCONOMIE COLLABORATIVE ET LE MODÈLE COOPÉRATIF ? WORKSHOP 3 18 POURQUOI ET COMMENT MOBILISER L’ÉPARGNE CITOYENNE ? WORKSHOP 4 22 CRÉATEURS, INTERMITTENTS, TRAVAILLEURS AUTONOMES… LA COOPÉRATIVE DE TRAVAILLEURS ASSOCIÉS EST-ELLE LA SOLUTION ? WORKSHOP 5 26 CIRCUITS COURTS : LE MODÈLE COOPÉRATIF EST-IL UNE OPPORTUNITÉ POUR RAPPROCHER PRODUCTEURS ET CONSOMMATEURS ? REMERCIEMENTS 30 3
AVANT-PROPOS L’Agence pour l’Entreprise & l’Innovation (AEI) anime un réseau d’opérateurs soutenant la création, le déve- loppement et la transmission des entreprises, ainsi que l’innovation. Elle favorise également le développement d’une culture entrepreneuriale et la diffusion des nouveaux modèles économiques. Fin 2015, le Gouvernement wallon confiait à l’AEI la mission de sensibiliser et de promouvoir les entreprises sociales et coopératives en s’appuyant sur les Agences-conseil en économie sociale et les autres acteurs spé- cialisés. Economie sociale et coopérative, entrepreneuriat social, innovation sociale… Toutes ces caractéristiques re- couvrent des réalités économiques pour entreprendre autrement : Entreprendre de manière collective Viser une finalité de services à la communauté Partager des aspirations aux enjeux sociétaux et environnementaux Proposer une autre répartition des richesses Adopter une gouvernance participative Le modèle coopératif s’est fortement développé en Wallonie, en réponse à certaines impasses économiques et environnementales. Pour comprendre, découvrir et partager la connaissance de l’économie coopérative, l’AEI organisait son pre- mier Forum des Coopératives en 2016, en collaboration avec la SOWECSOM. Lors de cette première édition, celle-ci fêtait ses 20 ans de financement de ce secteur. Près de 300 participants s’étaient donné rendez-vous pour entendre des témoignages et assister à la conférence de Cyril DION, producteur et coréalisateur du film « Demain ». Ce long métrage a initié un véritable mouvement citoyen. Le succès de cette manifestation a conduit l’AEI à éditer une seconde édition du Forum le 16 novembre 2017. Avec les Agences-conseil, l’AEI a souhaité susciter une plus forte contribution des participants en organisant cinq workshops participatifs afin d’échanger et de bâtir les modèles de demain. L’économie coopérative a été discutée, challengée et coconstruite avec des coopérateurs, des porteurs de projet, des étudiants, des experts et des financeurs autour de cinq enjeux : L’entrepreneuriat coopératif chez les jeunes L’économie collaborative Le financement coopératif Les coopératives de travailleurs Les circuits courts CYRIL DION – FORUM DES COOPÉRATIVES 2016 4 5
COMMENT CE FORUM A-T-IL ÉTÉ CONSTRUIT ? L’ensemble du Forum des Coopératives, et plus particulièrement les cinq workshops, ont été préparés avec nos partenaires selon un processus participatif. Le choix des cinq thématiques s’est ainsi fait en concertation. Pour chacune d’elles, un partenaire s’est engagé à en coordonner l’organisation. La méthodologie d’animation, les points de débats et le choix des témoins/intervenants ont été coconstruits avec ce groupe de contributeurs. Lors des workshops, après avoir introduit la thématique, chaque animateur a donné un court temps de parole à cinq ou six intervenants pour qu’ils apportent leur témoignage, soit en tant que coopérateur, soit en tant qu’ex- pert sur le sujet. Ensuite, les participants (entre 40 et 60 personnes par workshop) ont été amenés à échanger et à travailler sur trois aspects : les enjeux, la réponse coopérative et quelques propositions à formuler aux ac- teurs de l’économie coopérative ainsi qu’aux représentants publics/politiques. C’est le fruit de cette démarche participative qui est résumé dans ce Carnet. © VICTORIEN LORIERS Près de trente contributeurs ont préparé cette rencontre en coopération avec l’AEI et les Agences-conseil. Des propositions concrètes pour soutenir, favoriser et pérenniser le modèle coopératif ont été déployées par 300 participants. Elles vous sont résumées dans ce cahier. Gageons qu’elles inspireront chacun là où il peut agir. Ces workshops se sont clôturés par une conférence exceptionnelle de l’économiste de renommée internationale, Daniel COHEN. Celui-ci nous a apporté une autre vision de la croissance : « L’Homme veut être plus riche, et ça n’est jamais assez. La même frustration se répète, le progrès matériel n’est jamais suffisant. » Au nom de l’AEI, je remercie l’ensemble des partenaires et des partici- pants qui ont œuvré à ce travail collectif et participatif. Véronique CABIAUX, Directrice de l’Agence pour l’Entreprise & l’Innovation DANIEL COHEN © VICTORIEN LORIERS © VICTORIEN LORIERS 6 7
L’ÉCONOMIE SOCIALE ET COOPÉRATIVE, DE QUOI PARLE-T-ON ? LA COOPÉRATIVE SELON L’ALLIANCE COOPÉRATIVE INTERNATIONALE (ACI) De plus en plus d’entrepreneurs veulent entreprendre ensemble et autrement. Ils souhaitent mettre l’humain et le développement durable au cœur de leur activité. Ils visent aussi à mettre en œuvre un mode de gestion L’ACI définit la coopérative comme « une association autonome de personnes alternatif, basé sur la coopération, la gouvernance démocratique et participative, et l’affectation des bénéfices volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux à d’autres objectifs que la rémunération du capital. et culturels communs au moyen d’une entreprise dont la propriété est collective et où le pouvoir est exercé démocratiquement. » C’est ainsi que l’on observe, depuis quelques années, l’émergence de nouveaux modèles économiques qui expérimentent des pratiques en rupture avec le modèle de l’entreprise capitaliste. Coopératives citoyennes, Selon l’ACI, les coopératives se fondent sur un socle commun de valeurs : coopératives de travailleurs, coopératives d’artistes, structures mixtes privées/publiques… Ces initiatives réin- entraide – auto-responsabilité – démocratie – égalité – équité - solidarité ventent totalement nos modes de consommation, mais aussi les rapports entre consommateurs et produc- teurs, ou encore entre travailleurs et employeurs. QUELQUES CHIFFRES… L’ENTREPRISE COOPÉRATIVE : D’AUTRES LOGIQUES 25.405 : sociétés coopératives actives en Belgique au 31 décembre 2015. Rappelons que les entreprises coopératives sont des sociétés commerciales (presque) comme les autres. Elles contribuent au développement d’activités économiques productrices de biens et services, et sont soumises Près d’un millier de coopératives ont opté pour un modèle coopératif respec- 29% 38% aux règles du marché. tant les valeurs de l’Alliance Coopérative Internationale : 513 coopératives sont agréées par le Conseil National de Coopération (CNC) et 464 coopératives, non Flandre Wallonie Cependant, trois principes les distinguent des entreprises classiques : agréées au CNC, sont qualifiées à finalité sociale. 33% 1. Affectation des bénéfices à d’autres fins que la rémunération du capital : l’objectif d’une coopérative L’emploi au sein de ces coopératives agréées et/ou à FS s’élève à plus de 21.000 n’est pas la rémunération du capital. Les bénéfices sont principalement réinvestis dans l’entreprise et dans postes de travail. Région de Bruxelles-Capitale la poursuite de ses finalités. 2. Gouvernance démocratique et participative : l’entreprise coopérative implique dans les organes de gou- Source : Dufays F.& Mertens S. (2017), Belgian Cooperative Monitor, Leuven, Bruxelles : Cera-Febecoop vernance, et fait participer aux décisions, l’ensemble des parties prenantes (non seulement les action- RÉPARTITION DES SOCIÉTÉS COOPÉRATIVES naires, mais aussi les travailleurs, parfois les clients, les fournisseurs…). Ce principe peut aller jusqu’à « un WALLONIE PIONNIÈRE SELON LEUR SIÈGE SOCIAL homme = une voix ». 3. Finalité de service à la collectivité : les entreprises coopératives ont pour objectifs de mieux prendre en Le développement de l’économie sociale, coopérative et solidaire fait partie intégrante de la politique écono- compte les intérêts de leur communauté et d’y contribuer de manière positive. mique menée en Wallonie depuis plusieurs années. UN CADRE FÉDÉRAL POUR PROMOUVOIR LE MODÈLE COOPÉRATIF Plusieurs objectifs ont été fixés : En Belgique, les sociétés coopératives qui fonctionnent conformément aux valeurs et principes coopératifs Prendre en compte l’entrepreneuriat sous toutes ses formes peuvent obtenir un agrément auprès du Conseil national de la Coopération (CNC). Contribuer à la relocalisation de l’économie Mobiliser des ressources nouvelles, dont l’épargne citoyenne Cet agrément implique pour les associés : la libre admission, un dividende limité à 6%, un droit de vote égal aux assemblées générales… La Wallonie a d’ailleurs été la première région d’Europe à adopter, en 2008, un décret relatif à l’économie sociale. Celui-ci offre un cadre administratif solide et est un véritable levier pour les entrepreneurs sociaux, notamment grâce au renforcement des moyens de la SOWECSOM. 8 9
workshop 1 COMMENT FAVORISER L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL ET COOPÉRATIF Pistes pour les acteurs de terrain Pistes pour les pouvoirs publics CHEZ LES JEUNES ? 1. Favoriser les interactions entre l’économie sociale et l’enseignement 1. Donner les moyens aux acteurs de l’enseignement pour adapter les programmes aux nouveaux mo- dèles de l’économie sociale Depuis plusieurs années, les jeunes se montrent de plus en plus ouverts à l’entrepreneuriat. Parallèlement, suite à certaines dérives du modèle économique classique, incapable de répondre à une série de défis de notre pla- 2. Utiliser l’intelligence collective dans l’enseigne- 2. Introduire le modèle coopératif dans les disposi- nète, ils aspirent à entreprendre autrement. ment pour prouver que le collectif est une force tifs favorisant l’entrepreneuriat 3. Améliorer la communication des entreprises so- Face à ce double constat, l’entrepreneuriat social et coopératif apparaît comme une réponse aux enjeux socié- 3. Promouvoir et apporter un soutien financier à la ciales taux actuels. Mais avant de passer à l’action, les jeunes rencontrent une série de freins, dont les préjugés vis-à- création d’entreprises sociales vis de l’acte d’entreprendre de manière générale, et de la notion d’entreprise sociale plus spécifiquement, ou encore le fait qu’ils ont peu (ou pas du tout) été confrontés au modèle coopératif. L’enseignement a certainement un rôle à jouer dans le développement de cet entrepreneuriat plus responsable. QUATRE INITIATIVES POUR INSPIRER LES JEUNES À L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL ET COOPÉRATIF Les initiatives visant à inspirer et stimuler l’entrepreneuriat social et coopératif en témoignent. KU Leuven | Depuis 2011, KU Leuven propose aux ingénieurs diplômés un Post-Master en Entrepreneuriat Plus de neuf jeunes sur dix de moins de 30 ans ont une attitude favorable vis-à-vis de l’entrepreneuriat. innovant. Dans le cadre du stage/projet à réaliser, une coopérative à finalité sociale a été créée, soutenue entre 93% autres par plusieurs acteurs de l’économie sociale et solidaire. Cette coopérative fonctionne de façon auto- (source : VentureLab) nome et permet aux étudiants de mettre en pratique les principes coopératifs. 82,2% Plus de 80% des Belges francophones veulent changer les choses autour d’eux. (source : Déclic en PespectivES) Déclic en PerspectivES | La création de Déclic en PerspectivES est partie de divers constats : les jeunes ont envie de plus de sens, voire de lancer un projet à finalité positive. Mais très souvent, ils ne savent pas par où commencer. Au travers de différents programmes de formation et de sensibilisation, comme la « Tournée des TROIS FREINS À L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL ET COOPÉRATIF CHEZ LES JEUNES Possibles », cette ASBL s’est donné pour mission d’aider ceux-ci à passer à l’action vers l’entrepreneuriat social. 1. Inadéquation des méthodes d’enseignement et des objectifs pédagogiques. VentureLab | Le VentureLab est un éco-système de soutien à l’entrepreneuriat à 2. Méconnaissance de l’écosystème des entreprises sociales et coopératives ainsi que des enjeux sociétaux destination de tous les étudiants et des jeunes diplômés des institutions de l’Ensei- auxquels celles-ci veulent répondre. gnement supérieur du pôle académique Liège-Luxembourg. Il a développé le pôle 3. Manque de confiance dans la dimension collective et dans le fait d’entreprendre à plusieurs. BeeLab destiné à accompagner « les acteurs de changement ». Un des objectifs est d’éveiller l’entrepreneur et le porteur de projet à l’impact qu’ils peuvent avoir sur la société et son environnement. LA RÉPONSE COOPÉRATIVE : DÉCLOISONNER ET COOPÉRER À TOUS LES NIVEAUX AEI | Via le programme Générations Entreprenantes (#Génération-E), l’Agence pour l’Entreprise & l’Innovation mène depuis plusieurs années différentes actions pour éveiller l’esprit d’entreprendre chez les jeunes. Depuis 2015, des actions spé- cifiques autour de l’économie sociale, coopérative et solidaire sont menées. L’AEI contribue ainsi à sensibiliser les étudiants des écoles secondaires et supérieures de Wallonie aux nouveaux modèles coopératifs alternatifs. 10 11
HEC LIÈGE : L’UNIVERSITÉ A BESOIN DE CONNEXION AU TERRAIN. HEC Liège est la première école en Belgique à avoir mis sur pied un Master complet en Management des Entreprises sociales. Parmi les objectifs de ce programme : revisiter les différentes disciplines de la gestion en lien avec les grands défis sociétaux de notre époque et encourager le développement de nouveaux projets d’entrepreneuriat social. « Au fil des années, nous avons modifié le programme pédagogique de ce Master de manière à rendre les étudiants plus proactifs. En effet, nous gardons le socle théorique, mais nous estimons que la recherche doit rester connectée à ce qui se passe sur le terrain », explique Maxime Bouchat, coordinateur au Centre d’Economie Sociale de HEC Liège. Toucher les jeunes en leur parlant de valeurs Pour Maxime Bouchat, l’économie sociale et solidaire est plutôt complexe à appréhender avec des théo- ries. « Par contre, ce qui touche les jeunes aujourd’hui, ce sont les valeurs, le sens des choses… Stimuler l’entrepreneuriat social et coopératif chez les jeunes passe par l’inspiration, et donc par la ren- contre avec des entrepreneurs, des entreprises. » Ainsi, sur toute la durée du programme de forma- tion, visites d’entreprises, moments de réseautage, field trip à l’étranger et conférences thématiques sont au menu. Ces rencontres de terrain permettent aux étu- diants de développer leur réseau, mais aussi de développer leurs soft skills. Apprendre à tisser des liens est d’autant plus important dans un modèle d’entrepreneuriat coopératif… Maxime Bouchat constate que beaucoup d’étu- diants n’ont jamais entendu parler du fait que l’en- treprise peut être abordée d’une autre manière. Mais les choses bougent et une dynamique s’est enclenchée. « Nous avons la chance que les entre- prises sociales et l’éthique des affaires font désor- mais partie des pôles d’excellence de HEC Liège, MAXIME BOUCHAT signe d’une réelle préoccupation de l’école pour ce © VICTORIEN LORIERS domaine. » FIELD TRIP MAROC 2017 VISITE DE 7AY (RABAT) PAR 17 ÉTUDIANTS DU MASTER EN MANAGEMENT DES ENTREPRISES SOCIALES (HEC LIÈGE) 12 13
workshop 2 Y A-T-IL MATCH ENTRE L‘ÉCONOMIE COLLABORATIVE ET LE MODÈLE COOPÉRATIF ? LA RÉPONSE COOPÉRATIVE : ÉVOLUTION ET COHÉRENCE Pas une semaine ne passe sans que soit annoncé le lancement, en Wallonie ou à Bruxelles, d’une nouvelle plate- « La réponse coopérative est une solution à l’émergence des plateformes collaboratives si et forme numérique créant des raccourcis entre propriétaires et locataires, restaurants et livreurs à vélo, ménages seulement si le mouvement coopératif parvient à s’approprier la révolution numérique, tout et aide-ménagères… en conservant les valeurs coopératives et sociales. » L’économie collaborative séduit de plus en plus d’usagers. Mais elle a ses limites et n’est pas exempte de dé- rives, notamment en modifiant fondamentalement notre perception de la valeur réelle des biens et des ser- vices. Les conditions des travailleurs dépendant de ces plateformes peuvent aussi être considérées comme ILS ONT DIT ... préoccupantes. Dans ce contexte, des entrepreneurs coopératifs se mobilisent pour proposer des initiatives économiques ins- pirées de l’économie collaborative, visant à développer une activité plus humaine, plus solidaire et durable. Mais Quand on lance une entreprise alternative, on manque de repères. pour qu’ils constituent de véritables alternatives, il faut les amener à être au centre du jeu. Jean-Philippe Lens, co-fondateur de Topino « L’entrepreneuriat classique est un univers bien construit, où il existe une sémantique, des structures d’accom- QUATRE ENJEUX POUR QUE LE MODÈLE COOPÉRATIF TROUVE SA PLACE DANS L’ÉCONOMIE COLLABORATIVE pagnement et de nombreux mécanismes de soutien. Mais quand on lance une entreprise alternative, on manque de repères, et nous appeler des ‘start-up’ n’est pas adapté. » 1. Conditions de travail : Comment faire pour développer des conditions de travail de qualité ? 2. Fiscalité juste : Comment repenser la redistribution du capital et des ressources ? Nous sommes dans un secteur extrêmement compétitif. 3. Mentalités : Comment renforcer un changement de mentalité pour redonner du sens aux actes d’achat et Benoît Renard, co-fondateur de Rayon 9 de consommation ? 4. Finalité : Comment répondre à quels besoins et à quelle finalité ? Se poser la question est essentiel. « Nous sommes dans un secteur extrêmement compétitif où la vision que la livraison doit être gratuite est très forte. » Pistes pour les acteurs de terrain Pistes pour les pouvoirs publics Je travaille souvent la peur au ventre. Alain, chauffeur Uber 1. Diffuser une image positive et claire de l’entrepre- 1. Clarifier, et plus ambitieusement harmoniser, les « Pour avoir 1.000 euros/semaine, je dois prester environ 72 heures/semaine. Par contre, je travaille souvent la neuriat coopératif et de ses impacts (au niveau des statuts des travailleurs concernés par l’économie peur au ventre car nous sommes harcelés par les chauffeurs de taxi, voire la police. » coopératives ET des fédérations) collaborative pour éviter la concurrence déloyale entre travailleurs dits autonomes et les autres Les coursiers sont une variable d’ajustement. 2. Secteur concret à développer : créer une plateforme dédiée aux services à la personne afin de rendre ce 2. Clarifier et harmoniser le statut des entreprises Arnaud, ancien coursier pour Take it Easy et coursier pour Deliveroo secteur moins fragile et y maintenir la valeur « emploi » qui hébergent ces plateformes collaboratives « Personnellement, je n’ai pas de problème et j’ai des missions en suffisance, mais il est clair que chez Deliveroo, les coursiers ne sont qu’une variable d’ajustement. » Axer toute notre communication sur nos valeurs était une erreur. Jean-Philippe Lens, Topino « Nous avons démarré avec un idéal assez fort, axant toute notre communication sur les valeurs. Mais c’était une erreur car nous sommes tous des ‘homo consumens’. Cela nous a poussés à nous recentrer sur les besoins des clients et à proposer des services qui y répondent. » 14 15
WISHARE-WIBEE : LES GENS VEULENT PARTAGER, À CONDITION QUE ÇA SOIT FACILE ET FIABLE. A la base du projet Wishare, une vision : « Pour sortir du chaos de la mobilité, nous pouvons fonctionner comme tout le monde et nous procurer par exemple des applications qui servent à contourner ou éviter les bouchons. Ou alors changer de comportement, chacun dans son cadre, et inviter nos voisins à suivre le mouvement. » Pierre Oldenhove a commencé avec la plateforme de partage de véhicules wibee.be, qui tourne bien depuis 2015. Puis est venue l’envie d’aller plus loin en proposant au public un nouveau mode de consom- mation, coopératif, basé sur le principe d’autonomie. « Avec la coopérative Wishare, les gens deviennent co-propriétaires de véhicules partagés. Ces véhicules peuvent aussi être mis en location sur la plateforme wibee.be. » Le projet Wishare est sur les rails depuis septembre 2017. Il est complémentaire à la plateforme wibee.be. « Wishare part de l’idée que l’achat a peu de sens. Nous voulons aussi créer de la valeur pour nos coopéra- teurs », explique Pierre Oldenhove. Pas de solution bancale Mais celui-ci insiste : les entreprises coopératives doivent utiliser les mêmes armes que les plateformes classiques, tout en utilisant un mode de gouvernance qui fera la différence. « Les valeurs ne doivent pas passer au-dessus de l’efficacité. Pour amener les gens à changer, il faut que l’offre proposée soit parfaite d’un point de vue tech- nologique. Tout le monde est prêt à partager sa voiture, mais il faut que ça soit confortable et efficace. Pour créer Wishare, nous avons travaillé sur toutes les contraintes et les freins au partage, tout en ayant en tête que nous devions nous intégrer dans un marché. » 16 17
workshop 3 POURQUOI ET COMMENT MOBILISER L’ÉPARGNE CITOYENNE ? ELLES ONT DIT ... En 2014, le Baromètre des Investisseurs1 a révélé que 51% des investisseurs belges envisagent qu’au moins une partie de leur épargne soit investie en considération de l’impact social et environnemental des activités financées. Une autre enquête de 20162 a permis de considérer que près d’1% de la population adulte belge L’investisseur est prêt à investir dans des projets solidaires. a déjà souscrit à un ou plusieurs produits financiers labellisés Financité & FairFin. Isabelle Philippe, directrice de Crédal Pour les coopératives, il existe donc aujourd’hui un contexte favorable à la mobilisation de l’épargne ci- « L’investisseur aime investir en direct dans quelque chose de tangible. Crédal est né toyenne. Proposer au grand public d’investir dans son entreprise constitue une réelle opportunité : la coo- il y a une trentaine d’années suite à une prise de conscience de citoyens : à quoi était pérative crée, fidélise ou élargit une communauté autour de son projet, tout en diversifiant ses sources de utilisé leur argent placé sur les comptes d’épargne ? Cela manquait de transparence. financement. Ils ont donc décidé de créer une coopérative et d’investir dans des projets sociaux, environnementaux … » TROIS ENJEUX POUR MOBILISER L’ÉPARGNE CITOYENNE Le label s’est imposé. 1. Renforcer les soutiens publics, notamment au travers d’incitants fiscaux et d’une couverture de risques Sophie des Mazery, directrice de Finansol (France) favorisant l’investissement privé. « Pour favoriser l’investissement des particuliers dans les placements solidaires, l’idée de labelliser les produits soli- 2. Mettre davantage en valeur la plus-value sociale via une communication efficace et positive. daires s’est imposée. L’objectif de Finansol est que 1% de l’épargne soit investi en solidaire. L’attribution du label est 3. Mettre en place un label qui promeut les projets solidaires et garantit un investissement solidaire. sévère. Un comité d’experts indépendants vérifie trois critères : la solidarité, la transparence et l’action commerciale. » Pistes pour les acteurs de terrain Pistes pour les pouvoirs publics Un soutien à la dynamique coopérative et citoyenne. Flora Kocovski, directrice de la Sowecsom 1. Créer une certification des produits financiers 1. Se fédérer via une vitrine/plateforme commune « Depuis 2010, de nouveaux types de projets, coopératifs, se mettent en place avec une dynamique citoyenne. solidaires ainsi qu’un cadre fiscal pour les coopé- ratives (exemples : un Tax Shelter spécifique aux Le Gouvernement wallon a souhaité donner une impulsion à ce mouvement coopératif grâce notamment à la 2. Créer ou amplifier des outils et des méthodologies coopératives, ou des incitants fiscaux pour les pro- mesure Brasero, qui permet d’investir dans le capital des coopératives aux côtés d’autres investisseurs.» pour mesurer l’impact sociétal des activités coo- pératives duits financiers solidaires) 3. Recourir à la consultance et l’accompagnement 2. Mettre en place un Guichet unique pour les entre- pour améliorer la communication et la gestion fi- preneurs coopératifs et les investisseurs citoyens nancière 3. Prévoir une clause sociale dans les marchés publics 1 2 Etabli par TNS à la demande d’ING en collaboration avec l’Université de Gand et les quotidiens L’Echo et De Tijd Baromètre 2016 du label Financité & FairFin ANIMATION DU WORKSHOP 3 PAR BERNARD BAYOT – DIRECTEUR FINANCITÉ 18 19
VIN DE LIÈGE : AGIR CONJOINTEMENT. Domaine viticole de 15 hectares, Vin de Liège veut produire du vin bio, de qualité et respectueux des per- sonnes. Pour faire face à ses besoins d’investissements importants, l’appel à épargne citoyenne était à la fois nécessaire et cohérent. Cette coopérative liégeoise figurait alors parmi les pionniers du crowfunding en Belgique et a dû développer ses propres outils. Les débuts ont été un peu lents… Vin de Liège n’avait au départ qu’un plan financier pour convaincre. Mais très vite, la coopérative a fait le pari de la mobilisation citoyenne et a multiplié les occasions d’impliquer ses coopérateurs et bénévoles : présentations à des foires commerciales, présence au marché de Noël, planta- tion d’un premier vignoble expérimental, recrutement de nouveaux coopérateurs, soirées « Tupperwine », vendanges… Cette mobilisation très concrète a fini par payer. Lors de son premier appel de fonds, Vin de Liège a récolté 400.000 euros en un an. En juin 2017, elle a réussi à drainer 1 million d’euros en un seul week-end ! Fabrice Collignon, président de la SCRL Vin de Liège : « Fondamentalement, les gens ont envie de s’im- pliquer dans la mise en place de solutions pour un avenir meilleur. Nous avons donc compris qu’il faut leur proposer la possibilité de faire autre chose que de mettre de l’argent à disposition, et que du côté de la coopérative, nous devions être sérieux et respecter nos engagements. » Pour lui, le Forum des Coopératives 2017 a mis en avant cette prise de conscience des acteurs : il est nécessaire d’agir conjointement. « Maintenant, il est temps de rassembler nos forces pour une meilleure reconnaissance de nos spécificités. » Ses deux conseils pour mobiliser l’épargne citoyenne : Pour convaincre les investisseurs, n’hésitez pas à jouer sur tous les sens et pas uniquement sur le côté intellectuel « Lors de nos premières présentations, nous n’avions qu’un document financier à présenter. Alors nous avons fait goûter du vin belge, qui n’était pas le nôtre, pour montrer que c’était possible ! » Assurez un suivi professionnel « Ce n’est pas tout d’avoir un message convaincant et un beau site internet, il faut aussi assurer un suivi professionnel des citoyens qui ont, à un moment ou à un autre, manifesté leur intérêt pour le projet. Chez Vin de Liège, dès que quelqu’un se montrait intéressé, ses coordonnées étaient encodées dans la base de données. Chaque personne était ensuite relancée jusqu’à ce qu’elle prenne une part, ou qu’elle refuse de façon définitive. » DE NOMBREUX COOPÉRATEURS PARTICIPENT AUX VENDANGES © VIN DE LIÈGE 20 21
workshop 4 CRÉATEURS, INTERMITTENTS, TRAVAILLEURS AUTONOMES… Pistes pour les acteurs de terrain Pistes pour les pouvoirs publics LA COOPÉRATIVE DE TRAVAILLEURS ASSOCIÉS EST-ELLE LA SOLUTION ? 1. Le mouvement coopératif devrait se structurer pour dégager des moyens humains et financiers 1. Créer un statut social et fiscal qui corresponde à la réalité de bon nombre de travailleurs. destinés à mieux communiquer vers les entre- La plupart des créateurs, artisans, intermittents, artistes et travailleurs autonomes combinent des rythmes de 2. Développer un statut « projet » en marge des prises classiques et le grand public. travail et de vente atypiques, liés à la nature de leur activité. Une forme d’autonomie les caractérise, mais aussi diverses dispositions législatives existantes, une d’exclusion des circuits d’emploi classiques. La frontière entre salariés et indépendants est de moins en moins 2. Ce mouvement pourrait aussi produire des conte- sorte de « statut-test » reconnu, afin d’instituer le nette. nus pédagogiques afin d’éduquer les enfants et droit à l’expérimentation. Et pouvoir s’en inspirer les adultes à la coopération. pour adapter, le cas échéant, les lois et réglemen- Face à cette évolution, des coopératives de travailleurs associés ont apporté des solutions innovantes en termes tations. de modalités et d’organisation du travail. Elles ont ainsi contribué à la sécurisation de parcours atypiques. Le 3. Le secteur coopératif devrait mettre sur la table modèle SMart est bien connu, mais d’autres formes d’organisations existent. Aujourd’hui, ces coopératives de des pouvoirs publics des propositions pour la re- 3. Intégrer dans les programmes scolaires des travailleurs constituent de véritables laboratoires de transformation des modèles d’entreprises et des formes connaissance de statuts en phase avec l’évolution contenus pédagogiques permettant de découvrir d’emploi. des formes d’emploi. la coopération. +16% Entre 2004 et 2016, la part de la population occupée ayant un deuxième emploi en Belgique a augmenté de 16%. DiES | DiES est une coopérative d’emploi. Elle rassemble un ensemble de travailleurs autonomes dans une structure commune : des entrepreneurs solidaires, indépendants ou salariés. DiES donne la possibilité à des travailleurs autonomes d’intégrer une structure juridique au sein de laquelle ils pourront acquérir le statut +120% Evolution entre 2010 et 2015 (en Belgique) du nombre d’indépendants dont les revenus dépendent à plus de 75% du client principal. salarié, tout en gardant leur autonomie dans la gestion de leur activité. Ils vont ainsi bénéficier de services ad- ministratifs et comptables mutualisés. Par ailleurs, en fonction de leur revenu moyen annuel, ils obtiennent un +15% En Wallonie, 15% des indépendants ont opté pour ce statut faute d’alternative. salaire mensuel lissé. SMart | Initialement créée sous forme d’ASBL, SMart est une coopérative d’emploi qui permet aux intermit- tents et travailleurs autonomes de bénéficier d’un contrat de travail intérimaire lorsqu’ils travaillent pour un TROIS ENJEUX POUR PERMETTRE AUX COOPÉRATIVES DE TRAVAILLEURS DE RÉPONDRE AUX MUTATIONS DE donneur d’ordre. SMart devient ainsi, en tant qu’agence Interim, l’employeur de ses membres pour la durée de leur mission et prend en charge la conversion de la facture du client en contrat de travail. L’EMPLOI En janvier 2017, SMart est devenue une coopérative avec quelque 13.000 coopérateurs-utilisateurs de ses services. 1. Expliquer le modèle des coopératives de travailleurs associés et les solutions qu’elles mettent en place afin Le Comptoir des Ressources Créatives | L’ASBL Le Comptoir des Ressources Créatives (CRC) fonc- d’inspirer d’autres secteurs de la société. tionne selon une dynamique coopérative. Son leitmotiv est « pour les créateurs et par les créateurs ». L’objet 2. Mettre en place une organisation interne, au sein de la coopérative, en adéquation avec ses missions. social est la création de services matériels et immatériels mutualisés pour les artistes et créateurs. Elle les 3. Interroger, adapter et dépasser les statuts sociaux et fiscaux existants afin d’aller vers des statuts en oriente, elle part de leurs besoins, elle influence les opérateurs pour qu’ils répondent aux attentes de son phase avec la réalité des nouvelles formes d’emploi. public, et si les services n’existent pas, elle soutient les créateurs dans la création de solutions mutualisées innovantes, comme c’est le cas avec la coopérative Dynamo Coop, que le CRC a contribué à créer. LA RÉPONSE COOPÉRATIVE : RÉINVENTONS LE MONDE DE L’EMPLOI « Le modèle coopératif s’adapte bien à la réalité des statuts autonomes, c’est donc un choix in- téressant, mais il faut éviter que cela soit interprété comme une normalisation de la flexibilité ! » 22 23
DYNAMO COOP : ACHATS GROUPÉS DE BÂTIMENTS, UNE SOLUTION AUDACIEUSE POUR LES CRÉATEURS. Basée à Liège, Dynamo Coop est une coopérative immobilière à finalité artistique. En quelques mots, elle propose aux artistes, artisans et créateurs de devenir co-propriétaires de bâtiments culturels mutualisés en rejoignant la coopérative. « L’idée est partie d’un constat : le secteur créatif est sous-équipé en termes d’infrastructures et d’équipements », explique Marc Moura, co-fondateur de Dynamo Coop. Créée en 2015, cette coopérative s’est donc donné pour mission de combler ces besoins criants des créateurs en ache- tant, rénovant et louant des ateliers à bas prix. Actuellement, deux projets sont déjà sur pieds : les Espaces Mutualisés Dony, un hangar de 1.400 m2 si- tué dans le quartier Saint-Léonard, et le KulturA, en Outremeuse, qui propose entre autres deux salles de concerts, une galerie d’art, des bureaux… Permettre aux gens de se renforcer les uns les autres « Nous démarrons un projet non pas parce que nous avons détecté une opportunité de faire du business comme le font les promoteurs immobiliers, mais parce que des besoins collectifs sont exprimés par des porteurs de projet à caractère coopératif », poursuit Marc Moura. Dès le départ, les choses se font en co-construction. « Nous demandons aux porteurs de projet quel prix ils sont prêts à payer pour louer leur espace, et à partir de là, nous réfléchissons ensemble à la manière d’atteindre cet objectif. Cela demande donc l’implication de chacun. » Celle-ci va de la participation aux tra- vaux, à la mobilisation de son propre réseau dans le cadre d’un appel à épargne citoyenne… Plus l’implication est importante, plus le loyer pourra être bas. Marc Moura souligne : « Notre modèle promeut la collaboration alors que la société pousse à la compétition et à l’individualisme. Nous ne proposons pas que des ateliers à louer, mais de véritables lieux de connexion où les créateurs peuvent se rencontrer, les poussant ainsi à sortir de l’isolement auxquels ils sont souvent confrontés. » © DYNAMO COOP 24 25
workshop 5 CIRCUITS COURTS : LE MODÈLE COOPÉRATIF EST-IL UNE OPPORTUNITÉ LA RÉPONSE COOPÉRATIVE : RASSEMBLER ET ENCOURAGER POUR RAPPROCHER PRODUCTEURS ET CONSOMMATEURS ? « Le mouvement coopératif permet de rassembler et d’encourager la coopération entre tous les acteurs d’une filière autour de valeurs communes. » Diverses initiatives autour des circuits courts se développent un peu partout en Wallonie, plus particulièrement pour renforcer un modèle de production et de consommation locales. Des citoyens/consommateurs et des producteurs trouvent des intérêts communs à faire émerger des alternatives basées sur un système alimentaire de proximité. Le modèle coopératif n’est pas la seule réponse, mais il présente de nombreux atouts pour rendre viables et pérennes des initiatives entrepreneuriales impliquant les différents acteurs de la chaine alimentaire. Une de ses forces réside notamment dans les principes de gouvernance qui permettent de faire émerger des processus ILS ONT DIT ... décisionnels participatifs. Valoriser la production Connaître la provenance au prix juste de ce qui est dans l’assiette La force du modèle coopératif est la proximité. Stéphan Vincent, CEO d’Ethiquable et Administrateur de Coopéco « La coopérative n’est pas LA solution mais une alternative possible. Aujourd’hui, il existe AGRICULTEURS CIRCUITS COURTS CONSOMMATEURS une multitude de producteurs et de consommateurs. Et malheureusement, aussi un goulot d’étranglement contrôlé par un nombre limité d’acteurs. La force du modèle coopératif est la proximité. Cela permet de récréer un dialogue, de personne à per- TROIS ENJEUX POUR PÉRENNISER D’AUTRES MODÈLES D’AGRICULTURE sonne, et un rapport de force équilibré. » 1. Rééquilibrer les rapports de force entre tous les maillons de la chaine alimentaire. 2. Faciliter l’accès à une nourriture de qualité au plus grand nombre de consommateurs. 3. Eduquer les consommateurs aux circuits courts afin que ceux-ci constituent une réelle alternative à la Le modèle coopératif permet de travailler sur base d’un modèle et d’objectifs communs. grande distribution. Francis Bebronne, porte-parole de la filière Marguerite Happy Cow « L’avantage du modèle coopératif réside dans la réduction de la distance entre les agriculteurs et les consom- Pistes pour les acteurs de terrain Pistes pour les pouvoirs publics mateurs. Par essence, le lait est une matière première difficile à commercialiser en direct, ce qui éloigne la rela- tion producteur-consommateur. Le modèle coopératif a pour but de rassembler ces différents acteurs afin de 1. Adapter le cadre réglementaire pour faciliter le travailler ensemble, agriculteurs et consommateurs. Il permet de travailler sur base d’un modèle et d’objectifs 1. Assurer la transparence de chaque maillon sur les recours aux produits locaux (AFSCA et marchés communs. » prix tout au long de la chaine alimentaire, ainsi que publics) sur les conditions de travail 2. Eveiller les consommateurs aux bienfaits 2. Former et conscientiser les enfants à l’alimenta- tion durable et locale La collaboration est très positive pour les agriculteurs. d’une nourriture de qualité, y compris dans les Aurélie Noiret, conseillère au service Étude de la FWA (Fédération Wallonne de l’Agriculture) écoles 3. Mettre en place un système où les produits sont « La collaboration est très positive pour les agriculteurs. De plus, ceux-ci sont réellement demandeurs d’un rap- vendus au prix juste, c’est-à-dire un prix qui tient prochement avec les consommateurs. Mais la coopérative n’est qu’une forme de collaboration. Elle demande 3. Créer des espaces démocratiques de concerta- compte du coût environnemental et social réel du une réflexion et une formation sur le fonctionnement interne du mouvement. » tion avec les acteurs d’une chaine produit 26 27
RÉSEAU SOLIDAIREMENT : LES CIRCUITS COURTS ONT BESOIN DE LOGISTIQUE. Le point de départ du Réseau Solidairement est la mobilisation de citoyens, aidés par les autorités d’une petite commune près de Virton, pour reprendre l’épicerie du village. Depuis 10 ans, cette coopérative tourne grâce à la motivation citoyenne. Au fil du temps, elle a donné naissance à une série d’initiatives favorisant les circuits courts dans la région. Ainsi, la part des produits locaux dans l’assortiment de l’épicerie croît d’année en année. Dans la foulée ont été lancés des paniers de légumes saisonniers. De 4 maraichers au départ, ils sont aujourd’hui 24 à fournir des légumes localement. Ce mouvement a aussi impulsé la création de l’Epi lorrain, une monnaie locale destinée à favoriser les échanges économiques locaux. Organiser l’acheminement des producteurs aux consommateurs Mais pour que ces produits locaux arrivent jusque dans les épiceries, les GAC (Groupes d’Achats en Com- mun) ou les restaurants, il a fallu régler un problème de taille : la logistique. Centraliser les commandes, ra- tionaliser l’acheminement… C’est ce qu’ont fait les fondateurs du Réseau Solidairement. Très vite, ce réseau est devenu le lien manquant indispensable entre consommateurs et producteurs de la région. En 2017, le Réseau Solidairement a franchi une nouvelle étape : afin de trouver les moyens de financer ses besoins en locaux et en matériel, il s’est constitué en coopérative. Quasi tous les acteurs de la filière, producteurs, épiceries et restaurateurs, sont ainsi devenus coopérateurs, aux côtés des nombreux ci- toyens qui rejoindront l’aventure - c’est ce qu’espèrent les fondateurs - dans le futur. Un changement de fond Selon Pascal Van Bever, administrateur du Réseau Solidairement et membre-fondateur, tout ce travail mené depuis 2007 a changé pas mal de choses dans le Sud de la Province du Luxembourg. « Nous avons permis à certains maraîchers de s’installer puisqu’ils étaient assurés d’écouler une bonne partie de leur production. Nous avons aussi permis à certains agriculteurs de se diversifier. Quant aux consomma- teurs, nous les avons sensibilisés et leur avons donné accès aux produits de leur territoire. » Une des preuves est que le chiffre d’affaires de l’épicerie et du Réseau Solidairement est en constante hausse depuis des années, et que l’expérience a inspiré la création de nouvelles épiceries du même genre dans la région. Aussi, face à ce bilan, Pascal Van Bever appelle les pouvoirs publics à s’appuyer sur les initiatives citoyennes et à les soutenir. « Les personnes qui créent des coopératives citoyennes sont suffisamment motivées pour porter les valeurs coopératives et faire les choses bien. La réponse coopérative n’est bien sûr pas la seule aux dérives de l’industrie agro-alimentaire, mais nous avons pu constater que lorsque l’initiative part des ci- toyens, cela permet de s’accorder sur les valeurs à défendre et permet à chacun de s’approprier le projet. Cela mobilise les énergies. » 28 29
REMERCIEMENTS Le Forum des Coopératives est organisé par l’Agence pour l’Entreprise & l’Innovation en coopération avec ses partenaires de l’économie sociale et coopérative : Les Agences-conseil en économie sociale qui accompagnent les porteurs de projets et les entrepreneurs sociaux : Crédal Conseil, Febecoop, Progress, Propage-s, SAW-B, Step Entreprendre et Syneco ConcertEs, chargé de la concertation des acteurs wallons de l’économie sociale La SOWECSOM, partenaire financier wallon des entreprises sociales et coopératives Le Centre d’Economie Sociale de HEC Liège Ce carnet est téléchargeable sur : Le réseau Financité, qui réunit citoyens et organisations pour des financements éthiques et solidaires www.forum-cooperatives.be Et aussi les écoles pilotes qui ont mené des projets entrepreneuriaux coopératifs : Haute École Provinciale Condorcet (Ath), Haute École Provinciale de Namur, IPEPS–La Samaritaine (Charleroi) et la Haute École Albert Jacquard (Namur) Nous les remercions vivement pour leur apport et remercions la trentaine de contributeurs (témoins et experts) qui ont participé à ce processus. CONTACT L’Agence pour l’Entreprise & l’Innovation Agence pour l’Entreprise & l’Innovation (AEI) rue du Vertbois, 13b B-4000 Liège Téléphone : +32 (0)4/220.51.00 Mail : info@aei.be EDITEUR RESPONSABLE Véronique CABIAUX, Agence pour l’Entreprise & l’Innovation 30
ÉCONOMIE SOCIALE, COOPÉRATIVE ET SOLIDAIRE
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