Langues et cultures Camerounaises
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www.revue-akofena.com Hors-série N°05 Juin 2023 Sous la direction de Jean Romain KOUESSO et Marie KAKEU-MAKOUGANG Langues camerounaises, cultures et développement Nouvelles perspectives pour la cohésion sociale et la paix 2ème Symposium National sur les Langues Camerounaises Université de Dschang, Cameroun du 12 au 14 mars 2019 2ème Symposium National sur les Langues Camerounaises Université de Dschang, Cameroun du 12 au 14 mars 2019 Langues camerounaises, cultures et développement ISSN-L 2706-6312 Nouvelles perspectives pour la cohésion sociale et la paix E-ISSN 2708-0633 CC BY 4.0 ÉDITEUR CRAC – INSAAC https://www.revue-akofena.com/ D.O.I: https://doi.org/10.48734/akofena
Akofena, revue scientifique des Sciences du Langage, Lettres, Langues & Communication https://www.revue-akofena.com/ DOI : https://doi.org/10.48734/akofena PÉRIODIQUE : TRIMESTRIEL CC BY 4.0 - Creative Commons Sous-direction du dépôt légal, 1er trimestre Dépôt légal n°16304 du 06 Mars 2020 EDITEUR CRAC – INSAAC (Côte d’Ivoire) Centre de Recherche sur les Arts et la Culture (CRAC) Institut National Supérieur des Arts et de l’Action Culturelle (INSAAC) ISSN-L (imprimé) 2706 - 6312 E-ISSN (en ligne) 2708 - 0633
https://doaj.org/toc/2706-6312 https://reseau-mirabel.info/revue/7228/Akofena_revue_scientifique_des_sciences_du_langage_lettres_langues_et_communication https://www.journaltocs.ac.uk/index.php?action=browse &subAction=pub&publisherID=5480&journalID=46600&p ageb=1&userQueryID=&sort=&local_page=1&sorType=&s orCol=1 https://www.worldcat.org/title/revue-akofena-hors-srie/oclc/1151418959&referer=brief_results https://bibliographies.brillonline. com/pages/lb/periodicals https://commons.datacite. org/doi.org?query=Akofena http://ezb.uni-regensburg.de/ezeit/detail.phtml?bibid=SUBHH&colors=7&lang=de&jour_id=466175 hhttps://searchworks.stanford.edu/vie w/13629336 https://dbh.nsd.uib.no/publiseringskanaler/erihplus/periodical/info.action?id=498446 https://essentials.ebsco.com/search?query=Akofena&language=en https://portal.issn.org/resource/ISSN/2078-0633 https://zenodo.org/search?page=1&size=2 0&q=Akofena https://www.arsartium.org/wp-content/uploads/2021/02/MLA.pdf https://scholar.google.com/scholar?hl=en&as _sdt=0%2C5&q=revue+akofena&btnG= https://v2.sherpa.ac.uk/id/publication/37175 https://www.ascleiden.nl/content/recently-published-journal-articles-week-21-2020 Pour plus d’informations sur toutes nos bases d’indexation internationale : https://www.revue-akofena.com/indexation/
COMITÉ ÉDITORIAL & DE RÉDACTION/EDITORIAL AND WRITING BOARD Directeur de publication/ Director of Publication Pr ABOLOU Camille Roger, Directeur du CRAC – INSAAC Co-directeur de publication / Co-editor of Publication Pr Sihame KHARROUBI, Université Ibn Khaldoun Tiaret, Algérie Secrétaires éditoriaux / Editors' Secretaries Dr AHADI SENGE MILEMBA Dr KOUACOU N’goran Jacques, Université Phidias, Université de Goma, RDC Félix Houphouët-Boigny, Côte d’Ivoire Dr ALLA N’guessan Edmonde- Dr KOUASSI N’dri Andréa, Université Félix Houphouët-Boigny, CI Maurice, Université Péléforo Gon Coulibaly, Dr ALLOU Allou Serge Yannick, Université Côte d’Ivoire Félix Houphouët-Boigny, Côte d’Ivoire Dr KOUESSO Jean Romain, Université de Dr ATSE N’cho Jean-Baptiste, Université Dschang, Cameroun Alassane Ouattara, Côte d’Ivoire Dr MADJINDAYE Yambaïdjé, Université de Dr BOUTISANE Outhman, Université Moulay N’Djaména, Tchad Ismail Errachidia, Maroc Dr MANDOU AYIWOUO Faty- Dr GONDO Bleu Gildas, Université Félix Myriam, Université de Douala, Cameroun Houphouët-Boigny, Côte d’Ivoire Dr SEA Souhan Monhuet Yves, Université Félix Dr KODAH Mawuloe Koffi, University of Cape Houphouët-Boigny, Côte d’Ivoire Coast Cape Coast, Ghana Dr TOLOGO Guillaume Ballebé, Université Joseph Ki-Zerbo, Burkina Faso Rédacteur en Chef/ Editor-in-Chief Dr ASSANVO Amoikon Dyhie, Université Félix Houphouët-Boigny, Côte d’Ivoire Secrétaires de rédaction / Editorial Secretaries Dr ANDREDOU Assouan Pierre, Université Dr NANTOB Mafobatchie, Université de Lomé, Félix Houphouët-Boigny, Côte d’Ivoire Togo Dr BEN LARBI Sara, Université de Lorraine, Dr NIAMIEN N’da Tanoa Christiane, Université France Félix Houphouët-Boigny, CI Dr CONGO Aoua Carole, CNRST, Burkina Faso Dr NGUEMA ANGO Joseph- Dr DODO Jean-Claude, Université Félix Marie, École Normale Supérieure du Gabon Houphouët-Boigny, Côte d’Ivoire Dr N’GUESSAN Kouassi Akpan Dr KONE Drissa, Unification Theological Désiré, Université Félix Houphouët-Boigny Seminary, USA New York City Campus Dr STOLL Marie, Humboldt State University – Dr KOUASSI Amoin Liliane, INSAAC, Côte Californie, USA d’Ivoire Dr YOUANT Yves-Marcel, Université Félix Dr MAMADI Robert, Université Adam Barka Houphouët-Boigny, Côte d’Ivoire d’Abéché, Tchad Éditeur CRAC – INSAAC (Côte d’Ivoire)
COMITÉ SCIENTIFIQUE & DE LECTURE SCIENTIFIC AND READING BOARD National Prof. ABOA Abia Alain Laurent, Université Dr (MC) HOUMEGA Munseu Félix Houphouët-Boigny Alida, Université Félix Houphouët-Boigny Prof. AHOUA Firmin, Université Félix Prof KOSSONOU Kouabena Houphouët-Boigny Théodore, Félix Houphouët-Boigny Prof. BOGNY Yapo Joseph, Université Félix Dr (MC) SIB Sié Justin, Université Félix Houphouët-Boigny Houphouët-Boigny Dr (MC) BERE Anatole, Université Félix Dr (MC) TAPÉ Jean- Houphouët-Boigny, Côte d’Ivoire Martial, Université Félix Houphouët-Boigny Prof EKOU Williams Jacob, Université Félix Dr (MC) YEO Kanabein Oumar, Université Houphouët-Boigny Félix Houphouët-Boigny, Côte d’Ivoire Dr (MC) GOA Kacou, Université Félix Houphouët-Boigny International Dr (MC) ADJERAN Moufoutaou, Université Dr (HDR) MOUAS Samia, University of Oran d’Abomey-Calavi, Bénin 2, Mohamed Ben Ahmed- Algeria Prof. AINAMON Augustin, Université Prof. MOUS Maarten, Université Leyde, d’Abomey-Calavi, Bénin Pays-Bas Prof. BELGHEDDOUCHE Assia, ENS de Dr (MC) NJIOMOUO LANGA Carole, Bouzaréah, Algérie Université de Maroua, Cameroun Dr (HDR) BENAÏCHA Fatima Zohra, Dr (HDR) NOUREDINE Djamaleddine, Université de Blida 2, Algérie Université de Tiaret, Algérie Dr (HDR) Benamara Mohamed, Université Dr (HDR) OULEBSIR-OUKIL Kamila, Ibn Khaldoun Tiaret, Algérie École Normale Supérieure de Bouzaréah, Dr (HDR) Brahim Khaled, Université Ibn Algérie Khaldoun Tiaret, Algérie Dr (MC) OUÉDRAOGO Mahamadou Prof. GBAGUIDI Koffi Julien, Université Lamine, Université Norbert Zongo, Burkina d’Abomey-Calavi, Bénin Faso Pr Hemaidia Mohamed, Université Ibn Prof. PALI Tchaa, Université de Kara, Togo Khaldoun Tiaret, Algérie Prof. QUINT Nicolas, Université Paris Dr (HDR) Issad Djamel, Université Ibn Villejuif, France Khaldoun Tiaret, Algérie Dr (MC) RAKOTOMALALA Jean Robert, Dr (MC) KABORE Bernard, Université Université de Toliara, Madagascar Joseph Ki-Zerbo, Burkina Faso Dr (MC) RAZAMANY Guy, Université de Prof. KANTCHOA Laré, Université de Kara, Mahajanga, Madagascar Togo Dr (MC) REDOUANE Rima, Université Prof. LOUM Daouda, Cheikh Anta Diop de Abderrahmane MIRA-Bejaia, Algérie Dakar, Sénégal Dr (HDR) Soudani Mohammed, Université Dr (HDR) MAHFOUD Zakarya, Université Ibn Khaldoun Tiaret, Algérie Hassiba Benbouali de Chlef Algérie Prof. TCHABLE Boussanlègue, Université Prof. MALGOUBRI Pierre, Université de Kara, Togo Joseph Ki-Zerbo, Burkina Faso
Ligne éditoriale A kofena symbolise le courage, la vaillance et l’héroïsme. En pays Akan, les épées croisées représentent les boucliers protecteurs du Roi. La revue interdisciplinaire Akofena des Lettres, Langues et Civilisations publie des articles inédits, à caractère scientifique. Ils auront été évalués en double aveugle par des membres du comité scientifique et d’experts selon leur(s) spécialité(s). Notons qu’Akofena est une revue au confluent des Sciences du Langage, des Lettres, Langues et de la Communication. Les textes publiés sont des contributions théoriques ou des résultats de recherches de terrain des Chercheurs, Enseignants-Chercheurs et Étudiants. Pour éliminer toute velléité de collision avec des textes existants en ligne, c’est-à-dire déjà publiés, et obtenir un texte publiable ayant une grande qualité scientifique, valorisant tant le Contributeur que la revue Akofena, depuis octobre 2021, le Comité scientifique et l’Éditeur imposent à tout projet d’article une soumission à la détection anti-plagiat. Notons que le score obtenu ne devra pas excéder 20%. Akofena n’est ni une revue nationale ni régionale, mais une revue ouverte et accessible aux chercheurs de tous les horizons linguistiques. C’est à ce titre que les différents numéros publiés par Akofena font l’objet d’appel à contributions internationales sur les canaux de diffusions existantes. Outre, pour se départir des revues prédatrices, qui pullulent le monde universitaire, la soumission et les évaluations des projets d’article sont entièrement gratuites. Les seuls frais perçus par le nos services restent les frais liés à l’insertion/ publication des textes acceptés après évaluation. Pour terminer, conformément à la politique de libre accès, les articles publiés peuvent être copiés et distribués sans autorisation, à condition qu'une citation correcte de la publication originale soit fournie. Nous nous engageons à faire progresser la science et les applications à travers nos publications. Akofena veut s'assurer que votre expérience éditoriale se déroule le mieux possible afin que vous puissiez vous concentrer sur ce qui compte vraiment. Dr (MC) ASSANVO Amoikon, Université Félix Houphouët-Boigny Rédacteur en Chef
SOUS LA DIRECTION DE Jean Romain KOUESSO & Marie KAKEU-MAKOUGANG Langues camerounaises, cultures et développement HORS-SÉRIE N°5 – JUIN 2023 Nouvelles perspectives pour la cohésion sociale et la paix Akofena | Hors-Série n°05– Juin 2023 Date de mise en ligne 30 / 06/ 2023 ISSN-L : 2706-6312 //eISSN : 2708-0633 Éditeur : CRAC - INSAAC (Côte d’Ivoire) URL : https://revue-akofena.com
Sous la direction de Jean Romain KOUESSO et Marie KAKEU-MAKOUGANG Langues camerounaises, cultures et développement Nouvelles perspectives pour la cohésion sociale et la paix 2ème Symposium National sur les Langues Camerounaises Université de Dschang, Cameroun du 12 au 14 mars 2019 Cameroonian Languages, Cultures and Development New Perspectives for Social Cohesion and Peace 2nd National Symposium on Cameroonian Languages University of Dschang, Cameroon From 12 to 14 March 2019 Université de Dschang SIL Cameroon
Comité scientifique et de lecture Djomo Esaie, Université de Dschang Pangop Kameni Alain Cyr, Université de Dschang Amougou Louis Bertin, Université de Dschang Nforbi Emmanuel, Université de Dschang Fandio Ndawouo Martine, Université de Buéa Ngangop Joseph, Université de Dschang, Nguendjio Emile-Gille, Université de Bamenda Chiatoh Blasius Agha-ah, Université de Buéa Djimeli T. Alexandre, Université de Dschang Metangmo Tatou Léonie, Université de Ngaoundéré Meutem Lozzi Martial, Université de Maroua Fouelefack Kana Celestine collette, Université de Dschang Kengne Fokoua Magloire, Université de Dschang Tangyie Evani, Université de Dschang Wega Simeu Abraham, Université de Bamenda Manifi Abouh Maxime, Université de Yaoundé 1 Ngouo Rostand, Université de Maroua Ndamsah Linyor Gratiana, Université de Yaoundé 1 Ngo Ndjeyiha Madeleine, Université de Yaoundé 1 Comfort Beyong Oben Ojongnkpot, Université de Buéa Ndimofor Divine Nchang, Université de Buéa Kakeu-Makougang Marie, Université de Dschang Djomeni Gabriel Delmon, Université de Dschang Kouankem Constantine, Université de Bertoua Mamno Foko Hilarie, Université de Bertoua Djiafeua Prosper, Ministère des Enseignements Secondaires Voutsa Leopoldine, Ministère des Enseignements Secondaires Secrétariat de rédaction Kakeu Marie Makougang, Université de Dschang Minkeu Tcheulibou Elise, Ministère de l’Éductaion de Base Fokou Evariste, Ministère des Enseignements Secondaires Djoumene Kuete Juvelos, Université de Dschang
Escoffier-Ulrich KOUASSI NOTE D’INTRODUCTION L e présent ouvrage est issu du 2ème Symposium National sur les Langues Camerounaises (NASCAL2) qui s’est tenu du 12 au 14 mars 2019 à l’Université de Dschang. Ce rendez-vous du donner et du recevoir était organisé par le Département d’Etudes Africaines et Mondialisation de Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’institution hôte. Placé sous le thème Langues camerounaises, cultures et développement : nouvelles perspectives pour la cohésion sociale et la paix, il a bénéficié de la collaboration du Summer Institute of Linguistics (SIL) Cameroun et de plusieurs académies de langues camerounaises. L’événement a été une véritable opportunité pour ses nombreux participants d’explorer les solutions pratiques, structurées et transversales au besoin historique d’identification des pistes qui garantissent une paix et un développement durables, fondés sur les valeurs linguistiques et culturelles dignes et respectables d’un peuple camerounais fier et uni dans sa diversité. Autour d’une quatre-vingtaine de communications, les efforts consentis çà et là par les pionniers à questionner et à réquisitionner l’articulation entre le développement et la revalorisation des langues et cultures nationales ont été revisités. Il s’est agi, non pas de soulager un quelconque désir de contemplation intellectuelle, mais d’examiner les voies et les stratégies innovantes à l’aune des nouveaux défis qu’impose le nouvel environnement scientifique, technologique et socio-politique ou économique, aussi bien à l’échelle nationale qu’à l’échelle internationale. Dans la perspective des actes de ce Symposium, 32 contributions avaient été soumises à l’appréciation du Comité scientifique et de lecture. Au sortir de l’évaluation, 15 d’entre elles ont été retenues pour constituer les principales articulations de cet ouvrage. Elles sont reparties en trois sections : (1) hommage à Tadadjeu Maurice, (2) description des langues, (3) langues, cultures et société. Evidemment, c’est avec un réel plaisir que nous vous invitons à déguster ce modeste repas scientifique. Honneur et reconnaissance à toutes les personnes physiques et morales dont l’accompagnement inconditionnel voire multiple et multiforme, a irrigué le sillon patient du présent ouvrage. Nous pensons particulièrement aux membres du Comité scientifique et de lecture, à ceux du Comité permanent national de NASCAL, mais aussi et surtout aux différents contributeurs. Jean Roman Kouesso et Marie Kakeu-Makougang 4 HORS-SÉRIE N°05 – Juin ⎜2023
Overview of contents OVERVIEW OF CONTENTS Emmanuel Nforbi University of Dschang emmanuelnforbi@gmail.com T he book is organised into three main sections made up of a total of fifteen chapters. Each chapter has gone through a double-blind peer review process. The first section opens on two texts by two prominent African scholars, namely Sammy Beban Chumbow and Kum’a Ndumbe III. Chumbow pays a deserved tribute to late Maurice Tadadjeu, as a linguist, activist and theorician and humanist who has influenced his time and who has impacted mother tongue education in Cameroon and across the African continent with the tremendous results obtained from the implementation of the PROPELCA project. He is also presented as someone who laboured relentlessly up front and behind the scenes in the struggle of the Organization of African Unity (OAU) to become the African Union (AU). Kum’a Ndumbe III, while paying a sound tribute to late Professor Tadadjeu, relies on the example of the institution under his leadership, namely AfricAvenir to promote the linguistic and cultural diversity of Cameroon and Africa through African philosophy. To him, it is a way out of decolonisation, a means that will permit the liberation of Africans from neo- colonialism and burdens. The second section that addresses language description is made up of 05 chapters. In this section, Edmond Biloa looks at relative clause formation in four Chadic languages spoken in the upper north region of Cameroon, namely Musgum, Masa, Wandela and Giziga. The study shows that relative clauses are introduced by a relativizer which agrees in gender and number with the head noun (Masa). In the three languages, the unmarked relative position is DP REL and the relativizer modifies DPs. The author purports that the accessibility hierarchy devised by Keenan and Comrie is respected in the languages: Subject, Direct Object, Indirect object of pre-or postposition as well as Possessor are relativizable positions in the aforementioned languages. Still within a descriptive approach, Adriel Josias Bebine tackles verbal extensions and voice in nuasúɛ, an A62A Bantu Mbam Yambasa language spoken in Cameroon. Bebine borrows from the language integrated approach postulated by Dixon and Aikhenvald's basic linguistic theory to demonstrate that Nuasúɛ exhibits two types of polyfunctional verbal extensions, which are essentially voice markers: prototypical extensions which are suffixes whose main function is to augment verbal valency and non-prototypical extensions, which are the different affixes playing the role of verbal valency reducing morphemes in one of their secondary roles. He posits that the combination of these affixes creates different types of semantic impacts governed by the constraint of the maximal gauge of the domain of extensions, which requires at most three HORS-SÉRIE N°05 – JUIN ⎜2023 5
Emmanuel Nforbi (University of Dschang) syllables by verb stem and whose RAC order is the opposite of the Pan-Bantu CARPC gauge. This study is accompanied by Isaac Kendall’s description of the system of tense and aspect in Lefa’ (Bantu, A.50) where he identifies 4 pasts, 2 futures, a narrative and aspect such as progressive, habitual, persistive, inceptive, perfect. The description of their morphological properties exhibits that although these tense and aspect markers form semantic systems, the markers vary, morphological and constructional properties that seem unexpected. In the same vein, Nelson Tshongongei study on numeral Mutation in Lower Fungom languages. He demonstrates that the numbers from 1 to 10 have undergone mutation from numerals to act as head noun modifiers or determiners. He goes to the conclusion that typologically, the 13 languages studied fall into two of the three categories exhibited by numeral mutation (NMT): -NMT (minus numeral mutation), +NMT (plus numeral mutation), +NMT (plus and minus numeral mutation) while only certain noun classes allow numeral mutation. The second section of the book ends with Jean Romain Kouesso, looking at the problem of boundaries and the orthography of words in Yemba. Based on observation and analysis of words in the language, it looks at some word delimitation criteria to address their structural typology. He concludes on two main orthographic principles, which unfold in writing and reading principles. They include the orthography principles of reduplicated words and of compound words. The third section of the book examines language, culture and society related issues. It is composed of 08 chapters. Herein, Etienne Sadembouo who worked on “L’Alphabet Général des Langues Camerounaises : 1979-2019: quel accueil et quelle perspective après 40 ans d’adoption ?” examines the fate of the General Alphabet of Cameroonian Languages (GACL), a reference document developed 40 years ago by linguists-researchers assisted by other Cameroonian languages stakeholders. In recalling its creation and adoption context along its principles, the current state of its use and mainly the perspective of its consolidation and generalisation, the author mentions that the need to harmonise the writing principles of the languages came from the difficulties faced by authors and communicators in those languages to produce texts based on a common code addressed to the public within an avoidable multilingual context where languages live together. As he finally emphasises, the adoption of a common alphabet aims at facilitating the transition from one language to another in the implementation of a formal or non-formal multilingual teaching/learning programme. The AGLC, as a didactic tool, will help in any domain of language use in its written form, even in translation. Works on the description of African languages also made a good part of the contributions to this volume. Kathy Cummins in ‘Helping communities examine their language vitality using a practical Guide’ is convinced that over the last three years, many Cameroonian languages are becoming less vital – that is, they are losing speakers or richness or functions, often all of these together. This has led Godfrey Chuo Kain in his chapter titled ‘Achievements and challenges of the Kom Multilingual Education Longitudinal experience and the impact on Cameroon’s educational system’ to examine the 6 HORS-SÉRIE N°05 – JUIN ⎜2023
Overview of contents experiences and the impact of the longitudinal Multilingual Education (MLE) project in Kom, a project executed by the Summer Institute of Linguistics (SIL). It shows that attitudes manifested afield by stakeholders (educationists and parents) were questionable to the fact that multilingual education could be used as a tool to improve education standards, maintain peace and harmony of a nation. It is therefore on this basis that the study ethnographically dwells on examining the challenges and the achievements of the Kom project in Cameroon. With discussions from personal experiences the author shows that MLE views based on such a project could be a way to strengthen MLE partners who could be found in similar circumstances in their projects elsewhere in Cameroon. Still in the vein of assessing language attitudes, Linda Songbi examines in ‘Language Attitudes in Kom and Mankon Communities: Endangerment or Perpetuation’ assesses community members’ attitudes towards mother tongue and mother tongue education in order to ascertain whether a positive or negative attitude to a language naturally leads to perpetuation or endangerment, more precisely in Cameroon. Through direct and indirect methods dominated by questionnaire submission and matched guise techniques test, she unveils that Kom and Mankon community members portray a positive attitude towards their indigenous language and its use in schools with the attitudes of females with the aging population being most significant. Furthermore, the study also observes an intergenerational language shift from the indigenous language to English with the aging population and the inverse for the working population. The findings, she argues, are relevant to the sustenance of the Mother tongue education (MTE) programme in Kom whereby positive attitudes have, to an extent, led to success in MTE within the community and in Mankon which is aspiring to embrace MTE. Also, it is important for MTE teachers especially concerning the learners’ judgment of the teachers which invariably affects the learners’ success. Because mother tongue education requires fine-tuned writing systems for the languages involved. Joseph Mbongue questions through the lens of institutions for language and culture promotion, ethnomethodology and parameology how identity interplays with language and how traditional values are endangered because of the colonial linguistic and cultural tragedy. He argues that institutions like NACALCO, SIL- Cameroon and CABTAL that work for the federation of language committees suffer not only from the superpower of the official languages which dominate the Cameroon linguistic arena as languages of instruction, but also from the consequences of the power of technological development, which has imposed on Global South countries an unsuccessful race to fill the gap. To him, the mutation of Cameroon languages from the oral to the written tradition and to digital languages looks like a kind of cataclysm which has affected the soul of Africans from families to education and the whole society. In an attempt to meet the challenge, it causes a sort of linguistic and cultural drama in the sense of Fasold’s language shift. In his search for African authenticity and linguistic issue, Teguezem investigates the affirmation that African linguistic authenticity is instead possible in proper African languages but not in foreign Western languages and cultures. The researcher comes to the conclusion that the HORS-SÉRIE N°05 – JUIN ⎜2023 7
Emmanuel Nforbi (University of Dschang) deconstruction of the superiority complex of the rationality of Western languages must go through the acknowledgement of African languages and the relativization of other existing linguistic means. To him, the use of African languages must be handled with care in order not to exclude foreign languages, what will fence Africans in what he calls ‘sort of solipsism’. Marie Kakeu-Makougang in her chapter titled ‘Danse et chants Mǝso chez les Bamougoum à l’Ouest-Cameroun: décodage et enjeux’ examines how the Məso songs and dance of the Bamougoum people of the West Region of Cameroon are the expression of a certain cultural identity of these people. This observation leads the researcher to assert that the dance and songs that make up Mǝso are of particular importance in the epistemic domain of African civilisation. At the end of her analysis, she points out that the Mǝso songs are part of a real self-representation literature through which women’s magnificence is exhibited. In addition, she notes that it contributes to the will of the Bamougoum people to protect their cultural heritage in the midst of endangered national cultures because of negative impacts of globalisation. To end this third section of the book, Marie Kakeu-Makougang and Beaudelaire Kaze take the analysis to the study of the relation between semiotic and culture, proceeding with a semiotic analysis of funeral (taken from the Cameroonian sense) arsenals in the Bamileke land, West-Cameroon. They argue through semiological and anthropological methods that the elements that are put forward in funeral celebrations in the Bamileke area are full of communication reservoirs of all sorts. They bring meaning to the cultural practice and which also to participate in attracting people to the Bamileke ancestral ceremonies which carry along strong cultural aspects. 8 HORS-SÉRIE N°05 – JUIN ⎜2023
HOMMAGE À TADADJEU MAURICE
Beban Sammy Chumbow MAURICE TADADJEU ICON OF SELF-SACRIFICE AND SERVICE TO HUMANITY Beban Sammy Chumbow Emeritus Professor, University of Yaoundé 1 Foundation member of ACALAN sammybchumbow@yahoo.fr Maurice Tadadjeu, linguist, educationist, academician, researcher and humanist of exceptional prowess, commitment and dedication to service quite unexpectedly, took on early the fight to eternity on the thirtieth of December 2012, practically refusing to see another new year on the planet earth. Maurice Tadadjeu was a man of many distinguished parts and excelled in all of them or almost. He was an ideologist of African unity and a front-line activist (in the finest sense of the word) who laboured relentlessly up front and behind the scenes with the likes of his ‘ami personnel’, President Alfa Konare in the struggle of the Organization of African Unity (OAU) to become the African Union (AU). Even then, the present AU concept of autonomous states loosely related is a far cry for Maurice Tadadjeu’s deep-seated vision of a United States of Africa, an emergent USA, a veritable ‘Confederation of African States’ united in its destiny for a historic grandeur and economic prosperity. Maurice was vice-President of the OAU/AU’s prestigious civil society institution ‘Economic Social and Cultural Council (ECOSSOC) and during his tenure, he worked hard with the team in terms of dynamic service to give the institution meaning, functional relevance and prestige. The AU Constitution project which he and other colleagues wrote from the vantage point of this vision of Confederation of African States is alive and making the rounds in political circles across the continent and gathering adherents to the cause. Maurice Tadadjeu’s role and influence in the creation and implantation of the OAU/African Union Clubs in schools, in colleges and Universities on the continent is fundamental and determinant as a forum for ideological orientation of the rising generation to ideals of continental grandeur and the emergence of African nations. Maurice Tadadjeu, was an astute educationist whose vision of education transcended current elitist models that favor the creation of a class of governing elites for the government positions. He had aversion for this education via a policy of limited and exclusive use of exoglossic or foreign languages expropriated from Europe and appropriated in Africa as the nation’s only official languages, with the consequent marginalization and indeed exclusion from the development process, of the majority African populations who speak mainly or only an indigenous African language. The situation, Maurice Tadadjeu could not stand. It hurt him from the mind, through the body to the bones and the marrow. Eked by this unfortunate reality, Maurice Tadadjeu devoted thirty-seven years of his university teaching career to the fight to redress the situation. He enrolled in the continental army in the fight for what has become known as the ‘mother tongue based multilingual education’, the advocacy for the policy of mainstreaming the mother tongue as language of Akofena ⎜Hors-série n°05 9
Maurice Tadadjeu icon of self-sacrifice and service to humanity education with the official languages English, French, Portuguese and Spanish as ‘partner language’. He fought on all fronts for the implementation of this policy, at the national, the regional and continental levels. He rose from ranks to impose himself as the generalissimo, a foremost theoretician and practitioner in the mother tongue-based education industry. Among the litany of successes registered, Maurice will be remembered for the immense contributions to the advocacy that led to the revision of the 1961 and 1972 Cameroon Constitutions from a provision to the effect that ‘English and French are the official languages of Cameroon’ (un point, un trait) to the more progressive constitution which in addition, recognized the value of Cameroonian languages and consecrated their development and use in the school system. Although there is a gaping gap between the policy and its effective implementation, it has nevertheless given rise to the 1998 law on education and a number of decrees in favor of the effective use of Cameroon languages in education as a medium of instruction. Maurice conceived and developed the “Projet de Recherche opérationnelle pour l’Enseignement des Langues au Cameroun’ (PROPELCA) after the IFE (Nigeria) model. The PROPELCA project which demonstrated beyond reasonable doubts that children who studied primary school subjects first in their mother tongue and later in English or French performed significantly better than those who studied these subjects uniquely in English or French has become a major reference in the advocacy of the Mother tongue-based multilingual education by the UNESCO experts. The results of PROPELCA were verified and ascertained by external assessors led by Prof. Cairns of the Canadian International Development Agency (CIDA) and the International community as a reference in the implementation of the mother tongue-based multilingual education. The work by Maurice Tadadjeu, his students and colleagues produced from this project have had a lasting impact on issues of language planning and applied linguistics at the global level as attested by the various citation indexes and the award of the international linguapax for 2005 to Maurice Tadadjeu. In the ideological war between adepts of developing a few mega-languages from the development of Africa and the developing languages, Maurice Tadadjeu pitched camp with the later and developed cogent psychological and sociolinguistic arguments in favor of a project leading to the introduction of what he calls Basic Standardization of all African Languages (BASAL). The fact that the UNESCO 2003 Expert committee on the endangerment of world languages has taken position for advocacy for the revitalization of all endangered languages as well as the development, maintenance and use of all languages in education, is a vindication of the position of which Maurice Tadadjeu had fought for decades before UNESCO initiative. At the continental level, Maurice was very respected for his intellectual ideas, knowledge, experience, commitment and dedication sacrificially put at the service of the continental language policy lobby. In this regard, Maurice worked diligently and fervently with others in the several committees of the African Union that revised and produced the compendium of new texts that were adopted by the heads of States at the Khartoum summit in January 2006. (The Language Plan of Action for Africa 2006, the Charter for African 10 Actes de 2ème Symposium 2023 ⎜09-12
Beban Sammy Chumbow Cultural Renaissance 2006, the Statutes of the African Academy of languages (ACALAN) 2006: The year of African Languages). Together these texts for which Maurice made a significant input, constitute the language policy of the African Union; a policy which enjoins African countries to develop and use the African languages for Africa’s development with the official languages of the colonial heritage as partner languages in the development enterprise. The AU considers the partnership between the languages of the African heritage and the languages of colonial legacy as an indispensable condition for the mobilization of the masses of the rural population for effective development in the perspective of emergence. The African Academy of Languages (ACALAN) is the African Union’s power house for giving impulsion to and coordinating language policy and implementation action on the continent. Maurice Tadadjeu was, in 2007 elected and approved by the African Union Commission to serve as member of the first governing board of ACALAN in the distinguished company of Professor Ayo Bamgbose of the University of Ibadan, Nigeria and Dr. Neville Alexander of the University of Cape Town, South Africa. This was evidence of the continental recognition at the highest professional level, given that Maurice who was considerably much younger was to occupy the same space in the orbit with continental giants of the likes of Ayo Bamgbose and Neville Alexander. But he unquestionably deserved the honor bestowed to him. The African language policy for which Maurice worked so enthusiastically and so fervently is being implemented at various levels and at different rates of progression by the member States of the African Union since the commitment made at the Khartoum summit. In Cameroon, the Ministries of Basic, Secondary and Higher Education are actively involved in implementing this policy, especially as it is congruent with the provisions of the 1996 constitution and the 1998 law on education, It is gratifying that Maurice was actively sought and involved in working with all the three Ministries before his untimely exit. In times like these, some of us who, as Maurice Tadadjeu’s elder brothers in the profession have worked with him over the years, from ideological planning in the Diaspora (in the USA) to effective action on the continent and country of our birth, cannot help but feel a special sense of personal loss. The departure of Maurice at this time is certainly a loss felt by the family to whom I address my personal condolences. It is also a loss to the international community of scholars with whom Maurice has worked over the years in the realization of the continental project. Maurice, you have jumped over the queue! You always preferred the fast track! Yesterday, it was friend Neville Alexander, who after years in Robin Island with Mandela served the new South Africa and the continent diligently and took off to eternity for glorious splendor. Today, You, the prince inheritor of our dreams, you have taken the earlier flight to eternity, making me look like an over aged, out of space, out of time dinosaur! Well, it is God’s will and there is therefore no appeal! You have taken the flight to eternity an early and undeserved exit; so unexpected that you could not wait for your students to organize a proper academic honors for you in the form of a well-deserved festschrift. We are left with memories of your pugnacity, your Akofena ⎜Hors-série n°05 11
Maurice Tadadjeu icon of self-sacrifice and service to humanity dynamic engagement with adversity; memories of ambitious plans and of your determination to conquer the unconquerable and win all battles in the struggle for our noble cause. These memories we cherish; these memories we will treasure. As I said on the occasion of Neville’s funeral, I will say this again. I know it is not your wish that we should lay down our tolls and gloat for long over your departure. So, like the African freedom fighters of yester-years, we resolutely pledge to continue with the work/ ‘a lutt’a continua’. As you go through the pearly gates of splendor into heavenly glory, fair the well. Ghene ku zeshi’ne, Anwi fogho a gho. Arriver derci. To God be the Glory for everything we have done. 12 Actes de 2ème Symposium 2023 ⎜09-12
Prince Kum'a Ndumbe III SE RÉCONCILIER AVEC SON PASSÉ GRÂCE À SA LANGUE ET AFFIRMER SON IDENTITÉ MULTICULTURELLE SUR LE PLAN INTERNATIONAL PAR LES PRODUCTIONS DE SA LANGUE : L’ENGAGEMENT ET L’EXPÉRIENCE DE LA FONDATION AFRICAVENIR INTERNATIONAL ET DES EDITIONS AFRICAVENIR DEPUIS 1985 Prince Kum'a Ndumbe III AfricAvenir ndumbe3@yahoo.de Mon cher Tadadjeu, Me voici sur le sol de tes ancêtres, venu célébrer les fruits de tes efforts infatigables, le résultat de ton engagement sans faille, pendant tant de décennies, au Cameroun, en Afrique, dans le monde. Nos chemins se croisaient souvent, et nous marchions alors ensemble, aussi avec Neville Alexander, à qui je voudrais aussi rendre un hommage solennel. Ne me demandez pas de l’appeler Maurice, son nom du blanc, qui n’est pas son vrai nom. Mon cher Tadadjeu, je te parle en français, dans le sillon de ton trilinguisme intensif, mais un jour, un des miens viendra ici, à l’Université de Dschang, t’invoquer en langue duala, pendant que les traducteurs en yemba transmettront aux académiciens ici réunis le message envoyé depuis les profondeurs des eaux du Wouri. Ce jour-là, nous pourrons alors dire que nous sommes enfin sortis du génocide intellectuel et spirituel dans lequel nos peuples ont été engloutis depuis bientôt six siècles. Nous parler en nos langues, sans intermédiaire, sans interférence linguistique de l’Europe coloniale ou postcoloniale. Là, nous aurons commencé à nous parler vraiment, à transmettre les codes secrets africains qui ont besoin de nos langues pour s’enraciner et féconder profondément. 1. Sortir du génocide intellectuel et spirituel imposé aux peuples africains Sortir du génocide intellectuel et spirituel perpétré sur l’homme d’Afrique esclave, colonisé et néo-colonisé, quel défi ! Comment peut-on continuer à former des docteurs, des professeurs qui excellent dans les moyens d’articulation de la langue de l’autre, mais demeurent incapables de s’exprimer dans leur propre langue africaine ? Comment continuer à célébrer des diplômés hautement intelligents mais dont l’illettrisme ne permet pas de déchiffrer les codes de l’héritage scientifique des peuples africains ? Or pour décoder un héritage scientifique, la connaissance et la maîtrise de la langue sont incontournables. La langue n’est que la première clé, le premier sentier qui permet l’accès à l’héritage codé, à transmettre. Nos ingénieurs, nos chimistes, nos médecins, nos économistes, nos juristes, nos historiens formés dans les universités camerounaises, pour n’évoquer que ceux-là, ont-ils accès à l’héritage scientifique des peuples africains dans leur discipline de spécialisation ? Ou alors, leur suggère-t-on encore en ce 2019 que l’Afrique millénaire a dormi dans l’ignorance et qu’il a fallu l’arrivée du colonisateur il y a à peine deux siècles, avec sa langue étrangère, pour que la science et la connaissance s’introduisent dans notre monde sous les tropiques ? Akofena ⎜Hors-série n°05 13
Se réconcilier avec son passé grâce à sa langue et affirmer son identité multiculturelle sur le plan international par les productions de sa langue : l’engagement et l’expérience de la Fondation AfricAvenir International et des Editions AfricAvenir depuis 1985 2. L’« homo sapiens sapiens » noir peuple la planète terre Les découvertes scientifiques nous révèlent que l’Afrique est le berceau de l’humanité, que l’ « homo sapiens sapiens » noir peuple cette planète terre depuis non plus 150.000 ou 200.000, mais depuis 300.000 ans. La terre était donc peuplée de Noirs exclusivement, jusqu’à ce que par les diverses migrations de ces Noirs, la dépigmentation de la peau commence il y a 8.000 à 10.000 ans seulement. En langage clair : seul le Noir a peuplé le monde depuis 300.000 ans, la couleur blanche de la peau ne date que d’hier, il y a à peine 10.000 ans. Les Anglais ont publié en février 2018 leur ancêtre, l’Homme de Cheddar, un Noir aux yeux bleus, vieux de 10.000 ans environ.1 Les professeurs et chercheurs africains, mais aussi du monde entier sont interpellés pour répondre à cette question fondamentale : Puisque, selon les découvertes scientifiques les plus récentes, les Noirs ont seuls peuplé la planète terre pendant 290.000 ans, quel héritage scientifique, culturel, religieux, linguistique, etc. ont – ils légué à l’humanité pendant une si longue période ? Les universités et centres de recherche du monde, mais surtout africains, ont l’obligation d’apporter au fur et à mesure des éléments de réponse à cette question fondamentale pour l’évolution de l’être humain et les progrès de la science dans le monde. Or comment voulez-vous déchiffrer cet héritage scientifique de 290.000 ans si vous continuez à ignorer les langues dans lesquelles ces héritages étaient articulés ? Tout d’un coup, la richesse linguistique du continent africain se révèle sous une autre dimension. Quelles ont été les inventions scientifiques de cet homme noir pendant 290.000 ans et lors des derniers 10.000 ans qui ont vu apparaître la dépigmentation de la peau ? En réfléchissant sur les éléments d’une réponse à cette question, nous constatons au Cameroun l’absurdité de réduire l’enseignement et la science au bilinguisme français- anglais, langues toutes jeunes, importées en Afrique de surcroit, qui n’ont aucun impact sur le déchiffrage du legs scientifique et multi millénaire de l’humanité, une humanité essentiellement africaine. Le comble de cette absurdité au Cameroun est que nous nous faisons même la guerre pour nous identifier à l’anglophonie ou à la francophonie, nous nous définissons selon la coloniale, bloquant ainsi l’accès à l’héritage essentiel de l’humanité, un héritage fondamentalement africain. 3. Connaissance profonde des langues africaines et découverte de l’héritage scientifique de l’humanité Je vous demande : comment accéder à cet héritage de 290.000 à 300.000 ans en s’entêtant à ignorer les langues essentiellement africaines qui ont porté ce savoir ? « Les chercheurs ont découvert que dans la grotte de Blombos, à 290 Km du Cap en Afrique du Sud, il y a 75.000 ans, l’Homo Sapiens – qui ne pouvait être que noir- avait développé une pensée abstraite, capable de stocker des informations d’une autre manière que dans le cerveau, de créer des couleurs à travers des processus chimiques et des bijoux tels que les colliers…La curiosité des scientifiques de la NASA a été éveillée lorsqu’ils 1 Kum’a Ndumbe III, L’Afrique reprend sa place, Editions AfricAvenir, Douala/ Vienne, 2018 14 Actes de 2ème Symposium 2023 ⎜13-18
Prince Kum'a Ndumbe III constatèrent que les dessins géométriques d’une grande pierre dans cette grotte indiquaient la théorie et l’application de séries infinies avec une constellation de triangles… Ces séries infinies représentent les mathématiques supérieures et sont utilisées de nos jours pour faire tourner les avions ou calculer les forces de turbulence de l’air ». Au Congo, l’Os d’Ishango, vieux de 22.000 ans, érigé par les Belges à la place de la Monnaie à Bruxelles pour célébrer les débuts de la science, est bien considéré comme le précurseur de l’ordinateur et comme calculette préhistorique. Les papyrus mathématiques Rhind de l’Egypte noire conservé au British Museum ou le papyrus mathématique conservé à Moscou datant de 1500 ans av. JC ont bien servi à Thalès et Pythagore pendant leurs études de plus de vingt ans en Afrique. Comment voulez-vous vraiment accéder à toutes ces banques de données de l’humanité sans maîtriser les codes de transmission du savoir des peuples africains, sans maîtriser ces langues africaines dans leur évolution ? Et je me pose cette question : comment dans un pays africain comme le Cameroun l’élève, l’étudiant et le chercheur continuent-ils à être initiés dans la pensée en utilisant le français et l’anglais, langues toutes jeunes et importées, langues non africaines, pendant que l’essentiel de la science, de la pensée a toujours été articulé dans les langues africaines ? Il est urgent de décoloniser, il est urgent de libérer l’enseignement et la recherche dans les écoles et dans les universités africaines du 21è siècle pour permettre le grand bond dans la découverte scientifique, toutes disciplines confondues. Or la connaissance profonde des langues africaines, la redécouverte et le déchiffrage des écritures africaines, la redécouverte des modes de transmission du savoir par l’oralité africaine ne sont que des prérequis pour accéder à cet héritage scientifique. Les linguistes camerounais et africains se trouvent donc subitement devant un énorme défi lancé par l’humanité entière. Ils sont obligés d’abandonner les sentiers qui ont mené à l’introduction des langues africaines dans la recherche scientifique et l’enseignement colonial. Pour asseoir la colonisation en Afrique au 19è siècle, il fallait vider l’Africain intellectuellement et spirituellement de lui-même d’abord, et maîtriser son âme par la suite. Ce n’était possible que si dans un premier temps, l’Européen prêtre, pasteur évangélisateur ou simple colonisateur se mettait à l’étude des langues africaines. Ainsi, en Europe, s’établiront des instituts de langues africaines au 19è siècle. Leur travail se concentrera par la suite sur la traduction de la bible et la dissémination du christianisme sur le territoire africain conquis. Les instituts ou départements de langues africaines de nos universités sont quelque peu issus de ces structures métropolitaines. Ils étaient considérés pendant longtemps comme des départements exotiques ou peu utiles à la nouvelle nation africaine. Aujourd’hui, en 2019, ces départements se trouvent brusquement devant une responsabilité nationale et mondiale. Puisque l’Homme d’Afrique est l’origine de l’humanité et que le Noir a seul peuplé la terre pendant 290.000 ans, articulant sa pensée dans ses différentes langues, chaque discipline scientifique a besoin de connaissances dans les langues africaines pour pouvoir découvrir le legs scientifique hérité des peuples noirs sur la planète terre. Les universités africaines se trouvent donc au front avec leurs départements de langues africaines pour permettre de rétablir la vérité historique sur l’évolution de la science, de la pensée, de la spiritualité de la religion, etc. aussi bien en Afrique que dans le monde. Ces départements Akofena ⎜Hors-série n°05 15
Se réconcilier avec son passé grâce à sa langue et affirmer son identité multiculturelle sur le plan international par les productions de sa langue : l’engagement et l’expérience de la Fondation AfricAvenir International et des Editions AfricAvenir depuis 1985 deviendront tôt au tard des prestataires de service obligés pour les nombreuses disciplines scientifiques. C’est vrai que les langues qui, grâce à l’impérialisme du 19è au 21è siècle ont conquis le monde vont s’armer pour contrecarrer cette évolution des langues africaines, mais n’oublions pas qu’en l’an 2100, l’humanité sera à 40% africaine et que déjà en 2050, la jeunesse mondiale sera africaine avec un adolescent sur trois âgé de 15 à 29 ans qui vivra en Afrique. Aux Africains à prendre leur responsabilité historique. 4. L’engagement de la fondation AfricAvenir International et des Editions AfricAvenir Fort de cette analyse se basant sur la primauté de l’Afrique dans l’évolution de l’humanité, nous avons créé la Fondation AfricAvenir International en 1985, avec son quartier général à Bonabéri-Douala et des succursales à Berlin, en Allemagne, à Vienne en Autriche et à Paris en France. La Bibliothèque Cheikh Anta Diop fut installée en 1993 à Bonabéri-Douala et sert de base pour la collecte des travaux sur l’héritage scientifique africain. Elle est le pilier incontournable de l’école doctorale « Héritage & Innovations » créée en 2016 au sein de la fondation AfricAvenir, avec son « Institut Supérieur des Sciences Sociales et de Technologie pour la Renaissance Africaine » à Douala et son « AfricAvenir’s Higher Institute of Social Sciences and Technology » à Yaoundé, récemment autorisés par le MINESUP en mai 2019. Nous avons collectionné dans les archives allemandes les documents en langues camerounaises publiés sous différentes formes entre 1884 et 1935. Ces documents sont disponibles à la Bibliothèque. Et progressivement, nous achetons dans la mesure de nos modestes moyens les livres dans les langues camerounaises. Actuellement, environ 300 livres dans différentes langues camerounaises sont disponibles, mais demeurent inexploités par les linguistes et par le public. Il s’agit de livres d’apprentissage des langues, dictionnaires, livres de lectures, de contes, d’histoire, etc. Les moyens financiers appropriés pour mettre ces documents de manière agréable à la disposition d’un public de lecteurs et de chercheurs font encore défaut. L’expérience unique d’un concours de langues africaines entre 14 établissements secondaires en novembre 2003 a révélé un véritable engouement de la part des élèves. 1400 élèves ont pris part à ce concours, dépassant de loin ce que la fondation avait prévu. Nous étions obligés d’utiliser les haut-parleurs. La plupart des participants ne pouvant pas trouver une place dans la salle, ils suivaient seulement dehors. Les soirées de contes en langues camerounaises ont eu autant de succès en février 2004, mais l’expérience n’a duré que trois mois, faute de moyens financiers. 5. La mémoire collective africaine De 1981 à 1986, j’avais mis sur pied avec des collègues de différentes disciplines à l’Université de Yaoundé I un groupe de recherche intitulé « Souvenirs de l’époque allemande au Cameroun ». Il s’agissait de compléter nos sources d’histoire par le témoignage de nos vieux Camerounais qui avaient vécu le premier choc colonial, mais dont les contributions manquaient dans les livres et dans les archives confectionnées presque exclusivement par le maître colonial. Nous avions décidé de mener les interviews dans les langues 16 Actes de 2ème Symposium 2023 ⎜13-18
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