BILAN SCIENTIFIQUE 2021 - IHEDN
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CONTEXTE 02 L’ÉQUIPE 02 OBJECTIFS DE LA CHAIRE 05 LES CINQ THÉMATIQUES PRINCIPALES 06 RÉSULTATS OBTENUS 08 1. Connaissance des entreprises de défense : stratégies, forces et fragilités 09 2. Déterminants et impacts de la dépense de défense 10 3. R&D et innovation dans le domaine de la défense 13 4. Maintien en condition opérationnelle (MCO) 16 5. L’intégration et la coopération de défense en Europe 19 La Chaire Économie de défense - IHEDN est le fruit d’une initiative conjointe « État-Industrie » de soutien à INTERVENTIONS DANS LES FORMATIONS 22 la recherche académique en économie de défense. ACCOMPAGNEMENT DES JEUNES CHERCHEURS 23 RÉSEAUX / RECONNAISSANCES 23 Depuis 2014, la Chaire contribue à apporter un SITES ET RÉSEAUX SOCIAUX 24 éclairage, le plus objectif possible, sur les impacts économiques des décisions politiques en matière de INTERVENTIONS MÉDIATIQUES 24 SOMMAIRE défense. LES ENTRETIENS DE L’ECODEF 25 CONFÉRENCES ORGANISÉES PAR LA CHAIRE 26 LISTE DES TRAVAUX DE LA CHAIRE 28 • Revues scientifiques 28 • Ouvrages et chapitres d’ouvrage 29 • Coordinations de numéros spéciaux 30 • Newsletters de la Chaire 31 • Collaborations avec des revues spécialisées 32 • Documents de travail 33 • Présentations lors de conférences, séminaires ou workshops 34 • Diffusion de travaux lors de rencontres « grand public » 36 • Webinaires de la Chaire 37 -1-
CONTEXTE Même si la France bénéficiait d’une longue tradition de recherche en Économie de défense, cette discipline n’était que peu représentée ou structurée. Ce manque relatif d’analyse économique sur la défense se faisait ressentir, aussi bien du côté des décideurs publics et privés qu’au niveau académique. En comparaison des travaux anglo-saxons, la base industrielle et technologique de défense était peu étudiée en France et les liens Jean Belin Julien Malizard entre la sphère défense et la sphère civile restaient méconnus. Titulaire Titulaire adjoint C’est dans ce contexte que la Chaire Économie de défense - IHEDN a été lancée en janvier 2014. L’ÉQUIPE À fin 2021, six personnes composent l’équipe permanente de la Chaire : Jean Belin, titulaire, Laure Noël Josselin Droff Julien Malizard, titulaire adjoint, Josselin Droff Chercheur Chercheuse et Laure Noël, chercheurs, Jade Guiberteau, assistante de recherche en alternance, et My- riam Sonni chargée de communication. La Chaire dispose d’un Comité de pilotage, présidé par Olivier Martin, regroupant les Olivier Martin Président du Comité de pilotage représentants du ministère des Armées (Direction générale de l’armement, Direction générale des relations internationales et de la stratégie, Secrétariat général pour l’administration), de l’IHEDN et des industriels mécènes de la Chaire : Airbus, Arquus, MBDA, Naval Group, Nexter, Safran et Thales. Il fixe Jade Guiberteau Myriam Sonni Assistante de recherche Chargée de communication les grands objectifs de la Chaire et valide les activités. Le Conseil scientifique, présidé par le LES CHERCHEURS ASSOCIÉS Professeur Christian de Boissieu, veille à la définition et à l’évaluation des activités de la La Chaire est associée à des chercheurs dont les contributions ponctuelles viennent alimenter ses Chaire. travaux. À fin 2021, la Chaire compte parmi son équipe quatre chercheurs associés : Christian de Boissieu Président du Conseil scientifique • Jordan Becker, directeur du Social Sciences Research Lab à l’académie militaire des États- Afin d’atteindre ses objectifs, la Chaire intervient Unis ; ou participe à la création d’enseignements • Paul Hérault, docteur en sciences économiques de l’Université Paris Dauphine ; spécialisés, organise des conférences, des • Maxime Menuet , maître de conférences à l’Université d’Orléans ; webinaires, et produit des travaux de recherche • Friederike Richter, doctorante en Science politique au Centre de recherches politiques de à destination de la communauté scientifique et Sciences Po. du grand public. -2- -3-
LA CHAIRE EN OBJECTIFS DE LA CHAIRE CHIFFRES PRODUIRE & FÉDÉRER & 7 Ans depuis SOUTENIR UNE RECHERCHE UNIVERSITAIRE DIFFUSER LA PENSÉE ÉCONOMIQUE sa création DE RÉFÉRENCE DE DÉFENSE 4 Chercheurs + 4 Chercheurs associés 70+ Publications ÊTRE UNE INTERFACE ENTRE MONDE ACADEMIQUE, 12 Conférences et webinaires DÉCIDEURS PUBLICS ET ACTEURS PRIVÉS -4- -5-
LES CINQ THÉMATIQUES PRINCIPALES R&D ET INNOVATION CONNAISSANCE DANS LE DOMAINE DES ENTREPRISES DE DÉFENSE : DE LA DÉFENSE STRATÉGIES, FORCES ET FRAGILITÉS Le caractère stratégique des entreprises de la BITD apparaît par l’importance du secteur de la défense dans le système national d’innovation. Les entreprises de Le travail d’identification des entreprises de défense et de défense représentent une petite part des entreprises comparaison avec les entreprises civiles a conduit à la publication françaises mais elles réalisent presque le quart de la de différents articles. La BITD rassemble des entreprises qui ont dépense française de R&D (civile et défense) et emploient des particularités fortes. Elles ont des performances élevées en plus de 20 % des effectifs R&D des entreprises. Elles termes de valeur ajoutée, d’exportation ou d’emploi, malgré les déposent également une part importante des brevets difficultés de financement qu’elles subissent. L’analyse de leurs et occupent les premières places dans le classement actionnaires montre que le lien national est fort malgré la présence français des dépôts de brevets. de fonds d’investissement étrangers. MAINTIEN EN CONDITION DÉTERMINANTS ET IMPACTS OPERATIONNELLE (MCO) DE LA DÉPENSE DE DÉFENSE Si le MCO est une activité complexe, la problématique à laquelle doivent faire face l’ensemble des acteurs de Des publications ont été rédigées afin d’évaluer les la défense – acteurs civils représentant l’État, militaires causes et les conséquences macroéconomiques et industriels – n’en est pas moins relativement simple de l’effort de défense. Deux résultats principaux à exposer : les contraintes budgétaires sont fortes, apparaissent : les dépenses de défense sont plus les coûts tendent à augmenter suivant les évolutions sensibles aux contraintes budgétaires que les autres technologiques et/ou le vieillissement des flottes dans un dépenses publiques alors qu’elles génèrent des contexte où les sollicitations opérationnelles sont fortes. retombées économiques positives au travers des Tout l’enjeu consiste alors à trouver comment contenir dépenses d’équipement sur le tissu économique. ou réduire les coûts compte tenu de l’importance de Par ailleurs, des analyses ont été menées sur les ces contraintes budgétaires et opérationnelles. Le MCO exportations d’armes et visent à expliciter leurs apparaît donc comme une thématique de recherche trajectoires historiques ou leurs conséquences en centrale et incontournable dans l’étude des questions de termes de sécurité. défense et sa gestion dépend de dimensions financières, industrielles, technologiques et opérationnelles. -6- -7-
1. CONNAISSANCE L’INTÉGRATION ET LA COOPÉRATION DE DES ENTREPRISES DE DÉFENSE : DÉFENSE EN EUROPE STRATÉGIES, FORCES ET FRAGILITÉS Depuis 2016, les initiatives de coopération en matière de défense Caractéristiques des entreprises françaises de défense se multiplient : ont entre autres vu le jour une stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité, une capacité militaire L’activité de défense pour une entreprise génère des besoins de financement plus importants de planification et de conduite pour les opérations à mandat non qu’une activité civile (investissement en R&D, charges de personnel, financement de son cycle d’ex- exécutif, la Coopération structurée permanente (CSP), l’Initiative ploitation). Elle est plus difficile à financer par des financements traditionnels, les entreprises auto- financent une partie de leurs recherches et les pouvoirs publics interviennent de façon importante. européenne d’intervention (IEI), un Fonds européen de défense et la Direction générale de la Commission européenne en charge Les entreprises de défense affichent de meilleures performances à l’export ou en termes de valeur de l’industrie de défense et de l’espace (DG DEFIS). Ces instru- ajoutée. Elles contribuent ainsi à la fois au solde de la balance commerciale et à l’activité écono- ments, qui visent, dans leur ensemble, à améliorer la compétiti- mique générale (document n°3.2). vité et l’autonomie stratégique de l’UE, montrent que la défense est un enjeu prioritaire depuis ces cinq dernières années, non À partir d’un travail économétrique, nous montrons que les entreprises françaises de défense n’ont seulement dans les États-membres, mais aussi à Bruxelles. pas de profits anormaux par rapport aux autres secteurs, contrairement à ce qu’énonce une partie Nos travaux de recherche sur la coopération s’intéressent prin- de la littérature (document n° 7.2). cipalement à l’émergence des accords inter-gouvernementaux en matière de défense ainsi qu’à leurs bénéfices économiques. L’activité de défense pour une entreprise génère des besoins de Malgré ces efforts, nos travaux montrent que les États eu- financement plus importants qu’une activité civile. ropéens ont tendance à se replier sur leur marché natio- Les entreprises de défense au niveau international nal. De même, la coordination budgétaire reste insuffisante. Avec K. Hartley, nous avons réuni des experts ropéennes étudiées sont aujourd’hui cotées en des principales industries de défense au ni- bourse, et comptent parmi leurs actionnaires veau international afin de décrire et d’analyser des investisseurs institutionnels, demandant la la structure, la conduite et les performances de mise en œuvre d’un mode de gouvernance de RÉSULTATS OBTENUS ces industries depuis la fin de la guerre froide. Les entreprises de défense occupent une place type actionnarial (document n ° 3.4). importante dans le système économique de cer- L’information sur les liens capitalistiques des tains pays, elles ont un impact élevé sur la re- entreprises de défense est difficile à obtenir et cherche et l’innovation et sont pour certaines des précautions dans l’interprétation des résul- Les résultats présentés sont issus de travaux et d’études très interdépendantes. Dans de nombreux pays tats doivent être prises. Néanmoins, le travail ré- empiriques effectués à partir de bases de données indivi- cette industrie a été privatisée, le financement alisé sur les liens capitalistiques entre la Base duelles (informations sur les entreprises de défense) ou par le marché s’est développé et leur place dans Industrielle de Défense (BITD) de l’Union euro- agrégées (information sur les dépenses du Ministère des le système d’innovation a évolué. Chaque pays péenne (UE) et les États-Unis permet de faire Armées, informations en sources publiques issues des rap- possède des spécificités fortes mais la plupart ressortir des conclusions utiles. Au niveau des ports parlementaires, informations issues d’organismes connaissent une restructuration importante de actionnaires des entreprises de défense, il ap- spécialisés comme l’International Institute for Strategic leur industrie (document n° 2.2). paraît tout d’abord que le lien national est fort Studies ou le Stockholm International Peace Research Insti- pour la Suède, l’Espagne et la France, plus réduit tute). Ces travaux ont été réalisés ou finalisés dans le cadre En Europe, les entreprises restructurent leurs pour l’Allemagne et l’Italie et particulièrement de la Chaire. activités et sont de plus en plus tournés vers faible pour le Royaume-Uni. Ensuite, les liens, l’export. Les principaux fournisseurs européens au niveau européen, sont concentrés sur Airbus, Les résultats ont été diffusés dans le cadre de formations, d’équipements de défense font montre d’orien- MBDA et KNDS et sont peu développés sur les de conférences, dans des revues grands publics et publiés tations stratégiques désormais sous-tendues autres entreprises. Enfin, nous constatons des dans des revues scientifiques. par des logiques industrielles et commerciales liens asymétriques avec les États-Unis et une proches de celles des entreprises du secteur ci- présence importante des fonds d’investissement vil. De plus, 75 % du panel des entreprises eu- américains (documents n° 1.2 et 5.2). -8- -9-
résultats de la littérature montre, que pour de Chaînes de sous-traitance Enjeux liés aux transferts nombreux pays, l’impact économique est positif. aéronautique (civil et défense) de technologie (document 2.15). Nous analysons les changements dans le Enfin, des travaux sur l’impact local des dé- Aujourd’hui les États veulent maitriser les processus de production dans le domaine penses de défense ont été menés, notamment technologies de souveraineté, ce qui sup- aéronautique qui s’est traduit par l’appa- sur l’impact de la réorganisation géographique pose d’acquérir les connaissances néces- rition de sous-traitants majeurs (gestion des Armées à partir de la fin des années 2000 saires. En conséquence, les entreprises des stocks, R&D, risque…) mais qui a en- (document n° 5.11). Ces réorganisations n’ont ont adapté leurs offres pour répondre aux trainé une fragilité et un manque de renta- pas été sans conséquences pour les territoires demandes des clients et donc dispenser bilité à court terme pour ceux-ci (document qui les subissaient, de sorte que le ministère une formation. Une évaluation des risques n° 1.1). des Armées a accompagné financièrement de fuite de connaissance associés à la formation dans le cadre des contrats de les zones les plus fragiles (document n° 1.8). transferts de technologie a été réalisée. Contrairement à ce que mettait en avant une Ce travail montre une représentation dif- étude de la Cour des comptes sur le sujet, les ré- férenciée du risque de fuite de connais- sultats suggèrent une forme de cohérence dans sance en fonction des différentes catégo- Impact économique de la dépense l’attribution de la dépense publique à l’échelle ries de formateurs ainsi qu’une confiance départementale (document n° 1.10). En outre, les de défense industries de défense ont également contribué à excessive des dispositifs de contrôle en À partir d’une étude des effets des dépenses mi- compenser les pertes d’emploi liés à la réorga- amont (document n° 1.4). litaires sur l’investissement privé en France, pour nisation des armées, notamment dans certains la période allant de 1980 à 2010, nous montrons territoires particulièrement fragilisés sur le plan que les dépenses militaires évincent l’investisse- socio-économique (document n° 5.11). ment privé, un résultat communément accepté dans la littérature. Cependant en désagrégeant 2. DÉTERMINANTS ET IMPACTS la dépense de défense (fonctionnement et inves- Mesures des impacts économiques et méthode tissement), il apparaît que les dépenses de fonc- DE LA DÉPENSE DE DÉFENSE tionnement évincent l’investissement privé mais Dans le contexte actuel, d’endettement public les dépenses d’équipement le favorisent. important, de contrainte budgétaire et de re- cherche d’efficacité de la dépense publique, Opinion publique et déterminants de la dépense de défense en France En conséquence, il y a une forme de complémen- aggravé encore davantage par la crise sani- tarité entre investissement privé et dépenses taire, les études concernant l’impact écono- Les facteurs économiques jouent un rôle crucial dans l’explication des dépenses militaires fran- d’équipement de défense (document n° 1.18). mique de différentes activités ou projets se çaises (document n° 1.12). La sensibilité aux facteurs stratégiques (mesurés par l’appartenance à En analysant l’impact de la dépense de défense multiplient. Ce sujet touche tous les types de une alliance ou les conflits dans le monde) est également à souligner, même s’ils sont d’une moindre sur l’activité économique générale (PIB), il appa- dépense (industrie automobile, culture, envi- mesure. Nous montrons en outre que les dépenses d’équipement ont une sensibilité plus grande aux raît également que les dépenses d’équipement ronnement, défense…) et l’ensemble des pays contraintes budgétaires que les dépenses de fonctionnement (document n° 5.8). de défense ont un effet positif sur le PIB alors occidentaux. que les dépenses de fonctionnement n’ont pas La DICoD publie des sondages d’opinion sur la défense. Sur cette base, il est possible d’évaluer la d’impact significatif (document n° 6.11) de sorte Pour cette raison, la Chaire (documents n° disposition à payer des français pour la défense et d’en expliciter ses déterminants. Il apparaît que que les dépenses d’équipement sont le vecteur 1.13, 2.15, 5.16 et 6.2) a fait un bilan des mé- les facteurs économiques et stratégiques sont cruciaux (document n° 6.11). principal d’explication de retombées macroéco- thodes disponibles pour mesurer l’impact nomiques positives. Une autre explication tient économique de la défense, en présentant à Par ailleurs, il est possible d’analyser la représentation sociale de la défense et sa relation avec les dans le caractère central de la R&D de défense chaque fois les avantages et limites de ces allocations budgétaires des activités de défense (e.g. opérations extérieures) notamment chez les dans le processus d’innovation et dans les per- méthodes (impact à court terme avec modèles étudiants (document n°4.11). Des résultats obtenus sur une population d’étudiants montrent que la formances des entreprises de défense (docu- Input Output, impact utilisant des données par représentation sociale de la défense se structure autour des notions : « d’armée », de « protection ment 3.17). Le SIPRI a lancé un travail méthodo- branches ou par secteurs, impact mobilisant » et de « sécurité ». Ces notions font directement référence à la finalité des armées (cf. Ordon- logique sur ses données relatives aux dépenses des données individuelles sur les entreprises nance n°59-147, janv. 1959). De plus, dans le cadre d’une éventuelle augmentation du budget de la de défense. Elles ont servi à une analyse sur les ou impact à long terme). Une synthèse des en- défense, les étudiants favoriseraient, en priorité, le poste budgétaire concernant l’innovation de dé- pays de l’UE pour lesquels nous montrons que jeux méthodologiques (accès aux données et fense (ayant des retombées civiles) à défaut de celui des opérations extérieures et de la dissuasion les effets sont différents en fonction de leur ca- construction de modèle théorique) est présen- nucléaire (qui sont, pourtant, au centre de la stratégie de défense de la France selon le Livre blanc pacité à produire ou non des matériels militaires tée dans les documents 2.14, 2.15 et 9.1. de 2013 et la Revue stratégique de 2017). (document n° 1.19). Une synthèse des principaux - 10 - - 11 -
Déterminants des exportations de la France Une grande partie de la littérature s’intéresse aux raisons sous-jacentes des exportations d’armes. Ces dernières ont une origine plurifactorielle puisque des déterminants de nature politique, straté- gique, économique ou industriel ont été identifiés. À ce jour, aucun article n’a été publié sur le cas de la France. L’étude a été menée grâce à une base de données originale construite par l’équipe de la Chaire, couvrant la période de l’Après Guerre froide. En effet, l’analyse repose sur l’utilisation d’une source nationale pour définir les exportations d’armement de la France, i.e. différents rap- ports au Parlement sur les exportations de la France, au lieu de la « source traditionnelle » (la base de données Arms Transfers du SIPRI), mobilisée par la quasi-totalité de de la littérature qu’est le SIPRI. De nombreux résultats ont été présentés sur les déterminants de la décision (la probabilité d’ex- porter ou marge extensive) mais aussi du volume d’exportation de la France (les montants exportés ou marge intensive). Les variables traditionnelles (distance ou PIB par tête) ont un effet attendu sur la décision et le volume d’exportation de la France, i.e. négatif et positif. L’effet des embargos sur la décision d’export est négatif, et en particulier les embargos obligatoires décidés par les Nations Unies. Ces différents résultats complètent la littérature existante et permettent de comprendre les décisions de contrôle des exportations. Les dépenses d’équipement sont le vecteur 3. R&D ET INNOVATION DANS LE DOMAINE principal d’explication de retombées DE LA DÉFENSE macroéconomiques positives. Place importante des Exportations d’armement Dualité technologique l’autonomie stratégique et budgétaire. Plus glo- entreprises de défense Dans le cadre de la conférence annuelle de la balement, les exportations sont un enjeu d’im- dans le système national L’analyse de l’organisation des connaissances au sein Chaire et de la première newsletter (document portance pour les pays qui possèdent une BITD d’innovation de 26 systèmes techniques sur la période 2010-2012 n° 4.1), nous avons analysé le rôle des facteurs (document n° 8.21). Les entreprises françaises de défense à l’échelle mondiale révèle clairement une hiérarchie économiques dans la position française concer- occupent une place importante dans dans leur potentiels duaux. En les classant par ordre nant les exportations d’armement. D’autres travaux ont consisté à évaluer les ré- le système national d’innovation. En décroissant ces technologies concernent notamment centes performances d’exportations d’armes termes d’effectifs elles représentent : les systèmes de communication ; différents types La croissance récente des exportations s’ex- par rapport aux exportations passées. Il apparaît 11,3 % du total des entreprises ayant de capteurs ; l’optique et le traitement de l’image ou plique, en effet, par des facteurs politiques et que la situation observée depuis 2012 n’est pas une activité de R&D mais elles réalisent encore les systèmes de guidage à distance (docu- stratégiques mais aussi économiques, les trois particulièrement exceptionnelle (document n° presque le quart de la dépense interne de ment 2.18). facteurs étant interdépendants. La BITD est 5.19). R&D (21,5 % de la DIRD) de l’ensemble considérée comme stratégique et structurante des entreprises en 2009-2010. Elles em- Plus intéressant, cette étude nous informe sur les pour l’économie française. Les entreprises de Une autre analyse consiste à évaluer le rôle des ploient 22 % des effectifs des chercheurs caractéristiques de cette dualité. Porte-t-elle da- défense représentent une part importante de exportations d’armes sur la stabilité des pays employés dans les entreprises fran- vantage sur le système dans son ensemble ou sur l’investissement public, de la recherche ou des clients de la France. L’hypothèse est que la stabi- çaises. Elles réalisent en proportion plus certains éléments en particulier ? Permet-elle d’ex- exportations. lité peut être mesurée par l’intensité des conflits de recherche fondamentale et de déve- plorer une plus grande variété de pistes techniques civils. Les résultats suggèrent que les exporta- loppement que les entreprises civiles. ou, au contraire, d’intensifier l’exploitation d’un para- Elles emploient un nombre conséquent de per- tions françaises n’ont pas d’influence déstabili- digme technologique dominant ? Reproduire ce type sonnels qualifiés et affichent de bonnes perfor- satrice sur l’intensité des conflits au contraire Enfin, elles jouent un rôle conséquent d’analyse sur plusieurs années ferait apparaître des mances en termes de valeur ajoutée et d’expor- des exportations d’armes d’autres pays. Deux dans la structuration des activités na- tendances qui serviraient non seulement aux indus- tation. Les exportations permettent de desserrer analyses complémentaires permettent d’expli- tionales de R&D et dans la redistribution triels de la défense pour la définition de la stratégie certaines contraintes économiques (augmenta- quer ce résultat : la sélection des clients par la des financements publics (plus de 13 % de dualisation, mais aussi à la Direction Générale de tion de coûts, baisse de la demande nationale sur France est sérieuse et les armes exportées ap- de leur recherche externalisée est finan- l’Armement ou à l’Agence de l’Innovation de Défense longue période, baisse des financements directs paraissent comme plutôt défensives (document cée par fonds publics (documents n° 3.8 pour l’orientation de leurs financements duaux. à la R&D défense…) et d’assurer ainsi à la fois n° 3.10). et 6.3). - 12 - - 13 -
Les données de brevets pour étudier la production de connaissances et L’innovation, outil essentiel de la stratégie des entreprises de défense l’innovation L’innovation est un élément déterminant de cherche entre plusieurs pays ou entreprises, à l’autonomie stratégique de la nation et de coopérer avec des laboratoires de recherche L’utilisation des données de brevets est largement diffusée en économie de l’innovation. Elles l’attractivité de ses produits pour une entre- externes ou à pratiquer l’innovation ouverte contiennent des informations riches sur l’identité du déposant, sa localisation ou encore sur les prise. Elle nécessite des investissements im- (document n° 2.5). En plus des financements connaissances contenues dans l’innovation et la manière dont elles sont produites. Ces informa- portants en recherche. Plusieurs stratégies publics directs, elles ont recours à différentes tions sont validées par des offices indépendants et qualifient l’activité d’innovation technologique sont alors mises en place par les entreprises options de financement notamment l’autofi- des entreprises (document 1.21). pour réduire (partager) ces coûts ou pour nancement soutenu par des dispositifs de profiter d’économie d’échelle en augmentant type CIR ou les financements provenant du Pour la dualité technologique, ces données sont d’autant plus intéressantes que la question de la les applications et le volume de production. marché export (document n° 3.3). mise au secret pour des raisons militaires ne représente qu’une partie des stratégies de brevetage : le secret peut rester une stratégie de protection de la propriété intellectuelle comme dans tout Les entreprises de défense cherchent à aug- autre domaine d’activité. En effet, si pour des raisons militaires ou de souveraineté, une technologie menter leurs coopérations au niveau de la re- est tenue secrète, il n’y a aucune raison d’étudier son potentiel dual puisque cette technologie à vocation à rester secrète. L’application d’outils exploitant les informations contenues dans les bre- vets apparaît donc tout aussi pertinente pour étudier les flux de connaissances entre industrie de défense et industrie civile qu’elle l’est pour étudier ces flux entre n’importe quelles industries ou zones géographiques par exemple. Impact de la recherche de défense sur l’économie A partir de données américaines, l’innova- tion de défense (mesurée par les brevets) serait plus généraliste (brevets cités par plus de classes technologiques) et aurait plus d’impact économique. Des discussions (entre chercheurs, repré- sentants du ministère des Armées et in- dustriels) sur l’identification des brevets de défense en France et une présentation des nouvelles méthodes d’analyse des bre- vets ont eu lieu afin de tenter de répliquer cette étude sur données françaises. Les travaux réalisés sur la Californie montrent Adaptation des entreprises de défense face aux évolutions que la structure du système d’innovation Place des budgets publics de R&D du système national d’innovation de défense, les relations entre agents, la Cette étude porte sur l’évolution des budgets pu- politique de gestion de la propriété intel- blics de R&D, en se focalisant tout particulière- Nous avons analysé les évolutions du système Ces évolutions ont modifié le système d’innova- lectuelle sont des facteurs presque aussi ment sur la nature des impulsions budgétaires. national d’innovation et leurs conséquences tion de défense mais n’ont pas remis en cause importants que le volume de financement Il s’agit alors de discuter de l’arbitrage entre pour les entreprises de défense. Ces dernières le rôle clé des entreprises de défense dans le défense de la R&D pour expliquer le déve- choix de court terme, c’est-à-dire s’équiper pour ont dû faire face à des changements importants système national d’innovation. Que ce soit au loppement de la Silicon Valley (conférence maintenir une capacité opérationnelle forte et du système de science et technologie (augmen- niveau des inputs (investissement en R&D) ou organisée en 2015 sur la R&D à l’université choix de long terme, c’est-à-dire préserver une tation de la R&D civile, rôle accru des entre- des outputs (innovation, dépôts de brevets), les de Bordeaux). avance technologique. prises, place nouvelle des brevets…), du système entreprises de défense occupent toujours une de financement de la recherche (développement place très importante (document n° 3.2). Elles se Les résultats montrent que les dépenses de R&D des instruments de financement, baisse des fi- sont adaptées en accélérant le développement ne sont pas un budget privilégié au sein du bud- nancements directs, augmentation du CIR…) et des technologies duales et en s’ouvrant en col- get de la défense mais sont soumis à moins de plus généralement de leur environnement légis- laborant avec le domaine civil et des entreprises fluctuations que les dépenses d’équipement (do- latif et institutionnel. étrangères (documents n° 2.1 et 3.8). cuments n° 2.17 et 5.10). - 14 - - 15 -
Organisation géographique du MCO 4. MAINTIEN EN CONDITION La maîtrise des coûts du MCO passe, entre autres forces centrifuges poussant à la dispersion des OPERATIONNELLE (MCO) choses, par une rationalisation de la gestion du MCO. C’est dans ce but qu’ont été créées la SIM- activités (coût de transport et coûts stratégiques liés à la nature même des activités de défense) MAD (Structure intégrée de maintien en condi- (documents n°2.8, 3.9 et 5.7). tion opérationnelle des matériels aéronautiques Le maintien en condition opérationnelle (MCO) Si le MCO est une activité complexe, la problé- du ministère de la défense) (Devenue la Direction Cette grille de lecture théorique est un outil géné- regroupe l’ensemble des moyens (humains, matique à laquelle doivent faire face l’ensemble de la Maintenance Aéronautique - DMAé en 2018) ral et puissant pour comprendre les dynamiques techniques et financiers), des prestations et des acteurs de la défense – acteurs civils repré- pour les matériels aéronautiques, la Structure en œuvre dans le suivi des réorganisations du processus qui permettent à un équipement de sentant l’État, militaires et industriels – n’en est intégrée du maintien en condition opérationnelle MCO (processus de concentration des activités, défense (véhicule blindé, navire, aéronef, etc.) pas moins relativement simple à exposer : les des matériels terrestres (SIMMT) pour les ma- insertion des activités de MCO dans leur environ- durant toute sa durée d’utilisation jusqu’à la pré- contraintes budgétaires sont fortes, les coûts tériels terrestres et le SSF pour les matériels nement régional, etc.). Le travail réalisé montre paration au retrait du service, de rester apte à tendent à augmenter suivant les évolutions tech- navals. Ces restructurations administratives que si les forces centripètes sont bien à l’œuvre, l’emploi pour répondre au besoin de disponibi- nologiques et/ou le vieillissement des flottes entrainent des réorganisations géographiques les forces centrifuges demeurent fortes. Par lité et d’activité des armées, directions et ser- dans un contexte où les sollicitations opération- de la fonction MCO. Ces dernières peuvent être ailleurs, de façon plus générale le poids de l’his- vices (opérations et préparation opérationnelle) nelles sont – et resteront probablement – fortes. analysées au travers d’un jeux de forces entre toire et les facteurs politiques jouent aussi un conformément aux dispositions des contrats Tout l’enjeu consiste alors à trouver des solutions d’une part, des forces centripètes qui poussent rôle majeur dans les décisions de localisation opérationnels et organiques. Pleinement ins- afin de contenir ou réduire les coûts compte tenu à la concentration (économies d’échelle, éco- des activités de défense (documents n° 1.8, 1.10, crit dans la doctrine officielle (voir par exemple de l’importance de ces contraintes budgétaires nomies d’agglomération), et d’autres part, des 3.18, 5.11, 5.12). les Livres blancs de 2008 et de 2013 ou la Revue et opérationnelles (document n° 4.6). Le MCO Stratégique de 2017), le MCO est aujourd’hui une apparaît donc comme une thématique de re- fonction industrielle stratégique pour la Nation cherche centrale et incontournable dans l’étude dont l’objectif est bien de créer et recréer de fa- des questions de défense et sa gestion dépend çon cyclique du potentiel et des capacités mili- de dimensions financières, industrielles, techno- taires (document n° 4.6). logiques et opérationnelles. Les contraintes budgétaires sont fortes, les coûts tendent à augmenter suivant les évolutions technologiques et/ ou le vieillissement des flottes dans un contexte où les sollicitations opérationnelles sont – et resteront probablement – fortes. Evolution des coûts du MCO D’un point de vue budgétaire, les crédits d’Entretien Programmé des Matériels (EPM) (tous matériels confondus) représentaient environ 12 % du budget de la défense en France en 2021 et un peu plus de 20% du budget alloué aux équipements. En comptabilisant également les dépenses concernant la main d’œuvre et les infrastructures la part du budget de la défense allouée au MCO dépasse pro- bablement les 20 %. Sur le plan microéconomique, les coûts de MCO peuvent représenter de 35 % à 70 % du coût global de possession d’un équipement de défense sur l’ensemble de son cycle de vie Engagement dans les conflits et conséquences sur le MCO (document n° 5.7). La littérature montre que la part du MCO dans le coût global de possession a eu Le MCO est une activité indispensable à la re- les engagements de la France en Opex ont for- tendance à augmenter ces 20 dernières années (plus ou moins fortement selon les matériels). constitution du potentiel capacitaire militaire tement augmenté depuis le début des années d’un pays, notamment lorsque ce dernier est 2000 (document n° 5.9). L’allocation prioritaire Il est possible de regrouper les facteurs explicatifs de cette augmentation des coûts en trois catégo- des ressources (financières, matérielles, hu- amené à considérablement solliciter ses maté- ries (document n° 2.8) : les facteurs liés au cycle de vie des matériels (vieillissement, obsolescences maines) aux Opex entraîne un rationnement en riels lors d’engagements militaires et non-mi- et sollicitations des matériels en opération), les facteurs générationnels (évolution de la technologie métropole et des immobilisations de matériels litaires (e.g. lors de la lutte contre le corona- militaire, ruptures technologiques) et les facteurs institutionnels et historiques (réformes, évolu- liées à des reports de réparations (faute de main virus avec la mobilisation d’équipements pour le tion du cadre réglementaire, structures de marché). d’œuvre ou en raison du report de commandes transport de blessés et de matériel médical). Or - 16 - - 17 -
de pièces détachées). des interventions militaires dans une perspective industrielle, opérationnelle mais aussi budgétaire Par effet de chaîne, cela entraîne des répercus- qui est posée pour assurer la crédibilité des fu- 5. L’INTÉGRATION ET LA COOPÉRATION DE sions sur la formation et l’entraînement des tures capacités d’intervention des armées. Un troupes et donc le potentiel opérationnel des ar- travail théorique permet de mettre en évidence et DÉFENSE EN EUROPE mées. À moyen - long terme, la « qualité » du ca- de formaliser les arbitrages intertemporels entre pital militaire (via la baisse de la disponibilité) et régénération des capacités et emploi optimal des du travail militaire (via la formation) se dégradent forces ; ce travail est illustré par des cas d’études La mise à l’agenda de la coopération de défense en Europe (document n° 1.9, 2.10, 4.8, 6.5). récents en Allemagne, États-Unis, France, Italie, Pays-Bas et Royaume-Uni notamment (document Aucune coopération de défense n’est naturelle et montrent la diversification de celles-ci depuis In fine, c’est bien la question d’une soutenabilité n° 6.6). ne peut donc être détachée du contexte politique les années 1990 (document n°4.14). et économique à l’intérieur duquel elle s’inscrit. Innovation technologique dans le MCO On peut coopérer pour des raisons stratégiques (e.g. pour maximiser la sécurité collective), opé- La coopération européenne rationnelles (e.g. pour augmenter l’interopérabi- De nombreuses initiatives et expérimentations s’appuyant sur les technologies à la base de la nu- dans le MCO mérisation des chaînes de valeur ont été lancées, ou sont en cours de déploiement, dans l’objectif lité des armées), politiques (e.g. pour influencer d’améliorer significativement la façon de réaliser les tâches de MCO. Ces technologies recouvrent la politique de défense d’un autre État membre un spectre très large : maintenance prédictive et big data, utilisation de robots ou de drones pour ou encore d’un État tiers) et économiques (e.g. Dans un contexte où les coûts d’ac- des tâches d’inspection ou de maintenance, fabrication et réparation additives. Toutes ces tech- pour bénéficier des économies d’échelle, no- quisition et de maintenance tendent nologies ont en commun d’être l’origine de fortes évolutions des processus de production et des tamment pour le volet industriel de la politique à augmenter, avec des budgets qui modèles d’affaires afférents, qui se fédèrent autour de concepts tels l’ « Industrie 4.0 » ou l’ « Usine de défense). Ce qui importe est que chaque État restent fortement contraints, la taille du futur ». coopérant y trouve un intérêt et un sens (docu- des flottes d’équipements militaires ment 5.13). (aéronefs, blindés, navires) tend à di- Une étude a été conduite pour caractériser l’impact de ces technologies sur l’organisation et la réali- minuer dans la plupart des pays eu- sation du MCO (documents n° 2.11 et 3.27). En particulier, il s’est agi d’identifier l’état des pratiques L’objectif principal de nos travaux sur la mise ropéens. La coopération dans le MCO des acteurs du MCO, qu’ils soient étatiques ou industriels, vis-à-vis de ces nouvelles technologies. à l’agenda de la coopération en matière de dé- est une possibilité offerte aux diffé- Les résultats du travail de terrain montrent que dans l’ensemble, les quatre grappes de technologies fense est de mieux comprendre comment et rents pays européens pour conte- identifiées présentent un potentiel en termes d’amélioration du MCO mais ce potentiel n’est pas sous quel angle cet enjeu émerge en Europe. nir la hausse des coûts (économies perçu de la même manière selon les milieux, les acteurs interrogés et les technologies identifiées. Nos recherches montrent que la coopération d’échelle, effets de spécialisation) Ces technologies demeurent au cœur des pratiques des acteurs publics et privés dans une logique européenne de défense a toujours été un enjeu tout en contribuant à la construc- de restructuration et de modernisation du MCO et plus largement de numérisation des chaines de volatile (document n°3.29). Cela veut dire qu’il y tion d‘une Europe de la défense dans valeur. a eu des périodes d’enthousiasme – qui ont, par une approche bottom-up (document exemple, permis de mettre en place les institu- n°1.7). tions nécessaires à la coopération et d’opéra- tionnaliser celles-ci – et des périodes de stabi- La coopération dans le soutien est lité, avec peu ou pas de changements, pendant aujourd’hui soutenue et encouragée lesquelles la défense n’était pas particulière- par l’Agence Européenne de Défense ment prioritaire au niveau européen. et l’OTAN. Des initiatives existent et se développent, notamment dans le Dans le cas de la France, nos travaux montrent domaine naval ou encore des héli- que la coopération est devenue une réalité pour coptères (document n° 1.5). Cepen- les armées françaises depuis la fin de la Guerre dant, elle demeure encore limitée en froide. La France a en effet commencé à dévelop- raison d’une hétérogénéité dans les per une approche « flexilatérale » à sa politique préférences des nations, notamment de défense, contribuant à de nombreux disposi- pour des activités souveraines (docu- tifs avec un ou plusieurs partenaires. Certains ments n°1.6 et 1.7). reposent sur des institutions dédiées – au sein ou en dehors d’un cadre multilatéral – alors que d’autres sont plus informels, voire plus ponc- tuels. Nos travaux dressent ici un panorama des coopérations de défense au niveau étatique, et - 18 - - 19 -
contraints, les coûts de développement Les préférences d’Etat en matière Les budgets de défense au sein de l’UE et d’utilisation sont orientés à la hausse d’équipements de défense : les avions (à un rythme supérieur à l’inflation – de combat en Europe depuis la fin de la En lien avec nos travaux sur la mise à l’agenda des coopérations de défense en Europe, se pose donc « Loi d’Augustine ») et les flottes sont sou- Guerre froide également la question de leurs bénéfices économiques. vent peu homogènes, ce qui traduit une rationalisation faible. Dans ce contexte, Compte tenu de la multiplicité des sources possibles, faire des comparaisons internationales est une une étude a été réalisée par la Chaire tâche difficile : problèmes de périmètre (dans le temps et entre pays), difficultés à avoir des données sur le cas des avions de combat, au sein fiables, choix des indicateurs pertinents, etc. de l’UE-28, à laquelle ont été rajoutés la Norvège et la Suisse (cf. infographe ci- Par ailleurs, il faut disposer d’une grille de lecture permettant de comprendre les grandes évolutions contre). pour mettre en évidence les menaces et les zones de tension (documents n° 5.15 et 5.17). En outre, le concept de « budget de défense » est défini dans une encyclopédie (document n° 2.12). Une base de données originale, issue des Military Balance (International Institute Sur la base de données internationales, un travail de recherche (document n°1.11) a été réalisé for Strategic Studies - IISS), permet de afin de mesurer la nature des déséquilibres budgétaires au sein de l’UE sous l’hypothèse que cette quantifier les changements ou les conti- dernière serait une alliance. Les résultats montrent de fortes différences dans les contributions des nuités à travers des indicateurs comme pays européens dans de multiples dimensions (budget total, budget d’équipement, budget de R&D, la taille des flottes, leur diversité, leur budget de personnel, troupes déployés). Cela suggère que les politiques de défense au sein des pays âge moyen ou l’origine du pays construc- de l’UE ne sont pas encore intégrées. teur (document 5.14). Le modèle écono- métrique vise à estimer la part allouée Enfin, une analyse méthodologique sur l’usage des dépenses de défense pour mesurer la puissance par chaque État à l’origine du matériel et la sécurité a été proposée afin de montrer qu’elles sont utiles mais insuffisantes pour comprendre (construction nationale, en coopération globalement ces phénomènes (document n° 2.13). européenne, américain ou soviétique) en fonction de caractéristiques liées à la flotte, aux conditions économiques et à l’environnement stratégique. Trois résultats principaux émergent. Pre- mièrement, des appareils plus jeunes sont, en moyenne, associés à une part plus élevée d’appareils produits sur une base industrielle nationale ou en coopé- ration. Deuxièmement, l’existence d’une base industrielle et technologique de dé- fense (BITD) nationale est associée à une part plus importante d’avions produits sur une base nationale. Troisièmement, les effets d’apprentissage et le poids de l’histoire demeurent des déterminants majeurs. Le nombre d’années d’apparte- nance à l’Union européenne est associé à une part plus élevée d’appareils produits en coopération. Un nombre important de militaires américains présents sur le sol national d’un pays européen est associé à une part plus importante d’appareils Processus d’acquisition en Europe américains dans le parc. Le fait d’être un pays autrefois membre du pacte de Var- Les États européens sont soumis à de nom- leur parc d’équipements de défense : les sovie est associé à une part plus élevée breuses contraintes quant à la gestion de budgets d’acquisition et de maintenance sont d’avions d’origine russe. - 20 - - 21 -
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