CHOPIN FESTIVAL GENÈVE du 4 11 octobre 2020 - PROGRAMME

 
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CHOPIN FESTIVAL GENÈVE du 4 11 octobre 2020 - PROGRAMME
CHOPIN         FESTIVAL
          GENÈVE du 4 > 11 octobre 2020

                        PROGRAMME
N.lehr

                        Société Frédéric Chopin Genève
CHOPIN FESTIVAL GENÈVE du 4 11 octobre 2020 - PROGRAMME
Great teams
for great challenges!

  olympicbankingsystem.com
CHOPIN FESTIVAL GENÈVE du 4 11 octobre 2020 - PROGRAMME
Message de la Présidente

C    hers Membres et Amis de la Société Frédéric Chopin,
     Cher Public,
Actuellement, nous vivons une période bien étrange. Qui pouvait imaginer un pa-
reil scénario ? Seuls les scénaristes de film de fiction … et pourtant. La crise liée au
Covid-19 est bien arrivée et nous affecte tous depuis plusieurs mois !
La situation sanitaire nous a obligé à annuler notre traditionnel Concert du Prin-
temps à Collonge-Bellerive ouvrant la nouvelle saison musicale mais l’automne est
revenu et le temps du Festival Chopin aussi !
C’est donc avec enthousiasme et un immense plaisir que je vous souhaite la bien-
venue.
Pour cette édition 2020, les concerts se dérouleront sans entracte et sans récep-
tion. Les mesures d’organisation demandent un travail considérable mais restent
néanmoins nécessaires et nous espérons qu’elles permettront à tous de profiter
des concerts qui nous manquent aujourd’hui particulièrement.
La programmation de la 23ème édition s’annonce magnifique. Le Festival Chopin
s’ouvre ce soir avec François Dumont, pianiste de grande renommée que vous
avez tant apprécié l’an passé et qui nous a fait l’honneur, cette fois encore, d’être
parmi nous avec un programme très original. Parmi les Nocturnes, Polonaises et
Mazurkas, François accompagnera une sublime soprano, Helen Kearns dans les
« Chants polonais », et par la suite il sera rejoint par le Quintette Ephémère pour
interpréter la magnifique « Fantaisie sur des airs polonais ».
Du 5 au 7 octobre, François Dumont dirigera la Chopin Masterclass dans la Salle
de récital de l’Institut Jaques-Dalcroze. Vous trouverez le programme détaillé dans
la brochure. L’entrée est libre, mais venez masqués !
Mardi 6 octobre dans la Salle Willy-Buard de la Mairie de Collonge-Bellerive, nous
apprécierons Jansen Ryser, jeune talent suisse, déjà bien présent sur la scène
internationale.
Vendredi 9 octobre, Alberto Nosè, pianiste italien, lauréat du Concours Chopin de
Varsovie en 2000 et fidèle au Festival Chopin depuis de nombreuses années, nous
proposera un récital de piano solo dans la Salle des Nations du majestueux et his-
torique Hôtel des Bergues.
Le Festival Chopin se clôturera le Dimanche 11 octobre au Studio Ernest-Ansermet.
Christian Chamorel, pianiste suisse, vaudois, qui nous a plus qu’enchanté au
Concert du Printemps 2019 sera rejoint au violoncelle par Estelle Revaz puis ce
sera au tour de la violoniste Olivia Jacobson de rejoindre ces deux musiciens pour
former un trio inédit pour interpréter et clore le Festival sur les notes du grand
compositeur polonais.
Je ne doute pas que notre programmation sera à votre goût et il ne me reste plus
qu’à vous remercier, Chers Membres et Amis, Cher Public, de votre fidélité.
Vive la Musique malgré le Covid-19 !
                                                         Aldona Budrewicz-Jacobson

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CHOPIN FESTIVAL GENÈVE du 4 11 octobre 2020 - PROGRAMME
Chopin © Hari Karimi - 3d
CHOPIN FESTIVAL GENÈVE du 4 11 octobre 2020 - PROGRAMME
PROGRAMME
              TITRE 2020
          Dimanche 4 octobre à 17h
           CONCERT D’OUVERTURE
        Studio Ernest-Ansermet, Genève

          FRANÇOIS DUMONT piano
           HELEN KEARNS soprano

          QUINTETTE EPHEMERE
         OLIVIA JACOBSON violon
        ELSA-CAMILLE SAPIN violon
       GIUSEPPE RUSSO ROSSI alto
     FLORESTAN DARBELLAY violoncelle
       MASSIMO PINCA contrebasse
                        *
            Mardi 6 octobre à 20h
     Salle Willy Buard, Collonge – Bellerive
               RECITAL DE PIANO
                JANSEN RYSER
                         *
                5, 6 et 7 octobre
            CHOPIN MASTERCLASS
Institut Jaques-Dalcroze, Salle de récital, Genève
            Mercredi 7 octobre à 19h
          CONCERT DES PARTICIPANTS
                       *
           Vendredi 9 octobre à 20h
 Salle des Nations, Hôtel des Bergues, Genève
              RECITAL DE PIANO
                ALBERTO NOSÈ
                       *
          Dimanche 11 octobre à 17h
            CONCERT DE CLÔTURE
        Studio Ernest-Ansermet, Genève

        CHRISTIAN CHAMOREL piano
         OLIVIA JACOBSON violon
         ESTELLE REVAZ violoncelle
                      ***
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CHOPIN FESTIVAL GENÈVE du 4 11 octobre 2020 - PROGRAMME
Concert d’Ouverture

             Dimanche 4 octobre à 17h
              Studio Ernest Ansermet

             FRANÇOIS DUMONT piano
              HELEN KEARNS soprano

             QUINTETTE EPHEMERE
            OLIVIA JACOBSON violon
           ELSA-CAMILLE SAPIN violon
          GIUSEPPE RUSSO ROSSI alto
        FLORESTAN DARBELLAY violoncelle
          MASSIMO PINCA contrebasse

                   PROGRAMME

                FRYDERYK CHOPIN
                   (1810 – 1849)

      Nocturne en fa dièse mineur op. 48 N°2
       Polonaise en fa dièse mineur op. 44

                  Trois Chants op. 74
          « Smutna rzeka » – Un triste fleuve
       « Moja pieszczotka » – Ma douce Chérie
     « Piosnka litewska » – Chanson lithuanienne

        Barcarolle en Fa dièse majeur op. 60
          Deux Mazurka op. 63 N°2 et N°3

    Grande Fantaisie sur des airs polonais op. 13
            avec le Quintette Ephémère

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François DUMONT piano

François Dumont est lauréat des plus grands concours internationaux : Fryderyk
Chopin de Varsovie en 2010, Reine-Elisabeth en 2007, Clara Haskil et Piano Mas-
ters de Monte-Carlo. Il a été nominé aux Victoires de la musique dans la catégorie
« soliste instrumental » et a reçu le Prix de la Révélation de la Critique Musicale
Française.

François Dumont se produit en récital au festival Piano aux Jacobins à Toulouse, à la
Roque d’Anthéron, au Festival Chopin à Paris et à Nohant, au Festival Radio-France
Montpellier, au Festival « Chopin and his Europe » à Varsovie, aux Folles Journées
de Nantes…

Sa discographie en soliste comprend l’intégrale des Sonates de Mozart chez Ani-
ma Records, deux albums Bach chez Artalinna, un album Wagner / Liszt chez Piano
Classics, un double album « live » du Concours Chopin et l’intégrale de l’œuvre
pour piano de Maurice Ravel chez Piano Classics, ainsi que les deux concertos du
même compositeur avec l’Orchestre National de Lyon sous la direction de Leonard
Slatkin pour Naxos.

L’enregistrement de l’intégral des Nocturnes de Chopin lui a valu les éloges du
public et de la critique.

www.francoisdumont.com

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Helen KEARNS soprano

Helen Kearns, soprano irlandaise, mène aujourd’hui une carrière internationale qui
la conduit à alterner, avec succès, la scène lyrique, les récitals et les concerts avec
orchestre.
Elle s’est produite avec London Chamber Orchestra, l’Orchestre de chambre de
Wallonie, l’Orchestre National de Belgique, l’Orchestre National du Luxembourg,
l’Orchestre Philharmonique de Marseille, l’Orchestre Symphonique de Bretagne,
l’Orchestre Philharmonique de Cracovie, la Sinfonia Varsovia, le RTE National Sym-
phony Orchestra de Dublin.
On a pu l’entendre aussi à Paris, à Nohant, aux festivals de Menton, de Pornic ou
des Musiques au pays de Pierre Loti ; à Budapest, Bergen, Pise, Sienne, Milan,
Berlin, Cologne, Cracovie, au Japon comme au Brésil.
Helen Kearns a fait ses études musicales à la Royal Irish Academy of Music de
Dublin, dans sa ville natale. Elle a remporté tous les principaux concours d’Irlande,
notamment sept Feis Ceoil, mais aussi le Premier Prix des Belfast Classical Bur-
saries. A Vienne, elle gagne le Premier Prix du Concours International de Chant
Klassik-Mania ainsi que le Prix spécial du jury du Concours de Marmande.

Sa voix riche, puissante, aux couleurs infinies, d’une souplesse et d’une délica-
tesse rares, lui permet d’aborder un répertoire particulièrement large, des cantates
de J. S. Bach aux compositeurs contemporains.

Helen Kearns forme, depuis 2002, avec François Dumont un duo particulièrement
remarqué pour sa musicalité.
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Olivia JACOBSON violon

Violoniste genevoise d’origine polonaise, Olivia débute le violon à l’âge de quatre
ans et étudie auprès de grands maîtres du violon tels que Tibor Varga, Raphael
Oleg ou Francesco de Angelis. Elle bénéficie des précieux conseils de Latica
Honda-Rosenberg, Mi-Kyung Lee, Valery Gradow et Igor Oïstrakh.

Olivia s’est produite en tant que soliste en Suisse avec l’Orchestre de Chambre
de Lausanne, l’Orchestre Romand des Jeunes Professionnels, et à l’étranger avec
la Philharmonie de Chambre de Pologne Sopot, l’Orchestre Philharmonique de
Szczecin, l’Orchestre Symphonique de Torun, la Philharmonie d’Opole, et l’Orchestre
Virtuosi de Lvov en Ukraine sous la direction de chefs d’orchestre tels que Philippe
Béran, Guillaume Berney, Tomasz Wojciechowski, Serhiy Burko, Jesùs Medina,
Miroslaw Jacek Blaszczyk, Wojciech Rajski.
Passionnée par la musique de chambre, elle se produit régulièrement en duo
violon-piano et en différentes formations.
En 2017, elle fonde l’ensemble Ephémère, ensemble de musique de chambre à
géométrie variable avec lequel elle joue régulièrement sur les scènes suisses. En
2019, Olivia crée l’association musicale Les Archets du Léman qui débutera sa
première saison musicale en 2021.

Actuellement, Olivia enseigne le violon au Conservatoire de Musique de Terre-
Sainte et Environs ainsi qu’à l’Ecole de Musique de Pully tout en poursuivant paral-
lèlement sa carrière de concertiste.
www.oliviajacobson.com
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Elsa-Camille SAPIN violon

Née à Paris, Elsa-Camille commence le violon à l’âge de 8 ans. En 2010 elle intègre
la Haute école de Musique de Genève. Elle a travaillé avec des professeurs tel que
Florin Szigeti, Patrick Genet, Klaidi Sahatci, Alexis Cardenas et Sarah Nemtanu.
Elsa-Camille obtient en 2013 son Bachelor, en 2016 un Master Concert puis en 2018
un Master en Pédagogie Instrumentale dans la classe de Sasha Rozhdestvensky.
Avec l’orchestre de la « HEM » elle a eu l’occasion de jouer sous la direction de
grands chefs d’orchestre tel que : Jesus Lopez-Cobos, Michel Corboz, Nader Ab-
bassi, Thierry Fischer et également de bénéficier de cours de quatuor avec Gabor
Takacs-Nagy.

Passionnée par l’orchestre elle participe à plusieurs Académies d’Orchestre de
jeunes tel que l’académie « Musique en Ré » en France, « Animato Academy » en
Autriche et également le « Davos Festival » en Suisse.

En 2016 elle est sélectionnée pour jouer avec le Gustav Mahler Jugendorches-
ter sous la direction notamment de Phillipe Jordan, David Afkham et Christoph
Eschenbach. Elle participe la même année à la Mahler Academy sous la direction
de Mathias Pintscher.

L’année suivante elle devient membre de « l’United Strings Of Europe », « l’Or-
chestre Romand des Jeunes Professionels » et de « l’European Philharmonic of
Switzerland » sous la direction notamment de Gergely Madaras, Lorenzo Viotti,
Charles Dutoit et John Axelrod.
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Giuseppe RUSSO ROSSI alto

A « His command of the viola is really exceptional and the warmth and engagement
of his interpretation are absolutely captivating ... he is an accomplished, extremely
talented, interesting musician » (Bruno Giuranna).

« Giuseppe Russo Rossi è un musicista completo, possiede una musicalità pura,
una technica brillantissima et inappuntabile ed un suono caldo potente ed affasci-
nante » (Salvatore Accardo).

A 17 ans, Giuseppe Russo Rossi obtient des diplômes de violon et d’alto avec les
plus hautes notes, félicitations du jury et mention auprès du Conservatoire de Bari,
de la Hochschule der Künste de Berne et de l’Académie Sainte-Cécile de Rome,
où il reçoit également le Prix Sinopoli des mains du Président de la République
Italienne Giorgio Napolitano.

Il remporte de nombreux concours, notamment le Concours d’alto du Teatro alla
Scala de Milan. Il a collaboré en tant que premier alto avec l’Orchestra da Camera
Italiana de Salvatore Accardo et avec les Cameristi della Scala. Il a donné des réci-
tals et concerts avec orchestre en Italie, Tchéquie, Irlande, au Japon, en Chine et
aux Etats-Unis.

Fréquemment il joue en concert de musique de chambre avec Salvatore Accar-
do, Bruno Giuranna, Rocco Filippini, Franco Petracchi, Antonio Meneses, Simonide
Braconi, Quartetto di Cremona.
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Florestan DARBELLAY violoncelle

Florestan Darbellay a commencé le violoncelle avec son grand-père, François Cour-
voisier, avant de rejoindre la classe de Denis Guy au Conservatoire de Genève. En
septembre 2004, il entre dans la classe de Marc Jaermann à la Haute Ecole de
musique de Lausanne, où il obtient son diplôme d’enseignement avec les Félicita-
tions du jury.

Par la suite, il suit les cours de Roel Dieltiens à la Haute Ecole de Musique de Zurich
et obtient son « Master in art of Music » en juin 2010. Depuis plusieurs années, il
bénéficie des conseils de Nicolas Hartmann. Durant l’année 2015-2016, il suit la
formation postgrade du Conservatoire du Liceu à Barcelone, dans la classe de Lluis
Claret. Au cours de divers masterclasses, il travaille avec François Guye, Jeroen
Reuling, Marcio Carneiro et Roel Dieltiens.

Passionné par la musique de chambre, il a été membre durant plusieurs années
du Quatuor Boreas et du trio Digit Ludi. En 2014, il est co-fondateur de l’ensemble
Fecimeo. Depuis plusieurs années, il joue le répertoire baroque et classique sur
instruments d’époque. Parallèlement à sa vie de musicien classique, Florestan
s’intéresse aussi à la chanson française, collaborant notamment avec le chanteur
romand Tomas Grand avec lequel il se produit dans divers saisons de concert ou
festival : Voix de fête à Genève, les Anglofolies à Lausanne, les Francomanias à
Bulle, etc.

www.florestandarbellay.wixsite.com/florestandarbellay
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Massimo PINCA contrebasse

Homme et musicien curieux, le contrebassiste Massimo Pinca est actif sur la
scène internationale depuis 1998, en traversant les répertoires de la musique ba-
roque, classique, contemporaine, jazz, folk, rock. Sa multiforme activité l’a amené
à se produire sur les scènes les plus disparates, allant des plus reculés bistrots des
Pouilles, sa région d’origine, à des salles telles que la Philharmonie de Berlin, le
Town Hall de New York ou le Dom Musiki de Moscou.

Passionné par l’histoire de son instrument, il joue du violone en sol, en ré, du
violone viennois, de la basse électrique, afin de s’adapter au mieux au contexte
musical, tout en restant conscient des compromis auxquels la pratique moderne
nous induit.

Installé à Genève depuis 2009, aujourd’hui il enseigne la contrebasse au Conser-
vatoire populaire de Genève et est membre du collectif de compositeurs/improvi-
sateurs Fanfareduloup Orchestra. Il a été contrebasse solo du Geneva Camerata
entre 2013 et 2017 et collabore régulièrement, entre autres, avec l’Orchestre de la
Suisse Romande, l’ensemble Cristofori, l’ensemble baroque du Léman.

Avec son propre Ensemble Tarka il a publié deux CD, Frères de Voyage (2015) et
Owen’s Poems (2017). Son prochain album en solo Canoni & ricercari paraîtra en
2020 pour NBB records.

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M     oins célèbre que son compagnon en do mineur, le Nocturne en fa
      dièse mineur opus 48 N°2 n’enchante pas moins l’auditeur par sa flui-
dité incomparable, obtenue par « l’insensible, l’imperceptible glissement
d’une proposition mélodique à une autre », comme le notait avec admira-
tion l’écrivain André Gide. Notée Andante, la première partie baigne dans
un climat de douce mélancolie. Une simple juxtaposition entre noires et
croches à la main droite et triolets de croches à la gauche donne l’illusion
d’une mélodie qui s’étire à l’infini, comme libérée du temps. Contraste to-
tal avec la section centrale (Più lento), qui rumine la même formule à trois
temps avec obstination. La « mélodie infinie » du début revient, toujours
aussi insaisissable, avant une coda pimentée de chromatisme, qui se dis-
sout dans la tonalité lumineuse de fa dièse majeur.

Si le Nocturne opus 48 N°2 semble abolir les repères temporels, la Polo-
naise en fa dièse mineur opus 44 reste solidement ancrée au sol.

Achevée en 1841 à Nohant, à une époque de grande tension avec George
Sand, la partition est une « sorte de fantaisie en forme de Polonaise, mais
Polonaise quand même », écrit Chopin à l’un de ses éditeurs.

Elle s’élance à grands renforts de doubles octaves, de batteries d’accords et
de trilles menaçants, qui introduisent un thème principal volontaire, d’allure
martiale. Avec ses étranges gruppettos de triples croches sans cesse répé-
tés, qui évoquent les envolées excentriques d’un Charles-Valentin Alkan, la
partie centrale semble faire du sur place, comme un régiment de cavalerie
attendant de charger. Un épisode plus calme aux allures de Mazurka offre
une pause méditative. Deux traits fulgurants en doubles croches traver-
sant tout le clavier annoncent le retour du thème initial, dans un traitement
sonore encore plus grandiose, prolongé par une coda où le motif principal
s’éloigne lentement dans le registre grave.

Réunis après sa mort sous le numéro d’opus 74, les 17 Chants Polonais de
Chopin ont été composés sur près de vingt ans, entre 1829 et 1847.

Chopin, coupé de son pays natal, seul à Vienne et fortement ému par l’In-
surrection de Varsovie, compose le chant « Smutna rzeka » Le Fleuve triste
(1830) sur le poème de Stefan Witwicki, poète polonais. C’est un récit fu-
nèbre d’une mère qui a enterré ces sept filles.
Proche du bel canto, « Moja pieszczotka » Ma douce chérie (1841) poème de
Adam Mickiewicz, donne à entendre un Chopin plus charnel, le piano colorant
par petites touches subtiles les tournures mélodiques enjôleuses du chant.
Enfin, dans « Piosnka litewska » Chanson lithuanienne (1830-31) basé sur
12
le folklore lithuanien, Chopin met en scène un dialogue entre une mère
et sa fille avec un curieux mélange de gravité (la mère) et de tendre ironie
(la fille). L’extrême soin apporté à la composition de cette chanson lithua-
nienne, avec notamment sa palette si riche de tounures expressives, laisse
à penser que son compositeur aurait pu devenir un maître du genre s’il avait
poursuivi dans cette voie.

La Barcarolle opus 60 (1845-46) s’écoule comme un songe mystérieux et
chatoyant. Loin de tout pittoresque d’opéra, loin des charmantes pièces
de caractère romantiques (Chanson de gondolier vénitien extraite des
Romances sans paroles de Mendelssohn, par exemple), les flots de Chopin
appartiennent au domaine de l’imagination pure. Ses figures ondoyantes
de tierces et de sixtes, aux éclats de plus en plus dramatiques jusqu’à
l’apothéose, évoquent les jeux d’ombre et de lumière, les miroitements
de l’impressionnisme à venir, et laissent l’auditeur flotter sur les rivages
impalpables du rêve.

Les tardives (1846) Mazurkas opus 63 appartiennent à la veine d’inspira-
tion la plus personnelle de Chopin, compositeur éternellement nostalgique
de sa chère Pologne. Si la première possède le charme rustique d’une
danse paysanne aux rythmes puissamment scandés, les deux suivantes
débordent de mélancolie languide et de tristesse résignée, réminiscences
fuyantes d’un temps qui n’est plus. « Je me souviens à peine de la façon
dont on chante dans mon pays natal », regrettait Chopin peu avant sa mort.

Enfin, la Grande Fantaisie sur des airs polonais opus 13 reprend la forme
typique des « pots-pourris » si populaires au début du XIXe siècle, mais
avec une inventivité et un raffinement d’écriture qui n’appartiennent qu’à
Chopin. Jouée ici avec un quintette à cordes en lieu et place de l’orchestre,
comme lors de sa première exécution par le compositeur et ses amis, en
mars 1830 dans le salon familial des Chopin à Varsovie, la Grande Fantaisie
s’ouvre sur une Introduction expressive aux allures de Nocturne frémissant.

Basé sur la chanson polonaise La Lune est déjà descendue, le premier
des trois « airs » prolonge cette atmosphère de douceur soyeuse au gré
d’arabesques mystérieuses et délicates. Le deuxième « air », une fou-
gueuse Krakowiak attribuée au compositeur Karol Kurpinski, est l’occasion
d’une spectaculaire péroraison dans le style brillant en vogue à l’époque.
Une superbe transition amène à la Kujawiak finale, danse vigoureuse et
sautillante comme il se doit. Entre traits perlés, arpèges fulgurants et sauts
périlleux, elle offre au pianiste l’occasion d’affirmer sa virtuosité avec un
panache irrésistible. ■
                                                                           13
Portrait de Chopin par Maria Wodzinska – Août 1936
Masterclass

CHOPIN MASTERCLASS
             Dirigée par
    FRANÇOIS DUMONT piano
                   *
        Lundi 5 octobre 2020
              14h –18h
Suivi à 18h30 par la projection du film
        « Le Cœur de Chopin »
                 *
       Mardi 6 octobre 2020
             14h –18h
                 *
      Mercredi 7 octobre 2020
             10h –13h
                *
  Mercredi 7 octobre 2020 à 19h
  CONCERT des PARTICIPANTS

                 ***
     Institut Jaques-Dalcroze
          Salle de récital
  Genève, rue de la Terrassière 44

         ENTREE LIBRE

                                          15
Récital de Piano

                      Mardi 6 octobre à 20h
                     Mairie de Collonge-Bellerive
                           Salle Willy Buard

                           JANSEN RYSER

                            PROGRAMME

                         FRYDERYK CHOPIN
                            (1810 – 1849)

              Etude en do dièse mineur op. 25 N°7

                Scherzo en do dièse mineur op. 39

                 Nocturne en Si majeur op. 9 N°3

            Polonaise en do dièse mineur op. 26 N°1

                   Vingt-quatre Préludes op. 28
                  Do majeur-la mineur, Sol majeur-mi mineur,
               Ré majeur-si mineur, La majeur-fa dièse mineur,
            Mi-majeur-do dièse mineur, Si majeur-sol dièse mineur,
     Fa dièse majeur-mi bémol mineur, Ré bémol majeur-si bémol mineur,
           La bémol majeur-fa mineur, Mi bémol majeur-do mineur,
               Si bémol majeur-sol mineur, Fa majeur-ré mineur

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Jansen RYSER pianiste
Lauréat du Kiefer Hablitzel Göhner Music Prize 2019, Jansen Ryser s’est produit
à travers l’Europe ainsi qu’aux Etats-Unis. Loué pour sa musicalité, son jeu a été
décrit comme «combinant un pianisme naturel, une sensibilité musicale et une
éloquence poétique». Invité par de nombreux festivals, il s’est produit en soliste
et en musique de chambre au Verbier Festival, Gstaad Menuhin Festival, Lavaux
Classic Festival, Plovdiv International Chamber Music Festival, Les Jardins Musi-
caux de Cernier, Vienna Young Pianist, Art et Musique de Sierre, Opera Festival de
Montperreux.

Dès son plus jeune âge, Jansen Ryser obtient de nombreux prix nationaux et in-
ternationaux aussi bien en solo qu’en musique de chambre : 1er Prix au Concours
suisse des jeunesses musicales, deux 1ers Prix au concours organisé par le Conser-
vatoire de Genève, le Prix Heinrich Gattermeyer à Vienne. Il est également le réci-
piendaire de la Bourse Culturelle de la Fondation Leenaards 2017.

Né en 1994 à Lausanne, Jansen Ryser débute le piano à l’âge de 5 ans. Diplômé
de la Haute Ecole de Musique de Genève ainsi que de la Juilliard School de New
York grâce à la générosité de la Theodora J. Nicolas Piano Scholarship, il a suivi
l’enseignement de Matti Raekallio, Sylviane Deferne et Adrian Kreda. Il reçoit le
Prix Filipinetti 2017 récompensant le meilleur master soliste. Il s’est perfectionné
auprès de grands maîtres tels que Paul Badura-Skoda, Ferenc Rados, Eberhard
Feltz, Andreas Staier, Franz Helmerson, Nelson Goerner, Bjoern Lehmann, Jeffrey
Swann, Krzysztof Jablonski, Jean-Marc Luisada.

Actuellement, il poursuit ses études à la Hochschule für Musik und Tanz de Co-
logne dans la classe de Claudio Martinez-Mehner et Nina Tichman.
                                                                                 17
C   omposée vers 1835, l’Etude Op. 25 N°7 illustre à merveille ses ambitions de
    compositeur et ses exigences d’enseignant. Rien de mécanique bien sûr dans
l’écriture pianistique, mais un désir de transcender les limites de l’instrument, de
créer une métaphysique du son, pour ainsi dire. L’Etude en do dièse mineur prend
des allures de grand Nocturne triste, de « rêve sombre et mystérieux », selon l’ex-
pression du compositeur Stephen Heller, contemporain de Chopin, qui ne se las-
sait pas de la jouer. Sa mélodie, introduite par un récitatif à la main gauche, évoque
irrésistiblement le timbre d’un violoncelle, auquel répond un écho plaintif dans l’ai-
gu, expression d’un désespoir poignant.

Le Scherzo en do dièse mineur op. 39 (1839) joue sur les contrastes extrêmes,
entre élans passionnés et pauses méditatives au caractère quasi religieux. Le plus
bref des quatre Scherzos de Chopin, il s’ouvre sur un motif hésitant et presque
menaçant dans le grave, qui cède la place à un vigoureux martèlement d’octaves.
Le tempo ralentit, et voici que descend du ciel un chant intense, hymne ou choral,
auréolé à chacun de ses versets par une pluie d’accords brisés joués leggierissimo
dans l’aigu – effet magique s’il en est. Le choral progresse avec une majesté et
une tristesse grandissante, en alternance avec les octaves martelées du début. De
vibrants arpèges et une fougueuse transition amènent à la dramatique coda.
Le Nocturne opus 9 No. 3 emmène plutôt l’auditeur au bal, avec un premier thème
aux allures de valse tendrement mélancolique. La partie centrale apporte un violent
contraste, comme si un brusque orage venait soudain séparer les couples tour-
noyants, avant de disparaître aussi vite qu’il était arrivé, presque sans transition.
La reprise du premier thème se voit écourtée mais enrichie d’une petite cadence
ornementale dans l’aigu, comme une ultime révérence avant la fin du bal.

A partir du diptyque de l’opus 26, la forme de la Polonaise n’est plus une simple
danse de salon qui teste avec élégance et un clin d’œil au folklore la souplesse de
cheville de l’aristocratie : transfigurée par le génie de Chopin, la Polonaise devient
poème héroïque, fresque grandiose, chant épique. Dès son introduction, avec ses
quatre mesures en octaves fortissimo, l’opus 26 N°1 descend dans le champ de
bataille. Si le sinueux premier thème hésite entre ardeur juvénile et douceur mé-
lancolique, un motif secondaire au rythme syncopé et aux fulgurants arpèges as-
cendants semble évoquer le sifflement de la mitraille. La section centrale, basée
sur le premier thème, se pare de couleurs élégiaques. Le retour des octaves de
l’introduction annonce la reprise de la première partie, l’œuvre s’achevant dans un
apaisement énigmatique.

Composés entre 1838 et 1839, en grande partie lors du désastreux séjour de
Chopin et George Sand à Majorque, les 24 Préludes opus 28 rendent hommage
au Clavier bien tempéré de Bach, dont Chopin avait emporté les deux livres dans
ses bagages. Comme son modèle, le recueil du compositeur polonais explore
toutes les tonalités, alternant modes majeur et mineur, mais en suivant le cycle
des quintes (Do majeur, puis la mineur, suivi de Sol majeur, mi mineur, etc.), alors
que chez Bach la succession est chromatique. Autant ce dernier attribuait un carac-
tère particulier à chaque tonalité, autant Chopin trouve un geste expressif unique
pour chacun des 24 Préludes, créant un extraordinaire kaléidoscope de couleurs,
de rythmes et de textures.
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Un flot d’arpèges aux décalages subtils confère au 1er Prélude une texture riche
et complexe, à l’instar d’une vague qui s’élève et retombe. Le 2e Prélude pose un
décor d’une tristesse désolée, renforcé par des harmonies aux dissonances dou-
loureuses. Le 3e Prélude s’élance joyeusement, soutenu par les arpèges vivaces et
fluides de la main gauche. Le célèbre 4e Prélude, en mi mineur, donne à entendre
une plainte désolée sur deux notes, à l’intensité tragique. Le 5 e Prélude retrouve
une sonorité lumineuse, alors que le 6 e entonne un chant pensif à la main gauche.

Mazurka miniature, le 7e brille par sa simplicité enrobée de mélancolie. Pour
l’extraordinaire 8 e Prélude, Chopin invente une écriture dramatique et foisonnante,
qui nimbe le thème conquérant dans un halo d’arpèges chaotiques. Le Mi ma-
jeur du 9 e Prélude prend un caractère de procession grandiose grâce à une mélo-
die puissamment sculptée, aux harmonies riches et sonores. Nouvelles audaces
d’écriture dans le 10 e Prélude : des cascades de notes rapides se précipitent de
l’aigu vers le grave, comme une interrogation à l’inquiétude croissante. Le 11e Pré-
lude déroule des trésors d’élégance avec un charme irrésistible, alors que le 12 e
libère une énergie opiniâtre, presque héroïque.
Retour au calme contemplatif avec le 13 e Prélude, aux lignes mélodiques sen-
suelles et miroitantes. Une sérénité vite brisée par le 14e Prélude et sa violente
tempête dans le registre grave. Le 15e Prélude, surnommé Goutte d’eau à une
époque où l’on aimait attribuer un programme à la musique, assombrit encore
l’atmosphère : après une première section à la tristesse résignée, un motif en
notes répétées dans le registre grave crée un climat de plus en plus fantoma-
tique et angoissant. Aucune consolation avec le 16e Prélude, dont les tourbillons
de doubles croches de la main droite et les sauts haletants de la main gauche
évoquent une course vers l’abîme. L’élégant 17e Prélude ramène un semblant de
calme, vite brisé par les ruptures brutales, les accords grinçants et les soubresauts
diaboliques du 18 e.
Le lyrisme est de retour avec le pépiement dans l’aigu du 19 e Prélude. Le
20 e Prélude, en do mineur, inspire à Chopin une marche funèbre sobre et poi-
gnante, qui servira plus tard de thème à Busoni et à Rachmaninov pour des cycles
de variations. Il est suivi (21e Prélude) d’un superbe chant sans paroles aux sono-
rités raffinées. Sorte d’étude pour les octaves de la main gauche, le 22e Prélude
déploie une violence qui prend à la gorge. Par contraste, le 23 e Prélude, dans la
lumineuse tonalité de Fa majeur, ressemble à un fragile îlot de paix entre deux
gouffres. Car le dernier prélude conclut le cycle dans un climat d’apocalypse : sa
sombre mélodie chante avec véhémence, bravant les vagues fiévreuses de la main
gauche et les traits aveuglants de la main droite. Gammes, arpèges, tierces chro-
matiques zèbrent en effet tout le clavier, de l’aigu au grave, comme les éclairs du
Jugement Dernier.
La conclusion s’abat brutalement : le ré le plus grave du piano résonne trois fois,
comme trois coups de canon ou trois coups de feu mortels qui achèvent Varsovie !
Dans ce saisissant poème, Chopin le patriote se souvient sans doute du sort tra-
gique de Varsovie, dont le soulèvement contre le tsar avait été brutalement écrasé
par l’armée russe en 1831. Rarement la musique aura-t-elle atteint pareil sentiment
de révolte. ■

                                                                                  19
Récital de Piano

             Vendredi 9 octobre à 20h
       Salle des Nations – Hôtel des Bergues

                  ALBERTO NOSÈ

                    PROGRAMME

                FRYDERYK CHOPIN
                   (1810 – 1849)

     Polonaise en do dièse mineur op. 26 N°1

       Barcarolle e Fa dièse majeur op. 60

               Trois Mazurkas op. 56
        En Si majeur – en Do majeur – en do mineur

           Ballade en sol mineur op. 23

     Nocturne en Mi bémol majeur op. 55 N°2
      Valse en La bémol majeur op. 69 N°1

       Nocturne en do mineur op. 48 N°1
      Valse en Ré bémol majeur op. 70 N°3

       Scherzo en si bémol mineur op. 31

20
Alberto NOSÉ piano

Né en 1979 à Villafranca di Verona, diplômé à l’âge de 17 ans au Conservatoire de
Musique de Vérone, Alberto Nosè suit les cours de perfectionnement de Franco
Scala, Boris Petrushansky, Antonio Ballista et Leonid Margarius à l’Académie Inter-
nationale de Piano d’Imola. Il a participé aux masterclasses de Paul Badura-Skoda,
Murray Perahia, Fou Ts’ong et d’autres.

Lauréat du concours «Jeunesse pour Mozart» à Salzbourg en 1991, du Concours
International Chopin de Varsovie en 2000, il obtient encore de très nombreux pre-
miers prix (Prix Venise 1998, Prix Vendôme, Paris 2000, World Piano Competition,
Londres 2002, International Maj Lind Piano Competition, Helsinki 2002).

Alberto Nosè se produit avec orchestre et en récital dans la plupart des pays d’Eu-
rope, aux Etats-Unis, au Brésil et au Japon. Il a enregistré plusieurs CD et DVD
pour TAU Records, Domovideo ou encore Naxos.
                                                                                21
T    out en conservant l’élégance d’écriture des Polonaises de jeunesse, celle en
     do dièse mineur opus 26 N°1, exprime une gamme d’émotions bien plus vaste.
Dès l’introduction, avec ses quatre mesures assénées fortissimo, le ton se veut
dramatique, voire révolté. Si le premier thème regorge de fierté juvénile, un mo-
tif secondaire au rythme syncopé et aux fulgurants arpèges ascendants introduit
un ton d’inquiétude nerveuse. La section centrale, basée en partie sur le premier
thème, baigne au contraire dans un lyrisme intense. Le retour des octaves dra-
matiques annonce la reprise de la première partie, qui s’achève dans une douceur
énigmatique.

La Barcarolle op. 60 (1845-46) s’écoule comme un songe, dans une fluidité incom-
parable. Loin de tout pittoresque, les flots de Chopin appartiennent au domaine de
l’imagination pure. Ses figures chatoyantes de tierces et de sixtes, à l’ondoiement
de plus en plus dramatique, évoquent les jeux d’ombre et de lumière, les miroi-
tements de l’impressionnisme à venir, et laissent l’auditeur flotter sur les rivages
impalpables du rêve.

S’il y a une forme qui traduit plus que toute autre l’attachement de Chopin à sa
Pologne natale, c’est bien la Mazurka. Les trois exemples de l’opus 56 (1843)
comptent parmi les plus fascinantes compositions dans ce genre si particulier.
La première s’ouvre sur un dialogue d’abord hésitant, qui gagne peu à peu en vi-
gueur, et s’achève dans une atmosphère de légende. La deuxième séduit par son
caractère rustique et gaillard, souligné par des quintes à vide, avant un épisode en
canon aux surprenantes dissonances. La dernière, la plus développée, confine au
tragique, puis s’adoucit, avant de d’évader sur des chemins mélodiques et harmo-
niques audacieux, jusqu’à une coda richement développée.

La Ballade en sol mineur appartient à la période surnommée par le musicologue
Mieczyslaw Tomaszewski le « Sturm und Drang » de Chopin : « un monde dominé
par l’extraordinaire, l’inexplicable, le mystérieux, le fantastique et l’irrationnel ». A
l’instar du dramatique 1er Scherzo, la 1re Ballade introduit une forme d’hyper-ex-
pressivité dans la musique du compositeur polonais, jusque-là encore largement
tributaire du classicisme viennois. Les contrastes de textures, de dynamique, de
tempo, deviennent extrêmes et complètement imprévisibles. Dès l’introduction,
lente et indécise, répétitive et hypnotique, la Ballade en sol mineur fait exploser
toutes les conventions formelles. La musique s’emporte soudain, chante avec un
lyrisme désabusé, repart de plus belle, capricieuse comme une valse, s’interrompt
aux retours sans cesse transfigurés du thème initial. L’oeuvre trouve son apogée
dans une péroraison épique, ponctuée par une avalanche d’octaves flamboyantes.

Le Nocturne opus 55 N°2 fait partie de ces compositions de Chopin fluides et insai-
sissables, où les mélodies s’écoulent avec un naturel confondant, comme si elles
ne devaient jamais s’arrêter, et qui inspirèrent à Wagner le concept de unendliche
Melodie, la « mélodie infinie ». Spontané comme une improvisation, le Nocturne en
Mi bémol majeur s’étire et gonfle comme un nuage bercé par les vents, dans un mi-
roitement magique et scintillant, un long souffle généré à la fois par la mesure à 12/8
et l’accompagnement riche et détaillé. L’effet de continuité est tel, que l’on perçoit
à peine les deux parties de l’œuvre, la seconde étant le miroir varié de la première.
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Les deux Valses opus 69 ont acquis une notoriété démesurée grâce à la première,
connue sous le titre apocryphe de L’adieu. Chopin la copia en 1835 dans l’album
de Maria Wodzinska, une jeune Polonaise qu’il avait rencontrée à Dresde, et qui
était alors sa fiancée secrète… Le compositeur s’apprêtait à quitter Dresde et Ma-
ria ajouta de sa main le titre qui rendit la valse célèbre. Son expression fragile et
gracieuse, égrenée au fil de trois thèmes délicats, évoque à merveille le souvenir
d’un amour perdu.

Composée six ans plus tôt, la Valse en ré bémol majeur opus 70 N°3, contient-elle
aussi un message secret. Dans une lettre du 3 octobre 1829 à son ami Tytus Woy-
ciechowski, Chopin note que la « petite valse que je t’ai envoyée », lui a été inspirée
par son « idéal », Konstancja Gładkowska, jeune cantatrice, l’élève du Conserva-
toire de Varsovie… Encadré par un thème de valse à la grâce discrète, la partie
centrale (Trio) fait entendre à la main gauche une mélodie élégante, qui chante à la
manière d’un violoncelle : tel est le portrait fugace de la jeune et jolie Konstancja,
noté d’une croix dans le manuscrit.

Avec sa tristesse désolée et ses emportements tragiques, le Nocturne en do
mineur opus 48 No. 1, dissimule peut-être, lui aussi, un message secret. Il s’ouvre
sur un chant désolé, une plainte douloureuse, marche funèbre qui ne dit pas son
nom. Lui succède une partie centrale en Do majeur au caractère de choral. La
tension s’accumule peu à peu et des batteries d’octaves chromatiques en triolets
finissent par « dévorer » le choral sous la violence de leurs assauts. Après ce déluge
d’octaves, le thème initial fait un retour soudain et inattendu dans un tempo dou-
blé (doppio movimento), revêtant cette fois un caractère d’agitation désespérée,
voire angoissée. En guise d’apaisement final, trois accords prolongés, lugubres et
poignants.

Achevé en 1837, le Scherzo Op. 31 offre un paysage tout aussi contrasté. Un
étrange motif, sorte de sautillement de feu follet écartelé entre silences béants
et batteries d’accords dans l’aigu, bondit d’un registre à l’autre du clavier avec une
surprenante énergie. Après cette entrée en matière théâtrale, un thème chantant,
noté Con anima, introduit un épisode à l’expression élégante. La partie centrale
semble hésiter entre une mazurka mélancolique et une valse tournoyante. Le mo-
tif de mazurka triomphe dans un élan dramatique saisissant. Le retour du sautil-
lant motif initial annonce une récapitulation toujours furieusement énergique mais
condensée, suivie d’une brillante coda. ■

                                                                                    23
Concert de Clôture

                   Dimanche 11 octobre à 17h
                   STUDIO ERNEST-ANSERMET

                  CHRISTIAN CHAMOREL piano
                   OLIVIA JACOBSON violon
                   ESTELLE REVAZ violoncelle

                           PROGRAMME

                        FRYDERYK CHOPIN
                           (1810 – 1849)

                      Deux Nocturnes op. 55
                    En fa mineur - en Mi bémol majeur

                Nocturne en do mineur op. 48 N°1

             Sonate op. 65 pour piano et violoncelle
                            Allegro moderato
                                 Scherzo
                                  Largo
                                 Finale

     Trio en sol mineur op. 8 pour violon, violoncelle et piano
                            Allegro con fuoco
                             Scherzo. Vivace
                            Adagio sostenuto
                            Finale. Allegretto

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Christian CHAMOREL piano

Musicien « vif et éloquent » (Diapason), « parfait styliste » au jeu « jubilatoire et
orchestral » (Classica), Christian Chamorel est l’un des rares pianistes suisses
romands dont le rayonnement dépasse les frontières du pays. Son engagement
pour le lied et la musique de chambre en fait un partenaire artistique très recherché,
avec en prime un sens aigu du partage et de la communication salué par tous les
publics.

Invité de festivals prestigieux (Menuhin Festival, Sommets Musicaux de Gstaad en
Suisse, Festspiele Mecklenburg-Vorpommern, Klavierfestival Ruhr, Schloss Elmau
en Allemagne, Musicales du Golfe, Lisztomanias, Festival de Musique de Menton
en France, Istituzione Universitaria dei Concerti à Rome), il se produit également
aux Etats-Unis, au Canada, au NCPA de Pékin, aux Musashino Hall et Kioi Hall de
Tokyo, au Konzerthaus de Berlin, au Prinzregententheater de Munich, à la Tonhalle
de Zurich, au Wigmore Hall de Londres et au Victoria Hall de Genève.

Lauréat de plusieurs concours internationaux (Gian Battista Viotti à Vercelli, Beethoven
de Vienne, Société des Arts de Genève), il joue avec des phalanges telles que l’Orchestre
de Chambre Fribourgeois, l’Orchestre Symphonique de Berne, les Menuhin Academy
Soloists ou les Frankfurter Solisten.

Ses enregistrements dédiés à Liszt, Mendelssohn, Franck ou récemment Mozart
ont été salués par la presse internationale, avec notamment deux nominations
comme meilleur CD de l’année aux « International Classical Music Awards ».
                                                                                      25
Estelle REVAZ violoncelle

Après avoir débuté le violoncelle au Conservatoire de Sion, Estelle Revaz poursuit
ses études au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris dans la classe
de Jérôme Pernoo et continue à la Musikhochschule de Cologne où elle obtient
dans la classe de Maria Kliegel un Master de soliste et un Master en musique
contemporaine avec les plus hautes distinctions.

Comme soliste, elle s’est produite avec la Camerata Armin Jordan, l’Orchestre
Musique des Lumières, l’Orchestre des Pays de Savoie, l’Orchestre Romand des
Jeunes Professionnels, la Sinfonietta Genève ou encore l’Orchestre national du
Paraguay.

Elle a participé au Gstaad Menuhin Festival, à la Schubertiade d’Espace 2, aux
Sommets du Classique, Luna Classics, Cully Classique, Sion Festival, Festival Pa-
blo Casals, Festival International de Colmar, aux Variations musicales de Tannay et
au Festival Internazionale dei Duchi d’Acquaviva en Italie.

On la retrouve avec des partenaires musicaux tels que Gautier Capuçon, Renaud
Capuçon, Pavel Vernikov, Sergey Ostrovsky, Alessio Nebiolo, Finghin Collins, Fran-
çois Dumont, Christian Chamorel et le quatuor Sine Nomine.
Depuis trois ans, elle est « Artiste en résidence » à l’Orchestre de Chambre de
Genève.

Le disque Cantique (NEOS 2015), dans lequel elle interprète le concerto Shlomo
d’Ernest Bloch et du concerto Pitture écrit pour elle par Andreas Pflüger, ainsi que
son dernier disque Bach & Friends pour violoncelle solo (Solo Musica/Sony 2017)
ont été accueillis avec enthousiasme par la presse internationale.

www.estellerevaz.com
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Olivia JACOBSON
Biographie page 7

                    27
L   e Nocturne en fa mineur op. 55 N°1, exprime sa mélancolie au fil d’un
    thème simple mais obstiné, à la tristesse désolée, sans cesse répété
et varié. Il pourrait promener son humeur chagrine encore longtemps, s’il
n’était soudain interrompu par un récitatif fiévreux, presque brutal. La mu-
sique s’emporte avec douleur, avant de retomber dans sa complainte ini-
tiale. Mais voilà qu’une série d’arpèges parsemés de chromatisme laissent
filtrer la lumière dans la tonalité de Fa majeur.

Avec son raffinement inouï, ses couleurs prismatiques et sensuelles, le
Nocturne op. 55 N°2 crée un sentiment de fascination quasi-hypnotique.
Les arpèges sinueux de la main gauche, les ornements sans cesse variés,
la mélodie d’une fluidité incomparable forment une étonnante polyphonie à
trois voix, à la fois insaisissable et travaillée dans le moindre détail. L’un des
seuls Nocturnes à ne pas avoir de section centrale contrastante, il baigne
l’auditeur dans une atmosphère onirique et merveilleuse.

« Parmi tous les nocturnes de Chopin, celui en do mineur op. 48 N° 1 est
peut-être l’un des plus beaux et, sans contredit, l’un des plus puissants »,
estimait le pianiste polonais Raoul Koczalski (1885-1948), l’un des inter-
prètes « historiques » de Chopin. Il s’ouvre sur une mélodie grave, dépouil-
lée, tragique, comme un vestige de marche funèbre. Celle-ci cède la place
à un majestueux choral qui s’amplifie peu à peu, accumulant lentement la
tension jusqu’à exploser en une formidable cascade d’octaves. Le motif ini-
tial revient soudain, sa désolation tragique complètement transfigurée par
un élan passionné qui est l’une des plus géniales inspirations de Chopin.

Achevée en 1847, la Sonate pour violoncelle et piano op. 65 a longtemps
été incomprise. Destinée au violoncelliste virtuose Auguste Franchomme,
fidèle ami de Chopin depuis 1832, elle se découpe de manière classique en
quatre mouvements. Le ton y est à l’introspection, comme si Chopin cher-
chait au plus profond de lui-même le chemin vers des horizons nouveaux.

Lors de la création à Paris en février 1848, Franchomme et Chopin ne
jouèrent pas l’Allegro moderato initial, craignant peut-être une réaction né-
gative des auditeurs face à son caractère grave, sa richesse thématique et
son intensité prenante.

Le Scherzo déploie des accents fiers et ténébreux, presque « brahmsiens »
avant la lettre, tandis que son sinueux trio central pourrait être signé Dvo-
rak !

28
Avec sa mélodie simple mais incroyablement envoûtante, le Largo crée un
moment de pure contemplation au-delà du temps et de l’espace.

L’Allegro final conjugue à nouveau fougue et emportements, développe-
ment complexe et textures claires-obscures aux merveilleux reflets soyeux.

Contrairement à ses contemporains Mendelssohn et Schumann, Chopin
ne s’est que trop rarement intéressé à la musique de chambre. Outre la
crépusculaire Sonate pour violoncelle et piano opus 65, sa seule œuvre
majeure dans ce domaine reste le juvénile Trio opus 8. Publié en 1833, il est
le fruit de plusieurs années d’effort, témoignage d’un compositeur en plein
développement artistique.

L’atmosphère du premier mouvement, Allegro con fuoco, se rapproche du
lyrisme ardent des Concertos pour piano et orchestre opus 11 et 21. Si le
piano domine le discours avec ses sonorités naturellement opulentes, le
violon et le violoncelle ne restent pas dans son ombre et rajoutent une
teinte mélancolique aux élans soutenus du clavier.

D’une élégance toute classique, le solide Scherzo reste d’humeur plutôt
sage, même si quelques traits chromatiques viennent pimenter son dérou-
lement.

L’Adagio sostenuto déploie quant à lui l’une de ces larges cantilènes au ly-
risme ravageur, dont Chopin avait seul le secret. Exposée par le piano, elle
est reprise avec une expression croissante par le violon, puis le violoncelle,
qui la peignent de couleurs sans cesse changeantes.

L’Allegretto final évoque avec grâce un rythme de krakowiak, une dans polo-
naise de la région de Cracovie. Son déroulement fluide est dynamité en bout
de course par une brillante accélération, qui amène une digne conclusion à
cette partition pleine de charme. ■

                                               © Luca Sabbatini, Août 2020

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La courte vie de Chopin

L  a personnalité de Fryderyk Chopin s’est forgée dans le contexte historique de la
   lutte de la Pologne pour sa survie nationale au début du XIXe siècle. Sa musique
n’est pas une abstraction détachée de la réalité tragique ou heureuse de la vie du
compositeur. La musique de Fryderyk Chopin est évidement inséparable de sa per-
sonnalité et fortement influencée par son vécu.

La courte vie de Fryderyk Chopin (1810-1849) se situe dans une période politique-
ment mouvementée en Europe. La Pologne, depuis 1772 est progressivement dé-
vorée par la féroce volonté de ses voisins russes, prussiens et autrichiens, pour être
définitivement rayée de la carte de l’Europe de 1795 à 1918, c’est-à-dire jusqu’à la
fin de la Première Guerre Mondiale !
Géographiquement, la Pologne cesse d’exister !

Mais la nation polonaise résiste tant bien que mal à la russification, la germani-
sation et aux repressions. La langue, la religion, la culture et la musique sont ses
références sans failles.
Varsovie, sans avoir la taille de Paris ou de Vienne, est pourtant le centre principal
culturel. Fryderyk Chopin puise le meilleur de son inspiration dans le folklore de son
pays et garde cette signature jusqu’à la fin de ses jours.

A Varsovie, il suit des cours à l’Université. Il travaille la composition avec Józef Elsner
au Conservatoire de musique et découvre un grand nombre d’artistes et de savants
qui fréquentent la maison parentale. Les discussions littéraires et patriotiques se
poursuivent chaque jeudi soir. Des poètes, des musiciens, des amis sont là : Mau-
rycy Mochnacki, Ignacy Dobrzyński, Stefan Witwicki, Bohdan Zalewski, Stanisław
Koźmian et d’autres. Le sentiment d’une haine acharnée contre le régime tsariste
ne le quittera jamais.

Au moment du déclenchement de l’Insurrection contre les russes de novembre
1830, Chopin se trouve à Vienne. Il est profondément bouleversé. Son premier ré-
flexe est de rentrer immédiatement au pays. Mais après une longue discussion noc-
turne avec Tytus Woyciechowski, ils décident que Tytus rentrera seul et Fryderyk
restera à Vienne. En Pologne, on attend de lui autre chose que de le voir rejoindre
les rangs des insurgés.

Resté à Vienne, il passe son premier Noël en solitaire et se plaint plus que jamais
d’être orphelin. C’est au moment de ce premier Noël passé loin de chez lui, en dé-
cembre 1830, que naquit l’idée du son célèbre Scherzo en si mineur sur la mélodie
d’un cantique de noël polonais Lulajże, Jezuniu.

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