Complications chirurgicales de la transplantation rénale夽
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Progrès en urologie (2016) 26, 1066—1082 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com Complications chirurgicales de la transplantation rénale夽 Surgical complications of renal transplantation M.-O. Timsit a,∗,b, F. Kleinclauss c,d,e, V. Richard c,d, R. Thuret f,g a Service d’urologie, hôpital européen Georges-Pompidou, AP—HP, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France b Université Paris Descartes, 75006 Paris, France c Service d’urologie et transplantation rénale, CHRU de Besançon, 25000 Besançon, France d Université de Franche-Comté, 25000 Besançon, France e Inserm UMR 1098, 25000 Besançon, France f Service d’urologie et transplantation rénale, CHU de Montpellier, 34090 Montpellier, France g Université de Montpellier, 34090 Montpellier, France Reçu le 24 août 2016 ; accepté le 1er septembre 2016 Disponible sur Internet le 5 octobre 2016 MOTS CLÉS Résumé Complications Objectif. — Rapporter la nature, l’incidence, les outils diagnostiques et les moyens thérapeu- chirurgicales ; tiques des complications chirurgicales de la transplantation rénale. Fistule ; Matériels et méthodes. — Une recherche bibliographique exhaustive à partir de Medline Lymphocèle ; (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/) et Embase (http://www.embase.com/) a été réalisée entre Sténose ; 1960 et 2016 en utilisant les mots clés suivants « complications chirurgicales ; fistule ; lympho- Thrombose ; cèle ; sténose ; thrombose » en combinaison avec le mot clef « transplantation rénale » dans le Transplantation champ « Titre/Résumé ». Les articles obtenus ont ensuite été sélectionnés sur leur méthodolo- rénale gie. Ainsi 7618 articles ont été identifiés dont plus spécifiquement 981 pour les complications vasculaires, 1016 pour les complications urinaires et 239 pour les lymphocèles. Après élimination des doublons et sélection, 190 articles ont été revus et sélectionnés. Résultats. — L’incidence des complications chirurgicales de la transplantation rénale varie de 1 à 30 % selon les séries ; elles sont souvent rapportées de façon incomplète et leur prise en charge est rarement consensuelle. Les techniques d’angioplastie ont apporté une amélioration sensible du traitement des complications vasculaires du transplant à moyen et long terme. Les 夽 Cet article fait partie intégrante du Rapport « Les urologues et la transplantation rénale » du 110e congrès de l’Association française d’urologie rédigé sous la direction de François Kleinclauss. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : marc-olivier.timsit@egp.aphp.fr (M.-O. Timsit). http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2016.09.052 1166-7087/© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Complications chirurgicales de la transplantation rénale 1067 facteurs de risque de thromboses des vaisseaux du transplant sont le rein droit, la présence d’artères multiples du transplant, l’existence d’une artériopathie chez le donneur ou le rece- veur, les troubles hémodynamiques per-procédure, la présence d’une néphropathie diabétique ou un antécédent d’accident thromboembolique chez le receveur. Les complications urinaires et la lymphocèle, si elles ne mettent pas en jeu la survie du transplant, sont responsables d’une morbidité conséquente pour le receveur. L’anastomose pyélo-urétérale d’emblée ou de rattrapage fait partie des principales options thérapeutiques des sténoses et fistules urétérales. Conclusion. — La prévention des complications chirurgicales de la transplantation nécessite une préparation minutieuse du transplant, et un respect rigoureux des bonnes pratiques chi- rurgicales. Les comorbidités de plus en plus importantes des receveurs sélectionnés, et des donneurs marginaux, n’ont pas permis de diminuer significativement la morbidité globale de la transplantation rénale. © 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. KEYWORDS Summary Fistula; Objective. — To report the nature, incidence, diagnosis and treatment options of surgical Lymphocele; complications after renal transplantation. Renal Material and methods. — Relevant publications were identified through Medline (http://www. transplantation; ncbi.nlm.nih.gov/) and Embase (http://www.embase.com/) database from 1960 to 2016 using Stricture; the following keywords ‘‘fistula; lymphocele; stricture; thrombosis’’, in association with ‘‘renal Surgical transplantation’’ in Title/Abstract field. Articles were selected according to methods, language complications; of publication and relevance. A total of 7618 articles were identified including specifically Thrombosis 981 for vascular complications, 1016 for urologic complications and 239 for lymphocele; after careful selection 190 publications were eligible for our review. Results. — Surgical complications occur in 1 to 30% of renal transplantations while being incom- pletely reported without consensual management. Angioplasty techniques led to a significant improvement of short- and long-term vascular complications outcome. Risk factors for trans- plant thrombosis are a right allotransplant, multiple renal arteries or vasculopathy in the donor, diabetes, arterial disease or thrombophilia in the recipient and hemodynamic changes during procedure. Urinary complications and lymphocele significantly impair overall outcome and reci- pients quality of life with no demonstrated impact on allotransplant survival. Immediate or salvage pelvi-ureterostomy is a main treatment option for ureteral strictures and fistula. Conclusion. — Prevention of surgical complications following renal transplantation relies on careful allotransplant preparation and strict respect of surgical best practices. Increasing comorbidities in recipients as well as marginal donors are significant limits for the improvement of post-transplant surgical outcome. © 2016 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Introduction Compte tenu de l’absence d’essai contrôlé, de l’hétérogénéité des cohortes rétrospectives (types de En plus de 50 ans, la technique chirurgicale de trans- chirurgie, qualité des transplants, protocoles plantation rénale n’a que très peu évolué ; les principes d’immunosuppression, etc.) et de l’absence d’exhaustivité d’anastomose édictés par Jaboulay [1—3] et Carrel [4] ou dans les résultats publiés, il apparaît difficile de proposer la technique d’implantation du transplant décrite par Kuss des stratégies de prise en charge ou de prévention des et al. [5,6] sont toujours utilisés avec succès. complications avec un niveau de preuve élevé. Notre Toutefois, l’incidence des complications chirurgicales analyse de la littérature nous permet néanmoins d’apporter reste significative (1 à 40 % des cas selon les séries) [7—10]. un minimum de preuves à l’expérience chirurgicale que Il s’agit d’événements indésirables communs à toute chi- nous partageons ici. rurgie rétropéritonéale (voire abdominale) chez un patient fragile (maladie rénale chronique, maladie vasculaire, dia- bète, troubles trophiques, etc.) mais aussi de complications Matériels et méthodes spécifiques au transplant comme les thromboses vascu- laires, les syndromes hémorragiques ou les complications Une recherche bibliographique exhaustive à partir de urinaires. Medline (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/) et Embase
1068 M.-O. Timsit et al. (http://www.embase.com/) a été réalisée entre 1960 et Tableau 1 Incidence des complications chirurgicales 2016 en utilisant les mots clés suivants « complications d’après Wolff et al. [11]. Incidence exprimée en % des chirurgicales ; fistule ; lymphocèle ; sténose ; thrombose » cas opérés sur une période définie. en combinaison avec le mot clé « transplantation rénale » dans le champ « Titre/Résumé ». Les articles obtenus Type de complication Incidence ont ensuite été sélectionnés sur leur méthodologie, leur (%) langue de publication (anglais/français), leur pertinence Hématome/saignement 5 par rapport au sujet traité (rein exclusivement) et leur date Lymphocèle 4,6 de publication. Les études prospectives et rétrospectives Infection du site opératoire 4,4 en anglais et en français, les méta-analyses, et les articles Dont de revue ont été sélectionnés. Lorsqu’ils apportaient une Celles nécessitant une reprise 3,4 expérience notable, les case reports ont été inclus. De chirurgicale même, les articles pertinents cités dans les bibliographies Complications vasculaires 5,4 des revues et non identifiés préalablement ont également Dont été analysés. Ainsi 7618 articles ont été identifiés dont Sténose ou coudure de l’artère du 3,3 plus spécifiquement 981 pour les complications vasculaires, transplant 1016 pour les complications urinaires et 239 pour les Thrombose de l’artère du transplant 1,2 lymphocèles. Après élimination des doublons et sélection Sténose de la veine du transplant 0,6 des articles les plus pertinents parmi ceux dont le texte Thrombose de la veine du transplant 0,7 intégral était disponible par les abonnements hospitaliers Complications urétérales 6,7 et universitaires 190 articles ont été revus et sélectionnés. Blessure d’organe de voisinage 0,8 Total de patient ayant présenté au moins 24 une complication chirurgicale Résultats La série contemporaine la plus descriptive rapportant les complications chirurgicales globales d’une cohorte réparation vasculaire lors de la préparation du transplant. de 1496 patients a été publiée récemment par une En revanche, l’utilisation d’un patch aortique ou non n’avait équipe suisse [11]. Ce travail visait à étudier l’association pas d’impact sur la survenue des complications. Dans la entre l’incidence des complications chirurgicales et littérature, l’incidence des complications vasculaires varie l’expérience du chirurgien et montrait qu’il n’y avait pas de 2,6 % à 23 % [13—15]. courbe d’apprentissage, c’est-à-dire que l’augmentation de l’expérience du chirurgien n’était pas corrélée à une diminution du taux de complications. Comme toute étude Hémorragies rétrospective, le biais de sélection ne permet pas de consi- En plus du risque vital pour le receveur en cas de choc dérer ce résultat comme particulièrement robuste (puisque hémorragique [16], les saignements post-transplantation les cas les plus difficiles étaient certainement opérés par les augmentent le risque de complications infectieuses et chirurgiens les plus expérimentés) ; néanmoins cette étude pariétales (surinfection d’hématome) et compromettent démontre qu’au sein d’un service académique séniorisé l’avenir immunologique du receveur par allo-immunisation avec un programme pédagogique cohérent, la réalisation lors des transfusions de culots globulaires, même phénoty- des transplantations par les chirurgiens les plus jeunes est pés [17,18]. parfaitement éthique et satisfaisante. Ce travail a égale- De façon schématique, une déglobulisation dans les ment le mérite de décrire précisément les incidences de suites précoces d’une transplantation rénale peut avoir complications comme rapporté dans le Tableau 1. En ana- plusieurs origines [19] : les anastomoses vasculaires, les lyse multivariée, seuls l’âge élevé du donneur, le nombre vaisseaux hilaires du transplant, la capsule ou le paren- de transplantations itératives chez le même receveur et le chyme du transplant lui-même, les espaces de décollement sexe masculin du receveur étaient associés à un risque accru du rétropéritoine. Quant à l’hématurie macroscopique, elle de complications chirurgicales [11]. L’origine du transplant peut être secondaire à une lésion traumatique de la voie (donneur décédé vs donneur vivant) n’était pas corrélée au excrétrice ou, plus rarement, à une fistule artérielle ou risque de complications. faux anévrysme secondaires à la biopsie de déclampage [19]. Complications vasculaires Les variations de fonction plaquettaire et les accidents d’anticoagulants jouent donc un rôle primordial dans la sur- La plus large série évaluant spécifiquement les venue et la chronologie des complications hémorragiques complications vasculaires de la transplantation a été post-transplantations. Alors qu’aucune étude n’a pu démon- rapportée par Bessede et al. [12] ; il s’agissait de trer le bénéfice de l’héparinothérapie post-transplantation l’expérience monocentrique du CHU de Bicêtre, rapportant pour limiter les thromboses vasculaires du transplant [20], 3129 patients sur une période de 39 ans. L’incidence des il apparaît que l’administration peropératoire d’héparine complications vasculaires était de 13,5 % avec une survenue est associée à un risque accru de saignements et de associée à l’utilisation d’un rein droit, la réalisation d’une transfusions après transplantation [21]. En revanche, le anastomose terminoterminale sur l’iliaque interne, la pré- risque hémorragique lié à la présence d’artères mul- sence d’artères multiples du transplant et la nécessité de tiples du transplant reste débattu dans littérature, que ce
Complications chirurgicales de la transplantation rénale 1069 soit pour les reins issus de donneurs décédés ou vivants Sténose de l’artère du transplant [16,22]. La sténose artérielle du greffon (SAG) constitue la complica- tion vasculaire la plus fréquente après transplantation [36]. Thromboses vasculaires Son incidence varie selon la définition retenue entre 1 et Les causes de thrombose vasculaire du greffon peuvent 20 %. En effet, tout dépend des critères diagnostics retenus être liées aux anomalies du contenu (thrombophilie, hypo- (doppler vs angiographie) et de la réalisation ou non d’un volémie, anticorps préformés anti-HLA ou anti-AB) ou examen doppler systématique qui entraîne un sur-diagnostic du contenant (malfaçon des anastomoses, dissection de de SAG (de 2,4 % d’incidence à 12,4 % dans l’étude de Wong l’artère du transplant, lésions intimales, etc.). Les lésions et al. [37]). Une sténose significative est caractérisée par un de l’artère du transplant peuvent être directement héritées temps d’ascension systolique supérieur à 70 millisecondes, du donneur (plaques calcifiées, sténoses athéromateuses, une accélération de plus de 300 cm/s (pour une normale etc.) ou être la conséquence de déchirures intimales lors inférieure à 150) et surtout une démodulation des flux paren- du prélèvement (traction excessive sur le pédicule) ou de chymateux avec des faibles index de résistance (inférieurs la préparation (lésions de canulation lors de la perfusion du à 0,5) [38]. Elle survient le plus souvent entre 3 mois et transplant). deux ans après transplantation, mais peut s’observer à tout Les thromboses vasculaires peuvent ainsi résulter de dif- moment y compris dans les suites immédiates de la trans- ficultés techniques opératoires, liées à l’état des vaisseaux plantation [36,39—42]. anastomosés, mais aussi aux difficultés de positionnement Si l’impact de l’ensemble des SAG reste indéterminé, et du transplant qui peuvent conduire à des oblitérations par alors que le traitement endoluminal a démontré son effica- coudure (kinking) des vaisseaux [19,23]. cité (avec un taux de succès allant de 70 à 90 %) [39,41], il est Les facteurs de risque de thrombose des vaisseaux du tout de même suggéré que les SAG symptomatiques soient transplant identifiés en analyse multivariée sont : rein associées à une moins bonne survie du transplant [43]. droit, difficulté chirurgicale, troubles hémodynamiques per- La SAG peut être révélée par une hypertension arté- procédure, présence d’une néphropathie diabétique ou rielle réfractaire, une dysfonction chronique du transplant, antécédent d’accident thromboembolique chez le receveur voire des symptômes d’insuffisance cardiaque congestive [24]. Par ailleurs, concernant les liquides de préservation, par hyperaldostéronisme secondaire. seule l’utilisation d’EuroCollins (vs UW) a été historique- Aucune étude n’a clairement permis d’en identifier des ment associée à une augmentation de l’incidence des facteurs de risque indépendants, [22,25,37,43] et les épi- thromboses vasculaires du transplant [25]. sodes de rejet ou les infections virales à CMV semblent Les obstacles à l’écoulement laminaire du flux et autres être aussi impliqués de façon intriquée dans la survenue de turbulences rhéologiques sont difficiles à évaluer mais de cette complication [37,43,44]. De même, les mécanismes nombreux modèles expérimentaux ont corrélé la morpho- de l’hyperplasie intimale, responsable de la survenue de sté- logie de l’onde du flux sanguin avec la modulation du noses tardives, sont loin d’être élucidés même si les facteurs phénotype endothélial ; ainsi, les conditions de flux dans les de dysfonction endothéliale jouent un rôle certain [45,46]. vaisseaux sanguins peuvent entraîner une dysfonction endo- théliale avec un phénotype pro-thromobotique, aussi bien Complications urologiques de la dans les artères que dans les veines [26—28]. transplantation rénale L’échographie doppler permet de différencier les thromboses artérielles (transplant hypoéchogène sans flux L’estimation de l’incidence des complications urologiques intraparenchymateux) des thromboses veineuses (augmen- de la transplantation rénale est compliquée car les défini- tation du volume du transplant, flux amortis, inversion du tions varient entre les différentes publications. Par ailleurs, flux diastolique dans les vaisseaux du transplant et absence les techniques chirurgicales diffèrent naturellement d’un de flux dans la veine rénale). centre à l’autre. Les calculs, ainsi que les tumeurs rénales La thrombose veineuse est plus fréquente que la throm- ou urothéliales du transplant font l’objet de chapitres par- bose artérielle, avec une incidence allant jusqu’à 6 % des ticuliers et ne seront donc pas abordés ici. transplantations, et survient généralement entre 3 et 9 jours postopératoire [29,30]. Fistule urinaire Dans tous les cas, la reprise chirurgicale précoce avec Cette complication est rare, ne concerne que 2 à 5 % des thrombectomie et souvent réfection des anastomoses, peut cas et survient généralement lors du premier mois après permettre d’espérer sauver le transplant, avec un taux de la transplantation [47—50]. La fistule urinaire peut siéger succès faible et dépendant du délai entre la survenue pro- à tous les niveaux de l’appareil urinaire, mais plus fréquem- bable de l’événement thrombotique et la prise en charge ment au niveau de l’anastomose urétérovésicale (82 %) [50]. [19,29,31,32]. Les techniques endovasculaires sont mal éva- La fistule vésicale est rare et la fistule rénale par nécrose luées dans cette indication, mais souvent préférées lorsque parenchymateuse encore plus. Dans ce dernier cas, le scan- la chirurgie de reprise est inenvisageable [33]. ner permet d’en affirmer le diagnostic, et le traitement en Des alternatives ont été rapportées dans des cas clinique, est difficile, reposant sur l’ablation chirurgicale des tissus comme la perfusion d’activateur tissulaire recombinant du nécrosés[29], quasi-néphrectomie partielle du transplant. plasminogène [34]. Pour les thromboses veineuses tardives, Deux tableaux cliniques de fistule urinaire sont obser- la thrombolyse ± thromboaspiration percutanée a montré vés : la fistule vésicale, et la fistule urétérale. Le premier des résultats très intéressants et est utilisée en routine dans survient dès l’ablation de la sonde vésicale (SV). Les fac- de nombreux centres [35]. teurs favorisants sont les troubles mictionnels (obstacle
1070 M.-O. Timsit et al. cervico-prostatique), un retrait trop précoce de la SV, pédicule urétéral supérieur qu’il faut donc absolument res- une vessie rétractée (longue durée de dialyse pré- pecter. Par ailleurs, dans 25 % des cas, la vascularisation transplantation, absence de diurèse résiduelle) ou une urétérale n’est pas longitudinale (type 1), mais plexiforme malfaçon technique avec lâchage de la suture muqueuse (type 2) avec de fins vaisseaux rassemblés en maille de filet ou plaie vésicale associée. Quant à la fistule urétérale par qui rendent la vascularisation urétérale plus vulnérable. Il nécrose urétérale, elle est secondaire à une ischémie urété- faut donc absolument respecter le « triangle d’or » (limité rale favorisée par une trop grande longueur d’uretère, une en dedans par la veine génitale, en haut par le pédicule dissection urétérale trop proche sans respect de sa vascu- rénal et dehors par le pole inferieur du rein), utiliser un larisation, l’âge élevé du donneur, un retard de reprise de uretère le plus court possible et enfin, si un doute existe fonction (RRF) et une infection au cytomégalovirus (CMV) pendant la transplantation quant à la bonne vascularisation [50—53]. urétérale, ne pas hésiter à faire d’emblée une anastomose Une diminution de la diurèse et la présence d’urines dans pyélo-urétérale ou urétéro-urétérale [57]. Un arbre déci- le drain ou extériorisées par la cicatrice doivent faire pen- sionnel de prise en charge des fistules urinaires est proposé ser au diagnostic. La présence d’œdème cutané notamment (Fig. 1). Il n’est pas exhaustif mais permet d’avoir une vision au niveau des organes génitaux externes peut compléter le pratique de la prise en charge de ces fistules urinaires. Il tableau clinique. S’il existe un RRF du transplant, le suivi de faudra naturellement prendre en compte l’état général du la fonction rénale du receveur n’a aucun intérêt et l’analyse patient ainsi que ses comorbidités. biochimique de l’écoulement est discutable car le transplant ne concentre pas les urines et donnera donc des résultats relativement proches du ionogramme plasmatique. Si par contre la fistule survient alors que les drains ont été retirés, Sténoses urétérales il peut apparaître une douleur de la fosse iliaque homo- Deux tableaux distincts existent : la sténose précoce latérale à la transplantation en raison de l’urinome dont (< 1 mois) et la sténose tardive. La première est rare et le diagnostic différentiel sera la lymphocèle. La fonction favorisée par un œdème anastomotique, une torsion de rénale va se dégrader en parallèle. l’uretère du transplant, une malfaçon technique avec une L’échographie et/ou la tomodensitométrie abdomino- anastomose trop serrée, un caillotage de la voie excré- pelvienne (TDM) sans produit de contraste réalisées trice ou une compression extrinsèque par un abcès, une mettront en évidence une collection qui pourra être lymphocèle ou un hématome [29]. L’exemple typique en ponctionnée. La localisation de la fistule urinaire, pour est la survenue à l’ablation de la sonde double J en post- en adapter le traitement, sera possible grâce à une opératoire. La technique de réimplantation urétérovésicale cystographie éventuellement associée à une TDM abdomino- semble jouer un rôle, la technique de Leadbetter-Politano pelvienne (cystoscanner). La réalisation d’une injection (technique intravésicale) étant associée à une fréquence intraveineuse de produit de contraste iodé dépend de la des complications plus importante comparativement à la fonction du transplant et est donc à discuter au cas par technique de Campos-Freire (appellation exacte du « Lich- cas. On peut aussi réaliser une opacification antégrade par Gregoir », supra-hiatal et extravésical pur) en termes de une néphrostomie, ou une urétéropyélographie rétrograde fistule urinaire ou de sténose, alors qu’il est rapporté au bloc opératoire sous anesthésie générale ou sédation plus de complications hémorragiques avec la technique contrôlée. Ainsi, lorsqu’il n’est pas contre-indiqué, la TDM du One-stitch [58,59]. De même, lors d’une anastomose injectée permet d’éviter les inconvénients traumatiques de urétéro-urétérale d’emblée, la technique doit être rigou- l’opacification antégrade et le risque infectieux de la cysto- reuse et doit s’attacher à implanter l’uretère natif le plus graphie rétrograde. haut possible sur le transplant, au mieux sur le pyélon (ana- Le traitement de la fistule vésicale consiste au maintien stomose pyélo-urétérale vraie) [54]. de la SV 2 à 3 semaines de plus. En cas d’échec, une reprise La sténose urétérale tardive, plus fréquente, concerne chirurgicale doit être réalisée. 2 à 7,5 % des transplants, est d’origine ischémique dans Le traitement de la fistule urétérale consiste souvent en l’énorme majorité des cas et survient dans 70 % des cas la mise en place d’une sonde urétérale. La reprise chirurgi- lors des 3 premiers mois [50,60—62]. Ce risque de sténose cale précoce doit se discuter par réimplantation urétérale augmente avec le temps pour passer de 2 % la première ou anastomose pyélo-urétérale avec l’uretère propre et année à 9 % à 10 ans [61]. Les autres causes sont une lym- suivant les conditions locales. Si l’anastomose était pyélo- phocèle compressive, une tumeur de la voie excrétrice, un urétérale d’emblée, il est parfaitement possible de réaliser calcul urétéral ou une fibrose rétropéritonéale. Les fac- une réfection chirurgicale complète de cette anastomose en teurs favorisants ces sténoses urétérales sont la présence veillant à ne pas se contenter du simple ajout de quelques d’artères multiples ou de reconstruction artérielle du trans- points séparés [54]. La chirurgie de la fistule urinaire doit, plant, l’âge élevé du donneur et du receveur, un RRF, un au mieux, se faire dans les 3 premières semaines car par rejet aigu, une infection à CMV ou à BK virus [60,61,63—65]. la suite, l’urinome chronique favorise l’apparition d’une Ces différents facteurs agiraient en détériorant la vascu- fibrose et les reprises chirurgicales à distance sont des chi- larisation urétérale [29]. Le BK Poliomavirus a été décrit rurgies compliquées à risque de lésion du pédicule vasculaire pour la première fois en 1971 chez un patient transplanté du transplant [50,55]. rénal avec une sténose urétérale [66]. Il infecte de manière La prévention des fistules urinaires passe par la préser- asymptomatique plus de 90 % des enfants et reste ensuite vation de la vascularisation urétérale et du tissu cellulaire latent dans l’urothélium toute la vie [67]. Une réactivation péri-urétéral [56]. Après le prélèvement, la vascularisation virale se produit chez 1/3 des patients transplantés sous urétérale ne provient que de l’artère rénale par le biais du l’action du traitement immunosuppresseur ce qui favorise
Complications chirurgicales de la transplantation rénale 1071 Figure 1. Arbre décisionnel. Stratégie thérapeutique schématique devant une fistule urinaire avérée. D’après Timsit et Neuzillet [19]. les complications liées à ce virus dont les sténoses urétérales l’uro-TDM est rarement réalisable compte tenu de la dégra- et les cystites hémorragiques. dation concomitante de la fonction rénale. Ainsi, le plus Après une anastomose urétérovésicale, la sténose est souvent, une urétéropyélographie rétrograde est réalisée soit anastomotique (80 % des cas), soit rétro-anastomotique mais l’intubation du néo-méat urétéral n’est pas toujours (trajet intra-mural), soit urétérale. Après anastomose pyélo- aisée en cas d’anastomose urétérovésicale et l’opacification urétérale première (technique de Necker) [54], la sténose des derniers centimètres urétéraux pas souvent imparfaite. peut être anastomotique, sur un siphon urétéral sous- Quant à l’opacification antégrade par néphrostomie, elle ne pyélique ou sur l’uretère natif du receveur (patients permet pas de visualiser l’uretère d’aval ; une cystogra- restés pendant de nombreuses années en dialyse sans phie concomitante est d’ailleurs utile pour évaluer la perte diurèse résiduelle). Le siphon sous-pyélique est la conjonc- de substance urétérale. Il est intéressant de noter que le tion d’un excès de longueur de l’uretère associée à une diagnostic de la sténose par UPR ne posera en revanche ptose du transplant par rapport à sa position initiale per- aucun problème si l’anastomose réalisée était une urétéro- opératoire [19]. Il n’existe aucune différence statistique urétérale. en termes de survenue de complications urologiques et Dans tous les cas, le drainage premier du transplant est la notamment de sténoses urétérales en fonction du type règle, que ce soit par une sonde double J ou une néphrosto- d’anastomose urinaire réalisée (urétérovésicale ou pyélo- mie. La difficulté des sténoses urétérales réside dans leur urétérale) [68]. prise en charge thérapeutique. En effet, la sonde double Le diagnostic clinique d’une sténose urétérale associe J posée de manière transitoire suffit rarement à la traiter, dans les cas le plus typique une insuffisance rénale aigue même si certains auteurs rapportent 60 % de guérison pour et une dilatation pyélocalicelle (DPC). L’anurie n’est pré- des sténoses peu serrées prises en charges précocement sente qu’en cas d’obstruction complète et d’absence de [69]. diurèse par les reins natifs. Parfois, la fonction rénale se En cas de sténose urétérale précoce, il est proposé de dégrade plus lentement avec une dilatation des cavités reprendre chirurgicalement l’anastomose pour sa réfection. rénales beaucoup moins franche ce qui peut poser des soucis En cas de sténose tardive, plusieurs options sont envisa- diagnostiques. geables : changements itératifs d’une sonde double J [70], Les examens radiologiques vont permettre au clini- traitement endoscopique ou reprise chirurgicale. La pre- cien de diagnostiquer et localiser la sténose urétérale. mière option, si elle permet de surseoir à une chirurgie L’échographie, qui a l’avantage de son innocuité, permet difficile et ainsi d’éviter un risque de transplantectomie de rechercher une DPC du transplant et peut être poten- éventuelle, doit être une solution de dernier recours en tialisée par une injection de furosémide si besoin. Une raison des nombreuses anesthésies nécessaires au fil des lymphocèle associée sera recherchée. La situation exacte années et surtout de l’altération du transplant secondaire de la sténose ainsi que sa longueur sont des éléments à des infections urinaires récidivantes ou des bactériuries importants pour décider des options thérapeutiques, mais peu symptomatiques.
1072 M.-O. Timsit et al. La deuxième option est un traitement endoscopique de forcement son utilisation en envisageant un traitement la sténose par dilatation, urétérotomie ou pose d’un stent secondaire de ce reflux ; urétéral. La dilatation au ballonnet seule donne des résul- • anastomose pyélo-urétérale, qui donne les meilleurs tats médiocres [71] avec un taux de succès allant de 0 à résultats [88]. La difficulté opératoire réside dans le 30 % à long terme [70,72,73]. Pour certains, les résul- repérage du pyélon du transplant qui peut être facilité tats varient de 44 à 62 % de succès au prix de plusieurs par la mise en place d’une néphrostomie préopératoire séances de dilatation [74—77]. Une seule étude a retrouvé (et injection peropératoire d’indigo-carmin) et part la des résultats supérieurs avec 81 % de réussite sur 52 patients lecture attentive de l’imagerie et du compte rendu opéra- traités par dilatation percutanée [78]. Les meilleurs résul- toire de la transplantation afin d’identifier la position du tats sont obtenus pour des sténoses courtes et peu pyélon par rapport au pédicule. Ainsi, certaines équipes serrées. inversent systématiquement le côté du tranpsplant : un L’incision de la sténose en complément de la dilatation, rein droit est placé en fosse iliaque gauche et réciproque- semble en améliorer le résultat [72]. Le système Acucise® ment afin de toujours placer le pyélon dans une position (Applied Medical) a été proposé avec un taux de succès de antérieure ; 61 à 83 % [79—81]. Le suivi moyen était de 14 à 27 mois mais • vessie psoïque et lambeau de Boari-Kuss : ces deux tech- les effectifs étaient trop faibles (3 à 6 patients) pour pou- niques, exceptionnelles, sont difficiles à réaliser si la voir valider cette technique. Les incisions à la lame froide vessie est rétractée comme cela peut être le cas chez ou au laser obtiennent de meilleurs résultats avec des taux les patients ayant passé de longues années en dialyse. de succès primaire allant de 63 à 100 % [82—87]. Les résul- L’utilisation du lambeau de Boari a été réalisée avec suc- tats doivent être pondérés par les très faibles effectifs des cès par Kroczak et al. [89]. Dix patients avaient une séries rapportées (6 à 14 patients), la combinaison, non sténose urétérale résistante à 4 procédures endosco- standardisée, des traitements associant dilatation et inci- piques en moyenne et ont tous bénéficié d’une reprise sion dans la même procédure et le recul très faible de ces chirurgicale par voie ouverte avec réalisation d’un lam- séries (4,7 et 8 mois en moyenne). Par ailleurs, les auteurs beau de Boari. Ils n’ont eu aucune récidive avec un recul retrouvent constamment une corrélation entre la longueur de 18 mois en moyenne. L’absence de montage anti-reflux de la sténose et le taux d’échec de la technique ; ainsi, ne semble pas altérer la fonction rénale à long terme [90] ; une longueur de la sténose supérieure ou égale à 1—1,5 cm, • anastomose pyélo-vésicale, calico-vésicale : ces anasto- est un facteur de récidive post-incision. Enfin, la mise en moses très rarement réalisées peuvent être la seule place d’un stent urétéral est controversée. Les résultats des alternative malgré le reflux dans le transplant et le risque derniers stents en essai actuellement (Allium Medical/GHW) infectieux ; dans plusieurs centres français devraient être connus pro- • urétéro-iléoplastie : c’est une solution de dernier recours chainement. Toute la question est leur place par rapport compte tenu des résultats aléatoires et du risque de à une chirurgie correctrice ouverte et leur devenir sur des fistule digestive pour des patients fragilisés et sous immu- transplants qui sont précieux avec une médiane de survie nosuppresseurs ; longue. • pontage extra-anatomique sous-cutané, par prothèse La dernière option thérapeutique est la reprise chirurgi- type Detour® . L’équipe de Madrid rapportait un seul suc- cale de la sténose avec de grandes difficultés de repérage cès sur trois patients à 32 mois (une infection et une anatomique dans la zone de fibrose attendue. La mise en obstruction par incrustation) [70]. L’équipe française avec place d’une sonde double JJ première peut être d’une aide le plus d’expérience de cette technique est celle de Saint- précieuse. Le risque de plaie vasculaire est rare mais réel. Louis qui publia une série de 7 patients avec un suivi Deux grandes voies d’abord sont possibles : soit une voie moyen de 6 ans ; le taux d’infection était de 47 %, avec médiane transpéritonéale, soit la voie iliaque de trans- un seul décès par choc septique [91]. plantation. La première permet une dissection plus facile Le traitement chirurgical de ces complications relève de de l’uretère natif, des vaisseaux iliaques, des vaisseaux centres experts et permet, dans l’idéal, de préserver le du transplant et l’utilisation (théorique) de l’uretère natif bénéfice de la transplantation sans impact négatif sur la controlatéral si besoin. La seconde est rarement une voie survie du transplant rénal [50,92]. rétropéritonéale pure et l’ouverture péritonéale permet d’être plus à l’aise. Cette voie permettrait un repérage faci- lité de l’uretère du transplant par rapport à la première Reflux vésico-urétéral ainsi qu’un décollement postérieur plus aisé (elle est ainsi L’incidence du reflux vésico-urétéral (RVU) est extrême- préférée lorsque le pyélon du transplant est postérieur au ment variable (10 à 80 %) et clairement sous-évaluée pédicule vasculaire). car sa recherche n’est pas systématique chez les patients Il existe plusieurs stratégies de correction chirurgicale de transplantés rénaux [29,93,94]. Seule la réalisation d’une la sténose urétérale : anastomose pyélo-urétérale d’emblée permet de l’éviter • réimplantation urétérovésicale si la sténose ne concerne [54]. Pour Ranchin et al., le taux de reflux était de 58 % que la portion intra-murale, avec un uretère de qualité et chez 55 enfants transplantés rénaux avec une cystogra- mobile en amont ; phie réalisée en médiane 8 mois après la transplantation • anastomose urétéro-urétérale terminoterminale ou ter- [95]. Le reflux semble être associé à la néphropathie chro- minolatérale sur l’uretère natif ipsilatéral. L’uretère natif nique d’allogreffe [95—101] mais l’altération de la survie du controlatéral peut théoriquement être utilisé en cas transplant rénal n’est pas démontrée pour les reflux asymp- d’uretère ispislatéral inutilisable ou absent. La présence tomatiques, contrairement aux reflux avec pyélonéphrites d’un reflux sur l’uretère natif ne contre-indique pas du transplant [102—104]. Le taux de patients avec un reflux
Complications chirurgicales de la transplantation rénale 1073 symptomatique oscille entre 0,8 et 3 %, d’où l’importance nombreux puisque l’utilisation d’une sonde urétérale per- d’une prise en charge optimale [29,95,105,106] et de la mettrait de [124] : recherche d’un RVU par cystographie rétrograde devant des • faciliter la réalisation technique de l’anastomose urété- infections urinaires fébriles ou des bactériuries récidivantes rale ; [107]. Le traitement repose en premier lieu sur une antibio- • lutter contre l’hyperpression en cas d’hyperdiurèse ; prophylaxie systématique [29], le traitement d’un éventuel • favoriser la cicatrisation des petites zones ischémiques obstacle sous vésical aggravant et, pour certains, la mise en urétérales ; route d’un traitement alpha-bloquant par analogie avec les • éviter les fuites anastomotiques minimes ; reflux pédiatriques [108]. • éviter une obstruction par œdème anastomotique ou Le traitement chirurgical de référence du RVU du compression extrinsèque par lymphocèle ou hématome. transplant est la réimplantation par voie ouverte avec d’excellents résultats (83 à 100 %) [109—111] mais des Néanmoins, la mise en place de cette sonde peut être à alternatives moins morbides ont été proposées comme les l’origine : • d’un inconfort voire d’une gène douloureuse ; injections sous muqueuses péri-méatiques. Dans la série • d’une obstruction urétérale iatrogène en cas de migration marseillaise, 58 patients transplantés rénaux (anastomose urétérovésicale extravésicale avec sonde double J sys- ou de mauvais positionnement proximal de la sonde ; • de complications hémorragiques par irritation ; tématique) symptomatiques ont bénéficié entre 2000 et • de complications infectieuses (corps étranger, reflux) ; 2010 d’une cure de RVU par injection endoscopique soit • de complications liées au BK virus [125] ; de dextranomer-hyaluronic acid (DX-HA, Deflux® ), soit de • du développement d’une fibrose péri-urétérale ou d’un polydimethylsiloxane (Macroplastique® ) [112]. Les auteurs rapportent 56,1 % de succès clinique (24 patients en 1 pro- calcul si son ablation est oubliée. . . [126] ; • d’un surcoût (coût de la sonde et de la consultation secon- cédure et 8 patients en 2 procédures) avec un suivi moyen de 38 mois et 26,4 % de succès radiologique (cystographie daire avec cystoscopie pour en réaliser l’ablation). à 3 mois). En analyse multivariée, le sexe masculin (OR : Les résultats publiés en 2013 d’une méta-analyse 5,3, IC95 % : 1,2—22,8, p = 0,025) et l’utilisation de DX-HA (7 études) de la Cochrane database analysant 1154 rece- (OR : 12,7, IC95 % : 1,9—84,4, p = 0,009) étaient des facteurs veurs, plaident en faveur de la pose d’une sonde double J prédictifs de réussite du traitement contrairement au grade [127]. La mise en place systématique d’une sonde double du reflux, à la quantité de produit injecté et au nombre J pendant une transplantation rénale permettait d’obtenir d’injections. Toutefois, d’autres auteurs estiment que le une réduction significative du risque de fistule urinaire (RR : grade du RVU est prédictif de succès clinique [113,114]. 0,24 ; IC95 % : 0,07—0,77 ; p = 0,02) au prix d’une aug- Les autres séries de la littérature retrouvent des taux de mentation du risque d’infection urinaire chez les patients succès clinique du polytetrafluoroethylene (Deflux® ) allant (RR : 1,49 ; IC95 % : 1,04—2,15). Le retrait précoce de la de 30 à 53 % [113,115] contre 79 à 85,7 % [116,117] avec sonde double J (avant 6 semaines) et l’utilisation prophylac- l’emploi de DX-HA, agent plus récent. La question de la tique de cotrimoxazole à la dose de 480 mg/jour, permettait durabilité du succès se pose puisque les moins bons résultats d’annuler le sur-risque infectieux. La réalisation d’une écho- sont rapportés dans la série ayant le plus long suivi [112]. graphie systématique à l’ablation de la sonde double J ne L’injection peut être réalisée une seconde fois si la correc- semble pas apporter de bénéfice [128]. tion du reflux est imparfaite par la première avec un risque non négligeable d’obstruction de l’anastomose urétérovési- cale [118]. Par ailleurs, pour Elder et al., en cas d’échec Lymphocèle post-transplantation de première injection, le taux de succès était de 68 % à la seconde injection et de 34 % à la troisième [114]. Définition Ce traitement endoscopique permet aussi, en profitant La lymphocèle est une collection liquidienne constituée de de l’anesthésie générale, de compléter le bilan de tout lymphe dans une cavité non épithélialisée uni- ou multi- l’appareil urinaire en réalisant une urétéropyélographie de compartimentée. La lymphocèle post-transplantation est l’uretère natif homolatéral au transplant pour s’assurer de située dans la loge de la transplantation (extrapéritonéale). sa possible utilisation dans un deuxième temps si la correc- Historiquement elle fût décrite pour la première fois après tion endoscopique ne fonctionne pas. chirurgie gynécologique dans les années 1950 [129] et en Une reprise chirurgicale de l’anastomose urétérovésicale 1969 en transplantation par Inocencio et al. [130]. Son inci- doit être réalisée en cas d’échec avec réalisation d’une ana- dence après transplantation rénale varie de 5 à 26 % selon stomose pyélo-urétérale ou urétéro-urétérale avec l’uretère les études, le caractère symptomatique et les méthodes natif s’il n’est pas refluant. Pour certains, cette correction diagnostiques utilisées [131]. Le délai d’apparition post- chirurgicale reste de première intention si le reflux est de opératoire varie de 2 semaines à 6 mois avec un pic de grade élevé (supérieur ou égal à 3) en raison des conséquen- fréquence observé aux alentours de 6 semaines [132]. La ces néfastes pour le transplant d’un reflux symptomatique. lymphocèle est le plus souvent asymptomatique et diag- nostiquée de manière fortuite par les écho-dopplers de suivi post-transplantation. La lymphocèle peut être symp- Sonde double J systématique ou à la tomatique par compression des structures adjacentes : voie demande ? excrétrice, vessie, pédicule du transplant. Elle peut éga- L’intérêt de la mise en place systématique d’une sonde lement être responsable de douleurs, d’augmentation du double J lors de la transplantation a été pendant très volume de la paroi abdominale, de la jambe et du scrotum, longtemps débattu [119—123]. Les avantages semblent de complications infectieuses et de thromboses veineuses
1074 M.-O. Timsit et al. profondes [133,134]. En cas de compression de la voie excré- trice, la lymphocèle peut conduire à une hydronéphrose avec altération de la fonction rénale du greffon mais elle est rarement responsables de la perte du transplant ou du décès du patient. Facteurs de risque Lors de la transplantation rénale, il existe deux origines à l’écoulement lymphatique : les chaînes lymphatiques péri- vasculaires des vaisseaux iliaques (disséqués pour permettre les anastomoses vasculaires) et les chaînes lymphatiques situées au niveau du hile rénal disséquées lors de la prépara- tion du transplant [135]. Il a été montré que la composition de la lymphe en créatine-kinase et en gamma glutamyl transpeptidase était différente selon son origine (rénale ou pelvienne) [136]. Ainsi les mesures enzymatiques réalisées dans une petite série de 8 patients ont permis de montrer une prédominance de lymphe d’origine du transplant dans la lymphocèle renforçant l’importance d’une préparation minutieuse du transplant [136]. D’autres facteurs de risque chirurgicaux ont été décrits notamment les dissections vasculaires étendues de l’axe iliaque, la lymphostase par électrocoagulation (absence de facteurs de coagulation suf- fisants et absence de plaquettes), la ligature incomplète des vaisseaux lymphatiques entraînant un écoulement perma- nent de lymphe [137]. La technique chirurgicale joue aussi un rôle dans le développement des lymphocèles. Sansalone et al. ont utilisé deux techniques chirurgicales différentes chez les patients ayant une première transplantation rénale [138]. Dans le premier groupe, ils anastomosaient le pédi- cule vasculaire du transplant aux vaisseaux iliaques externes et dans le second le groupe aux vaisseaux iliaques primi- tifs. Ils ont noté une fréquence moindre des lymphocèles Figure 2. Aspect échographique anéchogéne et cloisonné d’une dans le deuxième groupe (respectivement 2 et 8 %) [138]. lymphocèle post-transplantation rénale. Certains facteurs de risque médicaux ont aussi été rappor- tés [139]. Ainsi il a été mis en évidence une association entre diabète pré-transplantation et lymphocèle avec une • syndrome fébrile évoquant une complication infectieuse risque relatif de 2,03 [140]. Les épisodes de rejet aigu du de la lymphocèle ; transplant sont aussi associés à la survenue d’une lympho- • douleurs projetées au niveau du transplant par compres- cèle [139]. Certains immunosuppresseurs utilisés favorisent sion de l’uretère responsable d’une dilatation des cavités la survenue d’une lymphocèle comme la corticothérapie pyélocalicielles ; à forte dose [141], ou les inhibiteurs de mTOR [142,143]. • apparition d’une hypertension artérielle par compression D’autres facteurs interviennent dans l’apparition d’un lym- de l’artère du transplant ou par compression des vaisseaux phocèle comme l’administration d’héparine [135,144,145]. iliaques responsables d’œdème des membres inferieurs La formation de lymphocèle semble plus fréquente chez les ou de thromboses veineuses profondes. patients ayant reçu des injections sous-cutanées héparine Il peut aussi exister une symptomatologie digestive à type [145] et Kropfl et al. ont rapporté que les patients ayant de constipation ou de syndrome occlusif par compression reçus de l’héparine par voie sous-cutanée dans la cuisse pré- de la charnière recto sigmoïdienne en cas de lymphocèle sentaient plus de lymphocèles que les patients recevant leur importante. Des troubles mictionnels à type de dysurie injection au niveau du bras [146]. et de pollakiurie pouvant aller jusqu’à la rétention aiguë d’urine peuvent être observés en cas de compression Diagnostic vésicale. Le plus souvent la lymphocèle reste asymptomatique et sa Sur le plan biologique, on recherchera une dégradation découverte est fortuite, à l’occasion d’un contrôle radio- de la fonction rénale associée ou non à des troubles ioniques. logique du transplant. Il peut cependant exister différents L’évaluation du syndrome inflammatoire a également son tableaux cliniques révélateurs selon la taille et la localisa- importance dans un contexte septique. tion (responsable de compressions diverses sur les éléments Sur le plan morphologique, une échographie du trans- environnants) [147—149]. plant couplée à un doppler est réalisée en première Les principaux signes cliniques décrits sont : intention. Elle objectivera une structure anéchogéne • apparition d’une masse abdominale palpable autour du d’allure kystique, cloisonnée (Fig. 2). L’emplacement carac- transplant ; téristique, les contours lobulés et la nature kystique de la
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