COUR DES COMPTES La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments - Cour des ...

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COUR DES COMPTES

                                                                 La vente de patrimoine
                                                                 immobilier par
                                                                 la Régie des bâtiments

                                                                 Rapport de la Cour des comptes transmis
                                                                 à la Chambre des représentants

                                                                                Bruxelles, août 2006

Il existe aussi une version néerlandaise de ce rapport.
Er bestaat ook een Nederlandse versie van dit verslag.
Vous pouvez consulter ou télécharger ce rapport dans la langue
de votre choix sur le site internet de la Cour des comptes.

 dépôt légal     D/2006/1128/18
  imprimeur      N.V. PEETERS S.A.

    adresse      Cour des comptes
                 Rue de la Régence, 2
                 B-1000 Bruxelles
           tél   02-551 81 11
          fax    02-551 86 22
site internet    www.courdescomptes.be
COUR DES COMPTES

La vente de patrimoine
immobilier par
la Régie des bâtiments

Rapport de la Cour des comptes transmis
à la Chambre des représentants

Adopté en assemblée générale de
la Cour des comptes le 16 août 2006
Synthèse

              Au mois d’octobre 2000, le gouvernement fédéral a décidé de mettre en vente un
              certain nombre de bâtiments. Cette politique a été poursuivie les années suivan-
              tes. Les ventes avaient pour objectif d’assurer l’équilibre budgétaire et de dimi-
              nuer la dette de l’État. En outre, elles devaient également contribuer à une
              meilleure qualité de l’hébergement des agents de l’État.
              Jusqu’en 2004, les recettes totales des ventes réalisées se sont élevées à
              840.718.509 euros. Les bâtiments vendus étaient presque exclusivement des
              immeubles de bureaux utilisés par les administrations fédérales. Après la vente,
              60 % des espaces de bureaux vendus ont été repris en location à long terme.
              D’autres immeubles vendus ont été remplacés par de nouvelles locations, la plu-
              part du temps après une brève reprise en location ou occupation gratuite.
              La Cour des comptes a examiné les opérations immobilières sous trois angles :
              •       Du point de vue de la bonne gestion, elle a examiné comment les ventes
                      ont été préparées, quels critères de sélection ont été utilisés et si le prix
                      de vente correspondait aux estimations.
              •       En outre, la légalité des opérations de vente et de reprise en location a
                      aussi fait l’objet d’un examen.
              •       Enfin, la Cour des comptes a passé en revue le traitement budgétaire et
                      comptable des opérations.
              L’audit a révélé que le choix politique de remplacer des bâtiments dont l'État était
              propriétaire par des bâtiments loués n’a pas été effectué sur la base d’une éva-
              luation préalable de cette option à la lumière des objectifs suivants : d’une part,
              assurer l’équilibre budgétaire et diminuer la dette de l’État et, d’autre part, contri-
              buer à une meilleure qualité de l’hébergement des agents de l’État. La prise des
              décisions a manifestement privilégié l’objectif à court terme, à savoir l’équilibre
              budgétaire.
              Par ailleurs, les bâtiments gérés par la Régie n’ont pas été sélectionnés sur la
              base de critères explicites et pertinents par rapport aux objectifs fixés.
              Le prix de vente des bâtiments a presque toujours atteint au moins le montant de
              l’estimation préalable. Les estimations n’ont cependant pas toujours été suffi-
              samment étayées. Cette lacune résulte du caractère exceptionnel de certains
              bâtiments, parfois conjugué à l'urgence dans laquelle l’estimation a dû être réali-
              sée. Dans certains cas, le gouvernement a utilisé d’anciennes estimations pour
              apprécier les offres. Dans d’autres cas, il n’a pas été tenu compte de la reprise
              en location du bâtiment prévue par les autorités.
              Une comparaison entre les loyers contractés et les loyers payés par la Régie pour
              d’autres bâtiments qu’elle loue n’a pas révélé d’anomalie.
              Dans les quelques cas où la ‘valeur actuelle nette’ du loyer à payer a été compa-
              rée avec le prix de vente offert, les autorités ont toujours opté pour l’offre la plus
              avantageuse. Il ne peut toutefois pas être déduit de cette constatation que, dans
              tous les cas, les ventes se sont avérées une bonne opération pour l’État. La
              rentabilité des opérations de vente de bâtiments suivies immédiatement d’une
              reprise en location n’a été calculée que pour la Tour des Finances après la vente.
              Or, le calcul s’est basé sur des hypothèses qui, soit, se sont avérées erronées par
              la suite, soit étaient peu pertinentes.

La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006
En ce qui concerne les bâtiments qui, après la vente, ont été loués pour une courte
période parce qu’aucun hébergement de remplacement n’était encore disponible,
le loyer demandé pour ce court délai a constitué la plupart du temps une part
substantielle du prix de vente de sorte que ces ventes n’ont absolument pas été
rentables pour les autorités fédérales.
Certaines dispositions légales relatives à la compétence du législateur et aux
informations à lui fournir dans le cadre de la vente de patrimoine immobilier n’ont,
à ce jour, été que partiellement respectées.
Pour quelques ventes complexes, les autorités ont fait appel à un consultant privé.
Le marché initial passé avec le consultant a été étendu à deux reprises d’une
manière contraire à la réglementation relative aux marchés publics. Les dossiers
de paiement ne contiennent aucune justification du dépassement considérable, par
le consultant, des quantités présumées. Il n’a pas davantage pu être déduit com-
ment la Régie a contrôlé si les prestations du consultant avaient réellement été
effectuées.
Les ventes ont été enregistrées de manière correcte sur le plan comptable et
administratif. Le traitement budgétaire des opérations a également été effectué
conformément à la réglementation.
Comme principale recommandation, la Cour préconise l’organisation, préalable-
ment à la vente, d’une évaluation sérieuse de l’opération envisagée, telle qu’une
analyse des coûts et profits ou une analyse sur la base de plusieurs critères
(« analyse multicritère »).

               La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006
Table des matières

              Chapitre 1
                Introduction                                                                  7

                 1.1     Contexte                                                             7
                 1.2     Méthodologie d’audit                                                 8
                    1.2.1   Questions d’audit relatives aux dossiers de vente                 8
                    1.2.2   Questions d’audit relatives aux contrats de location              9
                 1.3     Procédure contradictoire                                             9

              Chapitre 2
                Ventes                                                                       10

                 2.1     Objectifs et préparation                                            10
                 2.2     Critères de sélection                                               13
                    2.2.1   Absence de critères clairs                                       13
                    2.2.2   Nature des bâtiments vendus                                      14
                    2.2.3   Critère financier                                                 15
                    2.2.4   Critère de l’entretien                                           15
                    2.2.5   Conclusion                                                       15
                 2.3     Respect de la réglementation                                        16
                 2.4     Prix de vente                                                       16
                    2.4.1   Estimations                                                      17
                    2.4.2   Prix de vente                                                    21
                    2.4.3   Conclusion                                                       21
                 2.5     Recours à un consultant pour les ventes                             22
                    2.5.1   Marché initial                                                   22
                    2.5.2   Extension du marché                                              22
                    2.5.3   Justification des prestations supplémentaires                     23
                    2.5.4   Conclusion                                                       25
                 2.6     Traitement administratif, comptable et budgétaire des ventes        25

              Chapitre 3
                Contrats de bail                                                             27

                 3.1     Comparaison du contrat de location avec les contrats
                         de location types de la Régie                                       27
                 3.2     Loyers                                                              27
                    3.2.1   Comparaison des loyers avec ceux d’autres locations
                            de la Régie                                                      27
                    3.2.2   Adaptation du loyer de la Tour des Finances                      27

La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006
Chapitre 4
  Rapport entre le prix de vente et le loyer                                       30

 4.1   Locations à court terme (sans obligation de rénovation)                     30
 4.2   Locations à long terme                                                      31
 4.3   Conclusion                                                                  33

Chapitre 5
  Conclusions et recommandations                                                   34

 5.1   Conclusions                                                                 34
 5.2   Recommandations                                                             35
 5.3   Réponse du ministre                                                         35

Annexe 1
  Inventaire des bâtiments mis en vente                                            36

Annexe 2
  Relevé des loyers dus en vertu des contrats                                      43

Annexe 3
  Lettre du ministre                                                               45

           La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006
Chapitre 1
              Introduction

              1.1     Contexte

              La Régie des bâtiments a été créée en 1971 en tant qu’organisme public fédéral de
              catégorie A et est actuellement placée sous la direction du ministre des Finances.
              La mission essentielle de la Régie des bâtiments consiste à héberger les services
              d’administration générale de l’État fédéral1. La Régie intervient à titre de maître
              d’ouvrage pour ces services ou loue des bâtiments à leur intention. Elle assure
              également l’entretien, incombant aux propriétaires, des bâtiments qui sont la pro-
              priété de l’État et gérés par elle.
              En exécution de cette mission, la Régie joue un rôle actif sur le marché immobi-
              lier. Elle achète des terrains et bâtiments ou loue des bâtiments nécessaires aux
              services d’administration générale. Elle vend les terrains et bâtiments qui ne sont
              plus utilisables.
              Le Conseil des ministres du 17 octobre 2000 a décidé qu’en 2001, la Régie des
              bâtiments devait entamer l’aliénation d’immeubles de bureaux. Ces activités ont
              été poursuivies en 2002, 2003 et 2004. Au total, 33 bâtiments (31 immeubles de
              bureaux, le château d’Argenteuil et un bâtiment historique situé sur la Graslei à
              Gand) et deux terrains, tous propriété de l’État, ont été vendus2. Un relevé com-
              plet de ces bâtiments figure en annexe 1.
              Quinze des 31 immeubles de bureaux ont été repris en location pour une longue
              durée – minimum neuf ans – au moment de la vente ou peu de temps après et huit
              ont été loués pour une courte période – moins de neuf ans3. Cinq bâtiments ont
              été vendus à condition que l’administration fédérale puisse encore les occuper
              gratuitement pendant une courte période ; trois bâtiments n’ont pas été loués.
              Neuf des quinze ventes accompagnées d’une reprise en location de longue durée
              prévoyaient une obligation de rénovation dans le chef du nouveau propriétaire.
              Les recettes totales réalisées grâce à la vente de propriétés de l’État se sont
              élevées à 659.042.889 euros.
              Par ailleurs, le gouvernement a aussi décidé de vendre quatre immeubles de bureaux
              qui avaient été transférés auparavant à la SA Sopima4. Il en a résulté des recettes
              supplémentaires de 181.675.620 euros. Avant la vente, ces bâtiments étaient loués
              par la Régie des bâtiments pour une longue durée. Après la vente, la location a
              simplement été reconduite. Le montant total des recettes de la vente de propriétés
              de l’État et de la SA Sopima s’est dès lors élevé à 840.718.509 euros.
              1
                  La Régie assure également l’hébergement d’un certain nombre d’institutions internationales. Elle
                  peut aussi être chargée de l’hébergement d’autres services publics, voire – sous certaines condi-
                  tions – de l’hébergement d’associations de droit privé. Les tâches de l’organisme sont définies aux
                  articles 2, 2 bis et 2 ter de la loi du 1er avril 1971 portant création d’une Régie des bâtiments.
              2
                  Initialement, le gouvernement avait l’intention de vendre davantage de bâtiments. Huit ventes
                  n’ont pas eu lieu soit parce qu’aucune offre intéressante n’avait été reçue, soit parce qu’il s’agis-
                  sait de copropriétés et que des contestations sont survenues au sujet de la clé de répartition, soit
                  parce qu’il existait des obstacles légaux.
              3
                  Le bâtiment historique situé sur la Graslei à Gand est également loué pour une courte période. En
                  ce qui concerne le bâtiment situé à la Blijde Inkomststraat à Louvain, la Régie prolongera proba-
                  blement, après les travaux de rénovation, le contrat de location initialement de courte durée par un
                  contrat de location d’une durée de 9 ans.
              4
                  La SA Sopima est une société immobilière créée par le gouvernement en 1996. Les actionnaires
                  sont l’État, la Société fédérale de participation et la Régie des bâtiments.

La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006                           7
1.2     Méthodologie d’audit

La Cour des comptes a examiné les opérations immobilières effectuées jusqu’en
2004 sous trois angles :
•        Bonne gestion : préparation et critères de sélection des bâtiments à vendre
         et adéquation du prix de vente et des estimations ;
•        Légalité : application des prescriptions légales en matière de ventes et
         détermination de la nature juridique exacte des contrats de location et exa-
         men complémentaire des opérations à la lumière des principes de bonne
         administration (et, plus particulièrement, du principe d’économie) ;
•        Angle budgétaire et financier : traitement des opérations sur les plans bud-
         gétaire, comptable et administratif.
Concrètement, l’audit vise à répondre aux questions suivantes.

1.2.1     Questions d’audit relatives aux dossiers de vente
1. Quels ont été les critères utilisés pour sélectionner les bâtiments destinés à
   être mis en vente ?

Pour examiner sur la base de quels critères les bâtiments ont été sélectionnés, un
inventaire a été dressé de tous les bâtiments qui ont été vendus au cours de la
période examinée et des caractéristiques communes éventuelles des bâtiments
vendus.
L’inventaire des bâtiments de la Régie a été consulté pour vérifier s’il n’existait
pas des bâtiments vides ou occupés par d’autres services que ceux de l’adminis-
tration fédérale. Le cas échéant, il a été examiné pourquoi ces bâtiments n’ont
pas été mis prioritairement en vente.
En outre, il a été examiné si des critères écrits ou explicités d’une autre manière
ont servi à sélectionner les bâtiments vendus.

2. Les bâtiments ont-ils été vendus dans le respect des prescriptions légales ?

Les ventes ont été examinées à la lumière de la législation réglant les ventes de
patrimoine public, notamment les articles 87 à 90 des lois coordonnées sur la
comptabilité de l’État.

3. Le prix de vente obtenu peut-il être qualifié de raisonnable ?

Le prix de vente a été comparé avec les estimations effectuées par les comités
d’acquisition5. Sur la base des dossiers d’estimation, il a été examiné quel était le
fondement de leur estimation. En cas de constat de divergences substantielles
entre l’estimation initiale et le prix final obtenu, il a été examiné s’il existait une
explication acceptable à cet égard. De même, lorsque l’estimation du comité
d’acquisition différait largement des prix du marché connus, une explication a été
recherchée.
Lors de l’analyse du prix de vente, il a été tenu compte, dans la mesure du pos-
sible, des conditions de location négociées pour les bâtiments repris en location.

5
    Pour toutes ses transactions immobilières, la Régie est tenue de faire appel aux comités d’acqui-
    sition du SPF Finances. Les comités d’acquisition estiment la valeur des bâtiments vendus, organi-
    sent la vente et passent les actes de vente devant le notaire.

8                  La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006
4. Comment les ventes ont-elles été traitées sur les plans budgétaire, comptable
                 et administratif ?

              Il a été examiné si les transactions ont été enregistrées correctement dans les
              comptes de la Régie des bâtiments et de l’État. Le traitement comptable a été
              examiné à la lumière des dispositions de la loi du 16 mars 1954 relative au contrôle
              de certains organismes d’intérêt public et de l’arrêté royal du 7 avril 1954 pris en
              exécution de la loi précitée, ainsi que des lois coordonnées sur la comptabilité de
              l’État et des techniques habituelles dans le cadre de la comptabilité en partie
              double.

              1.2.2    Questions d’audit relatives aux contrats de location

              1. Les contrats prévoient-ils une répartition équilibrée des avantages et
                 inconvénients ?

              Les contrats de location ont été examinés à la lumière des dispositions du Code
              civil et des contrats de location types qui sont normalement utilisés par la Régie.
              Lorsqu’il a été dérogé à ces contrats de location types – censés avoir été élabo-
              rés de manière équilibrée – la raison en a été recherchée.

              2. Le loyer prévu dans les contrats peut-il être qualifié de raisonnable ?

              Les loyers ont été comparés aux prix pratiqués sur le marché et aux prix moyens
              payés par la Régie. Quand des écarts importants ont été constatés, il a été exa-
              miné s’il existait une explication acceptable.
              Il a été analysé comment le montant définitif du loyer après travaux a été calculé sur
              une base contractuelle. Il s’agit, en l’occurrence, d’un examen purement descriptif.

              1.3     Procédure contradictoire

              L’audit a été annoncé le 3 mars 2004 au ministre des Finances, au directeur
              général de la Régie des bâtiments et au conseiller général du service Patrimoine
              de la Régie.
              L’audit a été exécuté au cours de la période d’avril 2004 à juin 2005.
              La Cour des comptes a pu compter sur la bonne collaboration de la Régie des
              bâtiments. Les comités d’acquisition concernés du SPF Finances ont été associés
              à l’audit, par la fourniture d’informations.
              L’avant-projet de rapport a été envoyé le 15 décembre 2005 à la Régie des bâti-
              ments. Un échange de vues avec des fonctionnaires généraux de la Régie a été
              organisé le 8 février 2006. À cette occasion, la Régie a fourni de nouvelles infor-
              mations pertinentes que la Cour des comptes a examinées et intégrées dans le
              présent rapport.
              Le 18 mai 2006, le projet de rapport a été envoyé, pour commentaire, au ministre
              compétent, en le priant de réagir dans le délai (légal) d’un mois. La Cour des
              comptes lui a rappelé ce document par une lettre du 28 juin 2006. Le ministre a
              envoyé ses commentaires par écrit le 27 juillet 2006.

La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006       9
Chapitre 2
Ventes

2.1     Objectifs et préparation

Le 17 octobre 2000, le Conseil des ministres a décidé de vendre un certain nom-
bre d’immeubles de bureaux au secteur privé. Les déclarations formulées après
les ventes par le ministre compétent font apparaître que celles-ci poursuivaient
un objectif double :
•       Les ventes devaient contribuer à assurer l’équilibre budgétaire et à résor-
        ber la dette de l’État. Elles s’inscrivaient ainsi dans le cadre de la politique
        budgétaire déjà entamée en 1996.
•       En outre, les ventes devaient permettre d’améliorer la qualité de l’héberge-
        ment de l’administration fédérale. La Régie des bâtiments disposait, selon
        le ministre, de moyens budgétaires structurels insuffisants pour financer
        de nouvelles constructions et des rénovations ainsi que pour entretenir les
        bâtiments. Une vente au secteur privé aurait pour effet d’assurer un entre-
        tien convenable des bâtiments, de manière à améliorer l’hébergement des
        agents fédéraux6.
Comme il apparaîtra ci-après, la décision de procéder à la vente en vue d’attein-
dre ces deux objectifs n’a pas été suffisamment étayée.
La décision prise en Conseil des ministres du 17 octobre 2000 de procéder à la
vente au secteur privé d’un certain nombre d’immeubles de bureaux et à la loca-
tion consécutive de ceux-ci a constitué un revirement dans la politique en matière
d’hébergement. Jusqu’en 2000, la location d’immeubles de bureaux représentait
une exception7.
La décision du 17 octobre 2000 a été prise à l’occasion de la confection du bud-
get pour l’année 2001. La note au Conseil des ministres ne contient aucune jus-
tification de la nouvelle politique immobilière et mentionne même expressément
que cette décision ne peut pas remettre en question les avantages à long terme
que présente la conservation de la propriété par l’État d’une partie importante
des immeubles de bureaux. La décision du Conseil des ministres ne s’appuie pas
sur une référence à une analyse des coûts et profits qui démontrerait que la loca-
tion s’avère, à terme, moins chère que la conservation de la propriété des bâti-
ments, ni sur une analyse des besoins de l’administration fédérale en matière
d’hébergement, ni encore sur toute autre forme d’information visant à soutenir
cette politique, telle qu’un inventaire du patrimoine immobilier, sa qualité et l’uti-
lisation qui en est faite.
Dans la note de politique générale relative au projet de budget pour l’année 2000
du ministre des Télécommunications et des Entreprises et Participations publi-
ques, chargé des Classes moyennes et compétent à l’époque pour la Régie des
bâtiments (dénommé ci-après : ministre des Entreprises publiques), cette modifi-
cation de la politique n’a pas été annoncée.

6
    Interpellation et réponse au sein de la commission de l’Infrastructure, des Communications et des
    Entreprises publiques de la Chambre des représentants du 14 octobre 2002.
7
    Après la création de la SA Sopima, les autorités fédérales avaient déjà transféré à cette société
    quelques immeubles de bureaux qu’elles avaient ensuite repris en location. Étant donné que la
    société est restée intégralement aux mains du pouvoir fédéral, la majeure partie des loyers lui
    revenait, sous la forme de dividendes distribués ou de réductions de capital.

10                 La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006
De même, sa note de politique générale concernant le projet de budget 2001 ne
              fait pas mention d’un renversement de tendance dans la politique. Cette note a
              été soumise à la Chambre des représentants le 6 novembre 2000, soit après la
              décision prise lors du Conseil des ministres du 17 octobre 2000. Or, elle ne men-
              tionne pas cette décision. Elle précise que les recommandations de « l’audit orga-
              nisationnel » (1993) visant à remplacer systématiquement les bâtiments pris en
              location par des bâtiments en propriété n’ont pas été mises en œuvre pour des
              raisons budgétaires. La note ne précise pas pourquoi cette recommandation ne
              serait plus applicable en 2001. Elle signale toutefois qu’en raison d’un manque
              chronique de moyens et d’outils de gestion, il est devenu impossible pour la Régie
              de satisfaire aux exigences modernes de gestion dynamique des actifs et de satis-
              faire au besoin de logement des administrations. La note de politique se termine
              par une référence à une décision de principe, prise par le Conseil des ministres du
              15 octobre 2000, qui scinde le patrimoine en deux segments : les bâtiments « dans
              le marché » et le « Patrimoine national ». Les bâtiments « dans le marché », surtout
              des bureaux, feraient l’objet d’une cession à une sicav immobilière pour laquelle
              une mise en bourse serait demandée8. Cette décision n’a pas été mise en œuvre
              à l’époque.
              Dans sa note de politique générale relative au projet de budget 2002, le ministre
              des Entreprises publiques mentionne uniquement que la Régie poursuivra sa
              « politique de vente ». Le produit de la vente des immeubles de bureaux serait
              partiellement utilisé pour la prise en location de nouveaux bâtiments fonctionnels.
              La note de politique générale est muette quant aux motifs pour poursuivre une
              telle politique de vente.
              La note de politique générale concernant le projet de budget pour l’année 2003
              précise également que la politique de vente sera poursuivie.
              Les notes de politique générale successives soumises par le ministre à la Chambre
              des représentants ne permettent donc pas de déduire quelle justification est à
              la base de la décision de dorénavant pourvoir aux besoins en hébergement de
              l’administration fédérale par le biais de locations.
              La même observation vaut pour les notes de politique générale concernant les
              projets de budget 2004 et 2005 du ministre des Finances, qui, dans le gouverne-
              ment actuel, est compétent pour la Régie des bâtiments. En l’occurrence, il s’agit
              naturellement de la poursuite d’une politique déterminée antérieurement.
              Les différentes notes de politique générale qui ont été soumises à la Chambre
              des représentants par les ministres compétents ne contiennent pas non plus de
              calcul des coûts qui résulteront directement de la vente de biens immobiliers9. La
              Cour des comptes a calculé l’impact des nouvelles prises en location sur les bud-
              gets futurs. Les calculs (effectués sur la base des loyers prévus dans les contrats)
              par bâtiment et par année budgétaire ont été repris dans des tableaux récapitu-
              latifs joints en annexe 2.

              8
                  Le texte néerlandais de la note de politique générale n’est pas clair. La version française permet
                  toutefois d’en déduire la signification. La décision précitée du Conseil des ministres du 17 octo-
                  bre 2000 ne fait pas référence à la décision du 15 octobre 2000.
              9
                  Les projets de budget de la Régie contiennent toujours une estimation des loyers qui devront être
                  payés au cours des années à venir. Cette « estimation pluriannuelle » ne contient toutefois qu’un
                  chiffre global et n’opère pas de distinction entre les loyers résultant d’une vente et les autres
                  loyers. Elle est, en outre, uniquement effectuée pour l’année budgétaire concernée et les trois an-
                  nées qui suivent. Les informations figurant dans la justification du budget, tel qu’actuellement
                  élaboré par la Régie chaque année, ne permettent donc pas de reconstituer les coûts engendrés
                  par les ventes.

La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006                       11
L’ancien ministre compétent pour la Régie des bâtiments a été interpellé à plu-
sieurs reprises au Parlement au sujet des opérations de vente. Dans ses répon-
ses, il a une seule fois fait référence à une analyse qui aurait été réalisée en vue
de préparer la vente de la Tour des Finances. Or, la seule analyse retrouvée à la
Régie concernait un calcul effectué après la vente de cet immeuble10.
L’audit effectué auprès de la Régie n’a pas révélé d’éléments indiquant que le
nouveau choix politique a été opéré sur la base d’une analyse de la manière la plus
efficace d’héberger les agents de l’État. Par ailleurs, la Régie ne dispose pas d’un
relevé systématique d’analyse de la qualité d’hébergement des agents. Au moment
où il a été décidé de faire vendre par la Régie une série d’immeubles de bureaux,
aucune norme de qualité relative à cet hébergement n’avait été définie11. Le calen-
drier de construction à moyen terme de 2001, qui était auparavant élaboré cha-
que année par la Régie – le « programme physique » – ne mentionne nullement la
nouvelle politique menée par le gouvernement. Pour autant qu’il ait pu être véri-
fié, la Régie n’a pas été priée d’examiner systématiquement si le patrimoine
qu’elle gérait contenait des bâtiments n’ayant plus aucune fonctionnalité pour
l’administration fédérale. La Cour des comptes n’a pas davantage trouvé d’indi-
cations selon lesquelles la Régie aurait été priée de vérifier s’il existait des bâti-
ments occupés par d’autres services que ceux de l’administration fédérale. Or,
les informations figuraient effectivement dans l’inventaire des bâtiments tenu par
la Régie. Cette dernière n’a apparamment pas été associée à la préparation de la
modification de la politique12.
La Régie signale qu’elle a dressé de sa propre initiative une telle liste, qu’elle a
transmise au comité permanent13 chargé d’accompagner les ventes. Cette liste
n’a pas servi, si ce n’est de manière limitée, à sélectionner les bâtiments destinés
à la vente. Selon la Régie, plusieurs de ces bâtiments n’étaient pas en état d’être
vendus.
De même, les notes soumises au Conseil des ministres par le ministre des Entre-
prises publiques ne contiennent pas non plus d’éléments à l’appui de la politique
menée. Ce n’est qu’à l’occasion du regroupement d’un certain nombre de SPF
qu’une analyse des coûts et profits limitée a été effectuée, comparant la reprise
en location de bâtiments avec le maintien en propriété de ces bâtiments. La déci-
sion de regrouper certains services de l’administration fédérale a toutefois été
prise après que le gouvernement a décidé de vendre un certain nombre d’immeu-
bles de bureaux. Dans quelques cas, la décision de regroupement a même résulté
de la vente d’immeubles de bureaux. L’analyse précitée de la vente de la Tour
des Finances ne peut pas être considérée comme un élément à l’appui de la poli-
tique menée, étant donné qu’elle a été réalisée après la vente.

10
     Pour un commentaire du calcul, voir le point 4.2.
11
     Le Conseil des ministres du 6 février 2004 a adopté un document décrivant la finition et l’aména-
     gement standards des immeubles de bureaux loués que la Régie met à la disposition de l’adminis-
     tration fédérale.
12
     Selon la Régie, le directeur général de l’organisme s’est concerté avec le ministre compétent en
     vue de commenter la nouvelle politique au sein de la commission de l’Infrastructure, des Commu-
     nications et des Entreprises publiques de la Chambre des représentants. Ces commentaires ont
     donc été donnés après la prise des décisions politiques.
13
     Pour assurer le suivi des ventes, il a été créé un comité permanent composé de représentants du
     cabinet du ministre des Finances et du ministre compétent, de la Régie des bâtiments, du service
     Domaines du ministère des Finances et du consultant. Pour certaines ventes, l’Inspection des
     finances a également participé au comité permanent. Des représentants de la Communauté
     flamande, de la Communauté française et de la Région wallonne, ont également assisté aux réu-
     nions relatives à la vente de la Cité administrative de l’État à Bruxelles, en tant que copropriétaires
     du bâtiment.

12                   La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006
Lors de l’audit, la Régie a souligné qu’on ne lui avait jamais demandé d’effectuer
              une analyse des coûts et profits. Elle devait uniquement exécuter une politique
              fixée par le gouvernement.
              La préparation insuffisante de l’opération de vente ressort également du fait que
              plusieurs bâtiments vendus ont dû être reloués pendant une courte période, parce
              qu’au moment de la vente, il n’y avait pas d’autres bureaux disponibles14.
              Dans un certain nombre de cas – Résidence Palace Bloc E, Cité administrative de
              l’État, rue Belliard 49/55 –, il s’agissait, selon la Régie, de grands complexes
              hébergeant de nombreux fonctionnaires. Le déménagement s’est en outre accom-
              pagné du regroupement de plusieurs administrations fédérales. Ces opérations
              complexes ont nécessité du temps et ont inévitablement posé des problèmes de
              coordination. La Régie estime que le fait que certains bâtiments aient dû être
              brièvement repris en location ne résultait pas d’une préparation peu rigoureuse,
              mais du caractère complexe des regroupements.
              La Cour des comptes est d’avis que, même si les opérations étaient complexes,
              rien n’empêchait le Conseil des ministres de n’approuver les ventes qu’une fois
              les regroupements terminés et les bâtiments libres.
               L’audit de la Cour des comptes fait apparaître que la décision politique de ven-
               dre une partie importante du patrimoine immobilier de l’État et de le relouer par
               la suite n’a pas été suffisamment étayée. L’audit n’a permis de retrouver aucune
               évaluation préalable de la décision. Le seul élément à la base de la décision
               serait apparemment un objectif budgétaire à court terme, à savoir la réalisation
               d’un équilibre budgétaire. En outre, le Parlement n’a pas été suffisamment
               informé de la décision et de ses conséquences budgétaires.

              La réponse du ministre fait l’objet du point 5.3.

              2.2      Critères de sélection

              2.2.1      Absence de critères clairs
              Aucun document n’a été trouvé à la Régie des bâtiments qui fixerait les critères
              à utiliser lors de la sélection des bâtiments qui seraient proposés à la vente.
              Pour autant qu’il ait pu être vérifié, la Régie n’a presque pas reçu d’instructions à
              cet égard du ministre compétent. Selon la Régie, il devait s’agir de bâtiments à
              rénover, en vue d’améliorer ainsi l’hébergement des fonctionnaires fédéraux, et/ou
              de grands complexes, générateurs de revenus importants. Ces critères, tels que
              « à rénover », n’ont jamais été précisés.
              Les dossiers de vente ou les notes de proposition de vente de bâtiments desti-
              nées au Conseil des ministres ne contiennent pas non plus de motivation explicite
              de la décision de vendre ces bâtiments et non d’autres. Les listes transmises à
              plusieurs occasions au Conseil des ministres comprennent uniquement une énu-
              mération des bâtiments proposés à la vente, la valeur vénale estimée de ceux-ci
              et les conditions de location (loyer et délai). Elles ne fournissent aucun détail au
              sujet de ces bâtiments, tels que la date de construction, l’état du bâtiment, l’exis-
              tence de plans de rénovation, etc., qui aurait pu intervenir utilement dans la déci-
              sion à prendre par le Conseil des ministres.
              14
                   Tel a été le cas pour les bâtiments suivants situés à Bruxelles : le Résidence Palace Bloc E, la Cité
                   administrative de l’État et les bâtiments situés rue Belliard 49/55, rue de la Loi 61/65 et le long
                   du canal de Willebroek. Il en a été de même pour les bâtiments de la Graslei à Gand et de la Blijde
                   Inkomststraat et Dagobertstraat à Louvain.

La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006                          13
2.2.2      Nature des bâtiments vendus
Au total, environ 882.687 m² de bâtiments dont l’État était propriétaire15 ont été mis
en vente. Dans la plupart des cas, il s’agissait d’immeubles de bureaux (857.073 m²).
Les ventes effectives ont porté sur 843.189 m² (95 %), dont 837.801 m² de surface
de bureaux.
En outre, 141.427 m² de bureaux, propriété de la SA Sopima, ont également été
mis en vente, dont 109.188 m² ont été effectivement vendus.
Les espaces autres que des bureaux qui ont été mis en vente comportaient un
bâtiment historique à Gand, un terrain à Bruxelles et un terrain à Gand, trois
centres de vacances16 et le château d’Argenteuil. Hormis le bâtiment historique à
Gand, il s’agissait dans tous les cas de bâtiments qui, au moment de la vente,
n’étaient plus d’aucune utilité pour l’administration fédérale.
Au moment de la vente, 829.954 m² (99,06 %) de la surface de bureaux vendue,
dont l’État était propriétaire, étaient occupés entièrement ou partiellement par
des services de l’administration fédérale ; 452.566 m² (54,02 %) ont été repris en
location pour une longue durée (minimum 9 ans), 360.886 m² (43,07 %) ont été
repris en location pour une courte période et 19.918 m² (2,38 %) sont restés occu-
pés gratuitement pendant quelques mois par l’administration ; 4.431 m² (0,53 %)
n’ont pas été loués.
Les bâtiments vendus dont la SA Sopima était propriétaire et qui étaient déjà
loués au moment de la vente ont tous fait l’objet d’une prolongation de la location
pour une longue durée (109.188 m²).
59,3 % de l’ensemble des bureaux vendus par l’État et par la SA Sopima peuvent
encore être utilisés pendant une longue période par l’administration fédérale17.
Les ventes suivies d’une courte reprise en location et d’occupations (gratuites)
précèdent, dans la majorité des cas, la location d’un nouveau bâtiment et le
déménagement vers celui-ci.
Un audit précédent de la Cour des comptes a constaté que la Régie des bâti-
ments héberge plusieurs associations privées18 dans des immeubles gérés par
ses services. Cet hébergement est souvent gratuit ou est assorti de loyers non
conformes aux prix du marché. La question se pose de savoir si une gestion
rationnelle du patrimoine ne présupposerait pas la vente de ces bâtiments-là
préalablement à ceux qui sont utiles à l’administration fédérale. Comme men-
tionné ci-dessus, la Régie a transmis un inventaire, dont il n’a guère été tenu
compte.
Il est opéré ci-après une distinction entre l’objectif budgétaire des opérations
immobilières (correspondant au critère financier) et l’objectif d’amélioration de
l’hébergement des agents fédéraux (correspondant au critère de l’entretien).

15
     Les surfaces ne sont pas calculées de manière uniforme. Tantôt c’est la surface « intra muros » qui
     est utilisée, tantôt la surface « extra muros », ou encore une nouvelle méthode de calcul : la « surface
     grand plateau (SGP) », qui donnerait un résultat moyen entre l’intra et l’extra muros. La différence
     entre la surface intra muros et la surface extra muros représenterait environ 7 %. La surface de
     bureaux vendue tient compte des surfaces figurant dans l’inventaire des bâtiments de la Régie
     (soit la surface « extra muros »).
16
     Les centres de vacances avaient auparavant été achetés en tant que centres d’accueil pour les
     demandeurs d’asile. Ils ont été vendus après la clôture de l’audit.
17
     Sur les 946.989 m² de bureaux vendus, 561.754 m² ont été loués pour une longue durée.
18
     La loi-programme du 15 janvier 1999 modifie la loi du 1er avril 1971 portant création d’une Régie
     des bâtiments de manière à lui permettre d’héberger des associations privées à condition de
     respecter un certain nombre d’exigences formelles. Les hébergements datent toutefois d’avant la
     modification de la loi et ne satisfont, à ce jour, pas aux exigences formelles imposées par la loi.

14                   La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006
2.2.3      Critère financier
              Étant donné que la Cour des comptes n’a pas pu obtenir les données relatives à
              la valeur moyenne des bâtiments gérés par la Régie, elle n’a pas pu examiner
              systématiquement si les bâtiments sélectionnés étaient précisément ceux qui
              étaient susceptibles de générer les revenus les plus importants19.
              Des entretiens tenus avec des membres du personnel de l’organisme qui avaient
              participé à la sélection des bâtiments ont permis de déduire que ce critère a joué
              un rôle important lors du choix. Ce fait est, en outre, confirmé par la constatation
              que les listes de vente comprennent également de grands complexes administra-
              tifs, qui avaient été construits assez récemment et n’avaient pas besoin d’être
              rénovés20.

              2.2.4      Critère de l’entretien
              D’autres bâtiments mis en vente datent d’avant 1990 et nécessitaient une réno-
              vation approfondie. Neuf bâtiments vendus, représentant une surface totale de
              317.438 m², ont ensuite été repris en location à long terme, le propriétaire étant
              tenu de rénover le bâtiment. Ces immeubles représentent 37,89 % de la surface
              de bureaux de l’État vendus et 70,14 % de la surface de bâtiments de l’État ven-
              dus avec reprise en location de longue durée. Pour deux autres bâtiments, des
              travaux moins importants ont été prévus21. Enfin, des travaux ont dû être effec-
              tués dans un bâtiment, en vertu d’un accord conclu le 30 janvier 2001 entre la
              Régie et la Région de Bruxelles-Capitale22.
              Il est possible que l’objectif que le gouvernement s’était fixé d’améliorer la qualité
              de l’hébergement des agents fédéraux puisse être atteint grâce à la vente de ces
              bâtiments, suivie d’une reprise en location avec obligation de rénovation dans le
              chef du nouveau propriétaire. Toutefois, étant donné que la Régie n’a pas effec-
              tué d’analyse des coûts et profits (voir point 2.1), il est impossible de donner une
              réponse fiable à la question de savoir si le coût des futurs loyers est inférieur au
              coût de l’entretien que les autorités auraient normalement dû supporter pour ces
              bâtiments.

               2.2.5     Conclusion
               L’audit n’a révélé aucun élément démontrant que la sélection des bâtiments mis en
               vente a été effectuée sur la base de critères explicités. La Cour des comptes n’a
               pas davantage trouvé d’indices que le ministre ait donné des instructions claires à
               l’administration précisant, d’une part, les modalités de sélection et, d’autre part,
               l’objectif prioritaire si les deux objectifs ne pouvaient pas être atteints conjointe-
               ment. Certaines indications portent à penser que le critère financier (objectif bud-
               gétaire) a été déterminant.

              19
                   Les chiffres figurant dans les comptes de la Régie concernant la valeur des bâtiments ne donnent
                   pas une image réaliste et fidèle de cette valeur. Cette situation résulte de la manière dont les
                   bâtiments doivent, selon le plan comptable de la Régie, être repris dans les comptes.
              20
                   Tel était le cas du bâtiment A.C. Ter Plaeten à Gand, des bâtiments situés à Bruges et Furnes, du
                   bâtiment Egmont à Bruxelles et des quatre anciennes propriétés de la SA Sopima.
              21
                   Entretien et/ou rénovation restreinte pour les bâtiments de Bruges et de Furnes.
              22
                   Le Résidence Palace bloc E à Bruxelles.

La vente de patrimoine immobilier par la Régie des bâtiments – Cour des comptes, août 2006                      15
2.3     Respect de la réglementation
Les bâtiments gérés par la Régie ne sont pas la propriété de l’organisme, mais
des autorités fédérales. Les articles 87 à 90 des lois coordonnées sur la compta-
bilité de l’État sont dès lors applicables aux ventes concernées. L’article 87,
alinéa 3, prévoit ce qui suit :
          « Sauf en cas de vente publique ou lorsque l’expropriation pour cause
          d’utilité publique a été légalement décrétée, les aliénations visées par le
          présent article et par les articles 88 et 89 qui concernent des biens dont
          la valeur estimative excède 50 millions francs23, sont soumises à l’appro-
          bation législative. »
Étant donné que, dans pratiquement tous les cas, il s’agissait d’une vente sous
seing privé24, le législateur devait approuver – a posteriori – les ventes dont le
montant dépassait le seuil précité.
La loi domaniale du 4 juillet 2004 a autorisé un certain nombre de ventes. D’autres
ventes doivent encore recevoir l’approbation législative. L’approbation est don-
née a posteriori, mais la loi ne prévoit aucun délai à cet effet.
L’article 90 des lois coordonnées sur la comptabilité de l’État dispose qu’« un
rapport sur les aliénations effectuées en vertu des articles 87 à 89 sera commu-
niqué à la Chambre des représentants chaque année lors du dépôt du projet de
budget des voies et moyens ». Le gouvernement n’a pas respecté cette obligation
lors du dépôt du budget des voies et moyens pour les années 2004 et 2005.

2.4      Prix de vente

La Cour des comptes a examiné si les bâtiments et terrains avaient été vendus à
un prix acceptable.
Tous les terrains et bâtiments, sauf deux, ont été vendus par le biais d’une pro-
cédure de gré à gré, après une large publicité. La procédure d’une offre « en
masse », c’est-à-dire une seule offre portant sur plusieurs bâtiments, avait été
autorisée moyennant certaines conditions. Pour quelque six ventes relativement
complexes, la Régie a décidé de confier l’évaluation et l’optimalisation des offres
à un consultant.
L’audit a démontré que, dans tous les cas, la vente avait été conclue avec le plus
offrant.
Lorsque la vente s’est accompagnée d’une reprise en location du bâtiment, il a
aussi fallu tenir compte des conditions de location négociées.
Lors des premières ventes assorties d’une reprise en location de longue durée –
Tour des Finances et bâtiment situé rue des Palais à Bruxelles– les offrants ont
pu proposer eux-mêmes les conditions de location. La Tour des Finances a été
vendue au plus offrant. La comparaison de l’offre et du calcul effectué par le
consultant de la valeur actuelle nette des futurs loyers révèle que le plus offrant
était également celui qui proposait les conditions les plus favorables. En ce qui
concerne la vente du bâtiment situé rue des Palais à Bruxelles, le plus offrant
proposait également les meilleures conditions de location.

23
     1.250.000 euros (AR du 20 juillet 2000 portant introduction de l’euro dans les arrêtés royaux qui
     relèvent du ministère des Finances et en exécution de la loi du 30 octobre 1998 relative à l’euro).
24
     Seuls les bâtiments situés boulevard Bischoffsheim et rue Van Orley à Bruxelles ont été vendus
     publiquement.

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