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     Pas de Modification 2.0 France (CC BY-NC-ND 2.0)

     http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr

                                                             KANTCHEFF
                                                        (CC BY-NC-ND 2.0)
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UNIVERSITE CLAUDE BERNARD-LYON I
                                   U.F.R. D'ODONTOLOGIE

Année 2013                                                      THESE N° 2013 LYO 1D 054

                                 THESE
         POUR LE DIPLOME D'ETAT DE DOCTEUR EN CHIRURGIE DENTAIRE

                  Présentée et soutenue publiquement le : 15 octobre 2013

                                             par

                                     KANTCHEFF Louis

                   Né le 28 novembre 1987, à Chamonix Mont-Blanc (74)

                                       _____________

             Intérêts des restaurations partielles adhésives en secteur antérieur

                                       ______________

                                            JURY

              M. MALQUARTI Guillaume                            Président

              Mme RICHARD Béatrice                              Assesseur

              M. VIGUIE Gilbert                                 Assesseur

              M. CHALEIL Romain                                 Assesseur

              M. HOUG Georges                                   Assesseur

                                                                            KANTCHEFF
                                                                       (CC BY-NC-ND 2.0)
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Intérêts des restaurations partielles adhésives

             en secteur antérieur

                                            KANTCHEFF
                                       (CC BY-NC-ND 2.0)
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UNIVERSITE CLAUDE BERNARD LYON I

Président de l'Université                                              M. le Professeur F-N. GILLY
Vice-Président du Conseil Scientifique                                 M. le Professeur P-G. GILLET
Vice-Président du Conseil des Etudes et de Vie Universitaire           M. le Professeur P. LALLE
Directeur Général des Services                                         M. A. HELLEU

                                                  SECTEUR SANTE

Comité de Coordination des Etudes Médicales            Président : Mme la Professeure C. VINCIGUERRA

Faculté de Médecine Lyon Est                           Directeur : M. le Professeur. J. ETIENNE

Faculté de Médecine et Maïeutique Lyon-Sud             Directeur : Mme la Professeure C. BURILLON
Charles Mérieux
Faculté d'Odontologie                                  Directeur : M. le Professeur D. BOURGEOIS
Institut des Sciences Pharmaceutiques et
Biologiques                                            Directeur : Mme la Professeure C. VINCIGUERRA

Institut des Sciences et Techniques de la              Directeur : M. le Professeur Y. MATILLON
Réadaptation

Département de Formation et Centre de                          Directeur : Mme la Professeure A.M. SCHOTT
Recherche en Biologie Humaine

                               SECTEUR SCIENCES ET TECHNOLOGIES

Faculté des Sciences et Technologies                   Directeur : M. le Professeur F. DE MARCHI

UFR des Sciences et Techniques des                     Directeur : M. le Professeur C. COLLIGNON
Activités Physiques et Sportives

Institut Universitaire de Technologie Lyon 1           Directeur : M. C. VITON, Maître de Conférences

Ecole Polytechnique Universitaire                      Directeur : M. P. FOURNIER
de l’Université Lyon 1

Institut de Science Financière et d’Assurances         Directeur : Mme la Professeure V. MAUME DESCHAMPS

Institut Universitaire de Formation des Maîtres        Directeur : M. A. MOUGNIOTTE
De l’Académie de Lyon (IUFM)

Observatoire de Lyon                                   Directeur : M. B. GUIDERDONI, Directeur de Recherche CNRS

Ecole Supérieure de Chimie Physique Electronique       Directeur : M. G. PIGNAULT

                                                                                             KANTCHEFF
                                                                                        (CC BY-NC-ND 2.0)
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FACULTE D'ODONTOLOGIE DE LYON
Doyen          :                M. Denis BOURGEOIS, Professeur des Universités

Vice-Doyen     :                Mme Dominique SEUX, Professeure des Universités

SOUS-SECTION 56-01:                    PEDODONTIE

Professeur des Universités :           M. Jean-Jacques MORRIER
Maître de Conférences :                M. Jean-Pierre DUPREZ

SOUS-SECTION 56-02 :                   ORTHOPEDIE DENTO-FACIALE

Maîtres de Conférences :               M. Jean-Jacques AKNIN, Mme Sarah GEBEILE-CHAUTY,
                                       Mme Claire PERNIER, Mme Monique RABERIN

SOUS-SECTION 56-03 :                   PREVENTION - EPIDEMIOLOGIE
                                       ECONOMIE DE LA SANTE - ODONTOLOGIE LEGALE

Professeur des Universités             M. Denis BOURGEOIS
Maître de Conférences                  M. Bruno COMTE

SOUS-SECTION 57-01 :                   PARODONTOLOGIE

Professeur des Universités Emérite :   M. Jacques DOURY
Maîtres de Conférences :               Mme Kerstin GRITSCH, M. Pierre-Yves HANACHOWICZ,
                                       M. Philippe RODIER,

SOUS-SECTION 57-02 :                   CHIRURGIE BUCCALE - PATHOLOGIE ET THERAPEUTIQUE
                                       ANESTHESIOLOGIE ET REANIMATION

Maître de Conférences :                Mme Anne-Gaëlle CHAUX-BODARD, M. Thomas FORTIN,
                                       M. Jean-Pierre FUSARI

SOUS-SECTION 57-03 :                   SCIENCES BIOLOGIQUES

Professeur des Universités :           M. J. Christophe FARGES
Maîtres de Conférences :               Mme Odile BARSOTTI, Mme Béatrice RICHARD,
                                       Mme Béatrice THIVICHON-PRINCE, M. François VIRARD

SOUS-SECTION 58-01 :                   ODONTOLOGIE CONSERVATRICE - ENDODONTIE

Professeur des Universités :           M. Pierre FARGE, M. Jean-Christophe MAURIN, Mme Dominique SEUX
Maîtres de Conférences :               Mme Marion LUCCHINI, M. Thierry SELLI, M. Cyril VILLAT

SOUS-SECTION 58-02 :                   PROTHESE

Professeurs des Universités :          M. Guillaume MALQUARTI, Mme Catherine MILLET
Maîtres de Conférences :               M. Christophe JEANNIN, M. Renaud NOHARET, M. Gilbert VIGUIE,
                                       M. Stéphane VIENNOT, M. Bernard VINCENT

SOUS-SECTION 58-03 :                   SCIENCES ANATOMIQUES ET PHYSIOLOGIQUES
                                       OCCLUSODONTIQUES, BIOMATERIAUX, BIOPHYSIQUE,
                                       RADIOLOGIE

Professeur des Universités :           M. Olivier ROBIN
Maîtres de Conférences :               M. Patrick EXBRAYAT, Mme Brigitte GROSGOGEAT,
                                       Mme Sophie VEYRE-GOULET

                                                                                       KANTCHEFF
                                                                                  (CC BY-NC-ND 2.0)
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A notre président du jury,

Monsieur le Professeur Guillaume MALQUARTI

Professeur des Universités à l'UFR d'Odontologie de Lyon
Praticien-Hospitalier
Docteur en Chirurgie Dentaire
Docteur de l'Université Lyon I
Chef de Service du Service d'Odontologie de Lyon
Habilité à Diriger des Recherches

Nous vous sommes reconnaissants de nous faire l’honneur de présider notre jury.

Nous vous remercions de votre bienveillance et de votre disponibilité que vous
accordez années après années aux étudiants.

Veuillez trouver dans ce travail l’expression de nos sincères remerciements et le
témoignage de notre profond respect.

                                                                                     0

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                                                                      (CC BY-NC-ND 2.0)
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A notre juge,

Madame le Docteur Béatrice RICHARD

Maître de Conférences à l'UFR d'Odontologie de Lyon

Praticien-Hospitalier

Docteur en Chirurgie Dentaire

Docteur de l'Université Bordeaux 2

Nous vous remercions de l’honneur que vous nous faites en acceptant de siéger
parmi nos juges.

En travaillant sous votre direction, nous avons grandement apprécié votre
disponibilité et votre gentillesse. Nous sommes reconnaissants de l’intérêt que vous
portez aux étudiants par votre présence et votre accompagnement.

Nous vous prions de croire en notre profonde gratitude.

                                                                                     1

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A notre juge,

Monsieur le Docteur Gilbert VIGUIE

Maître de Conférences à l’UFR d’Odontologie de Lyon
Praticien-Hospitalier
Docteur en Chirurgie Dentaire
Docteur de l’Université Lyon I
Responsable de la sous-section Prothèses

Vous nous faites un très grand honneur en acceptant de juger notre travail.

Les circonstances ne nous ont pas permises de travailler sous votre encadrement,
mais nous vous remercions du sérieux et de la qualité de votre enseignement.

Veuillez trouver en cette thèse le témoignage de notre sincère gratitude et de notre
profond respect.

                                                                                       2

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A notre juge et directeur de thèse,

Monsieur le Docteur Romain CHALEIL

Assistant hospitalo-universitaire au CSERD de Lyon
Docteur en Chirurgie Dentaire

Nous vous remercions d’avoir accepté de diriger cette thèse. Nous avons
grandement apprécié votre encadrement, l’enthousiasme et l’intérêt que vous avez
portés à son élaboration.

Vous avez su nous guider dans l’exercice de notre art avec passion, sérieux et
bienveillance.

Nous vous sommes reconnaissants pour votre ouverture d’esprit et votre
disponibilité.

                                                                                     3

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A notre juge,

Monsieur le Docteur Georges HOUG

Docteur en Chirurgie Dentaire

Nous sommes très sensibles à l’honneur que vous nous faites en acceptant de siéger
parmi nos juges.

L’exercice sous votre direction a toujours été un plaisir. Nous vous assurons du bon
souvenir que nous garderons de votre enseignement, de votre rigueur et de votre
sympathie.

Veuillez trouver dans ce travail, l’expression de notre dévouement le plus sincère.

                                                                                      4

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SOMMAIRE
Introduction ......................................................................................................................... 3
Ière Partie : Prérequis à la restauration prothétique du secteur antérieur
1. La dentisterie esthétique ................................................................................................... 5
   1.1. Définition ................................................................................................................... 5
   1.2. La demande esthétique ............................................................................................... 5
   1.3. Normes morphologiques ............................................................................................ 6
      1.3.1. Introduction ......................................................................................................... 6
      1.3.2. Analyse du visage ................................................................................................ 7
      1.3.3. Examen du sourire .............................................................................................. 7
      1.3.4. Composition dentaire et gingivale ...................................................................... 8
2. Approche biomimétique de la restauration du secteur antérieur .................................... 10
   2.1. Biomimétisme et bioémulation : une « nouvelle » approche ................................... 10
   2.2. Analyse de l’organe dentaire ................................................................................... 10
      2.2.1. Etude histo-anatomique de la dent naturelle ..................................................... 10
      2.2.2. Propriétés du complexe amélo-dentinaire ......................................................... 14
      2.2.3. Configuration tridimensionnelle de l’émail et de la dentine ............................. 14
      2.2.4. Biomécanique de l’organe dentaire .................................................................. 15
3. Processus décisionnel lors de réhabilitations antérieures ............................................... 21
   3.1. Le gradient thérapeutique ........................................................................................ 21
   3.2. Le concept du volume de restauration ..................................................................... 22
      3.2.1. Facteurs structurels ........................................................................................... 22
      3.2.2. Facteurs esthétiques ........................................................................................... 23
      3.2.3. Facteurs parodontaux ....................................................................................... 24

IIème partie : Restaurations partielles adhésives en secteur antérieur
1. Les restaurations adhésives directes en résines composites ........................................... 26
   1.1. Indications cliniques ................................................................................................ 26
   1.2. Sélection des matériaux composites antérieurs ........................................................ 27
      1.2.1. Cahier des charges............................................................................................. 27
      1.2.2. Classification des résines composites ............................................................... 28
   1.3. Restauration antérieure par stratification de résine composite ................................. 29

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                                                                                                                 (CC BY-NC-ND 2.0)
1.3.1. La couleur des dents naturelles ......................................................................... 30
      1.3.2. Détermination de la carte chromatique ............................................................. 32
      1.3.3. Analyse de la forme de la dent .......................................................................... 33
      1.3.4. Réalisation de la préparation ............................................................................ 34
      1.3.5. Protocole adhésif ............................................................................................... 35
      1.3.6. Application du concept de stratification ........................................................... 36
      1.3.7. Polissage et finition ............................................................................................ 41
   1.4. Pronostic et longévité ................................................................................................ 41
2. Restaurations adhésives indirectes du secteur antérieur ................................................. 43
   2.1. Les matériaux de restauration : résines composites et céramique ........................... 43
      2.1.1. Les restaurations adhésives en résines composites ........................................... 43
      2.1.2. Les restaurations adhésives en céramique ........................................................ 45
   2.2. Principales indications cliniques .............................................................................. 46
      2.2.1. Dents réfractaires au blanchiment .................................................................... 46
      2.2.2. Modifications morphologiques majeures .......................................................... 47
      2.2.3. Restaurations de grande étendue ...................................................................... 47
   2.3. Critères décisionnels ................................................................................................ 47
      2.3.1. Surface de préparation dans l’émail ................................................................. 47
      2.3.2. Présence de restaurations en résines composites .............................................. 48
      2.3.3. Quantité de céramique non supportée ............................................................... 48
      2.3.4. Rapports occlusaux ............................................................................................ 49
      2.3.5. Limites de préparation cervicales des restaurations adhésives en céramique .. 49
      2.3.6. Variation de la couleur ...................................................................................... 49
   2.4. Méthodologie opératoire des restaurations adhésives céramiques ........................... 50
      2.4.1. Validation du projet thérapeutique .................................................................... 50
      2.4.2. Préparation tissulaire ........................................................................................ 52
      2.4.3. Empreintes et transfert des données .................................................................. 54
      2.4.4. Facettes provisoires ........................................................................................... 56
      2.4.5. Essai clinique et mise en œuvre du collage ........................................................ 56
   2.5. Comportement clinique et longévité ........................................................................ 61
Conclusion .......................................................................................................................... 64
Bibliographie ...................................................................................................................... 65

                                                                                                                                      2

                                                                                                                      KANTCHEFF
                                                                                                                 (CC BY-NC-ND 2.0)
INTRODUCTION

La restauration des dents antérieures s’est récemment développée grâce aux progrès de la
dentisterie adhésive, notamment par l’amélioration globale des propriétés mécaniques et
esthétiques des matériaux composites et céramiques et des systèmes adhésifs actuels. Cette
pratique s’inscrit dans le concept moderne de dentisterie à minima, favorisant la
préservation tissulaire et le biomimétisme des restaurations.

Les restaurations partielles adhésives directes en résine composite, ou indirectes, comme
les restaurations adhésives en céramique, ou facettes, entrent pleinement dans cette
démarche. En se distinguant des restaurations coronaires périphériques, ou couronnes, elles
permettent de répondre à l’augmentation contemporaine de la demande de la part des
patients de soins concernant des problèmes esthétiques.

Nous verrons en première partie que les restaurations partielles adhésives directes et
indirectes sont soumises à des impératifs esthétiques, biologiques, biomécaniques et
fonctionnels indissociables. La première étape de tout traitement du secteur antérieur, en
considérant la demande du patient, est de procéder à une analyse esthétique et
fonctionnelle permettant d’établir un plan de traitement adapté pour parvenir aux objectifs
thérapeutiques. La structure et le comportement de la dent naturelle, considérée comme la
référence en dentisterie restauratrice, seront ensuite étudiés. La connaissance histologique
et biomécanique des tissus de l’organe dentaire est fondamentale au processus décisionnel,
celui-ci suivra naturellement une démarche de préservation tissulaire.

A la lumière de ces considérations, les différents types de restaurations, leurs indications et
leurs protocoles, ainsi que le choix des matériaux et les techniques disponibles dans le
cadre des restaurations adhésives des dents antérieures seront étudiés. L’analyse de ces
éléments permettra au praticien d’établir une démarche raisonnée et d’adapter sa
thérapeutique à la situation clinique présente.

                                                                                              3

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                                                                               (CC BY-NC-ND 2.0)
Première Partie

  Prérequis à la restauration
prothétique du secteur antérieur

                                          4

                                KANTCHEFF
                           (CC BY-NC-ND 2.0)
1. La dentisterie esthétique

       1.1. Définition

Le terme « esthétique » qualifie ce qui se rapporte à la connaissance ou au sentiment du
beau, à sa perception, il possède une double racine, latine aesthetica, la « science du
beau », et grecque aisthêtikos, « qui a la faculté de sentir, pouvant être perçu par les sens »
(1). L’esthétique est à distinguer de la « cosmétique », venant du grec kosmêtikos, qui est
« relatif à la parure ». L’objectif de la dentisterie esthétique est de restaurer la beauté
naturelle de la bouche et du visage, et l’adjectif utilisé indique une qualité ressentie plus
profondément que superficiellement (2).

       1.2. La demande esthétique

Evaluer les attentes du patient est l’étape préliminaire à tout traitement, le praticien doit
pour cela être à son écoute et établir une relation de confiance. Un entretien confidentiel
avec le patient, avant qu’il ne soit assis sur le fauteuil, doit lui permettre d’exprimer
clairement sa demande. (3). C’est l’occasion pour le praticien d’effectuer une approche
psychologique du patient, en gardant à l’esprit que tout traitement est individualisé, adapté
et unique pour chaque situation clinique.

Les demandes d’intervention pour des raisons esthétiques sont nombreuses et variées, mais
trouvent souvent un même fondement dans l’impact que l’esthétique a sur le plan social :
le sourire, qui s'intègre dans le visage, devient un véritable passeport social, une carte
d'identité avec laquelle, quelques soient ses défauts ou ses qualités, nous sommes forcés de
communiquer (2).

Cette dimension esthétique devient indissociable de cet impératif vital qu'est la
communication et vient faire évoluer le rôle du chirurgien-dentiste, qui n'est plus un
personnage effrayant, mais plutôt un soignant qui restaure le sourire, améliorant la qualité
de vie et la valorisation de l'image de soi aussi bien personnelle que relationnelle (4).

                                                                                               5

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                                                                                (CC BY-NC-ND 2.0)
Le clinicien s’interrogera également sur les origines et les justifications de la demande du
patient. Influencé par les flots permanents d’image de visage idylliques, de bouches
merveilleuses aux dents bien alignées prodiguées par la télévision, les affiches
publicitaires, les magazines féminins, le patient peut essayer de s’apparenter à ces canons
de beauté médiatisés servant de référence, instaurant des critères esthétiques « standard ».
L’insatisfaction alors ressentie vis-à-vis de son corps et vis-à-vis de soi peut susciter un
désir de changement caractérisant le plus souvent la demande esthétique. Il est du rôle du
praticien d’éviter l’uniformisation de ses traitements convergeant vers ce modèle idéal
symbolisant la beauté, et de s’adapter à la personnalité de son patient. (2)

Le praticien doit pouvoir être en mesure de discerner l’origine du désir d’intervention, et
situer l’apparition, l’ancienneté et la justification du désir d’intervention. Une fois le
traitement achevé, les transformations réalisées peuvent être mal vécues par le patient. Une
mauvaise prise en compte de l’intégration psychologique du patient à sa nouvelle image,
même lorsque le résultat est techniquement excellent, peut aboutir à un échec pour le
patient (2). Une éventualité que l’on peut rencontrer lors de troubles psychologiques ou
d’anxiété existentielle, comme le cas de la dysmorphophobie, qui est caractérisée par des
préoccupations excessives liées à un défaut physique léger ou imaginaire, et peut être à
l’origine d'une détérioration de la vie sociale, personnelle et professionnelle de l’individu
(5).

Cette approche psychologique permet de prendre connaissance du caractère et du style de
vie propre à chaque patient. Afin que le patient retrouve un sourire harmonieux, ces
facteurs subjectifs seront pris en compte lors de l’étude esthétique conjointement à
l’analyse plus objective des critères morphologiques. (6)

       1.3. Normes morphologiques

               1.3.1. Introduction (2, 3, 7)

La restauration des dents antérieures est un traitement soumis à des critères fonctionnels et
esthétiques, et doit s’intégrer en harmonie avec le sourire, le visage et plus globalement
avec l’individu. Bien entendu, il est difficile de parler et de quantifier la beauté naturelle de
la bouche et du visage. Bien que certains individus ai un sens inné de l’esthétique, pour

                                                                                               6

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                                                                                (CC BY-NC-ND 2.0)
d’autres le respect de certaines règles, d’une méthodologie, est essentiel pour réaliser des
restaurations de manière harmonieuse avec des résultats réguliers, reproductibles et
prévisibles.

Au début du traitement, le recueil des informations anatomiques, morphologiques et
esthétiques du patient, lors d’une consultation spécifique avec radiographies,
photographies, empreintes d’étude coulées et montées sur articulateur, est nécessaire pour
établir un diagnostic correct et constituer un plan de traitement aboutissant aux objectifs
thérapeutiques. Un enregistrement vidéo du patient pendant la lecture d’un texte permet de
visualiser la dynamique des expressions du visage.

                1.3.2. Analyse du visage (2, 3)

L’étude esthétique du patient passe par une observation attentive du visage, de face et de
profil. L’objectif de l’analyse du visage est de restaurer le parallélisme du plan d’occlusion
et des lignes de référence, de rétablir la hauteur du tiers inférieur de la face et de retrouver
une dominance du secteur antérieur en accord avec le profil et les lèvres du patient.

                VUE DE FACE                                        VUE DE PROFIL
LIGNES HORIZONTALES DE RÉFÉRENCE                     LIGNE E, ANGLE NASO-LABIAL
 Rétablir le parallélisme du plan occlusal et des    Modifier l’arrangement dentaire sans interférer
lignes interpupillaire et commissurale               sur l’espace d’activité musculaire

LIGNE VERTICALE DE RÉFÉRENCE                         PROFIL CONCAVE, LÈVRES ÉPAISSES
 Ne pas tenir compte de l’asymétrie par rapport à  Rétablir la dominance marquée des dents
la ligne médiane de la face                         antérieures
 Rétablir la verticalité de la ligne interincisive
PROPORTIONS DE LA FACE                               PROFIL CONVEXE, LÈVRES FINES
 Rétablir une dimension verticale correcte pour      Rétablir une dominance modérée des dents
recréer une hauteur adéquate du tiers inférieur de   antérieures
la face
Tableau 1 : Considérations prothétiques pour une réhabilitation esthétique lors de l’analyse
de la face, (M. FRADEANI, 2006 (3)).

                1.3.3. Examen du sourire (2, 3, 6)

Le praticien évaluera ensuite l’exposition des dents au repos et pendant l’élocution du
patient, en observant le mouvement des lèvres lors du sourire, dans les plans frontal,
sagittal et horizontal.

                                                                                                         7

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                                                                                       (CC BY-NC-ND 2.0)
EXPOSITION DES DENTS AU REPOS           Rétablir une exposition des entre 1 et 5 mm selon la
                                        hauteur des lèvres, le sexe et l’âge

 LIGNE DU SOURIRE      Haute  Si possible, idéaliser la ligne des collets (orthodontie, chirurgie)
                              Assurer l’intégration biologique des restaurations dont les bords             
                             cervicaux sont sous-gingivaux

                       Basse     Eviter les traitements multidisciplinaires complexes pour
                                idéaliser la ligne des collets
                                 Donner priorité, si possible, aux bords cervicaux supragingivaux

 BORDS INCISIFS     Courbe incisive  Rétablir une courbe incisive convexe, parallèle à la lèvre
                                    inférieure

                    Profil incisif     Garder le profil incisif à l’intérieur du bord vermillon de la
                                      lèvre inférieure

 PLAN OCCLUSAL       Rétablir le parallélisme du plan occlusal, des lignes bipupillaire et
                    commissurale et des lignes horizontales

 CORRIDOR LABIAL  Restaurer le corridor labial
                  Rétablir l’inclinaison des dents postérieures
                  Idéaliser la progression du sourire

 LARGEUR DU SOURIRE       Evaluer le nombre de dents exposées
                          Sélectionner les matériaux et techniques les mieux appropriés pour
                         optimiser l’esthétique des secteurs antérieurs

 SYMÉTRIE DU SOURIRE  Rétablir la verticalité de la ligne interincisive
                      Ne pas tenir compte d’un écart éventuel avec la ligne médiane faciale

 EPAISSEUR DES LEVRES  Harmoniser la taille et la forme des dents antérieures avec la forme et
                      l’épaisseur des lèvres

Tableau 2 : Considérations prothétiques pour une réhabilitation esthétique lors de l’analyse
du sourire. (2, 3, 6)

               1.3.4. Composition dentaire et gingivale (2, 3, 6, 7)

Les dimensions esthétiques des dents et de la gencive sont déterminées par certains critères
objectifs fondamentaux et agissent ensemble sur l’harmonie et l’équilibre du sourire. La
morphologie et la santé gingivale ont un rôle important dans l’esthétique globale, surtout
chez les patients dont la ligne du sourire est moyenne ou haute, et font partie des premiers
paramètres à évaluer, avant la forme et l’arrangement des dents.

                                                                                                         8

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                                                                                     (CC BY-NC-ND 2.0)
C’est pourquoi le succès esthétique des restaurations antérieures repose sur des principes
fondamentaux ne se limitant pas simplement aux tissus dentaires mais intégrant les tissus
gingivaux dans une réhabilitation en harmonie avec le sourire, la face et la personnalité du
patient.

Le recueil de ces informations est effectué avec une certaine méthodologie, M.
FRADEANI propose d’utiliser une « check-list esthétique » (3), comme P. MAGNE (7) ;
JC. PARIS et AJ. FAUCHER conseillent l’emploi d'un « guide esthétique » (2). Bien que
les procédés ne soit pas exactement les mêmes, cette démarche reste essentielle pour le
recueil des données esthétiques et permet une meilleure communication avec le laboratoire
de prothèse et le patient.

Les restaurations esthétiques sont des répliques, des reproductions d’un modèle de
référence qu’est la dent naturelle. Avant d’envisager les méthodes de restaurations, il
semble essentiel d’analyser la structure et le comportement de l’organe dentaire.

                                                                                            9

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                                                                             (CC BY-NC-ND 2.0)
2. Approche biomimétique de la restauration du secteur antérieur

        2.1. Biomimétisme et bioémulation : une « nouvelle » approche

De tout temps et dans tous les domaines, les hommes ont tendance à être inspirés par la
nature et la vie, et ont cherché à l’égaler ou à la surpasser. L’art d’observer les stratégies
naturelles d’adaptation utilisées par les plantes et les animaux pour inventer des produits
ou des outils définit l’approche biomimétique.

La biomimétique, considérée comme la reproduction et l’imitation artificielle des procédés
de la nature dans les organismes vivants, est associée à la bioémulation, ou la reproduction
de la nature par imitation biomimétique. (7)

Utilisée en premier lieu en recherche médicale pour le développement et la synthèse de
matériaux substitutifs, cette notion s’est étendue à la chirurgie dentaire, définissant un
nouvel objectif : la reproduction des propriétés biomécaniques et de l’intégrité structurale
de la dent naturelle (7, 8).

        2.2. Analyse de l’organe dentaire

La dent naturelle est considérée comme la référence indiscutable en dentisterie
restauratrice (7,8). Son analyse nécessite l’étude de sa composition histologique, des
relations entre ses éléments constitutifs et de son comportement fonctionnel.

                2.2.1. Etude histo-anatomique de la dent naturelle

La couronne de la dent naturelle est composée de trois éléments indissociables : l’émail, la
jonction amélo-dentinaire et la dentine.

Structure histologique de l’émail (9, 10) :

L’émail est constitué d’une phase minérale, représentant 96 à 98% de la masse amélaire,
essentiellement constituée de cristaux d’hydroxyapatite, et d’une phase organique, formant
2 à 3% de la masse de l’émail, constituée de protéines et de lipides. La superposition des

                                                                                              10

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                                                                                (CC BY-NC-ND 2.0)
cristaux d’hydroxyapatite forme de longs rubans spiralés, ou cristallites, regroupés au
niveau des prismes d’émail et de la substance interprismatique.

Les prismes et l’émail interprismatique (Figure 1a) ont la même composition et ne
diffèrent que par l’orientation des cristallites. Ils sont séparés par un léger espace, la gaine
de prisme, contenant des protéines et quelques lipides. Cette gaine constitue une zone de
discontinuité, s’opposant à la progression des fissures au sein de l’émail et à leur
transmission aux prismes voisins, et pourrait permettre un léger mouvement des prismes
par rapport aux autres lorsque des forces importantes s’exercent sur l’émail.

L’épaisseur des prismes d’émail augmente de la jonction amélo-dentinaire à la surface de
la dent, alors que l’émail interprismatique s’amincie, améliorant la résistance aux forces en
surface. La résistance de l’émail à la propagation des fissures est également favorisée par
l’orientation des prismes, parallèles entre eux et perpendiculaires à la surface dentinaire.
(Figure 1b)

Figure 1 : Prismes de l’émail et substance inter-prismatique (MEB) (Fig. 1a) (GJ. MOUNT, WR.
HUME, 2002 (10)). Vue générale de l’émail : jonction amélo-dentinaire, lames et fissures
(dent sèche, MO × 100) (Fig. 1b) (11)

Structure histologique de la dentine (9, 10) :

Au niveau de la couronne de la dent naturelle, la dentine est un tissu organisé en deux
couches principales : une partie externe en contact avec l’émail, le manteau dentinaire, et
une couche plus épaisse située en dessous, la dentine circumpulpaire.

Lors de la dentinogenèse, le manteau dentinaire est synthétisé par les odontoblastes avant
qu’ils ne possèdent leur prolongement, formant une structure atubulaire d’une très faible

                                                                                              11

                                                                                     KANTCHEFF
                                                                                (CC BY-NC-ND 2.0)
épaisseur, inférieure à 150 µm. A ce niveau, la minéralisation est plus faible, et les fibres
de collagènes sont moins denses et sont disposées perpendiculairement à la jonction amélo-
dentinaire.

La dentine circumpulpaire se forme lors              de l’apparition      des   prolongements
odontoblastiques. Ces prolongements sont contenus dans les tubuli dentinaires, dont la
paroi est formée par la dentine péri-tubulaire. Les tubuli et la dentine péri-tubulaire sont
séparés par la dentine inter-tubulaire, qui se forme et se minéralise parallèlement à
l’allongement du prolongement odontoblastique. Les tubuli dentinaires sont parallèles
entre eux, selon un trajet en S allongé perpendiculaire à la jonction amélo-dentinaire
(Figure 2).

Figure 2 : Section horizontale de la dentine mature proche de la pulpe, permettant
d’observer les tubuli dentinaires en nombre et de taille importante (MEB x 1000) (Fig. 2a).
Section longitudinale de la dentine mature d’une zone proche de la figure précédente,
révélant les tubuli d’un diamètre proche de 2 µm (MEB x 1000) (Fig. 2b). (GJ. MOUNT, WR.
HUME, 2002 (10))

La microstructure de la dentine coronaire peut être comparée à celle d’un bio-composite de
fibres de collagène minéralisées, avec une matrice formée par la dentine inter-tubulaire
renforcée par des fibres cylindriques constituées par les tubuli dentinaires associées à leur
gaine de dentine péri-tubulaire. La dentine possède à la fois des propriétés élastique et
plastique, qui varient de manière significative d’une région à l’autre.

La jonction amélo-dentinaire (ou JAD) (7, 9, 10) :

La jonction amélo-dentinaire a un rôle majeur dans l’odontogénèse, sa formation débute
aux premiers stades de l’édification de l’organe dentaire, au début de la minéralisation et

                                                                                              12

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                                                                                (CC BY-NC-ND 2.0)
bien avant l’apparition d’une pulpe identifiable, constituant l’épicentre structurel de la
dent.

Elle représente un entrelacement complexe entre deux tissus calcifiés avec des propriétés
physiques et des compositions biochimiques différentes : l’émail servant de coque de
protection et la dentine de noyau d’amortissement.

La JAD a un trajet festonné, en particulier dans les zones soumises à des forces occlusales
élevées, renforçant la cohésion entre les deux tissus et formant une zone complexe capable
d’une déformation plastique.

Histologiquement, la jonction amélo-dentinaire est une structure composite d’environ
25µm d’épaisseur, moins minéralisée que l’émail et la dentine, et plus riche en matrice
organique, laquelle se révèle renforcée en fibrilles de collagène. A ce niveau, l’émail
aprismatique interne, la JAD et le manteau dentinaire se lient étroitement formant un
complexe amélo-dentinaire (ou CAD) (Figure 3a). La cohésion de ce complexe est
renforcée par deux structures : les touffes et les fuseaux de l’émail. Les touffes de l’émail
sont des reliquats de matrice organique issus de l’amélogénèse, et forment des structures
arborescentes qui partent de la JAD, perpendiculairement à celle-ci, et parcourent la partie
interne de l’émail (Figure 3b). Les fuseaux de l’émail sont des pénétrations de dentine
dans l’émail, ils correspondent à des prolongements odontoblastiques insinués entre les
améloblastes avant la formation de l’émail (Figure 3c).

Figure 3 : Email, jonction amélo-dentinaire et tubules dentinaires (dent sèche, MO x 40) (Fig.
3a). Lames et touffes de l’émail (dent sèche, MO x 200) (Fig. 3b). Fuseaux de l’émail (dent
sèche, MO x 100) (Fig. 3c) (11)

                                                                                            13

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De ce fait, la jonction amélo-dentinaire se révèle être une interface peu minéralisée,
renforcée par des fibres de collagène, entre deux tissus fortement minéralisés. Ces
faisceaux de fibres de collagène forment des poutres massives pouvant dévier et même
empêcher la propagation des fissures de l’émail.

               2.2.2. Propriétés du complexe amélo-dentinaire (7, 9, 10)

Du fait de sa structure histologique unique, le complexe amélo-dentinaire constitue une
zone de transition graduelle entre l’émail et la dentine, formant une interface fonctionnelle
entre deux tissus aux comportements biomécaniques différents.

Le complexe amélo-dentinaire révèle un mécanisme complexe assurant l'harmonie d'un
point de vue biomécanique entre les tissus dentinaire et amélaire, leur permettant de
fonctionner à l'unisson plutôt que de rester indépendant l’un de l’autre. Cette zone
particulière assure la transmission des forces au sein de l’organe dentaire et limite la
propagation des fissures de l’émail à la dentine par déformation et absorption des
contraintes.

Le CAD constitue une interface visuelle entre deux tissus aux propriétés de biréfringence
différentes : la lumière se propage de façon anisotrope à travers l’émail et la dentine,
puisque l’indice de réfraction au sein de ces milieux n’est pas unique mais dépend de la
direction de polarisation de l’onde lumineuse.

               2.2.3. Configuration tridimensionnelle de l’émail et de la dentine (9)

L’émail et la dentine ont une topographie particulière liée à leurs différents rôles
fonctionnels. Les contours convexes et arrondis de l’émail confèrent une solidité et une
résistance à un tissu soumit à des contraintes masticatoires et des forces occlusales directes.
En revanche, la surface concave et acérée de la dentine fournit un support stable pour la
coque d’émail. (Figure 4)

                                                                                             14

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Figure 4 : Les contours convexes de la surface de l’émail (à gauche) contrastent avec la
surface acérée et concave de la dentine (à droite). (Représentation d’une première
prémolaire maxillaire avant et après déminéralisation de l’émail) (P. BAZOS et P. MAGNE,
2011 (9)).

               2.2.4. Biomécanique de l’organe dentaire (7, 8)

Notion de résilience optimale :

Les dents naturelles, notamment les dents antérieures, ont la capacité d’amortir un impact
en emmagasinant l’énergie d’une force en se déformant de manière élastique et en libérant
cette énergie quand la charge est supprimée. Cette capacité à stocker l’énergie sans subir
de dommage irréversible, appelée résilience, est inhérente aux dents antérieures.

Ce phénomène est assuré par la dentine qui constitue l’élément élastique de l’organe
dentaire, mais sa flexibilité serait trop importante par rapport à sa fonction sans la présence
de la coque d’émail rigide.

Figure 5 : Vue détaillée d’une incisive centrale maxillaire. Sa morphologie particulière
(contours proéminents des crêtes proximales et du cingulum, concavité palatine) est adaptée
à la fonction de mastication. (P. MAGNE, A. VERSLUIS, WH. DOUGLAS, 1999 (12))

                                                                                             15

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Selon P. MAGNE et U. BELSER (2003) (7), l’émail vestibulaire joue un rôle déterminant
dans le comportement mécanique des dents antérieures. La flexibilité d’une dent intacte où
l’émail vestibulaire a été retiré par déminéralisation est effectivement plus importante
qu’une dent saine avec l’émail et la dentine intacts. De plus, la préparation d’un tiers de
l’émail vestibulaire augmente de 15% la flexibilité coronaire et l’élimination complète de
l’émail vestibulaire l’augmente de 116% (Figure 6).

On peut noter que la réalisation d’une cavité d’accès endodontique augmente faiblement la
flexibilité de la dent (seulement de 37%). D’où l’intérêt des restaurations partielles, par
rapport aux restaurations périphériques, au niveau de dents dépulpées avec une perte de
substance limitée à la cavité endodontique. (7)

Figure 6 : Flexibilité relative de la couronne d’une incisive préparée par rapport à une
incisive intacte. (P. MAGNE, U. BELSER, 2003 (7))

Comportement biomécanique :

En examinant séparément l’émail et la dentine, ces tissus ne possèdent pas de
caractéristiques mécaniques intéressantes : l’émail résiste à l’usure occlusale mais reste
fragile, friable et se fissure facilement ; tandis que la dentine est beaucoup plus flexible
mais résiste peu à l’abrasion et supporte mal l’exposition à l’environnement buccal.

Pourtant, l’association d’un tissu très dur comme l’émail et d’un tissu souple comme la
dentine confère à l’organe dentaire cette capacité de supporter les contraintes masticatoires

                                                                                           16

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                                                                             (CC BY-NC-ND 2.0)
et thermiques durant une vie entière, union rendue possible par la structure unique de la
jonction amélo-dentinaire.

Le comportement mécanique de la dent naturelle pendant la fonction a été étudiée par des
méthodes expérimentales non destructrices (P. MAGNE, A. VERSLUIS, WH.
DOUGLAS, 1999 (12)). La flexion de la couronne d’une incisive centrale maxillaire, sous
l’effet d’une charge fonctionnelle de 50 N. appliquée sur la face palatine du bord incisif,
est mesurée par des jauges de contraintes collées au niveau de la fosse palatine et du
cingulum. La charge est exercée en direction vestibulaire et perpendiculaire à l’axe de la
dent, le plan radiculaire étant immobilisé. Un modèle numérique des dents antérieures est
obtenu à partir de l’analyse de coupes vestibulo-linguales d’une incisive centrale maxillaire
extraite et des méthodes de simulation bidimensionnelle par éléments finis.

Cette étude montre que sous l’effet d’une force horizontale, correspondant aux forces
masticatoires exercées au cours de la propulsion, la dent se comporte comme un porte-à-
faux : la moitié vestibulaire subit une compression alors que la face palatine est soumise à
des forces de traction. Les forces de tractions maximales observées sont situées au niveau
de la jonction couronne/racine et au niveau de la concavité palatine. Des zones de faibles
contraintes sont remarquables dans la convexité du cingulum, le tiers cervical vestibulaire
et au niveau des crêtes proximales. (Figure 7a)

Ce comportement est expliqué par le changement d’épaisseur et de géométrie de l’émail.
La concavité palatine, qui donne à l’incisive sa géométrie fonctionnelle coupante, est une
zone de concentration de contraintes. Ce «défaut» relatif est compensé par la présence des
crêtes proximales, assurant la redistribution des contraintes en raison de leur épaisseur
d’émail plus importante et de leur convexité.

Cette analyse par éléments finis montre que l’élimination de l’émail vestibulaire affecte
significativement la rigidité coronaire et, de ce fait, la distribution des contraintes dans la
fosse palatine. (Figure 7b)

                                                                                             17

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Figure 7 : Distribution du stress dans le plan vestibulo-palatin d’une incisive supérieure sous
l’effet d’une charge fonctionnelle de 50N appliquée sur la face palatine du bord incisif en
direction vestibulaire, le plan de section radiculaire étant immobilisé. Le dégradé de couleur
(bleu - jaune) indique l’intensité croissante des contraintes en traction, la surface grise
représente la zone de compression. Le stress est concentré à la surface de jonction
couronne/racine et au niveau de la concavité palatine (Fig. 7a et 7b). L’élimination de l’émail
vestibulaire affecte significativement la rigidité coronaire et la distribution des contraintes
dans la fosse palatine (Fig. 7b). (P. MAGNE, A. VERSLUIS, WH. DOUGLAS, 1999 (12))

L’analyse de l’effet d’une force exercée au niveau de fissures de l’émail montre que la
distribution du stress se fait de part et d’autre de la fissure à travers la jonction amélo-
dentinaire (Figure 8).

Figure 8 : Vue détaillée de la distribution du stress (critère de Von Mises modifié) dans la
fosse palatine au niveau de la jonction amélo-dentinaire sur une dent fissurée naturellement,
sous l’effet d’une force horizontale de 50N exercée sur le bord incisif. (P. MAGNE, A.
VERSLUIS, WH. DOUGLAS, 1999 (12))

                                                                                             18

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L’étude histo-anatomique de la dent naturelle révèle le rôle essentiel de l’organisation
tissulaire dans son fonctionnement. Leur analyse et la compréhension des contraintes
exercées sur l’organe dentaire et ses déformations en découlant permettent de nombreuses
applications cliniques.

La préservation d’une épaisseur d’émail vestibulaire suffisante est primordiale à l’équilibre
des contraintes fonctionnelles s’exerçant sur les dents antérieures. La restauration de la
couche amélaire par des réhabilitations adhésives collées, comme les restaurations
adhésives en céramique, a le potentiel de restituer l’équilibre biomécanique de l’organe
dentaire (7).

L’affaiblissement biomécanique de la dent suite à la perte de l’émail périphérique est
illustrée par le principe de la théorie de la raquette de F. VAILATI (7). La conservation de
la coque d’émail externe empêche l’effondrement du réseau de dentine, à l’instar de
l’effondrement des cordes d’une raquette de tennis privée de son cadre (Figure 9).

Figure 9 : Le principe de la théorie de la raquette de F. VAILLATI : la rigidité de la dent
dépouillée de son cadre d’émail est fortement affaiblie.

En assurant la cohésion entre deux tissus fortement minéralisés et aux propriétés
mécaniques différentes, la jonction amélo-dentinaire constitue une interface fonctionnelle
fondamentale au comportement de la dent naturelle. La JAD sert de référence pour le
développement de nouveaux agents de collage dentinaire, ayant pour rôle majeur de
rétablir l’intégrité mécanique de la couronne restaurée.

                                                                                           19

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Deux éléments cliniques découlent de l’analyse de la dent naturelle :
-      La préservation du complexe amélo-dentinaire est capitale pour maintenir le
comportement biomécanique de la dent à restaurer. Pour cela, l’émail est touché avec
parcimonie autant que la situation clinique le nécessite.
-      Les fêlures de l’émail étant physiologiques, il est important de ne pas les toucher,
en dehors de toute symptomatologie clinique.

A la lumière de ces éléments fondamentaux, la prise de décision du praticien sur la
méthode de restauration suivra naturellement une démarche de préservation tissulaire.

                                                                                         20

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3. Processus décisionnel lors de réhabilitations antérieures

       3.1. Le gradient thérapeutique

La restauration des dents naturelles antérieures s’inscrit dans une démarche de préservation
tissulaire maximale, suivant des protocoles opératoires peu invasifs, c'est-à-dire conçu pour
détruire le minimum de structure dentaire (13, 14). Suivant ce principe, les solutions
thérapeutiques peuvent être classées sur un axe horizontal de la moins invasive à la plus
mutilante (15). En cherchant la stratégie de traitement permettant la plus grande économie
tissulaire, ce « gradient thérapeutique » est une aide à la réflexion du praticien. (Figure 10)

Le praticien a accès à de multiples modalités de traitements ultra conservatrices permettant
une approche la plus économe en tissus sains. Il choisira en premier lieu les protocoles les
plus simples, tels que les traitements chimiques de blanchiment des dents, la microabrasion
et la méga-abrasion ou les composites directs, avant toute approche sophistiquée. Les
traitements orthodontiques sont dans de nombreux cas des solutions de traitement
améliorant la fonction et l’esthétique, et sont à considérer avant la réponse prothétique.
(7).

Cette démarche est valable quel que soit l’âge du patient mais demeure essentielle chez le
jeune patient (15, 7). L’application du gradient thérapeutique permet de retarder le cycle de
l’apoptose dentaire et laisse plus de possibilités pour de futures réinterventions (13).

  Préservation tissulaire :

  Moins mutilant                                                                          Plus mutilant

 Orthodontie                     Méga-abrasion                 Facettes
               Eclaircissement                                                                 Couronnes
                                             Composites stratifiés        Inlays/Onlays       périphériques
               Microabrasion

Figure 10 : Le gradient thérapeutique lors de la restauration des dents naturelles antérieures
et unitaires (G. TIRLET, JP. ATTAL, 2009 (15))

                                                                                                              21

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