DROIT CONSTITUTIONNEL L1 FICHE N 1 : LA CONSTITUTION

 
CONTINUER À LIRE
1

 DROIT CONSTITUTIONNEL
             L1
FICHE N° 1 : LA CONSTITUTION

                          Tous droits réservés
2

TABLE DES MATIERES

Résumé : ................................................................................................................................................................. 4

1.           La notion de Constitution ......................................................................................................................... 5

             1.1.          Définition de la Constitution ...................................................................................................... 5

                           1.1.1.        La DDHC de 1789 ....................................................................................................... 7

                           1.1.2.        Le préambule de la Constitution de 1946 .................................................................... 8

                           1.1.3.        La charte de l’environnement de 2004 ....................................................................... 10

             1.2.          Les types de Constitution ......................................................................................................... 11

                           1.2.1.        La constitution coutumière ....................................................................................... 11

                           1.2.2.        La constitution écrite ................................................................................................ 11

             1.3.          Valeur des Constitutions .......................................................................................................... 12

                           1.3.1.        La valeur juridique ..................................................................................................... 12

                           1.3.2.        La supériorité des constitutions ................................................................................ 12

2.           L’élaboration de la Constitution ............................................................................................................. 13

             2.1.          Le recours à l’assemblée constituante ou au gouvernement .................................................... 13

                           2.1.1.        L’assemblée constituante ........................................................................................... 13

                           2.1.2.        Le gouvernement, approuvé par le peuple ................................................................. 13

             2.2.          Le pouvoir constituant ............................................................................................................. 14

3.           La protection de la Constitution ............................................................................................................. 15

             3.1.          La procédure spéciale de révision ............................................................................................ 15

             3.2.          La procédure du contrôle de constitutionnalité ........................................................................ 16

                           3.2.1.        Origine du contrôle de constitutionnalité ................................................................... 16

                           3.2.2.        Justification du contrôle de constitutionnalité ........................................................... 17

                           3.2.3.        L’exercice du contrôle de constitutionnalité .............................................................. 17

4. L’abrogation de la Constitution ........................................................................................................................ 19

             4.1.          L’abrogation totale des constitutions écrites ............................................................................ 19

                                                                                                                                         Tous droits réservés
3

4.2.   L’abrogation partielle des constitutions écrites ........................................................................ 20

                                                                                                     Tous droits réservés
4

RESUME :

Le droit constitutionnel est une branche plus politique et culturelle que les autres
branches du droit, mais il ne connaît pas moins d’aspects juridiques. C’est dans cette
optique qu’il vous faudra aborder le droit constitutionnel.

Comme son nom l’indique la norme la plus importante en droit constitutionnel est la
constitution. Elle sera donc votre référence indispensable et automatique de droit
constitutionnel, et fait l’objet de la 1ère fiche.

Avant de parler de la constitution il est opportun de définir cette notion [1]. Ceci fait, il
est important de comprendre comment peut être élaborée une constitution [2], de quelle
manière cette norme fondamentale est protégée [3] et enfin s’il existe des mécanismes de
disparition/abrogation d’une constitution [4].

                                                                                Tous droits réservés
5

    1.      LA NOTION DE CONSTIT UTION

    1.1.    DEFINITION DE LA CONS TITUTION

    C'est la norme juridique généralement suprême qui contient à la fois:

   les principes directeurs de l'ordre juridique étatique : la Constitution définit quels sont les
    buts, finalités qui doivent guider les opérateurs du droit,
   les règles de base concernant l'aménagement et la transmission du pouvoir d'État : la
    Constitution institue des organes d'État qu'on appellera « pouvoirs constitués» (cf. Des
    institutions politiques comme le Parlement, le Tribunal constitutionnel) et organise les
    mécanismes pacifiques visant à assurer leur renouvellement.
   l'énoncé des libertés fondamentales protégées par l'Etat : ces droits sont généralement
    énoncés dans le Préambule de la Constitution qui lui-même contient une Déclaration de
    droits ou s'y réfère.

    Au sens matériel, la Constitution est un ensemble des règles écrites ou coutumières qui
    déterminent la forme de l'État (unitaire ou fédéral), la dévolution et l'exercice du pouvoir.

    Au sens formel, la Constitution est le document à proprement parlé qui contient les
    règles constitutionnelles.

    Ce formalisme, que traduit, le plus souvent, l'expression de constitution rigide (révision
    possible seulement via une procédure spéciale et complexe), confère aux règles qui en
    bénéficient une force juridique qui les situe à la première place dans la hiérarchie des
    règles de droit.

    Par opposition, une constitution est dite souple quand, ne se distinguant pas par sa
    forme des lois ordinaires, elle occupe le même rang qu'elles dans la hiérarchie des règles
    juridiques et peut être modifiée par elles.

    La Constitution de la Vème république est une Constitution formelle, matérielle
    et rigide.

    Non seulement elle contient les articles constitutionnels, mais elle vise également (dans
    son préambule) un certain nombre de textes importants telle que la Déclaration des
    Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 (DDHC)

                                                                                      Tous droits réservés
6

Préambule

Le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l'homme
et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils ont été définis par la
Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution
de 1946, ainsi qu'aux droits et devoirs définis dans la Charte de l'environnement
de 2004.

En vertu de ces principes et de celui de la libre détermination des peuples, la
République offre aux territoires d'Outre-Mer qui manifestent la volonté d'y adhérer
des institutions nouvelles fondées sur l'idéal commun de liberté, d'égalité et de
fraternité et conçues en vue de leur évolution démocratique.

Titre Ier : De la Souveraineté (articles 2 à 4)

Titre II : Le Président de la République (articles 5 à 19)

Titre III : Le Gouvernement (articles 20 à 23)

Titre IV : Le Parlement (articles 24 à 33)

Titre V: Des rapports entre le Parlement et le Gouvernement (articles 34 à 51-2)

Titre VI : Des traités et accords internationaux (articles 52 à 55)

Titre VII : Le Conseil constitutionnel (articles 56 à 63)

Titre VIII : De l'autorité judiciaire (articles 64 à 66-1)

Titre IX : La Haute Cour (articles 67 à 68-3)

 Titre X : De la responsabilité pénale des membres du Gouvernement (articles 68-1 à
68-3)

Titre XI : Le Conseil économique, social et environnemental (articles 69 à 71)

Titre XI bis: Le Défenseur des droits (article 71-1)

Titre XII : Des Collectivités Territoriales (articles 72 à 75-1)

 Titre XIII : Dispositions transitoires relatives à la Nouvelle-Calédonie (articles 76 et
77)

Titre XIV : De la Francophonie et des accords d'association (articles 87 et 88)

Titre XV : De l'Union européenne (articles 88-1 à 88-7)

Titre XVI : De la révision (article 89)

                                                                                Tous droits réservés
7

La Constitution de la Veme, ainsi que les textes visés dans le préambule (cf. ci-dessus)
forment ce qu’on appelle le bloc de constitutionnalité.

En d’autres termes, cela signifie que l’ensemble des ces normes a valeur constitutionnelle.

Le préambule de 1958, et les normes qu’il vise, a valeur constitutionnelle au même titre
que la constitution elle même depuis une Décision du Conseil Constitutionnel que vous
devez absolument connaitre :

→ Décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971

          « 2. Considérant qu'au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la
          République et solennellement réaffirmés par le préambule de la Constitution il y a lieu de
          ranger le principe de la liberté d'association ; (…)

          4. Considérant, dès lors, qu'il y a lieu de déclarer non conformes à la Constitution les
          dispositions de l'article 3 de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel complétant
          l'article 7 de la loi du 1er juillet 1901 »
1.1.1. LA DDHC DE 1789
Elle comprend 17 articles proclamant solennellement des droits et libertés de l’Homme
et du citoyen.

Elle commence ainsi :

           « Les Représentants du Peuple Français, constitués en Assemblée Nationale, considérant
           que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'Homme sont les seules causes des
           malheurs publics et de la corruption des Gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une
           Déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l'Homme, afin que
           cette Déclaration, constamment présente à tous les Membres du corps social, leur
           rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs ; afin que les actes du pouvoir législatif, et
           ceux du pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute
           institution politique, en soient plus respectés ; afin que les réclamations des citoyens,
           fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au
           maintien de la Constitution et au bonheur de tous. »

La version entière est disponible via ce lien :

http://www.legifrance.gouv.fr/html/constitution/const01.htm

                                                                                             Tous droits réservés
8

1.1.2. LE PREAMBULE DE LA CONSTITUTION DE 1946

Il comprend 2 catégories de normes : les PFRLR (principes fondamentaux reconnus par
les lois de la République) et les principes particulièrement nécessaires à notre temps.

Il commence ainsi :

           1. Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui ont
           tenté d'asservir et de dégrader la personne humaine, le peuple français proclame à
           nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance,
           possède des droits inaliénables et sacrés. Il réaffirme solennellement les droits et libertés
           de l'homme et du citoyen consacrés par la Déclaration des droits de 1789 et les principes
           fondamentaux reconnus par les lois de la République.

           2. Il proclame, en outre, comme particulièrement nécessaires à notre temps, les principes
           politiques, économiques et sociaux ci-après (…)

La version entière est disponible via ce lien :

http://www.legifrance.gouv.fr/html/constitution/const02.htm

Le préambule liste les principes particulièrement nécessaires à notre temps mais
qu’en est-il des PFRLR ?

Les PFRLR ne sont pas énumérés dans le préambule de 1946.

Il appartient au Conseil Constitutionnel d’élever certains principes à ce rang.

Le Conseil constitutionnel a, avec une grande marge d’appréciation, consacré différents
principes comme la liberté d'association, la liberté d'enseignement et de conscience,
l'indépendance des professeurs d'universités ou encore le respect des droits de la défense.

Un principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR) doit, selon deux
décisions du 20 juillet 1988 et du 4 juillet 1989 du Conseil constitutionnel répondre à
plusieurs conditions :

                                                                                           Tous droits réservés
9

   être tiré d'une législation républicaine ce qui écarte toute législation intervenue sous un
    régime non républicain. Cette législation républicaine doit être intervenue avant l'entrée
    en vigueur du préambule de la Constitution de 1946, et être toujours en vigueur.
   ne pas avoir été démenti par une autre législation républicaine. Il y a donc une nécessité
    de constance et de répétition.

    Font par exemple partie des lois utilisées : la loi sur la liberté de la presse créée en 1881, la
    loi sur les libertés syndicales créée en 1895, la loi sur la liberté d'association créée en 1901
    ou encore la loi sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat en 1905 (principe de laïcité).

    Le juge décide de reconnaitre un PFRLR parce que ce principe est contemporain et
    mérite d’être protéger constitutionnellement dans l’intérêt des particuliers

    À ces conditions cumulatives s'ajoutent deux conditions dégagées par la jurisprudence du
    Conseil Constitutionnel :

   le principe doit satisfaire aux conditions précitées et doit revêtir également un caractère
    suffisamment général (décision du 20 juillet 1993 "Réforme du Code de la nationalité").
   le principe doit avoir un caractère fondamental (décision du 14 janvier 1999 "Mode d'élection
    des conseillers régionaux").

    Font par exemple partie des principes fondamentaux reconnus par les lois de la
    république les principes suivants :

   liberté d’association
    → CC, 1971, Liberté d’association
   liberté d’enseignement
   principe d’indépendance des professeurs d’université
   l’indépendance des juridictions judiciaires et administratives
   le respect des droits de la défense
   interdiction d’extrader un refugié dans un but politique
    → CE, 1996, Koné

                                                                                       Tous droits réservés
10

1.1.3. LA CHARTE DE L’ENVIRONNEMENT DE 2004
Elle proclame 10 articles et commence ainsi :

             Le peuple français,

             Considérant :

             Que les ressources et les équilibres naturels ont conditionné l'émergence de
             l'humanité ;

             Que l'avenir et l'existence même de l'humanité sont indissociables de son milieu
             naturel ;

             Que l'environnement est le patrimoine commun des êtres humains ;

             Que l'homme exerce une influence croissante sur les conditions de la vie et sur sa
             propre évolution ;

             Que la diversité biologique, l'épanouissement de la personne et le progrès des sociétés
             humaines sont affectés par certains modes de consommation ou de production et par
             l'exploitation excessive des ressources naturelles ;

             Que la préservation de l'environnement doit être recherchée au même titre que les
             autres intérêts fondamentaux de la Nation ;

             Qu'afin d'assurer un développement durable, les choix destinés à répondre aux
             besoins du présent ne doivent pas compromettre la capacité des générations futures
             et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins,

La version complète est disponible via ce lien :

       http://www.legifrance.gouv.fr/html/constitution/const03.htm

                                                                                       Tous droits réservés
11

    1.2.    LES TYPES DE CONSTITU TION

    On distingue principalement 2 types :

    1.2.1. LA CONSTITUTION COUT UMIERE

    Cas fréquent avant le XVIIIe siècle mais rare aujourd'hui.

    Aujourd'hui très peu d'Etats en Occident ont une Constitution coutumière (Cf. La GB a
    une Constitution partiellement coutumière), alors qu'ailleurs dans le monde, cela peut
    arriver (Cf. Certains Etats musulmans comme l'Arabie Saoudite).

    L'organisation politique et les garanties des libertés découlent alors du respect d'usages
    répétés (souvent depuis des temps immémoriaux) considérés comme obligatoires par les
    organes étatiques et sanctionnés par les tribunaux. C’est une coutume… d’où l’idée de
    Constitution coutumière…

    1.2.2. LA CONSTITUTION ECRI TE

    C'est le cas le plus fréquent.

    La Constitution se présente comme un document (notion de Constitution formelle) assez
    court qui a été adopté sous la forme d'une loi soit :

   particulière : loi adoptée par le Parlement à une majorité qualifiée ou par le peuple
    directement.
    Généralement, ce type de Constitution écrite est précédé d'un Préambule ou d'une
    Déclaration de Droits.
    Ex : États-Unis, France
   ordinaire : loi votée comme toutes les autres lois par le Parlement à la majorité simple.
    Ex : GB pour certains textes constitutionnels (Cf. Grande Charte de 1215, Bill of Rights
    de 1689), URSS

                                                                                 Tous droits réservés
12

1.3.   VALEUR DES CONSTITUTI ONS

1.3.1. LA VALEUR JURIDIQUE

Pendant longtemps, notamment en France ou aux Etats-Unis, la valeur juridique des
Constitutions et de leurs Préambules a été discutée.

Le débat est clos aujourd'hui pour ce qui concerne les Constitutions qui sont considérées
non plus comme des textes politiques mais bien comme des textes juridiques à part
entière sanctionnés par le juge.

Concernant les Préambules et les textes solennels auxquels ils renvoient (par exemple la
DDHC de 1789 pour le Préambule de la Constitution française de 1958), la discussion
continue.

Mais en France, la décision de 1971 du Conseil constitutionnel (précitée) a admis la
valeur juridique et constitutionnelle du préambule de la Constitution de 1958 et des
textes auxquels il fait référence. Une décision dont les avantages sont largement soulignés
par la doctrine (meilleur respect des libertés par le gouvernement ou le Parlement, Etat
de droit consolidé, etc.).

1.3.2. LA SUPERIORITE DES C ONSTITUTIONS

Généralement, les Constitutions ont une valeur supérieure à celle de toutes les autres
normes de droit interne : lois ordinaires, règlement...

Cela s'explique par l'importance (au sens matériel) des règles ou principes qu'elles
contiennent.

Dès lors toutes les autres normes devront respecter la Constitution et pourront être
déclarées inconstitutionnelles par les tribunaux si elles ne le font pas.

Cependant lorsque la Constitution est contenue elle-même dans une loi ordinaire, elle a la
valeur de cette loi ; c'est-à-dire la valeur de toutes les autres lois malgré son contenu
spécifique. Elle ne bénéficie donc pas d'une supériorité par rapport à ces lois.

C'est le cas en GB.

                                                                              Tous droits réservés
13

    2.      L’ELABORATION DE LA CONSTITUTION

    Dans le droit constitutionnel occidental classique, la Constitution qui est généralement
    écrite, supérieure aux autres normes juridiques fait l'objet de procédés d'établissement
    particuliers, solennels.

    Le procédé le plus souvent retenu depuis le XVIIIe siècle consiste à avoir recours à une
    Assemblée constituante ou au gouvernement suivi d’une approbation par le peuple. Un
    procédé qui permet de respecter le principe de souveraineté démocratique.

    Assemblée ou gouvernement exercent alors le pouvoir constituant au nom du Souverain.

    2.1.    LE RECOURS A L’ASSEMBLEE CONSTITU ANTE OU AU GOUVERNEMENT

    2.1.1. L’ASSEMBLÉE CONSTITUA NTE

    On distingue :

   l'assemblée constituante spéciale (ou ad hoc) : on convoque une assemblée spécialement
    dans le but qu'elle élabore une Constitution. Elle n'a que ce pouvoir à l'exclusion de tous
    les autres pouvoirs législatif, de contrôle politique...
    Ex : la Convention de Philadelphie qui élabora la Constitution américaine fédérale en
    1787.
   l'assemblée constituante et législative : l'assemblée élaborant la Constitution est
    l'assemblée ordinaire qui fait les lois au sein de l'État.
    Ex : la France a suivi cette voie durant la Révolution. Les assemblées de la révolution
    étaient constituantes et législatives.

    2.1.2. LE GOUVERNEMENT, APPROUVE PAR LE PEUPLE
    C'est la solution préférée aujourd'hui.

    Ainsi, la Constitution de 1958 a été élaborée par le gouvernement du G. de Gaulle sur le
    fondement d'une loi constitutionnelle du 3 juin 1958.

    Ce gouvernement devait recueillir l'avis d'un Comité consultatif en partie désigné par le
    Parlement.

    La Constitution a été adoptée par référendum (donc par le Peuple) le 28 septembre.

                                                                                  Tous droits réservés
14

    2.2.   LE POUVOIR CONSTITUAN T

    On admet généralement que l'organe qui élabore la Constitution détient un pouvoir
    constituant :

   originaire (ou inconditionné) notamment à la naissance d'un État ou à l'occasion d'un
    changement complet de régime politique (révolution). Dans ce cas l'organe agit au nom
    du souverain en toute liberté.
   institué (c'est-à-dire conditionné) les conditions étant généralement prévues par la
    Constitution précédente ou une loi spéciale. C'est le cas lorsqu'il y a simple révision. Ici
    l'organe agit au nom du souverain mais est lié par des obligations, interdits fixés, au
    préalable.

    On parle de pouvoir constituant dérivé pour les auteurs des révisions constitutionnelles.

                                                                                   Tous droits réservés
15

    3.      LA PROTECTION DE LA CONSTITUTION

    Cette protection de la Constitution écrite se justifie évidemment par l'importance des
    règles ou garanties pour les libertés qu'elle contient.

    Cette protection peut se manifester de deux façons.

    Par la mise en place :

   d'une procédure spéciale de révision qui sera longue, complexe pour éviter que la
    Constitution ne soit modifiée trop facilement (on parle de constitution rigide)
   d'une procédure de contrôle de la conformité à la Constitution des normes qui lui sont
    inférieures pour éviter que de telles normes soient édictées et viennent ainsi enfreindre et
    modifier implicitement la Constitution.

    3.1.    LA PROCEDURE SPECIALE DE REVISION

    Ce sont les Constitutions qui elles-mêmes en général organisent cette procédure spéciale.

    Du coup, ces Constitutions deviennent difficiles à modifier. On les dit rigides.

    C'est le cas en France et aux États-Unis.

    Elles sont en revanche dites souple des lors que leur révision se fait par la voie
    ordinaire du vote de la loi.

    Trois procédures sont à noter :

   la révision par le Parlement

    Cette révision se fait par le Parlement en formation spéciale et selon des modalités de
    vote particulières. Exemple : France IIIe République [la révision est faite par la
    Chambre des Députés et le Sénat réunis en une Assemblée appelée Assemblée nationale].
    Belgique [Les 2 chambres peuvent effectuer une révision mais après avoir été renouvelées
    et en votant à la majorité des 2/3 (art.195)].

                                                                                   Tous droits réservés
16

   la révision par une Assemblée spéciale

    Cette révision se fait par une Assemblée spécialement élue à cet effet. Exemple : États-
    Unis ; la révision peut être effectuée par une Convention élue à cet effet mais cette
    procédure se voit préférer en général la solution du Congrès votant à la majorité des 2/3.

   l'intervention directe du peuple par la voie du référendum

    Généralement, cette intervention est combinée avec l'utilisation du Parlement ou d'une
    Assemblée spéciale.

    3.2.    LA PROCEDURE DU CONTROLE DE CONSTITUTIONN ALITE

    Cette procédure spéciale presque toujours juridictionnelle a pour but d'empêcher les
    normes inférieures (principalement les actes du Législatif) d'enfreindre la Constitution.

    Elle a pour conséquence de garantir le fonctionnement normal des institutions politiques
    et le respect de nos libertés fondamentales (qui ne sont plus menacées par des lois
    pouvant être contraires à nos institutions ou liberticides).

    3.2.1. ORIGINE DU CONTROLE D E CONSTITUTIONNALITE
    L'idée d'un contrôle de constitutionnalité des lois n'a été développée et mise en
    application que tardivement par les États occidentaux.

    Elle commence maintenant à s'universaliser

    Cette idée est appliquée :

   aux États Unis à partir dès le XIXe siècle sur l'initiative de la Cour Suprême (1803,
    décision Marbury c. Madison)
   en Europe au XXe siècle sur l'initiative du Constituant qui crée un Tribunal
    constitutionnel (1920 en Autriche, 1958 en France) chargé de vérifier la conformité des
    lois à la Constitution. La France a mis en place ce contrôle très tard sans doute parce
    qu'elle a adhéré plus que les autres pays à l'idée que la loi en tant qu'elle émane du peuple
    souverain ne doit pas être critiquée.

                                                                                    Tous droits réservés
17

    3.2.2. JUSTIFICATION DU CONT ROLE DE CONSTITUTIONNALITE

    On ne fait plus confiance aux autorités politiques, notamment le Parlement pour
    respecter la Constitution.

    Ses lois peuvent être contraires à la Constitution.

    Il faut donc pouvoir les annuler ou les déclarer inconstitutionnelles.

    Conséquence : on permettra à certains organes, de préférence juridictionnels de contrôler
    ses lois.

    1. Pourquoi le juge ?

    Dans la tradition française (Cf. Montesquieu), le juge est considéré comme neutre pour
    au moins deux raisons :

   Le juge est au sein de l'État l'organe qui théoriquement bénéficie de la plus grande
    indépendance vis-à-vis du pouvoir politique. Ainsi, il est complètement séparé des
    organes législatif et exécutif qui ne peuvent faire pression sur lui ou le révoquer.
   Il est censé être un organe, neutre, impartial qui s'oppose à la loi pour des raisons de
    droit et non idéologiques.

    2. Quel contrôle ?

     Les juges feront un contrôle de constitutionnalité par rapport à la Constitution au sens
    strict ou mieux, par rapport à la Constitution au sens large (Constitution + déclaration
    des droits ou préambule).

    En effet, seul le contrôle par rapport à la Constitution au sens large permet un respect
    complet par le législateur des libertés fondamentales.

    3.2.3. L’EXERCICE DU CONTROL E DE CONSTITUTIONNAL ITE

    Le contrôle de constitutionnalité effectué par un juge peut intervenir selon deux
    mécanismes très différents :

   le contrôle par voie d'action :

    C'est un contrôle effectué par un juge spécialisé saisi pour vérifier la constitutionnalité
    d'une loi.

                                                                                  Tous droits réservés
18

    Cette demande est l’objet même du recours, la raison pour laquelle vous faites un recours.
    Ce juge spécialisé siège dans un tribunal ou une cour constitutionnelle. Le juge ordinaire
    est incompétent dans ce domaine.

    Le contrôle par voie d'action est :
    - soit a posteriori, soit a priori. Dans le premier cas, le Tribunal constitutionnel pourra
    contrôler une loi déjà promulguée (par exemple en Italie, en Allemagne...). Dans le
    deuxième cas, le contrôle intervient après le vote de la loi et avant sa promulgation.
    - toujours non incident ; c'est-à-dire que les effets de la décision concerneront toute la
    population et pas seulement les auteurs du recours. La loi est annulée ou bien déclarée
    non valable pour tous.

   le contrôle par voie d'exception :

    C'est un contrôle effectué par un juge ordinaire, non spécialisé, à l'occasion d'une
    quelconque action en justice. Ce contrôle est opéré par le juge à l’occasion d’un
    contentieux factuel vous concernant, comme on dit « l’occasion fait le larron »…
    Le justiciable invoquera le non respect de la Constitution (= une exception
    d'inconstitutionnalité) par la loi appliquée à son cas. Et le juge en conséquence vérifiera si
    cette loi est conforme ou non à la Constitution.

    Le contrôle par voie d'exception est toujours un contrôle :
    - a posteriori, c'est-à-dire qu'il intervient après que la loi a été promulguée et donc entrée
    en vigueur. Sinon elle ne saurait être invoquée à l’occasion d’un recours cela va de soi !

                                                                                     Tous droits réservés
19

    4. L’ABROGATION DE LA CONSTITUTION

    La Constitution peut être totalement ou partiellement abrogée (annulée pour l’avenir).

    Cela ne pose pas de difficultés particulières dans le cas de constitutions coutumières.

    Apparaissent alors de façon plus ou moins progressive, des coutumes contraires aux
    coutumes constitutionnelles existantes qui peuvent les abroger ou les remplacer
    facilement car elles ont même valeur juridique.

    Dans le cas des Constitutions écrites, cette abrogation partielle ou totale doit être
    soigneusement organisée et contrôlée sans quoi des dérapages peuvent intervenir.

    4.1.    L’ABROGATION TOTALE D ES CONSTITUTIONS ECR ITES

    Elle conduit à la disparition pure et simple d'une Constitution écrite.

    Deux situations sont à distinguer :

   l'acte juridique contraire

    Par une manifestation de volonté, (qui prend la forme généralement d'une loi
    constitutionnelle), il est décidé de mettre fin à une Constitution en procédant à une
    révision totale.

    Exemple : loi du 10 juillet 1940, loi du 3 juin 1958.

   le fait juridique contraire

    Un fait annoncé par la Constitution peut conduire à sa disparition automatique.

    Exemple : L'article 146 de la Loi Fondamentale de la R.F.A. prévoit que cette loi cessera
    d'exister si la réunification de la Nation allemande a lieu. Cela n'a pas eu lieu dans les faits
    puisque lorsque la réunification est intervenue, le Gouvernement allemand approuvé par
    référendum a préféré prolonger l'existence de la Loi fondamentale qui est maintenant
    appliquée sur les territoires de l'ex R.D.A. Le processus d'élaboration d'une nouvelle
    Constitution valable pour l'Allemagne réunifiée n'a pas été enclenché comme prévu.

                                                                                       Tous droits réservés
20

    4.2.    L’ABROGATION PARTIELL E DES CONSTITUTIONS ECRITES

    L'abrogation partielle doit normalement se faire par le biais d'une révision
    constitutionnelle dont la procédure est organisée par la Constitution elle-même.

    Mais, il arrive qu'on aboutisse au même résultat par le biais d'usages ou de pratiques
    contraires à la Constitution. Il s'agit alors d'une révision de fait.

    Le processus est le suivant : certains organes constitutionnels (faisant partie généralement
    de l'Exécutif), de façon unilatérale ou conjointe, prennent l'habitude de ne pas appliquer
    certains articles de la Constitution.

    Soit, ils n'obéissent pas à certaines obligations constitutionnelles, soit ils se donnent des
    compétences non prévues par la Constitution.

    Il y aura un faussement ou une violation de la Constitution favorisé généralement par 2
    facteurs :

   la Constitution est rédigée à certains endroits de façon maladroite ou ambiguë. Cela
    permet alors à certains acteurs politiques d'imposer plus facilement une interprétation
    contestable de certains articles de la Constitution.
   il n'existe pas de tribunal constitutionnel pour contrôler leurs actes ou si ce tribunal existe,
    sa compétence ne s'étend pas jusque-là.

    Certains auteurs de plus en plus nombreux considèrent que ces pratiques ou usages ont
    pu générer des normes constitutionnelles à part entière (soit des coutumes
    constitutionnelles contra legem) qui peuvent déroger légitimement à la Constitution écrite.
    Dès lors, on pourrait parler d'une révision de droit et non plus de fait.

    Mais la plupart la considère comme non acceptable en tant qu’atteinte.

    Voilà, désormais, la Constitution n’a plus aucun secret pour vous ‼ !

                                                                                      Tous droits réservés
Vous pouvez aussi lire