ECO NEWS Une ère nouvelle Mohamed Choucair - CCIA-BML
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
ECONEWS The Chambers’ Newsletter Numéro 81 Juin 2018 Publication «CCIA-BML» Une ère nouvelle Mohamed Choucair La politique comme chacun le sait sentée très largement au Parle- le monde peut le savoir, le consen- a son mot à dire dans l’écono- ment. sus est une chose difficile du fait mique. Au Liban plus qu’ailleurs, non seulement du conflit d’intérêt Dans le système majoritaire que et aujourd’hui plus que jamais. mais souvent pour un conflit d’hu- l’on a suivi jusqu’à présent, les Une nouvelle loi électorale a porté meur. L’action du gouvernement listes qui recueillaient le plus de au Parlement plus de la moitié de et du Parlement sont inhibés. Le nouveaux députés, dont une majo- voix grâce à un parti ou à un leader programme gouvernemental est rité de jeunes. pouvaient rafler tous les sièges. Et bloqué. Le budget est impossible l’opposition, qui pouvait se trouver C’est important en soi, mais plus à finaliser, et le 12e provisoire de- à un faible intervalle, pouvait être important encore, sont les ef- vient la règle. totalement écartée. fets du système proportionnel. Il Il fallait décrire la situation que est évident qu’il n’est pas parfait. L’harmonie exigeait de ne déci- nous avons vécue ces dernières Nous savions qu’il ne pouvait l’être der qu’à l’unanimité pour éviter le années, et dont la loi électorale, dès le premier essai. Cependant, conflit, souvent justifié, car la déci- compte tenu de la réalité libanaise, il marque une grande avancée : sion pouvait ignorer une large fac- porte la plus lourde responsabilité. l’opposition est désormais repré- tion de la société. Or comme tout uu p5. Nouveau parlement : du pain sur la p13. Le Conseil libanais des femmes planche en matière de législation ! p7. Les trois visages de la réforme leaders discute de CEDRE p17. Ali Hassan Khalil lance le «budget p25. The Joint Italian Arab Chamber du citoyen et de la citoyenne» p19. Karim Daher, invité de la CCFL of Commerce (JIACC) p31. Joumana Bassil Chelala: We should p23. Hariri from Tripoli: The Chamber p27. Saleh: we rely heavily on Lebanon’s make Lebanon a year-round destination augurs well with many good deeds ability to invest in its oil resources and diversify our tourism offering L'index page 2 Les articles de cette publication expriment l’avis de leurs auteurs ; ils sont publiés dans leur langue originale, et n’expriment pas nécessairement l’avis d’ ECONEWS. The views expressed in this publication are those of the authors; they are published in their original language, and do not necessarily reflect the opinion of ECONEWS.
Numéro 81 | PAGE 2 ECONEWS tt Désormais, nous attendons du ces travaux à un développement jets. La nouvelle structure politique gouvernement et de l’Assemblée inclusif qui s’inscrit dans : doit lui faciliter la tâche. une action plus efficace pour enca- - Une promotion sociale conforme Nous ne sommes pas défavo- drer les projets qui ont été soumis aux normes internationales - à la conférence CEDRE le 6 avril rables au projet du président de sustainable development goals passé. La relance économique et la République d’un gouvernement - et aux moyens du pays ; l’avenir de la nation en dépendent. qui gouverne et d’un Parlement qui - Un climat des affaires qui réta- Ces projets n’attendent que les ré- contrôle au plein sens du terme, en blisse la productivité des en- formes promises. Avant d’être une séparant les fonctions de ministre treprises, attire les investisse- exigence de CEDRE, ces réformes et de député de la nation. ments, et résorbe le chômage ; sont une exigence des organisa- tions économiques et de la société - Une attention particulière envers Si de telles mesures voient le jour, civile que le Premier ministre Saad les régions périphériques et l’ex- les anticipations favorables suffi- El Hariri a solennellement assumée ploitation rationnelle de leurs po- raient à relancer l’activité, l’inves- lors de la conférence. tentiels humain et technique. tissement et l’emploi dans le pays, Restaurer l’infrastructure va au Nous attendons avec le plus grand sans attendre leur pleine réalisa- delà de la rénovation des routes, la intérêt le programme du nouveau tion. dispense de l’électricité, le ramas- gouvernement qui doit matériali- sage des déchets, l’assainisse- ser ces objectifs, formaliser les ré- Je suis confiant dans l’avenir du ment de l’eau… elle vise à indexer formes, et entamer les grands pro- Liban. INDEX En français In English p3. Actus du mois p21. Lebanon-UAE: Renew links for promising p5. Nouveau parlement : du pain sur la planche partnerships en matière de législation ! p23. Hariri from Tripoli: The Chamber augurs well p7. Les trois visages de la réforme with many good deeds p9. Les enjeux de la lutte contre la corruption à l’ESA p25. The Joint Italian Arab Chamber of p11. La loi des PPP, un outil de transparence Commerce (JIACC) p13. Le Conseil libanais des femmes leaders p27. Saleh: we rely heavily on Lebanon’s ability to discute de CEDRE invest in its oil resources p15. Nagi Mouzannar : Le Liban a anticipé sur p29. Strategic and development vision of Zahle ses capacités pour s’adapter aux actuelles règles du jeu du commerce international et and Bekaa Chamber: Actual competencies ne semble pas encore être à niveau and labor market needs p17. Ali Hassan Khalil lance le « budget du p31. Joumana Bassil Chelala: We should make citoyen et de la citoyenne » Lebanon a year-round destination and p18. La réforme en cours au Conseil supérieur diversify our tourism offering des douanes p33. How industry can make savings while p19. Karim Daher invité de la CCFL développe preserving the environment « La fiscalité libanaise dans la perspective des relations France-Liban » p34. Federation News p35. Lebanon in p36. Upcoming p38. Exhibitions p39. Business p39. Conferences Figures Trainings Opportunities
ECONEWS Numéro 81 | PAGE 3 ACTUS DU MOIS Réunion élargie entre les organisations économiques et le conseil supérieur des douanes Initiée par le président des organisations économiques, une réunion élargie a été organisée le 11 mai dernier à la Chambre de commerce de Beyrouth et du Mont-Liban rassemblant des membres du conseil supérieur des douanes et des présidents d’associations économiques, des ONG et des syndicats. Étaient notamment présents, le président du conseil supérieur des douanes, Assaad Al Toufaili, et des membres du conseil, Gharasia Azzi et Hani Al hajj-Chehadé. Cette réunion avait pour objectif de discuter de la coopération entre les deux parties et de faciliter les transactions des commerçants et des industriels ainsi que l’amélioration de la gestion des douanes afin de mieux servir l'économie nationale. Dans son mot, Mohamed Choucair a déclaré: « Les organisations économiques souhaitent consolider le partenariat solide avec le service des douanes comme serviteur des institutions et de l'économie nationale ». Il a aussi salué les performances des douanes enregistrées dans la dernière période, ce qui a conduit à la lutte contre la contrebande dans une large mesure et à faciliter les transactions des commerçants et des industriels. « Il est nécessaire de faire des efforts de concertation afin d’arrêter la contrebande à la frontière avec la Syrie, et la poursuite du processus de développement des douanes», a-t-il ajouté. Le président a aussi dénoncé la contrebande à travers la frontière et la contrefaçon qui touchent les structures commerciales et industrielles légales. Mohamed Choucair a alors appelé « à y mettre fin car c’est une menace pour notre économie nationale ». De son côté, le président du conseil supérieur des douanes a présenté plusieurs projets de développement sur lesquels planche le conseil : « une nouvelle loi douanière, une structure et un plan stratégique pour les douanes ». Assaad Al Toufaili a aussi insisté : « Le rôle des douanes est non seulement de percevoir des redevances mais aussi de protéger l'économie et le citoyen ». Renforcer les relations libano-hongroises Mohamed Choucair a reçu le 27 avril dernier l'ambassadeur adjoint de Hongrie au Liban, Geza Mihalyi, ainsi que le président de la Chambre de commerce arabo-hongroise, Riad Naboulsi. Les discussions ont porté sur les moyens de développer les relations libano-hongroises, le renforcement de la coopération entre les secteurs public et privé des deux pays, et la mise en place d’un conseil d’affaires libano-hongrois. Dans son mot de bienvenue, le président des organisations économiques a fait part de son vif intérêt à renforcer les relations économiques entre le Liban et la Hongrie et à travailler dans les limites des moyens disponibles pour progresser sur cette voie. « Il y a beaucoup d'opportunités, notamment la nécessité d'augmenter les exportations libanaises vers la Hongrie », a assuré le responsable. Un vœu qui a été bien accueilli par le bord hongrois. L'ambassadeur adjoint et Riad Naboulsi ont noté le dynamisme de Mohamed Choucair et son intérêt pour le développement des relations économiques du Liban avec l'étranger, notamment avec la Hongrie. Ils ont aussi souligné « le grand intérêt de la partie hongroise dans le développement des relations économiques avec le Liban ». Une coopération renforcée avec des visites bilatérales des secteurs privés des deux pays et la création de partenariats d’affaires ont été décidés à l’issue de cette rencontre. Mohamed Choucair ouvre grand ses portes aux élèves du Collège international Mohammed Choucair a reçu le 25 avril dernier au siège de la Chambre de commerce de Beyrouth du Mont-Liban quatre élèves du Collège International (IC). Amin Choucair, Malek Damerji, Rafic Yaman et Ibrahim Tawil étaient accompagnés de leur professeur Farah Marchi. Avec le président des organisations économiques, ils ont notamment discuté des élections législatives le 6 mai dernier et de leur importance dans le renouvellement de la vie politique. Mohamed Choucair a notamment expliqué à la nouvelle génération l’importance de la tenue de ces élections après neuf ans, lesquelles ont permis de redonner vie à la démocratie libanaise. Il a ajouté : « Nous avons entendu ces dernières années de nombreuses critiques visant le pouvoir et uu
Numéro 81 | PAGE 4 ECONEWS tt ACTUS DU MOIS les politiciens. Je pense que l'occasion est venue de choisir qui travaille pour l’intérêt supérieur du Liban et de son peuple. Mohamed Choucair a donné la priorité « à l’économie libanaise qui devrait être au cœur des futures politiques afin de retrouver un essor et une confiance des investisseurs, notamment étrangers ». Déclaration de Federica Mogherini à l'occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse « Nous célébrons aujourd'hui la Journée mondiale de la liberté de la presse dans un contexte difficile pour le journalisme. La liberté d'expression et la liberté de la presse sont menacées dans le monde entier », a déclaré la haute représentante, Frederica Mogherini, au nom de l’Union européenne, à l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse, le 3 mai dernier. « Les attaques contre les médias et les journalistes sont des attaques contre la démocratie, contre la liberté de chacun d'entre nous. Nous rendons hommage à tous les journalistes qui, en Europe et dans le monde, ont perdu la vie dans l'exercice de leur profession. Nous appelons tous les États à condamner les violences commises à l'encontre de journalistes, à prendre des mesures afin d'améliorer la sécurité des journalistes, en accordant une attention particulière aux femmes journalistes, et à traduire en justice les auteurs et les instigateurs de ces violences », a-t-elle poursuivi. « Le respect de la liberté d'expression est intégré dans tous les programmes de développement et politiques de l'UE. (…) L'UE continuera à financer des projets ciblés dans les pays tiers destinés à améliorer la qualité du journalisme, l'accès aux informations publiques et la liberté d'expression », a aussi affirmé la responsable. Les prix des appartements à Beyrouth toujours en baisse Selon l’agence de conseil Ramco, qui a recensé 194 nouveaux projets dans la capitale, les prix affichés ont baissé de 1,8% en 2017. C’est la plus forte correction depuis 2014. Les difficultés du marché immobilier ne faiblissent pas. Au contraire, le baromètre de Ramco relève qu’ « en 2017 les prix demandés par les promoteurs, qui excluent toute marge de négociation et tout escompte, n’ont jamais autant baissé depuis 2014 ». Le communiqué note aussi que de 2014 à 2016, la baisse s’était située entre 0,7 et 1,5%. Elle s’est amplifiée en 2017 avec une baisse de 63 dollars par m2 dans les projets en construction. Cela représente une baisse d’environ 5 % des prix annoncés depuis quatre ans. ECO NEWS The Chambers Newsletter PUBLICITÉ Information Tarifs Surface Pub Dimension Prix Page pleine 21cm L x 30cm H $ 1,000 Demi-page 21cm L x 14.5cm H $ 600 Quart de page 9cm L x 14.5cm H $ 400 Manchette bas de page 19cm L x 6cm H $ 250 Diffusion: 22 000 destinataires: chambres de commerce des pays médi- ter- ranéens, ambassades du Liban, ministères, parlementaires, ambassades étrangères, sociétés commerciales, industrielles, de services, syndicats, organi- sations et commissions économiques, banques. Website: www.ccib.org.lb Email: econews@ccib.org.lb Call: 1314.ext.14 | +961.1.353390.ext.14 | +961.1.353190.ext.259 / 272
ECONEWS Numéro 81 | PAGE 5 Nouveau parlement : du pain sur la planche en matière de législation ! Sasha Boutros La nouvelle Assemblée devra se pencher sur de nombreux projets de loi en gestation ou croulant depuis des années dans les tiroirs de l’Hémicycle, essentiels pour la mise en application du plan CEDRE et la relance de l’économie. L’élection d’un nouveau Parlement le 6 mai dernier, qui a mis fin à une longue période d’absence de re- nouveau parlementaire, constitue certes un pas positif vers le re- nouvellement de la vie institution- nelle au Liban. Mais la reconduc- tion des mêmes partis politiques au pouvoir, à quelques nuances près, n’augure pas d’une nouvelle phase en matière de réformes lé- gislatives, désormais plus que né- cessaires pour éviter un effondre- ment du pays. Si l’ancienne Assemblée a réus- si, depuis l’élection d’un nouveau président fin 2016, à entériner plu- sieurs lois relatives à l’économie, dont celles des Finances de l’État risque de faire basculer le pays Si le plan est critiqué par certains pour 2017 et 2018, après douze dans l’inconnu. car non inscrit dans le cadre d’un ans de fonctionnement sans bud- schéma global de transports qui get, du partenariat-public-privé Le Parlement actuel devra égale- couvre l’ensemble du territoire, (PPP) – mise en veilleuse durant ment entériner des décrets d’ap- il n’en reste pas moins essentiel une décennie – et le dispositif plication liés à la loi sur le PPP, pour désengorger la capitale et nécessaires à la concrétisation fiscal relatif à l’exploration et l’ex- ses environs. de nombreux projets infrastructu- ploitation du gaz offshore, ayant rels aussi bien dans le cadre de la Le Parlement devrait également permis de lancer le premier appel conférence CEDRE qu’en dehors. mettre à jour le schéma directeur d’offres, la nouvelle Assemblée a encore beaucoup de pain sur la Toujours sur le plan infrastructurel, d’aménagement territorial, ayant planche. Le vote des quatre pro- une panoplie de lois devront être fait l’objet d’un décret présiden- chains budgets, dans les délais avalisées par la nouvelle assem- tiel en 2009, et le transformer en constitutionnels, et conformément blée : le projet de développement loi-cadre contraignante qui tienne aux engagements du Liban à CE- des transports en commun dans le compte des évolutions au cours DRE, consistant, parmi d’autres, à Grand Beyrouth approuvé par la des neuf dernières années, dont réduire le déficit budgétaire à 5% Banque mondiale - qui prévoit la les découvertes de gaz offshore. du PIB d’ici à cinq ans, constitue construction de 40 kilomètres de Des lois spécifiques pourront, par l’exercice le plus basique mais voies rapides et la circulation de la suite, en découler concernant sans doute l’un des plus capitaux 120 grands bus - doit encore être chaque domaine propre à l’amé- à mener par le Parlement actuel. approuvé par le conseil des mi- nagement : transports publics, es- Tout manquement à cet égard nistres, puis par le Parlement. paces verts, routes, préservation uu
Numéro 81 | PAGE 6 ECONEWS tt et organisation de l’espace agri- quelques amendements y ont été chain Parlement. cole, etc. apportés au cours des cinq der- nières décennies. Mise en garde de Fitch Dans le domaine pétrolier et ga- zier, une panoplie de lois capi- Sur le plan économique, le dérou- Dans ce registre, le Parlement ac- tales pour le lancement en bonne lement et les résultats des élec- tuel devra ainsi réexaminer le der- et due forme du secteur doit, par tions législatives du 6 mai n’ont pas nier amendement ayant permis ailleurs, faire l’objet d’un vote au toutefois suffi à rassurer certains l’extension de la couverture san- cours des quatre prochaines an- au Liban comme à l’international, té aux retraités. Votée en janvier nées : la loi sur la création d’un notamment les institutions concer- par l’ancienne Assemblée, cette fonds souverain – dont la struc- nées par l’évolution dramatique avancée sociale majeure exclut ture gouvernante et les principes de la situation socioéconomique, plusieurs catégories profession- de dépôt et de retrait ont fait et y compris les principales agences nelles (ex : les enseignants dans de notation financière. feront, sans doute encore, l’objet les écoles privées) et s’applique d’âpres discussions -, la loi sur par ailleurs aux personnes dont L’agence Fitch a ainsi souligné la transparence dans le secteur le départ de la vie professionnelle dans un communiqué publié au (dont le principe de divulgation s’est effectué après le 16 février lendemain du scrutin que les ré- des informations n’est pas en- 2017, date de la publication de la sultats des élections « n’ont pas core en phase avec les normes loi au Journal officiel. fondamentalement modifié le statu de bonne gouvernance), la loi sur quo politique » malgré l’adoption la création d’une direction des ac- d’une nouvelle loi électorale, crai- tifs pétroliers au sein du ministère gnant que les enjeux confession- des Finances – dont les préroga- nels continuent de « freiner » l’ac- tives sont à définir de sorte à ne UN RETARD DANS LA FORMATION tion publique et le lancement des pas empiéter sur l’autonomie du D’UN GOUVERNEMENT réformes exigées par les créan- fonds souverain - ainsi que la loi EMPÊCHERAIT L’ÉTAT DE MENER ciers et les soutiens du pays. Fitch sur la création de la compagnie a ajouté que l’ancrage du pouvoir pétrolière nationale. Le Parlement EFFICACEMENT TOUTE NOUVELLE du Hezbollah au Parlement expose actuel devra également discu- POLITIQUE EN 2018 un peu plus le Liban « aux tensions ter de la loi sur l’exploration des liées à l’Iran ». ressources pétrolières et gazière onshore, à la lumière des opéra- Le premier défi dans ce contexte, Les lois sur la protection de l’envi- poursuit Fitch, consiste pour la tions de balayage aérien ayant ronnement et du patrimoine cultu- classe politique à s’entendre ra- couvert le territoire, de sorte à rel constituent par ailleurs une pidement sur la formation d’un profiter de cette manne tout en nécessité non moins importante nouveau gouvernement. L’agence tenant compte du respect de l’en- que celles mentionnées ci-des- a exprimé à cet égard son scep- vironnement et des communautés sus. D’autres lois relatives aux ticisme quant à la capacité des locales dans les lieux d’éventuels droits des femmes, qu’il s’agisse politiques libanais à parvenir ra- forages et exploitation. de la transmission de la nationa- pidement à un consensus. Or, un Au niveau social, un dossier sans lité ou des différentes formes de retard dans la formation d’un gou- cesse reporté depuis cinq dé- violences subies, ou encore des vernement empêcherait l’État de cennies devrait en priorité être textes légaux ayant trait à l’évo- mener efficacement toute nouvelle remis sur le tapis : le régime de lution des libertés individuelles et politique en 2018, alors qu’il s’est couverture sociale et d’assurance collectives, à l’instar de l’abolition engagé à lancer au plus vite d’im- vieillesse, pour lequel un nouveau ou l’amendement de la loi sur l’ho- portantes réformes structurelles projet de loi est prêt mais n’a tou- mosexualité et le vote d’une loi sur dans le cadre de la conférence jours pas été adopté. La loi ac- le mariage civil, devraient égale- CEDRE qui s’est tenue début avril tuelle date de 1963, sachant que ment figurer à l’agenda du pro- à Paris, a mis en garde Fitch.
ECONEWS Numéro 81 | PAGE 7 Les trois visages de la réforme Roger Khayat Le gouvernement sortant a réussi une prouesse qui a étonné le monde, un acte de foi dans la nation. Il a rassemblé 250 grands projets d’une valeur de 23 milliards de dollars à exécuter en 12 ans, s’est présenté avec à Paris en avril dernier pour la conférence CEDRE, et a finalement obtenu le financement de la moitié d’entre eux. Ce financement est soumis à une condition : le Liban doit opérer des réformes. Quelles sont-elles ? En attendant que la France et la Banque mondiale se prononcent, les spéculations vont bon train. Et pour cause. Les édiles et les experts libanais font nécessaire- ment partie de la consultation. Pour certains, la réforme est syno- nyme d’équilibre budgétaire et de stabilisation de la dette. Pour d’autres, elle consiste princi- palement à éliminer la corruption surtout dans ses deux principaux aspects : la partialité monnayée dans les adjudications et le favo- ritisme dans l’emploi. l’effet est d’exacerber la crise. Les élections viennent de s’ache- ver. Elles ont dégagé les lignes Enfin, un troisième groupe insiste Il faut se rendre à l’évidence : ce qui déterminent un « pouvoir sur les tares qui minent la produc- n’est pas par l’équilibre financier fort ». Une poignée d’hommes tivité. qu’on retrouvera la productivité, peut s’entendre pour les mettre mais par la productivité qu’on re- en œuvre. Ils doivent le faire sans Critères de base trouvera l’équilibre financier. En- concession ni faiblesse car le sa- Il est impossible de s’atteler aux rayer la corruption ne ramènera pas lut de la République en dépend : trois aspects à la fois. Comme il la prospérité, mais aucune prospé- l’endurance sociale n’est plus loin est peu probable d’obtenir un ré- rité n’est envisageable dans un en- de son seuil de rupture. sultat en les traitant séparément. vironnement corrompu. Ceci dicte clairement les priorités qui rendent La première manifestation de l’au- D’ailleurs, une grande partie des la réforme possible. torité est dans la réforme, l’indé- mesures soi-disant favorables se- pendance et la suprématie de la raient contradictoires. La réforme fiscale dans une conjoncture dé- Tout repose sur le pouvoir justice. Le président Aoun a ex- primé son appui aux magistrats flationniste ne peut qu’exacerber Durant le court laps de temps du- au lendemain de son élection. la crise. Le marasme dans le sec- rant lequel Bachir Gemayel a accé- Il est temps que la justice rede- teur privé ainsi que le favoritisme dé à la tête de l’État, aucun fonc- vienne le garant absolu du droit dans le secteur public dégradent tionnaire n’a accepté de pot de vin, et le gardien de la liberté et de la la productivité nationale. Les pro- aucun entrepreneur n’a cherché démocratie dans le pays. jets, en l’absence de production, de passe-droit, l’administration n’a provoquent des tensions inflation- connu aucune absence ou retard Croissance et productivité nistes qui nécessitent une poli- injustifiées, aucun encaissement Il faut savoir que ce sont deux tique monétaire restrictive dont indu. facteurs autonomes. La producti-
Numéro 81 | PAGE 8 ECONEWS tt vité génère de la croissance et de Le Liban a déjà perdu une grande Conclusion l’emploi. Mais il peut exister de la partie de ses cadres qualifiés, et le Les mesures qui se trouvent sur le croissance sans amélioration de mouvement s’est accéléré ces der- chemin critique des réformes, c’est la productivité, notamment à tra- nières années par la déconfiture à dire qui sont indispensables, et vers la protection en mettant un d’un nombre croissant d’entreprises qui peuvent s’opérer au plus vite et plus grand nombre d’individus au de production, en l’absence d’em- à moindre coût sont les suivantes : travail. C’est un cas classique qui bauche ailleurs. De même, les étu- 1. Un pouvoir fort capable d’impo- permet de résorber pour un temps diants les plus doués s’expatrient ser les réformes, et qui assume le chômage, mais n’améliore pas dès l’obtention de leur diplôme. Le d’abord la consolidation du sys- le niveau de vie du citoyen. À long Liban, qui génère les ressources tème judiciaire sur lequel tout re- terme, le retard que prend la na- humaines les plus qualifiées de la pose en fin de compte ; tion devient irréversible. région, en dispose de très peu pour 2. Une justice indépendante, ga- Comme la croissance peut pro- ses propres entreprises. rante du droit, des libertés, de venir d’une majoration des profits Budget et dette publique l’exercice de la démocratie, et de que facilite l’économie de rente l’application impartiale des lois ; Rien de cohérent ne peut être fait dans les secteurs privilégiés. avant de rationaliser les taux appli- 3. Le respect et la stricte applica- Malheureusement, dans une telle qués à la dette publique. Le Liban tion des lois priment sur tout pro- conjoncture, le chômage demeure est en train de payer en moyenne jet portant leurs modifications ; élevé, la productivité basse, l’iné- 6% alors que le peg au dollar se lesquelles sont souvent proposés galité sociale se creuse, la classe pour faire échec aux lois en vi- maintient depuis plus de 20 ans. Il moyenne disparaît, les bruits de gueur et retarder leur application ; est urgent de s’approcher des taux la révolte deviennent audibles et internationaux ou d’abandonner le 4. Faciliter la fusion des entre- l’avenir incertain. peg. Un prolongement de la situa- prises en les exemptant de la La consolidation de la productivité tion actuelle serait hasardeux. La taxe sur la plus-value de l’actif et est la seule voie économique qui situation est suffisamment complexe du quitus qui sera pris en charge s’identifie à la réforme. Elle repose pour justifier ce que nombre de dé- par la nouvelle entité ; sur deux facteurs : le capital tech- putés réclament depuis un certain 5. Créer une administration indé- nique et les ressources humaines. temps déjà : une administration in- pendante de la dette avec les Les entreprises ont pris beaucoup dépendante de la dette. pouvoirs nécessaires pour la de retard dans la capacité de pro- Il est clair que le budget de l’État, gestion de l’émission et la déter- duction des biens et services, ce après les exercices de 2017 et mination des taux d’intérêt ; qui explique le déficit abyssal du 2018, est dans la bonne voie. Le 6. Refonte de la politique fiscale compte courant. Pour remonter la document a énormément gagné en avec un objectif absolu, celui de pente, il faut créer un environne- clarté et permet de dégager deux réduire les inégalités parmi les ment qui facilite aux entreprises lignes d’action prioritaires. La fraude couches de la population. le moyen d’atteindre leur seuil fiscale est loin d’être le problème Il n’est pas nécessaire de se bra- optimum de productivité. L’action majeur de la politique fiscale ; la tare quer sur la corruption, l’application la plus radicale est la fusion des principale se situe dans l’inégalité des lois en vigueur suffirait à l’en- entreprises similaires ou complé- des revenus que favorise cette po- rayer. De même les nombreuses mentaires dont l’effet immédiat litique. Le gel de l’embauche dans mesures auxquelles les uns et les est dans la rationalisation des l’administration civile est une erreur autres sont attachés peuvent être coûts et l’amélioration du mar- monumentale. Aucune réforme très louables, elles ne peuvent en- keting et du management. C’est n’est possible avant de pourvoir diguer les risques que nous cou- bien ce qui s’est passé au niveau aux postes vacants. L’allocation aux rons en ce moment si la réforme des banques à partir des années salaires et bénéfices de l’adminis- n’a pas lieu. Demeure le grand 1990. La taxe sur la plus-value de tration s’élève à environ 3% des dé- dossier de Taëf sur le confession- l’actif et l’exigence de quitus sont penses publiques, et rien ne justifie nalisme et ses effets nocifs. Il est les éléments critiques qui em- le gel d’une embauche rationnelle certain que la réforme, comme pêchent aujourd’hui la fusion des soumise aux règles et conditions du l’avait prévue la conférence, serait entreprises. conseil de la fonction publique. la voie royale à son dépassement.
ECONEWS Numéro 81 | PAGE 9 Les enjeux de la lutte contre la corruption à l’ESA Comment lutter contre la corruption ? À l’initiative de l’avocate Sandrine Richard, l’École supérieure des affaires a organisé le 3 mai dernier une conférence intitulée « défis et remèdes ». Elle a rassemblé un parterre d’experts ainsi que l’ancien ministre français des Finances, Eric Woerth. « Il est important pour notre grande école de management de pouvoir ac- cueillir cette rencontre initiée par Me Sandrine Richard, parce que notre mission est de former des managers, des jeunes et moins jeunes dirigeants et de les sensibiliser au phénomène de la corruption auquel ils ne pour- ront pas échapper », confie le direc- teur général de l’ESA, Stéphane Attali, Démarrage de la conférence en présence notamment de l'avocate Sandrine Richard et interrogé par Econews en marge de de Alain Bifani, directeur général du ministère des Finances. la conférence. « Ce phénomène est phénomène dans sa réalité profonde, Pour Charbel Massaad, doyen de global, on le retrouve dans tous les pour porter un jugement rationnel et l’Université Paris Descartes : « La cor- pays et pas seulement dans les plus déterminer des mesures salutaires. ruption est un mal global qui appauvri pauvres », ajoute le responsable. Oui, il s’agit d’abord d’un abus de pou- les peuples en assouvissant quelques D’où l’importance selon lui de préve- voir, de détenteurs de postes de res- hommes ». Pour y remédier, il propose nir et sensibiliser les diplômés et fu- ponsabilité qui détournent des avan- « de se doter d’un arsenal juridique turs diplômés qui durant leur carrière tages à leur profit personnel. C’est qui réprime et d’enseigner les bonnes ne pourront pas échapper à ces pro- l’un des torts causés aux citoyens », pratiques à travers l’éducation ». blématiques. « Être sensibilisé, c’est a-t-il affirmé. « Là où il y a corruption, déjà se préparer et être mieux armé il ne peut exister de développement », Défis et outils de lutte contre la pour faire face à ces enjeux et défis », a-t-il assuré. Le responsable a aussi corruption assure-t-il. salué l’opportunité CEDRE, « le train Lors d’un premier panel « Corruption: de la dernière chance pour relancer De l’importance de la prévention l’économie, reprendre le chemin de un moyen de dissuasion pour les in- En ouverture de la conférence, San- vestissements publics et privés », Phi- l’investissement (…), à condition que drine Richard, seule avocate anti-cor- lippe Montigny, le président d’Ethic la corruption ne s’en mêle pas à nou- ruption accréditée au Moyen-Orient, a Intelligence, a donné quelques ou- veau ». déclaré : « À ma petite échelle, j’es- tils : « Une entreprise qui a le pouvoir « Dans ma carrière j’aurais pu être cor- d’afficher clairement et visiblement saye de prévenir et de sensibiliser car rompu à maintes reprises mais s’en- ses objectifs anti-corruption a déjà un j’aime le Liban, mon pays d’origine, dormir du sommeil du juste n’a pas atout ». « L’autre moyen de rassurer et en tant qu’avocate et personne, il de prix », confie à son tour Jean-Paul les investisseurs est l’obtention de la est de mon devoir de former la future Vermès, le président de HEC Paris norme ISO 37001, systèmes de ma- génération ». L’avocate a notamment et vice-président de l’ESA. Selon lui, appelé « les secteurs privé et public nagement anti-corruption, qui définit dans toute ascension professionnelle, libanais à se mettre sur une même une série de mesures pour aider les de nombreuses personnes tenteront table pour envisager des solutions organismes à prévenir, détecter et de vous corrompre et l’accepter, c’est concrètes qui permettraient de lutter traiter les problèmes de corruption ». « attirer la délation et s’empêcher de au quotidien contre la corruption ». « L’entreprise met ainsi en place un dormir ». Il ajoute : « La philosophie de À son tour, Mohamed Choucair, le processus vertueux », a-t-il expliqué. l’ESA et d’HEC est d’apprendre aux président des organisations écono- jeunes à ne jamais tenter leur chance « Pour se protéger, elle doit aussi miques s’est penché sur les méfaits dans la corruption défendant plutôt la vérifier si ses partenaires et intermé- de la corruption au Liban. « Il faut que culture d’apprendre à vivre dans des diaires en font de même ». les citoyens prennent conscience du conditions décentes ». « La corruption est le terreau fertile uu
Numéro 81 | PAGE 10 ECONEWS tt d’un pays qui touche en premier lieu qui ont été enregistrées notamment : ruption qui ne vienne pleurer sur les à son attractivité », a expliqué ensuite 1- « Le Liban a réussi à élargir son as- plateaux télévisés et l’absence de Eric Woerth, ancien ministre français siette fiscale en multipliant par six le plainte. des Finances. Il rappelle que la France nombre de contribuables inscrits en - L’argent quand ça vient c’est bien. a beaucoup évolué ces dernières an- moins de quinze ans. Cela contribue Alors ça ne pousse pas certains inter- nées en créant la Haute autorité de grandement à limiter l’enrichissement médiaires à dénoncer la corruption. la transparence dans la vie publique. illégal de certains sur le dos de la D’ailleurs, comment lutter contre cet « L’attractivité n’est pas possible pour communauté. argent qui n’a pas d’odeur dans une un pays ou une entreprise sans des structure souvent opaque ? règles stables », a-t-il aussi défendu. 2- Aucune région libanaise ne reste D’où l’intérêt pour un pays « d’avoir réfractaire à l’impôt. En attendant de - Pas de culture de la corruption. Ce une armature administrative, fiscale et collecter tout ce qu’il faut collecter, les sont des acquis et des habitudes gouvernementale saine ». Le numé- régions les plus récalcitrantes com- prises surtout quand la corruption est rique est aussi un outil pour assainir mencent à jouer le jeu. à tous les étages de façon invisible. un certain nombre de pratiques. 3- Pour une fois, certaines mesures - L’instrumentalisation de la lutte Le rôle des lanceurs d’alerte a aussi permettant de rendre les citoyens contre la corruption pour éliminer la été abordé. « Il faut faire attention à égaux devant l’impôt ont été prises, concurrence rend la sensibilisation la frontière fine qui existe entre déla- et on a soumis à l’impôt des activités difficile. » tion et alerte, entre dénonciation et vie et des lobbies qui avaient réussi à De son côté, Charles Duchaine, di- privée surtout dans une démocratie », s’en soustraire très longtemps. Cela recteur de l’Agence française anti- prévient l’ancien ministre. a permis de limiter des pressions corruption (Afa), a soutenu que l’édu- supplémentaires sur les gens qui cation est le meilleur moyen de prise Alain Bifani : Le grand chantier respectent la loi. de conscience des nouvelles généra- de la transparence fiscale a 4- Le grand chantier de la transpa- tions. « Lutter contre la corruption se réussi envers et contre tout rence fiscale a réussi envers et contre fait aussi à travers des valeurs qu’on tout. Nous avons gagné une bataille inculque », a-t-il assuré. « La corrup- « Parce qu’il ne suffit pas de dénoncer féroce qui a permis au Liban d’échap- tion a toujours existé et la sanction a la corruption, c’est d’action dont nous per aux listes noires du G20, de l’OC- encore ses mérites, pas pour l’éra- avons besoin », défend Alain Bifani, DE et de l’Union européenne. Les lois diquer mais pour l’amener à un seuil directeur général du ministère des et règlementations passées ouvrent la raisonnable », a-t-il poursuivi. « Il faut Finances. « Tant qu’on ne se soumet voie à une plus grande transparence surtout se poser la question suivante : pas à la loi quelle qu’elle soit, com- et à la lutte contre la corruption. dans quel monde voulons-nous vivre ? battre la corruption restera dans le Surtout dans un monde où l’argent a meilleur des cas un exercice digne de 5- Nous avons également réussi à nous mettre au diapason de la légis- été érigé comme seule valeur dans Sisyphe », a-t-il expliqué. « Contrai- nos sociétés actuelles ». C’est pour- rement à une idée reçue, la corrup- lation relative à la lutte contre le blan- chiment d’argent et le financement du quoi, l’expert a préconisé « une volon- tion n’est pas confinée à la sphère té politique réelle et pérenne et d’éviter publique. Elle trouve son équivalent terrorisme. la confusion entre pouvoir et argent ». puissant et bien ancré dans le privé », 6- Le pays entier est sensibilisé sur a-t-il rappelé tout en reconnaissant le sujet et les citoyens commencent Constats et recommandations que l’administration libanaise devait à mesurer l’impact de la corrup- Si les intervenants ont reconnu que la être reformée et nettoyée des corrup- tion sur leur vie quotidienne, et les lutte contre la corruption est un travail teurs. Mais il a refusé que l’on jette responsables vont probablement de longue haleine, ils ont aussi estimé l’opprobre sur tous les fonctionnaires. commencer à sentir le besoin d’agir que le moment est propice car la prise Pour le responsable, les premiers contre ce fléau.» de conscience est internationale. Ils signes sérieux de lutte contre la cor- Prise de conscience ont assuré que la lutte ne doit pas être ruption sera « le renforcement des lois en façade, il s’agit d’agir avant de par- et de l’arsenal judiciaire ». Lorsqu’il Pour Bruno Dalles, à la tête de Trac- ler. Elle doit aussi être collective entre verra cela se produire, il saura que le fin, la cellule de renseignement an- plusieurs pays et les sanctions glo- processus est enclenché au Liban. tiblanchiment de Bercy, la prise de bales. Ils ont appelé à repenser une Après avoir dressé un constat plutôt conscience est difficile mais néces- définition commune. Aussi la justice noir, Alain Bifani a cependant reconnu saire pour les raisons suivantes : doit être indépendante, une condition qu’il y a beaucoup de petites victoires - « Pas de victime en matière de cor- sinequanone.
ECONEWS Numéro 81 | PAGE 11 La loi des PPP, un outil de transparence Marilyne Jallad Pour Ziad Hayek, le secrétaire général du Haut Conseil de la Privatisation (HCP) et des partenariats public-privé (PPP), la législation entrée en vigueur en septembre dernier est capitale pour la relance de l’économie du pays. À quoi va servir cette loi ? d’experts financiers est nécessaire. Le premier objectif est la transparence. C’est pourquoi, partout dans le monde, Cinq éléments dans la loi l’assurent : on a établi des unités spécialisées en PPP. Notre loi a elle aussi prévu d’éta- 1- Faire participer toutes les parties blir cette unité au sein du HCP. prenantes à l’élaboration du cahier des charges. Ce n’est donc plus l’af- Le troisième objectif est de rassurer faire exclusive d’une administration ou le secteur privé. Ceci est effectué en d’un ministère. Les documents sont sauvegardant les droits du partenaire distribués à tout le monde, il n’y a plus privé, en ce sens la loi stipule que les d’obscurité. compagnies pré-qualifiées seraient consultées sur le cahier des charges 2- Consulter les compagnies pré-qua- et sur les contrats et auraient la possi- lifiées sur le cahier des charges et le bilité de faire appel à un arbitrage local contrat de partenariat. Ceci permet de ou international. Ainsi, elles participent s’assurer que le document n’est pas avec nous en partenariat pour exécu- taillé sur mesure pour une compagnie ter ce projet. Ziad Hayek. au détriment d’une autre. Quel est le travail effectué en amont 3- Le contrat de partenariat doit faire pour chacun de ces projets. Ces depuis l’adoption de la loi en ce qui partie du cahier des charges. Lors- consultants travaillent avec le comité concerne les projets et l’organisa- qu’une compagnie participe à l’ap- du projet dans chaque cas pour l’ai- tion en interne ? pel d’offres, elle connaît d’avance le der notamment à écrire le cahier des Nous avons dû nous organiser en in- charges et gérer la transaction. contrat à signer en cas de victoire. terne en travaillant sur des décrets 4- On ne peut pas adjudiquer le contrat Le premier est celui du Terminal 2 de expliquant comment on va travailler s’il y a moins de trois offres. S’il n’y a l’aéroport International Rafic Hariri. au sein du HCP. Nous avons soumis que deux offres, on refait l’adjudication Nous venons de signer un contrat ces décrets au conseil d’État en février avec l’accord du conseil des ministres. avec IFC (International Finance dernier. Puis en mars dernier, nous Si l’on n’en reçoit qu’une, il n’est pas Corporation). Nous nous donnons 21 avons organisé une conférence trai- possible d’adjudiquer l’appel d’offres. mois pour terminer l’appel d’offres et tant des PPP au sein du Capital Invest- Il faut recommencer tout le processus l’adjudiquer. ment Plan (CIP) du gouvernement, une dès le début. Un processus long qui étape préparatoire à la Conférence Le deuxième est la route qui mène de prend plus d’un an. économique pour le développement, Khaldé à Nahr-Brahim. Pour réaliser ce 5- Une fois que l’adjudication a été par les réformes et avec les entre- projet, nous avons un contrat avec la faite, la compagnie pré-qualifiée devra prises (CEDRE) à laquelle nous avons Banque européenne pour la recons- présenter un rapport au gouvernement participé. Enfin, nous venons de signer truction et le développement (BERD). tous les six mois pour prouver qu’elle des contrats avec des conseillers qui Le projet devrait prendre trois ans. avance en adéquation avec le contrat. vont nous aider à lancer des appels Le troisième est la création d’un centre Le deuxième objectif de la loi est de d’offres. de données, un « cloud » libanais qui garantir le professionnalisme notam- Le Haut conseil de la privatisation et inclura tous les serveurs Internet. Pour ment du gouvernement. Que ce soit au des PPP a mandaté le Secrétariat gé- ce projet qui doit prendre 14 mois, Liban ou ailleurs, les ministères ont des néral pour trois projets prioritaires. nous avons signé avec KPMG et avec experts en matière de secteur mais ils Qu’en est-il ? la compagnie Solon. n’en n’ont pas en matière de finance, Oui, nous avons été mandatés par le Avec ces équipes nous travaillerons de structuration de financement et sur HCP pour la mise en place de trois jusqu’à la mise en place et le lance- le plan légal. C’est là où l’expertise projets. Nous avons signé des contrats ment de l’appel d’offres. Les choses d’avocats, de banquiers d’affaires et avec des conseillers en appels d’offres avancent, ce sont les premiers pas,
Numéro 81 | PAGE 12 ECONEWS tt nous sommes confiants. ce long processus. Je suis bien sûr des problèmes avec les PPP, notam- Que peuvent apporter ces trois pro- très content et j’espère qu’à l’avenir ment par manque de transparence. jets en termes d’emplois ? nous ne ferons plus que des projets Ainsi, nous pourrons réaliser le rêve Ils devraient générer environ 100 000 de PPP qui seront soumis à cette loi. Elle assure le succès des projets alors que nous avons tous de voir une in- opportunités d’emplois dans différents secteurs d’ici cinq ans. Mais il est im- qu’auparavant nous avions toujours frastructure moderne au Liban. portant de noter que ce sont des em- plois qui ont une durée de vie limitée Jacques Sarraf : Parler de lacunes avant par projet et par mission. Beaucoup estiment que CEDRE est l’application de la loi n’est pas sérieux l’opportunité de la dernière chance Longtemps président de l’Association des indus- pour que le Liban évite la faillite. triels, son doyen, l’homme d’affaires Jacques Comment la loi des PPP rejoint CE- Sarraf, estime que l’entrée en vigueur du parte- DRE ? nariat public-privé est « une opportunité pour le CEDRE est effectivement une dernière Liban de faire redémarrer l’économie nationale opportunité pour le Liban pour assai- sans alourdir le fardeau des finances publiques». Jacques Sarraf. nir sa situation économique, monétaire Quels sont les avantages de l’adoption de cette loi pour l’économie en et fiscale et bien sûr relancer l’inves- général et l’industrie en particulier ? tissement dans l’infrastructure. Or, pour accomplir ces points, il faut deux Nous avons une réelle opportunité de faire progresser notre économie sans conditions sinequanone : la confiance, alourdir le fardeau des finances publiques. Le partenariat entre les secteurs c’est à dire une réduction drastique public et privé est désormais à portée de main, après l’adoption d’une loi de la corruption. On en revient donc que l’on attendait depuis plus de dix ans. Elle est le moyen de parvenir à une à la transparence. Secundo, il s’agit reprise économique, de réduire le gaspillage et le déficit croissant. d’adopter les bonnes pratiques, les Je pense que la période post-élections parlementaires et les résultats obte- bons projets et de travailler de manière nus lors de CEDRE seront prometteurs. Je crois aussi que l’adoption de cette professionnelle. C’est là où la loi des loi a encouragé les pays participants à promettre au Liban de financer des PPP rencontre CEDRE ainsi que nos projets majeurs. ambitions et espoirs, attentes et rêves Nous attendons que le prochain gouvernement élabore un plan d’urbanisme pour le Liban. Finalement, qu’attend le financé et géré en partenariat avec le secteur privé, en particulier pour l’in- citoyen de CEDRE ? Il souhaite avoir frastructure qui doit être rénovée et développée dans les domaines de l’éner- confiance en son gouvernement, qu’il gie, de l’eau, des routes, des communications et des stations d’épuration. ne soit pas corrompu et qu’il travaille Ces projets représentent une priorité. La participation du secteur privé en- de manière professionnelle. courage les résidents libanais et les expatriés à employer leurs investisse- Certaines personnes mettent en ments et leur potentiel humain dans la reconstruction de leur pays et de réa- doute cette loi. Quelles sont les cri- liser le miracle à nouveau. tiques auxquelles vous souhaiteriez Certaines voix se sont élevées pour dénoncer des failles dans cette répondre ? loi. Que répondez-vous ? Nous avons entendu ici et là des cri- Parler de lacunes dans la loi du partenariat avant même son application, c’est tiques et des craintes, notamment que manquer de sérieux ! La vérité c’est que le retard de son adoption a coûté des le gouvernement allait tout donner au milliards de dollars à l’économie nationale. Le partenariat permettra de mettre secteur privé et aux plus riches. Or, les capacités de financement et les compétences administratives du secteur ces critiques ne sont fondées sur rien. privé au service de l’État. Les PPP ce n’est donc pas seulement un partenariat Certains n’ont même pas lu cette loi. dans les bénéfices et les capitaux, mais aussi dans la prise de risque, ce qui le Elles relèvent soit de l’idéologie soit de distingue de la privatisation et des contrats de gestion dans le secteur de télé- la peur. J’invite donc les Libanais à lire phonie mobile. On peut affirmer que le PPP est un projet de réforme qui stimule cette loi qui va les rassurer. toutes les capacités et ne se limite pas à la mise en œuvre des infrastructures, Durant des années, vous avez mais peut être étendu pour financer la reconstruction, la gestion et l’améliora- œuvré en coulisses pour faire adop- tion des services publics : écoles, hôpitaux, lignes de transports, ports, etc. ter ce texte. Êtes-vous satisfait ? Il s’agit d’un nouveau concept de gestion des affaires de l’État et d’élargisse- Depuis 2006, date à laquelle j’ai pris ment de la taille de l’économie, que nous devons utiliser pour assurer notre mes fonctions au HCP, je travaille sur stabilité, atteindre la croissance souhaitée et réduire la dette publique.
Vous pouvez aussi lire