Facteurs de succès dans la filière laitière

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Facteurs de succès dans la filière laitière
Facteurs de succès dans la filière
laitière
Projet mené en commun par la Commission des jeunes agriculteurs COJA, les Producteurs
Suisses de Lait PSL et la Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires
HAFL

29 mai 2018

Haute école spécialisée bernoise
Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires HAFL
Facteurs de succès dans la filière laitière
Vos interlocuteurs/-trices :

Direction de projet :      Martin Pidoux (martin.pidoux@bfh.ch)
Auteurs :                  Karin Ruchti (karin.ruchti@bfh.ch)
                           Melanie Glaus

COJA :                     Christian Schönbächler (c.schoenbaechler@junglandwirte.ch)
                           Judith Amgarten (j.amgarten@junglandwirte.ch)

PSL :                      Martin Rüeggsegger (martin.rueegsegger@swissmilk.ch)
                           Reto Burkhardt (reto.burkhardt@swissmilk.ch)

 Haute école spécialisée bernoise BFH
 Haute école des sciences agronomiques,
 forestières et alimentaires HAFL
 www.hafl.bfh.ch
 Martin Pidoux
 Länggasse 85
 CH-3052 Zollikofen
 Tél : +41 (0)31 910 29 84
 martin.pidoux@bfh.ch

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Facteurs de succès dans la filière laitière
Sommaire
Résumé                                                                                            5
1 Introduction                                                                                    6
2 Bases et définitions                                                                            7
    2.1 Création de valeur                                                                        7
       2.1.1 Définition de création de valeur en général                                          7
       2.1.2 Définition de la création de valeur dans la présente étude                           8
    2.2 Succès                                                                                   10
       2.2.1 Définition du succès                                                                10
3 Questions de recherche et hypothèses                                                           12
    3.1 Prix du lait                                                                             12
    3.2 Succès et facteurs de succès                                                             12
    3.3 Accroissement de la création de valeur                                                   12
4 Méthodologie                                                                                   13
    4.1 Sondage écrit                                                                            14
       4.1.1 Analyse                                                                             14
    4.2 Exemples de cas                                                                          14
       4.2.1 Sélection                                                                           14
       4.2.2 Interview                                                                           15
       4.2.3 Analyse                                                                             15
       4.2.4 Interprétation                                                                      15
5 Résultats                                                                                      16
    5.1 Résultats du sondage écrit                                                               16
       5.1.1 Évolution des structures                                                            16
       5.1.2 Prix du lait, généralités                                                           16
       5.1.3 Prix du lait vs quantité transformée                                                17
       5.1.4 Prix du lait par zone                                                               20
       5.1.5 Aperçu des facteurs de succès                                                       21
       5.1.6 Facteurs de succès (analyse quantitative)                                           23
    5.2 Résultats des exemples de cas                                                            26
       5.2.1 Description d’exemples de cas                                                       26
       5.2.2 Facteurs de succès tirés des exemples de cas                                        29
       5.2.3 Acteurs                                                                             31
       5.2.4 Produit et fabrication                                                              31
       5.2.5 Filières de vente                                                                   32
       5.2.6 Communication                                                                       32
       5.2.7 Stratégie des entreprises                                                           34
       5.2.8 Finances et comptabilité                                                            34
    5.3 Résultats de l’atelier                                                                   35
6 Synthèse générale                                                                              36
    6.1 De quels facteurs le prix du lait dépend-il ?                                            36
    6.2 Quels sont les facteurs de succès essentiels ?                                           37
       6.2.1 Rapports entre les acteurs                                                          38
       6.2.2 Produit, fabrication et communication                                               38
       6.2.3 Filières de vente                                                                   39
       6.2.4 Stratégie de l’entreprise, finances et comptabilité                                 39
7 Recommandations                                                                                40
    7.1 Comment encourager ou initier un accroissement de la création de valeur ?                40
8 Conclusions                                                                                    42
Légende des figures                                                                              44
Légende des tableaux                                                                             44
Bibliographie                                                                                    45
Annexe                                                                                           46

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Facteurs de succès dans la filière laitière
Légende des acronymes
AOC           Appellation d’origine contrôlée
AOP           Appellation d’origine protégée
COJA          Commission des jeunes agriculteurs
FLA           Fromageries et laiteries artisanales
HAFL          Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires
IGP           Indication géographique protégée
OP            Organisation de producteurs
OPU           Organisation de producteurs-utilisateurs
PSL           Producteurs Suisses de Lait
QR            Question de recherche
SAB           Groupement suisse pour les régions de montagne
USP           Union Suisse des Paysans

              Acteurs
              Produit et fabrication
              Filières de vente
              Communication
              Stratégie de l’entreprise
              Finances et comptabilité

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Facteurs de succès dans la filière laitière
Résumé
Auteurs : Martin Pidoux, Melanie Glaus, Karin Ruchti, COJA (projet de coopération)

Depuis la suppression du contingentement laitier, le marché suisse du lait se trouve dans une situation
difficile et doit continuer à rechercher de nouvelles solutions. Malgré la protection douanière, les prix
suisses restent fortement dépendants des prix européens et mondiaux. Quand les prix baissent sur ces
marchés, les prix suisses subissent une pression. Cela vaut non seulement pour le marché du fromage,
qui est ouvert à la concurrence de l’UE, mais aussi pour l’ensemble du marché du lait.

Dans ce contexte, la Commission des jeunes agriculteurs (COJA) et la Haute école des sciences
agronomiques, forestières et alimentaires (HAFL) ont développé un projet collaboratif axé sur le marché
du lait pour analyser les facteurs permettant d’augmenter la création de valeur. À côté des discussions
politiques au niveau des secteurs se pose la question de savoir comment faire, au regard de la situation
actuelle, pour accroître la création de valeur également dans le cadre de projets individuels. Existe-t-il
des facteurs centraux favorisant la création de valeur ? En principe, tout projet générant une plus-value
au niveau local, régional ou national représente un gain et une valeur. On analysera en outre par quel
moyen l’organisation de la branche pourrait encourager, voire initier un accroissement de la valeur
ajoutée (au niveau du marché et au niveau politique).

On a donc interrogé les fromageries, les organisations de producteurs-utilisateurs, les organisations de
producteurs, ainsi que des transformateurs industriels sur la valeur ajoutée, le succès et les facteurs de
succès au moyen d’un questionnaire en ligne. Pour obtenir un regard approfondi, on a réalisé sept
interviews avec des entreprises de transformation de la branche (exemples de cas). Les résultats et deux
exemples de cas ont été présentés et les facteurs de succès discutés et évalués lors d’un atelier avec
des représentants de la branche.

Les analyses et évaluations des questionnaires, des interviews et du travail réalisé en atelier montrent
qu’il n’y a pas de recette universelle. Les prix du lait payés aux producteurs sont très variables et liés à
la filière de vente. Accroître la création de valeur des produits laitiers, pour permettre aux producteurs
d’obtenir un meilleur prix du lait, demeure une gageüre. En effet, une augmentation de la création de
valeur n’entraîne pas forcément une hausse du prix à la production. Des exemples de réussite montrent
cependant qu’il est quand même possible dans la situation actuelle de verser aux producteurs de lait
un prix supérieur à la moyenne et de faire des bénéfices. Il faut pour cela du courage pour entreprendre
quelque chose de nouveau, du lait de haute qualité, une régulation claire des quantités, de la
transparence, une bonne collaboration entre producteurs et transformateurs, de la prévoyance, de la
passion, de la persévérance, de la ténacité de la part des producteurs et des transformateurs, une
stratégie claire, un produit différencié, une stratégie adaptée en matière de communication et de
marketing, des filières commerciales, de bonnes relations avec les clients et une clientèle disposée à
payer une valeur ajoutée pour le produit correspondant. Il est donc important qu’il existe un
engagement commun fort tout au long de la filière de création de valeur.

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1 Introduction
En Suisse, quelque 21 000 producteurs de lait possédaient en 2017 un cheptel de 532 000 vaches
laitières (PSL 2017). La quantité de lait commercialisée s’est élevée en 2017 à 3,43 millions de tonnes
(rapport agricole 2017). Une exploitation laitière moyenne exploite environ 24 hectares, possède
25 vaches et vend 150 000 kilogrammes de lait (PSL 2017). On note à cet égard de grandes disparités
entre les régions. D’une part entre les régions de montagne et de plaine et d’autre part entre les types
de production et les surfaces exploitées. Le lait produit est transformé par 600 fromageries et
90 laiteries. Cependant, les quatre plus grandes laiteries assurent la transformation d’environ 90 % du
lait de centrale (PSL 2017).

Depuis la suppression du contingentement laitier en 2009, la situation sur le marché a changé du tout
au tout pour les producteurs. En raison du lien étroit avec le marché mondial, les prix du lait en Suisse
affichent la même tendance à la baisse, même si c’est à un niveau plus élevé. Le franc fort renforce
encore cette évolution. Si les prix baissent sur le marché européen ou mondial, ils exercent une pression
sur les prix suisses. Cela est valable aussi pour le marché laitier qui se trouve en concurrence directe
avec l’UE, en particulier en ce qui concerne le fromage. Ainsi, le marché du lait se trouve dans une passe
difficile depuis la suppression du contingentement et est toujours à la recherche de nouvelles solutions.
Outre la discussion politique sur l’amélioration des conditions cadres pour les producteurs de lait, on
se pose la question de savoir comment arriver à une hausse de la valeur ajoutée compte tenu de la
situation actuelle. Y a-t-il des facteurs essentiels favorisant un accroissement de la valeur ajoutée ? Par
principe, tout projet générant une plus-value au niveau local, régional ou national, représente un gain
et vaut la peine d’être soutenu. Une autre question se pose, qui est de savoir comment l’organisation
de la branche (sur le marché et sur le plan politique) peut encourager, voire initier une création de
valeur.

Sur la base de ce constat ont été établies des questions de recherche et des hypothèses (voir chap. 2).
À l’aide de l’enquête écrite (voir point 5.1), des interviews semi-standardisés (cf. point 5.2) et d’un
atelier (cf. point 5.3), on a procédé à une analyse des structures actuelles et des possibilités
d’augmentation de la valeur ajoutée.

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2 Bases et définitions
Au cours des années passées, des études scientifiques ont été menées en Europe ainsi qu’en Suisse sur
divers produits agricoles (Réviron et al. 2017, Stoll et Häni 2017, Forney et Häberli 2015), études axées
sur l’augmentation de la valeur ajoutée. Elles ont servi de base à la présente étude. Les points communs
essentiels sont l’augmentation de la valeur ajoutée et l’élaboration de facteurs de succès. À cet égard,
il convient de préciser avant tout les définitions de succès et de création de valeur dans ce chapitre.

2.1 Création de valeur
2.1.1 Définition de création de valeur en général
La création de valeur correspond à l’augmentation de la valeur générée par une entreprise au cours
d’une période donnée (Meyre et al. 2003). Cette grandeur permet de mesurer la performance d’une
entreprise ou d’une branche (ibid.). Il faut cependant faire la différence entre la création de valeur nette
et la création de valeur brute (Figure 1). Pour une fromagerie artisanale par exemple, le prix du lait payé
aux producteurs est à classer dans les prestations préalables (biens acquis par des tiers). La création
de valeur brute dépend du niveau des prestations préalables qu’une entreprise de transformation de
lait doit fournir.

Figure 1 : composition des valeurs brute et nette d’entreprises (de transformation de lait) (source : Meyre et al. 2003)

Figure 1 : la création de valeur directe, mais aussi la création de valeur indirecte sont importantes tout
au long de la filière laitière. Cela comprend les services de sous-traitants, comme les vétérinaires ou les
centrales électriques.

    -    Production laitière : fourrage, vétérinaire, pareur d’onglons, assurance bétail, etc.
    -    Fabrication de fromage : courant, eau, cultures, produits de nettoyage, etc.
    -    Affinage : courant, planches de bois pour le stockage, matériaux d’emballage, etc.
    -    Vente dans le commerce de détail : matériaux d’emballage, courant, publicité, etc.

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Figure 2 : répartition de la valeur du lait de consommation en Suisse (source : Réviron et al. 2017)

La figure Figure 2 montre comment est répartie la valeur du lait de consommation en Suisse. Les
détaillants augmentent leur marge sur les produits différenciés à haute valeur ajoutée pour pouvoir
compenser les faibles marges prélevées sur les produits bon marché (Réviron et al. 2017). Un rapport
sur les effets de l’AOP/IGP montre que les détaillants réalisent des marges de 35-50 % sur ces produits
renommés (Gerz et al. 2017). Dans la présente étude, il a été décidé de renoncer à analyser en détail la
répartition des marges tout au long de la filière de création de valeur 1.

2.1.2 Définition de la création de valeur dans la présente étude

Si l’on se focalise sur l’augmentation de la création de valeur (produit donné), l’objectif, du point de
vue des producteurs / organisations de producteurs, est d’obtenir un prix du lait plus élevé et plus
stable et de maîtriser les coûts 2. Nous en déduisons l’hypothèse de travail suivante : l’augmentation
de la création de valeur a pour effet de permettre non seulement de vendre les produits plus
chers, mais aussi de permettre à tous les acteurs de la filière de création de valeur d’en profiter.
Comme déjà évoqué au point 1.1.1, cela signifie que quand un transformateur peut payer un prix du
lait plus élevé à ses producteurs, il est obligé de vendre son produit avec une plus-value pour qu’il n’en
résulte pas pour lui une création de valeur nette moindre.

Dans la présente étude, il a été aussi demandé aux transformateurs quelle plus-value ils étaient disposés
à donner à leurs producteurs. Ils ont répondu dans leur grande majorité que c’était en premier un prix
du lait plus élevé (ce qui confirme notre hypothèse de travail), en second une garantie de débouché
en tout temps et un droit à la parole (Figure 3). Pour se rendre compte de la difficulté d’application,
il suffit de regarder les diverses discussions organisées dans la branche laitière et le prix actuel du lait.
On ne peut cependant pas exclure un décalage entre les intentions exprimées (propre perception) et la
réalité (prix payé à la production).

1
    Ce thème est actuellement traité à la HAFL dans le cadre d’un préprojet intitulé « Développement des marges brutes
     dans le secteur laitier ».
2
    Dans cette étude ne sont pas pris en compte les coûts de production au niveau des producteurs de lait. Une
     optimisation de ces coûts induirait aussi une augmentation de la création de valeur.

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Figure 3 : transmission de valeur ajoutée du point de vue des transformateurs (source : propre illustration)

Il est possible pour les producteurs d’obtenir un prix du lait plus élevé en améliorant la transparence
(Réviron et al. 2017), c’est-à-dire quand le producteur sait à quel prix son produit est vendu au
consommateur. Quand un transformateur s’est spécialisé dans un petit nombre de produits, la
transparence est le plus souvent assurée (ibid.). Plus la gamme de produits est complexe et large, plus
il est difficile pour le producteur de comprendre comment se décompose le prix à la production. Le
producteur ne sait pas par exemple si le lait livré est destiné à une ligne bon marché ou à des produits
haut de gamme (ibid.).

Dans la présente étude, la création de valeur du point de vue des producteurs et des transformateurs
est définie comme suit : la création de valeur correspond à l’accroissement de valeur réalisé par
une entreprise dans un laps de temps défini. Pour les entreprises de l’industrie laitière de
transformation interrogées, le prix du lait payé, la garantie du débouché à tout moment et le droit à la
parole des producteurs sont primordiaux en ce qui concerne la transmission de valeur ajoutée. Sur la
base de ces résultats, on s’aperçoit qu’en matière de création de valeur les prestations préalables
revêtent une grande importance. Le prix du lait est un élément central non seulement pour les
producteurs, mais aussi pour les transformateurs. C’est pourquoi, on est parti du principe dans cette
étude que le résultat déterminant la réussite d’un projet est un prix du lait payé aux producteurs
élevé.

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2.2 Succès

En règle générale, mais aussi en matière de projets, le succès dépend de la définition et du point de
vue. D’un côté, le succès d’un projet se définit par le fait qu’il est mené à son terme et que les objectifs
fixés ont été atteints. D’un autre côté, on peut aussi juger du succès de la gestion du projet. De façon
classique, on le classe en se basant sur la qualité d’exécution et sur le respect du planning et des coûts.
Par ailleurs, on peut aussi considérer le succès d’une entreprise. En principe, plusieurs variables ont un
impact, sachant que plusieurs facteurs fondamentaux, dits facteurs clés, influent sur le succès
économique et stratégique.

2.2.1 Définition du succès
On peut insérer les facteurs de succès dans des dimensions contextuelle et entrepreneuriale, ce qui
permet de les classer en facteurs de succès généraux et en facteurs de succès spécifiques à la branche
et à l’entreprise (tableau 1). Il apparaît clairement que le succès d’une entreprise dépend aussi de sa
stratégie.

Tableau 1 : aperçu des différents facteurs de succès (source : propre illustration)

    Niveau des facteurs de succès (stratégiques)                 Exemple de facteurs de succès
    En général / contexte                                          Situation du marché mondial, prix à la production
    Indépendamment de la branche et du contexte                    à l’étranger, comportement des consommateurs,
                                                                   politique (agricole)
    Branche                                                        Coopérations / organisations, marketing,
    Spécificités de la branche                                     confiance, réseau, défense des intérêts, résilience
    Entreprise                                                     Stratégie et organisation, produit et fabrication,
    Peuvent être analysés et influencés par                        communication et marketing, finances, filières
    l’entreprise                                                   de vente

En principe, c’est au niveau des entreprises / organisations que l’on peut exercer le mieux une influence
sur les facteurs de succès stratégiques. Il est donc conseillé de se concentrer sur les entreprises 3 /
organisations et de différencier clairement le succès de l’ensemble de la branche de celui de
l’organisation de producteurs. Sur la base des définitions de succès tirées des questionnaires et de
l’étude de Meyre et al. (2003), il est possible de déterminer les facteurs de succès possibles dans les
entreprises et les projets. Ils se subdivisent en catégories principales : acteurs, produit et fabrication,
filières de vente, communication, finances et comptabilité et stratégie de l’entreprise. La qualité du
produit fabriqué, la transmission de la valeur ajoutée, les rapports avec la clientèle (producteurs /
acheteurs) et des finances solides revêtent une importance de premier plan dans la définition du succès.

Tableau 2 : répartition des facteurs de succès

    Catégorie                                 Facteurs de succès
    Acteur                                    Efficacité, savoir-faire, capacité à diriger, entrepreneuriat, relations
                                              clientèle, transparence et collaboration entre producteur et
                                              transformateur
    Produit et fabrication                    Innovation et recherche, qualité, différenciation, gamme de
                                              produits, transmission de la valeur ajoutée aux producteurs
    Filières de vente                         Diversification, part de marché
    Communication                             Communication de messages, crédibilité et fiabilité, image,
                                              encouragement de la production durable, valeur ajoutée, labels,
                                              marque
    Stratégie de l’entreprise                 Structure de l’entreprise ; vision et stratégie claires
    Finances / comptabilité                   Bénéfices, versement de dividendes, investissements,
                                              amortissements

3
    On entend par entreprise les fromageries/laiteries artisanales, les transformateurs industriels, les OP et OPU.

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Sur la base des six catégories de facteurs de succès, les entreprises ont été interrogées à l’aide d’un
questionnaire sur le succès et sa signification, sachant que l’on avait élaboré la définition suivante pour
la présente étude :

 Définition de la création de valeur
 La création de valeur correspond à l’accroissement de valeur réalisé par une entreprise dans un
 laps de temps défini. Pour les entreprises de l’industrie laitière de transformation interrogées, le
 prix du lait payé, la garantie du débouché à tout moment et le droit à la parole des producteurs
 sont primordiaux en ce qui concerne la transmission de valeur ajoutée. C’est pourquoi, on est
 parti du principe dans cette étude que le résultat déterminant la réussite d’un projet est un prix du
 lait payé aux producteurs élevé.

 Définition du succès
 Pour les transformateurs (entreprises interrogées) de la branche laitière, le succès signifie donc la
 fabrication et la commercialisation de produits de haute qualité, ce qui permet à l’entreprise de
 présenter un compte de résultat positif au terme de l’exercice et donc de payer aux producteurs
 un prix du lait au-dessus de la moyenne, de financer les amortissements et les investissements et
 de conforter sa position sur le marché sur le long terme.

Pour les transformateurs de la branche laitière, le succès signifie donc la fabrication et la
commercialisation de produits de haute qualité, ce qui permet à l’entreprise de présenter un compte
de résultat positif au terme de l’exercice et donc de payer aux producteurs un prix du lait au-
dessus de la moyenne, de financer les amortissements et les investissements et de conforter sa
position sur le marché sur le long terme.

En recensant les succès, on peut en déduire aussi les échecs grâce à un questionnement circulaire,
mais on n’approfondira pas ce point dans la présente étude.

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3 Questions de recherche et hypothèses

3.1 Prix du lait
Au chapitre Bases et définitions (cf. chap. 2), on a vu que le prix du lait est considéré comme un élément
essentiel pour la transmission de plus-value aux producteurs par les entreprises de transformation. À
partir de là, on peut en déduire les questions de recherche et les hypothèses suivantes.

QR 1 : De quels facteurs le prix du lait dépend-il ?

H1 : Plus la quantité de lait transformée en entreprise est élevée, plus le prix payé aux producteurs est
     bas.
H2 : Le prix du lait payé dans les régions de montagne est plus élevé qu’en zone des collines et de
plaine.

3.2 Succès et facteurs de succès

QR 2 : Quels sont les facteurs de succès essentiels qui favorisent l’accroissement de la création de
valeur ?

QR 3 : Quels sont les différents points de vue en matière de succès parmi les entreprises /
organisations interrogées ; quelles sont les tendances communes ?

H3 : Les entreprises payant le prix le plus élevé pour le lait ont d’autres facteurs de succès que les
     entreprises payant le prix le plus bas.
H4 : Les fromageries et laiteries artisanales ont d’autres facteurs de succès que les grandes
     entreprises.
H5 : Les projets réussis commercialisent des aspects de durabilité (bien-être animal, alimentation à
     base de fourrages grossiers, protection du climat, régionalité, etc.).
H6 : Les entreprises de transformation à succès se distinguent par des dirigeants dynamiques sachant
     faire preuve d’un esprit entrepreneurial.

3.3 Accroissement de la création de valeur
Les résultats des questions de recherche 1, 2 et 3 seront discutés et analysés en commun dans le
cadre d’un atelier. Cela permettra d’encourager les échanges dans une atmosphère positive.

QR 4 : Comment encourager, voire initier un accroissement de la création de valeur ?

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4 Méthodologie
Environ 600 fromageries artisanales fabriquent des spécialités fromagères au lait cru à partir de
1,2 million de tonnes de lait. 2,2 autres millions de tonnes sont transformées en produit laitiers par
environ 90 grandes, moyennes et petites laiteries (PSL 2016). Afin de pouvoir analyser le plus largement
possible le marché du lait suisse dans cette étude, on a procédé à un sondage écrit et à sept interviews
d’experts semi-standardisés avec des entreprises de transformation du lait. Cela a permis de réaliser
une analyse à la fois qualitative et quantitative. Le fil conducteur des interviews a été établi sur la base
des résultats du sondage écrit afin de pouvoir préciser et approfondir ces résultats, le but étant de
mieux comprendre surtout les facteurs de succès et d’échec et leurs corrélations éventuelles. La base
était constituée par les études de Meyre et al. (2003) et de Forney et Häberli (2015) qui seront
expliquées brièvement ci-après.

Le projet commun (2002-2007) du Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB) et des
Producteurs Suisses de Lait (PSL) avait porté sur les facteurs de succès dans la branche laitière. Plus de
23 projets des fromageries les plus diverses ont été analysés à l’époque (Meyre et al. 2003). Les acteurs
d’un projet ont pu être identifiés comme étant un facteur déterminant (Figure 4). Ils doivent faire preuve
d’une disposition à l’effort, de capacités à diriger et à motiver, d’une endurance, d’une capacité à
communiquer et d’une habileté de négociation de haut niveau. D’autres facteurs de succès corrélés
entre eux ont pu être identifiés dans les domaines produits et fabrication (Unique Selling Proposition),
communication (présentation en public, etc.), finances, filières de vente et stratégie d’entreprise.

                       Figure 4 : schéma relatif aux facteurs de succès (source : Meyre et al. 2003)

Dans l’étude à caractère sociologique intitulée « Filières alternatives dans la production laitière :
reconfiguration des réseaux et autonomisation des producteurs » de Forney et Haeberli (2015), il a été
utilisé un modèle pratique pour analyser les exemples de cas. Dans un premier temps, trois
organisations ont été sélectionnées, lesquelles avaient opté pour des produits locaux et régionaux
comme nouvelle stratégie. Diverses discussions ont été engagées avec les personnes initiatrices
(direction, producteurs de lait, membre de comité, administration, distribution) et des informations
provenant de manifestations et assemblées publiques, discussions informelles et divers documents
(presse, documents, publications, etc.) recueillies. Dans un deuxième temps, les enseignements
obtenus ont été élargis à trois autres organisations de producteurs. Ces dernières se distinguent de

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façon significative des autres entreprises quant à leur structure et leur stratégie. L’attention s’est
focalisée sur l’évolution de l’organisation de producteurs. Cette étude a surtout servi de base aux
interviews réalisées, mais aussi à établir un lien judicieux entre le questionnaire et les entretiens.

4.1 Sondage écrit
Le questionnaire en ligne a été rédigé sur la base de la bibliographie (Meyre et al. 2003, Estermann
2016) et d’un groupe d’accompagnement (HAFL, COJA, USP, PSL). Il a été élaboré avec Surveymonkey
et envoyé par courriel aux fromageries et laiteries artisanales (300), organisations de producteurs (13)
et aux organisations de producteurs-utilisateurs (15). Les questions ont été classées en trois
catégories : informations générales, évolutions au cours des 10 dernières années, forces et faiblesses,
succès et facteurs de succès. 30 questions ont été rédigées en tout, dont 16 ouvertes, 10 semi-ouvertes
et 4 fermées. Compte tenu d’un retour de n=59, il s’agit là d’un sondage non représentatif. Pour un
nombre total de 718, une marge d’erreur de 5 %, un intervalle de confiance de 95 %, il aurait fallu un
échantillon de n=251. Malgré les difficultés évoquées ci-dessus, il a été possible d’intéresser les
principales entreprises au sondage et de couvrir presque 70 % des quantités de lait produites en Suisse.

Tableau 3 : envoi et retours du questionnaire

                   Total                  Envoi               Retour       Pourcentage
                     n                      n                   n               %
 FLA                690                    300                  43            14,3
 OPU                 15                     15                   7              46,7
 OP                  13                     13                   9              69,2
 Total              718                    328                  59               18

4.1.1 Analyse
Les réponses ont été classées et analysées en fonction des questions de recherche. Pour l’évaluation
statistique, on a utilisé le programme NCSS. Les données ont été étudiées quant à la normalité de leur
répartition et à l’égalité des variances (ANOVA, régression linéraire et corrélation). Le descriptif détaillé
figure au chapitre 5 Résultats.

4.2 Exemples de cas

4.2.1 Sélection
Le but des études de cas était d’analyser plus précisément les exemples de réussite, c’est-à-dire
transformateurs et distributeurs de lait qui paient majoritairement un prix du lait au-dessus de la
moyenne, et de montrer les facteurs de succès. Le choix des sept études de cas, qui a été fait avec le
groupe d’accompagnement, s’est basé sur différents critères qui tous devaient être couverts par au
moins un exemple : grandeur (quantité de lait transformée / commercialisée), gamme de produits (type
et nombre de produits) et site. Le tableau 4 montre les exemples de cas retenus et les personnes
interviewées.

Tableau 4 : personnes interviewées pour l’étude

 Organisation                            Personne interviewée                     Fonction
 Fromagerie Ilfis                        Urs Fankhauser                           Fromager
 Fromagerie Flüeler                      Martin Flüeler                           Gérant
 Milch-Land Spezialitäten AG             Ueli Berger                              Gérant
 Le Maréchal                             Jean-Michel Rapin                        Gérant
 OPU Züger Forster                       Godi Siegfried                           Président OPU
 Emmi                                    Daniel Weilenmann                        Responsable politique agricole
 Fromagerie                              Aucune donnée                            Gérant

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4.2.2 Interview
Les personnes interviewées ont été contactées par téléphone, puis interrogées sur place. Avant
l’interview, des informations ont été recueillies sur l’entreprise. Le fil conducteur de l’interview était
basé sur le questionnaire du sondage en ligne et a été complété par des questions spécifiques. Il
comportait les thèmes suivants : informations générales sur l’entreprise, forces et faiblesses, projets
réussis et échecs, défis et questions spécifiques.

4.2.3 Analyse
Les réponses ont été notées par écrit. Les exemples de cas ont été d’abord analysés un par un. Les
principales déclarations ont été identifiées et les facteurs de succès déterminés. Une synthèse a été
finalement réalisée pour établir les tendances communes (cf. QR 4). Pour des raisons de protection
des données, les déclarations et chiffres ont été rendus en grande partie anonymes.

4.2.4 Interprétation
Étant donné que les interviews reflétaient surtout des opinions personnelles, l’atelier a servi à
rediscuter les déclarations, à les évaluer et à mettre en lumière les points communs.

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5 Résultats

5.1 Résultats du sondage écrit
Ce chapitre présente les résultats du sondage réalisé par écrit.
5.1.1 Évolution des structures
Afin que l’on puisse se prononcer fondamentalement sur la fiabilité des réponses, on a procédé à
l’analyse des quantités de lait, du nombre de producteurs de lait et de leur évolution au cours des dix
dernières années. Sur un total de 3,4 millions de tonnes de lait commercialisé, on a pu en étudier
2,4 millions environ, soit 70 %, ce qui permet de considérer le tableau comme étant représentatif. Ici
aussi on observe la disparition de près de 1400 producteurs de lait (2006-2016) (Statistique laitière
–8482) qui s’accompagne d’une augmentation de la production par exploitation. De 2006 à 2016, la
quantité de lait transformée en plus par les entreprises interrogées s’est élevée à 580 millions de kilos.

5.1.2 Prix du lait, généralités
Les prix moyens du lait indiqués sont comparables à la statistique sur le prix du lait (cf. tableau 5,
Agristat et al. 2017). Le lait transformé en fromage traité dans la présente étude comprend à la fois le
lait transformé selon un mode artisanal et la totalité du lait transformé en fromage. Si l’on compare la
valeur avec le lait transformé en fromage de façon artisanale de la Statistique laitière de la Suisse
(Agristat et al. 2017), on se rend compte que le prix de 71,3 ct./kg est proche. On peut supposer que
la fourchette des points de données est plus large.
Tableau 5 : prix payés ressortant de l’étude comparés à ceux de la statistique laitière (source : propre enquête,
statistique laitière 2017)

    Groupe                    Nbre de            Prix             Statistique             Agridea           Différence   4

                             réponses           moyen               laitière               ct./kg           (p < 0.05)
                                                ct./kg               ct./kg

    Lait de centrale             18               54.8                54.5                  55.0            Transformé en
                                                                                                            fromage, bio

    Lait transformé              39               72.5          71.3 5 / (65.3)          70.0-78.0          Laiterie, bio
    en fromage

    Lait bio                     11               83.7                78.3               77.0-90.0          Laiterie,
                                                                                                            transformé en
                                                                                                            fromage

Tous les prix figurant dans la présente étude diffèrent de façon significative (p
Figure 5 : prix à la production payés pour le lait de centrale, le lait transformé en fromage et le lait bio (source : résultats
du sondage écrit)

5.1.3 Prix du lait vs quantité transformée

H1 : Plus la quantité de lait transformée en entreprise est élevée, plus le prix payé aux producteurs
     est bas.

Pour vérifier l’hypothèse H1, on est parti de la quantité récoltée en 2016, et pour vérifier si le modèle
de régression est significatif dans l’ensemble, on a réalisé un test F. Dans les trois cas, le modèle n’est
pas significatif.

Le modèle ne peut donc pas apporter d’explication. Les corrélations (0,102 ; –0,285 ; –0,158) et R2
(coefficient de détermination : part de la dispersion totale dans la variable dépendante pouvant être
expliquée par la variable indépendante) sont faibles de surcroît. L’hypothèse H1 ne peut pas être
confirmée. Cela signifie que le prix du lait n’est pas automatiquement plus bas pour les entreprises
transformant de grandes quantités de lait.

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Figure 6 : prix du lait payé vs quantité transformée – (source : résultats du sondage écrit)

La Figure 6 montre que les petites entreprises paient un prix plus élevé. Il faut cependant retenir que
pour cette taille d’entreprise, il y a de nombreuses réponses, et par là plus de points et une plus grande
dispersion. On s’aperçoit que la dispersion des prix à la production est très large dans les trois
segments, surtout pour les petites quantités. Cela est particulièrement net pour le lait transformé en
fromage, alors que c’est dans cette catégorie que les réponses ont été les plus nombreuses. Les quatre
entreprises qui ont transformé plus de 120 millions de kilos de lait ont payé en 2016 des prix en
moyenne relativement bas, entre 54 et 56 ct./kg.

Si l’on compare le prix du lait payé à l’évolution des quantités de lait transformées (2006-2016 en
pourcentage), on peut supposer une tendance négative (Figure 1). Plus on a transformé de quantité
supplémentaire, plus le prix du lait a baissé. Cependant, le modèle est significatif seulement pour le
lait de centrale, avec une corrélation négative (p = 0,025) (Tableau 14). Le coefficient de
détermination (R2) est de 41,1 %.

La Figure 7 montre que la majorité des entreprises a transformé plus de lait qu’il y a encore 10 ans, la
plupart (27 entreprises) affichant une hausse comprise entre 0 et 50 %. 8 entreprises ont transformé
entre 50 et 100 % et 7 entreprises entre 100 et 300 % de lait en plus. 14 entreprises ont affiché une
quantité de lait en baisse (Tableau 6).

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Figure 7 : rapport entre le prix à la production et l’évolution des quantités de lait 2006-2016 (source : résultats du
sondage écrit)

Tableau 6 : évolution des quantités de lait 2006-2016

 Évolution des quantités de lait 2006-2016                                      Nombre d’entreprises
 –50 % – 0                                                                              14
 +0 – +50 %                                                                             27
 +50 % – +100 %                                                                          8
 +100 % – +300 %                                                                         7

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5.1.4 Prix du lait par zone

H2 : Le prix du lait payé dans les régions de montagne est plus élevé qu’en zone des collines et
de plaine.

Pour le lait transformé en fromage et le lait bio, le prix moyen payé en région de montagne est plus
élevé que celui en zone des collines et de plaine (Figure 8). Les différences ne sont cependant pas
significatives (p>0,05). Le prix du lait payé en région de montagne ne peut donc pas être considéré
comme significativement plus élevé, notamment si la large dispersion des données est prise en
considération.

Figure 8 : prix à la production par zone et type de lait (source : résultats du sondage écrit)

Tableau 7 : moyennes des différentes zones et type de lait (source : résultats du sondage écrit) 6

     Zone              Lait de centrale       Lait transformé en fromage                      Lait bio
                            ct./kg                       ct./kg                                ct./kg
     Montagne                52.7                         77.2                                  88.3
     Collines                56.7                         71.6                                  82.5
     Plaine                  55.2                         70.0                                  80.6

      •   Une plus grande quantité transformée n’est pas synonyme de prix plus bas à la production.
          Toutefois, la dispersion chez les petites fromageries / laiteries est plus grande que chez les
          grandes entreprises.

      •   La quantité transformée par les entreprises interrogées a affiché une tendance à la hausse au
          cours de 10 dernières années. À cet égard, la moitié environ des entreprises a augmenté la
          quantité de lait jusqu’à 50 % et un quart a accru la quantité transformée de 50 à 300 %. Seuls
          25 % des entreprises interrogées ont affiché une baisse de la quantité transformée.

      •   Les fromageries et laiteries artisanales ont tendance à payer un prix plus élevé pour le lait
          transformé en fromage, sachant que l’on est en présence d’une large fourchette, allant de 51 à
          91 ct./kg.

      •   Le prix du lait transformé en fromage et du lait bio payé en régions de montagne est
          légèrement plus élevé, mais il est à noter que la dispersion est importante et la différence non
          significative.

6
    Statistique : toutes les données ont été vérifiées quant à la normalité de leur répartition (Skewness, Kurtosis) et à
     l’égalité des variances (Kruskal Wallis). Les conditions étaient réunies pour toutes les données. On a eu recours au test
     de comparaisons multiples de Tukey-Kramer pour vérifier les différences significatives.

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5.1.5 Aperçu des facteurs de succès

Le Tableau 8 reprend tous les résultats du questionnaire en les classant en catégories et facteurs de succès comme déjà réalisé en 2003 (Meyer et al.). Il
s’agissait à cet égard d’une sélection de facteurs de succès qui a pu être complétée. Le questionnement a porté en outre sur les projets ayant échoué et leurs
facteurs d’échec. Ceux-ci ont une importance variable selon les entreprises. Il apparaît clairement que (presque) aucun projet n’est centré explicitement sur
le facteur « acteurs ». Il s’agit plutôt d’éléments essentiels qui favorisent ou gênent les projets dans les autres domaines. D’un côté ce sont le courage et le
savoir qui ont souvent fait défaut aux initiateurs de projets ratés. D’un autre côté, il ne faut pas ignorer les relations humaines, car c’est seulement quand il
y a des intérêts communs, un consensus de toutes les parties concernées et un personnel formé, qu’un projet peut aboutir au but recherché. La pertinence
dans les projets a été définie au moyen du nombre de mentions dans le questionnaire (1-4 = + / 5-9 = ++ / > 10 = +++). La sélection des projets mentionnés
au tableau 9 n’est pas exhaustive.

Tableau 8 : aperçu des facteurs de succès du sondage écrit et leur importance dans le succès ou l’échec (source : propres données et représentation)

 Catégorie                    Facteur de              Mentions                                                           Pertinence       Projets / remarques questionnaire
                              succès                                                                                    dans projets
 Acteurs                      Collaborateurs             Personnel compétent en nombre suffisant (formation,                +++
                                                          connaissances)                                                      +
                                                         Loyauté                                                             +
                                                         Qualité de vie et satisfaction                                      +
                                                         Sécurité, bons salaires
                              Savoir-faire               Le savoir nécessaire (produit, gestion de projet, etc.)             ++
                                                          existe, a pu être acquis ou assuré par des partenaires
                                                          extérieurs

                              Compétence                 Exemple / gestion d’entreprise                                      +            Au lieu de promouvoir, une entreprise régionale de
                              direction                  Potentiel de résolution des conflits                                +              commercialisation des produits a au contraire été
                                                         Consensus entre les parties concernées                             +++             un frein et édicté des contraintes.

                              Motivation / courage       Courage d’oser quelque chose de nouveau                             +
                                                         Tous les participants sont motivés et désirent contribuer           +
                                                          à la réussite
                              Entreprenariat             Intérêts communs                                                    ++           Des changements côté acheteur ont empêché toute
                                                                                                                                             collaboration
                              Relations clients          Prix élevé du lait et stabilité du prix pour les                   +++           Prix du lait, droit à la parole et transparence
                              (producteur)                producteurs                                                                        considérés comme secondaires
                                                         Droit à la parole des producteurs                                  +++
                                                         Transparence (composition prix de vente et prix à la                ++           Manque     de    compréhension     de   la   part   des
                                                          production)                                                                        producteurs pour un nouveau produit
                                                         Compréhension de la part des producteurs                            ++

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Catégorie                    Facteur de              Mentions                                                       Pertinence    Projets / remarques questionnaire
                              succès                                                                                dans projets
                              Relations clients          Reconnaissance des souhaits (consommateurs)                    +          Les souhaits ne sont pas reconnus
                              (acheteur)                 Compréhension de la part des consommateurs                    ++

 Produit / fabrication        Qualité                    Une matière première de haute qualité donne un                +++         Objectif principal des fromageries et laiteries
                                                          produit de haute qualité si la transformation est                         artisanales
                                                          adéquate
                                                         Swissness, provenance des matières premières                  ++
                              Gamme de produits          Rapport à la région                                           ++          Fromage de montagne bio des Grisons

                              Innovation et              Déceler les tendances du marché                                +          Innover en créant une nouvelle sorte de fromage
                              recherche                                                                                              (mozzarella au lait de vache, fromage à pâte mi-
                                                                                                                                     dure, etc.)
                              Différenciation            Se démarquer des autres                                        +          Spécialisation    dans     les    grandes     meules
                                                                                                                                     d’Emmentaler avec valeur ajoutée
 Filières de vente            Diversification            Nouvelles filières de vente                                   +++         Nouveaux acheteurs
                              Filières de vente          Garantie du débouché en tout temps  transformation           +++
                              fiables                     quantités supplémentaires
                              Part de marché             Progression constante ou maintien des parts de marché         ++          Augmentation de la production de lait pasteurisé et
                                                                                                                                     de yogourts par la vente à des points de vente
                                                                                                                                     régionaux
 Communication                Marketing                  Communication valeur ajoutée (produit)                        ++          Marketing et communication pour des produits à
                                                         Commercialisation caractère durable (climat, bien-être        ++           base de lait bio sans ensilage issu de petites
                                                          animal, etc.)                                                              structures
                                                                                                                                    Lait entier engraissement des veaux
                              Labels                     Labels régionaux                                               +
                              Valeur ajoutée             Effet direct pour les producteurs dans la plage de prix        +
                                                          élevée
                                                         Communication valeur ajoutée                                  ++
                              Marque                                                                                               Lancement marque propre
 Stratégie de l’entreprise    Construction               Rénovations des installations, extensions                     +++         Construction neuve et rénovation de l’ancien
                              Structure de               Taille d’entreprise appropriée  maintien ou                   +          Fusion de trois fromageries pour former une SA
                              l’organisation              développement de l’existant

 Finances / Comptabilité      Financement                Le financement du projet est assuré                           +++
                              Amortissements /           Investissements et amortissements peuvent être financés        +
                              investissements
                              Indépendance               Réussite sur le marché sans aide de l’État                     +          Gestion des coûts

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Comme l’ont montré Meyre et al. (2003) dans l’étude de PSL / SAB, les acteurs sont clairement en
première ligne en ce qui concerne la réussite de projets. Or, dans la présente étude, il apparaît
clairement que les projecteurs ne sont pas seulement braqués sur les qualités et capacités (capacité à
diriger et à motiver, endurance, habileté à communiquer et à négocier) du chef d’entreprise, mais aussi
sur les collaborateurs et les producteurs. Nombre de projets indiqués mettent l’accent sur le
développement des produits, sachant que là aussi c’est la personne qui se trouve au centre avec son
savoir-faire, son esprit de développeur et sa motivation. Aujourd’hui, comme autrefois, on voudrait
s’élever au-dessus de la masse et produire principalement des spécialités qui génèrent une plus-value
pour le client (acheteur) dans divers domaines (origine, production, forme et aspect, etc.).

5.1.6 Facteurs de succès (analyse quantitative)

Les facteurs de succès ont été analysés en termes quantitatifs. On a retenu pour cela les 15 %
d’entreprises payant respectivement le prix le plus élevé et le plus bas.

H3 : Les entreprises payant le prix le plus élevé pour le lait ont d’autres facteurs de succès que les
     entreprises payant le prix le plus bas.

En regardant la figure 9, on s’aperçoit que la réussite d’un projet est principalement liée à un fort
ancrage régional. De plus, ce sont surtout les facteurs humains, comme des intérêts personnels
communs, un personnel compétent et le consensus entre les parties concernées, qui revêtent de
l’importance. Les autres facteurs importants sont la communication de la valeur ajoutée (marketing) et
un financement assuré. On s’aperçoit en outre que les points forts des 15 % supérieurs ne sont pas les
mêmes que les 15 % inférieurs. Pour les 15 % supérieurs, les facteurs humains sont au centre.

Figure 9 : facteurs de succès (inhérents à un projet) des entreprises payant les prix les plus élevés et les plus bas pour le
lait (source : résultats du sondage écrit)

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H4 : Les fromageries et laiteries artisanales ont d’autres facteurs de succès que les grandes
     entreprises.

Si l’on considère les facteurs de succès en fonction des tailles d’entreprises 7, on note que pour les
petites entreprises (n=57), le rapport étroit avec la région, un personnel compétent en nombre
suffisant et un financement assuré sont les points les plus souvent mentionnés (Figure 10). Pour les
entreprises moyennes à grandes, ce sont le consensus des parties concernées et le financement, et
pour les plus grandes entreprises la communication de la valeur ajoutée. Comme les données
concernant les entreprises moyennes (n=18) et grandes (n=14) sont en nombre trop faible, il n’est pas
possible de confirmer l’hypothèse. Les résultats des exemples de cas confirment cependant les
facteurs de succès cités (cf. point 5.2).

                           14
                                                                                                            12
                           12
      Nombre de mentions

                           10                                         9
                                        8
                            8                                                                          7
                                                    6
                            6                                                              5
                                                4                                                                     4
                            4       3                                     3
                                2           2                2   22           22       2                         22
                            2                           11                         1               1       11             Grandes entreprises
                                                                                               0
                            0                                                                                             Moyennes entreprises
                                                                                                                          Petites entreprises

Figure 10 : facteurs de succès selon la taille des entreprises (source : résultats du sondage écrit)

H5 : Les projets réussis commercialisent des aspects de durabilité (bien-être animal, alimentation
     à base de fourrages grossiers, protection du climat, régionalité, etc.)

Sur la Figure 11 « domaines dans lesquels des projets ont été réalisés avec succès », on constate que
les facteurs de succès sont multiples et à rapporter à divers facteurs principaux (acteurs, produit,
finances). Pour tous, c’est cependant le facteur principal « acteurs » qui a le plus de poids.

Les aspects de durabilité ne sont pas considérés comme les facteurs de succès essentiels pour les
entreprises de transformation du lait. L’intérêt majeur porte plutôt sur la mise en place de nouvelles
filières de vente et le développement de nouvelles lignes de produits. Les travaux d’équipement dans
l’entreprise participent aussi souvent au succès. Les catégories fusions / regroupements et
modernisation d’installations sont incluses dans la rubrique « Autres ».

7
    Taille d’entreprises en fonction de la quantité de lait transformée : petites entreprises < 4,9 millions de kilos ;
     moyennes entreprises 5-42 millions de kilos ; grandes entreprises > 42 millions de kilos

Berner Fachhochschule | Haute école spécialisée bernoise | Bern University of Applied Sciences                                                   24
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