FESTIVAL DOSSIER DE FESTIVALS ! - Tranzistor
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No 66 JUIN 2019 GRATUIT L' I N F O C U LT U R E L L E E N M AY E N N E DOSSIER FESTIVAL DE FESTIVALS !
TÊTE À TÊTE 3 Édito Chanteur, conteur, chef de chœur... Il enchaîne les aventures J ’aime pas les festivals ! extraordinaires, des écoles du - Quoi ?! Tu plaisantes, j’espère ? Népal au Grand Rex où il jouait - Faire la queue des plombes pour récupérer mes récemment, accompagné d’une tickets puis repoireauter pour avoir le droit de boire une chorale de 9 à 99 ans. Itinéraire bière et manger une merguez carbonisée sur son lit de frites surgelées… Le tout en voyant des concerts à 30 mètres de pas ordinaire d’un explorateur qui la scène, parqué comme du bétail, avec un son pourri en se découvre artiste au fil de ses prime ? Très peu pour moi ! Et puis tous les festoches se projets. Par Sylvain Rossignol Pierre ressemblent aujourd’hui, programment les mêmes artistes, que l’on voit partout… TRANZISTOR N°66 - J’ai l’impression qu’on ne parle pas des mêmes festivals. Ici, Tranzistor est une publication dans le 5.3, on a la chance de pouvoir profiter d’évènements de Mayenne Culture : Bouguier accessibles et à taille humaine, qui soignent l’accueil du pu- 84 avenue Robert Buron CS 21429 - 53014 Laval cedex blic. On voit bien que tu n'as jamais goûté aux fameuses ISSN : 1968-2360 fouées des Bouts de ficelles. Tu m'en diras des nouvelles ! Directeur de publication et de Je n’ai jamais fait la queue plus de 5 minutes nulle part et rédaction : Nicolas Moreau j’ai souvent pu voir des concerts ou spectacles au plus près Rédaction : Carole Gervais, des artistes. Et puis un festival quand c’est bien fait, c’est François Geslin, Rémi Hagel, Amélie Le Bars, Nicolas bien plus qu’une liste de noms ronflants sur une affiche. Ce © Florian Renault Moreau, Armelle Pain, Arnaud sont des valeurs, un état d’esprit, un climat… que véhiculent illustré par PAULINE BROCHARD «H Roiné, Antoine Roquier, Sylvain le site, la déco, le sourire des bénévoles… Sans oublier les Rossignol, François Soutif prises de risque de la programmation qui, souvent, accorde abitué » de la scène du Grand Rex, qu’il foulait Maquette : Élise Moret une large place à des artistes hors format. Graphiste et webdesigneuse, Pauline pour la seconde fois en avril dernier avec les cho- Mise en page : Antoine Gautreau - Mouais et l’impact environnemental désastreux des festivals, Brochard conjugue sens de la ristes de Germaine & the kids, Pierre Bouguier Impression : Imprimerie Faguier tu en fais quoi ? La quasi-totalité des festivaliers y viennent composition et maîtrise des outils sortait ce printemps un disque témoignant de sa rencontre avec Tirage : 4 000 ex. avec leur voiture et ces évènements génèrent des tonnes de numériques pour créer des images Matthieu Hamon et son monde hors du commun, façonné par lège, c’est le sport qui m’a tenu. Je m’ennuyais en classe et je me La citation du numéro : déchets… Je ne te dis pas la tronche du bilan carbone ! impactantes, impeccablement l’autisme. Alors qu’il peaufine actuellement le premier album de sentais en décalage, sans trop savoir pourquoi, avec des ques- « Même si la vie n’a pas de - Difficile d’affirmer le contraire, il y a du boulot. Mais au-de- équilibrées, un brin vintage parfois. son groupe Mémé les Watts, cet hyperactif, toujours entre deux tionnements que j’avais du mal à partager. Je pratiquais le tennis sens, qu’est-ce qui nous empêche de lui en inventer là des gobelets recyclables et des toilettes sèches qui se gé- Illustratrice, la Lavalloise aime aussi spectacles, prend le temps de revenir sur quelques étapes d’un de table tous les jours en sport études, plus le foot. C’est en écou- un ? » Lewis Carroll néralisent, plusieurs festivals comme Au foin de la rue, Un troquer souris et écran pour ses papier parcours déjà bien rempli. tant un cousin jouer du djembé, à 15 ans, qu’il y a un appel de cet singe en été ou Croq' les mots montrent que des alternatives et crayons, explorant différentes instrument ; il s’impose à moi. Je joue seul, beaucoup, je cherche Contact sont possibles : navettes pour le transport du public, gestion techniques : aquarelles naturalistes Ton image est indissociable de ta guitare. Tu as eu ta des sons, des rythmiques… À 16 ans, je passe le brevet d’anima- 02 43 67 60 90 et tri drastique des déchets, recyclage à tous les étages, éner- virtuoses, dessins en mode BD, première au berceau ? teur Bafa et, pour mon évaluation, je choisis de transmettre une contact@tranzistor.org tranzistor.org gies renouvelables, circuits courts… Festoyer ok, mais sans linogravures très graphiques… Ah non, bien plus tard. Je n’ai pas baigné dans un milieu artis- chanson africaine, on finit tous en dansant. Je découvre que je facebook.com/tranzistormag faire sa fête à la planète ! Elle signe la couverture et l’ensemble tique. Mon père aime chanter, mais, enfant, je n’allais pas voir suis très à l’aise avec les enfants et réalise le pouvoir de la chan- twitter.com/tranzistormag Nicolas Moreau des illustrations de ce numéro. des expositions, des concerts, j’allais aux matchs de foot. Au col- son : elle donne du plaisir, de la cohésion, elle fédère.
4 TÊTE À TÊTE TÊTE À TÊTE 5 On m’offre ma première guitare à 18 ans. Mais j’ai deux pha- monde ne va pas être bouleversé. La planète va continuer à concert, ils me disaient : « Mais demain, Pierre, langes en moins à la main gauche et quand je demande à un tourner. au concert, on aura les paroles ? » Et je leur ré- ami de me montrer les accords… « Celui-là, Pierre, tu ne peux pétais : « Ayez confiance dans le groupe, le but, pas. Celui-là non plus ! Ni celui-là… » Je laisse tomber la guitare. Ce voyage est un tournant dans ton parcours ? c’est de rencontrer le public, le regarder, croiser les Le déclic se produit à Bamako où un Malien me dit : « Mais tu C’est plus que ça, un voyage initiatique : je trouve ma voie. En regards ». Je préfère voir grand au démarrage et as neuf doigts un tiers pour jouer, mec ! » Il me montre et je me jouant devant des enfants, je suis à ma place. Je passe du gars réviser les ambitions à la baisse si nécessaire. rends compte qu’avec trois accords, je peux jouer des milliers de qui a toujours eu peur de déranger à celui qui apporte quelque C’est parce qu’il y a cette exigence qu’ils sont chansons. Quand je reviens, j’ai 20 ans, je joue une à deux heures chose et j’ai envie de devenir celui-là : un colporteur de chan- obligés de se dépasser et parce qu’ils se dé- par jour, je jubile d’apprendre rapidement et de pouvoir sortir la sons qui vit en Mayenne. passent, ils gagnent de la fierté, de la dignité. Et guitare avec les copains. Depuis, elle ne m’a jamais quitté. puis, je crois qu’on apprend plus de ses erreurs Tu précises « qui vit en Mayenne ». Pourquoi ? que de ses succès. J’ai l’impression de leur appor- 2007 marque la naissance de ta première création : J’ai vu la beauté du monde en voyage, les déserts en Iran, la ter autant quand je me plante dans la direction Le voyage de Tunga, et ton projet de voyage au jungle en Inde, la plaine du Gange, la très haute montagne et du chœur que quand je réussis. Cela montre que Népal… j’ai réalisé à quel point l’endroit où j’habitais était magnifique et nous sommes là pour expérimenter, et donc se En 2006, je suis parti en Inde, en tant que bénévole pour un chanceux : il y a de l’eau, des collines, des fruits, des légumes, des tromper, pour grandir, pour apprendre de la vie. chantier participatif dans un orphelinat et j’ai voyagé aussi dans festivals… Je suis tombé amoureux de la Mayenne. © André Lemaitre le pays. Je reviens d’Inde avec un projet : je vais troquer des Tu travailles avec des personnes en chansons. Recueillir des chansons dans l’école de mon village Ce qui explique pourquoi tu n’as pas repris ton sac à Puis arrive Huguette the power… situation de handicap, d’autres en diffi- de Montjean et les échanger contre d’autres, collectées dans dos de globe-trotteur ? Une boule de neige qui se transforme en avalanche. Au départ, culté sociale, tu donnes de la place à ceux qui sont des écoles croisées sur mon chemin vers le Népal. En amont, Le voyage m’a aidé à faire tomber des barrières : je me suis rendu un seul concert est prévu pour l’édition 2016 du festival Au foin peu visibles. Tu es devenu un personnage public en avec l’aide du conteur Manu Grimo, je crée mon premier spec- compte que je pouvais être à l’aise avec les enfants, comme les de la rue. Nous nous découvrons mutuellement : les 56 choristes Mayenne, avec une image très positive, de tolérance… tacle, inspiré par mon projet de voyage : Le voyage de Tunga. Il vieux, les personnes de toutes classes sociales. Il y a toujours dont la doyenne a 97 ans et les musiciens de Mémé les Watts, Je n’aime pas trop le mot tolérance. Il sous-entend une position s’adresse aux enfants et raconte, sur le mode d’un mythe, l’his- quelque chose qui nous relie. Quand on m’appelle pour jouer un avec lesquels je joue. Six mois plus tard, nous sommes rappelés de supériorité, de surplomb de la part de celui qui dit « tolérer » toire d’un jeune aborigène qui doit partir à la recherche de nou- jour dans une maison de retraite, le lendemain dans une crèche pour un concert à Ernée et j’invite Arnaud Ray pour faire un pe- l’autre. Les vieux sont là, les enfants sont là, les personnes en velles musiques à travers le monde. Je le joue une vingtaine de ou dans un foyer pour adultes handicapés… Ce sont des uni- tit reportage de dix minutes sur la chorale. Arnaud m’appelle et situation de handicap sont là, il faut faire avec… et le « faut » fois à l’automne 2007 avant mon départ au Népal et j’attrape le vers, des histoires individuelles, des manières de se représenter me dit : « j’ai 42 minutes de rush, il y a une telle matière, il faut faire est sans doute de trop. Ce n’est pas une bonne résolution que virus de la scène. le monde différentes. Je voyage… un film documentaire ». Au culot, j’envoie un e-mail avec une je m’impose. Je ne me pose pas la question en fait. C’est la di- Le 8 janvier 2008, me voilà à la sortie de Montjean, le pouce vidéo à plusieurs associations spécialisées dans le domaine de la versité du monde et elle me plaît : rencontrer l’autre tel qu’il est. levé, le sac sur le dos, direction le Népal avec 500 enfants de sept De retour du Népal, tu crées ton spectacle vieillesse. Le soir-même, je reçois un e-mail : « Nous organisons Je pense qu’on ne voit pas assez la beauté des personnes âgées, écoles et sept centres de loisirs qui me suivent via mon blog. Colporteur de chansons, qui raconte ton périple… la Silver nigth au Grand Rex, il faut que vous veniez ! » Quelques ce qui explique leur absence dans l’espace public. J’ai des doutes Durant le voyage, je joue Le voyage de Tunga en m’adaptant : j’ai J’ai appris mon métier avec ce spectacle : la mise en scène, le mois plus tard, le film est bouclé, notamment grâce au finance- quant à l’efficacité des discours sur les valeurs, la tolérance, le un traducteur ou pas, là on entend les mouches voler, ailleurs son, la lumière, l’écriture d’un texte. Je suis un autodidacte : ment participatif et sera vu par plus de 5 000 spectateurs dans vivre ensemble, etc. Si ça n’est pas vécu, difficile de le conscien- ça rigole… Je fais avec les conditions, avec les traditions, avec j’apprends en faisant, avec l’aide des autres. J’ai aussi suivi des plus d’une quarantaine de cinémas, établissements scolaires, as- tiser. Je crois davantage à l’expérience collective, artistique ou les spectateurs. stages de techniques du son, de théâtre, de direction de chœur… sociations en région et ailleurs, ainsi que sur France 3 (plus de autre, que tu vas vivre dans le corps et l’émotion. C’est au fond Mais, chef de chœur, j’ai appris à le devenir sur le tas, avec deux 100 000 téléspectateurs) ! ce que j’essaie de faire depuis le début, animer, donner vie au À 23 ans, tu pars en stop vers le Népal, à travers chorales : ZékéToum et ses chants du monde, et Les Chœurs collectif ; pour que les différences et les regards se rencontrent, l’Europe, la Turquie, l’Iran… Tu n’as peur de rien ! ensoleillés, composée de personnes qui peuvent être isolées, en Les Huguette se sentaient capables d’aller sur une parce qu’ensemble, chacun d’entre nous devient plus grand que Ah si, j’ai plein de peurs. Mais j’ai dû apprendre à les dépasser. milieu rural, dont certaines ont des fragilités sociales ou psy- scène telle que le Grand Rex ? On dirait que tu ne te lui-même. J’y ai pris goût, cela procure de la joie de parvenir à dépasser chologiques. Nous avons joué pendant dix ans un répertoire fixes pas de limites, ni pour toi, ni pour les autres ? ses peurs. Grâce à mon voyage en Inde, j’ai appris à relativiser de classiques de la chanson revisités : La Tactique du gendarme, Je leur demande parfois des choses qu’ils ont oubliées ou qu’ils les choses, à prendre de la distance : si tu te plantes, l’ordre du Rossignol de mes amours… ne se croient pas capables de faire. Jusqu’à la veille du premier
6 BOUCHE À OREILLE BOUCHE À OREILLE 7 © Florian Renault Sculptures communes Cet été, haute-fidélité des œuvres pèlerinage obligatoire au Centre d’art de originales. Connectée à Pontmain, qui accueille jusqu’au cet écran, une appli mo- NATURE ET DÉCOUVERTE 1er septembre les œuvres du Rennais bile permet de sélectionner contrainte de remplissage », RIVER MAN Pascal Jounnier Trémolo, moulages les œuvres et d’avoir accès savoure Steven. Volontiers Imaginez la scène : débarquant sur son d’objets improbables, sculptures à la à une notice qui présente intergénérationnelle et fa- kayak, un chanteur, guitare en bandou- fois abstraites et concrètes, brutes de chacune d’elles, son auteur, miliale, variant les genres, lière, descend la Mayenne, et accoste décoffrage et charnelles. etc. Publics visés : les entre- de la soul-funk de Michelle sur les rives du halage pour donner un Hasard des programmations, la Chapelle prises, hôtels, restaurants, David à l’electro-pop de concert acoustique à la tombée du jour… du Genêteil à Château-Gontier invite hôpitaux, collectivités qui Flèche Love cette année, la C’est l’idée lumineuse qu’ont eu le CPIE aussi, jusqu’au 25 août, un sculpteur : le pourraient mettre cet outil prog’ s’accorde parfaitement Mayenne Bas Maine, association de Berlinois Stefan Rinck et son Carnival, ART ET NUMÉRIQUE à disposition de leurs clients, au décor verdoyant et hos- protection et de promotion de l’envi- bestiaire de créatures étranges et fami- collaborateurs, usagers… Autre débouché FESTIVALS pitalier du parc du Château de Mayenne. ronnement, et Mazarin, chanteur pop lières, semblant tout droit sorties d’une (ST)ART-UP possible, les musées et lieux d’exposition, L’HEURE D’ÉTÉ P endant que la France se dore la pilule, Steven Jourdan est sur le grill. « De Une carte – convivialité, évènement à taille humaine, site singulier – qui sé- duit le public d’Un singe en été (13 000 mayennais. Objectif : associer culture et nature pour valoriser ce haut lieu touristique et naturel qu’est le chemin de légende médiévale. Festoches de poche Fête de potes H ypothèse de départ : et si après avoir révolutionné la diffusion de la mu- sique et du cinéma, le numérique boule- à l’image du ministère de la Culture qui a fait appel à Artify pour enrichir une ré- cente exposition consacrée à Willy Ronis : mai à fin août, je ne vois pas trop le jour », entrées en 2018) comme celui de Terra halage. devenu festival « officiel » l’an passé, Zéro versait le monde de l’art ? Entrepreneur deux écrans permettaient aux visiteurs admet le co-fondateur du festival Terra Incognita. Après huit éditions organisées Gratuites et ouvertes à tous, du 9 au Tapage rejoint la liste encore modeste dans l’âme, passé par le monde du luxe d’accéder à près de 800 clichés numérisés Incognita, organisé fin août à Carelles. dans la ferme exploitée par les parents de 14 juillet, ces escales fluviales suivront des évènements dédiés aux musiques et de la finance, Christophe Roux y croit du photographe américain. Aussi salarié de l’association Tribu Fami- Steven, le festival déménage cette année. chaque jour le même scénario, dès électroniques en Mayenne. Au menu, le dur comme fer. Simon Cau, son associé Créé en 2017, Artify dispose déjà d’un lia, le jeune trentenaire assure la coordina- Une petite révolution là aussi, mais pas 17h30 : en introduction, une animation 27 juillet à Loiron-Ruillé : petite jauge, au sein d’Artify, se montre d’abord scep- fonds de 800 000 œuvres collectées tion et la programmation d’Un singe en d’inquiétude : « on ne quitte pas Carelles, pour découvrir le patrimoine naturel site champêtre et programmation de tique : galeriste et commissaire d’expo, il auprès de musées, galeries ou artistes été à Mayenne. Depuis cinq ans, au-delà rassure Steven. Et il est hors de question local et ses enjeux, suivie d’un apéro, puis DJ’s et d’artistes live locaux et régionaux. croit au rapport physique qui s’instaure contemporains, auxquels est reversée de nombreuses actions culturelles à l’an- de s’agrandir, la jauge reste bloquée à 1 200 d’un concert de Mazarin, en guise de Même topo pour la première édition du entre l’œuvre et le spectateur. Mais les une partie des bénéfices générés. Accom- née (en milieu scolaire, centre social…), festivaliers par soirée. » Quant à la pro- seconde mi-temps. Le tout dans le cadre Rafale festival, organisé par le label du perspectives de démocratisation de l’accès pagné par Laval Mayenne Technopole cette « saison estivale » mixant musiques grammation, l’équipe bénévole continue bucolique, chaque soir différent, d’un même nom le 10 août sur le magnifique à l’art qu’ouvre l’idée – toucher un public depuis ses débuts, le duo, basé à Paris, a actuelles et arts de la rue s’articule autour de fonctionner aux coups de cœur et de resto ou d’une guinguette au bord de site naturel du Montaigu (Hambers). qui ne fréquente pas les musées et susciter décidé d’implanter son entreprise à Laval de trois temps forts : les siestes musicales privilégier l’émergence : « la quasi-totalité l’eau. Plus d’infos sur le site du CPIE. Douze heures de son pour une « immer- l’envie de voir les œuvres grandeur nature où se situent ses principaux fournisseurs mi-juin, quatre soirées entre juillet et des groupes accueillis a juste sorti un EP ou sion totale » dans l’univers de ce jeune –, finissent par le convaincre. Ensemble, et partenaires. Les clients et projets se août, et, du 28 au 30 juin, « le festival » un album ». Parfois catalogué rock indé label techno. ils conçoivent un écran – qu’ils qualifient multiplient pour le binôme, qui envisage qui, nouvelle formule oblige, devient – Lysistrata, Last Train ou Rendez-Vous d’ « écrin numérique » – dont la qualité déjà de nouveaux développements. Et si payant cette année (7 euros par soir). sont passés par là avant d’exploser sur la Rolling stone Malgré une édition garantit une restitution grand format et le futur Spotify de l’art était lavallois ? Une petite révolution – la gratuité est scène indie rock –, Terra tape fort aussi 2018 déficitaire, le festival Les Roches inscrite dans l’ADN du projet – qui per- rayon techno. Zéro limite esthétique et d’Orgères remet le vinyle sur la pla- met à l’association de gonfler son budget zéro nom connu donc, mais de quoi sa- tine. Et passe même un cap en terme Range ta chambre Le festival Confluences musicales inaugure sa première édi- et d’étoffer la programmation du festival, tisfaire l’appétit des esprits curieux, qui de programmation, avec, parmi la tion du 29 au 31 août à Azé. Initié par le violoncelliste castro-gontérien Nicolas Menut rassemblant une grosse douzaine d’ar- devraient aussi apprécier la cantine 100 % vingtaine d’artistes invités pour cette et une équipe de jeunes musiciens professionnels, ce nouveau rendez-vous, dédié tistes. « Une fois qu’on a calé deux ou trois bio et locale du festival. Confirmation les 5e édition : Madben, Electric Rescue, à la musique de chambre, revendique son approche accessible et dépoussiérée du artistes un peu connus – Yuksek et Voyou 23 et 24 août. Après quoi Steven pourra Maxime Dangles… Les 30 et 31 août à répertoire classique. Au menu : tarifs abordables, concerts jeune public et en maisons cette année –, on fait ce qu’on veut, sans goûter des vacances bien méritées. Lignières-Orgères. de retraite, actions pédagogiques… © Franck Loriou
8 BOUCHE À OREILLE BOUCHE À OREILLE 9 Compagnie Super Super EXPO de Segré. Cette aventure collective rassemble bientôt deux exploitations bio, une La vie de château Archimède fête ses 10 ans au Château de Sainte-Suzanne CHERCHEUR auberge, un centre équestre le 31 août ! Un cadre magique pour un D’ART et un théâtre, qui accueille les spectacles de la compa- gnie Patrick Cosnet et bien concert unique à l’occasion duquel le groupe lavallois sera accompagné par un quatuor à cordes. Les frangins Boisnard S ouvent, on lui pose la question : « Pourquoi avoir ouvert une gale- rie d’art contemporain dans une petite type de lieu. « Même si la porte est grande ouverte, les gens n’osent pas entrer. Ils se d’autres, au rythme de 70 y dévoileront en avant-première les ville comme Château-Gontier ? » Ré- disent que ça n’est pas pour eux », regrette dates par an. chansons de leur nouvel album live, current, cet étonnement n’agace pas Jean-Dominique. « Mais une galerie est À l’origine de Fermes en alternant morceaux inédits et titres Jean-Dominique Sauret. Le créateur de un commerce comme un autre, personne scène, un constat : entre emblématiques revisités. Classe pour la galerie Art inside assume le carac- n’est obligé d’acheter, on peut juste regar- THÉÂTRE gens des villes et gens des oublier la rentrée imminente ! tère périlleux et militant de l’entreprise. der, poser des questions. Soyez curieux ! » FERME champs, « bobos écolos » et « agricul- Été indien Le Chainon manquant, ARTS DE LA RUE « Château-Gontier, c’est ma ville depuis S’il veille à proposer des œuvres abor- INTENTION teurs pollueurs », le fossé se creuse. Pour ÉDITION SPÉCIALE 20 ans, je m’y sens bien », justifie-t-il, en dables financièrement, ce que le galeriste renouer le lien entre ces deux mondes, Les Embuscades, La Ribouldingue… poursuivant : « Ouvrir une galerie, c’est avoue aimer le plus, c’est « partager avec «C ’est le lycée qui m’a sauvé. » Ou plus précisément un cours d’édu- cation socioculturelle au lycée agricole de la Cie Cosnet invente en 2005 un festival itinérant, qui la voit installer sa scène mo- bile dans les hangars des fermes. Seule Septembre s’annonce fou fou, d’autant que se dessine dans le paysage un nouveau-venu de poids. Pour sa pre- La Chalibaude : nom propre qui dési- gnait une fête révolutionnaire, version laïque des Feux de la Saint-Jean, au cours un vieux rêve et la suite logique de mon parcours ». Voilà 30 ans que le quinqua « vend de l’art », d’abord pour les visiteurs l’émotion que peut susciter une œuvre », en dehors de tout rapport marchand. Laval, dont Patrick Cosnet fut élève à la condition requise : que l’agriculteur qui mière édition, le V and B fest frappe de laquelle le maire de la ville allumait un éditeur d’art puis comme Céramique, sculpture, fin des années 70. « Ce fut une découverte l’accueille joue le jeu à fond, invite ses fort : 20 000 spectateurs attendus, 156 un feu de joie. C’est le nom que choisit courtier à son compte : peinture, art figuratif de la musique, de la photo, des voyages… amis et voisins, fasse visiter sa ferme au mètres de bar, 20 concerts et une pro- en juin 1989 la ville de Château-Gontier « j’achetais des œuvres à ou abstrait… La seule Une ouverture totale ! » Quelques années public… Certains en profitent pour orga- grammation qui devrait étancher tous les pour baptiser son festival nouveau-né. des artistes que je revendais ligne qu’il suit est celle plus tard, devenu paysan, il écrit avec un niser une vente de produits locaux, pro- gosiers, de papa (HF Thiéfaine) à tonton Les premières années, la manifestation, ensuite à des musées, arto- du coup de cœur et de voisin comédien, sa première pièce de poser un repas fait maison avant le spec- (IAM, Popof…) en passant par petit frère d’abord dédiée à la musique classique, thèques, galeries… » En 2016, la rencontre humaine. théâtre, La Casquette du dimanche. Un tacle de la compagnie, toujours précédé (Roméo Elvis) et petite sœur (BigFlo & tâtonne, avant de trouver sa voie à la lorsqu’un commerce qu’il Sa nouvelle exposition, succès phénoménal, qu’il jouera un millier d’une première partie locale. Et la formule Oli)… Du 13 au 15 septembre à Craon. fin des années 1990, et d’opter pour les guettait depuis quelques années jusqu’au 3 août, associe, de fois, à travers toute la France. La fibre fonctionne à plein, attirant un public sou- arts de la rue. Depuis, le festival, qui se se libère, il passe le cap. Niché au comme les précédentes, deux est résolument militante, les spectacles vent peu familier des salles de spectacles. Bocage ô mon bocage Depuis déploie dans toute la cité, du Jardin du cœur du coquet centre-ville de artistes, Nanan et Cyril An- qu’il monte cause de ce monde paysan en Rayonnant dans le Maine-et-Loire et les 2017, Cyril Le Tourneur d’Ison scrute bout du monde au centre-ville, pête le Château-Gontier-sur-Mayenne, guelidis, dont les univers, déroute, de ces agriculteurs en perte totale départements limitrophes, Fermes en « l’intimité d’un paysage emblématique du feu, attirant 5 000 à 6 000 festivaliers l’espace, avec ses 45m2 et ses inspirés par la pop culture, le de sens, des gilets jaunes d’hier et d’au- scène fait cette année une incursion en département : le bocage ». En attendant venus du Sud Mayenne et du Maine- deux vitrines en angle, est idéal. manga et la culture du toy, jourd’hui. À la fin des années 90, il achète Mayenne. Avec 11 rendez-vous prévus le film documentaire qu’il prépare sur le et-Loire voisin. Pour fêter ses 30 piges, Pas simple cependant de mobi- entrent en parfaite réson- avec une cinquantaine d’associés la ferme d’avril à septembre, c’est opération fermes sujet, le photographe présente une ex- les 29 et 30 juin, ce festival populaire et liser le public, peu familier de ce nance. Vibrations garanties. de la Chaise rouge à quelques encablures ouvertes dans le 53 ! position itinérante baptisée Palimpseste, gratuit étoffe sa programmation : plus de Nanan, Tommy visible notamment du 8 juin au 28 juillet 60 représentations prévues et 25 équipes sur les grilles du Musée des sciences de artistiques accueillies, parmi lesquelles Rêve général « Machines à rêver » aux rouages aussi complexes qu’inutiles, Galette party Peut-être les avez-vous croisés aux 3F ou bien les Laval. Trente-cinq tirages noir et blanc, les excellentes compagnies Pernette et « automaboules » rutilantes en métal peint, « peintures bavardes », dessins mono- rencontrerez-vous lors des Entrelacés, du festival Zéro Tapage ou des animations de faisant aussi l’objet d’un livre, qui subli- Benoît Charpe, les locaux de Bewitched chromes très graphiques… Entre bande dessinée, art brut et surréalisme, le monde Laval plage cet été… La petite bande d’allumés du collectif lavallois La Boum ambiance ment le mystère de ces paysages en voie ou de la fanfare Mouv’n’Brass… de François Monchâtre est protéiforme et inclassable, moquant avec dérision et les before des festivals et autres temps festifs, avec sa collec’ de disques vinyles plus d’effacement, et rappelle l’urgence de poésie le cynisme et l’absurdité du monde contemporain. À découvrir au Musée ou moins kistchs et ses tenues assorties. Décalage immédiat et gros lâchage assuré ! leur nécessaire préservation. d’art naïf et des arts singuliers (Manas) de Laval, jusqu’au 7 septembre.
Festival de festivals ! Dans le 5.3 comme de Woodstock ou Monterey, véritables ailleurs, les festivals marqueurs générationnels. Mais c’est au cartonnent ! tournant des années 1980-1990 que surgit Festivalisation de la la lame de fond : les festivals se développent vie culturelle, rôle alors de façon très nette un peu partout en Europe. Dans le 5.3, près d’une douzaine prépondérant du verront le jour entre 1985 et 2000. Dont la bénévolat, lien fort plupart sont toujours actifs aujourd’hui. Vi- au territoire… Survol, vaces, les festivals bien enracinés résistent forcément trop rapide, de aux intempéries, tandis que les jeunes pousses se multiplient : 11 nouveaux venus la très hétéroclite planète fêtent leur 1re ou 2e édition cette année. festival en Mayenne. Et pourtant, ces petites bêtes, par es- Par Nicolas Moreau sence fragiles, que sont les festivals doivent faire face à de nombreuses périls : météo O pourrie qui menace chaque année les n ne sait plus où donner de la fête. évènements pas étanches, raréfaction des De janvier à décembre, du trash subventions, augmentation des coûts de metal à la littérature contempo- sécurité, inflation des cachets artistiques, raine la plus pointue, en ville comme à la arrivée d’acteurs privés venus d’autres campagne, les festivals sont partout. À tel secteurs d’activité… Mais qu’importe, on point qu’aucun pays n’est capable de les festivalise à tout va, pour répondre aux at- compter. Ils seraient 3 000 en France. 61 dé- tentes d’un public en quête de convivialité. clarés comme tels en Mayenne. Et le chiffre La fête séduit (lire article p. 16), les festivals ne cesse d’augmenter ! incarnent « un certain état d’esprit, une Inventés à la fin du 19e siècle en Angle- forme de décontraction, de fête, d’ouverture, terre, les festivals quittent, au lendemain d’éclectisme » et renvoient « à la fois aux © Pauline Brochard de la Seconde Guerre mondiale, le cénacle notions de confirmation et de risque, d’hé- des musiques sacrées pour investir le ciné- ritage et de subversion », analyse le socio- ma, le jazz ou le théâtre. Puis viennent les logue Emmanuel Négrier, auteur de plu- sixties, secouées par la vague des festivals sieurs enquêtes sur le sujet.
12 DOSSIER DOSSIER 13 Extension du domaine des festivals spectacles « décentralisés », à l’image encore des 3F, des Ateliers “ LES FESTIVALS INCARNENT Agités du local Mais au fait, c’est quoi un festival précisément ? Il n’existe au- Jazz, du Chainon ou des Embuscades. UN CERTAIN ÉTAT D’ESPRIT, Premiers ambassadeurs d’un festival, les bénévoles garantissent cune définition partagée de ces objets particuliers. On peut Enfin, phénomène observable parmi ceux qui sont les plus aussi son ancrage local. Le site et le territoire qui l’accueillent s’accorder sur le caractère éphémère de ces évènements et leur durablement installés : les festivals se « permanentisent ». Au- UNE FORME DE DÉCONTRACTION, jouent souvent un rôle clé dans l’identité d’un évènement. Im- inscription dans un calendrier souvent annuel. Impossible ce- tour de leur évènement phare, ils développent de nombreuses DE FÊTE, D’OUVERTURE ” possible par exemple d’imaginer le festival électro Les Roches pendant de s’en tenir à la représentation classique les circons- actions à l’année : rendez-vous ponctuels, saisons, actions péda- d’Orgères ailleurs que sur le magnifique site naturel dont il crivant à un « évènement exceptionnel, dans un lieu exceptionnel gogiques, résidences d’artistes… Une façon de s’ancrer davan- où les propositions culturelles sont parfois rares. Plus du tiers porte le nom. à un moment exceptionnel ». Certains s’étirent durant plusieurs tage dans son territoire et de limiter les risques, en ne dépendant des festivals du 5.3 sont ainsi implantés dans des communes de Dès lors que la création d’un évènement répond à un enjeu semaines, circulent sur de multiples sites à l’échelle du dépar- plus uniquement d’un seul évènement. moins de 2 000 habitants. de développement local (« on veut faire bouger notre pays ! »), se tement ou d’une intercommunalité, à l’instar des Reflets du À cette « permanentisation » des festivals répond une Trait commun toutefois à l’ensemble des festivals : tous ont noue entre la manifestation et le territoire un lien identitaire puis- cinéma, des Nuits de la Mayenne ou du festival jeune public « festivalisation » des lieux culturels permanents : conscient recours à des bénévoles. Le fonctionnement d’une grande majo- sant. Pour beaucoup de Mayennais, S aint-Denis-de-Gastines, Monte dans l’bus. du potentiel de séduction du format évènementiel, théâtres, rité repose même uniquement sur le bénévolat. La culture n’est c’est Au foin de la rue. Et pour certains Parisiens, Laval, c’est Et puis, tendance de fond, les festivals étendent leur champ saisons culturelles et musées multiplient les temps forts, nuits pas seulement une affaire de professionnels experts, et les festi- Les 3 Éléphants. Vecteurs d’image et donc d’attractivité pour un d’action : nombreux sont ceux qui élargissent leur programma- (blanches) ou (folles) journées. On citera par exemple la bien- vals sont des outils parfaits pour qui veut participer activement territoire, les festivals génèrent aussi des retombées qui peuvent tion à de nouvelles esthétiques ou disciplines. Des 3 Éléphants nale Onze réunissant autour des arts de la marionnette une di- à la dynamique culturelle de son territoire. Vous êtes une bande s’avérer significatives pour l’économie locale. D’autant que beau- à Un singe en été, plusieurs festivals de musiques actuelles in- zaine de lieux de spectacles du département. de potes et vous trouvez que votre village manque d’animation, coup jouent le jeu des circuits courts et privilégient les entre- vestissent ainsi le terrain des arts de la rue. Autre exemple parmi Question : à force de « festivaliser », au-delà des risques de ou bien qu’un festival de manga sud-coréen fait cruellement dé- prises et producteurs locaux. bien d’autres, le Festival du premier roman et des littératures concurrence, ne risque-t-on pas de banaliser ce qui relève par faut dans le paysage ? Eh bien montez votre festoche ! Ce lien étroit au local, la « permanentisation » des festivals contemporaines à Laval propose aussi des concerts, expos, définition de l’exceptionnel ? Quoi qu’il en soit, le constat est C’est ainsi qu’a démarré l’histoire de la plupart des festivals. évoquée plus haut l’accentue de manière évidente. Au foin de la films, etc. irréfutable : autrefois à la marge, les festivals sont devenus des Par contre, ne rêvez pas : la gestation et la croissance du bébé rue et Les Mouillotins sont par exemple à l’origine de la création L'extension est spatiale aussi : de plus en plus de manifes- acteurs majeurs du paysage culturel. risquent sans doute de vous occuper quelques week-ends et de lieux de vie et d’échange dans leur fief : espace de vie sociale tations partent en balade sur leur territoire pour proposer des soirées. Au-delà des armées de bénévoles présents le jour J, un à Cuillé, tiers lieu à Saint-Denis… Preuve que ces associations Tous des cas (particuliers) noyau, généralement composé de quelques personnes, œuvre, sont actrices de leur territoire à part entière, et que leur rôle dé- Rencontres BD en Mayenne, les 30 et 31 mars 2019 à Changé. Difficiles à définir, les festivals sont tout parfois quotidiennement, à l’organisation. Un engagement chro- passe largement le cadre culturel. aussi complexes à cataloguer. Délicat d’en nophage et énergivore. « Quand le projet prend de l’ampleur et Autre élément qui vient renforcer l’enracinement local des dresser un portrait-robot et de générali- s’appuie sur des salariés, le poids des responsabilités est parfois festivals : leur public, avant d’être régional voire national, est ser. Du Keudfest, petite teuf hard rock à lourd à porter pour les dirigeants associatifs, et ça n’est pas tou- d’abord local comme l’illustrent différentes études menées en Cossé-en-Champagne au Festival d’arts jours simple de trouver des bénévoles prêts à prendre en charge région et à l’échelon européen. Des enquêtes qui montrent aussi sacrés d’Évron, du micro-festival Fro- des dossiers compliqués », témoigne Jeff Bodinier, co-président qu’ils programment, davantage que les lieux de spectacle, des mages, vins et musique à Livré-la-Touche des Mouillotins. artistes locaux. au géant V and B fest à Craon, le monde Un fardeau que de plus en plus d’assos allègent en le répartis- Ah oui, au fait, et les artistes ? On en parle quand ? Ils sont au des festivals est u ltra-disparate et hétéro- sant entre plusieurs co-présidents, à l’image des Mouillotins, des centre du phénomène festivalier. C’est pour eux que le public se © Rencontres BD en Mayenne / Dominique Vernier gène, fait d’extrêmes et de cas particuliers. Bouts de ficelles ou d’Au foin de la rue. À plus petite échelle, déplace : pour voir des « stars » parfois rares dans nos contrées, Derrière les « grand-messes » (sou- Adrien Legros, organisateur du Back Home festival, qui cu- mais aussi pour découvrir de nouveaux artistes, prendre le vent musicales) les plus fréquentées et les mulait un millier d’entrées lors de sa première édition en 2018, risque d’être curieux... « Toute relation humaine est basée sur la mieux identifiées – huit manifestations en confesse « consacrer à la prépa de Back Home près d’une dizaine découverte », avance l’écrivain Michel Le Bris, par ailleurs insti- Mayenne concentrent plus de la moitié du d’heures par semaine ». Avec ses équipes de bénévoles, répartis gateur du festival Étonnants voyageurs à Saint-Malo. Machines public des festivals –, fourmillent une mul- en commissions, il gère des « questions ultra-techniques, deman- à rêver et à fabriquer des souvenirs, les festivals existent aussi titude de projets, qui contribuent à la vita- dant des connaissances spécifiques » qu’il acquiert sur le tas : sé- pour cela, nous permettre d’explorer des mondes inconnus. Ou- lité du territoire et à la diversité de sa vie curité du site, besoins électriques, prévention, réglementation, vrez les écoutilles ! culturelle. Notamment en zones rurales, là plan Vigipirate, etc.
DOSSIER DOSSIER15 15 Festivals, les chiffres-clefs 5 700 37 bénévoles emplois 61 festivals Champion toute catégorie : Au foin de la C’est le nombre d’emplois (équivalent temps rue avec ses 1 200 bénévoles (pour une plein) permanents mobilisés par l’organisation commune de 1 600 habitants !). des festivals. Le paysage festivalier s’est On compte en Mayenne 61 évènements récurrents programmant Si la moyenne par festival est de 97 considérablement professionnalisé ces 20 au minimum 6 propositions artistiques. Plus de la moitié des festivals bénévoles, la moitié des festivals dernières années. Une évolution qui concerne ont lieu entre début juin et fin septembre, avec la palme pour le mois en compte 40 ou moins. Plus gros d’abord les « grands festivals ». de juin (12 festivals). Multiplication des évènements oblige, la période « employeurs » de bénévoles, les festivals Une forte majorité (près de 70 %) fonctionne festivalière s’étale toute l’année. Pas un mois sans festival ! de musiques actuelles, qui rassemblent avec moins d’un mi-temps salarié. Et 60 % sont Laval agglomération concentre un tiers des festivals (19). Mais 30 % 75 % des bénévoles des festivals. uniquement portés par des bénévoles. ont lieu dans des communes de moins de 2 000 habitants. N° 1 La musique C’est le budget cumulé des festivals en 2019. Un chiffre derrière lequel se cachent de très fortes disparités. La moitié des festivals disposent d’un budget Rock, metal, jazz, electro, chanson, musiques du monde… Plus de la moitié des festivals (32) de moins de 50 000 euros. Et plus de 50 % du budget total est concentré par relèvent des musiques actuelles. Viennent ensuite les arts de la parole (théâtre, conte...), cinq festivals. Parmi eux, trois festivals de musiques actuelles. le livre et la littérature, le cinéma… 11% 11 ans 243 000 festivaliers - 500 500 à 1 500 à 5 000 à + 10 000 10% C’est l’âge moyen des festivaliers 1 499 4 999 10 000 Théâtre, conte... festivals. Sachant que la 52% moitié d’entre eux ont C’est le nombre d’entrées cumulées en 2018. Premier festival en Livre et littérature moins de huit ans et plus fréquentation, Les 3 Éléphants totalisent 30 000 entrées (dont 22 000 d’un tiers moins de cinq ans gratuites). Premier festival en termes d’entrées payantes : Au foin de la rue 11% 6% (soit 20 festivals). (16 000). Témoignage du poids des « grands festivals » : huit concentrent 14% 14% Musiques 6% Cinéma Parmi les doyens, Les Nuits plus de la moitié de la fréquentation totale. Derrière ces évènements actuelles de la Mayenne (1973), Les phares, près de 40 % des festivals accueillent moins de 1 500 spectateurs. Musique classique Par ailleurs, les festivals de musiques actuelles rassemblent près de 40 % Lecture : Embuscades (1986), La 5% Chalibaude (1989) et le du public total. 27% 11 % des festivals rassemblent moins Lecture : festival Théâtre amateur en de 500 festivaliers. 5% Arts visuels 52 % des Mayenne (qui fête sa 30e FESTIVALS À LA CARTE 34% festivals sont 5% Pluridisciplinaire édition cette année). des festivals de Date, lieu, genre, site web… Retrouvez la cartographie musiques actuelles. Arts de la rue de tous les festivals du 5.3 sur tranzistor.org
16 DOSSIER DOSSIER 17 biance d’un festival à taille humaine. « Nous aimons le théâtre, dans un lieu-surprise remporte tous les suffrages : au départ de Amateurs de musique, férus de théâtre ou de la comédie musicale, ce qui est festif. Les Nuits de la Mayenne la basilique d’Évron, un car conduit les spectateurs vers une des- littérature, ils sont nombreux à courir les festivals à nous permettent de voir des pièces du répertoire classique et de tination secrète. « Ça donne un petit côté colonie de vacances. À travers le département. Un « pèlerinage moderne » découvrir des lieux patrimoniaux exceptionnels. » Chaque été, bord, les gens discutent facilement. » Petites ils invitent amis, enfants et petits-enfants à les rejoindre pour Dans la même veine, l’itinérance des Nuits de la Mayenne, dont les motivations dépassent largement partager l’événement. Et n’hésitent jamais à engager la discus- dans des endroits souvent méconnus, facilite la venue d’un pu- l’artistique. Et si on donnait la parole au(x) sion avec d’autres spectateurs. « Il y a une vraie fidélité de la part blic peu habitué des saisons culturelles. « En ouvrant des lieux public(s) ? Par Carole Gervais du public. On est heureux de se retrouver. » patrimoniaux, habituellement inaccessibles, dans de tout petits républiques José et Christian Meurisse sont passionnés de littérature. villages, précise Coralie Cavan, directrice du festival, nous pro- Le couple de septuagénaires vient tous les ans du Nord pour posons aux habitants de ces communes d’aller au spectacle… à siques, jugés parfois intimidants. « Il m’arrive d’aller assister au Festival du premier roman et des littératures deux pas de chez eux. » à des concerts, mais ce n’est pas la même démarche », contemporaines de Laval. « Nous sommes de grands lecteurs, Les moments partagés sont souvent mémorables. « Je me rapporte Étienne. « Une fois qu’on a quitté la salle, et apprécions d’échanger avec les auteurs. » Habitués des festi- souviens d’une représentation des Nuits, à Jublains. Il pleuvait des chacun rentre chez soi. Dans un festival, on reste sur vals, ils sont devenus des fidèles de l’événement lavallois dont ils cordes », rapporte Marieke Davy. « On s’est replié dans la salle «L le site, avec plein de gens autour… Ça reprend le len- goûtent l’ambiance. « On arrive pour la première rencontre, et on des fêtes, sans décor. Les acteurs ont fait preuve d’une extraor- es Mouillotins, Au foin de la rue, Les 3F. C’est mon demain matin, midi et soir ! » Bulles hors du monde réel et du repart après la dernière ! » dinaire capacité d’adaptation et ont réussi à nous embarquer ! » top 3 ! » À 23 ans, Étienne Hugedé est un habitué des quotidien, les festivals sont des « petites républiques » selon les Rares sont ceux qui vont au festival en solo. Cette année C’est aussi ça, la magie des festivals : des instants rares et des mo- festivals mayennais. Avec sa bande de copains – une mots du sociologue Emmanuel Négrier, mini-univers insulaires pourtant, Jennifer Heuzé, 28 ans, a tenté l’expérience. « Je ne suis ments de communion entre artistes et public. « Les gens aiment quinzaine de potes des années lycée – l’étudiant en chirurgie avec leurs propres règles, leur village, leur scénographie, leur pas restée seule bien longtemps ! », confie la jeune Lavalloise qui les festivals pour l’ambiance exaltée de communion, la chaleur dentaire, originaire de Cossé-le-Vivien, sillonne régulièrement monnaie… ne manque jamais le rendez-vous annuel de Lecture en Tête. communicative, le rituel… analyse l’historien de la culture Pascal les routes du département pour rejoindre ces rassemblements « J’ai très vite retrouvé des gens que j’y croise régulièrement et j’ai Ory. C’est une nouvelle forme de religion. Le festival, c’est le pèle- musicaux. « On s’y retrouve pour les concerts, mais aussi pour Belles rencontres vécu un super week-end : des auteurs hyper accessibles, des dé- rinage moderne. » l’ambiance. C’est un peu comme si on prenait des mini-vacances, Le festival offre aussi la possibilité de voir davantage d’artistes, bats riches et de belles rencontres ! » Festival Les Mouillotins, juin 2018. © Les Mouillotins / Maxime Jouin tous ensemble ! » Jeunes actifs ou encore étudiants, Étienne et et pour un coût assez modéré. « Si on rapporte le prix d’un pass ses amis sont aujourd’hui éparpillés dans tout le Grand Ouest. au nombre de concerts proposés, c’est moins cher qu’une place Colonie de vacances En fonction de leur lieu de résidence, ils s’acheminent en covoi- de spectacle », apprécie Étienne. Un point de vue que partage L’intérêt des festivals tient aussi à la facilité turage, ou se rejoignent directement sur place. Toile de tente, Marieke Davy, enseignante à Argentré. Passionnée de théâtre, des échanges. Avec la personne qui vous duvet, sac de courses, glacière, chacun emporte le nécessaire cette inconditionnelle des Nuits de la Mayenne a découvert précède dans la file d’attente ou qui est as- du parfait petit festivalier. « J’aime beaucoup le moment où on le festival à la fin des années 1980, alors qu’elle était étudiante. sise à côté de vous. « Le système des abon- s’installe », confie Étienne. « Et j’adore quand le camping est situé « Le premier spectacle que j’y ai vu, c’était Lucrèce Borgia, à nements fait que les gens se retrouvent aux assez loin des scènes. Ça permet de rejoindre les concerts tran- Lassay-les-Châteaux. Du vrai théâtre, dehors, dans un cadre mêmes places, avec les mêmes voisins ! Ça quillement, à pied. Plus on s’en approche, plus le son monte. C’est original, et pour un prix relativement modeste ! J’ai trouvé ça ma- crée des liens », note Emmanuel d’Erceville, cool ! » gnifique ! » directeur du Festival d’arts sacrés d’Évron. Selon une étude réalisée en 2016 auprès des publics de dix Trente ans plus tard, Marieke continue de fréquenter le fes- Sacré ne rime pas avec guindé, ici l’am- festivals de musiques actuelles en Pays de la Loire, les motiva- tival. En famille. « À l’origine, mon mari n’était pourtant pas très biance est résolument décontractée. Pour tions les plus fréquemment citées par les festivaliers étaient la attiré par le théâtre. Aujourd’hui, il ne manquerait le rendez-vous renouveler son public, le festival développe programmation (à 75 %) et l’ambiance (à 72 %). Plus des trois pour rien au monde. J’y emmène aussi ma mère, mon frère, mes une politique tarifaire avantageuse : prix quarts des personnes interrogées disaient aussi être venues en neveux et nièces… » unique pour les 12-25 ans, formule de par- groupe. Installés à Torcé-Viviers-en-Charnie depuis 20 ans, Annick rainage... « Et ça marche, notre public s’est La dimension festive et conviviale de la forme festivalière et Pierre Boivent figurent aussi parmi les habitués des Nuits. considérablement rajeuni ! » attire un public plus diversifié que celui des lieux culturels clas- Ces ex-Parisiens apprécient la qualité des spectacles et l’am- Moment-phare du festival, le concert
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