Jojo Rabbit de Taika Waititi - n 2189 - Les Fiches du Cinéma

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Jojo Rabbit de Taika Waititi - n 2189 - Les Fiches du Cinéma
n°2189

Jojo Rabbit
de Taika Waititi

                   N°2189 • 29 JANVIER 2020
Jojo Rabbit de Taika Waititi - n 2189 - Les Fiches du Cinéma
SOMMAIRE
Bad Boys for Life                          RETAR
                                                D   H
de Adil El Arbi et Biall Fallah
Garabandal                                 RETAR
                                                D   m
de Brian Alexander Jackson
Je voudrais que quelqu’un                  RETAR
                                                D
m’attende quelque part                              H
de Arnaud Viard                                 D
                                           RETAR
Luciérnagas                                         HH
de Bani Khoshnoudi

          FILMS DU 29 JANVIER 2020
La Bataille géante de boules de neige 2 HH
de Benoît Godbout
La Beauté des choses                                HHH
de Bo Widerberg
Botero                                              m
de Don Millar
Cuban Network                                       H
de Olivier Assayas
L’Esprit de famille                                 HH
de Éric Besnard
Histoire d’un regard                                HHH
de Mariana Otero
Jeunes et courts                                    HH
Film collectif
Jojo Rabbit                                         HHH
de Taika Waititi
Mission yéti                                        H
de Pierre Gréco et Nancy Florence Savard
L’Odyssée de Choum                                  HHH
de Julien Bisaro
Revenir                                             HHH
de Jessica Palud
Les Traducteurs                                     HHH
de Régis Roinsard
Un jour si blanc                                    HH
de Hlynur Pálmason
La Voie de la justice                               HH
de Destin Daniel Cretton
Waves                                               H
de Trey Edward Shults
Jojo Rabbit de Taika Waititi - n 2189 - Les Fiches du Cinéma
Bad Boys for Life (Bad Boys for Life)
de Adil El Arbi et Bilall Fallah

Mike et Marcus reprennent du service, pour parer                                                                           COMÉDIE D’ACTION
                                                                                                                          Adultes / Adolescents
la vengeance d’une tueuse impitoyable. En rompant
avec les aberrations, formelles et morales, de                              u GÉNÉRIQUE
l’initiateur de la franchise, Michael Bay, ce troisième                     Avec : Will Smith (Mike Lowrey), Martin Lawrence (Marcus Burnett),
volet film perd en singularité. Tant mieux, tant pis.                       Vanessa Hudgens (Kelly), Alexander Ludwig (Dom), Charles Melton
                                                                            (Rafe), Paola Núñez (Rita), Kate del Castillo (Isabel Aretas), Nicky
                                                                            Jam (Zway-Lo), Joe Pantoliano (le capitaine Conrad Howard),
                                                                            Jacob Scipio (Armando Armas), Theresa Randle (Theresa), Khaled
                                                                            “DJ Khaled” Khaled (Manny), Happy Anderson (Jenkins), Bianca
                                                                            Bethune (Megan), Dennis McDonald (Reggie), Carlos Guerrero
                                                                            (Javier), Massi Furlan (Terry Taglin), Chick Bernhard, Jennifer
                                                                            Badger, Jeff J.J. Authors, Michael Bay, Gissette Valentin.
                                                                            Scénario : Chris Bremner, Peter Craig et Joe Carnahan, d’après
                                                                            une histoire de Peter Craig et Joe Carnahan D’après : les personnages
                                                                            du film Bad Boys de Michael Bay (1995) Images : Robrecht
                                                                            Heyvaert Montage : Dan Lebental et Peter McNulty 1ers assistants
                                                                            réal. : Jeff J.J. Authors et Steve Danton Scripte : Dug Rotstein
                                                                            Musique : Lorne Balfe Son : Tony Lamberti Décors : Jon Billington
                                                                            Costumes : Dayna Pink Effets spéciaux : Eric Frazier Effets
                                                                            visuels : Hoyt Yeatman Dir. artistique : Alan Hook Maquillage :
                                                                © Sony      Kimberly Jones Casting : Mary Vernieu et Lindsay Graham
                                                                            Production : Don Simpson/Jerry Bruckheimer Films et Overbrook
                                                                            Entertainment Pour : Columbia Pictures Production associée :
      H         Comment remettre le couvert, seize ans après
                                                                            2.0 Entertainment Producteurs : Jerry Bruckheimer, Will Smith
un deuxième volet pour le moins problématique et en l’absence de
                                                                            et Doug Belgrad Distributeur : Sony Pictures.
son créateur Michael Bay ? Que faire de ses héros “too old for this
shit”, pour citer Danny Glover dans L’Arme fatale, parangon du                        123 minutes. États-Unis - Mexique, 2019
buddy movie d’action et ancêtre de Bad Boys ? Le film applique                            Sortie France : 22 janvier 2020
l’équation de circonstance pour pallier l’âge de ses interprètes
                                                                            u RÉSUMÉ
et le changement d’époque : running gags insistants (Martin
                                                                            Prison de Santa Maria, Mexique. Isabel Aretas s’évade avec l’aide
Lawrence n’y voit plus rien et refuse de mettre ses lunettes) et            de son fils, Armando, qu’elle charge d’éliminer ceux qui ont
nouvelles recrues ; trève de plaisanteries homophobes et moins              conduit son pv ère, mort depuis, en prison. Mike figure sur
de filles en bikini ; orgie de drones et de bidules informatiques.          la liste... Alors que Marcus prend sa retraite, Mike est abattu
Il n’y a guère de suspense quant à la finalité de l’entreprise : si         par Armando. Mike est dans un état critique ; l’enquête
la possible obsolescence de ses héros est pointée, c’est pour être          est conduite par le Capitaine Howard et Rita, à la tête
balayée d’un revers de main - une suite semble d’ores et déjà               d’une unité d’investigation : l’AMMO. Armando abat, l’un après
promise. Mais sa faillite réside ailleurs. L’amalgame de fautes             l’autre, les enquêteurs qui avaient condamné son père.
de goût, l’absence d’inhibitions, morales autant que formelles, en          SUITE... Six mois plus tard. Rétabli, Mike entend traquer son
quoi consiste le cinéma de Bay, son maximalisme pyrotechnique               assaillant. Marcus lui refuse son aide. Mike rencontre l’équipe
et son montage frénétique (comme si, pour filmer la moindre                 de l’AMMO : Kely, Dom et Rafe. Ils interviennent dans une vente
                                                                            d’armes qui tourne à la fusillade. Carver Remy, informateur de
action, il renonçait à choisir un angle ou une échelle de plan, il
                                                                            Marcus, contacte celui-ci. Mais, avant d’avoir pu parler, Carver
les compile tous), ont pu produire, çà et là, des séquences d’un            est tué par Armando, qui affronte Mike, puis s’enfuit. Quand
maniérisme terminal et, par endroits, fascinant. Ici, rien de               Howard est assassiné, Marcus reprend du service avec
tel : action lisible, récit (minimal) tenu, et aucun dérapage réac’         Mike. L’enquête les conduit à Zway-Lo, trafiquant d’armes.
- de cela seul, on se réjouit. Car, tout ce qui renonce à sa part           Ils le prennent en chasse, mais Armando intervient. Zway-
d’aberration perd aussi en singularité, et ne peut plus prétendre           Lo est tué. Mike comprend à qui ils ont affaire : Armando
qu’au rang de relique, à la traîne notamment d’une franchise plus           est son fils, fruit de ses amours avec Isabel, lorsque,
récente et qui, de ces carambolages XXL mêlés d’arguments                   25 ans plus tôt, il infiltra un cartel. Il décide d’aller trouver
                                                                            Isabel à Mexico. Marcus et l’AMMO l’y accompagnent. Mike
de telenovela (seul apport de ce nouveau volet : une intrigue
                                                                            rencontre Isabela. Armando et ses hommes sont présents.
sentimentalo-familiale), a su faire émerger une forme de                    Une fusillade s’engage. Affrontant Armando, Mike lui
grâce - Fast & Furious, oui messieurs-dames. Les premiers                   apprend qu’il est son père. Isabela blesse accidentellement
Bad Boys étaient des aberrations, celui-ci est une anecdote :               Armando, qui a renoncé à tuer Mike, et Rita sauve ce dernier
on ne saurait dire si l’on a gagné au change. _T.F.                         en tuant Isabel. Marcus renonce à la retraite.

                    Visa d’exploitation : 152193. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD Atmos. X copies (vo / vf).

                                                                    3                                                   © les Fiches du Cinéma 2019
Jojo Rabbit de Taika Waititi - n 2189 - Les Fiches du Cinéma
Garabandal Dieu seul le sait (Garabandal - Solo Dios lo sabe)
de Brian Alexander Jackson

Juin 1961 en Espagne, au village de San Sebastian                                                                              CHRONIQUE
                                                                                                                      Adultes / Adolescents
de Garabandal quatre jeunes filles tombent en extase.
Elles déclarent ensuite avoir vu un ange... Parfaitement                    u GÉNÉRIQUE
raté dans tous ses aspects, ce film mal écrit et mal                        Avec : Belén Garde García (Conchita), Fernando García Linares
filmé tombera des yeux des plus indulgents.                                 (le brigadier Juan Álvarez-Seco), Rafael Samino Arjona (le Père
                                                                            Valentín), Javier Paredes, Alberto Bárcena.
                                                                            Scénario : José Luis Saavedra García Images : Kristian Philip
                                                                            Espejon Musique : Karen Mary McMahon Production : Mater Spei
                                                                            A.I.E. Distributeur : SAJE Distribution.

                                                           © Mater Spei

     m        Bon, disons-le : rien ne va. Le problème n’est
pas le sujet du film, tant il est vrai que l’on peut apprécier
une œuvre traitant de mystique sans être porté soi-même
sur la chose. De nombreux auteurs, de Dreyer à Cavalier                                      96 minutes. Espagne, 2018
en passant par Pialat, se sont colletés à la question                                       Sortie France : 22 janvier 2020
de la foi, accouchant d’œuvres aussi puissantes
                                                                            u RÉSUMÉ
qu’universelles. Mais là, non, vraiment, même plein de bonne
                                                                            Espagne. Un envoyé de l’évêque exige de la jeune Conchita
volonté, le spectateur bâille dès les premières minutes,                    qu’elle avoue qu’elle et ses trois amies n’ont pas réellement
assistant incrédule à une sorte de version filmée d’un dépliant             vu la Vierge à San Sebastian de Garabandal. Cinq ans
touristique gentiment catéchisant. Jolis plans au drone                     plus tôt. Le 18 juin 1961, Conchita et ses amies tombent
(le souffle divin ?), ralentis à gogo (pour bien souligner l’état           en extase. Elles affirment ensuite au village avoir vu
de ravissement des quatre jeunes filles), autant d’effets                   un ange. Beaucoup sont sceptiques. Un autre jour,
de réalisation aussi naïfs qu’inefficaces pour signifier                    les quatre filles tombent à nouveau en extase devant tout
la céleste présence. Les acteurs font ce qu’ils peuvent,                    le village. L’évêque mandate une commission pour enquêter.
                                                                            Le docteur Morales, psychiatre de la commission, parle
n’ayant pas grand-chose à jouer en réalité. On écoute à
                                                                            de schizophrénie. Les extases se poursuivent. Les quatre
peine les dialogues, fonctionnels, sans aspérités, sans                     filles parlent à la Vierge. Des faits inexplicables viennent
sève ni ambition expressive. Seul le docteur Morales,                       renforcer la foi des villageois et des visiteurs. Mais le rapport
psychiatre sceptique à la trogne goguenarde, parvient                       de Morales à l’évêque nie tout phénomène surnaturel.
à tirer quelque peu son épingle du jeu. Si la mise en scène,                SUITE... Les filles annoncent un message de la Vierge
flirtant dangereusement avec le niais, ne fait pas - on l’aura              engageant les Hommes à changer sous peine de châtiment.
compris - d’étincelles, la part du lion revient au scénario.                Un jour, pour complaire à la foule, les quatre filles simulent
Mal fichu de bout en bout, il échoue à tous les étages. On                  une extase, ce que certains remarquent. Un autre jour,
ne connaît pas les quatre héroïnes, elles ne sont là que                    un miracle a lieu : une hostie se matérialise sur la langue
pour s’extasier. On ne ressent pas non plus la vie du                       de Conchita. Mais un prêtre ment à la commission et parle
village, les messes, l’école, le marché, etc. Résultat, on                  de supercherie. L’évêque fait lire au village une déclaration
                                                                            niant les apparitions. Lors d’une autre extase, la Vierge
se fiche pas mal de ce qui peut arriver à ce petit monde.
                                                                            donne un nouveau message accusant certains prêtres et
D’autre part, certains éléments demeurent vagues voire                      évêques d’aller sur le chemin de la perdition. 1966. L’évêque
incompréhensibles. Un bien beau ratage, donc, aussi inspiré                 rend visite à Conchita et exige la vérité. 1983 : Morales
et inspirant qu’un presse-papier made in China acheté à                     reconnaît publiquement que son rapport était insuffisant
Lourdes. _G.R.                                                              et demande qu’on rouvre le dossier.

                        Visa d’exploitation : en cours. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 25 copies (vo).

                                                                     4                                               © les Fiches du Cinéma 2019
Jojo Rabbit de Taika Waititi - n 2189 - Les Fiches du Cinéma
Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part
de Arnaud Viard

Une fratrie, quatre destins, des vies accomplies ou                                                                                     CHRONIQUE FAMILIALE
                                                                                                                                          Adultes / Adolescents
non... Arnaud Viard fait son troisième film, un récit
choral habilement construit à partir des nouvelles                                              u GÉNÉRIQUE
d’Anna Gavalda, avec une belle brochette d’acteurs.                                             Avec : Jean-Paul Rouve (Jean-Pierre), Alice Taglioni (Juliette),
Le résultat est trop convenu et visuellement banal.                                             Benjamin Lavernhe (Mathieu), Camille Rowe (Margaux), Elsa
                                                                                                Zylberstein (Héléna), Aurore Clément (Aurore), Sarah Adler
                                                                                                (Nathalie), Christophe Paou (Thierry), Elsa Damour-Cazebonne
                                                                                                (Charlotte).
                                                                                                Scénario : Arnaud Viard, Vincent Dietschy, Emmanuel Courcol
                                                                                                et Thomas Lilti D’après : le recueil de nouvelles d’Anna Gavalda
                                                                                                (1999) Images : Emmanuel Soyer Montage : Véronique Bruque
                                                                                                1re assistante réal. : Sophie Davin Musique : Clément Ducol Son :
                                                                                                Mathieu Villien, Agnès Ravez et Niels Barletta Décors : Sébastien
                                                                                                Gondek Costumes : Caroline Spieth Maquillage : Tina Rovère
                                                                                                Production : Easy Tiger Coproduction : UGC Images, France 2
                                                                                                Cinéma et Les 1001 Marches Producteur : Marc-Benoît Créancier
                                                                                                Dir. de production : Antoine Théron Distributeur : UGC.

  © Céline Nieszawzer / Easy Tiger - UGC Images - France 2 Cinéma - Les Milles et Une Marches

     H        Arnaud Viard avait réalisé en 2004 Clara et moi,
une petite comédie romantique douce-amère avec Julie
Gayet en séropositive. En 2015, le bien nommé Arnaud fait
son deuxième film était une autofiction et, à ce jour,                                                           89 minutes. France, 2019
ce qu’Arnaud Viard a fait de mieux. Aujourd’hui, il passe                                                      Sortie France : 22 janvier 2020
au film choral et garde la veine naturaliste du premier
                                                                                                u RÉSUMÉ
film (cette fois, c’est Elsa Zylberstein qui est malade),
                                                                                                Aurore, veuve, fête ses 70 ans avec ses quatre enfants.
tout en développant la réflexivité du deuxième film,                                            Jean-Pierre, commercial de 48 ans (avec sa femme Nathalie
en moins comique. Dans ce vieux projet plus ambitieux, avec                                     et sa fille Charlotte), se sent investi du rôle de chef de
un casting plus fourni, il s’essaie à l’adaptation littéraire.                                  famille et n’hésite pas à prêter des milliers d’euros à sa
Il crée une fratrie à partir des personnages du recueil                                         jeune sœur Margaux, qui veut devenir photographe. Prof
éponyme d’Anna Gavalda, n’ajoutant que leur mère,                                               de français, Juliette, 40 ans, vit avec Thierry. Le plus jeune,
néanmoins nécessaire pour lier la famille et la rendre                                          Mathieu, timide et complexé, rêve de sortir avec sa collègue
crédible. Les quatre enfants d’Aurore Clément sont assez                                        Sarah Briot. Atteinte d’une leucémie, la comédienne Héléna
                                                                                                Litowski, amour de jeunesse de Jean-Pierre, l’appelle. Ils se
différents les uns des autres (et âgés de 30 à 48 ans !)
                                                                                                voient et s’embrassent. Juliette annonce qu’elle est enceinte
mais ont en commun des rêves qui ne sont pas forcément                                          au repas de Noël, pendant lequel Jean-Pierre, dépressif, a
aisés à accomplir. Jean-Paul avait des penchants pour                                           des mots contre la radicalité artistique de Margaux. Nathalie
le théâtre, Juliette pour la littérature, Margaux pour                                          lui reproche d’être trop généreux avec sa sœur.
la photographie, Mathieu, plus secret, a juste un penchant                                      SUITE... Sarah s’invite chez Mathieu. Ils font l’amour.
pour Sarah... Ce troisième film semble plus calibré,                                            Quand, à cinq mois, le fœtus meurt, Thierry quitte Juliette,
le récit plus convenu, sans doute parce que les personnages,                                    soutenue par Jean-Pierre qui la pousse à écrire. En arrivant
dessinés au cordeau, sont proches de la caricature,                                             à l’hôtel pour un salon du vin, Jean-Pierre croise Margaux,
respectivement comme commercial, artiste ou enseignant.                                         en reportage, qui le snobe. Regrettant d’avoir abandonné
Cela provoque des numéros d’acteurs, un travers fréquent                                        le théâtre, il laisse une lettre et saute du septième étage.
du film choral. Jean-Paul Rouve fait figure de personnage                                       La fratrie est chamboulée par son suicide. Juliette rend
                                                                                                visite à Héléna qui lui révèle qu’ils s’étaient quittés suite à
principal alors qu’il disparaît aux deux tiers du film,
                                                                                                un avortement. Mathieu présente Sarah à Aurore. Margaux
après avoir réalisé qu’il était passé à côté de sa vie.                                         ne vend pas ses photos et devient vendeuse à la FNAC.
Le sujet principal, thème rebattu, reste cependant                                              La phrase écrite par Jean-Pierre à l’hôtel devient le titre
la solidarité familiale qui transparaît derrière les disparités et                              du livre de Juliette : Je voudrais que quelqu’un m’attende
les antagonismes... _M.B.                                                                       quelque part.

                                    Visa d’exploitation : 127322. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 300 copies.

                                                                                           5                                             © les Fiches du Cinéma 2019
Jojo Rabbit de Taika Waititi - n 2189 - Les Fiches du Cinéma
Luciérnagas (Luciérnagas)
de Bani Khoshnoudi

Coincé au Mexique malgré lui, un jeune Iranien                                                                                 CHRONIQUE
                                                                                                                      Adultes / Adolescents
homosexuel tisse de nouveaux liens d’amitié... Si la mise
en scène de Khoshnoudi ne manque pas d’élégance,                            u GÉNÉRIQUE
ce récit d’errance se montre tantôt trop abstrait, tantôt                   Avec : Arash Marandi (Ramin), Flor Eduardo Gurrola (Leti), Luis
trop systématique, pour réellement ébranler.                                Alberti (Guillermo), Eligio Meléndez (Jorge), Eduardo Mendizábal
                                                                            (Ernesto), Uriel Ledesma (Cuyo), Ishebel Mata (Rosi).
                                                                            Scénario : Bani Khoshnoudi Images : Benjamín Echazarreta
                                                                            Montage : Gilberto González Penilla et Miguel Schverdfinger
                                                                            1er assistant réal. : Julio Quezada Orozco Scripte : Efraín Conde
                                                                            Ortiz Son : Javier Umpierrez Décors : Florent Vitse Costumes :
                                                                            José Guadalupe López et Bertha Romero Dir. artistique :
                                                                            Florent Vitse Maquillage : Beatriz Vera Production : Zensky
                                                                            Cine Production associée : KinoElektron Coproduction : Pensée
                                                                            Sauvage Films, Foprocine, Haos Film et Aurora Dominicana
                                                                            Producteurs : Bani Khoshnoudi et Elsa Reyes Coproducteurs :
                                                                            Athina Rachel Tsangari, Laura Amelia Guzmán et Israel Cárdenas
                                                                            Productrice associée : Janja Kralj Dir. de production : Rodrigo
                                                                            Milanesi Distributeur : Optimale Distribution.

                                                          © Zensky Cine

    HH        Second long métrage de la plasticienne et
réalisatrice Bani Khoshnoudi, Luciérnagas fait s’entrechoquer
les destins de trois âmes errantes. Fuyant un pays où
la communauté LGBT+ est persécutée et torturée, Ramin                         88 minutes. Mexique - États-Unis - Grèce - République
(Arash Marandi) connaît un exil malheureux. Un concours de                      dominicaine, 2018. Sortie France : 22 janvier 2020
circonstances le mène en effet à Veracruz, où il rencontre Leti
                                                                            u RÉSUMÉ
(Edwarda Gurrola), une tenancière d’hôtel bientôt confrontée
                                                                            À Veracruz, Ramin travaille clandestinement. La nuit, il
au retour d’un compagnon égoïste. Enchaînant les contrats                   rencontre un passeur qui refuse de l’aider, faute d’argent.
précaires, le jeune Iranien se rapproche également de                       Marin récupère alors sa chambre auprès de Leti,
Guillermo (Luis Alberti), un dur à cuir fuyant son violent                  la tenancière de son hôtel. Le lendemain, Ramin discute
passé. Tiraillé entre l’idée du retour et les perspectives                  avec son petit ami, resté en Iran, via Internet. Dans le cadre
d’une terre plus heureuse, le migrant se tourne peu à peu                   d’un travail clandestin, il rencontre Guillermo, un évadé des
vers des lieux de rencontre gay, un des rares espaces à                     gangs du Salvador aspirant à vivre à Los Angeles. À l’hôtel,
transcender la barrière de la langue... Formellement,                       Leti s’occupe de son oncle. Ce dernier lui annonce le retour
                                                                            de son ancien compagnon, Ernesto. La nouvelle la trouble.
Khoshnoudi signe des plans intérieurs et nocturnes
d’un raffinement certain. Décrite comme une prison à ciel ouvert,           SUITE... Un matin, Leti accepte de donner des cours d’espagnol
la ville de Veracruz n’en restera pourtant pas moins une toile              à Ramin. Plus tard, Guillermo et Ramin vont à la plage.
                                                                            Remarquant les cicatrices de Ramin, Guillermo exhibe ses
de fond abstraite. Il en sera de même de quelques autres
                                                                            blessures de guerre. Au repas organisé pour le retour d’Ernesto,
réalités sociales - à commencer par l’évocation du travail                  Leti est envahie par l’émotion et finit par rentrer. Au travail,
clandestin, ici à peine esquissée. Davantage focalisée sur ses              Ramin confie à Guillermo vouloir rejoindre la Turquie ou
personnages, Khoshnoudi délaisse son cadre réaliste pour                    la Grèce. Le soir, Ramin, Leti et Guillermo sortent en boîte
dresser des portraits inégaux. Si la sensibilité de Ramin et                de nuit. Sur le retour, Ramin se rend sur un lieu de rencontre
le courage de Leti touchent, le refoulement et la masculinité               gay. Au matin, la culpabilité le ronge. Ernesto annonce son
toxique de Guillermo restent trop théoriques pour sortir des                nouveau départ à Leti, qui se montre indifférente. Guillermo
carcans et des clichés. Entre mélancolie et atermoiement,                   annonce aussi son départ à Ramin. Triste et saoul, celui-ci
                                                                            tente de l’embrasser. Refoulant ses désirs, Guillermo frappe
universalité et intimité, le rendez-vous entre la mise en scène
                                                                            Ramin. Plus tard, ivre, il retrouve Ramin dans sa chambre
et l’émotion est alors parfois manqué. Une sensation que                    d’hôtel. Il l’embrasse avant de redevenir violent. Ramin
vient renforcer une fin bien trop abrupte pour délivrer son                 chasse Guillermo. Les jours suivants, Ramin et Leti passent
message - selon lequel le hasard peut être le fruit d’un foyer              du temps ensemble. Au carnaval de Veracruz, les deux amis
inattendu, imparfait mais in fine tangible. _S.H.                           s’amusent et flirtent avec des hommes.

                         Visa d’exploitation : 152318. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. X copies (vo).

                                                                     6                                               © les Fiches du Cinéma 2019
Jojo Rabbit de Taika Waititi - n 2189 - Les Fiches du Cinéma
La Bataille géante de boules de neige 2 L’Incroyable course de luge
de Benoît Godbout                                                                                         (La Course des Tuques)

L’animation québécoise est de retour avec                                                                                           COMÉDIE
                                                                                                                                      Famille
les aventures de gamins qui s’affrontent sur la piste
de luge. Les petits y trouveront leur compte, mais                         u GÉNÉRIQUE
passé 12 ans, on a du mal à vraiment s’intéresser                          Avec les voix originales de : Hélène Bourgeois Leclerc (François-
à ce fantasme d’un monde dédié à l’amusement.                              les-Lunettes), Mehdi Bousaidan (Zac), Gildor Roy (Chabot),
                                                                           Ludivine Reding (Charlie), Mariloup Wolfe (Sophie), Sophie Cadieux
                                                                           (Lucie), Catherine Trudeau (Jacques), Anne Casabonne (Maranda),
                                                                           Sébastien Reding (Pierre), Nicholas Savard-L’Herbier (Luc), Aline
                                                                           Pinsonneault (France), Hugolin Chevrette-Landesque (Ti-Guy
                                                                           la lune), Gabriel Lessard (Henri / Georges), Esther Poulin (Daniel
                                                                           Blanchette), Marguerite D’amour (Violet).
                                                                           Et les voix françaises de : Céline Ronté, Thomas Sagols, Hervé
                                                                           Grull, Joan Predeo, Marie-Claude Facundo, Emmylou Homs,
                                                                           Clara Soares, Sauvane Delanoë.
                                                                           Coréal. : François Brisson Scénario : Paul Risacher et Claude &
                                                                           Maxime Landry D’après : le film La Bataille géante de boules de
                                                                           neige de Jean-François Pouliot (2015) Images : Jean-François
                                                                           Pouliot Animation : Jim Van der Keyl et Yann Tremblay Musique :
                                                                           Blü Dog Media, Dumas et Martin Roy Chansons : Garou, Corneille,
                                                                           Alex Nevsky, Dumas, Alexe, Ludovick Bourgeois, Kim Richardson,
                                                  © CarpeDiem Film & TV    Lulu Hughes et Joshua Moreno Son : Christian Rivest Production :
                                                                           CarpeDiem Film & TV Productrice : Marie-Claude Beauchamp
                                                                           Productrice déléguée : Sophie Roy Producteur exécutif : Patrick
    HH       L’hiver, c’est la saison de la raclette, du vin
                                                                           Roy Distributeur : Alba Films.
chaud, des chocolats et des films pour enfants. Trois
ans après le premier épisode, revoilà la bande de gosses
de La Bataille géante de boules de neige qui, cette fois,                                   89 minutes. Canada, 2018
ont décidé d’organiser une grande compétition de luge.                                    Sortie France : 29 janvier 2020
Les plus motivés ? François les lunettes et un nouveau
                                                                           u RÉSUMÉ
au village, Zac, deux graines d’inventeur. Le premier est
                                                                           Pierre retrouve tous ses camarades dans la vieille grange
assisté de toute une équipe, le deuxième de sa jolie cousine,              qui leur sert de QG. Tandis que les autres s’amusent,
Charlie. La rivalité entre les deux héros va donner lieu                   François les lunettes met au point une nouvelle luge dont il
à de nombreuses péripéties qui devraient ravir les plus                    est persuadé qu’elle remportera la course qui doit l’opposer
petits. Un scénario très simple qui aborde des questions                   le lendemain à Zac, le nouveau. Mais ce dernier a un plan
qui les intéressent : la rivalité, l’amitié, le mensonge,                  maléfique pour gagner.
le pardon, la solidarité... Le tout sans grand génie non plus.             SUITE... Le lendemain, tous s’affrontent en duo. Pierre
Aux manettes de cette nouvelle aventure dans le Grand Nord,                trouve un chiot. François fait concourir Sophie contre
le même duo de réalisateurs québécois, Benoît Godbout                      Charlie, la cousine de Zac. La luge de François se casse,
et François Brisson, et une même attention à proposer                      Sophie et lui perdent la course. François est furieux.
une animation originale riche de leur soin apporté aux                     Il découvre qu’un boulon a été remplacé par un sucre
                                                                           d’orge. Charlie commence à sympathiser avec les enfants
différentes textures, bonnets de laine, poudreuse, plaques
                                                                           du village grâce à un tour de chant. Le soir, François et
de métal... Les enfants devraient apprécier cet étonnant                   ses amies épient Zac et le confondent. Zac admet
village sans adultes où les personnages n’ont d’autre limite               la triche, et propose une revanche. François et ses amis
que leur imagination. La piste de luge ressemble à un manège               commencent à construire une nouvelle piste de luge. Zac
infernal, et s’ils décident de tous passer la nuit dans                    découvre la grange et François, décidé à gagner, accepte
une vieille grange, il n’y a personne pour les en empêcher :               de la mettre en jeu. Pierre découvre que le chiot appartient
le rêve ! Les parents, de leur côté, risquent de s’ennuyer                 à Zac, qui ne s’en occupe pas. Charlie confie le chiot
un peu. L’intrigue est très simple, souvent improbable                     à Pierre. Zac demande à Charlie d’espionner pour lui,
                                                                           mais elle fait semblant. Ses amis, furieux que François ait
(personne ne semble s’étonner que François n’ait rien parié
                                                                           parié la grange, reviennent l’aider. Charlie est démasquée.
en échange de la grange...), et manque d’émotion. Et puis,                 Sophie et François gagnent la course grâce à Charlie.
les deux petits chefs, libérés des sermons parentaux, ont                  Tous se réconcilient, Pierre rend le chien à Zac, content,
tendance à se montrer très agressifs, ce qui est un peu                    à qui François propose d’installer son propre atelier dans
fatigant. _M.Q.                                                            la grange. Ils font la fête.

                      Visa d’exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 250 copies (vf).

                                                                     7                                               © les Fiches du Cinéma 2019
Jojo Rabbit de Taika Waititi - n 2189 - Les Fiches du Cinéma
La Beauté des choses (Lust och fägring stor)
de Bo Widerberg

Le dernier film de Bo Widerberg, réédité aujourd’hui,                                                                CHRONIQUE INITIATIQUE
                                                                                                                        Adultes / Adolescents
fait la chronique d’un amour entre un adolescent
et sa professeure dans la Suède de 1943. S’y dessine                        u GÉNÉRIQUE
en creux toute une société en perte de repères                              Avec : Johan Widerberg (Stig), Marika Lagercrantz (Viola), Tomas
et de valeur. Le bel épilogue d’un grand cinéaste.                          von Brömssen (Kjell), Karin Huldt (Lisbet), Nina Gunke (la mère
                                                                            de Stig), Björn Kjellman (Sigge), Kenneth Milldoff (le père de Stig),
                                                                            Frida Lindholm (Olga), Sigge Cederlund (le projectionniste), Monica
                                                                            Stenbeck (la professeure de gym), George Bisset, Gösta Ekstrand,
                                                                            Hilda Suovanen, Per Olov Börjeson, Jörgen Svensson, Nynne
                                                                            Schwartz, Magnus Andersson, Paul Lindsjö, Mikael Bengtsson,
                                                                            Fredrik Berglind-Delin, Peter Larsdotter, Zacharias Bjar, Martin
                                                                            Olsen, Christian Candia, Fredrik Persson, Gustav Eriksson, Toni
                                                                            Popovski, Linus Ericsson, Jonas Pålsson, Hampus Hedberg
                                                                            Hankell, Thomas Rosqvist, Linus Hedberg Lindqvist, Jossi Sabbah,
                                                                            Linus Juhlin, Björn Sjöblom, John Larsson, Mattias Varén, Daniel
                                                                            Lindblad, Pekka Öhrstedt.
                                                                            Scénario : Bo Widerberg Images : Morten Bruus Montage :
                                                                            Bo Widerberg 1er assistant réal. : Jimmy Karlsson Scripte :
                                                                            Anna Idman Son : Owe Svensson Décors : Palle Arestrup
                                                                            Costumes : Renette Bengtsson, Åsa Broms, Lotta Petersson,
                                                             © Malavida     Birthe Qualmann et Nicklas Östergren Maquillage : Elisabeth
                                                                            Bukkehave, Sanne Dandanell et Eva Von Bahr Production :
                                                                            Per Holst Filmproduktion Production associée : Det Danske
   HHH        Le film pourrait n’être que cela : la chronique
                                                                            Filminstitut, Nordisk Film, SFI, Egmont Film, TV2 Danmark et SVT
d’un amour entre un adolescent, Stig, et sa professeure
                                                                            Drama Producteur : Per Holst Distributeur : Malavida.
de collège, Viola. À l’image du carton d’ouverture,
un texte se cantonnant à une description des manifestations                             130 minutes. Danemark - Suède, 1995
physiologiques pour décrire l’éveil à la sexualité de                                       Sortie France : 29 janvier 2020
l’être humain, l’amour et le film sont bien plus que cela.
                                                                            u RÉSUMÉ
Si Viola, en le déniaisant, a fait de Stig, interprété par le fils
                                                                            Malmö, en Suède, 1943. Stig est un adolescent qui, comme ses
du réalisateur, un homme, elle lui a surtout permis                         camarades de classe, est fortement travaillé par la question
de devenir adulte, ce qui semble plutôt rare, en Suède,                     sexuelle. Il ne laisse pas indifférent sa belle professeure
en 1943. Des adultes, Stig en croise peu. Ses parents                       d’anglais, Viola, avec qui il entame une liaison amoureuse
sont anodins, des êtres coutumiers et asexués, son frère                    clandestine. Le mari de Viola, Frank, est un représentant de
est absent, le mari de Viola s’aveugle dans l’alcool, et                    commerce féru de musique classique. Il accepte la présence
le monde est en guerre. Son émancipation naîtra des choix                   régulière du jeune homme, et développe avec lui une étrange
que son environnement, son époque, l’astreignent à faire.                   amitié en l’initiant à sa passion mélomane. Le grand frère
                                                                            de Stig, marin, passe de temps en temps au domicile, ou
Il apprend à prendre en charge ses parents, à rompre
                                                                            au cinéma dans lequel travaille Stig comme ouvreur, avant
une relation sans issue, et tente de transcender sa vie                     d’être incorporé dans un sous-marin militaire. Frank, qui
par la culture. La Beauté des choses est le dernier film,                   a tendance à fortement s’alcooliser, découvre la liaison
réalisé en 1995, de Bo Widerberg, cinéaste proche, dans                     qu’entretient Stig avec sa femme. Il ne s’en formalise pas, et
sa thématique et son esthétique, de la Nouvelle Vague                       partage avec lui ses états d’âme de vendeur de bas de laine,
française. D’une teneur sans doute autobiographique,                        au moment de l’irruption du bas nylon. Les manœuvres
l’histoire nous est contée avec délicatesse, sans impudeur                  de séduction des jeunes filles de son âge indiffèrent Stig,
                                                                            jusqu’à ce que son histoire avec Viola prenne un tour
ni pudibonderie et dans une belle atmosphère érotique.
                                                                            possessif. Le garçon tente de s’en détacher en couchant
Les jeux du désir, le plaisir excitant de la transgression,                 avec une de ses camarades.
quand on est avec les deux amants, sont parfaitement
évoqués, d’une frontalité honnête. De même que la bêtise                    SUITE... Viola menace de le renvoyer s’il la quitte, en invoquant
                                                                            ses nombreuses absences en cours. C’est la guerre entre
et la douleur, quand il s’agit de Frank, le mari trompé,
                                                                            les deux amants. Viola hésite entre agression et séduction. Par
sont pointées comme ça, à bonne distance, mais sans                         un télégramme, Stig apprend que son frère est mort dans
complaisance. La mise en scène s’interdit toute esbroufe,                   le naufrage du sous-marin. Il cache un temps la nouvelle à ses
s’appuyant sur un scénario à la construction parfaite.                      parents pour les protéger. Émancipé, Stig quitte le collège
Une belle dernière œuvre. _J.C.                                             non sans avoir dérobé les précieux dictionnaires de Viola.

                         Visa d’exploitation : en cours. Format : 1,66 - Couleur - Son : Dolby SR. 25 copies (vo).

                                                                     8                                                  © les Fiches du Cinéma 2019
Jojo Rabbit de Taika Waititi - n 2189 - Les Fiches du Cinéma
Botero (Botero)
de Don Millar

Consacré au peintre et sculpteur Botero, ce documentaire                                                                  DOCUMENTAIRE
                                                                                                                      Adultes / Adolescents
passe plus de temps à nous persuader de sa grandeur qu’à
nous conduire à la penser par nous-mêmes ; cette                            u GÉNÉRIQUE
admiration inhabitée en vient à décrédibiliser                              Scénario : Don Millar et Hart Snider Images : Johan Legraie et
les éloges sincères portés par les proches de l’artiste.                    Joe Tucker Montage : Hart Snider Musique : David Bertok Son :
                                                                            Juan Camilo Martínez, Jake Bolles, Manuela Patti, Turner Curran,
                                                                            Gaëtan Choozko, Juan Pablo Silva, Simone N. Valente et Jean
                                                                            Pourchier Décors : Don Millar Production : Hogan Millar Media
                                                                            Producteurs : Joe Tucker et Eric Hogan Producteurs exécutifs :
                                                                            Don Millar, Lina Botero, Kerri Borsuk, Jan Rofekamp, Kissy
                                                                            Dugan, J. Joly, Betsy Stahl et Stephen Nemeth Producteurs
                                                                            associés : Bryn Choppik et Cole Northey Distributeur : Dean
                                                                            Medias.

                                                    © Hogan Millar Media

                                                                                             82 minutes. Canada, 2018
     m        “C’est l’artiste vivant qui a le plus d’expositions                          Sortie France : 29 janvier 2020
à son actif. C’est l’artiste vivant qui compte le plus de livres
à son sujet. C’est aussi l’artiste vivant le plus connu à                   procurent uniquement du plaisir (et qui seraient donc
l’international et qui attire le plus de visiteurs lors de ses              moins légitimes), préférant les œuvres sibyllines
expositions”. Prononcées à l’ouverture de ce documentaire                   et politiques (alors que Botero a lui-même peint
dédié à Fernando Botero, ces trois phrases préludent                        des œuvres à vocation critique, telles ces peintures
non seulement une expansive prédilection pour                               satiriques sur l’Église, ou encore sa série sur
les superlatifs, mais condensent à elles seules son                         le scandale d’Abu Ghraib) pour pouvoir “jaser”,
projet, lequel consistera non pas à nous instruire, mais                    trahissant en réalité un “snobisme intellectuel”
à nous marteler l’idée selon laquelle l’artiste colombien                   Voilà qui est dit, égrenant au passage une définition
est et restera - ses thuriféraires bénéficient manifestement                relativement dichotomique de l’art. Le problème n’est
de dons divinatoires - l’un des plus importants de l’histoire               pas tant le contenu de ces propos que le discours
de l’art pictural et sculptural (et gare à ceux qui oseraient               profondément malaisant opéré par le montage,
dire le contraire) : mais si la certitude de sa majesté                     les images étant juxtaposées de manière à illustrer
est aussi indiscutable, à quoi bon déployer autant d’efforts                des présupposés qui se suffiraient à eux-mêmes ;
pour nous en persuader coûte que coûte ? Laissons de                        de fait, si le documentaire semble d’abord soucieux
côté cette interrogation et précisons d’emblée qu’il ne                     d’une certaine chronologie (l’initiation de Botero à
s’agit en aucun cas de dénigrer, ni la valeur, ni la qualité                la peinture, son départ pour l’Europe où il étudia
de l’œuvre du peintre - dont la prodigalité est par ailleurs                les peintres du Quattrocento, la découverte de son style
considérable - mais de questionner, outre ses intentions                    avec son tableau Nature morte à la mandoline...),
équivoques, la construction hasardeuse de ce documentaire                   les informations et les illustrations hagiographiques
qui s’applique uniquement à démontrer une valeur                            finissent par se succéder à une telle vitesse qu’elles
artistique par le prisme d’un  succès à l’international (à                  en deviennent décontextualisées, et le tout est
renfort de sophismes tels que “l’art doit être universel”)                  tartiné d’un arrière-fond musical aux intonations
qui, de facto, rendrait toute critique irrecevable. À cet égard,            tantôt héroïques, tantôt larmoyantes. On ne peut
la seule intervenante émettant un jugement péjoratif sur son                alors raisonnablement admettre que ses auteurs
œuvre voit sa sensibilité immédiatement débinée par                         éprouvent une passion véritable pour Botero - ou tout
l’entretien suivant, dans lequel un directeur de galerie                    du moins ont-ils failli à nous la transmettre - car nous
estime que les détracteurs de Botero font partie de                         n’avons pas, au bout du compte, le sentiment de mieux
ces vilains critiques aimant à rejeter les peintures qui                    connaître l’homme et son œuvre. _V.V.

                         Visa d’exploitation : 152311. Format : 1,77 - Couleur - Son : Dolby SRD. 15 copies (vo).

                                                                      9                                             © les Fiches du Cinéma 2019
Jojo Rabbit de Taika Waititi - n 2189 - Les Fiches du Cinéma
Cuban Network [Wasp Network]
de Olivier Assayas

L’histoire vraie des “Cuban Five”, installés à Miami                                                                          ESPIONNAGE
                                                                                                                       Adultes / Adolescents
dans les années 1990 pour infiltrer les groupuscules
anticastristes. Si la matière d’une épopée haletante est                    u GÉNÉRIQUE
là, le récit s’étire et se complexifie et les personnages                   Avec : Penélope Cruz (Olga Salanueva), Édgar Ramírez (René
ne s’incarnent que trop rarement. Dommage...                                González), Gael García Bernal (Manuel Viramontez), Wagner Moura
                                                                            (Juan Pablo Roque), Ana de Armas (Ana Margarita Martinez),
                                                                            Leonardo Sbaraglia (Jose Basulto), Nolan Guerra Fernandez (Raul
                                                                            Ernesto Cruz Leon), Osdeymi Pastrana Miranda (Irma), Tony Plana
                                                                            (Luis Posada Carriles), Steve Howard (le colonel Holmes), Stephen
                                                                            W. Tenner (Mack McLarty), Gisela Chipe (Maria Elvira Salazar),
                                                                            Patricia Gonzalez Ciuffardi (Lucia Newman), Adria Carey Perez.
                                                                            Scénario : Olivier Assayas D’après : le roman Os Últimos soldados
                                                                            da guerra fria de Fernando Morais (2011) Images : Yorick Le Saux
                                                                            et Denis Lenoir Montage : Simon Jacquet 1ers assistants réal. :
                                                                            Luc Bricault et Matthew Gledhill Scripte : Christelle Meaux
                                                                            Musique : Eduardo Cruz Son : Nicolas Cantin Décors : François-
                                                                            Renaud Labarthe Costumes : Jurgen Doëring et Samantha
                                                                            Chijona Garcia Dir. artistique : Romain Gautry et Onelio Larralde
                                                                            Maquillage : Thi Than Tu Nguyen Casting : Antoinette Boulat,
                                                                            Maria Mercedes Hernandez Lazaro, Valerie Hernandez et Anna
                                                        © Memento Films     Gonzalez Production : RT Features, CG Cinéma et Nostromo
                                                                            Pictures Coproduction : Wasp Network AIE, Scope Pictures,
                                                                            France 2 Cinéma, Orange Studio et Memento Films Producteurs :
     H        Après la réussite de sa mini-série Carlos
                                                                            Rodrigo Teixeira, Charles Gillibert et Lourenço Sant’Anna
en 2010, Assayas renoue avec une épopée sud-américaine
                                                                            Distributeur : Memento Films.
complexe et passionnante et son (excellent) acteur
Édgar Ramírez . Sur le papier, c’est une bonne nouvelle.                     125 minutes. France - Brésil - Espagne - Belgique, 2019
D’autant que pour cette histoire chorale (et vraie), celle                               Sortie France : 29 janvier 2020
des “Cuban Five”, chargés de démanteler sur le sol
                                                                            u RÉSUMÉ
américain les groupuscules anticastristes, il convoque
                                                                            Décembre 1990, René Gonzales détourne un avion de
un beau casting, avec aussi Penélope Cruz, Gael García Bernal               fumigation et atterrit en Floride. Il laisse à Cuba son
et Wagner Moura (Pablo Escobar dans la série Narcos).                       épouse Olga et sa fille, terrassées par la nouvelle de
En adaptant le livre de Fernando Morais, Les Derniers                       sa dissidence. Peu à peu sa vie s’organise : il travaille
soldats de la Guerre Froide, le scénariste et réalisateur                   pour différents organismes anticastristes cachant des
tente d’éclaircir une intrigue complexe tissée de fausses                   activités de terrorisme et de vente de drogue. En 1992,
trahisons et de vrais mensonges. Faisant de René Gonzales                   Juan Pablo Roque arrive à la nage de Cuba et demande
(Ramirez) son fil rouge, il le suit pendant plus d’une heure                l’asile politique. Installé à Miami, ce pilote tombe amoureux
                                                                            de Ana Margarita Martinez, qu’il épouse. Très vite choisi
et ne parvient qu’à distendre son film sans convaincre.
                                                                            (en secret) comme agent double par le FBI, il mène si grand
D’autant que les autres personnages sont traités à la va-                   train que sa femme s’interroge sur ses activités. Trop tard :
vite, leur sort résolu par des cartons finaux, et que l’on                  il a regagné Cuba.
s’y perd. Malgré leur talent, Bernal et Moura ne parviennent
                                                                            SUITE... Quatre ans plus tôt. Gerardo Hernandez devient
qu’épisodiquement à donner chair à ces êtres impossibles                    chef du Wasp Network, nid d’espions luttant sur le sol
à appréhender, les raisons de leur engagement restant                       américain pour infiltrer les groupuscules anticastristes.
constamment opaques. On jurerait, devant ce résultat                        En réalité, René comme Juan Pablo et quelques autres, ont
plus que mitigé, que l’ambition de faire une mini-série                     été recrutés par lui. Mais ils ne parviennent pas à déjouer
de six heures ou plus a été révisée à la baisse (et à                       les attentats à la bombe fomentés contre plusieurs grands
123 minutes). Malgré des plans aériens à couper le souffle                  hôtels, à la Havane, en 1997. Olga, ayant décidé de rejoindre
et des décors naturels saisissants, le film peine à trouver                 son mari avec sa fille, est avertie par Gerardo Hernandez
                                                                            du fait que René n’est pas un traître au régime castriste.
son rythme et sa voie, entre drame intime (René, sa femme,
                                                                            Mais, surveillé par la CIA, leur appartement est truffé de
sa fille) et enjeux politiques (confus, de surcroît), entre                 micros. En 1998, René, Gerardo et trois autres compagnons
séquence bouleversante dans les traces du poseur de                         sont arrêtés pour terrorisme, espionnage et autres délits.
bombes semant la mort sans chaque hôtel, et scènes                          Ils seront libérés au milieu des années 2010, après de
explicatives convenues. _I.D.                                               lourdes peines d’emprisonnement.

         Visa d’exploitation : 150676. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 200 copies (vo [espagnole / anglaise / russe]).

                                                                    10                                                © les Fiches du Cinéma 2019
L’Esprit de famille
de Éric Besnard

Le réalisateur de Mes héros et Le Goût des merveilles                                                                   COMÉDIE DRAMATIQUE
                                                                                                                          Adultes / Adolescents
revient avec un long métrage de la même veine
dans laquelle une mère et ses deux fils                                         u GÉNÉRIQUE
réapprennent à communiquer après la mort du père.                               Avec : Guillaume de Tonquédec (Alexandre), François Berléand
Pas mauvais mais sans surprise.                                                 (Jacques), Josiane Balasko (Marguerite), Isabelle Carré (Roxane),
                                                                                Jérémy Lopez (Vincent), Marie-Julie Baup (Sandrine), Jules
                                                                                Gauzelin (Max), Papilonio Tokotuu (Napoléon), Émilie Caen
                                                                                (la psychanalyste).
                                                                                Scénario : Éric Besnard Images : Jean-Marie Dreujou Montage :
                                                                                Christophe Pinel 1er assistant réal. : Alan Corno Scripte : Anne
                                                                                Wermelinger Musique : Christophe Julien Son : Dominique
                                                                                Lacour, Vincent Montrobert et Jean-Charles Liozu Décors :
                                                                                Bertrand Seitz Costumes : Fabienne Katany Effets spéciaux :
                                                                                Georges Demétrau Maquillage : Anaïs Lavergne Casting :
                                                                                David Bertrand Production : Cine Nomine et Same Player
                                                                                Coproduction : Apollo Films, France 3 Cinéma, Winch Films et
                                                                                Josy Films Producteurs : Vincent Roget, Pierre Forette et Thierry
                                                                                Wong Producteurs associés : Baptiste Deville et Gala Vara Eiriz
                                                                                Dir. de production : Ludovic Naar Distributeur : Apollo Films.

                                © Nathalie Mazéas / Cine Nomine - Same Player

    HH        C’est quasiment devenu une sous-branche
du cinéma à la française : on prend une famille un peu
bourgeoise - il y a en général trois enfants, dont l’un passe
son temps au téléphone, et leurs “pièces rapportées” -,                                          98 minutes. France, 2019
on en rassemble les membres dans une belle maison à                                            Sortie France : 29 janvier 2020
la campagne pour un événement spécial (mariage,
                                                                                u RÉSUMÉ
enterrement, grandes vacances...), on les laisse se
                                                                                Alex, écrivain, se préoccupe peu de sa famille. Quand son
disputer, un lourd secret éclate et tout est bien qui finit bien.               père décède brutalement, puis est incinéré, son fantôme
On remerciera donc Éric Besnard de nous avoir au moins                          hante Alex et converse avec lui. Ses hallucinations
épargné le “lourd secret” dans cette escapade quiberonnaise                     l’empêchent d’écrire et sa femme, Roxane, lassée de son
servie par un casting de valeurs sûres : Josiane Balasko,                       désintérêt, annonce qu’elle va le quitter. Alex part avec son
François Berléand, Isabelle Carré, Guillaume de Tonquédec                       fils Max pour la maison de ses parents, en Bretagne, où il
(dont les personnages n’en finissent plus de fréquenter des                     retrouve sa mère, son frère Vincent, agent de sportifs, et
Roxane), Jérémy Lopez... lesquels se mettent au service                         sa belle-sœur Sandrine.
d’une partition souvent entendue mais pas désagréable,                          SUITE... Le stagiaire de Vincent, Kevin, débarque avec
mélodie douce-amère d’accords et  de désaccords mineurs                         un rugbyman fidjien qui déprime à Clermont-Ferrand et
comme une bonne vieille chanson de Cat Stevens. C’est                           veut rentrer chez lui. La mère annonce qu’elle va vendre
                                                                                la maison à cause de ses dettes. Vincent panique quand
à peu près le message du père : “Regarde-moi, je suis
                                                                                il apprend que sa mère est rentrée volontairement dans
vieux mais je suis heureux”. Avec cette idée que dans une                       un arbre. Alex, que le reste de sa famille accuse d’égoïsme,
société devenue stressante et impitoyable la famille, malgré                    se dispute avec le fantôme de son père, qu’il accuse d’avoir
les ressentiments larvés, les complexes d’infériorité, reste                    été absent. Quand Roxane débarque, il se confie enfin à elle.
le nœud des vraies valeurs, de la bienveillance, de l’écoute,                   Elle lui conseille d’écrire sur sa famille. Alex, qui a décidé
et le seul endroit où on trouvera le bonheur. Comme pour                        d’être plus présent pour Max, entend son frère parler de
d’autres films dans la même veine il faudrait se demander                       ses problèmes personnels avec Napoléon le Fidjien. Tous
si le vrai sujet de cette comédie dramatique au dénouement                      vont pique-niquer sur la plage et jouent au rugby. Alex se
                                                                                réconcilie avec Roxane. La mère disparaît. Tous la cherchent
attendu n’est pas dans ce que justement elle ne montre pas :
                                                                                alors qu’elle est sur la plage pour répandre dans l’océan
un monde extérieur violent qui fait qu’Alex se réfugie dans ses                 les cendres de son mari. Sandrine part avec le Fidjien.
personnages de roman, sa mère dans son lit, que son frère                       Vincent, qui a vendu un joueur, propose de rembourser
affronte les problèmes par téléphone et que le rugbyman                         les dettes. Alex se réconcilie avec son père dont le fantôme
fidjien a le mal du pays. _M.Q.                                                 disparaît, puis il danse nu face au soleil.

                                Visa d’exploitation : 147042. Format : n.c. - Couleur - Son : Dolby SRD.

                                                                          11                                             © les Fiches du Cinéma 2019
Histoire d’un regard À la recherche de Gilles Caron
de Mariana Otero

M. Otero travaille l’œuvre de G. Caron, photojournaliste                                                                     DOCUMENTAIRE
                                                                                                                         Adultes / Adolescents
disparu en 1970, à même son deuil personnel,
s’accaparant d’une façon bouleversante l’essence des                           u GÉNÉRIQUE
photographies pour offrir un développement de soi-                             Scénario : Mariana Otero, avec la collaboration de Jérôme
même - et faire de ces images des ressacs familiaux.                           Tonnerre Images : Hélène Louvart et Karine Aulnette Montage :
                                                                               Agnès Bruckert Musique : Dominique Massa Son : Martin Sadoux
                                                                               Production : Archipel 33 Production associée : Diaphana et MK2
                                                                               Films Producteur : Denis Freyd Dir. de production : Juliette Sol
                                                                               Distributeur : Diaphana.

                                              © Jérôme Prébois / Archipel 33

                                                                                                93 minutes. France, 2019
   HHH        C’est lorsque, dans Histoire d’un regard, Mariana                               Sortie France : 29 janvier 2020
Otero lit une lettre, écrite d’Algérie où il subit la conscription,
du photojournaliste Gilles Caron à sa mère, et alors que                       Otero a perdu un parent très jeune, sa mère, Clotilde
défilent sur l’écran des images de la guerre du Vietnam,                       Vautier, en 1968, dans des circonstances tragiques.
que semble poindre la plus belle substance du film : il n’y a                  La mort de la mère (du père) se caractérise par
jamais juxtaposition de conscience avec une photographie ;                     les traînées de vie qu’elle laisse derrière elle, et infuse
l’œil passe toujours outre, s’invente une vie propre, finit par                le film. L’image absout, mais réactive la perte, comme
s’accaparer la photo, remonte à son essence, et alors, il ne                   lorsque Otero, méticuleusement, recrée la chronologie
reste plus rien qu’un grand flou qui emprunte autant à celui                   de la célèbre photo où Cohn-Bendit toise, en souriant,
qui regarde qu’à celui qui montre. La photo existe seule, on                   un policier, pour en arriver à un tragique finale :
ne lui fait pas dire ce que l’on veut, mais on peut, si l’on fait              cette émulation estudiantine mais aussi populaire,
l’effort, croiser son être dans le sien, le temps d’un regard.                 figée pour l’éternité dans des sourires frondeurs,
C’est ce que veut montrer Otero à travers ce documentaire                      des moues déterminées, cette masse convaincue,
- qui n’a rien de béatement hagiographique - consacré à                        émancipée, n’existe que dans le souvenir ému
Gilles Caron, autodidacte, photojournaliste qui couvrit,                       d’une mère qui n’a pu y prendre part. Alors, pour conjurer
la vingtaine à peine entamée, la Guerre des Six-Jours, celle                   le sort, Otero cherche ailleurs ; elle interviewe des
du Vietnam, le Biafra, Mai-68, les mondanités parisiennes,                     catholiques de Derry, leur montre les photos de Caron, ils
les révoltes catholiques en Irlande du Nord, documentant                       s’y reconnaissent mais semblent émerger d’un mauvais
les conflits les plus éloignés des consciences européennes                     rêve. Alors, Otero cherche aussi la corporéité de
autant que les heurts les plus locaux, les concerts les plus                   l’image, comme dans cette scène extraordinaire où
frivoles. Gilles Caron qui, aussi, disparut soudainement à                     elle reconstruit, à l’aide d’un historien, dans son studio
30 ans, père de deux petites filles, au Cambodge. Et plus                      devenu chambre épiphanique ou plan de Jérusalem,
qu’à une biographie sur celui qui révèle par l’image l’en-deçà                 le trajet matriciel, libérateur et coercitif de la “reprise”
du monde, c’est à un questionnement sur l’avenir spectral                      de la ville Sainte. Alors enfin, après ce bouleversant
d’un homme qui, une fois disparu, n’aura laissé que peu                        trajet, Otero peut s’approcher au plus près des icônes
de représentation de son monde à ses proches, qu’invite le                     laissés par Caron, si près qu’elle n’y voit certainement
film. Ce deuil entravé (comment travailler sur un deuil dont                   plus que des ombres, et fermer les yeux - comme
la composante s’affiche en Une des journaux?), on le comprend                  dans les plus grands documentaires, on en aura plus
vite, s’avère être le matériau de travail de la réalisatrice,                  appris sur cette conscience qui remonte le courant
dans ses échos les plus sourds : comme les filles de Caron,                    pour embrasser son sujet. _C.D.

                                 Visa d’exploitation : 146146. Format : 1,77 - Couleur - Son : Dolby SRD.

                                                                         12                                            © les Fiches du Cinéma 2019
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