L'ALCOOL ET LES TROUBLES NEUROCOGNITIFS - Fadi Massoud MD FRCPC, Gériatre Congrès Québécois sur la Maladie d'Alzheimer - Novembre 2018

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L'ALCOOL ET LES TROUBLES NEUROCOGNITIFS - Fadi Massoud MD FRCPC, Gériatre Congrès Québécois sur la Maladie d'Alzheimer - Novembre 2018
L’ALCOOL ET LES TROUBLES
            NEUROCOGNITIFS

Congrès Québécois sur la Maladie d’Alzheimer – Novembre 2018

          Fadi Massoud MD FRCPC, Gériatre

              Centre Hospitalier Charles LeMoyne et
          Institut Universitaire de Gériatrie de Montréal
L'ALCOOL ET LES TROUBLES NEUROCOGNITIFS - Fadi Massoud MD FRCPC, Gériatre Congrès Québécois sur la Maladie d'Alzheimer - Novembre 2018
L’Alcool et les TNC
                  Objectifs

• Discuter du lien épidémiologique entre la
  consommation d’alcool et la cognition

• Réévaluer de façon critique le concept de
  démence éthylique

• Proposer une démarche pratique chez le
  patient dément qui consomme de l’alcool
L'ALCOOL ET LES TROUBLES NEUROCOGNITIFS - Fadi Massoud MD FRCPC, Gériatre Congrès Québécois sur la Maladie d'Alzheimer - Novembre 2018
L’Alcool et les TNC
                   Questions
• Est-ce que la consommation chronique et
  modérée d’alcool protège du déclin cognitif ?
• Est-ce que la démence éthylique existe
  vraiment ?
• Quelle devrait être la conduite chez un patient
  qui consomme de l’alcool et qui présente un
  déclin cognitif ?
L’Alcool et les TNC
                       PLAN

• Introduction/Généralités

• Épidémiologie

• Démence éthylique

• Conclusions
Code du Travail français: « aucune boisson
alcoolisée n’est autorisée sur le lieu du
travail excepté le vin, la bière, le cidre et le
poiré »

Loi sur la Santé et la Sécurité du Travail
(Code Civil du Québec): « tolérance zéro »
pour la possession, consommation et trafic
de substances.
INTRODUCTION
Introduction
                Spectre de la consommation
•   Spectre de la consommation d’alcool

•   Abstinence  dépendance

•   Déterminants majeurs de la consommation
     –   Quantité
     –   Durée
     –   Patron de consommation
     –   Conséquences

•   Inconstances dans la littérature
     –   Définition/mesure de la consommation (consommation « standard » et « modérée »)
     –   Variables démographiques
     –   Contexte géographique / culturel
Recommandations de Consommation au Québec

                       •   Programme 2-3-4-0
                       •   Femmes
                            –   2 verres/j max (mais PAS tous les
                                jours)
                            –   Occ: 3 verres
                            –   10 verres/sem max
                       •   Hommes
                            –   3 verres/j max (mais PAS tous les
                                jours)
                            –   Occ: 4 verres
                            –   15 verres/sem max
                       •   Unité / Consommation
                            –   10 g d’alcool
                            –   1 verre de vin à 12.5%
                            –   1 bouteille de bière à 5%
                            –   1 oz d’alcool « fort » 35-40%

                                       Educ’alcool, janvier 2013
Introduction
                      ROH et Cognition
• Alcool comme facteur de risque
   – Facteurs confondants potentiels
      •   Traumatismes crâniens
      •   Facteurs de risque vasculaires
      •   Conditions psychiatriques
      •   Abus d’autres substances
      •   Contribution métabolique (hépatopathies, déficits
          nutritionnels)
• Alcool comme facteur protecteur
   – Facteurs confondants potentiels
      • Association à saines habitudes de vie
            – Diète (méditerranéenne)
      • Association à un niveau de stress inférieur
      • Association à une meilleure perspective / philosophie de vie
ÉPIDÉMIOLOGIE
Épidémiologie
                  Facteur Protecteur ?
• « Overview of systematic reviews »
• 3 revues de la littératures de qualité (2 incluant une
  métanalyse)
• 45 articles originaux
• Consommation lég-modérée réduit le risque
   – MA: pooled RR = 0,72
   – Démence: pooled RR = 0,74
• Consommation élevée ne modifie pas le risque
• Données hétérogènes
   – Durée du suivi
   – Évaluation de la consommation (type/durée) et des patrons
   – Type d’alcool

                                        Ilomaki J et al, Current Clin Pharmaco 2015
Épidémiologie
                  Facteur Protecteur ?
• « Dose-response metanalysis »
• Évaluer l’association selon la quantité consommée
• N = 11 études / 73 300 individus
• Association non-linéaire entre la quantité de ROH et le
  risque de démence
• La dose quotidienne associée au risque le plus faible est de
  6-12.5g/j
• Risque élevé
    –  23 consommations par semaine
    –  38 g / j
• Effet « protecteur »: ≤ 60 ans
• Type de ROH « protecteur »: surtout le vin

                                               Xu W et al, Eur J Epidemio 2017
ÉPIDÉMIOLOGIE
                              Facteur Protecteur ???
Études longitudinales Récentes
•   Sydney Memory and Aging Study (Heffernan M et al, J Alzh Dis 2016):
     –   Étude longitudinale de 4 ans / 70-90 ans
     –   PAS d’association entre l’alcool et le déclin cognitif
•   Étude Hunt (Norvège) (Langballe et al, Eur J Epidemio 2015):
     –   Étude longitudinale de 27 ans (N = 40435)
     –   Consommation fréquente (plus de 5 fois/14 derniers jours)  risque de démence (MA, Dva)
•   Étude Whitehall II (GB) (Topiwala A et al, Br Med J 2017):
     –   Étude longitudinale de 30 ans (N=550, Â=43 à l’initiation)
     –   Prise de ≥ 14 conso/ sem associée à une atrophie de l’hippocampe à l’IRM + déclin au test de fluidité
         verbale – Pire si ≥30 conso/sem
     –   PAS d’effet protecteur de la conso légère (1-7 conso/ sem)
     –   Edito: «…findings strengthen the argument that drinking habits many regard as normal have adverse
         consequences for health… »
ÉPIDÉMIOLOGIE
                  Facteur Protecteur ???
• Données de l’étude Whitehall II – Incidence de démence
• Étude prospective / N = 9100 /x 23 ans
• Abstinence à l’âge adulte → HR = 1.47 (vs 1-14 cons/sem)
• Augmentation linéaire du risque au-delà de 14 cons/sem
  (17% pour chq ↑ de 7 conso/sem)
• Risque varie selon la trajectoire de consommation
    – Abstinence au long cours → HR = 1.74
    – Consommation chronique de ≥ 14 cons/sem → HR = 1.40
    – Diminution de la consommation → HR = 1.55
• Risque associé à l’abstinence semble médié par des
  facteurs cardio-métaboliques
    – Abstinence sans facteurs caridio-met = pas d’↑ du rsq

                                                   Sabia S et al, BMJ 2018
Épidémiologie

                                      Importante ou
            Abstinence               abus/dépendance

Déficits
Cognitifs                  ???
                          Modérée

                         Quantité (durée ?)
OU
Épidémiologie

                                      Importante ou
            Abstinence   Modérée     abus/dépendance

Déficits
Cognitifs

                         Quantité (durée ?)
SYNDROMES COGNITIFS
  RELIÉS À L’ALCOOL
Syndromes Cognitifs Reliés À
                 L’Alcool
• Encéphalopathies sub-aiguës ou chroniques
    –   Encéphalopathie post-traumatique
    –   Hématome sous-dural
    –   Encéphalopathie hépatique
    –   Dégénérescence hépatocérébrale acquise
    –   Myélinolyse centropontine
• Déficits nutritionnels
    – Syndrome de Wernicke-Korsakoff
    – Encéphalopathie associée à la pélagre
• Maladie de Marchiafava-Bignami
• Démence éthylique
Démence Éthylique
      Évolution (confusion?) Nosologique

•   DSM II (1968): « alcoholic deterioration »
•   DSM III (1980): « alcoholic dementia »
•   DSM III-R (1987): «dementia associated with alcoholism»
•   DSM IV (1994): « alcohol-induced persistent dementia » (291.2)
•   DSM IV-TR (2000): idem
•   DSM V: « neurocognitive disorder (major/minor) due to substance disorder »
•   Autre:
     –   “Alcohol-related brain damage (ARBD)”
     –   “Alcohol-related brain injury (ARBI)”
Démence Éthylique
                 Existe-t-elle vraiment ??
• « Démence alcoolique » serait une forme particulière de
  syndrome de W-K

• Possible contribution de pathologie dégénératives, vasculaire, et
  métabolique (hépatique)

• En faveur de cette hypothèse
    – Difficile de dissocier la neurotoxicité directe de l’EtOH des atteintes
      concomitantes (métaboliques, trauma…)
    – Pas de patron spécifique à la pathologie
    – Cas de syndrome de W-K à évolution insidieuse (phase de Wernicke non-
      identifié)
    – Cas de syndrome de W-K ou l’atteinte cognitive dépasse le domaine
      mnésique (difficultés perceptuelles, dysfonction exécutive)

                                                                       Victor et al., 1989
Démence Éthylique
                     Existe-t-elle vraiment ??
                                                   •Amélioration
                                                   mnésique
  •Delirium               •Atteinte mnésique
                                                   •Disparition de
  •Ataxie                 prédominante
                                                   la confabulation
  •Signes oculomoteurs    •Confabulation
                                                   •Atteinte globale

Encéphalopathie de       Syndrome de Korsakoff   Syndrome de Korsakoff
    Wernicke               « Confabulatoire »          chronique
                                                 « non-confabulatoire »

                                                               Victor et al., 1989
Démence Éthylique
                    Manifestations Cliniques
• Cognitives
   – Atteinte globale ( de la MA)
         •   Ralentissement du temps de réaction,  attention (mémoire de travail)
         •   Mémoire (Récupération  rétention)
         •   Dysfonction exécutive ++
         •   Langage épargné
   – Sévérité variable de l’atteinte
   – Amélioration avec l’abstinence / fluctuations
         • Dépend de la quantité (récente consommée) et de la durée d’abstinence
   – Stabilité relative avec le temps ? (Woodburn KJ, Health Bull 1999)

• Comportementales
   – Syndrome frontale
         • Apathie, indifférence à l’environnement
         • Peu d’auto-critique
         • Perte des conventions sociales, désinhibition, labilité émotionnelle

                                                      Pierrucci-Lagha et al., Psych NeuroPsych Vieill 2003
                                                      Victor, Neurol Clinics 1993
Démence Éthylique
     Critères Diagnostiques Spécifiques

• Démence Éthylique Certaine
  – Pas de critères…
• Démence Éthylique Probable
  – Démence  60 j après dernière consommation
  – Consommation significative
     • H :  35 consommations/sem x 5 ans
     • F:  28 consommations/sem x 5 ans
     •  3 ans entre la période de consommation et le début des
       symptômes

                                              Oslin et al., Int J Geriatr Psych 1998
Démence Éthylique
        Critères Diagnostiques Spécifiques
• Démence Éthylique Probable (suite)
   – Diagnostic soutenu par:
       • Perturbations hépatiques, pancréatiques, G-I, cardiovasculaires et rénales liées à
         l’EtOH
       • Ataxie ou polynévrite sensitive
       • Atrophie cérébelleuse surtout vermienne
       • Amélioration ou stabilisation des déficits cognitifs après 60 j d’abstinence
       • Diminution de l’atrophie à l’imagerie après 60 j d’abstinence
   – Diagnostic moins probable si:
       • Troubles du langage
       • Autres symptômes ou signes neurologiques focaux
       • Atteinte cérébrovasculaire significative
       • Score HIS élevé

                                                                     Oslin et al., Int J Geriatr Psych 1998
Démence Éthylique
            Critères Diagnostiques Spécifiques
• DSM 5
• Trouble Neurocognitif Léger / Majeur induit par abus de substances ou de
  médicaments
    – Remplit critères de TNC léger / majeur
    – Exclusion: delirium / intoxication ou sevrage
    – La quantité / durée de consommation suffisante pour produire atteinte
      cognitive
    – Association temporelle entre l’abus et les atteintes cognitives ou entre
      l’abstinence et la stabilisation/amélioration
    – TNC non attribuable à une autre condition
• Classification (pas de critères spécifiques)
    – « Alcohol mild NCD »
    – « Alcohol major NCD, amnestic-confabulatory type » (Korsakoff ??)
    – « Alcohol major NCD, nonamnestic-confabulatory type » (« démence
      éthylique »?)
    – Pas de « Wernicke-Korsakoff »
DÉMENCE ÉTHYLIQUE
                       Approche Clinique
• Abstinence
• Traitement pharmacologique spécifique ?
    – ChEI dans les conditions « mixtes »
    – Mémantine dans l’ARD (Cheon Y et al, Int J Neuropsychopharmacol 2008)
         • Étude ouverte positive avec 19 pts (cogn, QOL, comportement)
    – Mémantine dans le SWK (Rustembegovic A et al, Med Arh 2003)
         •   Étude R-C positive avec 16 patients (cogn, fct)

• Traitement des conditions associées
    – Dépression, anxiété, insomnie, etc.
• Traitements spécifiques pour assurer l’abstinence
    – Groupes de soutien
    – Approche comportementale
    – Counseling en collaboration avec la famille

                                                                          Smith et al., Int J Addiction, 1995
CONCLUSIONS
Conclusions
• L’effet protecteur de l’EtOH (seul) sur la cognition demeure
  controversé …mais semble de moins en moins probable
• EtOH en grande quantité et sur une période prolongée est toxique
  pour le cerveau
• La notion de « démence éthylique » demeure controversée… mais
  semble probable
• L’abstinence entraîne une stabilisation ou une amélioration de la
  majorité des manifestations cliniques
• Validation prospective des critères diagnostiques souhaitable pour
  mieux cerner la question
• Recommandations Cliniques Pratiques
   – Il n’est pas recommandé de consommer de l’EtOH pour prévenir les
     déficits cognitifs
   – Chez les patients avec une démence clinique, la consommation d’EtOH
     et à déconseiller
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