À la CPAC, les conservateurs américains font bloc pour 2020, autour de Trump
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
À la CPAC, les conservateurs américains font bloc pour 2020, autour de Trump Par Alexis Rapin Lancée en 1974, inaugurée alors par Ronald Reagan, l’affiche, animant un mouvement conservateur uni la Conservative Political Action Conference derrière une seule et unique figure, Donald Trump. (CPAC) était autrefois le rassemblement annuel des conservateurs américains bon ton. Quelque C’est un ralliement pour le moins singulier qu’a 45 années plus tard, c’est un tout autre visage qu’a effectué en quatre ans à peine l’élite conservatrice montré l’édition 2019 de l’événement, tenu il y a une fréquentant la CPAC : en 2015 encore, le semaine à Washington : « America First » et natio- traditionnel sondage pré-électoral réalisé lors de nalisme populiste y tiennent désormais le haut de
l’événement indiquait que seuls 3,5% des visiteurs convertie : du sénateur de la Caroline du Sud soutenaient le candidat Trump. Des figures plus Lindsey Graham à l’ex-gouverneur du Wisconsin traditionnalistes, comme les sénateurs Rand Paul Scott Walker, les politiciens vétérans invités à la (Kentucky) ou Ted Cruz (Texas) y faisaient alors CPAC 2019 n’ont eu que des bons mots pour le encore la loi. Cette année pourtant, au terme du président. À l’inverse, les derniers républicains même exercice, le verdict est sans appel : 82% des dissidents, tels l’ancien gouverneur de l’Ohio John participants affirment déjà vouloir voter Trump Kasich, ont suscité les huées de l’assistance lorsque lors d’une potentielle primaire républicaine en nommés sur l’estrade. Si la CPAC peut être consi- 2020, le score le plus élevé jamais enregistré lors de dérée comme une bonne vitrine du mouvement l’événement. conservateur américain, force est de constater que ce dernier est désormais entièrement conquis par De quoi expliquer que tout, ou presque, de la (et dévoué à) Donald Trump. CPAC 2019 se soit articulé autour du trumpisme, de la thématique de l’édition (« What Makes Plus qu’un simple acquiescement, c’est une America Great ») à la liste des invités (Mike Pence, métamorphose de la droite américaine dont Kellyanne Conway, Donald Trump Jr., quelque la CPAC 2019 témoigne : avec nombres six membres du cabinet de la Maison-Blanche… d’interventions dédiées aux frontières et à la et Donald Trump lui-même). L’assistance, de son souveraineté (dont le meilleur exemple restera côté, ne faisait pas exception, arborant nombre sans doute l’allocution aussi virulente que virale de casquettes MAGA et scandant régulièrement de la chroniqueuse Michelle Malkin), le néo- « build that wall ! » (construisez ce mur) ou « four nationalisme confirme désormais sa centralité more years ! » (quatre ans de plus). Visiblement parmi les priorités conservatrices. Aux principes conscient que l’événement lui était implicitement de libre-échange et d’« hégémonie bienveillante » dédié, le principal intéressé s’y est d’ailleurs autorisé promus par l’ancienne garde, une nouvelle le plus long discours de sa carrière, deux heures génération d’activistes substitue une volonté de durant, dans le style le plus irrévérencieux qu’on lui verrouillage des frontières et d’« isolationnisme connaisse. agressif ». Gonflés à bloc pour 2020 Un mouvement en mutation Jeunes, étonnamment diversifiés, maîtrisant Alors que le pedigree conservateur de Donald pleinement le potentiel des nouvelles technologies, Trump lui-même a longtemps fait débat, comment cette nouvelle vague militante (incarnée par des expliquer cette dévotion désormais totale du figures comme Charlie Kirk, Candace Owens mouvement ? Sur l’estrade de la CPAC 2019, ou James O’Keefe) signale que l’avenir du le sénateur du Texas Ted Cruz, autrefois rival conservatisme américain sera trumpiste, ou ne sera et détracteur du milliardaire, le résume mieux pas. L’avenir proche, d’ailleurs, ne leur inspire que que quiconque : « réforme fiscale, dérégulations la plus grande confiance : à l’approche des élections économiques, lois anti-avortement et juges présidentielles de 2020, les visiteurs de la CPAC conservateurs, nous avons enregistré d’immenses 2019 voient globalement leur mouvement comme victoires en deux ans seulement ». Qu’il s’agisse soudé, discipliné et très enthousiaste. Tout l’inverse des évangélistes anti-avortement ou des partisans d’une opposition démocrate décrite comme de la libre-entreprise, la présidence Trump tient électoralement fragmentée, dépourvue de message pour l’heure plus de promesses que beaucoup ne positif et devenue idéologiquement trop radicale à l’escomptaient. travers son virage « socialiste ». De fait, même la vieille garde conservatrice ayant Ce dernier terme, abondamment invoqué par critiqué Donald Trump en 2016 s’est aujourd’hui les intervenants de la CPAC, s’annonce d’ailleurs
comme le grand thème de campagne des conserva- teurs pour 2020 : la prééminence de figures comme Bernie Sanders, Elizabeth Warren ou Alexandria Ocasio-Cortez, de même que la rhétorique de guerre froide entourant la crise au Venezuela ont, semble-t- il, convaincu les stratèges républicains de faire cam- pagne sur le retour du « péril rouge ». Pari gagnant ou non, les conservateurs américains conservent au moins une certitude : la présidence Trump, qu’elle se termine en 2020 ou en 2024, n’aura pas été une pa- renthèse mais bien le début d’une nouvelle ère pour leur mouvement. Alexis Rapin est chercheur en résidence à l’Observatoire sur les États-Unis de la Chaire Raoul-Dandurand. Pour en savoir plus sur la Chaire Raoul-Dandurand et ses travaux: https://dandurand.uqam.ca/ Photos: Alexis Rapin
Vous pouvez aussi lire