LA FONCTION LEGISLATIVE DU PARLEMENT SUJET D'ACTUALITE -SUJET QUI FAIT L'ACTUALITE
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• Premières journées dédiées à la mémoire des camarades qui nous ont quitté : les frères benallegue, Djamel Liamini, Taourirt lamri, Yachir Fayçal, Bouaoud Djamel, Izem Mohamed, Yaici Mohand … LA FONCTION LEGISLATIVE DU PARLEMENT SUJET D’ACTUALITE -SUJET QUI FAIT L’ACTUALITE Par Mr. Azzouz NASRI, Député de la Wilaya de Sétif, ancien 1er Président de la Cour Suprême. 3 Observations préliminaires : * Cette communication s’inscrit dans le cadre de l’analyse du fonctionnement d’une des institutions de la République, à savoir le parlement vu de l’intérieur par un député en fin d’exercice et non prétendant aux élections législatives du 17 mai prochain. * Les différentes interventions ont un fil conducteur : La communication utile qui pose des problématiques concrètes et propose des pistes de réflexion, car au-delà de la curiosité scientifique, il est utile de vérifier si la norme juridique, surtout celle contenue dans la constitution, trouve son application dans le sens arrêté par son auteur. * Le sujet est vaste : développer les grands axes, ouvrir le débat et préparer la prochaine communication. Dans un système institutionnel basé sur le principe de la séparation des pouvoirs, le parlement fait la loi, le pouvoir exécutif l’applique et le pouvoir judiciaire contrôle sa bonne application. Alors le titre « la fonction législative du parlement » peut paraître comporter une redondance, si le parlement n’avait d’autres fonctions : ¾ Une Fonction de contrôle qui s’exerce notamment à travers : o Les commissions d’enquête sur des affaires d’intérêt général. o Les questions orales. o Les questions écrites. o L’interpellation du gouvernement sur des questions d’actualité. o Les auditions des membres du gouvernement par les commissions permanentes du parlement. o Le débat sur la déclaration annuelle de politique générale du gouvernement qui peut se terminer par le vote d’une motion de censure. o Le vote de la loi portant règlement budgétaire, après compte rendu du gouvernement au parlement de l’utilisation des crédits votés pour chaque exercice budgétaire. o L’adoption du programme du gouvernement ¾ Une Fonction diplomatique : la diplomatie parlementaire est un espace de réflexion et de dialogue interparlementaire, conquis sur la diplomatie traditionnelle, qui touche divers domaines allant du développement des technologies de l’information, à la politique de l’habitat, aux perspectives de sécurité et de paix dans le monde, aux problèmes de décolonisation et de circulation des personnes … Cependant La fonction essentielle du Parlement est de fabriquer la loi. L’art 98 de la Constitution dispose : « le pouvoir législatif est exercé par un parlement composé de deux chambres, l’Assemblée Populaire Nationale et le Conseil de la Nation. Le parlement élabore et vote la loi souverainement » Mais L’art 122 de la constitution limite le domaine de compétence du parlement : « Le parlement légifère dans les domaines que lui attribue la constitution, ainsi que dans les domaines suivants : « suit une liste de 30 domaines » ; Et même dans ces 30 domaines, le parlement n’est compétent que pour fixer : • La législation de base (nationalité) ; • les règles générales (statut personnel et droit de la famille ; santé publique et population ; environnement ; droit du travail) ; • le régime général (mines et hydrocarbures ; forets et terres pastorales ; eau) ; • les garanties fondamentales (fonctionnaires et statut général de la fonction publique).
Question : Pourquoi cette compétence d’attribution limitée au pouvoir législatif ? • éviter l’omnipotence d’un pouvoir qui risque par nonchalance ou par zèle de bloquer le fonctionnement normal des institutions ; • la loi n’est pas bavarde, laisser le détail au règlement. Qui réglemente les autres domaines ? La constitution y répond l’art 125 de la Constitution : « les matières, autres que celles réservées à la loi , relèvent du pouvoir réglementaire du président de la République » . Le président de la république légifère dans son domaine de compétence par décrets présidentiels qui au point de vue de la hiérarchie des textes sont au même niveau que la loi. Mais comment régler les conflits en cas de dépassement ou de chevauchement de compétence ? Des mécanismes de régulation existent : c’est le conseil constitutionnel qui veille au respect de la constitution et qui arbitre au besoin les conflits de compétence. Le parlement a –t-il le monopole de l’exercice de la fonction législative ? Oui , mais : l’art 124 de la Constitution dispose : « en cas de vacance de l’Assemblée Populaire Nationale ou dans les périodes d’intersession du parlement, le Président de la République peut légiférer par ordonnance. Le Président de la République soumet les textes qu’il a pris à l’approbation de chacune des chambres du parlement, à sa prochaine session. Sont caduques les ordonnance non adoptées par le parlement. » La notion d’urgence n’existe pas dans le texte constitutionnel pour justifier au besoin l’intervention du Président de la République dans le champ législatif ; Les périodes d’intersession (art 118 :2 sessions ordinaires d’une durée minimale de 4 mois + possibilités de sessions extraordinaires L’art 5 de la loi fixant l’organisation et le fonctionnement du parlement fixe la durée maximale de chaque session à 5 mois. (session de printemps 2e jour du mois de mars ; session d’automne 2e jour du mois de septembre) Le parlement est donc disponible, en session, dix (10) mois sur douze En sus de la possibilité de le réunir en session extraordinaire ; La période d’intersession est si courte, comme précisé plus haut ,que le parlement semble être en session permanente. Or Durant la législature en cours, sur les 94 textes votés par le parlement, plus du tiers –32-sont des lois d’approbation d’ordonnances présidentielles ! Qui peut initier la loi –qui est le détenteur de l’initiative législative ? L’art 119 de la constitution : « l’initiative des lois appartient concurremment au chef du gouvernement et aux députés ». Remarques le chef du gouvernement est cité en premier !! Le Président de la République et les membres du conseil de la nation sont exclus. Au cours de la 5e législature-2002-2007-le parlement a été saisi de 113 textes : 19 propositions de lois introduites par les députés 94 projets de lois introduits par le gouvernement Sur les 19 propositions de lois déposées sur le bureau de l’APN, seules 4 ont été déclarées recevables, communiquées au gouvernement et soumises aux commissions concernées. Une seule, des quatre propositions, celle relative au régime électoral, a été adoptée par l’APN. Quant aux 94 projets de lois introduits par le gouvernement : 01 texte a été retiré par son auteur, celui relatif à la circulation des ressources biologiques et au contrôle des OGM 01 texte n’a pu être étudié en raison de la fin de la mandature à savoir le nouveau code de procédure civile et administrative. 2
02 textes ont été inscrits aux débats et non votés : reformes de l’enseignement supérieur et de l’enseignement professionnel. 90 textes ont été adoptés dont 32 approbations d’ordonnances présidentielles. CE QU’IL FAUT RETENIR DE CES CHIFFRES : Plus du 1/3 de l’activité législative soit 32 ordonnances présidentielles ont été adoptées sans débat. sur les 59 autres textes votés, 58 ont été initiés par le gouvernement. Ce phénomène n’est pas propre à l’Algérie. Dans de nombreux pays, les grandes lignes du programme législatif annuel du gouvernement sont exposées au parlement par le chef de l’Etat. En Jordanie, au Koweït, aux Pays Bas, au Royaume Uni le discours du trône contient l’essentiel des projets de lois qui seront déposées par le gouvernement au cours de la session qui commence. Quelles sont donc les raisons du retrait de l’initiative parlementaire ? Complexité des lois modernes qui exigent non seulement l’imagination créatrice d’un cerveau politique et juridique , mais aussi les connaissances d’un économiste doublé d’un spécialiste en toute une série de sciences annexes ; Ressources techniques et de rédaction des parlementaires bien inférieures à celles du gouvernement. Écueils de certaines dispositions constitutionnelles : ¾ L’art 119 de la constitution qui dispose que pour être recevable toute proposition de loi doit être signée par au moins 20 députés. ¾ L’art 121 de la constitution qui dispose que : « est irrecevable toute proposition de loi qui a pour objet ou pour effet de diminuer les ressources publiques ou d’augmenter les dépenses publiques, sauf si elle est accompagnée de mesures visant à augmenter les recettes de l’Etat ou à faire des économies aux moins correspondantes sur d’autres postes des dépenses publiques ». Écueil lié à l’ordre du jour du parlement qui est arrêté par les bureaux des deux chambres du Parlement et le représentant du gouvernement suivant l’ordre de priorité fixé par le gouvernement !!! Même si une proposition passe, elle risque de ne jamais être programmée. Volonté délibérée du législateur de laisser au gouvernement le soin d’initier les textes juridiques nécessaires à la mise en œuvre du programme que ce même parlement a adopté. Fort de sa position d’initiateur privilégié de la loi, le gouvernement a réglementé pour ses propres besoins la procédure d’élaboration de la norme législative. Cette réglementation rappelle aux membres du gouvernement : Que l’initiative de la proposition des textes leur appartient. Que les textes initiés sont soumis à la concertation interministérielle. Que tout projet doit être adressé au Secrétariat Général du Gouvernement en 40 exemplaires en langue nationale et en français pour garantir la diffusion aux autorités et institutions publiques dont l’avis est requis. Qu’à l’issue des délais prévus pour la transmission des avis et observations, le Secrétariat Général du Gouvernement fixe un programme de réunions pour la mise en forme du projet de loi dont la mouture définitive sera rédigé en 5 exemplaires –Arabe et Français- et transmise au SGG. qu’une fois le texte adopté en conseil du Gouvernement, il sera soumis à l’avis du conseil d’Etat , adopté par le conseil des ministres et déposé sur le bureau de L’APN par le Secrétaire Général du Gouvernement au nom du gouvernement. 3 Observations méritent d’être faites : 1. Pourquoi la traduction des textes de loi en langue française ? Force probante du texte en français ? Responsabilité en cas de contradiction ? Le parlement ne vote pas le texte en français 2. Le dépôt des lois par le Secrétaire Général du Gouvernement au nom du gouvernement est en contradiction avec la lettre de la constitution qui le met à la charge du chef du gouvernement. Le conseil constitutionnel a eu à s’exprimer sur le problème des saisines. 3. Quel est le rôle du conseil d’Etat dans le processus d’élaboration de la loi ? 3
L’art 12 de la loi relative au Conseil d’Etat stipule que ce dernier donne son avis sur les projets de textes qui lui sont soumis et propose toutes modifications qu’il juge nécessaires. Quelle peut être la nature de ces modifications ? - sémantique ? - juridique ? - constitutionnelle ? - opportunité du texte ? Le Conseil d’Etat qui est une institution judiciaire devient conseiller du gouvernement ! Le principe de la séparation des pouvoirs est mis à mal !! -Quelle est la force probante de ces avis ? -Ces avis sont-ils destinés seulement au gouvernement ou bien doivent-ils accompagner le texte déposé à l’APN ? -Peut on se passer de l’avis du Conseil d’Etat sans risque de déroger à une procédure imposée par la constitution ? Rappeler l’avis du comité de réforme des missions et structures de l’Etat à ce sujet (proposition de création d’un Conseil Consultatif de l’Etat aux lieux et place du Conseil d’Etat). Les projets ou propositions de lois déposés sur le bureau de l’APN sont renvoyés devant une des douze Commissions Permanentes de l’assemblée pour étude qui consiste à : Présentation du projet par le représentant du gouvernement en commission Audition d’experts en tant que de besoin Discussion en présence des représentants du GVT art par art : adoption-modification forme et/ou fond-abrogation-ajout art en relation avec le texte. Rédaction d’un rapport préliminaire qui sera soumis au débat en plénière. A l’issue du débat , les députés peuvent introduire des amendements sur les articles de la loi ( 10 députés) ; ces amendements seront débattus au sein de la commission permanente qui devra alors rédiger un rapport complémentaire qui sera soumis au vote en plénière. C’est le texte voté par l’APN qui sera transmis dans les 10 jours de son adoption au président du conseil de la nation qui le soumet à la commission permanente compétente (09 commissions permanentes). Les rapports des commissions permanentes sont présentés au Conseil de la Nation pour approbation- pas d’amendement ni au niveau de la commission, ni par les soins des membres du Conseil de la Nation ; En cas de désaccord entre les deux chambres sur le texte, une Commission Paritaire, constituée de membres des deux chambres se réunit à la demande du chef du gouvernement pour proposer un texte sur les dispositions objet du désaccord. Ce texte est soumis par le gouvernement à l’adoption des 2 chambres et n’est pas susceptible d’amendement sauf accord du gouvernement. En cas de persistance du désaccord, le texte est retiré. Observations ¾ l’initiative de saisine de la Commission paritaire appartient au seul chef du GVT ! ¾ Même dans le cas d’un texte initié par des députés, le chef du gouvernement reste le maître de la procédure. ¾ Même le vote du texte consensuel reste tributaire du bon vouloir du gouvernement. La procédure d’adoption du texte de loi par le Conseil de la Nation et sa transmission au Président de la République clôt la mission du parlement. La loi ainsi votée doit être promulguée par le Président de la République dans un délai de 30 jours à compter de la date de sa remise, sauf saisine du Conseil Constitutionnel ou deuxième lecture de la loi votée demandée par le Président de la République. Question : Si la loi n’est pas publiée dans les délais ? Pas de mécanisme pour y suppléer. La constitution de 1963 avait appréhendé ce cas de figure puisque à défaut de promulgation des lois par le Président de la République dans les délais prévus (10 jours) le président de l’APN procède à cette de promulgation. 4
Que vous dire en guise de conclusion ? J’ai choisi de vous livrer 2 réflexions, la première de Montesquieu et la seconde de Churchill : ¾ Montesquieu dans son analyse de la constitution d’Angleterre rappelait que : «lorsque dans la même personne ou dans le même corps de magistrature, la puissance législative est réunie à la puissance exécutrice, il n’y a point de liberté, parce que on peut craindre que le même monarque ou le même sénat ne fasse des lois tyranniques pour les exécuter tyranniquement ». ¾ Quant à Churchill, sous sa bonne bouille, il aimait à dire que la démocratie est le pire des systèmes imaginés par l’esprit de l’homme, à l’exception de tous les autres. A méditer Je vous remercie de m’avoir prêté votre attention. 5
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