La masse du boson de Higgs - Jean Zinn-Justin CEA, IRFU (irfu.cea.fr) Centre de Saclay 91191 Gif-sur-Yvette et
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
La masse du boson de Higgs irfu Jean Zinn-Justin saclay CEA, IRFU (irfu.cea.fr) Centre de Saclay 91191 Gif-sur-Yvette et (Shanghai University) J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 1
Au début était le Big Bang irfu saclay Big Bang J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 2
Transition de phase et masse des particules irfu fondamentales Par un mécanisme encore mystérieux, l’énergie du Big Bang engendra toutes les particules fondamentales: quarks constituants saclay des protons, neutrons… les leptons (électrons, neutrinos, muons…), les bosons vecteurs: photons, Z, W+, W-, gluons et peut-être d’autres que nous ne connaissons pas encore. Mais toutes étaient nées sans masse. Dans une fraction de seconde après le Big Bang, la température ayant diminué, une transition de phase* eut lieu qui donna des masses à toutes les particules, leptons, quarks, bosons vecteurs, sauf le photon, médiateur des interactions électromagnétiques, et les gluons, médiateurs des interactions fortes entre quarks. *Des exemples de transition de phase sont la transition liquide- vapeur, liquide-solide, Hélium fluide à superfluide… J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 3
Les particules fondamentales en 2011 irfu saclay J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 4
Transition de phase et brisure spontanée de irfu symétrie T>Tc saclay Surface d’énergie: minimum symétrique À cause de l’invariance par rotation autour de l’axe vertical, le minimum de la surface d’énergie, s’il est unique, est à l’origine. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 5
Transition de phase et brisure spontanée de irfu symétrie T
Transition de phase et boson de Higgs irfu La théorie (le Modèle Standard des interactions à l’échelle saclay microscopique) prédit que de cette transition de phase il reste une particule relique supplémentaire, un boson scalaire (sans spin), le boson de Higgs, la seule particule du Modèle Standard qui reste à découvrir. Par ses propriétés, elle est seule de son espèce. Sa mise en évidence est un objectif majeur du Large Hadron Collider (CERN, Genève), l’accélérateur dans lequel les physiciens enregistrent des collisions proton-proton depuis deux ans. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 7
Théorie quantique des champs: le problème irfu des infinis La physique à l’échelle microscopique est décrite par le Modèle Standard qui est une théorie quantique des champs, une théorie saclay quantique et relativiste. Sa construction a commencé vers 1930 par une généralisation quantique de l’électromagnétisme de Maxwell (Dirac, Heisenberg, Pauli) appelée Electrodynamique Quantique. Dès 1934 (Weisskopf), il devint évident que la nouvelle théorie, conduisait à des résultats infinis à cause de la nature ponctuelle des particules et des interactions. Clairement, la nouvelle théorie était, en un certain sens, incomplète. De plus, toute tentative simple pour modifier la théorie à courte distance pour la rendre finie, conduisait à la violation de principes fondamentaux, par exemple, la conservation des probabilités dans les processus physiques, une propriété fondamentale de la mécanique quantique. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 8
Théorie quantique des champs: le problème irfu des infinis Néanmoins, dans les années qui suivirent des calculs furent effectués avec de telles modifications, supposant que la théorie saclay n’était valable que jusqu’à une certaine distance liée, par exemple, à la portée des forces nucléaires. Le but de ces calculs était d’estimer au moins l’ordre de grandeur des corrections à la théorie classique, à défaut de conduire à prédiction précise puisque les résultats étaient fonction de la distance de modification et de la forme explicite de la modification. Au lieu de la distance a de modification, on exprime en général les divergences en fonction d’une échelle d’énergie dite de coupure Λ=ħc/a >> mc2 (courte distance est équivalent à haute énergie pour les phénomènes très quantiques et relativistes) où m la plus grande masse des fermions et bosons. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 9
Le boson scalaire: les infinis irfu En 1939, Weisskopf remarqua que les corrections pour les fermions chargés (comme les électrons et les protons) étaient beaucoup plus petites que pour les bosons scalaires chargés. saclay Dans un calcul au premier ordre, on trouve des termes en α ln(Λ/mc2) pour les fermions, α (L/mc2)2 pour les bosons sans spin, où α =e2 /4πħc= 7.2973525698(24)×10−3 est la constante de structure fine. Comme α est petit, pour les fermions les divergences logarithmiques conduisaient à des corrections d’ordre de grandeur acceptable, au contraire des divergences quadratiques des bosons. Dans les années qui suivirent, le point de vue se répandit que les bosons sans spin ne pouvaient pas être des particules élémentaires. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 10
L’idée de renormalisation irfu En physique, quand on rencontre des nombres très grands, une hypothèse plausible est qu’on a paramétré les phénomènes en terme de quantités inappropriées à leur échelle. Par exemple, saclay décrire les propriétés d’une table en terme de la structure atomique. Dans le cas de l’électrodynamique quantique, la nécessité d’introduire une échelle nouvelle très petite où le modèle devait être modifié, suggérait que les paramètres initiaux de la théorie étaient en fait appropriés à cette échelle microscopique et pouvaient donc être très différents des paramètres adaptés à la physique observée. En effet, les charges et les masses des particules sont elles-mêmes modifiées par l’interaction électromagnétique. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 11
Renormalisation et insensibilité à la irfu modification de courte distance Si a0 et m0 sont les paramètres qui apparaissent dans la théorie (dans le lagrangien), les quantités mesurées, a et m, sont saclay données par un développement de la forme a=a0+# a02 ln(Λ/m0c2)+… m=m0(1+ # a0 ln(Λ/m0c2)+…) L’idée est d’inverser ces relations, d’exprimer a0 et m0 en fonction de a et m, et d’exprimer ensuite toute observable physique en terme de a et m au lieu de a0 et m0 . Cette transformation est appelée renormalisation. Alors un miracle se produisit: pour toutes les quantités physiques (mesurables), après cette reparamétrisation, toutes les contributions qui tendent vers l’infini quand L tend vers l’infini se compensaient et les résultats étaient indépendants de la forme précise de la modification de courte distance. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 12
Renormalisation et insensibilité à la irfu modification de courte distance Dans la limite où la distance de coupure tend vers zéro, les saclay quantités physiques, exprimées en termes des variables macroscopiques, charges et masses physiques, semblent en un sens insensibles à la structure artificielle de courte distance introduite pour rendre la théorie finie. De façon un peu surprenante, cette procédure (Feynman, Tomonaga, Schwinger) conduisit à des prédictions en excellent accord avec les résultats expérimentaux. L’Électrodynamique Quantique est d’ailleurs la théorie qui est vérifiée avec le plus de précision de toutes les théories physiques. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 13
La renormalisation irfu Néanmoins, cette stratégie compliquée, impliquant dans une étape intermédiaire d’introduire une théorie artificielle ayant des propriétés non physiques à courte distance (ou grande énergie) et des paramètres dépendant de façon singulière d’une échelle saclay microscopique, continua à susciter un grand malaise chez les théoriciens. On essaya donc d’imaginer un cadre théorique d’où cet intermédiaire serait absent. Cela devint même l’école dominante dans les années 1960 et 1970. Cette démarche conduisait à des règles de calcul très artificielles dont l’origine physique était difficile à comprendre. De plus, la physique classique, relativiste ou pas, la mécanique quantique non-relativiste sont basées sur les notions de lagrangien et d’hamiltonien, et soudain dans le cas de la mécanique quantique et relativiste, il fallait les abandonner! J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 14
Boson de Higgs et renormalisation irfu Pour la question qui nous concerne ici, l’existence de bosons scalaires, la conséquence fût que le problème des trop grandes corrections quantiques, fût déclaré non-physique et saclay promptement oublié. Dans les années 1960 et début des années 70 fut construit le Modèle Standard des interactions à l’échelle microscopique, basé sur la structure mathématique de théorie de jauge non- abélienne (Yang, Mills) et de symétrie brisée spontanément. Ce modèle (un peu adapté à la masse des neutrinos) décrit encore aujourd’hui toute la physique à l’échelle microscopique. Dans ce modèle un boson scalaire, le boson de Higgs (Higgs est le nom d’un physicien) joue un rôle central, étant directement lié aux masses des particules. Notons qu’aucun physicien impliqué dans cette construction ne semble avoir insisté alors sur la difficulté potentielle associée aux trop grandes corrections quantiques. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 15
Transitions de phase macroscopiques et irfu théorie quantique des champs Des exemples de transitions de phase macroscopiques ont déjà été mentionné: liquide-vapeur, Hélium fluide à superfluide, saclay démixtion des mélanges binaires, aimantation-désaimantation… À peu près dans le même temps où le Modèle Standard était construit, eut lieu une avancée très remarquable dans la théorie des transitions de phase macroscopiques continues, résolvant un problème posé depuis des décennies. Il était lié à la détermination des singularités des fonctions thermodynamiques à la température de transition. La dynamique de ces phénomènes est entièrement décrite à une échelle microscopique, comme la maille du réseau pour les cristaux, la portée des forces…, par des degrés de liberté (variables dynamiques) et des interactions associés à cette échelle. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 16
Transitions de phase macroscopiques, un irfu exemple: systèmes ferromagnétiques saclay Modèle de spins sur les sommets d’un réseau bidimensionnel avec, par exemple, interactions de proches voisins J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 17
Transitions de phase macroscopiques et irfu théorie quantique des champs À haute température, les interactions deviennent négligeables, les systèmes sont désordonnés, l’aimantation est nulle: au sens des probabilités les spins forment une collection de variables saclay indépendantes. Par contre, quand on s’approche de la température de transition, ou température critiaue, une nouvelle échelle est engendrée: la longueur de corrélation. Les spins séparés d’une longueur de corrélation (ou moins) apparaissent comme corrélés. Cette longueur de corrélation tend vers l’infini quand on s’approche de la température de transition. En dessous de la température de transition, les systèmes sont ordonnés, une aimantation spontanée apparaît. La théorie classique qui décrivait ces transitions prédisaient des propriétés universelles au voisinage de la température de transition, mais dont la forme explicite se révéla incompatible avec l’expérience et des solutions de modèles particuliers. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 18
Transitions de phase macroscopiques et irfu théorie quantique des champs Ce problème défia pendant longtemps la sagacité des théoriciens. La solution vint de l’utilisation d’un outil technique nouveau saclay remarquable, le groupe de renormalisation (Kdanoff, Wilson…). Une conséquence surprenante est que les propriétés macroscopiques universelles de ces transitions de phase peuvent être décrites par une théorie quantique des champs (en temps imaginaire) avec un champ scalaire. Mais, comparée à la théorie des interactions microscopiques, cette théorie a des modifications à courte distance qui reflètent qualitativement la structure microscopique initiale et qui rendent la théorie finie. Cependant, le groupe de renormalisation permet de montrer que les propriétés universelles ne dépendent pas de tous les détails de la structure de courte distance mais seulement de quelques aspects généraux (symétries….). De plus ces propriétés diffèrent de celles de la théorie classique. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 19
Transitions de phase macroscopiques et irfu théorie quantique des champs Exemple de la transition d’aimantation saclay Théorie classique ou de Landau: M=√Tc –T . Théorie quantique des champs: M=(Tc –T)β , β Ising=0,3258 (0,0014) J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 20
Transitions de phase macroscopiques et irfu théorie quantique des champs Certaines de ces conclusions s’appliquent directement au boson de Higgs et plus généralement à la théorie quantique des champs saclay des interactions à l’échelle microscopique: Rejeter la théorie lagrangienne initiale, modifiée à courte distance, avec l’argument que ces modifications violaient des principes de la physique, était une conclusion prématurée: ces modifications simulent les effets d’une théorie plus fondamentale, inconnue, mais dont les effets directs ne sont observables qu’à beaucoup plus courte distance. Cependant, le groupe de renormalisation nous apprend que seuls quelques aspects très qualitatifs de ces modifications sont importants à grande échelle (grande échelle signifie ici 10-15 cm qui, par exemple, est beaucoup plus grand que la longueur de Planck). Apparemment, les modifications qui avaient été introduites sont compatibles avec ceux de cette théorie plus fondamentale. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 21
Boson de Higgs et ajustage fin irfu La longueur de corrélation est l’équivalent de l’inverse de la masse. Comme la longueur de corrélation ne devient beaucoup plus grande que l’échelle microscopique qu’au voisinage de la température critique, on en déduit que la masse mHiggs du boson saclay scalaire ne devient petite par rapport à l’échelle de modification, mHiggs
La masse du boson de Higgs au LHC irfu saclay J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 23
La masse du boson de Higgs au LHC irfu saclay J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 24
La masse du boson de Higgs au LHC irfu saclay J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 25
L’ajustage fin et le boson de Higgs irfu Expérimentalement la masse du boson de Higgs semble donc se trouver entre 115 Gev/c2 (recherche directe au LEP) et 131 Gev/ saclay c2. Pour éviter un ajustage fin, trois scénarios ont été envisagés : La supersymétrie (qui relie bosons et fermions): Λ est alors relié à l’échelle de brisure de supersymétrie; Le boson de Higgs est un état lié de fermions (d’un nouveau type?). Il est une manifestation de dimensions supplémentaires de l’espace, l’ajustage fin est alors remplacé par un ajustage de l’épaisseur des dimensions supplémentaires. Toutes ces extensions du Modèle Standard prédisent de nouvelles particules, que le LHC essaye de mettre en évidence. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 26
. at LHC Particle search irfu . saclay . . . . . . J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 27 .
La masse du boson de Higgs et l’ajustage fin irfu Comme jusqu’aujourd’hui aucune particule nouvelle n’a été trouvé au LHC en dessous environ de 500 GeV, saclay le degré d’ajustage fin est au moins d’ordre f = (Λ/mHiggs c2 )2/8π2 ≅ 0,2 ce qui est acceptable. Cependant, si aucune trace de nouvelle physique n’était trouvée en dessous de 2 TeV et si le boson de Higgs était trouvé avec une masse par exemple de 125 GeV/ c2, alors la correction relative à la masse du boson de Higgs serait d’ordre f ≅1 ce qui serait un sujet de perplexité, mais pas encore une crise. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 28
Conclusion irfu À la fin 2012, le problème expérimental de la masse du boson de Higgs pourra sans doute être considéré comme résolu. saclay S’il était découvert dans l’intervalle maintenant encore permis, le Modèle Standard s’en trouverait totalement confirmé. Il resterait à rechercher la physique nouvelle au delà du Modèle Standard. Si rien n’est découvert avant fin 2012, il faudra attendre la deuxième phase après 2013 où le LHC fonctionnera à son énergie nominale. Si alors rien n’était découvert, un nouveau problème mystérieux apparaîtrait, le problème de l’ajustage fin d’un paramètre de la théorie. J. Zinn-Justin, CEA,Irfu (Saclay) Meudon 23/02/2012 29
Vous pouvez aussi lire