La médecine traditionnelle chinoise
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La médecine traditionnelle chinoise . En quoi la médecine traditionnelle tiques thérapeutiques dépend d'abord du pouvoir chinoise (AATC) est-elle si différente de conviction de ces idées. Les succès obtenus dans de la médecine occidentale? la pratique clinique ne viennent qu'en deuxième position. Et ceux-ci semblent valables dans la La réponse n'est pas facile car avant les années médecine occidentale comme dans la médecine cinquante il n'existait pas de système théorique chinoise. que l'on pouvait qualifier de MTC. Ce n'est qu'avec Certes, à chaque époque correspond une l'avènement de la Chine populaire et ses efforts conception dominante quant à la nature de la mala- pour rendre la MTC intelligible aux médecins chi- die et des processus nécessaires pour s'en proté- nois qui avaient fait des études occidentales que ger ou pour la guérir. Pourtant, il existe à tout fut élaboré en 1958 un corpus: Fondements théo- moment des alternatives qui sont susceptibles d'ob- riques de la MTC. En 1986, une commission spéciale tenir de meilleurs succès cliniques dans tel ou tel travaillait encore pour participer à l'enseignement domaine particulier. Mais le fait d'admettre ces en vigueur dans les instituts de formation pour succès ne résulte que de l'idée de la vie et de la les nouveaux médecins de MTC. vision du monde partagée par la fraction de la popu- Du coup, aujourd'hui il existe quasiment deux lation qui y adhère. présentations de la MTC : d'une part, celle propo- L'enthousiasme initial pour la médecine chi- sée parla Chine populaire et reprise dans les milieux noise ne fut pas provoqué par des succès théra- de praticiens, d'autre part, celle qui peut se déga- peutiques vérifiés scientifiquement ou statisti- ger de l'étude rigoureuse de l'histoire de la MTC, quement, mais par des informations concernant vieille de deux mille ans. une médecine supposée être, contrairement à la Sur quels critères peut-on juger de la valeur médecine occidentale, holistique et proche de la d'un système thérapeutique ? Certes, la médecine nature, même si cette croyance n'est nullement fon- occidentale peut se prévaloir aujourd'hui de nom- dée au regard de l'histoire. La MTC continue de breux succès encore impensables il y a quelques nos jours à se présenter comme si elle était l'exact décennies et qu'aucune médecine concurrente ne opposé de la médecine occidentale, laquelle sus- peut lui disputer. Mais par ailleurs il existe d'autres cite peut-être le malaise d'une partie de la formes de thérapies -« alternatives » ou « com- population. plémentaires » à la médecine occidentale -, qui peu- Le manque de contact émotionnel et physique vent se targuer d'obtenir des résultats tout aussi entre médecin et malade, une plus froide techni- probants dans certains domaines. Toutes ces thé- cité dispensatrice de chimiothérapie et de méde- rapies comptent des thérapeutes et des patients cine nucléaire, l'image d'une médecine de plus en pleinement satisfaits et qui peuvent faire valoir, plus spécialisée, donc d'une science du détail avec pour certaines pathologies, des taux de réussite absence de vision globale..., sont les reproches habi- presque comparables. tuellement faits à la médecine occidentale. Pourquoi donc tant de systèmes thérapeutiques En résumé, l'Occident n'a plus le monopole de différents peuvent-ils être convaincants vus de l'in- la réflexion médicale, et la MTC a l'avantage de térieur de tel ou tel groupe humain alors que cette représenter, parmi les médecines savantes tradi- conviction ne s'étend pas à tous les autres groupes ? tionnelles, une médecine toujours d'actualité car En fait, l'acceptation par une communauté encore pratiquée à vaste échelle et même impor- humaine donnée d'un système d'idées et de pra- tée en Occident. 06, 2002 1
La médecine traditionnelle chinoise Étude comparative avec la médecine occidentale Épistémologie de la médecine occidentale Médecine occidentale « centripète » De nombreux signes ou symptômes pouvant se grouper en syndromes donnent une définition d'une maladie qui est référée à un seul diagnostic étiologique, lequel lui-même est référé à un traitement à visée étiopathogénique. C'est un modèle que l'on peut appeler « centripète » (cf. l'exemple du diabète avec deux types de syndromes, le diabète de type 1, dû à une insuffisance de sécrétion de l'insuline, et le diabète de type2, dû à une résistance périphérique à l'action de l'insuline; il en résulte un seul diagnostic étio- logique: l'hyperglycémie. Le but du traitement est iden- tique, c'est l'augmentation de l'insulinémie et la diminu- tion de la glycémie, même si les médications sont différentes). l \ et traitement Épistémologie de la MTC MTC « centrifuge » La nosologie chinoise comprend de nombreux syndromes, Les perturbations externes J lesquels résultent du déséquilibre du Yin et du Yang. Ces Vêt )t - Froid - Humidité - Sécheresse - Feu - Chaleur déséquilibres reposent tantôt sur les désordres du flux Xué, tantôt sur les désordres du flux Qi, tantôt sur les désordres Les viscères du flux Jin Ye. Chacun de ces flux se trouve lui-même affecté par plusieurs perturbations étio/ogiques, lesquelles Les flux Qi sont corrélées soit aux grandes causes externes (vent froid, Jin, Ye et Xue humidité, sécheresse, feu et chaleur), soit aux perturba- tions internes (joie excessive, colère, pensées obsession- Yin nelles, tristesse, affliction, peur, effroi), soit aux excès char- _^ Yang nels. A signaler que les perturbations externes ne sont pas Les 5 correspondances simplement des indications climatiques mais, par exemple au plan du microcosme humain, le vent se trouve corrélé Les méridiens avec l'un des couples de viscères: le foie et la vésicule Les énergies biliaire. La M TC sera donc un modèle de médecine « centrifuge » : Les 5 organes et les 6 entrailles les études et les traitements ne seront pas axés sur une seule cause mais sur une série de relations interdépen- L =s perturbations internes (joie excessive, colère, dantes circulaires, les « relations en mouvement ». pensées obsessionnelles, tristesse, affliction, peur, effroi) et les excès charnels r Le cadre fondamental Il faut donc partir de la conception que les Chi- nois se font de la vie de l'homme au sein de l'Uni- En Occident, nous sommes depuis longtemps vers... La vie de l'Univers est un échange entre le habitués à décrire et à penser le corps en termes Ciel et la Terre. L'homme « couvé par le Ciel » est d'anatomie (macroscopique ou moléculaire). Cette « porté par la Terre ». L'existence humaine se déroule description anatomique, initiée par Galien, a été dans ce vide médian. Les souffles du Ciel sont l'ini- reprise àla Renaissance, puis les progrès techniques tiative qui crée la vie: ils s'adressent à la Terre, (microscope, chimie...) ont révélé un monde de celle-ci les reçoit, les emmagasine et les restitue structures et de molécules: c'est ce monde des- après les avoir transformés. Le Ciel et la Terre se criptif qui définit, depuis Platon et Aristote, l'être, font face. Ce qui se produit entre eux provient tou- les objets et les catégories d'idées aboutissant à jours de l'un et de l'autre. des systèmes conceptuels qui permettent de pen- D'autre part, ce qui est vrai de l'espèce humaine ser le vivant. Or, il est nécessaire pour comprendre est vrai de tout l'empire qui organise la vie des la vision chinoise du corps d'accepter d'abandon- hommes à partir d'un centre. Le rôle du souverain ner ces habitudes. est de présider à la vie et la vertu qu'il reçoit du
La médecine traditionnelle chinoise ciel se diffuse d'elle-même sur -le peuple. Des La vie est dans l'homme un courant de souffles ministres et tout un gouvernement relais servent subtils et essentiels, mais c'est le souffle primor- sa puissance vers le peuple. dial qui constitue le fondement de tous les êtres, L'homme, individuellement, est à l'image de qui fait la santé des hommes comme la santé de l'empire. Il possède des esprits célestes et à par- la nature. tir du centre ces esprits régissent la vie de l'orga- L'amas des souffles originels, souvent appelé nisme: des ministres, des serviteurs, des forces le « chaos », est qualifié de « chose en état de armées, des magasins, des envoyés, des gardiens mélange » : cela deviendra, après séparation, le Ciel assurent la vie, la subsistance et la défense de tout lumineux et la Terre tranquille. ce qui vit dans l'enceinte corporelle. La vie humaine ne fait que reproduire le mou- Le fonctionnement du Ciel/Terre est régulier: vement toujours recommencé du Ciel à la Terre: la santé est donc l'état naturel de l'Univers. La santé c'est ce que l'on appelle le souffle médian (ou souffle de l'homme comme le bon état de l'empire ne sont de l'espace médian). On dit aussi que les souffles que des manifestations particulières de la santé yin et les souffles yang se rejoignent dans cet espace du Ciel/Terre. C'est le point de départ de la MTC. médian. Deux caractères chinois décrivent le couple Les textes médicaux reconnaissent le rôle santé/maladie : d'initiative du Ciel et du mouvementyang qui mène -Ping représente la régularité, le calme, la tran- l'énergie, mais ils tiennent une balance strictement quillité et donc la santé ; égale entre le yin et le yang dans l'écoulement du -Bing, c'est le défaut, le vice de fonctionnement flux vital. Le vivant aura toujours tendance à donc la maladie. rechercher le haut, la lumière, le rayonnement, l'ini- Dépouillé de son enveloppe Ciel/Terre, l'homme tiative, la chaleur. Mais, dans le même moment, il devient incompréhensible, C'est pourquoi les clas- se soumet au rôle que jouent en lui les souffles siques de la médecine chinoise révèlent une grande yin, l'immobilité, la passivité, la docilité et quantité de considérations astronomiques, météo- l'humilité. rologiques, géographiques, minéralogiques... A côté du couple yin-yang, opposés et com- Le rapprochement de la MTC de la médecine plémentaires, qui s'engendrent ou se succèdent dite occidentale doit s'efforcer de respecter cette mutuellement dans le temps, à côté des autres vision de l'homme dans le monde. couples de l'ordre de la nature qu'il est toujours Pour lire la vie, il faut donc un double mouve- possible de ramener au couple symbolique yin- ment : d'abord lever la tête vers le Ciel pour y consi- yang (dur/mou, vide/plein, froid/chaud, haut/bas, dérer les grands mouvements qui y apparaissent ; etc.), la doctrine des cinq agents peut aussi déter- ~ puis abaisser notre regard sur la Terre pour exa- miner des catégories et donc définir des relations miner les transformations qui s'y font. C'est dans avec les phénomènes. La Nature et les phénomènes cet esprit qu'il faut lire les parties anatomiques et naturels sont découpés en cinq catégories où physiologiques des ouvrages anciens de médecine chaque composant participe aux mêmes mouve- chinoise. Le médecin de la tradition ancienne est ments (ou transformations), à la même dynamique une sorte de souverain: il n'ignore rien de l'ana- que l'agent dont il relève. Au macrocosme corres- tomie et de la physiologie, des aiguilles ou de la pond le microcosme humain avec leurs correspon- pharmacopée, mais il est l'observateur des volon- dances systématiques : explication de la succession tés du Ciel et l'ordonnateur de la santé : il préserve naturelle des phénomènes mais aussi de la régu- ce qui est sain et normalise ce qui pourrait être lation (et du contrôle) des processus. pathologique. Les cinq agents symbolisent les cinq manifes- À l'origine de l'homme il y a donc le Ciel et ses tations de l'interaction primaire du Ciel et de la ancêtres. Les souffles célestes sont aériens, subtils, Terre. légers, lumineux. Le mécanisme de la respiration, L'individu, soumis à une suite sans fin de de l'alimentation, de la physiologie en général, ce transformations, est emporté dans un plus vaste sont les souffles qui vont là où il faut: ils main- mouvement qui est celui de l'Univers : c'est la prise tiennent, développent, réparent et transmettent de conscience du temps lui-même. la vie selon un programme qui va de la naissance Le temps, en Chine, est une réalité concrète. Il à la mort, traverse les cycles diurnes et nocturnes est facile de le mesurer et même avec une remar- et celui des saisons et conduit la vie à son terme. quable précision. En fait, pour un médecin chinois, Ainsi la longévité est moins une augmentation ce qui importe le plus c'est son aspect qualitatif: démesurée de jours que le fonctionnement par- les saisons (au nombre de 5), les périodes clima- fait d'un être qui meurt en son temps. tiques annuelles (au nombre de 24), les heures du
La médecine traditionnelle chinoise Le yin et le yang Les notions de yin et de yang qui indiquent respective- Les mêmes notions sont également sous la dépendance du ment les aspects ombragés et ensoleillés d'une montagne temps : si la première moitié de l'année est yang, la deuxième sont deux concepts fondamentaux dans la philosophie chi- est yin et leur succession fait que le yang engendre le yin et noise depuis la plus haute Antiquité. réciproquement, il ne peut pas y avoir de phénomène exclu- Par extension, toutes les choses lumineuses et chaudes sivement yin ou yang dans le processus vital car cela échap- sont dites yang par rapport aux choses sombres et froides perait aux transformations et aux mouvements incessants qui sont dites yin. qui caractérisent la vie. Yang Lumineux Tiède Chaud Sec Léger Pur Monter Yin Sombre Frais Froid Humide Lourd Impur Descendre Yang Ouvrir Mouvement Générer Haut Gauche Est Sud Extérieur Yin Fermer Repos Inhiber Bas Droite Ouest Nord Intérieur jour Gt de la nuit ont chacune un rôle important du 1 qui garde néanmoins son unité. Il aspire à se dans la vie. Le temps n'est plus ainsi que la circu- réunir autour d'un pivot: 3 ; lation de l'amas des souffles, en circulation régu- - 3 va se répandre dans le ciel et ce sont les 4 sai- lière. Les textes anciens montrent la vie entière de sons, mais sur la terre ce sont les 4 directions ; la Chine réglée parle passage des saisons. De même, -ces 4 saisons et ces 4 directions vont s'ordonner le diagnostic, le traitement des maladies comme autour d'un centre pour faire tourner régulière- le reste de l'existence sont rigoureusement subor- ment les souffles et c'est l'origine du 5 ; donnés aux mêmes cycles saisonniers. Chaque sai- -l'harmonie résulte de la distribution régulière des son comporte un mois où le principe est ascen- souffles du ciel et des réactions de la terre : c'est dant, un mois où il est en équilibre et un mois où le 6, nombre des courants qui s'échangent (avec sa vigueur décroît. Le yin et le yang contrôlent ainsile 12) ; les quatre saisons, les dominant tour à tour et mar- -mais 7 est le pivot des 6 courants et l'on com- quant des moments d'équilibre (équinoxe) ou des prend alors l'importance exceptionnelle de 7 pour moments d'acmé (solstice). ordonnancer le flux de la vie ; -la suite des nombres est bien sûr illimitée ; et le À cette symbolique des souffles s'ajoute une vide, qui tient lieu aux Chinois de 0, joue bien sûr autre difficulté de compréhension de la MTC pour un rôle central. un esprit occidental : la symbolique des nombres. Les nombres sont d'un usage, là encore, avant tout qua- Une autre notion de la MTC embarrasse les Occi- litatif: dentaux : c'est la notion de « souffle pervers ». Pour -le chaos représente le 1 ; la MTC l'invasion par les souffles peruers signifie -2, c'est le couple, considéré comme la scission l'existence d'une perturbation, d'ennemis de l'in- Les catégories du yin et du yang dans le Classique Interne de l'Empereur Jaune: classification médicale • La tranquillité est yin, l'agitation est yang. - Sur le plan humain l'extérieur est yang, l'intérieur est yin. • Le yang donne la vie, le yin stimule la croissance. - Sur le plan corporel le dos est yang, l'abdomen est yin. • Le yang tue, le yin conserve. -Les dépôts (le foie, le cœur, la rate, les poumons et les • Le yang transforme le Qi, le yin parachève notre appa- reins) sont yin, les palais (la vésicule biliaire, l'estomac, le rence physique. gros intestin, l'intestin grêle, la vessie et les triples réchauf- • Le ciel est yang clair, le yin est terre sombre. feurs) sont yang. • L'eau est yin, le feu est yang. - La région située derrière les yeux est yin, les quatre • Le Qi est yang, la saveur est yin. membres sont yang. • L'Est est yang, l'Ouest est yin. - Les maladies yin se produisent dans les os, les maladies • Le soleil est yang, la lune est yin. yang dans le sang. • Ce qui part est yin, ce qui arrive est yang. - Les maladies yin se produisent dans la chair. • Ce qui est immobile est yin, ce qui bouge est yang. - Les maladies yang éclatent en hiver, les maladies yin écla- • Ce qui est retardé est yin, ce qui est accéléré est yang. tent en été.
La médecine traditionnelle chinoise Tableau des correspondances dans le microcosme humain (Selon le Huang di-Nei /ing-Su-wen) 5 agents Bols Feu Terre Métal Eau 5 organes pleins Foie Cœur Rate Poumon Reins 5 entrailles Vésicule biliaire Petit instestîn Estomac Gros intestin Vessie 5 éléments corporels Tendons Muscles Circulations Chairs Peau Os vitales (vaisseaux) Poils (moelles) 5 émotions Colère Joie Obsession Tristesse Peur Impétuosité Allégresse Réflexion 5 saveurs Acide Amer Doux Piquant Salé Acre~ 5 odeurs fiance Brûlé Parfumé Piquant Fermenté 5 sons (émis par la gorge) Cri Rire Chant Sanglot Soupir 5 liquides organiques Larmes Sueur Salive Mucus nasal Crachats 5 caractéristiques du pouls En corde En crochet En intermittence En poil En pierre 5 orifices Yeux Langue Bouche Nez Oreilles/les 2 orifices irtférie térieur ou de l'extérieur, qui va créer un désordre. se répartissent en vaisseaux yin et en vaisseaux En fait, c'est le temps qui va départager l'ortho- yang. Ils assurent la communication entre la pro- doxie ou la perversité. Ces souffles ne sont pas fondeur du corps, où sont logés les viscères, et la mauvais par eux-mêmes, mais c'est leur mouve- superficie. Ils comportent des branches profondes ment qui est mauvais, parce qu'il est intempestif, et des branches superficielles (les points d'acu- et quijoue doncun rôle dans l'apparition des mala- puncture se localisent sur ces dernières). Les méri- dies. Ils sont dits «• pervers » parce qu'ils se sont diens principaux, au nombre de douze pour chaque installés dans l'organisme à contretemps et c'est moitié du corps, vont de la poitrine aux mains, des l'opposition de deux souffles, dont l'un est ortho- mains à la tête, de la tête aux pieds et reviennent doxe et l'autre pervers, qui forme le conflit donc des pieds vers la poitrine. la maladie. Mais comme ia santé, la maladie peut Regroupés par paires, (yin et yang), ces vais- visiter tour à tour les organes dans le nycthémère seaux sont individuellement reliés à un organe plein etle médecin doit savoir le moment et le lieu conve- ou à un organe creux. Ces organes sont avant tout nables pour rameuter les souffles orthodoxes et caractérisés par leur fonction et sont les véritables régulariser les courants d'énergie. administrateurs du corps: assimilation des par- Omniprésent dans le corps et provenant aussi ties subtiles des aliments (Qï et saveurs) pour l'es- bien de l'air qu'indirectement des aliments, le Qi tomac et le petit intestin,gestion des liquides orga- parcourt le réseau des vaisseaux méridiens (Jing Mai) niques (Jin et Ye) pour le rein et la vessie, répartition en vingt-quatre heures. Les vaisseaux méridiens du Qï dans le corps pour le poumon. Tableau des correspondances dans le macrocosme (Selon le Huang di-Nei jing-Su-wen) 5 agents Bois Feu Terre Métal Eau 5 directions Est Sud Centre Ouest Nord 5 saisons Printemps Eté Eté prolongé Automne Hiver 5 planètes Jupiter Mars Saturne Vénus Mercure 5 souffles atmosphériques Vent Chaleur Humidité Sécheresse Froid 5 couleurs Vert Rouge Jaune Blanc Noir 5 animaux domestiques Coq Mouton Bœuf Cheval Porc 5 vertus Sens de l'humain Sens des rites Confiance Sens des devoirs Sagesse 5 états Naissance Croissance Maturation Récolte Conservation
La médecine traditionnelle chinoise Les points d'acupuncture. Vue de profil. « Quand une maladie est déjà déclarée et qu'alors seulement on la traite avec des remèdes, quand un désordre est déjà manifesté et qu'alors seulement on le régit, cela ne revient-il pas à creuser un puits seulement après être devenu assoiffé ou à forger des armes alors que la bataille a commencé ? Est-ce que cela ne serait pas trop tard également ? » (« Su Wen », Hi/ang Di Nei Juig - Classique Interne de l'Empereur jaune). Pour rendre compte de la vie psychique il existe Quand on compare les cinq éléments corpo- également des entités qui se répartissent entre les rels qu'utilisent les médecins chinois (tendons et divers organes pleins, tout comme les émotions : muscles, vaisseaux, chair, peau et poils, os) avec la colère fait monter le Qi comme le Qi du prin- la richesse du vocabulaire anatomique dans la temps sort de terre. Ces entités représentent en médecine occidentale et avec le nombre impres- fait les aspects les plus subtils du monde vivant. sionnant de noms des points d'acupuncture, on
La médecine traditionnelle chinoise se rend compte de la différence de regard porté tiques, atmosphériques, stress, etc.) : ces énergies sur le corps avec la priorité donnée, en Chine, aux ne sont pas perverses en elles-mêmes mais elles mouvements et aux changements par rapport à le deviennent quand elles se manifestent à contre- la description anatomique formelle... temps. Six facteurs climatiques sont en général décrits : le vent, le froid, l'humidité, la sécheresse, le feu de la terre et la chaleur. Chacune des éner- gies correspond à une saison. Encore une fois ce Nosologie, diagnostic, sont des énergies normales, mais qui deviennent outils, maladies perverses quand elles s'exercent à une saison qui n'est pas la leur ou encore sur un terrain orga- Le champ énergétique humain se présente sous nique qui est perturbé. forme de force énergétique que les Chinois appel- Les causes internes correspondent au « terrain » lent les souffles. Ces souffles naviguent sur des tra- sur lequel les influences climatiques externes jets nommés les MO organisés en méridiens princi- pourront s'exercer. Les perturbations du terrain paux et secondaires. Les trajets de ces méridiens ont peuvent être dues aux « sept sentiments » (appe- été codifiés dès les tout premiers textes anciens lés également les sept blessures de l'âme). Ce sont (Huang Di Nei Jing - Classique Interne de l'Empereur la joie excessive, la colère, les pensées obsession- jaune) rédigés vraisemblablement du ive au ne siècle nelles, la tristesse, l'affliction, la peur et les mou- avant Jésus-Christ) puis leur description a été ensuite vements d'effroi. plus ou moins simplifiée jusqu'ànos jours. En défi- Mais les perturbations du terrain peuvent aussi nitive, ce sont ces trajets simplifiés (où sont par- être dues aux excès charnels ou à d'autres per- fois seulement indiquées certaines portions por- turbations, tels que les excès alimentaires (d'ori- teuses de points d'acupuncture) qui se trouvent gine animale ou d'origine végétale, voire d'origine dans certains précis occidentaux modernes d'acu- hydrique). puncture ; les traités, mêmes actuels, de Chine font, Il faut noter l'importance de ces perturbations par contre, toujours référence aux textes originaux internes : quand la psychologie se dérange et que anciens du Huang Di Nei Jing. les passions désorganisentle bon fonctionnement Les souffles qui naviguent donc sur ces trajets physiologique, les Esprits n'opèrent plus selon la d'énergie sont soit normaux, soit pathologiques. formule du SuWen. D'où l'importance de la patho- Schématiquenient, les souffles normaux peu- logie des émotions, car elles déstabilisent, elles vent se répartir en deux grands groupes : les éner- déconcentrent, elles défont la relation au Ciel et gies héréditaires (c'est-à-dire les énergies originelles, au naturel qui entretiennent la vie. ~ Yuan, les énergies essentielles Jing, et les énergies ancestrales, Zhong) et les énergies de l'adulte. Ces dernières peuvent elles-mêmes être considérées Vers une lecture du corps soit d'une manière macroscopique (énergie Yong et Wei), soit d'une manière microscopique (le Xue Dans lamédecine occidentale c'estl'anatomie, et les souffles). la physiologie, la biochimie, la biophysique, etc. Les énergies anormales ou pathologiques cor- qui, tout au long des progrès scientifiques, ren- respondent en MTC à l'étude des énergies perverses dent compte du corps humain. Dans la MTC, la (Xie Qi). conception du corps « concret » est plus complexe. Les énergies perverses représentent l'intro- L'écriture chinoise archaïque (celle que l'on a duction d'une perturbation dans le jeu des éner- retrouvée au début sur les os, les omoplates, les gies normales. C'est son étude qui se ramène à fragments de pierre ou de bronze), sous forme de celle des causes des maladies (étiologie) avec en pictogrammes puis d'idéogrammes, désigne plus, en MTC, les mécanismes qui perturbent les quelques traits du corps ou le corps lui-même (Shen) énergies normales avec le maximum de précision le cœur (Xin), la langue (She), la colonne vertébrale (étiopathogénie). (Lui), etc. Le déchiffrement des textes nous informe L'étude des causes des maladies distingue des que sous la dynastie Zhou, l'empereur Zhou fai- causes externes (ou exogènes), des causes internes sait ouvrir les corps des victimes pour l'examen (ou endogènes) et des causes qui ne seraient ni des viscères (et même, lorsqu'il s'agissait de externes ni internes (intempérance diététique ou femmes enceintes, l'examen du fœtus). sexuelle, épuisement par surmenage ou oisiveté). L'empereur Zhou Mu Wang (à la même époque) Les causes ou perturbations externes peuvent reçut des mains d'un sage, un « automate » - modèle venir des énergies de l'environnement (clima- réduit d'un homme-, ce qui constitue la première 7
La médecine traditionnelle chinoise description anatomique d'un corps à partir d'un -l'inspection : il faut inspecter le teint du visage, modèle artificiel. la prunelle, le tronc, les membres ainsi que la langue Plus tard, dans le Ling Shu, deuxième livre du et son enduit, la vascularisation superficielle, les Nei/ing, plusieurs mesures de longueur des par- attitudes et la démarche; ties du corps humain sont parfaitement consignées : -l'interrogatoire : d'après la « Chanson des 10 ques- tête, poitrine, lombes, os, tube digestif, estomac, tions », il s'agit d'un interrogatoire précis sur les intestin grêle, gros intestin et même longueur des circonstances d'apparition des symptômes, des fac- méridiens, sont l'objet de mensurations très pré- teurs aggravants, des traitements antérieurs, les goûts cises en « cun » (1 cun = longueur d'une phalange) : pour certains aliments et certaines couleurs. On c'est dire l'intérêt dans cette période archaïque de doit questionner sur tout ce qui entre et sur tout la Chine ancienne pour l'étude du corps concret. ce qui sort du corps, sur les mouvements organiques, Mais en 1971, après des fouilles qui durèrent plu- sur les sensations internes, sur les sentiments et sieurs années, furent découverts dans un site sur le champ immense de la psychologie ; archéologique fameux les documents du Ma Wang -l'écoute: le timbre delà voix, l'écoute des bruits Dui. C'est un document présentant un texte sur respiratoires, la recherche des odeurs corporelles ; soie, préservé miraculeusement dans une tombe. -la palpation : surtout la palpation des trajets des Les publications à partir de ces recherches ont méridiens et de l'abdomen pour préciser les zones apporté une documentation clinique de premier de blocage ou de déficience ; plan, d'où l'on peut dégager plusieurs expressions - la prise des pouls : la palpation des pouls radiaux qui se rapportent à la description du corps humain : doit confirmer le diagnostic déjà constaté sur tous -l'expression Wu Zang: ce sont les cinq organes les éléments précédents. Le Classique des pouls (mai (cœur, foie, reins, rate, poumons) ; jing), rédigé au m" siècle, distingue 24 qualités du -Liu Fu : ce sont les six entrailles ; pouls, qui est examiné aux trois emplacements du -Jiu Qiao : ce sont les neuf orifices ; poignet sur le trajet de l'artère radiale. Cet exa- -Shi Er ]ie : ce sont les douze articulations ; men, détaillé et subtil, renseigne sur l'état de la -Liu )ï: ce sont les six extrémités (les quatre superficie et de la profondeur du corps, sur l'état membres, le sexe et l'anus) ; des organes, qui ont chacun leur lieu privilégié, et -Shi Yi Mai: ce sont les onze méridiens (chaque sur la nature de l'agent pathogène en cause. trajet de méridien est déjà décrit avec une très À partir de ces 4 opérations diagnostiques (pal- grande précision de caractère quasi anatomique). per, observer, écouter, interroger), S règles dia- De plus on relève toujours sur les documents gnostiques autorisent un bilan global de la situa- du MÛ Wang Dui les termes de Qi (flux d'énergie), tion pathologique. Ces 8 règles sont fondées sur Xue (sang et trajet du sang) et le]inq (essence sub- 4 « couples » : le couple vide/plein déterminera le tile et « liant » entre îes différentes parties du corps), vide du Qi par rapport à l'augmentation du Qi patho- le Ye (liquide organique) et le Shen (deuxième ton) gène, le couple biao/li (envers et endroit d'un vête- (l'activité de l'esprit). ment) déterminera la localisation pathologique Tout cela montre bien que ce premier docu- (superficielle ou profonde), le couple froid/chaud ment comporte un grand nombre de parties du détermine la nature de la perturbation et le couple corps considérées dans la civilisation chinoise yin/yang fixe les caractéristiques du déséquilibre comme uisible et concret. Toutefois, à côté des de l'organisme malade. aspects concrets du corps se rencontrent déjà des Chacune de ces étapes diagnostiques est essen- termes qui font référence aux parties non visibles tielle pour l'identification du mécanisme pathogé- du corps (par exemple les méridiens, le Qi) ou encore nique et pour conditionner le choix de la méthode des aspects qui ne sont pas manifestes. De plus, on et des moyens thérapeutiques. peut considérer qu'un nombre d'aspects visibles se trouvent associés, en permanence, avec des aspects non visibles (par exemple le Xue -sang- La thérapeutique est associé au Qi non visible qui lui donne impul- sion et mouvement). À chaque « schéma diagnostique » correspond une thérapie, au contraire de la médecine occi- dentale qui peut établir un diagnostic sans dispo- Les outils du diagnostic ser de thérapie. La thérapie repose généralement sur l'identification des constructions théoriques Le diagnostic est établi à partir des informa- de chaque maladie et sur l'identification des états tions recueillies par: morbides {signes ou syndromes visibles). 8
La médecine traditionnelle chinoise Les cinq grands principes de la thérapeutique : Les techniques thérapeutiques - le même caractère (idéogramme) s'emploie pour traditionnelles désigner l'acte de gouverner et l'acte de traiter : il signifie maintenir ou rétablir l'ordre (naturel) dans Dans la Chine et encore actuellement, la MTC associe le plus souvent plusieurs techniques thérapeutiques le corps, dans l'esprit, dans le pays, etc. ; -les techniques thérapeutiques traditionnelles sont L'aiguille (acupuncture). Longueur, diamètre et forme varient selon le but recherché; les effets de la puncture e x t r ê m e m e n t n o m b r e u s e s et en général sont liés aux modalités d'introduction, de manipulation et associées ; de reirait de l'aiguille en un point précis. La stimulation -mieux vaut prévenir que guérir: la prévention des énergies du corps est un acte complexe qui nécessite n'est pas rajoutée, elle fait partie de la MTC (mieux un long apprentissage. vaut prévenir les troubles qu'y remédier, en santé Le marteau à aiguilles. L'aiguille aux sept étoiles sert à la comme en politique) ; technique dite « fleur de prunier » et permet de renforcer - pour traiter il faut aller jusqu'à la « racine » : même l'énergie de défense de l'organisme, de traiter des dou- si un premier traitement pourrait ne s'occuper que leurs superficielles et certaines dermatoses. des « branches » (effets secondaires ou symptômes La saignée. À l'aide d'aiguilles triangulaires, elle consiste visibles). En effet la racine de la maladie, c'est le à évacuer une très petite quantité de sang au niveau de points d'acupuncture déterminés. dérèglement fondamental qui entraîne toutes les autres perturbations ; La moxibustion. L'origine de cette technique est très -l'acte thérapeutique a pour but premier de réta- ancienne. Pratiquée avec les fleurs et les feuiliéTd'armoise finement broyées, elle a pour effet de renforcer les éner- blir l'harmonie ; gies du corps et traite certaines maladies chroniques. On -enfin, le traitement doit remettre le poisson peut également utiliser des cataplasmes et des emplâtres dans l'eau pour qu'il puisse à nouveau y nager composés de plusieurs substances médicinales. de lui-même, en suivant sa nature propre et ses Les vases àfeux. Nos grands-parents employaient de manière capacités. empirique les ventouses. La MTC les utilise encore pour rétablir la circulation des énergies et traiter certains états congestifs. Les techniques thérapeutiques traditionnelles La pharmacopée. Le Materia Medica de l'empereur Shen Nong est un des quatre grands classiques de la médecine L'acupuncture traditionnelle chinoise. Rédigé avant la dynastie Han (300 Comme son nom l'indique, c'est « la théra- av. J. -C.) il énumère de nombreuses substances végétales, minérales et animales utilisées comme procédés théra- peutique qui travaille le corps par la piqûre d'ai- peutiques. On ne saurait comparer la pharmacopée chi- guille ». En fait, le terme chinois est plus complexe : noise à la phytothérapie occidentale, car la nature de la il résulte de l'addition de deux idéogrammes Zhen substance, la saveur, le iroplsme et éventuellement la toxi- etjiu: Zhen représente les aiguilles (le métal qui cité sont pour les Chinois des éléments thérapeutiques fon- mord) et Jiu représente l'action lente du feu. L'acu- damentaux, puncture comprend donc d'une part l'action des Le Qi Gong. Gymnastique « de santé » millénaire, « tra- aiguilles et, d'autre part, un procédé quilui est sou- vail sur le Qi », pour détendre le corps, rendre serein l'es- vent associé, la moxibustion. prit, concentrer la pensée, régulariser la respiration et le Qi. Basé sur la comparaison des attitudes et des mouve- Dans la moxibustion on applique sur un point ments des animaux. du corps à cauthériser des fleurs et des feuilles Le massage. C'est à la fois un traitement local de la dou- d'armoise finement broyées que l'on fait brûler leur et un traitement global d'harmonisation des énergies. lentement. Par extension, on peut désigner tout La Chine moderne associe An Mo et Tui Na (mobilisations procédé d'échauffement lent d'une zone cutanée articulaires) aux thérapeutiques traditionnelles. produit directement par un cône d'armoise appli- La diététique. Comme la pharmacopée, elle applique aux qué sur la peau ou, indirectement, par réchauffe- aliments les mêmes critères de nature, tropisme et toxi- ment d'une aiguille grâce à l'armoise placée en cité. Elle a pour effet de réharmoniser les fonctions phy- son extrémité libre (pour éviter toute brûlure on siologiques des organes. Un traitement principal sera sou- place entre la peau et la base du cône d'armoise vent accompagné d'une liste d'aliments recommandés ou une substance intermédiaire : une pelure d'ail, une proscrits. Elle obéit à la doctrine des correspondances des 5 éléments : la déficiencede chaque organe conduit à impo- tranche de gingembre ou une couche de sel). ser le profil d'un certain régime. On peut également utiliser une cigarette d'ar- La psychologie. Elle s'intègre dans l'étude de la médecine moise que l'on promène au-dessus de la peau (dans chinoise. Partie intégrante du fonctionnement organique un sens giratoire ou dans un sens d'allées et venues). il n'y a pas de séparation corps-esprit. La régulation des On peut également se servir de petits récep- énergies psychiques entre dans te cadre de l'harmonisa- tacles en métal remplis de poudre d'armoise et tion générale. La MTC est par essence psychosomatique.
La médecine traditionnelle chinoise munis de trous, que l'on promène sur la peau en général de la même manière que les cigarettes afin d'éviter tout risque de brûlure. En ce qui concerne l'acupuncture, il existe clas- siquement neuf types d'aiguille qui diffèrent par la longueur et par la forme. Leur emploi dépend de la profondeur du point d'acupuncture à atteindre et du but recherché. Le choix des points d'acu- puncture et/ou des médicaments associés est conditionné par l'analyse des symptômes. Un défi- cit de la fonction d'un organe peut amener à piquer le point de cet organe et/ou à utiliser d'autres points pour remédier aux troubles. L'histoire de l'acupuncture constitue sans aucun doute le chapitre le plus confus de l'histoire de la MTC. L'existence de l'acupuncture, c'est-à- dire de la tentative de réguler le flux du Qi dans les conduits (vaisseaux méridiens) à l'aide d'ai- guilles enfoncées dans certains points précis du corps, n'est pas attestée avant le i" siècle av. J.-C. Les fondements théoriques de l'acupuncture comme moyens d'influencer le Qi dans le corps sont vraisemblablement un pur produit de la réunification de l'Empire en 221 av. J.-C. et de l'ap- parition des nouvelles structures politico-écono- miques qui s'ensuivirent. Le fait que certains textes fondamentaux exposentles fondements de cette thérapie ne nous apprend rien quant à son Moxibustion par cigarette d'armoise, application dans la pratique quotidienne des (photo: Chassenet / BSIP) médecins: de même, on ne sait quasiment rien sur le rôle de l'acupuncture au cours des siècles suivants. D'après la littérature de la dynastie des La pharmacopée Han, l'acupuncture n'était pas censée traiter des Alors que l'acupuncture sert à maintenir ou à maladies qui s'étaient déjà déclarées. Deux sta- recouvrer la santé de l'organisme par une stimu- tues de bronze indiquant la localisation des lation de certaines fonctions, la pharmacopée chi- 657 points d'acupuncture sont décrites au début noise a visé, durant la plus grande partie de l'his- du Xe siècle, avec, comme étalon de mesure des toire chinoise, à traiter directement les signes de distances permettant de situer les points, la pha- la maladie. C'est seulement à partir du xne siècle lange médiane du majeur du malade (cun). Les points que des efforts systématiques à grande échelle visè- des vaisseaux méridiens se répartissent en 5 points rent, pendant les trois siècles suivants, à concep- Shu et en points spécifiques de méridiens. Les 5 tualiser les effets de la thérapeutique médica- points Shu (aux extrémités de chaque méridien) menteuse sur les fonctions de l'organisme. sont mis en correspondance avec les 5 agents et Comme dans beaucoup d'autres cultures, en les précis d'acupuncture indiquentles symptômes remontant à l'époque préhistorique, les premières que ces points (individuellement ou regroupés en pratiques médicales sont une très ancienne manière « prescriptions ») permettent de traiter. de soigner avec des plantes (plus ou moins vrai- Au travers de toute l'histoire, l'acupuncture resta semblablement accompagnée de techniques secondaire par rapport à la thérapie pharmaceu- diverses). Les textes anciens, antérieurs aux pre- tique, malgré une riche littérature vantant ses ver- miers écrits médicaux, mentionnent abondamment tus thérapeutiques. En 1754 elle finit par être consi- des pratiques et des recettes dites « populaires ». dérée comme une tradition qui s'était perdue et Elles se distinguent souvent mal de la sorcellerie, en 1822 elle fut même officiellement interdite. En de la magie, du chamanisme, des recettes d'ori- France, l'acupuncture fut vraiment connue grâce gine empirique dites « remèdes de bonne femme ». aux efforts de vulgarisation et à l'action de Georges Souvent propre à traiter des maladies spécifiques Soulié de Morant (1879-1955). à une région et transmise de génération en géné- 10
La médecine traditionnelle chinoise ration, l'utilisation des plantes pouvait être pour parfois aussi des extraits d'animaux ou des un clan une source de revenus non négligeable. extraits minéraux. L'ouvrage de pharmacopée chi- L'ensemble considérable de la pharmacopée chi- noise le plus complet est le Ben Zao Gang Mu, Traité noise se formera, à partir du développement de des plantes médidnaîes, écrit par Li Shi-Zhen ces connaissances, par l'enrichissement des maté- entre 1552 et 1578. Dans ce livre sont décrits riaux utilisés et par la multiplication des recettes 898 remèdes à base végétale, 1000 remèdes à base mais aussi par l'élaboration de théories et par la d'extraits animaux ou minéraux et 8160 « pres- mise en relation avec une vision de l'organisation criptions » (il a été en partie traduit dans diffé- corporelle et de son fonctionnement. rentes langues occidentales: « Materia meàica »). L'idéogramme qui signifie médecine est Yi : une Une légende montre l'empereur mythique des interprétations de cet idéogramme décrit Shen Nong qui aurait essayé successivement toutes l'image de pointes métalliques disposées comme les herbes existantes de façon à reconnaître celles dans un étui, pointes qui n'exercent aucune agres- susceptibles d'avoir une efficacité thérapeutique : sion mais vont servir, grâce à la main habile qui « en un seul jour il trouva 70 herbes toxiques ». les manie rapidement et grâce àl'action des médi- Shen Nong est passé à la postérité comme le pré- caments, à guérir le malade. Le caractère rappelle curseur vénéré de la pharmacopée chinoise. Les donc que l'action des aiguilles doit être normale- textes de Ma Wang Oui (168 av. J.-C.)-Prescriptions ment accompagnée de celle des médicaments. Ainsi pour 52 maladies, qui donnent des détails sur plus une consultation d'acupuncture, en Chine, se com- de 200 substances- constituent la première trace plète toujours par l'adjonction de produits, en géné- historique et un témoignage très impressionnant ral préparés pendant la pose des aiguilles. Ces pro- sur la science des médicaments dans la Chine duits sont le plus souvent d'origine végétale et sont antique. Les potions médicamenteuses ont été uti- Harmonie Dans le cadre des cinq mouvements l'harmonie obéit à Pour chacune des cinq catégories de mouvements, il existe deux mécanismes différents, la génération et l'inhibition. donc quatre types de relations: générer, être généré par, inhi- Lagénération, c'est le mouvementqui va nourrir, promouvoir ber et être inhibé par. et aider au développement du mouvement suivant. C'est l'ensemble de ces relations qui forme l'équilibre (« c'est L'inhibition, c'est le mouvement qui va contrôler, domi- l'ensemble des contradictions qui forme l'harmonie »). ner un autre mouvement avec un ordre d'inhibition comme il existe un ordre de génération. " Feu Sud Été Cœur Intestin grêle Bots Correspondances : interrelations Amer Est - le Feu fond le Métal Chaleur Printemps - l'Amer combat le Piquant Foie - l'Eau éteint le Feu Vésicule biliaire Terre - le Piquant combat l'Acide Acide Centre - le Métal fend le Bois Vent Été prolongé - le Salé est atténué par le Doux Rate - le Bois appauvrit la Terre Estomac - le Salé combat l'Amer Doux - la Terre absorbe l'Eau Humidité - l'Acide combat le Doux Eau - le Froid combat la Chaleur Nord - la Joie combat la Tristesse I Hiver - le Vent rend l'Humidité dangereuse Métal Rein - le Souci atténue la Peur Ouest Vessie - la Chaleur aggrave la Sécheresse Automne Salé - la Tristesse atténue la Colère Poumon Froid Inhibition - l'Humidité rend le Froid dangereux Cros intestin - la Colère combat les Soucis Piquant Génération - la Sécheresse rend le Vent dangereux Sécheresse - la Peur combat la Joie (et inversement) 11
La médecine traditionnelle chinoise Usées en premier lieu contre des maladies cau- toire de la MTC. De son vivant il était un médecin sées parles démons. Mais le Su Wen indique clai- et un alchimiste célèbre ; il a laissé à la postérité rement que la croyance dans les démons et la réus- de nombreux ouvrages et un code de déontologie site de la pharmacopée s'excluent l'une l'autre. chinois qui fait pendant au serment d'Hippocrate. Dès les premiers traités, on retrouve des indi- Ses livres les plus connus sont le Qian Jin Fang (Les cations concernant la hiérarchie des différentes Prescriptions ualant mille onces d'or) et le Qian/in Yfang classes de médicaments dans une prescription (Les Autres Prescriptions ualant mille onces d'or). Ces médicale: la classe supérieure regroupe les « sei- deux ouvrages contiennent plusieurs milliers de gneurs » (Jim) comme la racine de ginseng, gage prescriptions, classées selon leurs indications thé- de longévité. La classe inférieure est celle des « assis- rapeutiques et comportant souvent des conseils tants et collaborateurs » (Zuoghi) comme les fruits très détaillés sur la préparation des substances et de croton: elles combattent les maladies et sont sur la fabrication des médicaments (certains cha- vénéneuses. pitres sont consacrés au diagnostic par l'examen La troisième classe, intermédiaire, regroupe les des pouls et d'autres, consacrés à l'acupuncture « ministres » (Chen) : certaines seulement sontvéné- et à la moxibustion). neuses et donc ont un pouvoir de guérison, mais Il est étonnant que pendant mille cinq cents pas toutes. ans, en Chine, deux traditions médicales aient pu Sun Simiao {581-682, dynastie desTang) est une être décrites, développées et pratiquées sans se des personnalités les plus passionnantes de l'his- rencontrer: d'un côté, la médecine des corres- pondances systématiques avec l'application d'une forme d'acupuncture et de diététique inspirée des doctrines du yin et du yang et de la théorie des 5 éléments ; de l'autre côté, la médecine pharma- ceutique qui, sans aucun regard sur la doctrine des correspondances systématiques, tentait d'éta- blir des liens entre les effets des médicaments et d'innombrables symptômes ou maladies. Ce n'est qu'au xne siècle que ces deux traditions ont pu se rapprocher et constituer un savoir-faire pharma- ceutique très élaboré : des procédés de la cueillette (localisation, saisons, etc.) aux procédés de pré- paration mécanique, en passant par le mode de mise à la disposition des patients, tout a été codi- fié au long des siècles (jusque dans les années cin- quante où un effort d'explications détaillées a été fait en Chine pour nombre de remèdes). Le Qi Gong et les autres techniques physiques Elles ont toutes pour fondement une pratique particulière de la respiration que les Chinois appel- lent respiration embryonnaire, qui consiste selon Gra- net à « respirer à la manière d'un embryon en cir- cuit fermé ». La respiration n'est donc plus un phénomène purement thoracîque, elle s'étend au fonctionnement de tous les tissus et concerne en particulier les viscères qui sont alimentés, comme cela se produit chez l'embryon, par un apport d'oxy- gène peut-être relativement limité mais physio- logiquement adapté. La respiration « embryonnaire » vise, par la res- piration abdominale, au contrôle de la respiration La pharmacopée de la médecine traditionnelle chinoise. La plupart du temps, les diverses substances (végétales, viscérale et même tissulaire, ce qui assure ainsi la minérales et animales) sont utilisées en association. vie végétative. C'est en tout cas la clé de voûte des (photo : Aigus Photo/and / BSiP) exercices du Toi)i Quan dont la pratique est popu- 12
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