La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités
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La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités BANQUE DU CANADA • Revue du système financier • Décembre 2016 45 La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités Don Coletti, Marc-André Gosselin et Cameron MacDonald La structure du marché hypothécaire canadien a changé au cours de la dernière décennie : les acteurs non traditionnels, comme les sociétés de financement hypothécaire, ont gagné en importance, et cette évolution s’explique en partie par les politiques gouvernementales et par les avan- cées dans le domaine de l’informatique. Les sociétés de financement hypothécaire entretiennent avec les grandes banques une relation complexe, fondée tant sur la coopération que sur la concurrence. Si certaines banques comptent sur les sociétés de finance- ment hypothécaire pour souscrire et administrer les prêts hypothécaires émis par les courtiers, les sociétés de financement hypothécaire comptent également sur les banques pour financer leur fonds de roulement et une bonne part de leurs prêts hypothécaires. Parallèlement, les sociétés de financement hypothécaire et les banques se disputent les prêts hypothé- caires intermédiés par les courtiers. Les emprunteurs hypothécaires ont bénéficié de la présence des sociétés de financement hypothécaire, car l’intensification de la concurrence a fait baisser les taux hypothécaires et rendu le crédit plus disponible. Dans le même temps, certaines vulnérabilités du système financier se sont toute- fois accentuées. Les sociétés de financement hypothécaire présentent un risque systé- mique qui est largement atténué par le fait que la plupart des crédits hypo- thécaires qu’elles accordent sont assurés et que leurs pratiques en tant que prêteurs sont influencées par la réglementation fédérale. Néanmoins, le rendement des prêts hypothécaires consentis par ces établissements est un aspect important, parce qu’il peut grandement influer sur l’accès au financement de ces sociétés et peser à terme sur leurs capitaux limités et leur liquidité conditionnelle, surtout en cas de ralentissement prononcé de l’économie et du marché du logement. La défaillance d’une grande société de financement hypothécaire ou son incapacité à financer de nouveaux prêts perturberaient le marché hypothécaire, ce qui pourrait amplifier les effets d’un tel ralentissement. Parce que les sociétés de financement hypothécaire dépendent de l’assu- rance garantie par l’État et des programmes de titrisation publique, elles devraient être plus touchées par les effets des mesures annoncées par le gouvernement fédéral au début d’octobre que les prêteurs traditionnels comme les banques ou les caisses d’épargne et de crédit.
46 La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités BANQUE DU CANADA • Revue du système financier • Décembre 2016 Comme les sociétés de financement hypothécaire ne sont pas directe- ment soumises à la réglementation et à la supervision prudentielles, il demeure nécessaire de suivre de près l’évolution de leur modèle d’af- faires et les effets que leurs activités pourraient avoir sur les vulnérabilités du système financier. Introduction Pendant longtemps, tout le processus d’obtention d’un prêt hypothécaire au Canada, de la demande initiale jusqu’à l’administration continue du remboursement, relevait d’une des institutions soumises à la réglementa- tion et à la supervision prudentielles1. Depuis le milieu des années 1990, il s’agissait généralement d’une des six grandes banques, mais de nouveaux acteurs ont gagné en importance au cours de la dernière décennie et trans- formé le marché hypothécaire canadien2 . De nouveaux prêteurs, par exemple les sociétés de financement hypothé- caire (aussi appelées « sociétés de prêt hypothécaire »), les sociétés de placement hypothécaire et les investisseurs privés, ont accru leur présence sur le marché 3. Les sociétés de financement hypothécaire sont des institu- tions financières qui n’acceptent pas de dépôts mais souscrivent et admi- nistrent des prêts hypothécaires intermédiés par des courtiers. Ces prêts sont financés principalement par la titrisation ou par des ventes directes de crédits hypothécaires à des tiers, essentiellement les six grandes banques. Les sociétés de financement hypothécaire administrent habituellement les prêts qu’elles souscrivent ou en externalisent l’administration à d’autres sociétés de financement hypothécaire. Pour leur part, les sociétés de placement hypothécaire et les autres investis- seurs privés s’intéressent généralement aux prêts hypothécaires personna- lisés non assurés, qui ne peuvent être obtenus par les canaux traditionnels. Ces produits comprennent les prêts à risque, les prêts hypothécaires de second rang et les prêts hypothécaires à très court terme4. Les investisseurs des sociétés de placement hypothécaire prennent un plus grand risque et reçoivent donc de meilleurs rendements. Si les sociétés de placement hypothécaire et les investisseurs privés occupent encore une petite partie du marché hypothécaire résidentiel canadien, les sociétés de financement hypothécaire ont, quant à elles, pris de l’importance. Le présent rapport donne un aperçu de la place accrue des sociétés de financement hypothécaire sur le marché hypothécaire canadien. Nous analysons le modèle d’affaires des sociétés de financement hypothécaire, et décrivons la relation complexe que ces sociétés entretiennent avec les banques et les avantages qu’elles procurent aux emprunteurs. Enfin, nous évaluons comment leur présence dans la chaîne du crédit hypothécaire influe sur les vulnérabilités du système financier 5 . 1 La prépondérance des six grandes banques a commencé durant la période de consolidation qui a suivi l’adoption de la Loi sur les banques de 1992, lorsque ces établissements ont acquis presque toutes les sociétés de fiducie. Voir Freedman (1998). 2 Voir Crawford, Meh et Zhou (2013) pour une analyse approfondie du marché hypothécaire canadien. 3 Voir l’Encadré 2 dans la Revue du système financier de juin 2015 publiée par la Banque du Canada. 4 Certaines sociétés de placement hypothécaire offrent des prêts conjoints, c’est-à-dire qu’elles consentent un prêt de second rang de concert avec un prêt de premier rang accordé par un prêteur traditionnel. Bien que les frais d’intérêt soient élevés, ce produit permet aux emprunteurs dont la mise de fonds est inférieure à 20 % de ne pas avoir à contracter une assurance hypothécaire. 5 Une vulnérabilité est une condition préexistante susceptible d’amplifier les chocs et de les propager à l’ensemble du système financier, au point de faire monter le risque systémique. Voir Christensen et autres (2015) pour en savoir davantage sur l’approche adoptée par la Banque pour le suivi des vulné rabilités du système financier.
La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités BANQUE DU CANADA • Revue du système financier • Décembre 2016 47 La structure en évolution du marché hypothécaire canadien Au Canada, le processus standard pour obtenir un prêt hypothécaire rési- dentiel est relativement simple. Le plus souvent, l’emprunteur commence par déposer une demande auprès d’une banque ou d’une coopérative d’épargne et de crédit (amorce). Un dossier est monté, et l’institution évalue le risque de crédit du demandeur et la valeur de la propriété (souscription). S’il est approuvé, le prêt hypothécaire est généralement financé par les dépôts faits auprès de l’institution (financement). La même institution se charge la plupart du temps de l’administration du remboursement du prêt hypothécaire (administration). Le marché hypothécaire résidentiel canadien est encore largement dominé par les institutions traditionnelles et caractérisé par ce processus standard. Néanmoins, depuis la fin des années 1990, les sociétés de financement hypo- thécaire participent de plus en plus aux activités de souscription et d’adminis- tration des prêts hypothécaires. La Société financière MCAP, première société de financement hypothécaire au Canada, a été constituée en 1997 comme filiale en propriété exclusive de Mutual Trust (un établissement financier sous réglementation fédérale) pour gérer la division des crédits au logement du groupe. En 1998, MCAP a été détachée et constituée en entité indépendante autorisée à émettre, échanger et administrer des prêts hypothécaires pour une gamme élargie de sociétés6. Au début des années 2000, First National Income Trust (rebaptisée Financière First National) est devenue la deuxième société de financement hypothécaire à entrer sur le marché. Les deux sociétés ont connu une croissance rapide de 1999 à 2007 : l’encours de leurs prêts hypothécaires est passé de 5 à 60 milliards de dollars (part de marché d’environ 1 % à quelque 7 %). Plusieurs autres sociétés de financement hypothécaire sont apparues depuis 2007, dont la Paradigm Quest Incorporated/Merix Financial et la Corporation financière Street Capital. La part de marché globale de ces quatre sociétés de financement hypothécaire a dépassé 12 % en 2015 (Graphique 1)7. Bien que l’activité soit concentrée dans quelques grandes entités, des sociétés de financement hypothécaire de plus petite taille, notamment la Financière Radius, la Financière CMLS et la Canadiana Financial Corporation, sont aussi des prêteurs actifs. La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada a été soutenue à la fois par les politiques gouvernementales destinées à intensi- fier la concurrence sur le marché hypothécaire et par certaines avancées dans le domaine de l’informatique. Facteur plus important, l’existence de programmes d’assurance hypothécaire garantie par l’État et de programmes de titrisation publique a renforcé la viabilité du modèle d’émission puis de cession du crédit utilisé par les sociétés de financement hypothécaire. Parce qu’elle élimine le risque de crédit pour les investisseurs, l’assurance hypothécaire rehausse grandement l’attrait commercial des prêts hypo- thécaires, qu’ils soient vendus comme des prêts dans leur intégralité ou comme des instruments titrisés. Par conséquent, la vaste majorité des cré- dits hypothécaires consentis par les sociétés de financement hypothécaire 6 Renseignements tirés du site Internet de MCAP : www.mcap.com/a-propos-de-mcap/historique. 7 Les prêts hypothécaires administrés comprennent les prêts souscrits et administrés par les institutions elles-mêmes, et les prêts consentis par des sociétés de financement hypothécaire plus petites dont l’administration est confiée en sous-traitance à ces quatre établissements. Sauf indication contraire, les montants concernant les sociétés de financement hypothécaire mentionnés dans le présent rapport intègrent les données des quatre plus grandes sociétés de financement hypothécaire pour lesquelles est diffusée de l’information publique.
File information (for internal use only): 48 La montée des sociétés BANQUE DU CANADA • Last Revue de financement Chart1 Mortgages du système output: -- FR.indd 09:31:43financier hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités AM; Jul 10, •2013 Décembre 2016 Graphique 1 : Les sociétés de financement hypothécaire ont gagné une part importante du marché de la souscription des prêts hypothécaires résidentiels depuis le début des années 2000 Part de marché des quatre principales sociétés de financement hypothécaire et valeur des prêts hypothécaires qu’elles administrent Milliards $ CA % 180 14 160 12 140 10 120 100 8 80 6 60 4 40 2 20 0 0 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 MCAP (échelle de gauche) Part de marché First National (échelle de gauche) (échelle de droite) Paradigm Quest/Merix (échelle de gauche) Street Capital (échelle de gauche) Sources : rapports des sociétés de financement hypothécaire, Standard & Poor’s et calculs de la Banque du Canada Dernière observation : 2015 sont assurés, que ce soit dès le départ, pris séparément, ou après coup par l’assurance de portefeuille. Comme celles des autres prêteurs qui ont recours à l’assurance hypothécaire garantie par l’État, les pratiques de souscription des sociétés de financement hypothécaire sont soumises à des exigences fédérales qui limitent le risque de crédit porté par les contri- buables. Ces exigences sont analysées en détail plus loin, dans la section où nous examinons l’incidence des lignes directrices du Bureau du surinten- dant des institutions financières. La croissance des programmes de titrisation publique a aussi contribué au succès des sociétés de financement hypothécaire 8. L’attrait commercial accru des titres hypothécaires émis en application de la Loi nationale sur l’habitation (titres LNH) et des Obligations hypothécaires du Canada (OHC) par rapport aux prêts hypothécaires a eu une influence déterminante sur le bassin d’investisseurs des sociétés de financement hypothécaire, qui s’est élargi pour inclure les compagnies d’assurance, les caisses de retraite et d’autres gestionnaires de patrimoine. En particulier, la garantie de paie- ment ponctuel des intérêts et du capital offerte par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) a éliminé le risque de paiement pour les investisseurs achetant des titres LNH. En outre, le programme des OHC, lancé en 2001, a éliminé le risque résiduel de remboursement anticipé dans la mesure où les rentrées de fonds mensuelles fournies par les titres LNH sont converties en paiements obligataires. 8 La titrisation hypothécaire consiste à convertir des prêts hypothécaires illiquides en titres négociables. La titrisation publique constitue une source de financement économique pour les prêteurs hypothécaires. Par exemple, Mordel et Stephens (2015) estiment que l’avantage des Obligations hypothécaires du Canada en termes de coût de financement global par rapport à la deuxième option de titrisation privée la moins chère est de 28 à 51 points de base.
File information (for internal use only): La montée Chart2 Outstanding des NHA sociétés MBS -- FR.inddde financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités Last output: 09:31:43 AM; Jul 10, 2013 BANQUE DU CANADA • Revue du système financier • Décembre 2016 49 Graphique 2 : Les titres émis par les sociétés de financement hypothécaire représentent une part croissante de l’encours des titres LNH Encours des titres LNH par type d’émetteurs Milliards $ CA % 500 25 400 20 300 15 200 10 100 5 0 0 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 Prêteurs sous réglementation fédérale Sociétés de financement (échelle de gauche) hypothécaire et revendeurs Sociétés de financement hypothécaire et en pourcentage du total revendeurs (échelle de gauche) (échelle de droite) Autres (coopératives de crédit et d’épargne, compagnies d’assurance vie, etc.) (échelle de gauche) Sources : Société canadienne d’hypothèques et de logement et calculs de la Banque du Canada Dernière observation : octobre 2016 Par ailleurs, les changements apportés aux programmes de titrisation ces dernières années ont favorisé les petits prêteurs, comme les sociétés de financement hypothécaire. En 2013, la SCHL a commencé à imposer un plafond annuel sur le montant des émissions de titres LNH et fait en sorte que celles-ci soient réparties à parts égales entre les participants au pro- gramme, peu importe leur taille (SCHL, 2013). Depuis 2007, l’encours des titres LNH émis par les sociétés de financement hypothécaire ou les reven- deurs de créances hypothécaires9 est passé de 15 à 100 milliards de dollars (de 9 % à 22 % de l’encours des titres LNH) (Graphique 2). Les innovations technologiques apportées au processus d’émission et de souscription des prêts hypothécaires et à leur administration ont également joué un rôle non négligeable dans la montée des sociétés de financement hypothécaire. La souscription, par exemple, était traditionnellement une formalité qui reposait entièrement sur de la documentation papier et qui faisait intervenir de nombreux intermédiaires. Les sociétés de financement hypothécaire ont amélioré ce processus au moyen de services de gestion documentaire, d’une automatisation poussée, de systèmes sans papier hautement intégrés et de plateformes Web conviviales pour les clients. Les prêteurs qui ont réussi à mettre en œuvre ces innovations sont en mesure d’offrir de meilleurs services aux emprunteurs, et cela a également contribué à accroître la part de marché de ces sociétés. L’un des changements impor- tants est l’utilisation plus répandue d’Internet par les consommateurs pour comparer les produits et les taux d’intérêt hypothécaires. Selon les résultats de l’enquête auprès des emprunteurs hypothécaires réalisée en 2016 par 9 Les revendeurs de créances hypothécaires sont un intermédiaire de plus entre les sociétés de financement hypothécaire et les acheteurs d’instruments titrisés. Ces revendeurs sont particulièrement importants pour les petites sociétés de financement hypothécaire qui ne peuvent émettre elles-mêmes des titres hypothé- caires LNH. Parmi les cinq grands revendeurs au Canada, quatre sont des maisons de courtage des six grandes banques; l’autre, Merrill Lynch, est la filiale de courtage d’une banque étrangère.
50 La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités BANQUE DU CANADA • Revue du système financier • Décembre 2016 la SCHL, près des trois quarts des emprunteurs ont fait des recherches en ligne pour obtenir de l’information sur les différentes options et modalités des produits hypothécaires, et près de la moitié de ces emprunteurs ont consulté des sites où ils pouvaient comparer les taux d’intérêt. Les sociétés de financement hypothécaire s’en sortent très bien dans ce contexte, car leurs prix sont généralement transparents et concurrentiels. Le rôle des sociétés de financement hypothécaire sur le marché hypothécaire Dans la présente section, nous analysons plus en détail le modèle d’af- faires des sociétés de financement hypothécaire; nous décrivons la relation qu’elles entretiennent avec les courtiers hypothécaires et les banques, et les avantages qu’elles procurent aux emprunteurs hypothécaires. Il est également important de comprendre ce modèle d’affaires pour évaluer l’incidence potentielle des sociétés de financement hypothécaire sur les vulnérabilités du système financier. Le canal des courtiers hypothécaires Au Canada, lorsque les emprunteurs cherchent un prêt hypothécaire, ils essaient souvent d’obtenir un taux d’intérêt inférieur aux taux publiés par les grandes banques. Cette démarche profite aux prêteurs, qui peuvent ainsi, d’une part, tirer une marge bénéficiaire plus élevée des emprunteurs moins à même ou moins désireux de comparer ce qui leur est offert, et, d’autre part, demeurer concurrentiels auprès des emprunteurs qui obtiennent des propositions de différents prêteurs. Cette caractéristique du marché des taux hypothécaires est décrite par Allen, Clark et Houde (2014), qui montrent qu’une partie importante de la dispersion des taux hypothécaires au Canada est attribuable aux différences observées dans les efforts de prospection et le pouvoir de négociation des emprunteurs. Plutôt que de négocier individuellement leur taux d’intérêt, les emprunteurs peuvent choisir d’engager un courtier qui cherchera le meilleur taux pour eux. Allen, Clark et Houde montrent également que, parmi ce groupe d’emprunteurs, la dispersion des taux hypothécaires causée par le pouvoir de négociation est beaucoup plus limitée. Par conséquent, le marché hypothécaire canadien est pour l’essentiel segmenté entre le canal des courtiers, où les emprunteurs sensibles aux prix sont en mesure d’obtenir un taux d’intérêt concurrentiel, et le canal bancaire direct, où la capacité et la volonté de négocier des emprunteurs jouent un rôle majeur. Fait notable, d’autres facteurs que le niveau des taux hypothécaires pourraient pousser les emprunteurs à choisir le canal ban- caire direct. Par exemple, les emprunteurs peuvent attacher de l’importance aux réductions de prix qui leur sont offertes lorsqu’ils regroupent tous leurs services dans une même institution. Ils peuvent également accorder de l’importance à la commodité que leur procure la possibilité de faire toutes leurs opérations bancaires au même endroit ou juger que le coût des efforts de prospection est trop élevé. Les courtiers permettent aux emprunteurs de recevoir de multiples propo- sitions à moindre coût et facilitent également la participation de prêteurs comme les sociétés de financement hypothécaire qui n’ont pas de réseau de succursales. En conséquence, les emprunteurs qui passent par des
La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités BANQUE DU CANADA • Revue du système financier • Décembre 2016 51 courtiers tendent à avoir accès à un plus grand nombre de prêteurs poten- tiels, tant les prêteurs traditionnels que les établissements sans succursales qui traitent uniquement avec des courtiers. Caractéristiques des emprunteurs qui passent par les courtiers Dans les régions où les prix des logements sont élevés par rapport aux revenus, les emprunteurs doivent contracter de gros prêts hypothécaires. Le montant de leur emprunt risque davantage d’être restreint par les lignes directrices sur la souscription ou les règles de l’assurance hypothécaire qui plafonnent les paiements hypothécaires et les coûts de logement en fonction du revenu (exigences au titre du service de la dette). Ces emprunteurs sont donc très sensibles aux prix et plus portés à passer par un courtier afin d’ob- tenir le meilleur taux possible. Cette caractéristique transparaît dans les prêts hypothécaires assurés consentis par les sociétés de financement hypothé- caire : contrairement aux prêteurs traditionnels, ces sociétés accordent des prêts en plus grande proportion à des emprunteurs dont le ratio prêt/revenu et le ratio du service de la dette sont plus élevés (Encadré 1). La relation entre les banques et les sociétés de financement hypothécaire : coopération et concurrence Le recul de la participation directe des grandes banques à l’activité de courtage est un phénomène important qui a suivi l’arrivée des sociétés de financement hypothécaire10. La majorité des grandes banques accèdent plutôt indirectement au canal des courtiers en acquérant des prêts hypo- thécaires auprès des sociétés de financement hypothécaire ou en concluant des contrats d’impartition avec ces sociétés. Les achats de prêts hypo- thécaires prennent généralement l’une des deux formes ci-après : soit une banque (ou un autre acquéreur) s’engage au préalable à acheter des prêts hypothécaires pour un certain montant, prêts qui sont alors financés par l’acheteur lorsque la transaction est conclue; soit ces crédits hypothécaires sont financés par une société de financement hypothécaire à la conclu- sion de la transaction, puis vendus par la suite. Dans ce deuxième cas de figure, les prêts hypothécaires doivent être temporairement « hébergés » avant d’être vendus. Dans l’ensemble, environ 6 % de l’encours des crédits hypothécaires souscrits par les sociétés de financement hypothécaire sont hébergés à un moment ou à un autre, bien que des différences consi- dérables existent entre les sociétés de financement hypothécaire. Ces opérations d’hébergement sont financées principalement par des véhicules d’émission de papier commercial adossé à des actifs (PCAA) et les lignes de crédit que les sociétés de financement hypothécaire obtiennent habituel- lement auprès de plusieurs banques11. Les banques peuvent choisir, pour différentes raisons, d’externaliser l’émission et l’administration des prêts hypothécaires intermédiés par des courtiers en confiant ces missions à des sociétés de financement hypo- thécaire. Une première raison, comme nous l’avons vu plus haut, tient au fait que de nombreuses sociétés de financement hypothécaire emploient 10 Au cours de la dernière décennie, la Banque de Montréal (2007), la HSBC (2010) et la Banque CIBC (2012) se sont retirées du courtage immobilier ou y ont nettement réduit leur présence. La Banque Royale ne participe plus au courtage immobilier depuis plus de dix ans. 11 Les sociétés de financement hypothécaire utilisent, comme source de financement souple, des véhi- cules de titrisation du PCAA qui sont administrés par les grandes banques pour l’hébergement à court terme de prêts hypothécaires. Comparativement aux titres LNH et aux OHC, le financement par PCAA est relativement cher, car les sociétés de financement hypothécaire doivent déposer des garanties en espèces afin de rehausser le crédit, et verser des commissions d’engagement sur les parties non utilisées des facilités de crédit mises à disposition.
52 La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités BANQUE DU CANADA • Revue du système financier • Décembre 2016 Encadré 1 File information (for internal use only): Les Chart prêts hypothécaires 1-A - Mortgages -- FR.indd assurés souscrits par les sociétés de financement hypothécaire présentent généralement un ratio prêt/revenu et un ratio du service de la dette élevés Last output: 05/28/09 Graphique 1-A : Caractéristiques des prêts hypothécaires assurés à ratio élevé émis par les sociétés de financement hypothécaire, 2013T1-2016T3 a. Ratio prêt/revenu (%) b. Ratio du service de la dette (%) Part des émissions de prêts hypothécaires (%) Part des émissions de prêts hypothécaires (%) 8 20 7 6 15 5 4 10 3 2 5 1 0 0 0 100 200 300 400 500 600 700 0 10 20 30 40 50 Prêteurs traditionnels (banques et coopératives d’épargne et de crédit) Sociétés de financement hypothécaire Sources : ministère des Finances du Canada et Banque du Canada Dernière observation : 2016T3 Le Tableau 1-A compare les caractéristiques des emprun- En outre, comme le montre le Graphique 1-A, les prêts teurs hypothécaires médians des sociétés de financement hypothécaires assurés sont plus susceptibles de présenter hypothécaire à celles des emprunteurs qui s’adressent aux un ratio prêt/revenu et un ratio du service de la dette parti- prêteurs traditionnels (banques et coopératives d’épargne culièrement élevés lorsqu’ils sont souscrits par les sociétés et de crédit) . Cette comparaison est faite en s’appuyant de financement hypothécaire plutôt que par les prêteurs sur les crédits hypothécaires qui présentent un haut ratio traditionnels . La proportion de crédits hypothécaires émis prêt/revenu, émis pendant la période allant du premier trimestre de 2013 au troisième trimestre de 2016 1 . (suite à la page suivante) Tableau 1-A : Caractéristiques des emprunteurs D’une part, les taux des prêts en souffrance sont d’ordinaire hypothécaires médians beaucoup plus bas chez les sociétés de financement hypo- 2013T1-2016T3 thécaire que chez les prêteurs traditionnels2 . Les sociétés Sociétés de de financement hypothécaire consentent également des Prêteurs financement crédits à des emprunteurs aux revenus plus élevés, revenus traditionnelsa hypothécaire qui constituent souvent un bon indicateur de la stabilité Pointage de crédit 739 742 d’emploi . D’autre part, comparativement aux prêts hypothé- Taux de prêts en caires émis par les prêteurs traditionnels, les prêts souscrits souffrance depuis 0,28 0,14 par les sociétés de financement hypothécaire sont générale- 90 joursb (%) ment plus importants, et les coûts connexes du service de la Revenu des ménages 80 912 $ 84 404 $ (annuel) dette plus élevés par rapport aux revenus de l’emprunteur . Ratio prêt/revenu 304 357 Ratio du service de la 35,3 37,2 1 L’ensemble de données comprend toutes les émissions de prêts hypothécaires dette (%) à ratio élevé (rapport prêt-valeur supérieur à 80 %) assurés par Genworth, la a. Banques et caisses d’épargne et de crédit société canadienne d’hypothèques et de logement et Canada Guarantee . b. Taux fondé uniquement sur les prêts hypothécaires contenus dans les blocs 2 Les taux de prêts en souffrance sont un indicateur des tensions financières plutôt de titres LNH au quatrième trimestre de 2015 que des vulnérabilités . Pour une analyse plus approfondie, voir la Revue du système Sources : ministère des Finances du Canada, Société canadienne d’hypo- financier de la Banque du Canada (juin 2016, page 13) . thèques et de logement et calculs de la Banque du Canada
La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités BANQUE DU CANADA • Revue du système financier • Décembre 2016 53 Encadré 1 (suite) par les sociétés de financement hypothécaire présentant soit 22 %, sont concentrées à Vancouver et à toronto, des un ratio prêt/revenu supérieur à 450 % ou un ratio total du marchés où les ratios moyens prêt/revenu et du service de service de la dette au-dessus de 42 % est de 29 %, contre la dette sont plus importants, alors qu’elles ne concernent 18 % pour les prêteurs traditionnels3 . que 12 % des crédits hypothécaires accordés par les prêteurs traditionnels . Cela dit, même à Vancouver et à Ces résultats peuvent s’expliquer en partie par les diffé- toronto, les prêts hypothécaires consentis par les sociétés rences dans la distribution géographique des émissions de financement hypothécaire sont plus susceptibles de de prêts hypothécaires assurés à ratio élevé . Près du quart présenter un ratio prêt/revenu et un ratio du service de la des émissions des sociétés de financement hypothécaire, dette plus élevés 4 . 3 Le ratio prêt/revenu est une mesure établie tout au long du cycle qui sert à évaluer la vulnérabilité des ménages endettés . Cette mesure est particulièrement utile 4 La part des prêts hypothécaires émis par les sociétés de financement hypo- lorsque les taux d’intérêt se situent à des creux historiques et que les prix des thécaire à Vancouver et à toronto assortis d’un ratio prêt/revenu ou d’un ratio logements atteignent des niveaux record . Un ratio élevé est associé à la proba- du service de la dette élevé est de 44 %, contre 38 % dans le cas des prêteurs bilité accrue que les ménages considérés éprouvent des difficultés financières, traditionnels . Les limites de chaque ville correspondent aux bornes de la région lesquelles entraîneraient des arriérés dans le remboursement des dettes . métropolitaine de recensement définie par statistique Canada . des technologies qui ont nettement amélioré l’efficience de l’émission et de l’administration des prêts hypothécaires intermédiés par des courtiers. Ces technologies réduisent le temps requis pour prendre des décisions en matière de souscription et font baisser les coûts. Il peut donc être plus profitable pour certaines banques de confier ces activités à des sociétés de financement hypothécaire que de mettre en œuvre ces technologies à l’interne. Deuxièmement, il est plus facile pour les banques d’accroître ou de réduire le montant des prêts hypothécaires qu’elles achètent des sociétés de financement hypothécaire que de modifier le volume de leurs opérations internes. Bien que cette possibilité soit avantageuse pour une banque qui voudrait restreindre ses activités sur le marché du logement en cas de ralentissement, cette option peut constituer une vulnérabilité pour les sociétés de financement hypothécaire (ce point est analysé plus loin, dans la section que nous consacrons à la concentration des sources de finan- cement de ces sociétés). Troisièmement, les banques peuvent recourir aux sociétés de financement hypothécaire pour avoir accès aux emprunteurs dans des régions où elles sont moins présentes. Les sociétés de financement hypothécaire et les programmes de titrisation publique Les achats directs effectués par les banques représentent environ 40 % du financement des sociétés de financement hypothécaire; la plupart des prêts hypothécaires émis par ces sociétés sont cependant financés par les programmes des titres LNH et des OHC (Figure 1). Les titres LNH émis par les sociétés de financement hypothécaire ou les revendeurs de créances hypothécaires sont vendus soit directement à des investisseurs, soit à la Fiducie du Canada pour l’habitation, qui les transforme en OHC. Une partie de ces titres LNH et de ces OHC sont achetés par les grandes banques pour leurs besoins en liquidité conditionnelle, mais l’essentiel est acheté par une vaste gamme d’investisseurs non bancaires, notamment des caisses de retraite, des gestionnaires de patrimoine et des compagnies d’assurance. Par exemple, en 2015, environ les trois quarts des acquisitions d’OHC
54 La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités BANQUE DU CANADA • Revue du système financier • Décembre 2016 Figure 1 : Financement des prêts hypothécaires souscrits par les sociétés de financement hypothécaire Sources de financement estimatives au quatrième trimestre de 2015 (les flèches indiquent le mouvement des prêts hypothécaires) achetés par les banques Banques (sauf les revendeurs) 65 milliards $ prêts intermédiés Sociétés de achetés par vendus aux par les courtiers financement les revendeurs Revendeurs investisseurs Courtiers hypothécaire (SFH) 55 milliards $ 165 milliards $ Acheteurs d’OHC et de titres LNH 90 milliards $ titres LNH émis vendus aux Autre financementa par les SFH Titres LNH investisseurs 10 milliards $ 35 milliards $ a. Les autres sources de fonds comprennent le papier commercial adossé à des actifs, les lignes de crédit bancaire et les capitaux propres des sociétés de financement hypothécaire. Sources : rapports établis par les sociétés de financement hypothécaire; Standard & Poor’s; Dominion Bond Rating Service; Société canadienne d’hypothèques et de logement; et calculs de la Banque du Canada ont été faites par des investisseurs non bancaires12 . Ainsi, les activités de financement des sociétés de financement hypothécaire sont dans une large mesure réalisées hors du circuit des banques. Globalement, la relation qu’entretiennent les banques et les sociétés de financement hypothécaire est fondée à la fois sur la coopération et sur la concurrence. D’une part, les sociétés de financement hypothécaire servent d’extension aux grandes banques qui ont choisi d’externaliser certains services de crédit hypothécaire que les sociétés de financement hypothé- caire peuvent offrir avec plus d’efficience. En outre, certaines opérations des sociétés de financement hypothécaire dépendent des lignes de crédit accordées par les grandes banques. D’autre part, comme il est possible d’obtenir du financement à faible coût par l’intermédiaire des programmes de titrisation publique, les sociétés de financement hypothécaire sont en mesure de financer les prêts hypothécaires sans recourir aux banques et contribuent à renforcer la concurrence sur le marché hypothécaire. Toutefois, parce qu’elles comptent sur les programmes d’assurance hypo- thécaire et de titrisation soutenus par l’État, les sociétés de financement hypothécaire sont relativement plus vulnérables que les prêteurs tradition- nels quand certains aspects des politiques gouvernementales sont modi- fiés. En particulier, une réduction de la disponibilité de ces programmes ou une augmentation des droits toucheraient plus profondément les sociétés 12 Voir Les Trois piliers du Programme des Obligations hypothécaires du Canada (SCHL, 15 août 2016) à l’adresse www.cmhc-schl.gc.ca/fr/clfihaclin/in/obhyca/upload/canada-mortgage-bonds-fact-sheet- aug-15-2016-fr.pdf.
La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités BANQUE DU CANADA • Revue du système financier • Décembre 2016 55 Encadré 2 Répercussions des changements apportés récemment aux règles de l’assurance hypothécaire En octobre 2016, les autorités canadiennes ont annoncé des doivent satisfaire aux critères qui ne s’appliquaient aupa- changements aux règles de l’assurance hypothécaire . Ces ravant qu’aux prêts hypothécaires assurés à ratio élevé . modifications ont pour objet d’agir sur les niveaux élevés En outre, les prêts hypothécaires refinancés ne sont plus d’endettement des ménages et de contribuer à la stabilité assurables dans le cadre de l’assurance de portefeuille . Ces à long terme du marché du logement1 . Bien qu’ils ne visent changements comportent nombre d’aspects qui pourraient pas les sociétés de financement hypothécaire ni d’autres peser sur les activités des sociétés de financement hypothé- prêteurs en particulier, ces changements toucheront caire . Par exemple, la période d’amortissement maximale davantage les sociétés de financement hypothécaire et les de 25 ans qui s’applique désormais aux prêts hypothécaires banques de petite taille que les prêteurs traditionnels . assurés au moyen d’une assurance de portefeuille aurait touché 59 % des prêts couverts par ce genre d’assurance Depuis le 17 octobre 2016, tous les emprunteurs contractant consentis par les sociétés de financement hypothécaire au un prêt hypothécaire assuré à ratio élevé, à échéance fixe de cours de la dernière année, comparativement à 38 % des cinq ans ou à plus longue échéance, doivent pouvoir obtenir prêts consentis par les prêteurs traditionnels . une assurance hypothécaire à un taux d’intérêt correspon- dant au plus élevé des taux suivants : celui prévu par leur Par ailleurs, la possibilité (actuellement à l’étude) de faire contrat hypothécaire ou celui des prêts hypothécaires ordi- porter une partie des risques par les prêteurs dans le cadre naires de cinq ans publié par la Banque du Canada . toutes de l’assurance hypothécaire pourrait aussi toucher les choses égales par ailleurs, 43 % des prêts hypothécaires sociétés de financement hypothécaire de manière dispro- assurés à haut ratio qui ont été émis par les sociétés de portionnée . si les prêteurs traditionnels sont déjà habitués financement hypothécaire entre le quatrième trimestre à la gestion du risque de défaut de paiement sur les crédits de 2015 et le troisième trimestre de 2016 n’auraient pu être hypothécaires et pourraient s’adapter assez facilement au assurés aux termes des nouvelles règles, contre 27 % des partage des risques, les sociétés de financement hypo- prêts hypothécaires provenant des prêteurs traditionnels . thécaire devraient quant à elles modifier sensiblement leur modèle d’affaires pour intégrer un mécanisme de Depuis le 30 novembre 2016, les prêts hypothécaires partage des risques . En définitive, les répercussions que assurés par des prêteurs au moyen d’une assurance de la mise en commun des risques aura pour les sociétés de portefeuille ou d’un autre type d’assurance hypothécaire financement hypothécaire dépendront de la structure du discrétionnaire visant des prêts à rapport prêt-valeur faible mécanisme de partage des risques et de la réaction des 1 Pour en savoir davantage, voir Canada, ministère des finances (2016) . participants au marché . de financement hypothécaire que les prêteurs traditionnels. Les change- ments annoncés par le gouvernement fédéral au début d’octobre ont fait ressortir cette vulnérabilité (Encadré 2)13. Les sociétés de financement hypothécaire et les lignes directrices du BSIF sur la souscription Compte tenu de la montée en force des sociétés de financement hypo- thécaire, une proportion accrue des prêts hypothécaires sont désormais souscrits par des institutions qui ne sont pas directement soumises à la réglementation ou à la supervision prudentielles. Toutefois, comme la plupart des prêts hypothécaires souscrits par les sociétés de financement hypothécaire finissent par être assurés et sont soit titrisés dans le cadre des programmes des titres LNH ou des OHC, soit vendus à des prêteurs sous réglementation fédérale, ils sont visés par les lignes directrices B-20 et B-21 13 Les autres changements apportés récemment aux programmes gouvernementaux sont la hausse des droits de cautionnement pour les programmes des titres LNH et des OHC et les nouvelles règles interdisant le placement des prêts hypothécaires assurés dans des véhicules de titrisation qui ne sont pas garantis par la SCHL, comme les véhicules d’émission de PCAA (les deux modifications ont pris effet en juillet 2016).
56 La montée des sociétés de financement hypothécaire au Canada : avantages et vulnérabilités BANQUE DU CANADA • Revue du système financier • Décembre 2016 du Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF)14. Selon ces lignes directrices, les institutions financières fédérales doivent respecter les principes fondamentaux d’une souscription prudente, et les mêmes prin- cipes s’appliquent aux prêts hypothécaires achetés auprès de sociétés de financement hypothécaire. De plus, le BSIF a récemment fait le point sur ses attentes concernant la souscription des prêts hypothécaires résidentiels et des produits d’assurance hypothécaire15. Le BSIF veillera encore davantage à vérifier que les institu- tions financières fédérales observent des pratiques prudentes en matière de souscription de prêts hypothécaires, et que leurs mesures de contrôle interne et leur gestion du risque sont saines et tiennent compte de l’évolution des marchés. Plus précisément, il resserrera la surveillance qu’il exerce à l’égard de la vérification des revenus et de l’emploi des emprunteurs, de la diligence raisonnable montrée dans le cas des prêts non conformes, de la mise à l’épreuve de la capacité des emprunteurs à soutenir des chocs financiers, et des évaluations foncières. En outre, le BSIF s’attend à ce que les prêteurs et les assureurs de prêts hypothécaires sous réglementation fédérale vérifient régulièrement que leur propension à prendre des risques concorde dans une large mesure avec leurs pratiques en matière de souscription de prêts hypo- thécaires ou de produits d’assurance hypothécaire. La rentabilité des sociétés de financement hypothécaire est tributaire de la vigueur du marché hypothécaire Le contexte actuel marqué par une importante progression des prix des logements et de l’activité sur le marché hypothécaire a permis aux sociétés de financement hypothécaire d’être très rentables. En 2015, chacune des trois principales sociétés de financement hypothécaire a enregistré un taux de rendement de ses capitaux propres supérieur à 20 %. Cependant, comme il s’agit d’établissements monogammes, leurs sources de revenus sont forte- ment concentrées. En 2014 et en 2015, environ 55 % des revenus des trois principales sociétés de financement hypothécaire provenaient de la vente de prêts hypothécaires (déduction faite des commissions versées aux courtiers) ou des marges retenues sur les prêts hypothécaires titrisés. Par ailleurs, 30 % de leurs revenus provenaient des services d’administration des crédits hypo- thécaires. Ces revenus s’accumulent lentement pendant la durée des prêts hypothécaires et procurent des entrées de fonds stables aux sociétés de financement hypothécaire qui, sinon, dépendraient presque totalement des volumes d’émission de prêts. Le reste de leurs revenus (15 %) provenait de placements et d’autres sources. Les vulnérabilités du système financier associées aux sociétés de financement hypothécaire Le rôle élargi que jouent les sociétés de financement hypothécaire sur le marché hypothécaire a été à l’avantage des emprunteurs parce que la présence de ces établissements a renforcé la concurrence. Or ce rôle pourrait aussi amplifier certaines vulnérabilités du système financier. Dans cette section, nous 14 Par conséquent, les activités de presque toutes les sociétés de financement hypothécaire sont consi- dérées comme intégrées au secteur réglementé et sont donc exclues de la mesure du secteur bancaire parallèle effectuée par la Banque. Voir le rapport de Chang et autres dans la présente livraison. Résumé de la ligne directrice B-20 (www.osfi-bsif.gc.ca/fra/fi-if/rg-ro/gdn-ort/gl-ld/pages/b20.aspx); ligne directrice B-21 (www.osfi-bsif.gc.ca/Fra/fi-if/rg-ro/gdn-ort/gl-ld/Pages/b21.aspx). 15 Voir la lettre ouverte du BSIF aux institutions financières fédérales (juillet 2016), à l’adresse www.osfi- bsif.gc.ca/fra/Docs/rfmrm.pdf.
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