Le Capitole nouveau est arrivé! - Éric Etter Continuité - Érudit

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Le Capitole nouveau est arrivé! - Éric Etter Continuité - Érudit
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Continuité

Le Capitole nouveau est arrivé!
Éric Etter

Patrimoine et littérature
Number 55, December 1992, January–February 1993

URI: https://id.erudit.org/iderudit/16343ac

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Publisher(s)
Éditions Continuité

ISSN
0714-9476 (print)
1923-2543 (digital)

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Etter, É. (1992). Le Capitole nouveau est arrivé! Continuité, (55), 46–52.

Tous droits réservés © Éditions Continuité, 1992                             This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit
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Le Capitole nouveau est arrivé! - Éric Etter Continuité - Érudit
RESTAURATIOn

                                                   Le Capitole nouveau
                                                   est arrivé!
                                                                                      par Éric Etter

                                                                                                                            La rencontre de l'ancien et du
                                                                                                                            nouveau: à gauche le couronne-
                                                                                                                            ment de l'entrée de l'hôtel.
                                                                                                                            Photo: Jean-Marie Villeneuve.

     J  e revis enfin. Je suis né d'un
        c o n c e p t de l ' a r c h i t e c t e
     W.-S. Painter. La fin de mes
                                                   de son confrère québécois
                                                   Héléodore Laberge, et j'ai été
                                                   rebaptisé Capitol en 1930.
                                                                                             C'est ainsi que pourrait
                                                                                      se présenter, très succincte-
                                                                                      ment, ce monument de l'his-
                                                                                                                            résidu de fossé entre le mur de
                                                                                                                            fortification et l'édifice du
                                                                                                                            YMCA. U n e contrainte qui
     travaux de construction re-                   Abandonné en 1982 et réou-         toire culturelle de Québec, s'il      nous fait découvrir un Painter
     monte à 1904, alors que je                    vert officiellement le 21 no-      lui était possible de parler. Et il   plutôt inventif en ce qui con-
     suis baptisé l'Auditorium de                  vembre 1992, je suis aussi un      en aurait bien d'autres à racon-      cerne l'aménagement du com-
     Québec. J'ai été agrandi et                   des fleurons, si ce n'est «le»     ter. Par exemple, sa remarqua-        plexe en deux bâtiments dis-
     redécoré en 1927, sous la gou-                fleuron de la place d'Youville à   ble adaptation architecturale à       tincts, l'édifice à bureaux de
     verne de l'architecte new-                    Québec et je m'appelle désor-      l'espace restreint auquel il était    style Renouveau classique en
     yorkais Thomas Lamb, assisté                  mais le Théâtre Capitole.          confiné, alors coincé sur un          façade, sur la place d'Youville,

46   CONTINUITE NUMERO 55
Le Capitole nouveau est arrivé! - Éric Etter Continuité - Érudit
caractérisé par un arrondi inci-     d'Youville au lobby, créant       d'inspiration classique et son     L'effervescence culturelle de la
tant le piéton à converger na-       ainsi un achalandage constant     allure beaux-arts, le nouvel       fin des années 20, l'avènement
turellement vers l'allée qui         du matin au soir, une anima-      Auditorium de Québec appa-         et la populatité croissante du
conduisait à l'entrée de la salle    tion des lieux soutenue par les   raît comme un des très beaux       cinéma muet imposèrent rapi-
de spectacles, soit le deuxième      espaces commerciaux latéraux.     exemples architecturaux de         dement l'idée d'une salle de
bâtiment situé en retrait de la      L'élancement monumental de        théâtres, bien adapté au lieu      cinéma polyvalente. En 1927,
place d'Youville, plus volumi-       la volumétrie du bâtiment         parmi tous ceux construits en      T h o m a s Lamb, c o n s i d é r é
neux, qui contraste par sa so-       donnant sur place d'Youville      Amérique du Nord entre 1890        comme le spécialiste américain
briété. Pour relier ces espaces      est accentué par les dégage-      et 1930.                           numéro un en architecture de
fonctionnels, un corridor inté-      ments aménagés le long du                Si le Théâtre Capitole se   salles de spectacle, est mandaté
rieur a également été construit.     rempart du bastion Saint-Jean     faisait narrateur, il pourrait     par la compagnie Famous
Avec ses alcôves latérales, ce       et du mur mitoyen du YMCA.        aussi disserter longuement sur     Players pour e n t r e p r e n d r e
corridor reliait l'entrée du carré   Avec sa façade ornée de motifs    sa première métamorphose.          l'adaptation de l'Auditorium
                                                                                                          aux exigences du temps. As-
                                                                                                          sisté de l'architecte québécois
                                                                                                          Héléodore Laberge, Lamb s'at-
                                                                                                          taque donc à la rénovation du
                                                                                                          complexe de la place d'You-
                                                                                                          ville. Parmi les travaux ma-
                                                                                                          jeurs alors entrepris, mention-
                                                                                                          nons l'agrandissement de la
                                                                                                          salle, l'ajout des équipements
                                                                                                          cinématographiques et d'un
                                                                                                          grand orgue muni de 3 5 jeux, la
                                                                                                          modification du corridor du rez-
                                                                                                          de-chaussée de l'édifice à bu-
                                                                                                          reaux pour le relier au foyer de
                                                                                                          la salle de spectacle et la créa-
                                                                                                          tion d'une succession d'espa-
                                                                                                          ces communiquant entre les
                                                                                                          deux bâtiments. Toutefois, se-
                                                                                                          lon l'étude du bureau d'archi-
                                                                                                          tectes Denis Saint-Louis et as-
                                                                                                          sociés, chargé des plus récents
                                                                                                          travaux de restauration qui
                                                                                                          viennent de se teminer, le trai-
                                                                                                          tement architectural extérieur
                                                                                                          des agrandissements et des
                                                                                                          ajouts de 1927 a été quelque
Le côté est de l'ensemble
pendant les travaux.
Photo: Jean-Marie Villeneuve.

Perspective du côté est,
vue des Remparts.
Photo: Jean-Marie Villeneuve.

                                                                                                                      NUMÉRO 55 CONTINUITÉ       47
Le Capitole nouveau est arrivé! - Éric Etter Continuité - Érudit
Plan d'une chambre.
                                                                                          (Bernard S. Gagné),
                                                                                          Denis Saint-Louis et associés.

                                                                                          se métamorphose en véritable             dial de l'UNESCO, ait été re-

                          m                                                               centre de la vie culturelle de           connu comme monument his-

\w \
                                                                                          Québec, avec la construction             torique d'envetgure nationale
                                                                                          du palais Montcalm et du ci-             par le Gouvernement fédéral
                                                                                          néma de Paris, pour lequel on            et qu'il ait été inscrit au regis-
                                                                                          abat une travée du voisin ouest          tre des biens culturels du Gou-
                                                                                          du Capitol, le YMCA. Cette               vernement du Québec à titre
\ —               \                M                  ' ' \ \ m lulu^n.
                                                                       ik
                                                                                          dernière construction rompt le
                                                                                          dialogue entre les deux édifices
                                                                                                                                   d'immeuble de classement su-
                                                                                                                                   périeur, il subit malgré tout de
\\ < \                «        \i i l          fÉ
IL =J                                                 \ V9I-
                                                                                          à cause de l'érection d'un mur
                                                                                          mitoyen aveugle.
                                                                                                  Ce qui n'empêche pas le
                                                                                                                                   nombreux outrages jusqu'à ce
                                                                                                                                   qu'on le reprenne en main. Et
                                                                                                                                   le temps ne s'avère pas le seul
                                                                                          Capitol de vivre des moments             responsable...
                                                                                          prestigieux en accueillant                         Après l'abandon d'un
                                                                                          pendant près de 40 ans les plus          projet de centre commercial
                                                                                          grands noms de la scène inter-           en 1988, nous devrons atten-
                                                              i
                                                                  fTX                     nationale. Il suffit de penser à         dre le 22 mars 1990 avant d'en-
                                                                                          Gérard Philippe, Louis Jouvet,           t r e v o i r la r e n a i s s a n c e du
  H T a j!                                                         o                      M a u r i c e C h e v a l i e r , Yves   Capitol. C'est en effet à cette
  II V Y                                                                                  Montand ou Gilbert Bécaud,               date que trois promoteurs,

      /      \
                                                                  IP                      pour n'en citer que quelques-
                                                                                          uns. Le grand maître du sus-
                                                                                          pens, Alfred Hitchcock, y a
                                                                                                                                   MM. Guy Cloutier, Michel
                                                                                                                                   Rodrigue et Jean Pilote, regrou-
                                                                                                                                   pés sous la raison sociale la
                                                                                          également présenté en grande             Société du Théâtre Capitole,
                                                                                          première mondiale le film inti-          acquièrent le complexe. Tous
                                                                                          tulé La loi du silence.                  trois issus du milieu du specta-
                                                                                                  Pendant plus de 70 ans,          cle, ils proposent un projet
                                                                                          le Capitol fait les beaux jours          multifonctionnel qui prévoit
                                                                                          de la vie artistique de la Vieille       une salle de spectacle de 1 400
                                                                                          Capitale en présentant toute             places, un restaurant et un hô-
                                                                                          une variété de spectacles, du            tel de 40 chambres, auxquels se
           peu délaissé et laisse à désirer.          thétique. De la nouvelle en-        théâtre conventionnel au ci-             greffent un studio de produc-
           Ainsi, l'agrandissement de la              trée, maintenant située sous        néma, en passant par les tours           tion audiovisuelle et des bouti-
           salle s'est fait en rupture avec           l'arcade de l'édifice à bureaux,    de chants, opéras ou opérettes,          ques. Le budget du projet est
           le traitement architectural                le spectacteur accède aux gui-      concerts et galas.                       alors évalué à 12 600 0 0 0 $ .
           existant, tandis que de simples            chets par un corridor qui se                Dans les années 70, l'ar-                   Vingt mois plus tard, les
           coques de brique abritent le               prolonge vers le lobby, soit une    rivée de nouvelles salles de             travaux peuvent commencer,
           lobby et le foyer ajoutés. Il y a          pièce symétrique flanquée de        spectacle et de cinéma, dont le          les trois paliers de gouverne-
           fort à parier qu'en plus des               colonnes. Il se dirige ensuite      Grand Théâtre de Québec, aux             ment ayant non seulement ac-
           courts délais de réalisation et            vers le foyer oval, aux dimen-      technologies qui correspon-              quiescé à ce projet, mais aussi
           du contexte économique, l'in-              sions impressionnantes, orné        dent beaucoup mieux à l'évo-             décidé d'y contribuer en ar-
           térêt de Lamb pour les inté-               d'un escalier monumental et         lution des goûts du grand pu-            gent sonnant, soit une somme
           rieurs a c o n s i d é r a b l e m e n t   de loggias. Du foyer, on accède     blic et les réaménagements ur-           cumulative qui représente à ce
           influencé ce p a r t i pris.               directement à la salle ou, par      bains importants qui transfor-           jour quelque cinq millions de
           D'ailleurs, l'aménagement des              l'escalier, à la promenade qui      ment radicalement la physio-             dollars.
           espaces intérieurs prouve hors             mène au balcon. La salle se         nomie de la place d'Youville
           de tout doute cette affection              révèle alors dans toute sa splen-   entraînent le déclin du théâtre          Q U E LA FÊTE
           particulière de l'architecte.              deur. En 1930, l'Auditorium         du Capitol, qui cesse ses activi-        COMMENCE!
                  Tel un parcours initiati-           devient Capitol, cinéma, théâ-      tés en 1982.                                    Ainsi, après presque dix
           que, le nouvel aménagement,                tre ou restaurant, à la conve-              Bien que l'ensemble, si-         années d'abandon, durant les-
           de l'entrée à la salle de specta-          nance de chacun.                    tué dans l'arrondissement his-           quelles des vandales de tous
           cle, permet une progression                      C'est aussi durant les an-    torique de Québec répertorié             genres s'en donnèrent à cœur
           sensible vers une apothéose es-            nées 30 que la place d'Youville     sur la liste du patrimoine mon-          joie, l'illustre édifice s'apprê-

 48        CONTINUITÉ NUMÉRO 55
Le Capitole nouveau est arrivé! - Éric Etter Continuité - Érudit
tait à revivre. Et pour ce faire,          avait pu être à l'époque, ne         que l'on pouvait s'imaginer la     langage architectural inhabi-
les architectes Denis Saint-               seraient-ce que les plaques          beauté du lieu malgré la glace     tuel. Nous ne voulions pas
Louis et associés devaient sur-            d'identification des anciens         sur les planchers, les plâtres     recréer des allures de musée
monter un défi de taille, soit             locataires de l'édifice à bureaux,   dégarnis et ébréchés. La fonc-     d'époque. Au contraire, il
exécuter les travaux en moins              la présence de l'orgue et de sa      tion de théâtre avec toutes les    s'agissait de recréer un envi-
d'un an: «Les contraintes ma-              soufflerie, la salle elle-même       connotations qui en découlent,     ronnement architectural évo-
jeures que nous avons connues              avec toute sa richesse. Et puis,     les événements, l'attachement      cateur de théâtralité. Il fallait
relèvent essentiellement de                il y avait aussi un peu de tris-     du public, cela était également    que la vieille personne puisse
l'échéancier, car il a fallu exé-          tesse, vu l'état de détéroration     stimulant. Donc en lisant l'his-   continuer à émouvoir et à
cuter le projet en douze mois; il          et d'abandon dans lequel se          toire de ce théâtre, en considé-   s'émouvoir en chansons dans
fallait tout faire en même                 retrouvait l'édifice. Je le com-     rant l'ensemble de son évolu-      un cadre renouvelé.»
temps: plans, devis et sur-                pare un peu à une vieille per-       tion, nous étions à même de               Ce qui se traduit con-
veillance progressive de la                sonne ridée qui ne croit plus        saisir que nous pouvions inter-    crètement dans le parti archi-
construction. Quotidienne-                 que la beauté de son intérieur       venir de façon très dynamique,     tectural adopté. La restaura-
ment, on devait prévoir ce                 transcende toutes les cicatri-       originale et sensible dans un      tion des bâtiments existants
qu'on allait faire le lendemain,           ces et les rides. Ce qu'il y avait   complexe où l'on pouvait           respecte leurs caractéristiques
et ce, jusqu'au parachèvement.             d'inspirant dans le projet, c'est    émouvoir et évoquer dans un        architecturales évolutives tout
C e qui veut dire plus de
300 feuilles de plans d'archi-
tecture pendant douze mois,
avec des annotations fréquen-
tes pour signifier à l'entrepre-
neur d'exécuter une partie des
travaux et d'en réserverd'autres
pour les détails d'exécution à
venir.»
        Denis Saint-Louis révèle
que l'aspect multifonctionnel
du projet a également eu ses
contraintes, car il comporte
trois plans distincts en ce qui
concerne le Code du bâtiment:
« Il a fallu travailler deux codes
applicables en tenant compte
de la compartimentation des
différents blocs fonctionnels du
complexe et de leurs caracté-
ristiques de construction.»
        Cela sans compter tout
le t r a v a i l que r e p r é s e n t e
l'intégration d'éléments con-
temporains à l'ensemble exis-
tant. Une question de pratique
professionnelle, bien entendu,
mais qui nécessite aussi une
approche dynamique et sensi-
ble à la restauration et au
recyclage d'édifices historiques.
Denis Saint-Louis nous la ré-
sume ainsi: «Ce qui nous a gui-
dés, c'est la fonction et le décor
historique du lieu même. Lors-
que le client nous a demandé si
le projet nous intéressait, nous
avons accepté parce que nous
avons cru au potentiel excep-
tionnel du lieu et à la formule
d'exploitation qu'envisageait
le client. Même s'il était aban-
donné, le Capitol avait quel-
que chose d'émouvant de par
l'espèce de réminiscence pré-              Le balcon.
sente dans les traces de ce qu'il          Photo: Jean-Marie Villeneuve

                                                                                                                              NUMÉRO 55 CONTINUITÉ     4M
Le Capitole nouveau est arrivé! - Éric Etter Continuité - Érudit
L'œuvre du temps.
                                                                           Photo: Jean-Marie Villeneuve.

                                                                           vivante que dans une période         les 40 chambres étant insuffi-
                                                                           restreinte, tout comme la salle      sant dans l'ancien édifice à
                                                                           de spectacle, où les représenta-     bureaux, nous avons construit
                                                                           tions ne durent en général que       des étages additionnels au-des-
                                                                           deux ou trois heures. En ame-        sus du lobby et du foyer, tout en
                                                                           nant la fonction "hôtel" et          prenant soin de bien les préser-
                                                                           "bistro", on générait une clien-     ver en place. Ainsi, vu de la rue
                                                                           tèle et des activités qui allaient   d'Auteuil, l'ensemble apparaît
                                                                           animer constamment le com-           désormais comme une succes-
                                                                           plexe, avec tout le va-et-vient      sion de façades sun rue, dotées
                                                                           qu'un hôtel et un bistro peu-        d'un langage individuel, mais
                                                                           vent susciter. Par conséquent,       cohérent.»
                                                                           on sentirait une présence régu-             U n point intéressant à
                                                                           lière et une vie dans ce com-        relever est l'aménagement de
                                                                           plexe. Il ne faut jamais oublier     l'hôtel et du bistro, empreint
                                                                           que le théâtre se situe à l'ar-      de théâtralité, suggérant le
                                                                           rière et que la façade monu-         double jeu. Le client ou le visi-
                                                                           mentale sur le carré d'Youville      teur, à la fois acteur et figurant,

     en les adaptant aux nouvelles
     exigences fonctionnelles ainsi
     qu'aux normes de contrôle cli-
     matique intérieur. L'enveloppe
     extérieure est également trai-
     tée selon le même principe.
            Quant aux espaces inté-
     rieurs, la salle de spectacle
     conserve en très grande partie
     l'allure de son décor des an-
     nées 30. Les adaptations scéni-
     ques, technologiques et norma-
     tives s'inscrivent discrètement
     dans ce cadre, sans toutefois
     être complètement occultées.
     L'ameublement et l'éclairage
     de la salle répondent aux be-
     soins techniques de la produc-
     tion actuelle. Le parterre s'or-
     ganise désormais en paliers
     meublés de banquettes et de
     tables pour permettre un ser-
     vice de restauration pendant
     les spectacles.
            Les espaces de l'ancien
     édifice à bureaux sont réamé-                                                                              Une idée de l'ampleur des travaux
     nagés en hôtel particulier.        au sein de ce complexe. Dans       a toujours abrité des bureaux.       dans la salle de spectacle.
     L'aménagement intérieur af-                                           Le soir, on voulait que l'acti-      Photo: Jean-Marie Villeneuve.
                                        ce cas, la réponse de l'archi-
     firme un caractère résolument      tecte s'avère éclairante: «Pour-   vité y soit constante, qu'il y ait
     contemporain quoique inspiré       quoi un hôtel au lieu de bu-       une espèce de fusion, une ri-
     par la théâtralité initiale du     reaux? Parce que la fonction       chesse d'occupation qui soit
     complexe. O n pourrait s'inter-    "bureau" est une fonction          aussi apportée par la fonction
     roger sur la présence de l'hôtel   morte. C'est-à-dire qui n'est      "hôtel". L'espace requis pour

SO   CONTINUITE NI 'MERl ) 55
Le Capitole nouveau est arrivé! - Éric Etter Continuité - Érudit
accède à l'hôtel par l'ancienne     valeur considéré, nous nous
     alléeconduisant à l'auditorium.     sommes toutefois inspirés de
     Ce passage, converti en hall        l'idée des architectes de l'épo-
     d'hôtel, est suggéré comme tel      que, c'est-à-dire la progression
     et s'érige avec sa nouvelle fa-     des couleurs plus pastel dans
     çade vitrée. Les murs latéraux      les espaces où l'on rentre pour
     ducorridoretduvestibule con-        aller vers des couleurs plus ri-
     tigusauhalld'hôtel etau bistro      ches en direction de la salle,
     ont été ajourés. Lorsqu'on cir-     comme unegradation,uncres-
     culedanscesespaces,ona l'im-        c e n d o . N o u s avons d o n c
     pression d'être sur une scène       changé complètement la pa-
     où se côtoient visuellement         lette des couleurs pour rendre
     tous lesfigurants du complexe,      la salle plus chaude, plus at-
     qu'ils soient clients de l'hôtel,   trayante et plus intéressante.
     du bistro II teatro ou public du    Cequenousavonsretenu, c'est
     théâtredéambulant danslecor-        le concept du crescendo des
     ridor central contigu. Quant        coloris. Quant au choix des
     aux chambres, situées au haut       couleurs, on peut en faire va-
     d'un escalier monumental, el-       rier la palette comme dans la
     les sont conçues comme de           toile d'un peintre. Cette idée
     véritables loges où le décor et     prévaut également pour le dé-
     les accessoires sont mis en         cor. Lorsqu'on entre dans le
     scène, recréant une ambiance        bâtiment, on arrive dans un
     qui allie lefaste à l'imaginaire.   vestibule et un corridor volon-
             De plus, le parcours        tairement moins ornés que le
     initiatique imaginépar Lamb a       lobby. Plus on va vers la salle,
     également été repris par les ar-    plus la richesse du décor
     chitectes responsables de la        s'accroît, les espaces s'agran-
'   restauration actuelle en ce qui      dissent et deviennent plus
     a trait à la progression vers la    monumentaux. La palette des
     salle.À partir d'études histori-    couleurs s'enrichit selon la
    ques très fouillées et très bien     même progression. Nous nous
    faites, l'équipe de concepteurs      sommes donc inspirés du con-
     a pu en quelque sorte jouer         cept initial et évolutif des
    avec leslieux, maistoujours en       couleurs, mais nous avons                                             Détail de la corniche.
    respectant leur esprit. «À titre     exécuté la toile selon une pa-                                        Photo:Jean-Marie Villeneuve.
    d'exemple, nous savions qu'en        lette plus chaude et plus har-
    ce qui concerne lescouleurs, il      monieuse.»
                                                                             eu préservation optimale des
    y avait plusieurs phases. Nous
                                                 Et la restauration dans     éléments structuraux, volu-
    enconnaissionslapolychromie
                                         tout cela? «Dans le cas de la       métriques et décoratifs. Les
    évolutive. Nous ne voulions
                                         restauration, nous sommes           contraintes de reproduction
    toutefois pas retourner à une
                                         quand même allésassezloin. Il       sélective de composantes his-
    polychromie d'époque sur la
                                         faut comprendre que dans le         toriques basée sur une docu-
    base de la documentation dis-
                                         casduThéâtre Capitole, beau-        mentation d'époque n'ont pas
    ponible. La restauration des
                                         coup d'éléments avaient été         réellement influencé le parti
    couleurs d'une époque est sou-
                                         détruits, pillés,vendus aux en-     de la restauration, puisque les   sieurs années, nous avons pu
    vent problématique d'un cer-
                                         chères et aujourd'hui introu-       artisans concernés par les tra-   procéder plus rapidement. Si
    taindegréd'incohérence entre
                                         vables.Maisnousavonspures-          vaux lesplusdélicatsde restau-    nous n'avions pas eu accès à la
    le décor et ses accessoires, à
                                         taurer la salle, notamment tous     ration existent toujours. Puis-   recherche historique, déjà fort
    moins d'une restauration
                                         ses plâtres, ses sorties de se-     que nous n'avons paseu à faire    bienpréparéepar le MAC, nous
    muséale d'époque. Comme ce
                                         cours, les espaces monumen-         de recherches historiques, ce     n'aurions pu atteindre la qua-
    n'était pas le parti de mise en
                                         taux avec leurs boiseries. Ilya     qui peut parfois prendre plu-     lité de ce qui a été livré.»

                                                                                                                           NUMÉRO55 CONTINUITÉ   51
Cequinefaitpasducom-        le cas du Théâtre Capitole,          comprenait la manière dont         elle valait mieux que le triste
     plexe un musée, bien au con-        d'avoir eu en MM. Cloutier,          nous abordions le tout, un as-     spectacle qu'elle leur a offert
     traire, comme tient à le préci-     Pilote et Rodrigue, des clients      pect primordial de la réussite     pendant prèsdedix ans. Grâce
     ser Denis Saint-Louis, qui cite     qui étaient très ouverts à l'ap-     du projet. Ilnous adonc confié     auxtalentsdetrois générations
     particulièrement l'exemple de       proche et au concept de la           l'ensemble delaconception de       d'architectes, et en particulier
     l'éclairage. «Nous avons            théâtralité, ce qui est très rare.   l'aménagement, depuis l'édi-       des artisans de la réussite
     redessiné l'éclairage au com-       À mon avis, c'est quasi excep-       fice même jusqu'aux moindres       d'aujourd'hui, M M . Denis
     plet,àl'exception dulustredans      tionnel. Je ne pense pas que         détailsdesescomposantes, tels      Saint-Louis, Bernard S. Gagné
     le foyer, qui est le seul article   nous puissions retrouver une         que la décoration, l'ameuble-      etJean-Gilles Lemieux, au dy-
     d'éclairage de reproduction.        fusion d'intérêts aussi dynami-      ment, l'éclairage, la signalisa-   namisme desespromoteurs ac-
     Nous l'avons voulu là comme         que entre les intentions d'un        tion, etc.»                        tuels et à la compétence des
     pièce unique, comme œuvre           promoteur et celles des archi-               De fait, le résultat est   ouvriers qui ont travaillé à sa
     d'art. Pour des raisons fonc-       tectes. Lorsque nous leur par-       spectaculaire et laréussite évi-   réfection, leCapitole nouveau
     tionnelles, esthétiques et de       lionsdu langage que nous vou-        dente. Il suffit de s'offrir une   retrouve enfin «pignon sur
     théâtralité, tout le reste de       lionsutiliserpour le traitement      visite des lieux pour immédia-     place» et,nousl'espérons, pour
     l'éclairage a été traité, amé-      des espaces, ils ont compris         tement se sentir happé, enve-      très longtemps.
     lioré et intégré. Il est contem-    l'intention, nous ont même           loppé par l'ambiance de théâ-
     porain.»                            challengeet largement appuyés        tralité, fascinante et omnipré-          Que le spectacle
             Selon les architectes,      en ce sens. C'est ce qui nous a      sente dans le complexe.                  commence!
     l'attitude du client a été un       le plus stimulés dans ce projet,             Depuis le 21 novembre,
     autrefacteur fondamental pour       en dehors des ressources du          les Québécois redécouvrent
     la revitalisation de ce projet.     complexe architectural. En           enfin le vrai visage de la place
     «Nousavonseulachance, dans          plus d'être intéressé, le client     d'Youville,et c'est heureux,car

                                                                              La couverture d'origine.
                                                                              Photo:Jean-Marie Villeneuve.

52   CONTINUITÉ NUMÉRO55
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