Le cheval au service de la rééducation relationnelle Approche éthologique
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JEAN LOUIS ROBERT Jonon 03250 Mayet de Montagne Tel 0470564059 Le cheval au service de la rééducation relationnelle Approche éthologique Mots clés : Ethologie , comportement, tonus , communication non verbale Domestication, inhibition. Résumé : Les pratiques de rééducation relationnelle utilisant le cheval sont en premier lieu un échange entre deux espèces. Sur quelles bases comportementales cette relation entre l’homme et le cheval s’est elle établie ? Quel potentiel thérapeutique représente cette relation et quelles clés nous permettent de concevoir des propositions d’interventions. QUEL POTENTIEL THERAPEUTIQUE ? L’utilisation des chevaux au service de la thérapie, de la rééducation, et de l’éducation spécialisée est aujourd’hui une pratique qui se développe . En effet l’approche des chevaux et l’équitation, qu’elle soit qualifiée de « loisir adapté", d’équithérapie ou d’hippothérapie serait susceptible de contribuer à l’amélioration physique et psychique des personnes qui en bénéficient . .
Si ce potentiel thérapeutique ou éducatif est dans certaines situations constaté , il ne reste pas moins difficile de comprendre où se cachent les mystères de cette relation « homme- cheval » dont les résultats nous surprennent . La fascination et l’attachement de l’homme au cheval (qui est bien réciproque !) et la faculté qu’ont les chevaux de déclencher en nous des excès de crainte ,d’élans affectifs, de désirs (vitesse , puissance) sont autant de pistes intéressantes pour notre recherche. Quelle pourrait être le pouvoir de guérir de cette relation « homme cheval ». ? Plusieurs options thérapeutiques sont à ce jour mises en œuvre : - la psychothérapie avec pour bases les réflexions psychanalytiques (principalement Winnicott et le concept du Holding ), -un autre axe de recherche du coté de la rééducation motrice ou sensitive est expérimenté par les kinésithérapeutes utilisant le cheval comme support à la rééducation fonctionnelle (rééducation proprioceptive , coordination etc ..) - « médiateur éducatif » le cheval est aussi le partenaire des éducateurs pour des projets de socialisation de revalorisation , de régulation du comportement . Cette réflexion sera plus particulièrement axée sur la recherche d’une action thérapeutique concernant les pathologies qui ont pour symptômes : Les troubles de la communication et de la relation . I /LA THERAPIE AVEC LE CHEVAL QUELLE SPECIFICITE ? En effet , sans les détourner ou les exclure du champs de notre recherche il faut cependant constater que de nombreux éléments permettent de penser que ces étayages théoriques ( psychanalyse entre autre ) ne sont pas spécifiques aux pratiques thérapeutiques avec des chevaux . La socialisation peut s’opérer sur les stades de foot ou au travers de nombreuses autres situations, autant que sur les chevaux L’« estime de soi » peut se travailler avec la musique, la peinture , et le « holding » de Winnicot ne peut me semble t’il , suffire à rendre compréhensible une intervention « thérapeutique »sans autre forme d’explication .Il est vrai toutefois, que la cure analytique et les pratiques psychocorporelles qui en sont issues , sont fondées sur des théories qui n’ont pas à prendre en compte une explication rationnelle et que le cheval représente un lieu de médiation idéal pour faciliter la question du transfert, du partenaire affectif etc .. .
Au delà de ces constats je me propose de rechercher plus explicitement les fondement du succès présupposé de la « rééducation relationnelle » avec pour support le cheval. Dans un premier temps nous examinerons quelle est l’histoire de cette relation de l’homme et du cheval. Dans un deuxième temps nous proposerons ce que pourraient être les indications de l’activité thérapeutique ou éducative avec les chevaux sur les bases de nos observations . I/1 LA RELATION DU CHEVAL ET DE L’HOMME UNE VIELLE HISTOIRE Un bref détour par quelques notions élémentaires d’éthologie me semble nécessaire pour appréhender la question de l’efficience de la thérapie avec les chevaux. Ceci nous permettra peut être de préciser dans quelles directions rechercher les atouts thérapeutiques , s’ils existent , pour quelles pathologies et en espérant quel résultat . Si cette approche me paraît incontournable , c’est en raison de la nature même de notre recherche : nous nous proposons d’examiner les troubles de la communication, et en l’occurrence notre support est déjà une communication , une relation entre l’homme et le cheval , ce qu’il ne faut pas oublier …. I/2 DE L’HOMME AU CHEVAL QUELLE RELATION ? L’homme est un prédateur , dont la fonction est aujourd’hui en mutation pourrait-on dire . D’abord chasseur ,cueilleur, puis éleveur et cultivateur, l’homme a toujours eu besoin pour assurer sa survie de décoder le comportement des autres espèces Certaines ont été domestiquées , d’autres sont restées « sauvages »…. Cette culture de « la relation à l’animal » a perdurée dans nos sociétés occidentales jusqu'à un passé très récent et fait partie dans la plupart des régions du monde, du bagage culturel transmis aux hommes dès leur naissance . Domestiqué cela veut dire quoi ?
Chaque individu au sein de son espèce doit sa survie à sa capacité « innée et acquise » à reconnaître les sources de danger et de satisfaction à ses besoins . Le cheval d’abord proie pour l’homme comme pour d’autres prédateurs , est ainsi dés sa naissance grâce a des sens très fins, capable de détecter toute présence inquiétante , un appareil locomoteur performant lui permet de prendre la fuite . Sa mémoire engrange ses expériences et en fonction de l’environnement dans lequel il vit , détermine son comportement , celui de ses pairs et de sa progéniture . L’homme de son coté , « super prédateur » ,doté lui aussi de sens performants , peut réfléchir , composer des stratégies, élaborer des outils pour parvenir à ses fins . Pour apprivoiser le cheval ( ou un autre animal ),il ne suffit pas de courir vite ou de frapper fort . L’observation fine de l’animal à approcher , la connaissance de ses habitudes, sont pour le moins les compétences d’un chasseur ou d’un dresseur habile . D’abord chassé , le cheval est devenu comme c’est encore le cas dans certaine région du monde , un animal vivant au sein du troupeau suivi ou suivant l’homme dans ces migrations . A se côtoyer ainsi, les deux espèces ont appris réciproquement leurs modes d’expressions physiques , à décoder leurs langages corporels . A la naissance y compris pour des espèces domestiquées , le moindre geste, le plus petit intrus est observé attentivement .les sens sont en éveils et les schèmes de comportement s’installent avec pour trame le bagage génétique (de l’espèce et de l’individu) et l’interaction avec le milieu environnant .( Il est à noté que les chevaux sauvages ne sont génétiquement pas domesticables ) La domestication peut ainsi se comprendre comme l’acquisition par une espèce des codes d’expression d’une autre espèce en l’occurrence l’homme . Pour le cheval , le comportement résulte de la recherche de la moindre pression et de la satisfaction des besoins , vivant en troupeau , le dominant a pour fonctions de protéger , de conduire ses congénères vers des ressources suffisantes L’homme devenu « dresseur »prend ainsi progressivement la place au sein de ce système de ce que les éthologues appellent l’étalon Alpha, c’est à dire à l’origine des orientations comportementales que cela soit la fuite, le repos etc .. Comment une espèce peut elle comme c’est le cas dans notre propos être réceptive à des codes d’expression qui ne sont pas les siens ?, les théories mises à jour par Lorenz sur l’imprégnation nous donne une réponse : Certaines espèces de mammifères pourraient être dotées génétiquement de la capacité de « s’imprégner d’ une double empreinte » , celle de leur espèce et celle de l’homme . C’est le cas du chien , du chat et du cheval (CF Montagner) .
I/3 UN SYSTEME COMPORTEMENTAL PROPRE A CHAQUE ESPECE Nous avons un peu rapidement expédié quelques milliers d’années de recherches et de savoirs en ce qui concerne un sujet passionnant et fort complexe, celui qui concerne l’origine de l’action elle même . IL n’est pas de mon propos de vouloir approcher des notions qui sont du domaine des neuro sciences ( neurophysiologie , neurobiologie etc) Ma démarche est plus modestement étayée par quelques observations et concerne le système tonicopostural et comportemental propre à chaque espèce au sein d’un environnement donné . La tonicité ( à comprendre au sens neurophysiologique du terme ) est l’ensemble des phénomènes qui permettent la vie , le résultat des mécanismes complexes du système neural . LE CHEVAL Pour tenir debout , pour prendre une tété, le poulain est déjà « activé » par des tensions propres à son espèce et à son capital génétique . Son environnement , sa vie sociale poursuivront la construction de sa « personnalité tonique » . Chaque individu de la même espèce en fonction des paramètres environnementaux , aura une expression et un comportement sensiblement différents . Ainsi au sein du troupeau , la communication entre les individus se fait très précisément par des jeux subtils d’intimidation , de reconnaissances olfactives visuelles , sonores, immédiatement suivis de réponses, d’actions , de mouvements que cela soit l’évitement , l’attirance , la lutte etc … Pour l’homme les choses se compliquent, puisque « super prédateur »il est doté d’un cerveau développé qui lui permet l’abstraction , le langage , l’élaboration de l’action . Ces facultés supérieures nous ont éloigné du rapport « simple » que les animaux ont à l’action (volontaire ou non ) . Entre émotions , mémoire, aptitudes sensorielles et intelligence notre cerveau ou plutôt nos cerveaux interfèrent , composent , et quelquefois dysfonctionnent . Pour ce qui nous intéresse , il est à noter que les troubles du tonus et plus largement du comportement ou de la communication sont des symptômes
que l’on peut dire « communs » à de nombreuses pathologies. Entre autres dysfonctionnements , les mécanismes d’inhibitions sans être propre à notre espèce en sont l’origine . Ainsi en est- il de la dépression qui agit sur le système de régulation tonique , de pathologies mentales telles que la psychose , ou des conséquences de déficit de tout ordre qui entravent le fonctionnement sensoriel , moteur ou cognitif que cela soit pour des raisons constitutionnelles ou le fait de traumatismes . Traumatismes affectifs , carences d’ordre environnementales ou déficits dus à des pathologies invalidantes , quelqu’en soient les raisons, les conséquences seront les tensions ( hyperactivités etc ..ou au contraire la Dépression, par le jeu des inhibitions ). Tous ces « symptomes-solutions »sont mise en place par l’organisme dans une recherche d’équilibre et débouchent sur ce que nous appelons , des « troubles de la relation » . Le cheval : une gamme de comportements toniques adaptée Elevés dans des conditions proches de celle de l’espèce en milieu naturel le cheval dispose d’un registre comportemental adapté à ses besoins : -Pâturer lui demande peu d’effort , il peut tout simplement rester des heures à l’ombre en chassant les mouches , se déplacer au pas ou au petit trot dans ce que j’appellerai un régime tonique d’entretien . -Il peut passer sans transition à un régime de survie hypertonique pour fuir , pour jouer ou se battre mais aussi pendant les périodes d’accouplement . -IL peut encore se déplacer tranquillement d’un point d’eau à un coin d’ombre ( changer de territoire) au pas ou au petit trot sans dépense d’énergie excessive . Pour le cheval dont la vie sociale est réglée par une savante hiérarchie , le rythme quotidien est ainsi dicté par la pression (ou la non pression) du dominant qui suivant les situations ,se fait guide , ou protecteur , chassant le troupeau pour le soustraire à un danger . Du statut de prédateur, l’homme quand il dresse ( ou éduque) un cheval passe à celui de dominant apportant soit le calme et la satisfaction soit la pression pour obliger au mouvement , à la fuite . L’équitation « active » , le dressage( discipline) devient alors l’utilisation plus ou moins finement comprises par l’homme des réactions du cheval à ses
demandes . La rencontre du cheval et l’homme est ainsi une rencontre de deux systèmes toniques et comportementaux qui malgré quelques centaines de milliers d’années restent marquées par leurs place respectives au sein de l’écosystème : l’homme prédateur ne peut avoir à faire au cheval qu’a la condition de prendre sa place dans son système comportemental . I/4 QUELS FONDEMEMENTS ET POUR QUELLES PRATIQUES THERAPEUTIQUES ? Nous détenons maintenant la plupart des éléments qui nous permettent d’expliquer quelle serait le potentiel thérapeutique de la relation avec les chevaux . Les thérapies avec le cheval ( hipothérapie) sont basées sur l’utilisation de chevaux « calmes »marchant au pas en régime hipotonique pourrait t’on dire Nous pouvons proposer les arguments suivant : . Pour le cheval cette attitude est le fruit d’une relation de confiance avec l’homme , c’est cette même situation que nous pouvons observer quand des chevaux au pré, n’ont aucune sollicitations et un régime tonique minimum. L’écho de ce calme est pour l’homme un signal environnemental de quiétude la réaction du cheval ou plutôt son absence de réaction ( il est « sécurisé »sous la protection d’un dominant « Alpha ») est le fruit de milliers d’années de proximité avec l’homme et d’une éducation particulière . Ce comportement traduit selon que l’on considère l’intervention de l’homme en tant que prédateur ou dominant alpha , soit l’absence de besoin pour le prédateur et donc un état de calme , soit l’absence de danger signaler pour le dominant . La relation archaïque qui d’un seul geste de l’un ou de l’autre déclenchait la fuite , la poursuite , c’est-à-dire la mobilisation de toutes les énergies de part et d’autre devient au contraire un signal d’apaisement qui s’adresse aux sphères les plus profondes de notre fonctionnement cérébral . Ce signal d’apaisement pourrait avoir pour origine un fonctionnement psychique archaïque , il suffit pour s’en convaincre d’observer , la coexistence d’espèces proies et prédatrices sur un même territoire , les unes servant aux autres comme signal d’alerte d’une intrusion au sein du système établi ou encore d’observer des chevaux paisibles sous la protection d’un mâle ou d’une jument . Nous pouvons constater auprès de différents publics une modification notoire du comportement lors de la mise à cheval, cependant compte tenu des raisons que nous avons évoquées , il est peu probable que cet effet thérapeutique soit durable .
. . A contrario, l’équitation active , c’est à dire avec l’intervention de l’homme, peut se définir comme la réactivation chez le cheval des comportements « hypertoniques » naturels .étant entendu que monter à cheval à quelque niveau que ce soit, c’est toujours du dressage . l’équitation ayant pour finalité l’acquisition du tact , ces pratiques seront fertiles en retombées sur les aptitudes relationnelles du sujet puisque mettant directement en action les mécanismes complexes de l’ajustement de l’action ( le contrôle comportemental) , et contribuent à rétablir nos capacités à communiquer avec notre environnement) Cette pratique , difficile à manier , puisqu’elle met en jeu les capacités motrices , intellectuelles et psychoaffactive du sujet peuvent générer au contraire d’une séance hipotonique des moments d’angoisse aussi bien que des instants d’euphorie . Cette alternance est bien entendu la matière première du thérapeute, qu’il lui faudra gérer au plus près de la disponibilité du couple cavalier , cheval . Bibliographie : -« La chevauchée des kids » Nutan , Reynard et Baran édition Hoebeke Paris 2002 : pour les photos . -Le comportement des chevaux Marthe Kiley-Worthington Edition Zulma 1999 -Cheval Inadaptation et handicap Edition Maloine paris 2000 -La recherche en éthologie Les comportement animaux et humains Edition du Seuil Evreux 1979 . L’enfant et l’animal Hubert Montagner Edition Odile Jacob Lisieux 2002 -Manuel de rééducation Psychomotrice J.Defontaine Maloine Paris . Revues :Pour la Science Fevrier 2003 Konrad Lorenz Lien social : decembre 1997 la zoothérapie L’intelligence émotionnelle Daniel Goleman J’ai lu Berlin 2001 Compte rendu journée éthologie équine Février 2004 Jean Claude Barrey Station de recherche pluridisciplinaire de Metz
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