Le commerce de la terreur n 4 - Amnesty International DDOOCCUUMMEENNTT PPUUBBLLIICC

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Amnesty International
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Le commerce de la terreur
         n° 4

        Index AI : ACT 31/002/2003
                     •
                   ÉFAI
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AMNESTY INTERNATIONAL                          ÉFAI
Index AI : ACT 31/002/2003

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                                               Londres, mai 2003

         Le commerce de la terreur
                  n° 4

                          SOMMAIRE

Des armes incontrôlées                                                2

Livraisons américaines d’armes légères aux Philippines                5

Plus de trois millions de morts : trafic d’armes et pillages          7
en République démocratique du Congo (RDC)
Afflux de mercenaires et d’armes en Côte d’Ivoire                    11

La position d’Amnesty International                                  14
sur les armes non discriminantes
Qui a armé l’Irak ?                                                  16

États-Unis : escalade de l’aide militaire                            20
accordée aux auteurs d’atteintes aux droits humains
La répression s’exporte au Zimbabwe                                  23

Pièces détachées pour armements : fournies par                       26
l’Europe, « made in USA » et utilisées en Israël
et dans les Territoires occupés
Réseau d’action international                                        28
sur les armes légères (RAIAL)
Le commerce des instruments de torture                               29

Des hélicoptères pour la Colombie                                    33

Maintien de l’ordre et usage des armes à feu                         34

Brésil : les femmes disent « Non aux armes ! C’est elles ou nous »   37

En point de mire                                                     40
Le commerce de la terreur n° 4                                 ACT 31/002/2003 - ÉFAI -

Des armes incontrôlées
Les puissances du G8, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe
et les États parties à l’Arrangement de Wassenaar, entre autres, avaient déclaré
qu’ils allaient faire reculer le commerce illégal des armes et œuvrer ainsi pour le
respect des droits humains. Ce numéro du Commerce de la terreur montre à quel
point la réalité est éloignée de ces promesses.

Légende photo :
Les militants d’Amnesty International donnent un carton rouge
au G8 lors d’une manifestation organisée à l’ouverture du sommet du G8 à Calgary,
au Canada, en juin 2002.
© The Calgary Sun

Campagne européenne pour le contrôle
du commerce des armes
Le 27 janvier 2003, une coalition d’organisations non gouvernementales (ONG)
de France, d’Allemagne, d’Autriche, des Pays-Bas, d’Italie, du Royaume-Uni,
d’Espagne et de Belgique, à laquelle se sont associées plusieurs sections
d’Amnesty International, a lancé à l’échelle de l’Union européenne une campagne
intitulée Surveillons les ventes d’armes : sauvons des vies !
Cette campagne a pour but d’empêcher les transferts d’armes, dès lors qu’il existe
un risque manifeste que les destinataires probables des armes en question les
utilisent pour commettre des atteintes aux droits humains ou au droit international
humanitaire, et d’obtenir la mise en place de contrôles stricts sur les contrats de
vente d’armes et d’exportation d’armes produites sous licence.

Légende photo :
Lilian Thuram, membre de l’équipe de France championne du monde de football,
s’adresse aux journalistes lors d’une conférence de presse organisée à Paris,
le 27 janvier 2003, à l’occasion du lancement de la campagne européenne
pour une réelle réglementation des transferts d’armes.
© AI France

La campagne pour le contrôle des armes porte ses fruits

Voici quelques succès récents :
• En 2002, la section italienne d’Amnesty International et plusieurs autres ONG
  d’Italie ont recueilli plus de 10 000 signatures en faveur d’un appel au
  renforcement de la loi sur les exportations d’armes, dans le souci de mieux
  protéger les droits humains. Le gouvernement italien a indiqué fin 2002 qu’il
  allait rendre plus contraignante la loi sur les armes légères et sur les ventes
  internationales d’armement.
• En 2001, les gouvernements du Royaume-Uni et de France ont annoncé
  l’adoption d’une nouvelle loi, visant à renforcer les contrôles des activités des
  marchands et des trafiquants d’armes. Cette initiative faisait suite à une
  campagne sur ce thème menée par les sections britannique et française
  d’Amnesty International, en collaboration avec des coalitions d’ONG.

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• La section slovaque d’Amnesty International a fait campagne pour que la
  Slovaquie se dote d’une loi plus satisfaisante sur les exportations d’armes.
  Bratislava a modifié au cours de l’année 2002 la législation relative aux
  permis d’exportation d’armes, accordant désormais un droit de veto au
  ministre des Affaires étrangères.
• En Belgique , après une campagne menée par plusieurs ONG, dont Amnesty
  International, le gouvernement a proposé en octobre 2002 de modifier la
  législation sur le commerce des armes. Le projet de réforme prévoit
  notamment d’interdire tout transfert d’armes à destination de pays étrangers
  incorporant des mineurs dans leurs forces armées. Il préconise également la
  stricte application du Code de conduite de l’Union européenne sur les
  exportations d’armes, notamment en ce qui concerne les armes produites sous
  licence étrangère. Le champ d’application de la loi a en outre été élargi, pour
  prendre en compte les équipements de police et de sécurité.
• En Espagne, à la suite du lobbying et de la campagne menés par une coalition
  d’ONG emmenée par Amnesty International, le gouvernement a soumis au
  Parlement, en septembre 2002, un rapport consacré aux exportations d’armes
  pendant l’année 2001. Les informations contenues dans ce rapport étaient plus
  fournies que les années précédentes. Le pays de destination des exportations
  était notamment indiqué systématiquement et les articles exportés répartis en
  sept grandes catégories. Ce rapport ne précisait toutefois pas quelles étaient
  exactement les armes envoyées à tel ou tel pays ou utilisateur final, comme
  l’avait demandé le Parlement espagnol en décembre 2001.
• Au Portugal, Amnesty International et plusieurs autres ONG ont recueilli
  95 000 signatures dans le cadre d’une pétition demandant que la législation
  portugaise relative aux transferts d’armes soit plus transparente. Cette pétition
  a été remise en 2002 au président du Parlement et une commission
  parlementaire a été mise en place, avec pour mission d’étudier les modalités
  d’une réforme législative en ce sens.

Agissez dès maintenant !

Participez à la campagne pour la réglementation des transferts internationaux
d’armes. Consultez les recommandations de la rubrique « En point de mire »
page 40 et prenez contact avec la section d’Amnesty International de votre pays.
Les coordonnées des différentes sections d’Amnesty International figurent sur
le site : http://web.amnesty.org/web/contacts.nsf

Légende photo :
Logo de la campagne européenne pour une réglementation stricte des transferts d’armes.
Cette campagne est menée en Allemagne, en Autriche, en Belgique, en Espagne,
en France, en Italie, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni.
© AI France

La justice italienne libère un marchand d’armes
Léonid Minine a été arrêté par la police italienne dans la nuit du 5 août 2000, non
loin de Milan. On a retrouvé dans sa chambre d’hôtel une pile de documents qui
décrivaient en détail, semble-t-il, les modalités d’un contrat de vente illégale
d’armes au Revolutionary United Front (RUF, Front révolutionnaire uni),
mouvement insurgé de Sierra Leone figurant parmi les plus sanguinaires
du continent africain.

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Remis en liberté

En juin 2001, Léonid Minine est inculpé de trafic d’armes par la justice italienne.
Les juges italiens déclarent toutefois qu’ils ont eu beaucoup de mal à engager des
poursuites contre un homme soupçonné d’un trafic portant sur des armes dont ni
l’origine ni la destination ne concernaient le territoire italien.
Le 17 septembre 2002, la Cour suprême italienne annonce qu’il n’existe à ses yeux
aucune base légale permettant de justifier les poursuites engagées contre Léonid
Minine, « pas même le fait que le trafic d’armes a eu lieu en violation d’un
embargo décrété par une résolution de l’ONU ». Estimant qu’elle ne peut rien faire
contre l’inculpé, dès lors qu’il « ne menace pas la sécurité intérieure » de l’État, la
Cour suprême exige du parquet qu’il fournisse davantage d’éléments à charge
permettant de le reconnaître coupable de trafic d’armes en Afrique et en Ukraine.
Le 18 décembre 2002, le tribunal de Monza conclut qu’il n’est pas en mesure de
juger Léonid Minine. Ce dernier est donc remis en liberté provisoire, en attendant
une dernière audience, qui doit avoir lieu le 17 juin 2003.
Le substitut du procureur de Monza a publiquement reproché à la Cour suprême
d’avoir déclaré que Léonid Minine n’était pas passible de poursuites sur le
territoire italien. Dans une affaire analogue antérieure, la Cour suprême avait
estimé que la loi relative au trafic d’armes s’appliquait également « aux armes
non présentes sur le territoire national et n’étant pas destinées à y pénétrer ».

Preuves à charge
Parmi les documents retrouvés en possession de Léonid Minine figuraient
notamment des contrats, des télécopies portant sur des ventes d’armes, des
catalogues d’armement et de faux certificats attestant l’identité des utilisateurs
finaux. On a également retrouvé dans sa chambre d’importantes sommes d’argent,
dont des roupies mauriciennes et des forints hongrois, ainsi que des diamants
polis pour une valeur de près de 500 000 euros.
Léonid Minine, qui est citoyen israélien, avait sur lui des passeports de l’ancienne
Union soviétique, de Russie, d’Allemagne et de Bolivie.
En décembre 2000, un groupe d’experts de l’ONU a indiqué que Léonid Minine
avait été, en mars 1999, à l’origine de la livraison au Libéria, via le Burkina Faso,
de 68 tonnes d’armes venant d’Ukraine. Ces armes étaient destinées au RUF de
Sierra Leone. L’ONU a également pu établir qu’en décembre 1998, un appareil
BAC-111 appartenant à Léonid Minine avait livré des armes au RUF depuis le
Niger, en passant par le Libéria, juste avant que les forces rebelles ne se livrent à
de nombreuses exactions à Freetown, en janvier 1999. En octobre 2001, l’ONU a
de nouveau dénoncé l’implication de Léonid Minine dans la livraison de
113 tonnes d’armes au Libéria, via la Côte d’Ivoire. Le RUF et le Libéria font
tous deux l’objet d’un embargo des Nations unies sur les fournitures d’armes
depuis, respectivement, 1997 et 2001.

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Agissez dès maintenant !

Écrivez au gouvernement de votre pays, en citant le cas de Léonid Minine comme
exemple. Demandez à votre gouvernement de reconnaître la nécessité d’un
instrument juridique international réglementant de manière stricte la vente et le
trafic des armes, et de se faire l’avocat d’un tel texte. Reprenez les
recommandations mises « En point de mire » page 40, en faisant valoir qu’un tel
instrument permettrait d’empêcher que des armes ne parviennent à des forces
comme le RUF, qui sont responsables de graves atteintes aux droits humains.
Soulignez en outre que le fait de rompre un embargo sur les livraisons d’armes
décrété par les Nations unies devrait être considéré comme « un acte illicite »
dans tous les pays.

Légende photo :
Léonid Minine © AFP

Livraisons américaines d’armes légères aux Philippines
Le gouvernement des États-Unis a récemment fourni au gouvernement philippin
du matériel militaire pour une valeur de plus de 100 millions d’euros.
Ces livraisons portaient notamment sur des hélicoptères, des avions de transport
et 30 000 fusils M16.
Ce matériel, livré au titre d’un accord conclu dans le cadre de la « guerre contre
le terrorisme » livrée par les États-Unis, est destiné à être utilisé par les forces
armées philippines dans la lutte qui les oppose depuis des années à divers
groupes armés. Il est toutefois à craindre qu’il ne serve à commettre des
violations des droits humains.
Les différents conflits qu’a connus l’archipel ont déjà donné lieu, tant de la part
des forces gouvernementales que des groupes d’opposition armés, à de graves
atteintes aux droits humains, entre autres à des homicides illégaux.

L’excellente santé du marché clandestin des armes à feu
Il existe déjà aux Philippines un marché illégal florissant d’armes légères.
On peut craindre que l’arrivée dans le pays de matériel militaire venant des
États-Unis, et notamment de nouvelles armes légères, ne débouche sur une
prolifération encore plus grande de ce type d’engins.
Que ce soit à la suite de pertes, de vols ou de reventes illégales, une partie de
l’arsenal des forces gouvernementales philippines passe aux mains de bandes
criminelles ou de groupes politiques armés.
Le très lucratif marché noir des armes de petit calibre risque de séduire plus d’un
soldat de l’armée régulière, où la solde est maigre et la discipline relâchée.
Sur l’île de Mindanao, par exemple, plus de 70 p. cent des habitants possèdent au
moins une arme à feu. N’importe qui peut s’offrir une mitrailleuse pour la modique
somme de 375 euros ou un revolver pour seulement 15 euros. Quelque 82 p. cent
des homicides sont commis à l’aide d’armes légères (78 p. cent des meurtres).

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Il est facile de se procurer des armes aux Philippines, car il existe environ
45 fabricants locaux (des paltik) qui inondent non seulement le marché national,
mais également toute la région, d’armes à feu à bas prix.

Beaucoup d’armes légères pénètrent également dans le pays en contrebande par
des « portes de service ». Certains groupes insurgés reçoivent ainsi des
cargaisons entières, qui leur sont expédiées avec la connivence de
gouvernements ou d’organisations complices. Le gouvernement chinois aurait
par exemple fait parvenir des armes à la New People's Army (NPA, Nouvelle
Armée du peuple), tandis que la Libye et la Malaisie armeraient les groupes
sécessionnistes islamistes de Mindanao.

Le gouvernement philippin a manqué de rigueur en matière de contrôle des armes
légères. Ainsi, de 1993 à 1999, environ 93 p. cent des armes récupérées lors
d’enquêtes sur des affaires pénales ne portaient aucun numéro de licence. Sur un
marché aussi peu réglementé, il est évident que les armes légères risquent avant
tout de servir à commettre des crimes violents ou d’alimenter les conflits armés.

Des manœuvres militaires d’une durée de six mois ont débuté en janvier 2002 sur
l’île de Mindanao : 650 soldats américains y participaient en qualité de
conseillers. Cet exercice avait officiellement pour but de former l’armée
philippine à la lutte « antiterroriste » contre le groupe Abu Sayyaf, une
organisation islamiste indépendantiste pratiquant l’enlèvement contre rançon.
Aux termes d’un accord de cinq ans signé en novembre 2002 par les États-Unis et
les Philippines, ce pays est devenu un « point d’approvisionnement » pour les
opérations militaires américaines.

Agissez dès maintenant !

Écrivez à l’ambassade des États-Unis dans votre pays pour faire part de votre
inquiétude quant aux récentes fournitures d’armes aux Philippines. En vous
appuyant sur les informations contenues dans cet article, rappelez au
gouvernement américain les conséquences humaines d’une prolifération des
armes dans l’archipel philippin et demandez que des contrôles draconiens soient
effectués sur l’utilisation finale des armes exportées par les États-Unis. Voir la
rubrique « En point de mire » page 40.

Légendes photos :
Un petit garçon regarde le fusil à longue portée d’un soldat philippin
sur l’île de Basilan, dans le sud des Philippines.
© AP
Destruction d’un millier d’armes confisquées, à l’occasion de la Journée pour
l’élimination des armes légères organisée à Quezon City (Philippines), en juillet 2002.
© AP

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Plus de trois millions de morts : trafic d’armes e t pillages
en République démocratique du Congo (RDC)
Plus de trois millions de civils auraient été victimes du conflit qui déchire la RDC
depuis 1998.
Les belligérants se sont livrés à des atteintes massives aux droits humains, bien
souvent en cherchant à s’assurer le contrôle des gigantesques richesses naturelles
du pays. Des atrocités ont été signalées non seulement dans la région des
gisements diamantifères de Mbuji-Mayi, mais également dans celles où se
trouvent les abondantes réserves congolaises de cobalt, de coltan (matière entrant
dans la composition des puces électroniques utilisées dans les téléphones et les
ordinateurs portables), de cuivre, d’or, de bois, d’uranium ou d’eau.
Des enquêteurs des l’Organisation des Nations unies (ONU) ont découvert des éléments
de preuve établissant un lien entre trafic des richesses naturelles et trafic d’armes.

Des « réseaux d’élites »
Un groupe d’experts de l’ONU chargé d’enquêter sur l’exploitation illégale
des ressources naturelles de la RDC parle de « réseaux d’élites » pour désigner
les groupes de politiciens, de chefs militaires et d’affairistes qui s’arrangent
entre eux pour conserver la mainmise sur l’ensemble du commerce au sein de
leurs fiefs respectifs.

Pouvoirs
L’Angola, le Burundi, l’Ouganda, le Rwanda et le Zimbabwe sont parties
prenantes dans le conflit actuel et ont tous eu, à un moment ou à un autre, des
forces sur le terrain ; à ces intervenants s’ajoutent évidemment divers groupes
d’opposition armés ainsi que les forces régulières de la RDC. Des zones entières
du pays sont, de fait, passées sous le contrôle de différentes forces armées
étrangères qui s’affrontent pour le contrôle des richesses minérales congolaises.
L’armée régulière de la RDC participe à la surveillance des concessions
d’extraction de diamants de la région de Mbuji-Mayi ; jusqu’à leur retrait de
RDC, vers le milieu de l’année 2002, les militaires zimbabwéens étaient
également impliqués dans la surveillance de ces concessions. Les soldats affectés
à cette tâche opèrent en dehors de tout cadre légal approprié et relèvent d’une
autre hiérarchie que celle des vigiles directement employés par la société MIBA,
qui exploite les gisements. Ils sont responsables de nombreuses atteintes aux
droits humains, notamment d’exécutions extrajudiciaires.
Dans les zones de la RDC occupées par les forces rwandaises ou ougandaises,
d’autres militaires contrôlent également l’accès aux régions où se trouvent
les richesses naturelles.

Des activités étroitement liées
En s’attaquant au problème des revenus illégaux qui servent à financer les trafics
d’armes, il serait possible d’accomplir un grand pas en avant dans la lutte pour
mettre un terme aux violations des droits humains qui caractérisent ce conflit.

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L’un des grands mérites du groupe d’experts de l’ONU a été d’établir les liens qui
existent entre l’exploitation des ressources minières et le trafic d’armes. Ces liens
impliquent souvent toute une ribambelle de sociétés internationales mettant en
contact des personnes dont les relations sont soigneusement dissimulées.
Les quelques exemples qui suivent, tirés des rapports du groupe d’experts de
l’ONU, montrent à quel point ces liens peuvent être complexes.

La société Avient
Les experts de l’ONU ont découvert que, dans la partie de la RDC contrôlée par
le gouvernement, une compagnie minière, Oryx Natural Resources, entretenait
d’étroites relations de travail avec Avient Air, une société qui fournit des
services et du matériel militaires, et qui a comme clients les forces armées du
Zimbabwe et de la RDC.
L’ONU a trouvé la trace d’un virement de quelque 35 000 euros, effectué en
septembre 2001, du compte détenu par la société Oryx auprès de la Banque
Belgolaise au compte de la société Avient Ltd., dont le siège est au Royaume-Uni
et qui appartient au même groupe qu’Avient Air.
En avril 2002, Avient Air a conclu la vente de six hélicoptères de combat au
gouvernement de la RDC. Dirigée par un ancien capitaine de l’armée britannique,
la firme Avient Air avait été chargée d’organiser des bombardements aériens dans
l’est de la RDC, en 1999 et 2000. Elle avait d’autre part fourni des prestations
logistiques à la société Sengamines et acheminé du matériel d’extraction pour
cette entreprise – dont une partie des capitaux sont zimbabwéens, qui est
étroitement liée à l’armée du Zimbabwe et dont Oryx Natural Resources est
actionnaire. En 1999, c’est à Avient Air que le président de la RDC de l’époque,
Laurent-Désiré Kabila, avait accordé des droits exclusifs sur deux des plus riches
concessions diamantifères du pays.

Victor Bout
Le réseau d’élites de la zone de la RDC contrôlée par le Rwanda entretient
d’étroites relations commerciales avec Victor Bout. Celui-ci est accusé par l’ONU
d’utiliser les Émirats arabes unis comme base arrière, pour son trafic illégal
d’armes et de diamants.
Des appareils appartenant à Victor Bout auraient servi à sortir du coltan et de la
cassitérite du territoire de la RDC, à apporter du matériel sur des sites d’extraction
et à transporter des troupes et des équipements militaires. Fin 2000, lors d’une
importante offensive militaire contre Pweto, en RDC, les avions de Victor Bout
ont également acheminé dans la région des hommes de l’Armée patriotique
rwandaise (APR). Cette offensive avait, selon les témoignages recueillis, donné
lieu à de très nombreuses exactions contre la population civile.
Victor Bout est également lié au réseau d’élites de la zone de la RDC contrôlée
par l’Ouganda. Ses avions partagent créneaux horaires et destinations avec ceux
de la compagnie Planet Air, qui appartient à l’épouse du général Salim Saleh,
ancien haut responsable de l’armée ougandaise, qui joue un rôle clef au sein du
réseau d’élites de la région. Planet Air aiderait Victor Bout en déposant des plans
de vol pour ses appareils. Un pilote britannique affirme avoir régulièrement
acheminé du matériel et du personnel militaires dans l’est de la RDC à bord d’un
avion de Planet Air.

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Armes à feu et diamants
Le récit qui suit montre à quel point la contrebande de diamants et le trafic
d’armes sont parfois étroitement liés en RDC. Les victimes de ces agissements
sont les innombrables civils qui sont pris au piège du conflit et dont les droits les
plus fondamentaux sont foulés aux pieds.
En octobre 2001, un groupe d’experts de l’ONU travaillant sur le Libéria a révélé
les détails d’une livraison illégale d’armes effectuée depuis une entreprise basée
en Ouganda à destination de la capitale libérienne, Monrovia. Cette livraison
faisait intervenir tout un réseau de compagnies d’aviation, de marchands d’armes
et de transporteurs.
L’ONU avait interdit toute importation d’armes au Libéria, car les autorités de ce
pays étaient soupçonnées d’aider le Revolutionary United Front (RUF, Front
révolutionnaire uni), mouvement d’opposition armé opérant en Sierra Leone
voisine. Les combattants du RUF ont commis de très nombreuses exactions
contre la population civile. On ne compte plus les meurtres, les mutilations et les
viols dont ils sont responsables.
La livraison d’armes en question portait sur un lot de mitraillettes fabriquées en
Slovaquie. Officiellement, ces armes étaient destinées à la Guinée. Or, c’est au
Libéria que s’est finalement rendu l’appareil à bord duquel elles avaient été
chargées, un Iliouchine exploité par Centrafrican Airlines, une compagnie
contrôlée par Victor Bout.
Le groupe d’experts de l’ONU a toutefois omis un détail : l’avion a fait escale en
RDC. Une enquête menée par l’International Peace Information Service (IPIS)
d’Anvers, en Belgique, a révélé qu’à son retour du Libéria, l’appareil s’était arrêté
à Kisangani, une ville du centre de la RDC.
Les registres de l’aviation civile ougandaise montrent d’autre part que,
le 25 novembre 2000, l’Iliouchine s’est posé sur l’aéroport d’Entebbe (Ouganda)
en provenance de Kisangani.
Sanjivan Ruprah est un autre personnage très impliqué dans le marché du diamants
en RDC depuis le début des années 1990. Les autorités de ce pays lui ont accordé
une concession diamantifère de 4 000 kilomètres carrés, près de Kisangani.
Sanjivan Ruprah entretient des relations étroites avec le Rassemblement congolais
pour la démocratie (RCD), un groupe d’opposition armé opérant en RDC. Il aurait
tenté d’écouler ses diamants congolais en Belgique. Il serait également très
impliqué dans des ventes illégales d’armes au Libéria.
Mukeba Muchuba a été abattu en septembre 2001 par un garde de la Société
minière de Bakwange (MIBA), alors qu’il tentait de s’introduire dans la
concession de cette société diamantifère à Mbuji-Mayi. Il avait tout juste dix-huit
ans. Un peu plus tôt, son ami Kabongo avait lui aussi été tué par un garde de la
MIBA, au moment où il sortait d’une des mines du site. Le garde aurait dit aux
personnes présentes qu’il allait tuer Kabongo, qui n’était pas armé. Après l’avoir
abattu, il aurait dit aux autres : « Voilà le sort qui vous attend tous. »
Chaque année, des dizaines de personnes sont tuées par balle dans la région de
Mbuji-Mayi. On ne compte plus les blessés. De très nombreuses personnes, dont
des enfants, sont placées en détention, sans inculpation et dans des conditions
épouvantables, par des forces de sécurité qui n’y sont pas légalement habilitées.
La plupart des victimes sont soupçonnées de prospecter illégalement sur des
concessions diamantifères.

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Frères d’armes
Le système de troc permettant d’échanger des diamants contre des armes aurait
été mis en place au Libéria et en RDC par Victor Bout et Sanjivan Ruprah.
Ces deux hommes seraient impliqués depuis des années dans le trafic d’armes.
Selon le groupe d’experts de l’ONU, un certain Carlos Alberto La Plaine,
surnommé « Beto », proche collaborateur de Sanjivan Ruprah et connaissant très
bien le marché du diamant d’Anvers, se serait rendu au Libéria puis en RDC à
bord de l’avion transportant les armes slovaques. Cet homme a indiqué sur sa
carte de débarquement en Ouganda qu’il était « courtier en diamants ».
Sanjivan Ruprah a été arrêté en Belgique en février 2002. Il a été accusé de faux
et d’usage de faux à propos d’un passeport trouvé en sa possession. Selon son
avocat belge, il venait à Anvers pour négocier des diamants au nom de Paul
Kagamé, le président du Rwanda.

Une deuxième livraison d’armes ?
Le groupe d’experts de l’ONU a également révélé que l’appareil qui avait livré les
armes au Libéria était retourné en Ouganda trois jours plus tard, pour y prendre
livraison d’un nouveau chargement de 1 250 mitraillettes. Cette fois, cependant, les
autorités ougandaises ont décidé d’acheter les armes et de les garder. Ce second
chargement continue toutefois de soulever un certain nombre de questions.
Un courrier émanant des Uganda People's Defence Forces (UPDF, Forces de
défense populaire de l'Ouganda), en date du 11 janvier 2001, mentionne en détail
le contenu de cette deuxième livraison. Les auteurs de cette lettre demandaient
que 600 armes soient envoyées dans la province d’Ituri, dans le nord-est de la
RDC. Cette demande était formulée au moment où se produisait un épisode
particulièrement sanglant du conflit en RDC.

Conflit dans la province d’Ituri
La province d’Ituri est le théâtre d’un violent conflit entre deux groupes
ethniques, les Hema et les Lendu. L’armée ougandaise et ses alliés en RDC y sont
responsables de terribles atteintes aux droits humains ; ils attisent d’autre part les
haines entre milices hema et lendu, dans le but de mettre la main sur les
importants gisements de diamants et d’or de la région.
L’ONU estime que 50 000 personnes ont été tuées dans la province d’Ituri depuis
1999 et que 500 000 autres ont été déplacées. Des accords de paix ont été signés
entre le gouvernement et les forces d’opposition, mais les milices continuent de
s’affronter régulièrement, dans l’espoir d’infiltrer les zones riches en ressources
naturelles situées le long de la frontière qui sépare la RDC de l’Ouganda.
Un groupe d’experts de l’ONU a commencé à faire la lumière sur l’univers
glauque des trafiquants d’armes. Il existe incontestablement des liens entre la
capacité des belligérants à acquérir des armes pour poursuivre leur lutte et les
profits générés par l’extraction et la contrebande des richesses minérales.
Au cœur de ce système se trouvent des courtiers et des trafiquants internationaux,
qui poursuivent leurs activités illicites sans se soucier le moins du monde des
effets qu’elles ont sur les droits fondamentaux de millions d’êtres humains.
Aidez Amnesty International à obtenir de meilleures garanties contre de tels
agissements.

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Agissez dès maintenant !

Écrivez au gouvernement de votre pays au sujet de la situation en RDC.
Demandez-lui quelles mesures de contrôle des activités des personnes impliquées
dans le commerce des armes il a mises en place afin d’empêcher que du matériel
ne parvienne aux auteurs d’atteintes graves aux droits humains. Insistez pour que
les marchands et les transporteurs d’armes soient inscrits sur un registre normatif,
dans le pays dont ils sont ressortissants ou résidents, et pour que tout projet de
vente ou de livraison d’armes soit soumis à autorisation selon une procédure
stricte, y compris lorsque le contrat envisagé doit être exécuté par le biais de pays
tiers. Faites part à votre gouvernement des recommandations mises « En point de
mire » page 40.
Écrivez également aux principaux protagonistes du conflit en RDC, notamment
aux gouvernements de la RDC, du Rwanda et de l’Ouganda, pour les prier
instamment de prendre des mesures afin de briser les liens qui se sont instaurés
entre l’exploitation des richesses minérales, la guerre et les atteintes aux droits
humains perpétrées en RDC. À titre d’exemple, vous trouverez
une lettre concernant les violations des droits humains commises dans la
région     des    gisements    diamantifères   de   Mbuji-Mayi sur le site
http://web.amnesty.org/web/web.nsf/pages/ec_campaigns_africa (en anglais).

Légendes photos :
Cartes postales adressées au président du Conseil mondial du diamant dans le cadre
de la lutte d’Amnesty International contre les liens entre le marché du diamant
et les atteintes aux droits humains.
Création Martin Wiliams Advertising. Photo Curtis Johnson.
© AI et la coalition Campaign to Eliminate Conflict Diamonds
Prospecteurs clandestins au travail avec, en insert,
les photos de civils tués ou blessés par balle © AI
Intervention de militants italiens d’Amnesty International dénonçant le commerce des
diamants qui servent à acheter des armes, lors du Forum social européen de Florence,
en novembre 2002.
© AI
Pour participer à la campagne d’Amnesty International sur les droits humains
et l’exploitation économique en Afrique, consultez le site :
http://web.amnesty.org/web/web.nsf/pages/ec_campaigns_africa (en anglais).

Afflux de mercenaires et d’armes en Côte d’Ivoire

Mercenaires étrangers
L’Institute for Security Studies, dont le siège se trouve en Afrique du Sud,
a affirmé le 29 octobre 2002 que plusieurs dizaines de mercenaires sud-africains
avaient été engagés par le président ivoirien Laurent Gbagbo.
Au mois de novembre, un porte-parole de l’armée française, déployée en Côte
d’Ivoire pour évacuer les étrangers et pour veiller à l’application du cessez-le-feu
(voir ci-dessous), a déclaré que des anglophones, blancs et noirs, avaient participé à
un raid d’hélicoptères contre des positions rebelles, dans l’ouest du pays.

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Une source proche de Laurent Gbagbo a affirmé un peu plus tard que les
combattants blancs étaient en fait les membres des équipages chargés de piloter les
hélicoptères de combat que le gouvernement avait achetés peu de temps auparavant.
D’autres mercenaires, originaires de pays voisins, ont rejoint les rebelles. Certains
seraient dirigés par un ancien commandant du Revolutionary United Front (RUF,
Front révolutionnaire uni), un groupe d’opposition armé opérant en Sierra Leone,
pays en proie à une féroce guerre civile. Le RUF s’est notamment distingué en
menant une véritable campagne délibérée de mutilations et de massacres.

Armes légères

La prolifération des armes de petit calibre dans les pays voisins contribue à la
multiplication des atteintes aux droits humains en Côte d’Ivoire.
La Côte d’Ivoire a signé en octobre 1998 le moratoire sur les armes légères de la
Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Cela n’a
pas empêché le gouvernement ivoirien d’importer des quantités considérables de
matériel militaire, notamment en provenance de Chine. Entre novembre et
décembre 2002, un Boeing 707 affrété par la filiale chinoise d’une entreprise
allemande a acheminé une cargaison de matériel militaire depuis l’aéroport de la
ville chinoise de Guanzhu jusqu’à Abidjan. Le chargement contenait notamment
des cartouches pour 1 000 chargeurs de mitraillettes T62mm et un million de
cartouches ordinaires de calibre 7,62 mm. Il aurait été livré par une compagnie
aérienne dont le siège se trouve en Ouganda et qui est dirigée par deux pilotes
belges et un ingénieur allemand.

Agissez dès maintenant !

Écrivez aux ambassades de Chine, de Belgique et d’Allemagne dans votre
pays. Citez les exemples ci-dessus et demandez à vos correspondants comment
des ressortissants de leur pays ont pu être autorisés à envoyer des armes en
Côte d’Ivoire, au moment où s’y déroulait une crise majeure des droits
humains. Demandez-leur d’appliquer les recommandations mises « En point
de mire » page 40.
Écrivez à l’ambassade d’Afrique du Sud dans votre pays, en demandant que les
autorités sud-africaines enquêtent de toute urgence sur les informations faisant
état de la présence en Côte d’Ivoire de mercenaires sud-africains.
Écrivez également au Premier ministre de Côte d’Ivoire pour lui demander de
veiller à ce que le gouvernement ivoirien assume les responsabilités qui lui
incombent de faire respecter les droits humains sur le territoire national et prenne
des mesures pour que le moratoire de la CEDEAO sur les importations d’armes
légères soit appliqué.

Légende photo :
Des rebelles menacent un combattant des forces gouvernementales qu’ils viennent
de capturer, alors qu’il effectuait une patrouille tout près de la ville occupée
de Bouaké (Côte d’Ivoire), en octobre 2002.
© AFP / Georges Gobet

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Crise en Côte d’Ivoire

Une insurrection lancée en septembre 2002 par un groupe armé a divisé de fait la
Côte d’Ivoire en deux. De graves atteintes aux droits humains ont été commises
tant par les forces gouvernementales que par des groupes armés.
Le 19 septembre, jour du début de l’insurrection, le général Gueï, ancien chef de
l’État, a été abattu dans la cathédrale d’Abidjan par des membres des forces de
sécurité. Sa femme, Rose Gueï, et plusieurs de ses proches ont tenté de se cacher,
mais ils ont été découverts et ont eux aussi été tués par les forces de sécurité.
La crise du mois de septembre intervenait après deux années de troubles
inaugurées par le coup d’État militaire de décembre 1999. Ces deux ans ont été
marqués par de graves atteintes aux droits humains, perpétrées dans un climat de
xénophobie encouragé par certains dirigeants politiques.
Aux termes d’un accord de cessez-le-feu conclu en octobre 2002 sous l’égide de
la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), les
deux camps se sont engagés à ne pas faire appel à des mercenaires ni à enrôler des
mineurs dans leurs rangs.
Cet accord n’a malheureusement pas mis fin aux hostilités. Des hélicoptères des
forces gouvernementales ont attaqué des positions rebelles dans l’ouest du pays,
entraînant la mort de nombreux civils. Au mois de novembre, deux nouveaux
groupes d’opposition armés – le Mouvement pour la justice et la paix et le
Mouvement populaire ivoirien du Grand Ouest (MPIGO) – se sont insurgés à leur
tour, près de la frontière avec le Libéria.
Tous les acteurs de la crise ont signé l’Accord de Marcoussis, à la fin du mois de
janvier 2003. Celui-ci prévoyait la mise en place d’un gouvernement de
réconciliation nationale, auquel devaient participer toutes les parties au conflit.
Ce gouvernement n’avait toujours pas vu le jour à la fin du mois de mars, en
raison de désaccords entre les différents protagonistes.
En dépit de l’accord conclu, les affrontements se sont poursuivis. Des combats
faisaient toujours rage au début du mois de mars dans l’ouest du pays, avec de
graves conséquences pour la population civile (des milliers de personnes ont
notamment dû fuir de chez elles). Le 2 mars, Félix Doh, chef du MPIGO,
a déclaré que le fragile cessez-le-feu était rompu, accusant les troupes
gouvernementales d’avoir attaqué des civils à l’aide d’hélicoptères de combat,
tuant une vingtaine de personnes.

Amnesty International en Côte d’Ivoire

En octobre 2002, Amnesty International a envoyé dans la région une délégation
qui a constaté que les deux camps s’en étaient pris plus particulièrement aux
civils qu’ils soupçonnaient de soutenir l’adversaire. Cette attitude a entraîné le
déplacement de dizaines de milliers de personnes et une crise humanitaire.
Les belligérants s’étaient livrés à toutes sortes d’atteintes aux droits humains :
homicides arbitraires et exécutions extrajudiciaires, détention secrète de membres
de l’opposition, destructions d’habitations, extorsion de fonds par des membres
des forces de sécurité, ou encore violences physiques et menaces contre des civils,
des personnes militant pour la défense des droits humains ou des journalistes.

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Légende photo :
Décembre 2002 : des civils fuient une ville de l’ouest de la Côte d’Ivoire
où se déroulent d’intenses combats entre les rebelles et l’armée régulière.
© Luc Gnago / Reuters / popperfoto.com

La position d’Amnesty International
sur les armes non discriminantes
Amnesty International demande à toutes les parties à un conflit international
armé, quel qu’il soit, de prendre toutes les précautions nécessaires pour éviter les
pertes civiles, conformément aux principes souverains du droit international
humanitaire. Ceux-ci interdisent notamment toute attaque contre des civils ou des
biens de caractère civil, toute attaque durant laquelle il ne serait fait aucune
distinction entre les objectifs militaires et les civils ou biens de caractère civil,
ainsi que toute attaque qui, bien que dirigée contre un objectif militaire, aurait des
conséquences disproportionnées pour les civils ou les biens de caractère civil.

Les armes chimiques et biologiques
L’usage d’armes chimiques ou biologiques dans un conflit armé est prohibé par le
droit international. Ces armes, de par leur nature même, frappent sans
discrimination. Il est impossible de les utiliser sans enfreindre en même temps la
règle coutumière du droit international humanitaire selon laquelle il importe de
distinguer les civils des combattants.
D’ailleurs, même si elles pouvaient être dirigées exclusivement contre des
combattants, ces armes chimiques ou biologiques seraient tout de même
interdites, car leur action provoque des dommages superflus et des souffrances
inutiles aux combattants, ce qui est contraire à une autre règle coutumière du droit
international humanitaire.

Les armes nucléaires
Amnesty International avait demandé qu’en cas de conflit armé international
opposant les États-Unis et leurs alliés à l’Irak, tous les belligérants s’abstiennent
d’employer des armes atomiques, dans la mesure où un tel usage violerait les
règles fondamentales du droit international humanitaire.

L’uranium appauvri
À la suite de son rapport sur la campagne de bombardement menée par
l’Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN) en ex-Yougoslavie et, plus
récemment, des bombardements effectués en Afghanistan par les États-Unis et
leurs alliés, Amnesty International a appelé les gouvernements à adopter un
moratoire sur le transfert et l’emploi des armes à uranium appauvri, en attendant
les conclusions des enquêtes sur leurs effets à long terme. Les munitions à base
d’uranium appauvri peuvent constituer une menace à longue échéance pour la
population civile et l’environnement. Certaines études donnent à penser que la
poussière d’uranium appauvri (qui reste autour des points d’impact) se révèle
nocive en cas d’inhalation ou d’ingestion.

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Les mines terrestres antipersonnel
Ces mines sont à ce jour les seules armes de guerre dont Amnesty International
s’oppose totalement à l’emploi, à la production, au stockage et au transfert. Dans
de nombreux conflits, elles sont délibérément placées dans les zones où elles
toucheront le plus la population civile. Elles continuent à tuer et à mutiler par
surprise bien après la fin des hostilités.
Amnesty International demande à tous les gouvernements de la planète :
• de signer, de ratifier et d’appliquer l’Accord d’Ottawa sur l’interdiction des
   mines (1997), mais aussi d’en surveiller la mise en œuvre (voir encadré) ;
• d’interdire l’emploi, la production, le stockage, la vente, le transfert et
   l’exportation des mines terrestres ;
• de fournir les moyens nécessaires à un déminage local et à la mise en place de
   programmes de sensibilisation aux dangers présentés par les mines ;
• d’aider les victimes des mines terrestres.

Les bombes en grappe
Amnesty International s’est penchée sur la question des bombes en grappe lors
des guerres menées au Kosovo et en Afghanistan. Il s’agit d’engins explosifs qui
contiennent des centaines de petites bombes.
En octobre 2001, lors des bombardements effectués en Afghanistan par les forces
emmenées par les États-Unis, Amnesty International a demandé l’adoption d’un
moratoire sur l’utilisation de ces armes. Les bombes en grappe présentent en effet
un risque élevé pour la population civile, dans la mesure où leur contenu est
disséminé sur une large surface. Cinq p. cent au moins des petites bombes
n’explosent pas au moment de l’impact. Elles se transforment ainsi, de fait,
en mines antipersonnel et menacent durablement les personnes, notamment les
civils, qui sont susceptibles de les toucher.
Amnesty International poursuit son action en faveur d’un moratoire sur l’usage
des armes en grappe.

• La mise au point, la fabrication et le stockage d’agents microbiens et plus
  généralement biologiques à des fins hostiles sont prohibés par la Convention
  des Nations unies sur les armes biologiques (1972). La Convention sur les
  armes chimiques (1992) interdit quant à elle la mise au point, la fabrication,
  le stockage et l'emploi d’armes chimiques ; elle impose en outre la destruction
  des unités de production de ces armes ainsi que des stocks existants. Les États-
  Unis sont partie à ces deux Conventions. L’Irak est uniquement partie à la
  Convention sur les armes biologiques.
• Dans les années 80, le gouvernement italien a autorisé l’exportation vers l’Irak de
  plus de neuf millions de mines terrestres antipersonnel. Elles ont été disséminées
  par l’armée irakienne dans les zones kurdes du nord du pays. Certaines ont été
  récemment retrouvées en Turquie, où elles ont été placées par des groupes armés
  kurdes. L’armée turque a elle aussi eu recours aux mines terrestres. De nombreux
  civils auraient été tués ou blessés par l’explosion de ces engins.
• La Convention des Nations unies sur l'interdiction de l'emploi, du stockage,
  de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction
  (également appelée Accord d’Ottawa sur l’interdiction des mines) a été signée
  en 1997 par 122 pays. Elle est entrée en vigueur le 1er mars 1999.

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Agissez dès maintenant !

Demandez à votre gouvernement :
• de ne pas utiliser d’armes qui sont non discriminantes de par leur nature même
  (armes chimiques ou biologiques, bombes en grappe et mines terrestres
  antipersonnel, entre autres) ;
• de ne pas employer de missiles à longue portée imprécis (comme les missiles
  Scud) et de ne pas larguer des bombes à haute altitude (plus de 4 500 mètres),
  car les expériences récentes montrent que ces pratiques ne permettent pas de
  respecter pleinement le droit international humanitaire, qui dispose notamment
  que les belligérants doivent tout faire pour distinguer les objectifs militaires de
  la population civile ;
• de s’abstenir d’utiliser des armes contenant de l’uranium, tant que n’auront pas
  été publiés les résultats d’études médicales indépendantes prouvant que ce type
  d’armement n’est pas dangereux à long terme pour la population civile.

Légende photo :
Installation réalisée devant leur école par les lycéens de la Holy Trinity High School
d’Edmonton, dans la province d’Alberta, au Canada, en signe de solidarité avec les
victimes des mines terrestres (1999)
© Nancy Ingram, Mines Action Canada, 1999
Légende affiche :
Les armes non discriminantes touchent les civils
(De gauche à droite)
Uranium appauvri
Mine terrestre antipersonnel
Bombe en grappe
Uranium appauvri
Bombe sale
États-Unis – Irak : halte aux armes sales
© Karl Wood

Qui a armé l’Irak ?
Fin 2002 et début 2003, tandis que les forces emmenées par les États-Unis
mettaient en place un impressionnant dispositif militaire en vue d’une
intervention en Irak, un certain nombre d’éléments ont indiqué que tous les
membres permanents du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies
(ONU) ainsi que plusieurs pays d’Europe orientale et la Syrie avaient fourni des
armes et du matériel annexe au gouvernement irakien. Cependant, à l’heure où
ces lignes sont rédigées, aucune preuve convaincante ne permet de conclure que
l’Irak est en possession d’armes de destruction massive.

Au moins 20 pays ont été accusés d’avoir aidé l’Irak, avant la guerre du Golfe de
1991, à acquérir les technologies nécessaires à la réalisation de différents
programmes d’armement, dont un concernant la mise au point d’armes chimiques.
En décembre 2002, le gouvernement irakien a remis aux Nations unies un dossier
de 12 000 pages dans lequel il citait diverses entreprises britanniques, françaises,
russes, américaines et chinoises qui lui ont fourni des technologies militaires.

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