LE FASCICULE DE LA SANTÉ - Diabète et Ramadan
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LE FASCICULE Hors série DE LA SANTÉ N° 1 Juin 2014 REVUE ALGÉRIENNE DE MÉDECINE Diabète et Ramadan Pr Ali Lounici Pr Zakia Arbouche Le Fascicule de la Santé - Hors Série N° 1 - Juin 2014 E. mail : sante_fas@yahoo.fr Web : www.lesfasciculesdelasante.org
Le Fascicule de la Santé Diabétologie - Hors série n° 1 - Juin 2014 CONSEIL SCIENTIFIQUE DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Cardiologie A. Biad - Professeur, Chef de Service, N. Adjroud - Professeur, Anc. Chef de Service Médecine Interne, EPH de Ain Taya, Alger A. Salah Laouar de Cardiologie, Hôpital Central de l’Armée R. Malek, Professeur Chef de Service de Médecine 0771 45 29 82 Ain Nâdja, Alger Interne, CHU de Sétif S. Benkhedda - Professeur, Service de Cardiologie A A. Chibane - Professeur, Service, Médecine Interne CHU Mustapha, Alger EPH de Ain Taya, Alger DIRECTEUR DE LA REDACTION M. Tahmi - Professeur, Chef de Service de Cardiologie CHU Nedir Mohamed, Tizi Ouzou Médecine Légale Docteur A. Salah Laouar Y. Mehdi - Professeur, Anc. Chef de Service Cardiologie Pédiatrique de Médecine Légale, CHU Mustapha, Alger R. Touati - Professeur, Service de Chirurgie Cardiaque COMITÉ DE LECTURE EHS de Bousmail, Tipaza Microbiologie M. Abid F. Bachi - Professeur, Service de Chirurgie-Anatomie Microbiologie, Institut Pasteur d’Algérie, Alger S. Ayoub S. HamoudiI - Professeur, Directeur M. T. Benatmane de Département d’Anatomie, Université d’Alger Néphrologie T. Rayane - Professeur, Hôpital N’fissa A. Bensalem Chirurgie Thoracique Hamoud, Alger K. Bentabak Cardiovasculaire et greffe rénale A. Atik - Professeur, Chef de Service H. Chaouche - Professeur, Anc. chef de service de Néphrologie, CHU Annaba R. Boukari de Chirurgie thoracique Cardiovasculaire et Greffe Pr M. Ben Mansour - Professeur, Chef de Service R. Djidjik Rénale, CHU Mustapha, Alger de Néphrologie, CHU Tlemcen M. Gharnaout Chirurgie Viscérale Neurochirurgie S. Joucdar L. Abid - Professeur, Chef de Service de Chirurgie K. A. Bouyoucef - Professeur, Chef de Service Hôpital de Bologhine, Alger de Neurochirurgie, CHU de Blida A. Kerboua A. Lounici Dermatologie Oncologie I. Benkaidali - Professeur Chef de Service K. Bouzid - Professeur, Chef de Service d’Oncologie H. Mahfouf de Dermatologie - CHU Mustapha, Alger Médicale, Centre Pierre et Marie Curie, Alger Y. Medjdoub B. Bouadjar - Professeur Chef de Service de Dermatologie, CHU Mohamed Lamine Ophtalmologie M. Oukkal Debaghine, Bab El Oued, Alger D. Hartani - Professeur, Anc. Chef de Service M. Taieb d’Ophtalmologie, CHU Mustapha, Alger Endocrinologie -Diabétologie A. Ailem - Professeur, Service Z. Arbouche - Professeur, Chef de Service d’Ophtalmologie - CHU Mustapha, Alger Le Fascicule de la Santé CHU Nedir Mohamed, Tizi Ouzou Revue médicale trimestrielle O.R.L Dépôt légal 917 - 2003 Gastro-entérologie Dj. Selmane - Professeur, Chef de Service d’ORL, Pr F. Chaoui - Professeur, Anc. Chef de Service CHU Mohamed Lamine-Debaghine, Bab El Oued, Alger Rédaction Clinique des Orangers, Médecin libéral, Alger E.mail : sante_fas@yahoo.fr Pédiatrie Tél/Fax. 023 25 43 42/41 Gynéco-obstétrique J. P. Grangaud - Professeur, Anc. Chef de Service de Z. Sadi- Professeur, Service de gynécologie Obstétrique Pédiatrie et anc. Directeur de la Prévention (MSPRH) Editeur CHU Mustapha, Alger Le Fascicule de la Santé Pneumophtisiologie Hématologie S. Nafti - Professeur Chef de Service, Clinque Conception & Réalisation R. M. Hamladji - Professeur, Anc. Chef de Service des Maladies Respiratoires “ Djillali Larbaoui” Éditions le Fascicule de la Santé d’Hématologie, Centre pierre et Marie Curie, Alger CHU Mustapha, Alger Tél./Fax : (+ 213) 023 25 43 42/41 N. Boudjerra - Professeur, Service d’Hématologie Mobile : 0553 784 052 Centre Pierre et Marie Curie, Alger Radiologie & Imagerie E. mail : sante_fas@yahoo.fr S E. Bendib - Professeur, Chef de Service Web : www.lesfasciculesdelasante.org Immunologie de Radiologie & d’imagerie, Centre Pierre et Marie M. Bouali Benhalima - Professeur, Chef de Service Curie, Alger Publicité d’Immunologie, CHU Mustapha, Alger Tél./Fax : (+ 213) 023 25 43 42/41 A. BOUGUERMOUH - Professeur, Anc. Rhumatologie Mobile : 0553 784 052 Chef de Service de Virologie, NIPA, Sidi Fredj, Alger S. Abtroune - Professeur, Anc. Chef de Service de Rhumatologie, CHU Mohamed Lamine Debbaghine Service abonnement Maladies Infectieuses Bab El Oued, Alger Le Fascicule de la Santé R. Bouhamed - Professeur, Service des Maladies A. Rezig Ladjouze - Professeur, Chef de Service Cité des 71 logements, Bâtiment D, N° 1 Bis, infectieuses, Hôpital de Boufarik, Blida de Rhumatologie, CHU Beni Messous Ouled Fayet (les grands vents) - Alger S. MESBAH - Professeur, Directeur Général des Tél./Fax : (+ 213) 023 25 43 42/41 services de Médecine Préventive au Ministère de la Santé Sciences Pharmaceutiques Mobile : 0553 784 052 de la Population et de la Réforme Hospitalière (MSPRH) R. Denine - Professeur, Chef de Service, Laboratoire de pédiatrie, EHS Benaknoun, Alger Médecine Interne M. Belhadj - Professeur, Chef de Service, Médecine Urologie Interne, EHU 1er Novembre 54, Oran A. Bouanani - Médecin libéral, Alger N. Benfenateki - Professeur Chef de Service, Médecine A. Chibane - Professeur, Service d’Urologie Interne, Hôpital de Rouiba, Alger CHU Mustapha, Alger Copyright © 2014-06 Editions Les Fascicules de la Santé www.lesfasciculesdelasante.org Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé, des pages publiées dans le présent ouvrage, faite sans l’autorisation de l’éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont autorisées les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère scientifique.
e 11 Forum National de l’Omnipraticien Alger , 3 - 4 Avril 2015 Le rendez vous annuel de la FMC Informations Tél./Fax : (+ 213) 023 25 43 42/41 Mobile : 0553 784 052 E. mail : sante_fas@yahoo.fr Web : www.lesfasciculesdelasante.org
Le Fascicule de la Santé Revue Algérienne de Médecine sante_fas@yahoo.fr É DITORIAL L e jeûne du Ramadan est l’un des cinq piliers de l'Islam, et cons/tue un rite sacré dans le monde musulman. Bien que le texte coranique autorise à ne pas jeûner dans certaines situa/ons excep/onnelles comme la maladie, beaucoup de pa/ents jeûnent malgré le risque que peut représenter le jeûne pour leur santé, menaçant parfois le pronos/c vital. Ceci est dû probablement au manque d'informa/on et à la crainte du regard de la société. On sait que la période du jeûne pendant le Ramadan s'accompagne d'un changement du mode de vie avec notamment une alimenta/on riche en sucres rapides et en graisses ainsi qu'une perturba/on du cycle du sommeil. Ces condi/ons sont délétères pour le pa/ent diabé/que. Les risques liés au jeûne sont variables selon le type du diabète, l’existence de complica/ons chroniques, la thérapeu/que et les par/cularités de chaque pa/ent. Ainsi l'observance du jeûne peut être cause de complica/ons métaboliques aiguës comme l'hypoglycémie, l'hyperglycémie et l’acidocétose. De plus, il existe un risque de déshydrata/on, d'autant que le Ramadan se déroule actuellement en été avec des durées de jeune allant jusqu'à 18h par grande chaleur. Les pra/ciens, avec l’aide des hommes de culte, ne doivent pas se lasser d'expliquer au pa/ent et à son entourage que le jeûne, par/culièrement chez le diabé/que de type 1 déséquilibré, le diabé/que de type 2 compliqué, la femme diabé/que enceinte ou allaitante, est associé à des risques mul/ples. Notre religion offre des alterna/ves compensatrices au jeûne comme «nourrir un pauvre» (Sourate El-Bakarah, verset 184). Au final, le jeûne est une ques/on spirituelle dont la réponse en dernier ressort revient au pa/ent idéalement préparé, éduqué et conseillé par des enseignements religieux et médicaux. Pour aider les pra/ciens dans la prise en charge des pa/ents diabé/ques qui insistent pour accomplir le jeûne durant le Ramadan, au détriment souvent de leur santé, les auteurs de ce numéro hors série proposent des recommanda/ons pra/ques inspirées des consensus d’experts interna/onaux publiés récemment. Z. Arbouche Présidente De la Société Algérienne de Diabétologie Le Fascicule de la Santé - Hors série n° 1 – Juin 2014
1 DIABÈTE ET RAMADAN Diabète et Ramadan Pr Ali Lounici Maître de Conférences, Université d’Alger Service de Médecine Interne - Hôpital Salim Zemirli, El Harrach, Alger Vice président de la Société Algérienne de Diabétologie E-mail : alilounici@hotmail.com Pr Zakia Arbouche Chef de Service de Diabétologie - CHU Nedir Mohamed, Tizi Ouzou Présidente de la Société Algérienne de Diabétologie Cet article a été revu et enrichi par le Pr Aissa Boudiba Chef de Service Diabétologie CHU Mustapha Pacha - Alger Avant propos Ce travail est inspiré de deux principales références portant sur les recommandations de la prise en charge des diabétiques durant le Ramadan publiées en 2005 et mises à jour en 2010 dans la revue «Diabetes Care». 1. Al-Arouj M, et al. Recommendations for management of diabetes during Ramadan. Diabetes Care 2005;28:2305–2311 2. Al-Arouj M, et al. Recommendations for management of diabetes during Ramadan: Update 2010. Diabetes Care 2010;33:1895–1902 E Introduction N 2009, le nombre de musulmans a été saison et la situation géographique, variation de estimé à 1,57 milliards, représentant en- quelques heures à 20 heures. L’abstinence du viron 23% de la population mondiale, lever au coucher du soleil porte sur les aliments, avec une augmentation d’environ 3% par an [1]. les boissons et le tabac. La majorité des prati- Le jeûne durant le Ramadan, mois sacré de quants consomment deux repas, un après le cou- l’islam, est une obligation pour tous les adultes cher du soleil (IFTAR) et un autre avant le lever du en bonne santé. soleil (SUHUR). La prévalence élevée du diabète de type 2 Le coran exempt les patients malades (Sou- (6,6% des adultes âgés entre 20 et 79 ans) cou- rate El Bakarah, Versets 183-185), particulière- plée à l’étude EPIDIAR 2001 (Epidemiology of ment si le jeûne les expose à des risques. Les Diabetes and Ramadan), qui a porté sur 12243 patients diabétiques rentrent dans cette caté- diabétiques de 13 pays musulmans, a révèle gorie car leur maladie métabolique chronique que 43% des patients ayant un diabète de type1 les expose aux risques de complications va- et 79% des patients avec un diabète de type 2 riées si les apports alimentaires et liquidiens jeûnent durant le Ramadan [2] donnant une es- sont déséquilibrés. En pratique beaucoup de timation de 50 millions de diabétiques jeûneurs patients diabétiques insistent pour jeûner du- dans le monde durant le Ramadan. rant le Ramadan, créant ainsi des problèmes Le Ramadan est un mois lunaire qui dure entre 29 de prise en charge pour eux-mêmes et un défi et 30 jours. La durée du jeûne peut varier selon la pour leurs médecins. Le Fascicule de la Santé - Hors série n° 1 – Juin 2014
Ali Lounici 2 Physiopathologie du jeûne Il n’existe pas d’estimation concernant la contribution de l’hy- poglycémie dans le diabète de type 2. Cependant, il semble L’insulino-sécrétion, qui favorise le stockage du glucose au que l’hypoglycémie est une cause rare de mortalité dans le niveau du foie et du muscle en glycogène, est stimulée par diabète de type 2. l’alimentation chez les sujets sains. Durant le jeûne, le taux de glucose circulant tend à baisser, à l’origine de la diminu- Le risque d’hypoglycémie est beaucoup plus élevé chez le dia- tion de la sécrétion d’insuline. Au même moment les taux de bétique de type 1 par rapport au type 2 [2]. glucagon et de catécholamines augmentent. Ce qui stimule L’effet du jeûne durant le ramadan sur l’incidence de d’hypo- l’utilisation du glycogène, et au même moment la néogluco- glycémie chez les diabétiques n’est pas connu avec certi- genèse est augmentée [3]. tude. L’étude EPIDIAR a montré que le jeûne durant le Si le jeûne se prolonge pendant plusieurs heures, les ré- ramadan augmente le risque d’hypoglycémie sévère (définie serves de glycogène chutent, et le taux bas d’insuline circu- par l’hospitalisation) de 4,7 fois dans le type 1, et de 7,5 fois lant permet la libération des acides gras libres provenant des dans le type 2. Cette étude sous estime l’incidence des hy- adipocytes. L’oxydation des acides gras libres génère des poglycémies sévères car elle ne tient compte que des cas cétones qui servent de sources énergétiques aux muscles nécessitant une hospitalisation. L’hypoglycémie sévère était squelettiques et cardiaques, foie, rein, et le tissu adipeux, plus fréquente chez les patients qui ont subi des modifica- économisant ainsi le glucose pour une utilisation continue tions de la posologie des médicaments oraux ou d’insuline et par le cerveau et les érythrocytes. chez ceux qui ont rapporté des changements dans les habi- Chez les sujets indemnes de diabète, ce processus est régulé tudes alimentaires [2]. par un équilibre entre insulinémie et hormones contre-régula- trices qui permettent le maintien de la glycémie à des taux phy- Hyperglycémie siologiques. Chez les patients diabétiques, l’homéostasie du Les études DCCT et UKPDS ont démontré le lien entre l’hy- glucose est perturbée par la physiopathologie sous-jacente et perglycémie chronique et les complications micro vasculaires devient difficile à contrôler par les médicaments visant à amé- et peut être les complications macro-vasculaires [4,6]. Cepen- liorer ou complémenter la sécrétion d’insuline. dant, nous ne disposons pas d’information sur l’effet répétitif Dans le diabète de type 1, la riposte à l’hypoglycémie peut être al- de l’hyperglycémie de courte durée (4 semaines) sur les térée par une baisse de la sécrétion adrénergique et du glucagon complications du diabète. L’étude EPIDIAR a montré que l’in- en raison de la neuropathie autonome, de l’ancienneté de l’affec- cidence de l’hyperglycémie sévère nécessitant une hospita- tion et de la récurrence des hypoglycémies antérieures [3]. lisation est 5 fois plus élevée chez le type 2 et 3 fois plus Chez les patients avec un déficit sévère d’insuline, un jeûne pro- élevée dans le type 1 (avec ou sans acidocétose) [2]. L’hy- longé sans apport d’insuline provoque une utilisation excessive perglycémie peut être due à une réduction excessive des mé- du glycogène et une augmentation de la néoglucogenèse et de dicaments pour éviter l’hypoglycémie. Les apports importants la cétogenèse, menant à l’hyperglycémie et à l’acidocétose. d’aliments et/ou de sucreries augmentent le risque d’hyper- Les diabétiques de type 2 peuvent avoir des perturbations simi- glycémie sévère [2]. laires en réponse au jeûne prolongé. Cependant, l’acidocétose est rare et la sévérité de l’hyperglycémie dépend du degré d’in- Acidocétose diabétique sulino-résistance et/ou du niveau d’insulinopénie. Les patients diabétiques, particulièrement ceux de type 1, qui jeûnent durant le ramadan ont un risque important de dévelop- Risques associés au jeûne chez les diabétiques per une acidocétose diabétique, surtout si le diabète est mal contrôlé avant le Ramadan [2]. De plus le risque d’acidocétose L’étude EPIDIAR, qui a porté sur 12243 diabétiques ayant peut être augmenté par la réduction excessive des doses d’in- jeuné durant le Ramadan montre une fréquence élevée de suline du fait de la réduction des apports alimentaires. complications [2]. Les complications majeures sont reportées dans le tableau 1. Déshydratation et thromboses La déshydratation liée à la limitation des apports liquidiens, sur- Hypoglycémie tout si le jeûne est prolongé, peut être sévère par excès de La diminution des apports alimentaires est un facteur de risque transpiration en climat chaud et humide et chez les patients d’hypoglycémie connu [4]. On estime que 2 à 4% de la mortalité exerçant un travail physique dur et pénible et dans toutes les chez le diabétique de type 1 est liée à l’hypoglycémie [5]. conditions de transpirations importantes. L’hyperglycémie peut provoquer une diurèse osmotique et créer une déplétion hydro-électrolytique. L’hypotension orthostatique Tableau 1. Risques majeurs associés au jeûne chez les diabétiques peut se manifester particulièrement en cas de neuropathie au- tonome. Une syncope, les chutes, et les fractures peuvent résul- Hypoglycémie ter de l’hypovolémie et de l’hypotension. De plus la contraction Hyperglycémie du volume intra-vasculaire peut contribuer à un état d’hypercoa- Acidocétose diabétique Déshydratation et thromboses gulabilité bien connu chez les diabétiques [7]. Les diabétiques ont un état d’hypercoagulabilité due à une augmentation des Le Fascicule de la Santé - Hors série n° 1 – Juin 2014
3 DIABÈTE ET RAMADAN facteurs de coagulation, une diminution des anticoagulants en- Considérations générales dogènes et une altération de la fibrinolyse. L’augmentation de la viscosité sanguine secondaire à la déshydratation augmente le Individualisation risque de thrombose et d’AVC [8]. La question la plus cruciale est que la prise en charge doit être En Arabie Saoudite, il a été constaté une augmentation de l’in- très individualisée et la planification du traitement est spécifique cidence de l’occlusion de la veine rétinienne chez les diabétiques pour chaque patient. qui jeûnent durant le ramadan [9]. Cependant, les hospitalisations liées aux événements corona- Surveillance fréquente des glycémies riens et cérébraux n’augmentent pas durant le Ramadan [10]. Il est important que les patients disposent de moyens pour sur- Il n’existe pas de données concernant l’effet du jeûne sur la mor- veiller leurs glycémies durant la journée. talité chez les patients avec ou sans diabète. La surveillance de la glycémie capillaire est particulièrement in- dispensable chez les diabétiques de type 1 et de type 2 qui sont Classification par catégorie de risque du jeûne sous insuline et à risque d’hypoglycémies. chez les diabétiques Nutrition Le médecin doit classer le patient par catégorie de risque Les habitudes alimentaires changent considérablement durant selon le nombre et l’extension des facteurs de risque. Il le mois du Ramadan. La plupart des problèmes de santé sont existe 4 catégories de risque de survenue d’événement dé- liés à une alimentation inappropriée ou comme conséquence favorable chez les diabétiques de type 1 ou 2 qui décident d’une suralimentation et d’une durée de sommeil insuffisante. de faire le Ramadan (Tableau 2). Pour cela la diététique durant le Ramadan ne doit pas être dif- Tableau 2. Catégories de risque chez les patients diabétiques qui jeûnent durant le Ramadan Risque très élevé - Hypoglycémie sévère survenue dans les 3 mois précédant le Ramadan. - Antécédents d’hypoglycémies récurrentes. - Patients inconscients du risque d’hypoglycémie. - Patients mal équilibrés. - Acidocétose dans les 3 mois précédant le Ramadan. - Diabète type 1. - Affection aiguë. - Coma hyperosmolaire survenu dans les 3 mois précédant le Ramadan. - Patients qui ont un travail physique intense. - Grossesse. - Patients dialysés. Risque élevé - Hyperglycémie modérée (glycémie moyenne entre 1,5 et 3 g/l, A1c 7,5 à 9%). - Insuffisance rénale. - Complications macrovasculaires évoluées. - Patient vivant seul et traité avec insuline ou sulfamides. - Patients avec co-morbidités et qui présentent d’autres facteurs de risque. - Personne âgée et malade. - Médicaments qui peuvent affecter la vigilance. Risque modéré - Patients bien équilibrés traités avec des insulino-sécrétagogues d’action courte. Risque bas - Patients bien équilibrés traités avec diététique seule, ou metformine, acarbose ou glitazones et/ou incrétines. Ces patients sont par ailleurs en bonne santé. Cette classification est largement basée sur des opinions d’experts et non sur des données scientifiques. Le Fascicule de la Santé - Hors série n° 1 – Juin 2014
Ali Lounici 4 férente de la diététique saine et équilibrée. Les conseils diété- nés individuellement aux patients concernant les risques poten- tiques doivent être adaptés en fonction des besoins et des pro- tiels qu’ils doivent accepter s’ils décident de jeûner. blèmes médicaux. Le but est de maintenir un poids constant. Pendant cette évaluation, les changements nécessaires de dié- Les apports excessifs d’aliments riches en glucides et en lipides, tétique ou médicamenteux doivent être opérés pour que le pa- particulièrement lors de l’IFTAR doivent être évités. Les glucides tient débute le jeûne dans des conditions stables et sécurisées. à absorption lente peuvent être conseillés lors du SUHUR et les Cette évaluation doit aussi toucher les patients qui ne désirent glucides à index glycémique élevés lors de l’IFTAR. pas jeûner du fait qu’ils sont exposés au risque d’hypoglycémie Il est aussi recommandé d’augmenter les apports liquidiens et d’hyperglycémie durant le Ramadan. entre IFTAR et IMSAK et que le repas du SUHUR doit être pris le plus tardivement possible, proche de l’IMSAK. Prise en charge des diabétiques de type 1 Exercice physique En général, les diabétiques de type 1, sont à très haut risque de Il faut conseiller une activité physique régulière. Cependant il faut développer des complications sévères. Ce risque est particuliè- éviter les exercices physiques intenses qui peuvent augmenter rement élevé chez les patients mal équilibrés, inconscients du le risque d’hypoglycémies, particulièrement quelques heures risque hypoglycémique, avec un contrôle glycémique instable, avant la rupture du jeûne. On peut proposer une activité phy- et des hospitalisations fréquentes, ainsi que les patients non sique deux heures après l’IFTAR. La prière du TARAWIH, doit couverts par la sécurité sociale. De plus les patients qui ne peu- être considérée comme une partie du programme de l’exercice vent pas surveiller leurs glycémies plusieurs fois dans la journée physique quotidien. Chez certains diabétiques de type 1 mal sont à très haut risque. On doit fortement conseiller à ces caté- équilibrés, l’exercice peut provoquer une hyperglycémie sévère. gories de patients de ne pas jeûner durant le Ramadan. Les études DCCT et EDIC ont montré que le strict contrôle de Rupture du jeûne avant IFTAR la glycémie permet d’éviter les complications micro vasculaires et que ce bénéfice dure dans le temps [4,11]. Pour obtenir une glycémie proche de la normale, il faut en général plusieurs in- Tous les diabétiques doivent comprendre qu’il faut arrêter le jections d’insuline par jour (trois ou plus) ou l’utilisation continue jeûne en cas de survenue de signes d’hypoglycémie (Ta- d’insuline par pompe. Une surveillance stricte et des ajuste- bleau 3), car la glycémie peut chuter davantage en cas de ments fréquents des doses d’insuline sont essentiels pour at- retard de prise en charge. Le jeûne doit être rompu si la gly- teindre les objectifs glycémiques optimaux et éviter l’hypogly- cémie est inférieure à 0,7 g/l durant les premières heures cémie et l’hyperglycémie. après l’IMSAK, particulièrement si les patients ont pris lors Certains patients avec un diabète de type 1, prennent la déci- du SUHUR un traitement à base d’insuline, de sulfamides sion de jeûner. Ils changent leur schéma d’insulinothérapie hypoglycémiants ou de repaglinide. juste avant, durant et quelques jours après le Ramadan. Des Le jeûne doit être rompu si la glycémie est supérieure à 3 études très limitées ont évalué l’efficacité et la sécurité des dif- g/l. Les patients doivent éviter de jeûner s’ils sont souffrants férents protocoles d’insulinothérapie chez le diabétique de d’une autre pathologie. type 1 qui jeûne durant le Ramadan. La surveillance des glycémies doit être renforcée notamment en fin d’après midi ou devant tout symptôme ou événement clinique. A notre avis le diabète de type 1 crée une condition qui néces- Tableau 3. Signes annonciateurs d’hypoglycémie site une auto prise en charge rapprochée avec un ajustement horaire conciliant les apports alimentaires, les aptitudes phy- Sueurs Anxiété siques et l’ajustement thérapeutique avec une concomitance la Tremblements Troubles visuels plus étroite possible. Ces impératifs sont impossibles à respec- Palpitations Anomalies du comportement ter avec un jeûne dépassant 6 à 8 h. le jeûne doit être interdit Accès de pâleur Confusion et au minimum fortement déconseillé. Sensation de malaise Difficulté de parler L’incompatibilité avec la physiologie n’autorise pas le praticien Vertiges Irritabilité à proposer des schémas thérapeutiques hasardeux notamment avec l’insuline et à risques imprévisibles. Evaluation médicale avant le Ramadan Prise en charge des diabétiques de type 2 Tous les patients avec un diabète désirant jeûner durant le Ra- madan doivent se préparer par une évaluation médicale et s’in- Patients sous diététique seule tégrer dans un programme éducationnel structuré pour observer Chez les patients avec un diabète de type 2 qui sont bien équi- un jeûne le moins risqué possible. librés sous diététique seule, le jeûne comporte un risque faible Cette évaluation doit se faire 1 à 2 mois avant le Ramadan. Elle de complications. portera sur le contrôle de la glycémie, de la pression artérielle Le seul problème est la survenue d’hyperglycémie postpran- et des lipides. Un bilan biologique approprié doit être demandé diale après l’IFTAR et le SUHUR si les patients abusent en et analysé. Des conseils médicaux spécifiques doivent être don- quantité dans le repas. On peut proposer de répartir la ration Le Fascicule de la Santé - Hors série n° 1 – Juin 2014
5 DIABÈTE ET RAMADAN en trois «petits» repas dans l’intervalle entre l’IFTAR et l’IM- Insulinosécrétagogues d’action courte SAK, pour prévenir une excursion glycémique excessive Les molécules de cette classe (repaglinide et nateglinide) sont postprandiale. utiles et pratiques du fait de leur courte durée d’action. Elles Le programme de l’activité physique doit être modifié en inten- peuvent être administrées en deux prises par jour avant (IFTAR sité et en horaire pour éviter les épisodes d’hypoglycémies. On et SUHUR). Une étude chez les diabétiques de type 2 qui ont peut proposer une activité physique 2 heures après l’IFTAR. jeûné a montré que l’utilisation de repaglinide est associée avec moins d’hypoglycémies en comparaison avec le glibenclamide Patients sous médication orale [16]. Une étude tunisienne à montré que l’utilisation du repagli- Le choix des agents oraux doit être individualisé. En général, nide chez le diabétique de type 2 pendant le Ramadan contrôle les médicaments qui augmentent l’insulino-sensibilité ont un les glycémies post prandiales sans exposer à un risque d’hypo- risque très faible d’hypoglycémie par rapport aux médicaments glycémies diurnes [17]. La molécule nateglinide a la plus courte qui augmentent l’insulino-sécrétion. durée d’action et donc un risque bas d’hypoglycémie sévère parmi les sécrétagogues. Metformine Les patients sous metformine seule peuvent jeûner car le risque Traitement par les incrétines d’hypoglycémie sévère est minime. Il faut juste modifier les po- Les traitements relevant du système incrétine comprennent les sologies des prises. Les auteurs recommandent que deux tiers analogues du GLP-1 (exenatide et liraglutide) et les inhibiteurs de la dose totale doivent être pris lors de l’IFTAR et le tiers res- de la DDP-4 (alogliptine, saxagliptine, sitagliptine, et vildaglip- tant lors du SUHUR. tine). Ces molécules ne provoquent pas d’hypoglycémie, mais peuvent augmenter l’effet hypoglycémiant des sulfamides, des Glitazones glinides et de l’insuline. Les patients sous glitazones, qui sont des agents insulino-sen- L’exenatide en particulier, peut être prescrit avant les repas pour sibilisateurs, ont un risque faible d’hypoglycémie. Mais ces mo- réduire l’appétit et favoriser la perte pondérale. Avec sa courte lécules peuvent amplifier l’effet hypoglycémique des sulfamides, demi-vie de 2 h, il n’est pas associé avec un effet substantiel des glinides et de l’insuline. Les glitazones peuvent provoquer sur la glycémie à jeun. Le liraglutide est donné une fois par jour, une prise de poids et une augmentation de l’appétit. indépendamment des repas, et est plus efficace dans le Le problème majeur reste l’augmentation de la fréquence de contrôle des glycémies à jeun. Les deux molécules nécessitent l’insuffisance cardiaque, malgré l’avancée dans la compréhen- des ajustements des doses sur une période de 2 à 4 semaines, sion du mécanisme de cet effet secondaire qui semble être lié et donnent des nausées dans la moitie des cas. plûtot à une réabsorption rénale hydro-sodique tubulaire et non Les inhibiteurs de la DDP-4 sont les mieux tolérés dans le traite- par effet direct sur la contractilité myocardique. Plus récemment, ment du diabète. Ils sont légèrement moins efficaces que le GLP- une appréhension a émergé concernant l’augmentation de la 1 dans la baisse de l’A1c, mais fait important vis-à-vis du traitement fréquence de l’œdème maculaire et des fractures osseuses, durant le Ramadan, ils ne nécessitent pas d’ajustement de doses. particulièrement chez les femmes ménopausées. Certains auteurs vantent leur rôle potentiel de substitution aux sul- La question pratique, d’importance significative est que les gli- famides. Cependant, il n’y a pas d’études spécifiques concernant tazones nécessitent 2 à 4 semaines pour voir l’effet substantiel l’utilisation des incrétines durant la période du jeûne [18]. anti-hyperglycémique. Pour cela ces molécules ne peuvent pas être rapidement remplacées par des molécules provoquant une Inhibiteurs de l’alpha-glucosidase hypoglycémie durant les périodes de jeûne [13]. Acarbose, miglitol, et voglibose sont des molécules qui ralen- tissent l’absorption des hydrates de carbone quand elles sont Sulfamides hypoglycémiants prises au début du repas. Du fait de leur non-association avec Du fait du risque d’hypoglycémie, l’utilisation de cette classe de l’hypoglycémie, particulièrement en période de jeûne, ces mo- médicaments est théoriquement incompatible avec le jeûne. Ce- lécules sont particulièrement utiles durant le Ramadan, mais pendant l’hypoglycémie sévère fatale est une complication rela- elles ont un effet modeste sur la glycémie à jeun, et sont sou- tivement rare des sulfamides. Ils doivent être utilisés avec vent associés aux molécules qui contrôlent la GAJ. Elles don- précaution en fonction de chaque patient. Le chloropropamide nent fréquemment des effets secondaires gastro-intestinaux est formellement contre-indiqué durant le Ramadan car il com- légers à modérés, particulièrement une flatulence. En utilisant porte un risque élevé d’hypoglycémie prolongée et non prévisi- des faibles doses et une initiation progressive du traitement, on ble. On pense que le glyburide ou le glibenclamide peuvent être peut réduire la fréquence de ces effets secondaires [19]. associés avec un risque élevé d’hypoglycémie par rapport aux sulfamides de seconde génération, en particulier le gliclazide, le Diabétiques de type 2 traités par insuline glimiperide et glipizide [14,15]. Le problème du diabète de type 2 sous insuline est similaire Pour proposer de fortes recommandations, des études sont aux diabétiques de type 1, avec une moindre incidence d’hy- nécessaires pour évaluer l’utilisation des sufamides chez les poglycémie. Les personnes très âgés avec un diabète de type patients qui jeûnent durant le Ramadan. Néanmoins, du fait 2 sous insuline peuvent être à haut risque. de leur utilisation mondiale et du faible coût, ces molécules Le but est de maintenir des doses nécessaires d’insuline ba- peuvent être utilisées durant le Ramadan avec précaution. sale pour prévenir l’hyperglycémie à jeun. 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Ali Lounici 6 Une stratégie efficace serait l’utilisation judicieuse d’insuline post-prandiales et les niveaux d’insuline sont substantiellement intermédiaire ou à longue durée d’action plus une insuline élevés chez les femmes enceintes saines par rapport aux d’action courte, avant les deux principaux repas (IFTAR et femmes non-enceintes. L’augmentation de l’A1c chez la femme SUHUR) pourrait assurer une couverture satisfaisante tant que enceinte est associée avec un risque élevé de malformations la posologie de chaque injection est individualisée. Bien que congénitales. Le jeûne pendant la grossesse semble provoquer l’hypoglycémie est moins fréquente, il y’a toujours un risque, un risque élevé de morbidité et de mortalité pour le fœtus et sa particulièrement chez les patients sous insulinothérapie pen- mère, bien que ce risque soit controversé [24]. Alors que les dant plusieurs années ou chez ceux où le déficit de la sécré- femmes enceintes sont exemptées du jeûne, certaines, ayant tion d’insuline est important. un diabète (type 1, type 2, ou gestationnel) insistent pour faire le Ramadan. Ces femmes constituent un groupe à très haut Pour les patients de type 2 avec sécrétion basale d’insuline per- risque et leur prise en charge nécessite des soins intensifs [25]. sistante, une seule injection d’insuline intermédiaire pourrait suf- En général les femmes avec diabète pré-gestationnel doivent fire pour avoir un équilibre acceptable. Cependant, la plupart des être fortement conseillées de ne pas jeûner. Si elles insistent, patients nécessiteront une insuline d’action rapide associée à une une surveillance très stricte doit être assurée. Leur prise en intermédiaire ou longue pour pallier à l’excursion glycémique charge doit se faire dans les consultations de grossesses à haut postprandiale de l’IFTAR. De plus plusieurs patients nécessite- risque et multidisciplinaires. L’évaluation médicale est essen- ront un complément d’insuline d’action courte lors du SUHUR. tielle avant le Ramadan. Certaines études suggèrent que l’utilisation d’insuline analogue La prise en charge des femmes enceintes durant le Ramadan d’action rapide au lieu de l’insuline classique avant les repas est basée sur une diététique appropriée et une insulinothérapie chez les diabétiques de type 2 qui jeûnent durant le Ramadan intensive. Les questions discutées dans le chapitre de la prise en ont moins d’hypoglycémies et une faible excursion glycémique charge du diabète type 1 et 2 sont applicables à ce groupe, avec postprandiale [20,21]. une surveillance glycémique et des ajustements des doses d’in- suline qui doivent être nécessairement plus fréquents. Dans une étude récente, l’utilisation d’une prémix lispro mélan- gée à une protamine lispro dans un ratio 50/50 lors de l’IFTAR Conclusion et de l’insuline NPH (70/30) lors du SUHUR, en comparaison avec l’insuline NPH (30 /70) deux fois par jour est associé à une Les diabétiques qui jeûnent durant le Ramadan sont exposés amélioration modérée du contrôle glycémique sans augmenta- à un risque de complications. En général, les diabétiques de tion de l’incidence de l’hypoglycémie [22]. type 1 qui sont à très haut risque de complications vitales doi- Quelque soit le schéma de l’insulinothérapie, la surveillance des vent être fortement conseillés de ne pas jeûner. glycémies plusieurs fois dans la journée est nécessaire. Néanmoins, la réduction excessive des doses d’insuline chez ces patients (pour éviter l’hypoglycémie) peut les exposer au Prise en charge de l’hypertension risque d’hyperglycémie et de cétose diabétique. L’hypoglycé- La déshydratation, l’hypovolémie et une tendance à l’hypo- mie et l’hyperglycémie peuvent aussi survenir chez les pa- tension peuvent survenir lors du jeûne. Surtout si le jeûne est tients avec un diabète de type 2, mais sont généralement prolongé et associé à une transpiration excessive. Les poso- moins fréquentes et ont moins de conséquences fâcheuses logies et les classes thérapeutiques des antihypertenseurs que dans le diabète de type 1. peuvent nécessiter des réajustements pour prévenir l’hypo- tension. Les diurétiques peuvent être inappropriés durant le La décision de jeûner doit être prise après discussion approfon- Ramadan pour certains patients. die avec le médecin traitant sur les risques encourus. Chez les personnes âgées, souvent avec une hypertension ar- La prise en charge doit être individualisée. Un suivi strict est es- térielle et une dyslipidémie, la restriction hydrique et la déshy- sentiel pour réduire le risque de complications. dratation peuvent augmenter le risque de thrombose. La survenue du mois de Ramadan en saisons chaudes avec Prise en charge de la dyslipidémie des journées de plus de 16 heures de jeûne rendent très difficile La prise excessive d’aliments hypercaloriques et riches en l’implication du praticien dans des recommandations qui vont à graisses est une «coutume» durant le Ramadan. Des conseils l’encontre de la physiologie. appropriés doivent être donnés pour éviter cette pratique. Le Ramadan est mois sacré qui un poids spirituel important. Les malades qui sont sous traitement de la dyslipidémie doi- Dans ce contexte il est très difficile de convaincre nos patients vent le maintenir. de s’abstenir de jeûner malgré les préceptes religieux dans l’exemption bien établie dans cette maladie. Grossesse et jeûne durant le Ramadan Le médecin doit juger au cas par cas avec toute l’autorité et la La grossesse est un état d’augmentation d’insulino-résistance et sagacité nécessaires pour accompagner son patient. Il ne s’agit d’insulino-sécrétion et une réduction de l’extraction hépatique pas de prouesses d’endurances à négocier, mais de risques, de l’insuline. Les glycémies à jeun sont basses, les glycémies souvent silencieux, indolores même sur de courtes périodes. Le Fascicule de la Santé - Hors série n° 1 – Juin 2014
7 DIABÈTE ET RAMADAN Tableau 4. Changements de traitements recommandés chez les diabétiques de type 2 qui jeûnent durant le Ramadan Avant Ramadan Durant Ramadan Patients sous diététique et exercice physique sans médicaments. - Modifier horaire et intensité de l’exercice physique. - On peut proposer une activité physique 2 heures après l’IFTAR. - Assurer une réhydratation adéquate. Patients sous médicaments oraux - Assurer une réhydratation adéquate. - Biguanides : exemple Metformine 500 mg 3 fois par jour. - Metformine 1000 mg au moment de l’IFTAR, 500 mg au moment du SUHUR. - Glitazones, Inhibiteurs α–glucosidase, Incrétines. - Pas de changements. - Sulfamides hypoglycémiants Une prise par jour : exemple Glimepiride 4 mg, Gliclazide MR 60 mg. - Une prise doit se faire avant l’IFTAR, ajuster les doses en fonction des glycémies et du risque d’hypoglycémies. Deux prises par jour : exemple Glibenclamide 5 mg/ Gliclazide 80 mg - Utiliser la moitie de la dose au moment du SUHUR (Glibenclamide 2,5 (matin et soir). mg/ Gliclazide 40 mg) et la dose totale au moment de l’IFTAR (Gliben- clamide 5 mg/ Gliclazide 80 mg). Patients sous insuline - Assurer une réhydratation adéquate. Exemple : Patients sous schéma Premix, Mixtard (70/30) deux - Utiliser la posologie du matin lors de l’IFTAR et la moitie de la dose injections par jour, exemple 30 unités matin et 20 unités le soir. du soir lors du SUHUR (30 unités le soir au moment de l’IFTAR et 10 unités le matin au moment de SUHUR). On peut faire des appoints en préprandiale avec une insuline d’action rapide. Ces recommandations sont basées sur des opinions d’experts cliniques et non basées sur des preuves scientifiques. Elles doivent être ajustées pour chaque patient. Adapté de l’article Akbani et al [23]. Abréviations IFTAR Repas au moment de la rupture du jeûne lors du coucher du soleil. SUHUR Repas de l’aube avant IMSAK. IMSAK Moment du début du jeûne lors du lever du soleil. TARAWIH Multiples prières réalisées chaque soir du mois de ramadan après IFTAR. EPIDIAR Epidemiology of Diabetes and Ramadan. DCCT Diabetes Control and Complications Trial. UKPDS UK Prospective Diabetes Study. EDIC Diabetes Interventions and Complications. GLP-1 Glucagon-like peptide-1. DPP-4 Dipeptidylpeptidase-4. GAJ Glycémie à jeun. AVC Accident Vasculaire Cérébral. Le Fascicule de la Santé - Hors série n° 1 – Juin 2014
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s L ’obstination de jeûner durant le ramadan est une décision importante que le patient diabétique prendra à la lumière des recommandations des exemptions religieuses et après évaluation minutieuse des risques potentiels du jeûne en consultation avec le médecin traitant. Les patients qui insistent pour faire le Ramadan doivent être informés des risques qu’ils encourent et prêts à adhérer aux conseils de leurs médecins pour diminuer ces risques. Après avoir expliqué au patient diabétique tous les risques du jeûne particulièrement les patients sous insuline. Le médecin doit accompagner et respecter la décision de son patient qui a opté de jeûner, et doit tenir compte de la dimension spirituelle que procure le jeûne au patient, en lui prodiguant les conseils appropriés. Les pa/ents avec un diabète de type 1 qui font des hypoglycémies récurrentes ou qui sont inconscients du risque d’hypoglycémie ou qui sont mal équilibrés, et ceux qui ne peuvent pas surveiller leurs glycémies durant la journée, sont à risque très élevé de développer une hypoglycémie sévère. On doit fortement conseiller à ces catégories de pa/ents de ne pas jeûner durant le Ramadan. Les pa/ents avec un diabète de type 2, par/culièrement ceux qui sont sous insulines ou sulfamides hypoglycémiants, ont aussi un risque d’hypoglycémie même s’il est rela/vement moins fréquent et moins sévère. Ils nécessitent une surveillance glycémique renforcée. Les pa/ents qui décident de jeûner doivent subir une évalua/on avant le Ramadan et recevoir une éduca/on par/culière et des instruc/ons spécifiques. La prise en charge doit être individualisée. Un suivi strict est essen/el pour réduire le risque de complica/ons. Le jeûne doit être rompu en cas de survenue de signes d’hypoglycémie et si la glycémie est inférieure à 0,7 g/L durant les premières heures après l’IMSAK. L’espoir reste dans les nouveaux médicaments qui ont un risque amoindri d’hypoglycémie et peuvent avoir des avantages spécifiques durant le Ramadan. Dr Abdelhamid SALAH LAOUAR
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