Le re et élitaire de la musique classique - Apolline TERRET - Diplôme Supérieur d'Arts Appliqués ÉSAAB Nevers 2020/2021

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Le re et élitaire de la musique classique - Apolline TERRET - Diplôme Supérieur d'Arts Appliqués ÉSAAB Nevers 2020/2021
Le reflet
élitaire
de la
musique
classique

Apolline TERRET - Diplôme
Supérieur d’Arts Appliqués
ÉSAAB Nevers - 2020/2021
Le re et élitaire de la musique classique - Apolline TERRET - Diplôme Supérieur d'Arts Appliqués ÉSAAB Nevers 2020/2021
Le re et élitaire de la musique classique - Apolline TERRET - Diplôme Supérieur d'Arts Appliqués ÉSAAB Nevers 2020/2021
Le reflet
           élitaire
            de la
          musique
          classique

Apolline TERRET - Diplôme Supérieur d’Arts Appliqués
             ÉSAAB Nevers - 2020/2021
Le re et élitaire de la musique classique - Apolline TERRET - Diplôme Supérieur d'Arts Appliqués ÉSAAB Nevers 2020/2021
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Index
Introduction                                 p. 9

Au commencement...                           p. 11
Les origines de la vision élitaire de
la musique classique. Définition de
la musique classique. Étude de son
origine, de son financement et de son
accès. État des lieux de la situation
actuelle.

Face à face                                  p. 16
Des points de vue contradictoires,
voir paradoxaux. Les différents points
de vue, le public, les artistes, ce qu’ils
projettent.

Miroitement et réception                     p. 22
Les représentations de la musique
nourrissent-elles cet élitisme ?
Les thèmes abordés sur les pochettes
de disques, les images renvoyées à la
télévision.

Supports prometteurs                         p. 31
Quels supports tendent à
démocratiser la musique classique?
La musique dans les films,
les videos, la réaction du secteur
face à la pandémie mondiale.
L’importance des réseaux sociaux
et des plateformes de streaming.

Conclusion                                   p. 38

Bibliographie                                p. 40
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▶ Erhard Scön, Le diable à la
cornemuse, gravure, vers 1525

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J
       e ne comprends pas    pourquoi la musique classique fait peur aux gens »
«      s’étonne le compositeur, concertiste et animateur radio Jean-François
       Zygel dans un entretien2 pour le magazine Télé Z. D’où peut bien venir
       cette appréhension ? Lorsqu’on parle de « musique classique », l’adjectif
« élitiste » est un de ceux qui lui est le plus souvent associé. C’est donc peut-
être cette réputation élitaire dont souffre le secteur qui effraie les foules. Cette
notoriété rend frileux de nombreux curieux qui n’osent pas s’investir ou se
sentent jugés de ne pas avoir une connaissance parfaite. Le support principal
de représentation de la musique classique est sans nul doute le concert suivi
du support CD. Les concerts de musique classique sont traditionnellement
codés et insinuent une certaine conduite pas forcément connue de tous,
rendant les représentations inconfortables pour certains. L’image désuète
de la musique classique, présente dans les affiches de spectacle et dans les
CD, a également un impact sur la manière dont elle est perçue. Figées dans le
temps, les illustrations oscillent entre des thèmes peu diversifiés et renforcent
un aspect élitaire par l’utilisation d’œuvres d’art historiques pas forcément
accessibles à tous. Les nouveaux supports d’écoute tels que les plateformes
de streaming, tendent à démocratiser cette musique mais le fait de sorte que
seuls les aficionados peuvent au final s’y retrouver ; ne « traduisant » pas les
noms des œuvres. Quand on choisit d’écouter du classique, on choisit avant
tout un compositeur connu ou on lance une playlist toute faite. Il nous est
difficile de retenir le nom d’une piste ou de nous y retrouver face aux multiples
Bagatelle, Concerto, Suite, Nocturne, etc. À travers cet écrit, il ne s’agit pas de
vérifier si la musique classique est élitiste, mais de comprendre les fondements
de l’image qu’elle renvoie. Il est donc question de saisir les origines de cette
vision élitaire afin de déceler ce qui empêche une meilleure accessibilité à la
musique classique, de déchiffrer les codes qui miroitent et nourrissent cette
image. Il s’agit aussi d’analyser les différents points de vue des acteurs du
secteur pour voir si le milieu est prêt à accueillir un nouveau public.

1. Anne-Claire Dugas, « Jean-François Zygel « Je ne comprends pas pourquoi la musique classique fait
peur aux gens », TéléZ, www.telez.fr, Paris, 28 août 2018. Consulté le 10 novembre 2020.

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Au
 com
 men
cement
      ...
 11
La musique classique désigne une musique savante, profane
ou sacrée, dédiée à contribuer à la culture musicale générale
et à ce titre étudiée dans des conservatoires de musique. Elle
fait référence aux œuvres répertoriées de grands compositeurs
occidentaux2, par opposition à la musique populaire, au jazz, au
rock ou à la musique de variété. La musique classique répond à
des règles codifiées qui n’ont cessé de se perfectionner avec le
temps. C’est une musique écrite ˗ à l’origine par des pontifes3, des
nobles et des seigneurs ˗ rigoureuse, donc habilement construite.
Le son, matériaux noble mais impersonnel de la composition,
doit être émis selon des règles conservatrices. Cette musique
veut survivre à son époque et est donc dédiée aux compositeurs,
laissant une part relativement restreinte à l’interprète.

La musique classique se distingue donc de la musique populaire
orale et exige plusieurs degrés d’apprentissages. Au XVIIe siècle,
tout le monde ne peut pas s’offrir d’instruments ni même une
éducation. La plupart des morceaux de musiques classiques
étaient financés par de riches mécènes, par l’Église ou directement
par la Cour, donc par le Roi. La musique de chambre, formation
musicale de petite taille performant chez un particulier, n’est
accessible que pour les plus aisés. Les représentations publiques,
qui n’arrivent qu’au XVIIIe siècle en France, sont également
restreintes et donc peu accessibles car l’Académie royale de
musique avait la main mise sur tout spectacle. À l’époque,
écouter, jouer ou composer de la musique classique est de ce fait
l’affaire de la haute société.

2. Il existe aussi des musiques classiques ailleurs qu’en Occident, qui désignent
les traditions musicales érudites, telles que la musique classique chinoise, la
musique classique indienne, la musique classique andalouse, etc. Mais l’objet
d’étude ici est bien la musique classique occidentale.
3. N.m, du latin pontifex,-icis : titre donné aux évêques et, en particulier, au
pape, évêque de Rome et chef suprême de la chrétienté, appelé souverain
pontife. def. du dictionnaire Larousse.

                                12
▶ Collage Le Roy dansant en
      musique,par l’auteure, 2020

13
▶ Auditorium du
                             Conservatoire à Rayonement
                               Régional (crr) du Grand
                                 Chalon (dr), anonyme

Qu’en est-il aujourd’hui ? La musique classique est-elle toujours
réservée à une certaine catégorie sociale ? Sans apprentissage,
cet art ne nous est pas familier et peut paraître compliqué,
donc inaccessible. L’école n’ayant pas à son programme un
apprentissage approfondi de la musique classique, la familiarité
à cette pratique reste déterminée par le bagage culturel auquel
chaque individu a accès grâce à son cercle de socialisation
primaire, ce que Bourdieu qualifie de capital culturel. L’école
a pour mission de démocratiser le savoir, sachant que celui ci
n’est pas possible sans transmission. La musique classique, elle,
ne bénéficie pas de structure où l’accès y est obligatoire et donc
où l’approche de la pratique devient familière. Les bases sont
enseignées en cours de Musique mais, avec une heure de cours
par semaine pendant les quatre années de collège4, il est difficile
de rentrer dans les détails. Un des seuls moyens d’être touché par
la musique classique est que le cercle de socialisation primaire,
donc la famille et l’entourage proche y ait eu aussi accès.
L’enseignement musical extra-scolaire peut également participer
à une sensibilisation à la musique classique. Celle-ci connaît
en France une augmentation importante de ses effectifs depuis
les années 1970. Dans ce contexte où l’enseignement musical
n’occupe qu’une place mineure à l’école, ce développement s’est

4. Horaires comuniquées sur le site du ministère de l'éducation nationnale, de
la jeunesse et des sports.

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fait par la création de nombreux établissements spécialisés.
Cependant, malgré des objectifs d’une démocratisation
culturelle, les données disponibles sur les conservatoires
montrent au contraire un renforcement de la sélectivité sociale
de cette pratique. En effet, l’enseignement de la musique en
conservatoire se distingue des autres par son caractère formel
et exigeant, et demande un investissement familial en temps et
souvent en argent important. Un établissement semble tout de
même décidé à améliorer les choses. En 2018, à l’occasion de La
rentrée en musique de la radio France musique, le contre-ténor
Philippe Jaroussky, parrain de cet évènement, témoigne de son
investissement dans la pédagogie et dans la démocratisation du
classique. Pour lui, il faut arrêter d’attendre que les choses se
fassent toutes seules et il faut « se retrousser les manches ». C’est
ce qu’il a fait en créant sa propre académie musicale5 en 2017.
Venant d’un milieu modeste, il a souhaité donner leur chance
aux jeunes venant de milieux défavorisés et ne pouvant pas
s’offrir le luxe d’un conservatoire. Les cours sont gratuits et les
instruments sont prêtés le long de la formation. Les élèves sont
accompagnés et baignés dans une culture riche et bienveillante.
Sur le site de l’académie le programme « Jeunes Apprentis » est
décrit comme permettant « la découverte de la musique classique
et l’accès gratuit à la pratique instrumentale à des enfants qui en
sont éloignés financièrement et culturellement. » Ils travaillent en
association avec des centres sociaux culturels pour repérer ces
élèves. Cette académie est unique en son genre, car la pluspart
des cours de musique gratuits se font en ligne et ne permettent
pas un suivi soutenu. Un problème de taille reste à soulever dans
cette belle démarche : la localisation. Même s’ils accueillent des
enfants des banlieues défavorisées, les familles peuvent-elles
vraiment se permettent de passer une heure aller et une heure
retour dans les transports deux fois par semaines pour un cours
de musique d’une heure à Boulogne Billancourt ? De plus, c’est
l’Île-de-France qui est privilégiée, la centralisation Française est
encore bien représentée.

À un certain degré, la vision élitaire de la musique classique est
donc justifiée par ses origines et par son accès limité. Cependant
d’autres facteurs peuvent jouer en défaveur de cette image. Si
l’apprentissage de la musique classique semble élitaire, son
écoute, son appréciation l’est-elle autant ? Différents points de
vue soulèvent un paradoxe au sein de cette pratique.

4. L’Académie Musicale Philippe Jaroussky, association loi 1901, fondée en
2017, 2 Île Seguin, 92100 Boulogne-Billancourt.

                    15
Face
à
face
  16
À la lecture de divers articles, on constate que les acteurs du milieu du
classique ont des points de vue divergents et peuvent renvoyer une image paradoxale.
En effet, la vision que certains aficionados de musique classique ont d’eux-mêmes
peut parfois laisser perplexe. Dans un de ces articles6 publié sur le site Diapason7, les
arguments mis en œuvre pour défendre le non élitisme de la musique classique posent
question. L’auteur commence par annoncer un fait « prouvé » par de nombreuses
enquêtes statistiques, à savoir que le public de la musique classique ne rajeunit pas.
Cependant, il remet immédiatement en cause ces résultats mettant en avant les failles
des enquêtes, telles que la non prise en compte du vieillissement du public dans
d’autres genres musicaux, comme le rock, ainsi que les mutations démographiques
concernant l’entièreté du pays à savoir un vieillissement global de la population.
Emmanuel Dupuy blâme ensuite les politiques, pour lui incapables de mettre en
place des programmes d’éducation inclusifs. Ce serait apparement les institutions
symphoniques et lyriques de France qui mènent des actions envers les jeunes. Et
d’après une nouvelle enquête, cela fonctionne. Celle-ci montre que 20% du public a
moins de 18 ans, et que l’élitisme de la musique classique n’est pas avérée car 48% du
public n’appartiendrait pas aux catégories socioprofessionnelles supérieures. Dupuy
se sert donc d’une enquête pour prouver que la musique classique n’est pas élitiste
alors qu’il remettait en cause l’utilisation de ce genre de pratique un paragraphe plus
tôt, très convainquant.

Un témoignage vient, de plus, court-circuiter ces dires. Le 17 décembre 2018, lors de
sa chronique8 sur France Musique, la journaliste Aliette de Laleu avoue ne plus avoir
envie d’aller à des concerts de musique classique. Pour elle, même si les concerts
de musique classique sont accessibles financièrement au plus grand nombre et
semblent s’être démocratisés ces dernières années, un problème persiste. Comment
un néophyte est-il sensé se sentir à l’aise dans une salle où tout le monde s’accorde sur
les codes stricts à respecter lors d’une représentation ? Comment, lui qui est curieux
et ne connait pas forcément les œuvres présentées, peut-il savoir à quels moments
applaudir ? Pourquoi se soumettre à des codes tels que l’immobilité, le silence imposé,
la nécessité d’une connaissance de l’œuvre pour apprécier la musique ? Aliette met en
avant le besoin d’exporter un nouveaux public dans les salles de concert tout en leur
laissant la possibilité de vivre la musique comme ils le veulent sans être jugé pour
leur méconnaissance. La musique classique, selon elle, n’est pas un savoir, c’est de
l’émotion, « celle-ci se vie sinon elle meurt ». L’acte même du concert nourrit donc
cette vision élitaire et ne rend pas agréable l’expérience du classique.

5. Emmanuel Dupuy, « Non, le public de la musique classique n’est pas vieux et élitiste ! », Diapason,
www.diapason.fr, Paris, le 09 octobre 2015 mis à jour 09 mars 2017, consulté le 17 octobre 2020.
6. Ayant pour sous-titre L’amour du classique, la passion de l’excellence, ce qui en dit long sur leur
positionnement assez stricte, où aucune faille ne semble possible.
7. Aliette de Laleu, « Les concerts de musique classique sont-ils élitistes ? », Paris, France musique,
www.francemusique.fr, le 17 décembre 2018, consulté le 18 octobre 2020.

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▶ Peintures acryliques retouchées,
Danses hongroise, par l’auteure, 2020

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D’autres interventions semblent mettre
en avant une vision du classique
contradictoire au sein des acteurs du
secteur. Dans son mémoire universitaire9,
Adeline Viey analyse et dresse un
compte rendu d’entretiens réalisés avec
des professionnels du milieu. Il apparait
que les artistes sont dans le déni de cette
image élitaire et ne partagent pas ces a
priori. Ils se basent sur leur propre vision
du classique, à savoir, leur métier et leur
passion, oubliant le chemin qu’ils ont dû
emprunter pour apprécier les subtilités
du classique. Pour eux, il n’est pas
nécessaire d’avoir un bagage intellectuel
pour apprécier la musique classique.
Mais, au fil de la discussion, ils finissent
par se contredire en admettant que l’accès
au classique est tout de même semé
d’embuches et peut être contraignant.
Viey cite notamment Marine Berthet,
administratrice du Quatuor Debussy :
« La musique classique, et plus
particulièrement le quatuor à cordes qui              jouer simplement, ne veulent pas
dépend de la musique de chambre, est                  « devenir un orchestre de variété »10 et
un art qui n’est pas forcément accessible             souhaitent garder la part de mystère et de
à des gens qui ne connaissent pas. […]                complexité du classique.
Le public de la musique classique est
un public aisé situé dans les catégories              Ces entretiens et divergences d’opinions
sociaux professionnelles les plus élevées,            illustrent bien la complexité de la question
parce que c’est un art qui est plus                   d’accessibilité à la musique classique. De
difficile d’accès, par rapport à la danse             plus, cela met en avant à quel point cette
ou au théâtre auxquels on va pouvoir                  pratique culturelle est involontairement
accéder plus facilement sans avoir de                 élitaire. Comment pallier ce problème
compétences particulières. » Suite à                  d’image ancrée profondément dans notre
ce constat, deux visions s’opposent.                  société ? Les supports de communication
Certains soutiennent la nécessité de                  et de vulgarisations populaires sont-ils de
produire des évènements plus faciles                  bons intermédiaires ?
d’accès, plus simples et plus ludiques
pour toucher un plus grand public ;
d’autres regrettent de ne pas pouvoir

8. Adeline Viey, Démocratisation et musique classique : mythe ou réalité ?, Lyon, Université Lumière
Lyon II, Institut d’Études Politiques, 2005-2006.
9. Citation de Claire Delamarche, musicologue et chargée des publications à l’Orchestre National de Lyon

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« Je continue à composer
parce que cela me fatigue
moins que de me reposer. »
 Wolfgang Amadeus Mozart / Lettre - 11 Avril 1787

                          20
▶ Collage, High Mozart, par l’auteure, 2020

21
Miroi

&
tement
  récep
   tion
  22
Si la musique classique souffre d’une certaine réputation, il est légitime
d’en observer tous les facteurs. Un de ceux-ci repose sur sa représentation visuelle.
En général, quand on pense à des pochettes de musique classique on a des images
désuètes et kitsch11 en tête. Si on observe les disques présents dans les rayons « musique
classique » à la Fnac ou chez Cultura, plusieurs thèmes sont récurrents. Celui qui a
le plus persisté dans le temps est le portrait historique du compositeur. Des dizaines
de disques différents sont donc promus avec la même représentation Beethoven ou
Mozart. Seuls les usages typographiques divergent mais ils sont souvent proches :
typographie manuscrite ou à empatement. Le thème qui est sans nul doute le plus
employé aujourd’hui est celui de la photographie d’interprètes. Pianistes, violonistes,
flûtistes ou encore chefs d’orchestres prennent la pause tant bien que mal, et virent
à la caricature dans certains cas. Effets de mouvements, dégradés, flous gaussiens
viennent « parfaire » les pochettes avec cette fois des typographies plus linéales. La
nature morte est également très représentée et censée rendre immédiatement compte
du contenu du disque. Sujets religieux pour les requiems, paysages champêtres pour
Les quatre saisons de Vivaldi, forêts mystérieuses ou encore horizons d’océans
infinis. Censés représenter la poésie des œuvres, ces illustrations enferment la
musique classique dans un registre pictural daté. De plus, ces représentations
appartiennent au registre des beaux-arts et peuvent parfois véhiculer des messages
moins directs de par la nécessité de compréhension de l’œuvre. Tout le monde n’a pas
une culture de l’histoire de l’art étendue. Si la double lecture peut-être intéressante,
l’incompréhension devant les illustrations choisies peuvent les rendre étranges, hors-
propos. Si les illustrations figuratives ancrent le classique dans un registre désuet,
les représentations contemporaines, elles, le rendent parfois si abstrait que l’accès
y devient difficile. Dans les faits, l’abstraction peu exprimer de manière brute et
spontanée un sentiment, un mouvement, un rythme, sans l’imager figurativement.
Cependant, le goût pour l’art contemporain est moindre et sa compréhension peut
parfois être limitée si on y est peu familier. L’abstraction reste tout de même un
outil bénéfique à la représentation musicale. Un équilibre entre narration figurative
et abstraction pourrait peut-être habiller la musique classique de manière plus juste
et plus contemporaine. Sortir des outils « traditionnels » peintures et photographies
pourrait également donner plus de puissance aux contenus à illustrer.
Les livrets présents dans les CDs, cassettes ou vinyles de musique classique sont
également à questionner. En effet, on retrouve souvent la biographie du compositeur
accompagnée de la genèse de l’œuvre. Écrit en corps minuscules et formant un gris
typographique très dense, la lecture devient douloureuse. Employant des termes
spécifiques peu compréhensifs pour les néophytes, les explications apportées ne sont
finalement que peu utiles à l’appropriation du registre. Plus de simplicité, de clarté et
des mises en page plus aérées pourraient guérir bien des maux.

11. adj. Se dit de quelque chose de démodé, ridicule, surchargé et souvent laid selon
les critères du moment.

                                              23
▶ Florilège de pochette d’albums des compositions de Chopin

                                                     24
▶ Peintures retouchées, Music in movement, par l’auteure, 2020

                                             25
▶ Prodiges 2020,
                                                                          François Lefebvre,
Sortons du format disque. Si on observe l’image de la musique
                                                                         Endemolshine, FTV
classique renvoyée par les médias audiovisuels, ces derniers
nourrissent une certaine image traditionnelle. En effet, diverses
émissions consacrées au classique sont diffusées chaque années,
souvent sur les chaines du service public, telles que Les victoires de
la musique classique ou encore l’émission Prodiges. Les victoires
de la musique classique subissent depuis plusieurs années une
baisse d’audience. La raison se trouve suremment dans la durée
du programme qui est d’environ trois heures. L’impression d’être
inculte face aux morceaux interprétés, la non compréhension des
titres joués, l’ennui de voir des personnes inconnues défiler, ainsi
que les nombreux aléas du direct, participent également à une
certaine réticence. Cette émission, bien qu’essayant de promouvoir
la musique classique auprès d’un large public, n’est finalement
réservée qu’aux connaisseurs. Même s’il est légitime qu’une
émission très spécialisée soit diffusée, l’image que celle-ci renvoie
à un plus grand public peut intimider. L’émission Prodiges est, elle,
de par sa formule « concours », plus divertissante. La compétition
bienveillante est de mise s’agissant d’enfants âgés de sept à seize
ans. Une bourse de 10 000€ pour commencer sa carrière est à
remporter. Le profil des participants ne varie que légérement : des
enfants ayant débuté le conservatoire très jeunes, parfois forcés par
leurs parents ou des prodiges ayant commencé à jouer une année
auparavant. Plusieurs candidats sortent des mêmes académies ou
sont parfois de la même famille. Cette émission mettant en scène
des enfants très doués peut renvoyer une image attendrissante au
public, facsiné par ce qu’il ne serait même pas capable de faire.
Prodiges reflète un classique innaccessible aux commun des
mortels, seulement abordable aux prodiges.

                                                26
S’il y a un évènement classique que la
plupart des Français regardent chaque
année, c’est le concert de Paris pré feu
d’artifice de fête nationale. Présenté par
Stéphane Bern, ce concert est considéré
par Yannis Chebbi, producteur de
l’évènement comme « le plus Grand
concert » de musique classique : « une
diffusion en prime-time en France et
à l’étranger, des audiences record, une
jauge de public sur place de près de
500 000 personnes. À travers tous ces
éléments combinés, on parle bien du plus
grand concert du monde».12 Ce concert
célèbre la France et la musique classique
mais renvoie une image ostentatoire de
cette dernière. Les solistes se déplacent
avec des robes de bal et des bijoux
inestimables, l’orchestre est rangé au
millimètre près, les chanteurs ont sorti            ▶ Concert de Paris, Delphine Ghosarossian, 2020
leur plus beaux costumes trois pièces.
En soit rien d’anormal, l’évènement étant
exceptionnel mais, cela nourrit encore
une image stricte, luxueuse, taillée au
« cordeau » du classique où « l’à peu près »
n’est pas envisageable.

12. Propos recueillis par Clément Buzalka,
« Audiences en hausse pour le Concert de Paris »,
francemusique.fr, France Musique, Paris,
15 Juillet 2019, consulté le 10 décembre 2020

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La télévision est donc un support de communication non négligeable pour la musique
classique. Si des émissions renforcent une image désuète, La Zygel Academie amène,
elle, un apprentissage historique ludique de la pratique. Le compositeur et concertiste
Jean-François Zygel propose dans celle-ci un concept original permettant de mieux
connaître le classique accompagné de célébrités. Il se confie auprès du magazine
Télé Z à propos de cette émission : « une émission de musique classique peut tout à
fait fonctionner en télévision. Je suis certain qu’aujourd’hui le public a soif d’émissions
de télévision où on s’adresse à lui simplement et intelligemment en lui expliquant
comment ça marche, comment apprécier les différents instruments, découvrir les
nombreux interprètes. Regardez les succès des tutoriels sur Internet : à notre époque,
les gens veulent comprendre. Nous, les musiciens classiques, devons admettre que notre
métier est aussi d’expliquer, de transmettre et de partager la musique classique avec
pédagogie. »13 Et cela a fonctionné, bien que malheureusement diffusée à une heure
tardive14, les parts de marché de l’émission étaient au rendez-vous. La musique classique
s’est vue libérée et décomplexée. Cependant, les émissions culturelles comme celles-ci
sont souvent les premières à être annulé dans les programmations du service public et la
Zygel Académie n’a pas vu de nouveaux épisodes depuis 2018.

Si l’accès à la musique classique par l’apprentissage et le concert est élitaire
involontairement, sa présentation, elle, est plus abordable. La plupart des illustrations
sont accessibles et illustrent relativement bien les œuvres sonores. Le registre kitsch des
œuvres est également un outil marketing jouant sur la culture du moche. Interloquantes
et décalées sans le vouloir, ces illustrations peuvent vendre. Cependant, ces figures,
souvent désuètes, ancrent cette pratique culturelle dans un registre peu contemporain
et n’attire pas forcément un nouveau public de manière pérenne. Les représentations
audiovisuelles renvoient, pour la plupart, une impression d’innaccessibilité. Le sujet
étant la musique classique populaire, faisant partie de la mémoire collective, l’image
élitaire renvoyée par certaines émissions n’est pas souhaitable. Des programmes courts,
décontractés et instructifs, passés à des heures de grande écoute pourraient désinhiber
l’image du classique.

13. Anne-Claire Dugas, « Jean-François Zygel : « Je ne comprends pas pourquoi la musique classique fait
peur aux gens », TéléZ, www.telez.fr, Paris, 28 aout 2018, consulté le 10 novembre 2020.
14. Diffusion en deuxième partie de soirée, à 23h sur France 2

                                                       28
▶ Distortions colorées de pochettes de
     Mozart, par l’auteure, 2020

29
30
31
     Supports
     prometteurs
La musique classique bénéficie d’une         change et laisse place au voyage à travers
vaste promotion souvent cachée. Les          les différentes phases de la nature.
bandes originales de films sont fournies     L’animation est le moyen pour Walt
en références classiques. Œuvres             Disney et Stokowski d’amener la musique
réinterprétées ou ayant inspirés de          classique au monde. Stokowski, lors
nouveaux morceaux, les films comme la        d’une rencontre avec un journaliste en
publicité, sèment dans notre inconscient     1971, évoque d’ailleurs les nombreuses
des airs lyriques. Ainsi, Kubrick nous       lettres de personnes le remerciant d’avoir
hypnotise en 1968 avec l’emploi de Also      fait Fantasia, de leur avoir permis avec
Sprach Zarathustra de Richard Strauss        ce film d’exorciser leurs peurs d’aller
dans le long métrage 2001 : A space          dans une salle de concert et d’aimer les
Odyssey. Il réitère dans A Clockwork         chefs-d’œuvre de la musique classique.
Orange en 1971 en employant la musique       La liste des emplois cinématographiques
de Beethoven comme source de la              est bien plus longue et permet donc
violence du personnage principal. Francis    aux auditeurs de se familiariser avec
Ford Coppola, lui, nous transporte           les compositions classiques, sources
avec La chevauchée des Walkyries             narratives inépuisables.
de Wagner dans Apocalypse Now. De
son coté, Disney nous captive avec le        La multitude de films retraçant la vie
long-métrage d’animation Fantasia en         des compositeurs les plus connus aide
1940. Celui-ci est composé comme une         également à une vulgarisation du secteur.
série de sept séquences illustrant huit      Bien que ces adaptations ne soient
morceaux de musique classique célèbres.      pas toujours fidèles, elles réussissent à
On retrouve notamment Toccata et fugue       nous divertir tout en nous instruisant.
en ré mineur de Bach, différents extraits    Ainsi, nous voila plongés dans la folie
du ballet Casse-noisette de Tchaïkovski,     de Mozart dans l’Amadeus de Miloš
Le Sacre du printemps d’Igor Stravinsky,     Forman en 1984, absorbés par la tragédie
ou encore l’Ave Maria de Schubert. Ces       auditive de Beethoven dans Immortal
morceaux sont joués pour la plupart          Beloved de Bernard Rose en 1994. Jean-
par l’orchestre de Philadelphie sous la      Louis Guillermou nous accueille dans
direction de Leopold Stokowski.              l’intimité de Bach dans Il était une fois
                                             Jean-Sébastien Bach en 2003 et de
Fantasia se veut être une véritable          Vivaldi dans Antonio Vivaldi, un prince
expérimentation artistique mettant au        à Venise en 2006.
premier plan la musique et l’animation.
Contrairement au cinéma où l’image           Le cinéma, et donc l’image animée,
précède la musique, la musique est,          sont un support permettant de mettre en
ici, la base de toutes les séquences.        tension musique et narration. Adapter
Les animateurs n’ayant que les notes         certaines des œuvres de compositeurs
de musique pour socle d’histoire, leur       en long ou court métrages serait une
imagination n’a pas de limites et les ré-    solution pour faciliter l’accès à celles-
interprétations sont audacieuses pour        ci. Il existe déjà quelques adaptations
l’époque. Ainsi, le ballet Casse-noisette    mais celles-ci sont souvent destinées aux
est complètement réinventé. La danse         enfants ou plutôt datées.
et la forme ballet restent mais l’histoire

                                             32
▶ Also Sprach                                   ▶ La chevauchée
Zarathustra,                                    des Walkyries,
Richard Strauss                                 Wagner dans
dans 2001 : A space                             Apocalypse Now,
Odyssey, Staneley                               Francis Ford Cop-
Kubrick, 1968.                                  pola, 1979

▶ Symphonie n°9,                                ▶ Casse-Noisette,
Beethoven dans A                                Tchaïkovski dans
Clockwork Orange,                               Fantasia, Walt
Stanley Kubrick,                                Disney Studio,
1971                                            1940

                      ▶ Poster du film Amadeus, Miloš Forman, 1984.

              33
bist die Ruh,’ D. 776 - Piano Quartet No. 1, Op. 25 - Nocturne in B-flat minor, Op. 9, No. 1 - Scherzo No. 1
  1 - Quintet for Clarinet and Strings in A major, K. 581 - Sonata for Clarinet and Piano, Op. 120, No. 1 -
  ite No. 3 in D major, BWV 1068 - Partita in C minor, BWV 826 - Also Sprach Zarathustra, Op. 30 - An
   77 - Cello Concerto in A minor, Op. 33 - Piano Concerto No. 1 in B-flat minor, Op. 23 - Peer Gynt Suite
horus of the Hebrew Slaves (Va’, Pensiero, Sull’ali Dorate) - Piano Concerto No. 21 in C major, K. 467: II.
   Op. 95, «From the New World»: II. Largo - Gymnopédie No. 1 - Bagatelle in A minor, Wo Op. 59, «Für
  rings and Organ (after T. Albinoni) - Serenade No. 13 in G major, K. 525, «Eine Kleine Nachtmusik»: I.
 Vlast (My Fatherland): Vltava (The Moldau River) - String Quintet in E major, Op. 13: Minuet (mislabe-
 iano Sonata No. 11 in A major, K. 331: Rondo: Alla Turca - Double Concerto in D minor for Two Violins,
a Requiem: Dies Irae – Tuba Mirum - Festival Overture in E flat major, Op. 49 - Vivace - Allegro - Pasto-
e» - String Quartet No. 62, Op. 76/3 «Emperor» - Der Hölle Rache kocht in meinem Herzen - 2. Adagio
 3 «Pathétique» - Concerto Grosso in G minor, Op. 6/8 «Christmas Concerto» - Allegro ma non tanto -
Andante cantabile - Radetzky March, Op. 228 - Symphony No. 9 in D minor, Op. 125 «Choral» - Songs
 agietto (from Symphony No. 5) - Piano Quintet in A major, D. 667 «The Trout» - Allegro molto appas-
e. Jesu bleibet meine Freude (Jesu, Joy of Man’s Desiring) - Cantata, BWV 147 - Allegro molto moderato
 ves (Va’, pensiero, sull’ali dorate) - Notturno - String Quartet No. 2 in D major - Pavane, Op. 50 - Adagio
New World» - Ombra mai fu - Xerxes, HWV 40 - Bagatelle in A minor, WoO 59 «Für Elise» - O mio bab-
a - Nocturne No. 2 in E flat major, Op. 9/2 - Minuet, arrangement - Suite No. 1 in G major, for solo cello,
  - Piano Sonata No. 11 in A major, K. 331 - Double Concerto in D minor, for two violins, BWV 1043 - Alle-
  ngs and Percussion - Allegro molto - Symphony No. 40 in G minor, K. 550 - String Quartet No. 13 in A
rg Concerto No. 3 in G major, BWV 1048 - Symphony No. 94 in G major, H. 1/94 «The Surprice» - Piano
 ine Kleine Nachtmusik» - Lasciaascia ch’io pianga - Rinaldo, HWV 7 - Violin Concerto No. 4 in F major, RV
 a and Fugue in D minor for organ, BWV 565 - Canon in D major - Allegro con brio - Symphony No. 5 in
  jor, BWV 846 - Suite No. 1 in G major for unaccompanied cello, BWV 1007- Symphony No. 5 in C Minor,
Scherzo No. 1 in B minor, Op. 20 - Nocturne in C-sharp minor, Op. 27, No. 1 - String Quartet in F major,
  120, No. 1 - Piano Concerto No. 1 - Symphony No. 40 in G minor - Symphonie Fantastique, Op. 14 - Or       Or-
Op. 30 - An Alpine Symphony, Op. 64 - Piano Concerto No. 2 in C minor, Op. 18 - Violin Concerto in D
   Gynt Suite No. 1 Op. 46:: Morning Mood - Adagio for Strings - Orchestral Suite No. 3 in D major, BWV
  jor, K. 467: II. Andante - Brandenburg Concerto No. 3 in G major, BWV 1048: Allegro - Symphony No. 9
p. 59, «Für Elise» - Symphony No. 9 in D minor, Op. 125, «Choral»: Ode an Die Freude - Adagio in G mi       mi-
musik»: I. Allegro - Piano Sonata No. 14 in C-sharp minor, Op. 27:2, «Moonlight Sonata»: Adagio Soste     Soste-
  t (mislabeled – should be Op. 11, No. 5 (G 275): Minuet) - Symphony No. 40 in G minor, K. 550: I. Allegro
wo Violins, BWV 1043: Vivace - Concerto Grosso No. 8 in G minor, Op. 6: «Christmas Concerto»: Allegro
  ro - Pastorale - Hungarian Rhapsody No. 2 in C sharp minor, S. 244/2 - Waltz in D flat major, Op. 64/1
  Adagio cantabile - Partita No. o. 2 in D minor for solo violin, BWV 1004 - Piano Sonata No. 8 in C minor,
nto - Piano Concerto No. 3 in D minor, Op. 30 - Rhapsody on a Theme of Paganini, Op. 43 - Variation 18:
 Without Words, Op. 62/6 «Frühlingslied» - Dies irae - Tuba mirum - Chôro No. 1, «Chôro típico» - Ada      Ada-
 ionato - Violin Concerto in E minor, Op. 64 - Pomp and Circumstance March No. 1, Op. 39/1 - Chorale.
Allegro moderato - Symphony No. 8 in B minor, D. 759 «The Unfinished» - Chorus of the Hebrew Slaves
  poco mosso / 3. Rondo: Allegro - Finlandia, Op. 26 - Symphony No. 9 in E minor, Op. 95 «From the New
  o caro - Adagio in G minor - Panis Angelicus - Liebestraum No. 3 in A flat major, s. 541/3 - Habanera -
BWV 1007 - Peer Gynt Suite No. 1, Op. 46 - Piano Concerto No. 21 in C major, K. 467 - Rondo: Alla turca
  ro non troppo e molto maestoso - Allegro con spirito - Piano Concerto No. 1, Op. 23 - Fratres for Strings
 inor, D. 804 «Rosamunde» - Also Sprach Zarathustra, Op. 30 - L’Arlesienne Suite No. 1 - Brandenburg
onata No. 14 in▶CCollage,
                     sharp Cacophonie
                           minor, Op.sans
                                        27/2 «Moonlight
                                           noms,             Sonata»
                                                 par l’auteure, 2020 - Serenade No. 13 in G major, K. 525 «Eine
 «Winter» (L’inverno) - Violin Concerto No. 1 in E major, RV 269 «Spring» (La primavera) - Toccata and
  nor, Op. 67 «Fate» - Orchestral Suite No. 3 in D major, BWV 1068 - Prelude and Fugue No. 1 in C major,
 2 846 - Ballade No. 3 in A-Flat Major, Op. 47: Allegretto - Barcarolle in F-Sharp Major, Op. 60 - S o n a -
  lat Major, Op. 53, ‘Heroic’: Maetoso - No. 3 in F Major: Allegro ma non troppo - No. 1 in B Major: Vivace

                                                                 34
En 2020, une pandémie mondiale a entaché le rythme des pratiques musicales. Les
rassemblements sont interdis, plus de concerts, de spectacles, de répétitions, de cours
de musique, toute la chaine est ralentie. Mais, grâce à internet, le monde du spectacle
a su se réinventer. Des artistes du monde entier se sont mis à jouer simultanément
grâce aux visio-conférences15. Ils se sont démarqués dans les médias en partageant
leurs performances sur les réseaux sociaux , ont instruit un public plus numérique en
filmant l’histoire de leur instrument et en partageant leur passion. Évidemment, ces
pratiques ne datent pas de cette année, mais le public s’est élargi et les circonstances
ont offert une plus grande visibilité au registre. Ce genre de vidéo-didacticiels
pourraient atteindre le format télévisuel recherché dans la partie précédente, offrant
connaissance en simplicité.

Ce n’est pas une surprise, l’industrie du disque va mal et les ventes d’albums ne
constituent plus le revenu principal des artistes. Ce qui rapporte aujourd’hui ce sont
les concerts et les droits d’auteurs. La diffusion de la musique se fait quasiment
entièrement sur les nouveaux supports d’écoute, à savoir les plateformes de streaming
musical et les réseaux sociaux. Ces nouveaux supports d’écoute participent-ils à la
démocratisation du classique ? La musique classique est présente sur les plateformes
et est donc accessible en un clic au plus grand nombre. Cependant, cela implique-t-il
pour autant une large démocratisation ? Tout dépend de ce qu’on appelle démocratiser.
Si par là on veut parler du fait d’être à la porté de tous dans la consommation immédiate,
oui les plateformes aident. Mais, si on veut dire rendre accessible intellectuellement
et facilement la musique classique, il ya des progrès à faire. Comment s’y retrouver
quand on ne connait pas le domaine devant des Bagatelle, Concerto, Suite, Nocturne,
Sérénades, Fantaisies , face aux noms allemands, italiens ou russes. Comment retenir,
retrouver et apprécier des œuvres sans le reflex d’ajouter une piste aux favoris. Là
encore, seul les connaisseurs peuvent vraiment se repérer et profiter d’un catalogue
infini. Il serait intérresant d’exercer un travail de traduction des œuvres ainsi qu’une
meilleure organisation. De plus, les supports tels que la plateforme Spotify permettent
des intégrations visuelles. Dans certaines des récentes sorties musicales, chaque pistes
est associées à une courte animation illustrant le morceaux16. Le chanteur français
Vianney a également réalisé des courtes vidéos dévoilant les étapes de production
de ses morceaux à l’occasion de la sortie de album N’attendons pas en 2020. Promu
comme « album augmenté » par Spotify, les coulisses, les secrets de réalisation et les
anecdotes rendent l’expérience d’écoute plus riche. Une adaptation de ces pratiques au
classique pourrait renouveler le secteur et le démarquer.

15. cf. Le Boléro de Ravel par l’Orchestre national de France,Youtube, youtube.com, 29 Mars 2020.
16. cf. Deux derniers albums de la chanteuse américaine Taylor Swift, folklore et evermore, 2020.

                                             35
Certains peuvent cependant hésiter à
passer sur une plateforme de streaming
pour écouter du classique, la qualité
du son étant compressée à la création
de la piste. Une plateforme musicale
française s’est donc chargée de pallier
ce problème. En effet, en 2007, Yves
Riesel et Alexandre Leforestier fondent
la plateforme Qobuz. C’est un service
de streaming qui a la particularité de
proposer des abonnements d’écoute de
musique illimitée en Hi-Res Audio17, de
l’achat de musique, des articles et des
playlists. Ils accordent une grande part
dédiée aux labels indépendants et aux
petites productions, mettant en avant
des pratiques de niche comme le jazz
contemporain, le baroque sur instruments
d’époque, la musique médiévale ainsi
que les musiques du monde.

Les supports qui tendent à démocratiser
la musique classique sont donc multiples.
Si certains comme les films ou les réseaux
sociaux sont efficaces à rendre accessible
le secteur, d’autres supports pourraient
gagner en performance. Les plateformes
musicales offrent un catalogue classique
infini mais peu digeste aux novices.
Un effort de vulgarisation pourrait
augmenter et faciliter l’expérience.
                                                  ▶ Collage, Joueur de Flûte nasales double,
                                                                         par l’auteure, 2020

17. Son en haute résolution.

                                             36
37
L
          a vision élitaire de la musique classique trouve son origine dans
          les fondements de la pratique. Son degré d’apprentissage, son besoin
          d’investissement intellectuel et monétaire rendent son accès limité.
          De plus, au sein même du secteur, plusieurs visions s’opposent.
Certains sont dans le déni de l’image que la musique classique renvoie,
d’autres aimeraient voir le milieux se réinventer pour mieux l’apprécier.
Les représentations visuelles du classique participent également à cette
vision élitaire. La majorité des émissions télévisuelles reflètent une image
grandiloquente du domaine, à travers les mises en scène sensationnelles
des concerts ou concours. Certains programmes échappent à cette vision,
ayant à cœur de vulgariser la pratique, et gagneraient à être développés plus
largement. La communication autour des disques de musique classique est peu
diversifiée. Les pochettes se ressemblent et forment un tout homogène peu
distrayant et appétissant. Figées dans le temps, le graphisme de pochettes de
musique classique aurait besoin d’une profonde refonte, tout comme les livrets
les accompagnant. Il serait nécessaire d’expérimenter autour de matériaux,
supports et techniques de production afin de raviver l’image du classique. Les
films et les réseaux sociaux réussissent, eux, à mettre en image le classique
de façon plus attrayante. Ces supports, démocratisant le classique permettent
de s’éloigner de la vison élitaire du secteur. L’image animée a un pouvoir de
narration fort, permettant une appréhension intuitive et ludique. Développer
cet outil est un passage essentiel à la démocratisation du classique. L’avenir de
la musique, en général, se trouve dans les nouveaux supports d’écoute. De plus
en plus développées, les plateformes de streaming offrent un accès illimité
et instantané à tous genres musicaux, y compris le classique. Cependant, il
est difficile de s’y retrouver devant cette offre infinie quand on est néophyte.
Plusieurs pistes permettraient de rendre l’expérience du classique sur ces
plateformes plus agréable. D’abord les traductions des titres en langues
étrangères dans un soucis de compréhension globale. Puis, l’utilisation
des outils permettant l’intégration visuelles, l’écoute serait augmentée car
liée à l’image. Enfin des courtes vidéos coulisses ou anecdotes pourraient
décomplexer le genre et amener à une vulgarisation ludique du classique.
Une chose est sûre, le reflet élitaire de la musique classique n’attend qu’a être
métamorphosé...

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▶ Sérigraphie, Les Noces de Figaro,
     Acte III scène 11, par l’auteure, 2021

39
Bibliographie
Livres, ouvrages

Lawrence KRAMER, Why Classical Music Still Matters, University of California
Press, Berkeley and Los Angeles, California, 2007.

Lawrence KRAMER, Classical Music and Postmodern Knowledge, University of
California Press, Berkeley and Los Angeles, California, 1995.

Adeline VIEY, Démocratisation et musique classique : mythe ou réalité ?, Lyon,
Université Lumière Lyon II, Institut d’Études Politiques, 2005-2006.

Articles, presse

Cinla SEKER (PhD), New Classics : The Analysis of Classical Music Album Covers’
Digital Age Characteristics, Dokuz Eylul University, Turkey, European Scientific
Journal May 2017.

Articles internet

Aliette DE LALEU, « Les concerts de musique classique sont-ils élitistes ? », Paris,
France musique, le 17 décembre 2018.

Emmanuel DUPUY, « Non, le public de la musique classique n’est pas vieux et
élitiste ! », Paris, Diapason, le 09 octobre 2015 mis à jour 09 mars 2017.

Films

Miloš FORMAN, Amadeus, film cinématographique, The Saul Zaentz Company,
1984, 35mm, son Dobly Stereo, coul. (durée 2h40).

Staneley KUBRICK, 2001 : L’Odysée de l’espace (« 2001 : A space Odyssey »), film
cinématographique, Stanley Kubrick Productions, 1968, 65mm, son stéréo Master
hd, coul. (durée 2h41).

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