Les abeiLLes se font péter La ruche - Apiculture - Agrobio Bretagne
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LE dossier du mois Apiculture Les abeilles se font péter la ruche PAr NIels Bize (FRAB) & Damien DEïss (GAB29) Un convoi mortuaire de ruches. L’image fait José Nadan, apiculteur au Faouët, membre chimiques utilisées (par exemple les néo- froid dans le dos. C’est pour faire prendre de la FFAP* et organisateur de l’événement, nicotinoïdes) jouent un rôle majeur dans la conscience de leur situation critique que se faisant la voix des apiculteurs en dé- décimation de nos abeilles. Sur ce dossier les apiculteurs bretons ont organisé cette tresse, demande l’indemnisation de l’en- en effet, il est essentiel que l’ensemble des funeste manifestation du 30 avril au 4 mai. semble des apiculteurs, professionnels ou acteurs concernés prenne ses responsabi- En effet, ce sont pas moins de 20 000 colo- amateurs, pour la perte de leur cheptel et la lités : consommateurs, agriculteurs, pou- nies d’abeilles qui ont été décimées l’hiver diminution de leur chiffre d’affaires en vue voirs publics ; chacun a un rôle déterminant dernier. Le convoi mortuaire, composé de de sauver les producteurs proches du dépôt à jouer pour préserver nos abeilles, notre ruches mortes, a démarré en début de se- de bilan. biodiversité et pour in fine éviter un drame maine de la place des halles au Faouët avec écologique ». pour objectif de se rendre à la chambre ré- La mortalité explose gionale d’Agriculture en fin de semaine et En effet, la mortalité des abeilles a explo- de demander audience aux représentants Sandrine Lefeur, députée de la 4 circons- e sé depuis l’apparition de ces substances politiques et agricoles de la région Bre- cription du Finistère et maraîchère biolo- au milieu des années 90. L’agriculture bio- tagne, ainsi qu’à Nicolas Hulot, ministre de gique, présente à l’occasion de la manifes- logique représente une réelle alternative la transition écologique et solidaire. tation à la chambre régionale d’agriculture face à l’emploi de produits chimiques de twittait alors : « Je serai vendredi matin à synthèse en agriculture. C’est malgré une saison apicole déjà dé- Rennes pour l’arrivée du cortège en soutien marrée que les apiculteurs ont décidé de aux apiculteurs. Avec mes collègues nous Le réseau des agriculteurs biologiques de consacrer leur semaine à la dénonciation, soutenons un amendement pour l’interdic- Bretagne soutient les apiculteurs dans leurs pointant du doigt les produits chimiques de tion des néonicotinoïdes. Tous, il est temps difficultés et leur démarche et réaffirme sa synthèses utilisés en agriculture et respon- de prendre nos responsabilités. Aujourd’hui, position pour l’interdiction des insecticides sables de la mort de milliers de ruches et engageons nous tous dans une réduction néonicotinoïdes. Même si on savoure la vic- colonies sur le territoire breton. massive de l’utilisation des produits phyto- toire du 27 avril dernier, avec le vote de l’UE sanitaires. ». La députée du Finistère a éga- pour l’interdiction des 3 principaux « néo- Les politiques publiques locales, lement publié une tribune sur son site Inter- nics », le combat continue. Il faut veiller a conscientes du problème, constatent les net : « Depuis plusieurs années, on entend ce que la loi soit appliquée et Il faut aller en difficultés dans lesquelles se trouvent les ici ou là, avec insistance, que nos abeilles se plus loin en interdisant tous les « néonics », apiculteurs. Pierre Guitton, le maire de la meurent. Un nouveau cap vient tristement notamment les nouveaux de type sulfoxa- commune de Saint-Meen Le Grand, affirme d’être franchi puisqu’en Bretagne, au sortir flor. au passage du convoi avoir perdu 5 des 6 de l’hiver, c’est plus de 30% de la popula- ruches pédagogiques implantées à l’auto- tion d’abeilles qui a d’ores et déjà disparu. *Fédération Française des Apiculteurs Pro- nome 2017. […] Il est évident que certaines substances fessionnels symbiose | Juin 2018 13
LE dossier du mois Élevage des abeilles en bio Comment ça marche? L’apiculture est un domaine très particulier, et le développement de cette filière en bio est conditionnée par le développement des surfaces agricoles bio en général (mellifères et pollinifères de préférence). Le choix de l’emplacement des ruchers constitue la base de l’élevage des abeilles en bio. Emplacements des ruchers L’achat d’essaims et de reines. Les essaims et reines doivent en principe être achetés en bio. Cependant, il est très difficile au- Le cahier des charges bio repose sur 2 principes. jourd’hui d’en trouver en France et déconseillé d’en acheter plus loin. Il est possible de convertir un essaim conventionnel en res- Premièrement, les abeilles doivent butiner essentiellement sur pectant le cahier des charges bio pendant 1 an. Le renouvellement des cultures bio, de flore spontanée ou de cultures « peu trai- en colonies non bio est limité à 10% de son cheptel. Les essaims tés ». Concrètement, il s’agit de veiller à ce que, dans un rayon « sauvages » devront respecter une période de conversion d’un de 3 km autour du rucher, plus de 50 % des plantes mellifères et an, exceptés ceux récupérés à proximité immédiate des ruches pollinifères en floraison soient bio ou constituées de flore spon- bio (qui seront considérés comme bio). Enfin, une dérogation est tanée ou de surfaces agricoles « peu traitées ». Sont considérées possible en cas de mortalité importante, comme cette année par comme « peu traitées », même si elles ne sont pas certifiées bio, exemple… les prairies, les forêts, les jachères, les zones humides, landes, etc. Ce principe ne s’applique ni pendant l’hivernage, ni quand les L’achat des essaims et reines pour l’élevage doit prendre en plantes ne sont pas en floraison. Ce principe guide la rédaction compte un critère essentiel : l’hygiène. Le test du couvain congelé d’un cahier de butinage, obligatoire dans le cadre de la certifi- permet de déterminer différents niveaux d’hygiène : le principe cation bio. Chaque déplacement de rucher doit y être enregistré. est de prélever une partie de couvain, le congeler, le replacer sur le cadre et mesurer la vitesse de nettoyage de ce couvain. Deuxièmement, les ruchers doivent être suffisamment éloignés des sources susceptibles de contaminer les produits de l’apicul- Au vu de la faible disponibilité en essaims certifiés, les apiculteurs ture ou de nuire à la santé des abeilles : zones urbaines, indus- bio français sont près de 70% a pratiquer l’auto-renouvellement. trielles, etc. Les ruches Il est possible de positionner les ruchers ponctuellement sur des cultures ou vergers conventionnelles, dans le cadre de presta- Tous les types de ruches sont autorisés en bio. Les ruches Dadant tion de pollinisation par exemple. Ces déplacements doivent être et Langstroth sont les plus utilisés (comme en conventionnel). Les enregistrés et les miellées associées seront déclassées. Elles ne matériaux utilisés pour les ruches doivent être en bois naturel pourront ni être vendues en bio, ni être utilisées pour nourrir les non traité. Certains éléments de la ruche peuvent être en plas- colonies. Si cette pratique est autorisée et intéressante, elle n’est tique (matériel d’élevage, nourrisseur, plancher) mais le corps, les pas sans risques. Elle nécessite une relation de confiance avec hausses et les cadres doivent être en vois naturel. Les peintures à l’agriculteur conventionnel, qui devra respecter scrupuleusement pigment aluminium (ex : Thermopeint) peuvent être utilisées pour la réglementation. Les insecticides néonicotinoïdes utilisés sur le peindre l’extérieur de la ruche, tout comme l’huile de lin, l’essence colza notamment, ont la particularité d’être présent dans le pollen de térébentine et les peintures ou lasures à base d’eau (peinture et le nectar des végétaux traités. Ces substances vont être ainsi suédoise facile à fabriquer : farine de blé, eau, huile de lin, ocre, consommées par les abeilles pendant leurs vols, mais également sulfate de fer et savon noir). par toute la colonie au sein de la ruche. Ces substance, d’une ré- manence exceptionnelle, déciment les colonies d’abeilles depuis La cire utilisable en agriculture bio plus de 20 ans. La cire ne peut pas être certifiée bio puisqu’elle n’est pas considé- Le cheptel bio rée comme un produit agricole mais comme un intrant. Elle doit cependant provenir d’une structure certifiée bio. Il y a aujourd’hui Les races. Même si toutes les races d’abeilles peuvent être éle- de grandes difficultés pour s’approvisionner en cire bio, et la tra- vées en bio, Apis mellifera et ses écotypes locaux restent les plus çabilité de ces produits n’est pas très aisé. Une dérogation peut- utilisées et considérées comme étant les plus adaptées naturelle- être demandée en cas de non disponibilité de cire bio sur le mar- ment à leur environnement. C’est un des principes de l’agriculture ché, pour pouvoir acheter de la cire conventionnelle d’opercule biologique, favoriser la rusticité, la résilience des systèmes. On uniquement, non-contaminée par des substances interdites en cherche donc des abeilles résistantes aux maladies, qui ne sont agriculture biologique (analyse multi-résidus et d’adultération). Il pas ultra-spécialisées pour le miel (nous avons besoin de cire bio), faut faire très attention aux cires que l’on achète (risque de conta- pour respecter au maximum les cycles naturels. mination important), et privilégier au maximum l’autonomie en 14 symbiose | Juin 2018
L’apiculture bio en Bretagne cire. La qualité de la cire a un rôle central pour la santé des colo- nies et elle peut-être analysée par l’organisme certificateur. On dénombrait environ 2000 ruches certifiées bio en Bretagne, fin 2016. Cela représente moins de 2% du cheptel bio français. La demande en miel en bio et local est aujourd’hui très forte, Soigner ses abeilles il y a une vraie opportunité à développer des ateliers apicoles en Bretagne. Le nourissement de ses ruches. Le cahier des charges de l’agricul- ture biologique met en avant l’importance de « respecter le com- A l’initiative de plusieurs adhérents porteurs de projet no- tamment, nous vous proposons pour cet hiver une formation portement naturel de l’abeille », en évitant donc l’alimentation en régionale d’initiation à l’apiculture biologique, ainsi qu’une sucre de ses colonies. Cependant, il est parfois nécessaire de com- formation sur la gestion du Varroa. penser les ressources alimentaires naturelles limitées. Le nourris- sage des colonies n’est autorisé que lorsque la survie de la ruche Pour plus d’informations et pour vous inscrire, vous pouvez est menacée (conditions climatiques particulières) et l’apiculteur contacter Damien, référent apiculture, au 02 98 25 16 76 ou d.deiss@agrobio-bretagne.org bio doit veiller à laisser suffisamment de miel et de pollen dans les ruches pendant les périodes d’hivernage. Les apports de pro- téines sont interdits, seul le sucre bio est portable. Un Guide édité par la FNAB Les maladies et parasites. En bio, encore plus qu’en convention- Un guide technique « Produire bio en apicul- nel, la lutte contre les maladies et parasites passe avant tout par ture » d’une centaine de page, publié par la une bonne hygiène et des mesures préventives. FNAB vient de sortir, pour vous le procurer, vous pouvez contacter Damien, référent api- La gestion du Varroa est une des principales difficultés à gérer culture, au 02 98 25 16 76 ou d.deiss@agro- pour l’apiculteur bio. Les traitement les plus répandus en conven- bio-bretagne.org tionnel ne sont pas autorisés en bio, il existe des méthodes parti- culières combinant prévention et traitements curatifs. Les principales maladies des abeilles Catégorie Exemples Prévalence Gravité Solutions Largement répandu ff Pas de traitement homologué Virus DWV, SBP, CBPV, ABPV (existence de ruches Modéré à important ff Le parasite Varroa favorise l’infestation par « porteuses saines ») certains virus Répandu, sous forme Loque européenne Modéré à important ff Prophylaxie et utilisation d’abeilles hygiéniques de spores. ff Déclaration obligatoire Bactéries ff Transvasement/destruction de la colonie ; désin- Répandu, sous forme Virulents et Loque américaine fection du matériel de spores. contagieux ff Antibiotiques interdits ff Prophylaxie et utilisation d’abeilles hygiéniques Ascosphérose ff Considérées comme des maladies opportunistes Toutes trois large- ff Antibiotiques interdits Mycoses ment répandues Noséma apis Modéré à virulent ff Huile essentielle de sarriette des montagnes (champignons) (existence de ruches ff et utilisation d’abeilles hygiéniques Noséma ceranae « porteuses saines ») ff Changement des reines sensibles Répartition actuelle Acarapis woodi Modéré à important ff Pas de cas répertorié en France inconnue Acariens ff Lutte annuelle indispensable à l’aide de médi- parasitaires caments homologués (avec autorisation de mise Varroa destructor Largement répandu Très virulent sur le marché) ff Suivi des chutes naturelles ff Luttes bio-mécaniques ff Gestion des colonies (ruches fortes, cadres Touche les colonies neufs,...) Insectes Fausse teigne Largement répandu faibles et le matériel ff Traitement du matériel entreposé (acide acé- tique) Mouche, frelon, Faible incidence ff Mesures de lutte limitées Largement répandu guêpe, araignée Problème gérable ff Emplacement des ruchers ff Piégeage, uniquement lorsque leur présence est Grosse incidence en Prédateurs constatée au rucher Frelon asiatique Largement répandu particulier sur les ff Réducteur d’entrées « frelons » ruches faibles ff Destruction des nids En hiver, peut tuer Souris, musaraigne Largement répandu ff Réducteur d’entrées une colonie faible symbiose | Juin 2018 15
Le dossier du mois Ancien menuisier-charpentier en éco- construction, Sylvain Koeller a choisi de s’orienter vers l’apiculture et la culture de PPAM, en biodynamie. Il sera officiel- lement agriculteur dans un an, mais il se teste déjà depuis 3 ans, ce qui lui permet déjà d’appréhender l’avenir avec une forme de sérénité. « En 2015, j’ai suivi une formation apicole en biodynamie. Le formateur nous a dit : « si vous appelez les abeilles, elles viendront ! ». Quelques jours plus tard, une grande quantité entraient dans ma maison par la cheminée, probablement des éclaireuses... Plus tard encore, lors d’une sieste, j’entends un sourd vrombissement et vois un essaim arriver et entrer dans la ruche « auberge » que j’avais installée contre le pignon de la maison suite à cette visite. ». En cours d’installation sur ce coteau caillou- teux des Montagnes noires, à Laz, Sylvain Koeller a acheté sa première ruche il y a trois ans. Depuis, des essaims viennent régulière- Le miel et les ment chez lui et ils les récupèrent petit à pe- tit. Son projet d’installation, il le conçoit au- tour d’une délicate symbiose entre les PPAM (plantes à parfum, aromatiques et médici- abeilles nales) et l’apiculture. Ancien menuisier char- pentier en reconversion, il se teste depuis 3 ans déjà. L’an dernier, il a acquis 3 hectares pour développer sa production de PPAM. Pour l’instant en formation BPREA à dis- tance, à Venours (à côté de Poitiers), il récolte déjà un peu de miel et des plantes qui sont Laz séchées afin de confectionner les tisanes qu’il commercialise en direct. « Je ne me vois Finistère pas apiculteur avec 400 ruches. Je prévois produire de petites quantités, pas plus de 10-12 kilos de miel par ruche, et je vais diver- sifier au maximum les produits de la ruche et les plantes : le miel, la propolis, la cire, que je pourrais valoriser vus les problèmes actuels de qualité de cire. En visant petit, je ne pourrais avoir que de bonnes surprises si ça marche mieux », explique Sylvain. Sylvain Koeller L’abeille, pas un animal domestique Apiculture - PPAM Installation : Il devrait à terme avoir une centaines de 1er juin 2019 - Porteur de projet ruches. Bien qu’il ne soit pas encore installé, Sylvain se teste donc chez lui, mais aussi à travers des stages. Il travaille en biodynamie depuis trois ans. Au risque de faire « hurler certains », comme il dit, il n’utilise aucun Commercialisation produit de traitement, même utilisés en bio : acide formique ou acide oxalique. Il se contente de tisanes de plantes et de soins Vente directe : 1 UTH homéopathiques. magasin de producteurs, vente à Pour lui, la spécificité de l’abeille réside la ferme, marché dans le fait que ce n’est pas un animal do- SAU 16 symbiose |4 ha2018 Juin
mestiqué. « Contrairement à un troupeau Une année d’abeille de miel, mais j’y vois le côté indispensable de bovins, on ne va pas pouvoir maîtriser, pour participer à la survie de l’abeille. » avec plein de guillemets, l’alimentation et L’année de l’apiculteur démarre à l’au- l’environnement de l’animal », remarque Syl- tomne. C’est à ce moment là qu’il va préparer Un essaimage peut par exemple permettre vain. Pour pouvoir certifier son miel en bio, ses colonies à passer l’hiver pour avoir des de baisser fortement la pression du varroa, il faut qu’il y ait plus de 50% de cultures en abeilles robustes au printemps. «Je m’assure cet acarien qui peut décimer des colonies bio ou de zones sauvages, ou des prairies, qu’elles ont assez de miel en ré- serve et leur d’abeilles. Quand il se constitue en grappe, ou de friches, dans un rayon de 3 kilomètres. apporte les soins nécessaires. Si une colonie l’essaim va mon- ter très vite en tempéra- « Dans la région, c’est compliqué », estime est faible, il y a différentes méthodes, soit ture et va construire des nouvelles cires (son l’apiculteur. C’est pourquoi il faut bien po- je la réunis avec une autre colonie, soit je la squelette). Cette forte montée en tempéra- sitionner ses ruchers. Sans faire de concur- laisse comme telle : il y a parfois quelques ture n’est pas favorable au varroa, qui va ain- rence à ses collègues, il a trouvé des accords belles surprises malgré tout l’année suivante. si plus facilement se détacher des abeilles. avec des éleveurs voisins pour installer des La reine interrompt sa ponte à l’automne. Et Sylvain de renchérir : « C’est aussi l’ab- ruches. À sa reprise, vers fin janvier, je m’assure sence de couvain pendant plusieurs jours, qu’elles aient toujours assez de réserves. Les qui contient les futures générations de var- Même si pour Sylvain on ne peut garantir abeilles consomment alors beaucoup plus et roa, qui permettra cette forte baisse. Il pa- à 100% un miel sans résidu de pesticides, les floraisons ne démarreront que quelques raît que l’essaimage permet aussi à la vieille il s’emploie à mettre toutes les chances semaines plus tard. Je leur donne du miel en reine qui a quitté sa colonie avec la moitié de son côté. Par exemple, il ne fait pas de complément si nécessaire » des abeilles environ, de retrouver comme récolte de printemps. « Aux alentours de une second jeunesse dans sa ponte. La créa- la ferme, il y a certaines années du colza A partir d’avril, Sylvain peut commencer à tion d’un essaim artificiel revient pour moi à conventionnel. Je veux éviter d’avoir du miel revisiter les ruches et reprendre les activités mettre un coup de scalpel dans une colonie. issu de ces fleurs là. Je fais en sorte de pla- d’élevage : divisions, cueillettes d’essaims. Autant donc l’éviter au maximum ! » cer les hausses pour la miellée d’été, princi- « Selon les années on peut imaginer des palement pour la floraison des plantes sau- récoltes de miel au printemps. J’ai choisi de On revient encore à la rusticité des abeilles. vages. Et je place les ruchers sur des fermes ne pas en faire pour favoriser au maximum le Concernant le varroa, Sylvain nous ex- bio, avec un environnement immédiat développement des colonies, surtout cette plique que certaines abeilles savent le sain ». A terme, Sylvain aimerait pour para- année. Je choisis de faire une récolte en été, repérer, s’épouiller et s’en débarrasser chever la diversification également cultiver une par an. Si l’année est exceptionnelle, naturelle- ment. « Si l’abeille n’est pas un peu de céréales et de plantes mellifères, pourquoi pas une récolte de printemps, adaptée, si elle ne sait pas s’épouiller et comme le sarrasin. mais ce n’est pas la base de mon système », détecter puis supprimer ces acariens pré- répète Sylvain. sents dans le couvain, il prend le dessus ». Comme pour d’autres types d’élevage, l’api- De par son passé de menuisier, Sylvain culteur en devenir considère qu’on peut L’essaimage plutôt que la division construit ses ruches. Il a construit une ruche avoir une approche intensive ou extensive. dite kenyanne, en forme de berceau (donc Lui penche pour le modèle extensif. « Dans Il observe beaucoup, patiemment, méti- horizontale et non verticale), sur la- quelle il certaines régions de grandes cultures, ils culeusement. Il constate d’ailleurs que les fait des comptages varroa. « Elle n’en a pas, peuvent produire le double de quantité abeilles sont globalement affaiblies. Les en tout cas pas suffisamment pour qu’il y ait par ruche, mais ils vont aussi avoir des gros reines, dans un élevage classique, sont des chutes naturelles visibles au fond de la trous entre chaque miellée, car entre deux facilement remplacées au bout de deux- ruche », observe-t-il. Il fait également part cultures, les abeilles n’ont rien à manger, trois ans voire parfois chaque année, alors des recherches qui commencent à mettre ce qui peut les fragiliser et oblige à les bi- qu’elles peuvent en vivre cinq. « Les colo- en évidence l’adaptation d’abeilles capables beronner au sirop de sucre. Ici, c’est moins nies essaiment désormais parfois chaque de détecter le varroa dans les cellules du marqué », remarque Sylvain. Dans ce coin de année, ce qui est difficilement acceptable couvain et à retirer les larves infestées. « Finistère, plutôt froid et humides, il faut des pour l’apiculteur qui recherche une produc- D’elles même, les abeilles peuvent avoir un abeilles adaptées au terroir. En Bretagne, il tion de miel. Or, ce processus d’essaimage comportement sanitaire sain, surtout si on le y a l’abeille noire, dont il existe un conser- est notamment ce qui permet à la colonie leur permet : richesse et grande diversité de vatoire à Ouessant, qui semble particulière- de se régénérer : diminution de la pression la ressource en pollen et nectar, qualité de ment adaptée au climat breton. de parasites, cire neuve... L’équilibre est donc l’eau, pas de produits phyto sur les cultures, subtil à trouver.» bref, un environnement et des pratiques api- Sylvain estime élever majoritairement de coles sains. » la type « noire », mais qui s’est croisé avec L’essaimage reste pour Sylvain un processus d’autres abeilles indigènes. Néanmoins, ce naturel, qu’il ne veut pas essayer d’empê- Sylvain est conscient que son système se qui l’intéresse au-delà de ça, c’est d’avoir une cher coûte que coûte. « Mon but, ça va être base sur un début de pratique et qu’il est abeille bien acclimatée à sa ferme, capable d’accompagner le processus d’essaimage facile à envisager sans avoir pour l’instant de passer des hivers qui peuvent être longs pour garder les essaims et bénéficier du pro- la pression financière. Mais il va son rythme, et humides, comme l’hiver passé. « Ce que cessus naturel de régénération qui va avec. petit à petit. Que va piano va sano comme je retiens, c’est que les abeilles s’adaptent J’aimerais avoir des ruches de production et on dit. au fur et à mesure des générations, et c’est des ruches pourvoyeuses d’essaims. Après ce qui m’intéresse, étant don- né que je sou- qu’un essaim ait quitté sa ruche d’origine, il haite apporter le moins d’intrants possibles. est très vite productif une fois dans son nou- Antoine Besnard, Par exemple, la Buckfast, la prim’hosltein des veau logis ; il a une sacrée patate ! L’équilibre Rédacteur en chef Symbiose abeilles, je ne suis pas sûr qu’elle tienne le est difficile à trouver parce qu’en fonction- coup ici sans intrants. » nant comme ça, on a moins de production symbiose | Juin 2018 17
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