Commentaires de la France sur les rapports des groupes de travail " crédit immobilier "
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Commentaires de la France sur les rapports des groupes de travail « crédit immobilier » La France remercie les membres des groupes de travail qui apportent ainsi une contribution importante à la réflexion de l’Union européenne sur le crédit immobilier. Leurs rapports participent à la démarche pragmatique lancée par la Commission sur ce sujet. La France regrette cependant que les parties soient invitées à réagir sur des documents dont, à l’exception du résumé des travaux du groupe d’experts sur le financement, seule la version anglaise est disponible. Cela nuit à la qualité de la consultation; les acteurs non-professionnels et notamment les particuliers peuvent plus difficilement réagir dans ces conditions. La France souhaite que les documents ultérieurs sur le crédit immobilier soient traduits. En préambule à sa réaction au travail mené par les groupes d’expert, la France souhaite rappeler son soutien aux initiatives de la Commission visant à l'intégration des services financiers de détail, et tout particulièrement en matière de prêts au logement. Ils constituent l'un des services bancaires clés dans la vie du citoyen européen et ce marché est actuellement très fragmenté en Europe. Son intégration se ferait au profit des professionnels et des consommateurs. La France considère que l'intégration des marchés du crédit immobilier1 en Europe passe nécessairement par une pleine harmonisation ciblée notamment sur les règles essentielles de protection des consommateurs. Leur grande disparité en Europe constitue le frein majeur au développement des opérations de crédit transfrontalières. A ce titre, elle regrette que le groupe d’experts « professionnels et consommateurs » n’ait pu trouver davantage de points d’accord. La présentation des deux rapports est reprise ci-dessous afin de faciliter la lecture des remarques qu’inspirent successivement : - le rapport du groupe d’experts « professionnels et consommateurs » ; - le rapport du groupe d’experts sur le financement du crédit immobilier. 1 La France souhaite rappeler que le champ de la réflexion ne doit pas être limité à l’existence d’une garantie hypothécaire. Un tel critère ferait échapper tout un pan du crédit immobilier français à une initiative européenne. Sur le plan économique, en France, les prêts aux logements ne sont pas tous hypothécaires, ni même garantis. Sur le plan juridique, comme une majorité d'Etats membres, la France considère l'objet d'un prêt (crédit immobilier ou crédit à la consommation) pour en déterminer la nature et le régime juridique, notamment en matière de protection des consommateurs, et non pas la sûreté attachée à ce prêt.
1. Rapport du groupe d’experts « professionnels et consommateurs » En préambule, la France regrette que le groupe de travail n’ait pas évoqué la question de la loi applicable en matière de contrat de crédit immobilier. Elle rappelle que, de son point de vue, il conviendrait d’appliquer les dispositions prévues par la Convention de Rome, et à l’avenir par le règlement « Rome I », pour la détermination des règles nationales applicables aux obligations contractuelles nées des contrats de crédit immobilier conclus par des consommateurs. Il apparaît en effet souhaitable que ce soit le droit du pays de la résidence habituelle de l'emprunteur qui s'applique pour régir les contrats de crédit. 1.1. Information précontractuelle : Sur l’information précontractuelle, la France souhaite rappeler qu’elle a pour objectif d’assurer la protection des consommateurs en facilitant la comparabilité des offres. A ce titre, la France souscrit au consensus qui s’est dégagé au sein du groupe d’experts en faveur d’une information générale précontractuelle préalable à la fourniture par le client de ses informations personnelles. Quant aux informations précontractuelles ou contractuelles personnelles, la France juge naturellement indispensable que le consommateur dispose d'une information complète, fiable et remise sur un seul et même support, via par exemple l'offre préalable, en amont de la signature du contrat. La réglementation du délai entre la fourniture par le client de ses données personnelles et l’information précontractuelle ou contractuelle personnelle pourrait être laissée au droit national. La France souhaite en revanche que soient harmonisés les délais de réflexion à compter de la présentation de l'offre préalable2 et le délai de rétractation à compter de la conclusion de l'offre. Cela contribuerait à la convergence du marché du crédit immobilier au niveau européen sans pour autant nécessiter l’harmonisation du délai entre la fourniture de données personnelles par le client et l’information précontractuelle ou contractuelle personnelle qui semble, au vu des conclusions du groupe de travail, être controversée. En tout état de cause, les informations précontractuelles ou contractuelles permettant d'apprécier l'opération de crédit devraient être contenues dans l'offre préalable de prêt, qui devrait être remise gratuitement à l'emprunteur. A ce titre, la mise en place sur la base du volontariat du code de bonne conduite et de la fiche européenne standardisée est, de notre point de vue, loin d'être suffisante. Sur le contenu de l’information précontractuelle ou contractuelle personnelle elle-même, ces informations doivent permettre une comparaison des offres entre établissements des différents pays. Par conséquent, les offres devraient au moins mentionner : le nom du prêteur, la description du produit, le TAEG, le montant prêté, la monnaie, la durée du contrat, le coût 2 Ce délai est fixé en France à 10 jours et ne peut être réduit.
total du crédit, le coût des assurances et des sûretés, le nombre de versements, leur montant et leur périodicité. Pour les prêts à taux fixe, l’offre doit s’accompagner du tableau d’amortissement détaillant pour chaque échéance le capital amorti et les intérêts. A cet égard, les informations contenues dans la fiche européenne d'information standardisée apparaissent pertinentes mais encore insuffisantes. Le contenu de cette fiche, qui est déjà appliqué par de nombreux établissements de crédit notamment français, devrait donc être intégré dans un texte européen, afin d'assurer une protection identique du consommateur dans tous les pays. Elle pourrait dans cette perspective être complétée de façon à mieux préciser le coût total du crédit,3 mais aussi l’existence d’un droit à rétractation et les modalités de son exercice. Les autres mécanismes de régulation envisagés page 5 du rapport (médiateur, conseils de surveillance nationaux ou européen) nous semblent insuffisants pour atteindre l’objectif de protection du consommateur et de création d’un marché intégré de crédit logement. Ils ne permettraient au mieux que de traiter quelques problèmes individuels, mais pas de les prévenir. 1.2. Conseil, mise en garde, information Sur la question du conseil, de l’information et de la mise en garde, la France juge utiles et opérantes les définitions proposées par le groupe d’expert pour ces différents concepts. Par ailleurs, elle souligne que le devoir d'information à la charge des professionnels implique une information personnalisée, y compris en matière de conditions financières (par exemple, la vérification de l'adéquation des charges du prêt aux ressources dont dispose le consommateur). Une réforme du droit du crédit immobilier devrait donc veiller à assurer l'effectivité de la responsabilité (contractuelle) du prêteur en cas de non respect de ses obligations légales, en particulier en matière d’information précontractuelle. En France, selon une jurisprudence constante de la Cour de Cassation, la responsabilité contractuelle du prêteur professionnel est engagée4 en cas de manquement par ce dernier à son obligation d'information à l'égard de l'emprunteur. Tel est le cas notamment en l'absence d'information au regard des risques de surendettement. Les obligations d'information contraignantes devraient être étendues aux intermédiaires de crédit qui interviennent à titre de profession principale dans la conclusion du contrat de crédit immobilier et dont les décisions engagent le prêteur, par exemple les agents indépendants tels que les courtiers. Quant aux six principes identifiés par le groupe en matière d’information, de conseil et de mise en garde, la France serait favorable à ce qu’ils soient intégrés dans un texte européen, afin d'assurer une protection identique du consommateur dans tous les pays. Pour autant, la 3 Le coût total du crédit représente la somme en valeur absolue des intérêts et de tous les accessoires de la dette (frais administratifs, droits de timbre, coûts des sûretés et de l’assurance, etc. et des frais qui sont qualifiés de « frais additionnels récurrents ou non récurrents » dans la fiche européenne d’information standardisée). Cette information est nécessaire, qu’elle dépende ou non du prêteur. La fiche européenne d’information standardisée (item n°10) est ambiguë sur ce point. 4 Article 1147 du Code civil
France souligne la distinction entre l’activité de conseil, l’information et la mise en garde de l’emprunteur. 1.3. Le remboursement anticipé Le principe du remboursement anticipé à tout moment et en toutes circonstances apparaît, compte tenu de la durée de plus en plus longue des opérations de crédit immobilier, indispensable pour éviter les engagements perpétuels, qui peuvent nuire à la mobilité bancaire et surtout géographique ou professionnelle, et pour renforcer la concurrence entre les établissements. De notre point de vue, (1)le remboursement anticipé ne devrait pas rester une simple faculté laissée au choix des parties mais être systématiquement prévu. (2)Il devrait être impérativement intégré dans les informations obligatoires fournies au consommateur. (3) Enfin, il convient de prévoir un plafond pour limiter l'indemnité de remboursement anticipé au bénéfice du prêteur.5 Quant au remboursement anticipé pour des raisons exceptionnelles, il semble que la détermination de ses conditions pourrait être laissée au droit national sous réserve des trois principes évoqués ci-dessus. 1.4. Le taux annuel effectif global Le TAEG devrait être le taux de référence utilisé par tous les pays de l'Union Européenne pour permettre des comparaisons efficaces entre pays. Une harmonisation de la méthode de calcul et de l'assiette de ce calcul paraît indispensable pour rendre possibles ces comparaisons. L'information sera plus précise et la comparaison plus pertinente en utilisant une assiette large incluant tous les coûts nécessaires à l'obtention du crédit, à savoir : intérêts, frais d'assurance si celle-ci est obligatoire pour obtenir le crédit, frais de garantie, frais d'ouverture de dossier. Cette assiette de calcul ne dispense toutefois pas le prêteur de donner, dans l'offre préalable de crédit, une information sur le coût global du prêt, qui constitue un autre élément d'appréciation de l'opération de crédit puisqu'il renseigne sur les frais en valeur absolue en France et qu'il est susceptible de contenir des coûts ou frais non indispensables à l'opération. Le TAEG revêt une importance particulière pour l'information du consommateur puisqu'il est obligatoire dans les publicités et qu'il constitue de ce fait le premier élément chiffré porté à la connaissance de l’emprunteur. A des fins de transparence pour le consommateur, il serait souhaitable que, sous réserve de ces principes, la définition du taux effectif global pour le crédit immobilier soit proche ou identique de celle pour les prêts à la consommation. En tout état de cause, le TAEG devrait pouvoir ne pas dépasser un certain plafond. Le maintien d'un instrument tel que le taux de l'usure en France apparaît important pour protéger les consommateurs, notamment les plus vulnérables. 5 Le plafond en France est égal à 3% du capital remboursé.
2. Rapport sur le financement du crédit immobilier 2.1. « Vision » pour le marché du crédit immobilier La France partage la vision exposée par le groupe d’experts sur le financement du crédit immobilier. Un marché européen du financement de l’immobilier peut sans doute améliorer l’efficience, la diversité des produits et la compétition entre les fournisseurs. Toutefois l’impact sur le marché de la banque de détail d’un marché du refinancement complet, compétitif, efficace, transparent et stable sera marginal si l’harmonisation ne permet pas de décloisonner les marchés nationaux pour les consommateurs. C’est pourquoi la France estime que l'harmonisation doit principalement porter sur les règles essentielles de protection des consommateurs, dont la grande disparité en Europe constitue le frein majeur au développement des opérations de crédit transfrontalières. Cette convergence des protections du consommateur doit les rassurer, permettre une réelle comparabilité, et ainsi une véritable concurrence. Les pistes ouvertes par le groupe d’experts sur le financement du crédit immobilier sont donc utiles, mais elles ne peuvent être explorées seules. Les principes identifiés par le groupe d’experts appellent par ailleurs quelques remarques. La création d’un marché complet où la réglementation ne conduit pas à privilégier un mode de financement sur un autre est utile, elle est compatible avec l’existence de mécanismes incitatifs qui permettent le financement de logements sociaux. Quant au lancement d’une étude de la Commission sur les intermédiaires de crédit en 2008, la France n’y est pas opposée. Elle voudrait cependant souligner que l'activité d'octroi de crédits à titre de profession principale est, en France, une activité réservée aux établissements de crédit en raison des risques qu'elle comporte tant pour les consommateurs que pour les prêteurs et pour le système financier. Ces établissements doivent en effet assurer leur refinancement dans des conditions suffisamment sûres pour que d'éventuelles difficultés ne s'étendent pas à toutes leurs contreparties. Il apparaît nécessaire qu'une telle activité, exercée à titre de profession principale, reste réservée à des établissements soumis au moins à un régime d'autorisation, à des règles prudentielles adaptées à ces risques, et à des contrôles par les autorités bancaires, notamment en matière de lutte contre le blanchiment, afin d'assurer la solidité financière des prêteurs et de garantir la protection des consommateurs et, in fine, leur confiance. Dans cette perspective, il convient de veiller à ne pas multiplier les statuts en matière de services bancaires. Une telle multiplication risquerait d'introduire une confusion du public en la matière et de nuire à la lisibilité et au bon fonctionnement de tous ces établissements. C’est pourquoi le principe de reconnaissance mutuelle des fournisseurs de crédit immobilier ne nous semble pas pouvoir être retenu sans que la Commission définisse un passeport exigeant pour ce type d’activités, notamment en termes de protection des consommateurs et de lutte contre le blanchiment.
2.2. Marchés primaires 2.2.1. Remboursement anticipé En complément des éléments évoqués en 1.3, le remboursement anticipé doit être systématiquement prévu. La formule de compensation doit être naturellement établie ex ante, transparente et facile à comprendre, mais il convient aussi de plafonner l’indemnité. 2.2.2. Evaluation des immeubles La France souligne la complexité de l'instauration d'une norme unique entre tous les Etats membres s'agissant des procédures d'évaluation du bien immobilier objet de l'hypothèque. A ce titre une recommandation, comme le souhaite le groupe d’experts, paraît plus pertinente qu’une réglementation contraignante. La France préconise donc la mise en place d'une reconnaissance mutuelle des normes nationales en la matière. 2.2.3. Les registres fonciers La France partage l’objectif du groupe d’experts de promouvoir la transférabilité des portefeuilles de prêt. Cette évolution devra néanmoins se faire dans le respect des droits des consommateurs. Il faut par exemple que l’information du débiteur soit assurée par l’envoi d’une lettre simple lorsque le cédant se décharge également du recouvrement de la créance. La France partage également la volonté exprimée par le groupe d’experts d’encourager l’accès non discriminatoire à des registres fonciers transparents, exhaustifs et fiables. A cet égard, elle précise que l’accès aux fichiers français est libre : toute personne, quelle que soit son pays de résidence et sa nationalité, peut demander des renseignements hypothécaires auprès des conservations des hypothèques, sans avoir à justifier de sa qualité ou d’un intérêt particulier. L’accès est d’autant plus aisé qu’une double entrée est possible, par le nom du propriétaire ou par les références de l’immeuble. De notre point de vue, il n’est pas nécessaire pour assurer l’effectivité des objectifs de transparence, d’exhaustivité et de fiabilité d’imposer aux Etats membres la création d’un registre centralisé. Le principe de centralisation ne serait pas respectueux du principe de subsidiarité puisque l’approche décentralisée - qui existe dans la moitié des Etats membres, notamment en Allemagne, au Portugal et en Italie - permet déjà d’assurer en France un accès aisé, rapide et non-discriminatoire au registre. En outre, la réalisation d’un fichier centralisé ne manquerait pas d’être coûteuse pour une utilité réduite. Le fichier français est découpé par circonscriptions géographiques. Il suffit que le prêteur connaisse le service gérant la circonscription géographique dans laquelle est situé l’immeuble garantissant l’emprunt, information facilement disponible, pour accéder au registre foncier. Ce système répond au besoin de transparence exprimé par le groupe d’experts. Quant à la question de la suppression de tous les privilèges occultes, la France souligne que son registre foncier est, de ce point de vue, particulièrement complet et fiable. Le droit français prévoit deux garanties réelles pour le paiement préférentiel d'une créance :
l'inscription d'une hypothèque au fichier immobilier ou le droit légal d'avoir un privilège pour être payé en priorité. L'hypothèque doit être inscrite au fichier immobilier pour prendre rang. Ce même principe concerne également les privilèges, avec quelques exceptions. Parmi ces exceptions, la France souhaite qu’il n’y ait pas de confusion entre privilèges occultes, spéciaux ou généraux. Ces derniers ne font pas l’objet d’une publicité en France, car ils s’exercent sur tous les immeubles en raison de dispositions légales. Bien que ces privilèges soient dispensés de publicité dans le registre foncier, ils ne sauraient être qualifiés d’occultes, car ils sont limités et résultent de dispositions connues de tous. Parmi les privilèges spéciaux, seul celui du syndicat des copropriétaires n’est pas publié. Il garantit le paiement des charges et travaux immobiliers lors de la vente d'un lot de copropriété. Il ne saurait être considéré comme véritablement occulte : l’existence d’une copropriété sur l’immeuble conduit naturellement le prêteur à s’enquérir des obligations incombant au propriétaire vis-à-vis de la copropriété. Par ailleurs, le tableau 2 - page 20 appelle deux remarques. Les données qui y sont synthétisés ne tiennent pas compte de la récente réforme des tarifs qui a accompagné la réforme des sûretés du 23 mars 2006.6 Les coûts présentés dans ce document ont été depuis divisés par deux. Par ailleurs, le délai de constitution d’une hypothèque en France est de moins de 20 jours en moyenne grâce à l’informatisation des procédures. La dématérialisation des échanges entre les conservations des hypothèques et les usagers est également en cours de développement via le programme Télé@ctes, ce qui devrait encore permettre une accélération de la procédure. 2.2.4. L’efficacité des procédures de saisie et de distribution L'efficacité de ces procédures est primordiale au développement transfrontalier du crédit immobilier. Comme le souligne le groupe de travail, elles conditionnent les droits et le recouvrement du créancier prêteur. Ces procédures doivent se dérouler selon le droit national du pays où est situé le bien : seul le juge national doit pouvoir décider d'une vente forcée. La France est favorable à une étude sur la performance de ces procédures qui encourage les Etats membres à en réduire notamment les délais, ainsi que le propose le groupe de travail. Pour cela, il faut toutefois qu’une discussion méthodologique préalable sur les critères7 et les systèmes de mesure ait lieu. 6 L’ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sûretés a réformé ce régime juridique et créé le prêt viager hypothécaire et l’hypothèque rechargeable, Décret du 16 mai 2006, Décret du 22 juin 2006. 7 Des critères quantitatifs synthétiques pourraient mettre en regard la durée des différentes phases de saisie (obtention du titre exécutoire, délai de consignation de la somme, délai de désintéressement des créanciers), mais aussi l’efficacité de la saisie pour le débiteur, dont le bien ne doit pas être vendu à vil prix (prix du bien vendu par rapport au prix de marché local, délai entre l’acquisition du bien et sa revente par l’acquéreur). Des critères qualitatifs sont également indispensables (contrôle judiciaire ou non de la procédure de saisie, transparence des procédures d’adjudication, équilibre des droits du débiteur et des créanciers, caractère exécutoire des privilèges (hypothèque ou privilège de prêteur de denier, existence de privilèges occultes (autres que les privilèges généraux présentés plus haut), existence de solutions amiables, effets de l’engagement de la procédure de saisie sur le débiteur et le créancier, expulsion du débiteur après réalisation de la vente forcée, préservation des droits du locataire).
Dans ce contexte, la France appelle l’attention sur la réforme de son régime juridique des saisies immobilières. L’ordonnance n°2006-461 du 21 avril 20068 et le décret n°2006-936 du 27 juillet 2006 poursuivent deux objectifs fondamentaux, d’une part, assurer une protection adéquate du débiteur en prohibant les expropriations injustifiées ou expéditives pour éviter de brader ce qui constitue généralement l’élément principal de son patrimoine, et en développant les solutions consensuelles,9 d’autre part, offrir aux créanciers des procédures efficaces et simplifiées de recouvrement des créances. L’effet attendu de cette réforme est une accélération notable de la durée des procédures et une augmentation du produit des ventes forcées, dans l’intérêt commun du débiteur et de ses créanciers, notamment grâce à l’autorisation de la vente amiable de gré à gré du bien saisi. Cette réforme complète en effet les mécanismes renforçant le caractère exécutoire de l’hypothèque issus de l’ordonnance du 23 mars 2006. Elle reconnaît au créancier le droit de demander au juge l’attribution de l’immeuble hypothéqué en cas de défaillance de son débiteur. Elle admet également le pacte commissoire, qui permet au créancier disposant d’une hypothèque de se faire consentir le droit de s’approprier de lui-même, sans passer par une décision judiciaire, l’immeuble hypothéqué faute de paiement à l’échéance.10 Ainsi, le créancier hypothécaire qui n’est pas payé n’est plus obligé pour réaliser sa sûreté de procéder à la saisie et à la vente forcée de l’immeuble selon les procédures civiles d’exécution. Il dispose d’autres moyens pour être désintéressé. 2.2.5. Protection des données Sur la protection des données, la France partage les orientations du groupe de travail dans la mesure où ils respectent les principes de la directive 95/46, y compris en ce qui concerne le transfert de fichiers à des Etats tiers. Ces dispositions assurent la protection des données des personnes et ne sauraient être à ce titre assimilées à des « charges administratives ». 2.3. Marchés secondaires 2.3.1. / 2.3.2. « Covered bonds » / société de crédit foncier ; RMBS / FCC La France considère utile, comme le suggère le groupe de travail, l’introduction dans chaque pays membre de dispositions législatives ou réglementaires qui encadreraient le régime de fonctionnement des « covered bonds », comme elle l’a d’ailleurs fait en 199911. Elle souligne en particulier que dans la législation française, la cession de créances s'effectue par la simple remise d'un bordereau opposable aux tiers à la date indiquée sur ce bordereau. Cette simple opération emporte de plein droit des sûretés et garanties attachées aux créances cédées avec opposabilité aux tiers sans autre formalité à accomplir.12 De plus, le rechargement d'un FCC est possible par la reconstitution des actifs hypothécaires ; le véhicule ne sert donc pas que pour une seule opération de titrisation. 8 Articles 2190 à 2216 du Code civil 9 Parmi ces solutions consensuelles, il faut noter la vente à l’amiable, la distribution du prix entre créanciers, etc. 10 Article 2459 du Code civil 11 Articles L. 515-13 à 33 du Code monétaire et financier 12 Article L214-43 du Code monétaire et financier
Le groupe de travail suggère que les textes législatifs / réglementaires des pays membres concernant la titrisation soient fondés sur le respect de 10 principes. Les recommandations du groupe de travail sont issues du European securitisation Forum, qui constitue une fédération de banques dans laquelle les banques françaises sont peu représentées. La France considère que la plupart des points relevés sont pertinents, notamment dans l’optique de la transparence à atteindre dans les mécanismes de titrisations. En accord avec cette constatation, la France insiste toutefois sur le fait qu’il reste fondamental de maintenir un niveau de contrôle important sur les gestionnaires des fonds communs de créance émetteurs de RMBS. En ce sens la flexibilité des véhicules ne doit pas être synonyme de relâchement dans la qualité des agréments délivrés et leurs obligations. Le groupe de travail préconise la création d’un nouveau type de véhicule reconnu par tous les Etats membres. Sa mise en œuvre avec la souplesse évoquée dans le rapport reviendrait à revenir sur la plupart des garanties prévues par la législation française sur les fonds communs de créance (autres que celles dérivant de la réglementation communautaire sur les OPCVM). Parmi ces garanties, importantes pour la France, on relève que : - les fonds communs de créance (FCC) ne peuvent être gérés que par des sociétés commerciales agréées par l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) et leurs actifs déposés entre les mains d’un établissement de crédit ; - les FCC appartiennent à la catégorie des organismes de placements collectifs ; - les parts de fonds communs de créances ne peuvent être détenues au-delà d’un certain pourcentage par un fonds commun de placement ou une SICAV dont les organes de gestion sont sous le contrôle ou la dépendance d’un établissement de crédit ayant cédé des créances au fonds ; - les créances des FCC ne peuvent être nanties ou cédées ; - le règlement du FCC est soumis à un visa de l’AMF ; - un commissaire aux comptes est nommé auprès de chaque fonds ; - les fonds peuvent être compartimentés dans un souci de saine gestion des différents actifs du fonds ; - l’établissement cédant ne peut conserver aucune garantie ; - un capital social minimal substantiel est exigé (125 000 euros représentant un pourcentage au moins égal à 0,2 % de l’ensemble des actifs du fonds). La France n’est pas favorable à la création du véhicule proposé, pour plusieurs raisons : - la bonne gouvernance des entités et la transparence des comptes, récemment renforcée par la directive 2006/46/CE, exige que des informations soient données sur les opérations hors bilan ; - la combinaison de ces propositions accroît considérablement les risques de blanchiment, alors que se développe une politique de lutte contre ce phénomène et le financement du terrorisme à l’échelle communautaire depuis 1991 ; - il n’est pas certain que les règles de conflit de lois résultant de la proposition Rome I en cours de discussion au Conseil JAI et au parlement européen permettront à l’emprunteur de bénéficier des protections que garantit le droit français en matière de saisies s’agissant de la résidence principale.
Le groupe de travail propose par ailleurs de conférer un statut particulier aux FCC, même créés pendant la période suspecte (période entre l’ouverture d’une procédure collective et la cessation de paiement), ce qui va au-delà du droit interne en matière d’insolvabilité pour ce type de véhicule. La France est opposée à l’idée d’une « période suspecte minimum » car la période suspecte assure une protection contre le risque de fraude - risque dont rien n’établit qu’il est inexistant en matière de cession à un SPV. Le groupe de travail demande également une modification du règlement 1346/2000 sur les règles en matière de compétence judiciaire et de conflits de lois en droit de l’insolvabilité. La France est opposée à une modification isolée de l’article 13 du règlement 1346 : il s’agit en effet d’un texte d’ensemble cohérent qui a fait l’objet de longues négociations. La question de cette modification devrait être intégrée à la réflexion qui ne manquera pas d’être menée prochainement en vue de la rédaction du rapport prévu par l’article 46 du règlement que la Commission devra présenter au plus tard le 1er juin 2012 au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social. La directive insolvabilité des établissements de crédit est elle-même largement calquée sur le règlement 1346 et l’expiration du délai de transposition est assez récente. Par ailleurs, il est également important que les Etats membres aillent dans le sens de la transparence fiscale, afin d’éviter au maximum, notamment au travers de conventions bilatérales, la double imposition. 2.3.3. Eléments concernant la lisibilité de l’actif refinancé La France soutient l’idée développée par le groupe de travail concernant l’homogénéisation des termes techniques employés dans différents marchés secondaires, afin de faciliter la transparence des mécanismes de refinancements. Dans le même sens, les idées concernant les différents reportings vont dans le sens de la transparence et de la lisibilité, ce qui paraît une bonne initiative. 2.3.4. Eléments prudentiels La France soutient entièrement la demande du groupe de travail de pouvoir porter à 100% de l’actif refinançable par « covered bonds » les parts RMBS notées AAA. Il est important que la directive CRD, qui fixe à 20% de l’actif des « covered bonds » la part de ces RMBS AAA avec une dérogation à 100% jusqu’à 2010, soit amendée en ce sens, une clause de revoyure ayant été prévue à cet effet à cette date. 2.3.5. L’euro-hypothèque La France souligne que le groupe d’experts ne se prononce pas sur l’euro-hypothèque et, en tout état de cause, n’apporte aucun élément de nature à justifier le recours à cet instrument pour faire émerger un marché secondaire.
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