Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD
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Rapport — Défenseur des droits Les droits TSA 90716 - 75334 Paris Cedex 07 Tél. : 09 69 39 00 00 fondamentaux des defenseurdesdroits.fr — personnes âgées accueillies en EHPAD Toutes nos actualités : defenseurdesdroits.fr Face au droit, nous sommes tous égaux © 05-2021 | Défenseur des droits
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 Table des matières Introduction 04 D· L a liberté d’aller et venir 23 Les entraves fondées sur la sécurité des résidents 23 I· L es droits et libertés des personnes Le recours aux dispositifs de agées accueillies en EHPAD à l’épreuve géolocalisation 24 de la réalité 06 Le recours aux mesures de contention 24 A· P rincipe du libre choix, du consentement E· L e droit à la vie privée, à l’intimité et au éclairé et droit à l’information de la maintien des liens familiaux 25 personne accueillie 08 Le recours aux dispositifs de Le libre choix du lieu de résidence 08 vidéosurveillance 26 La recherche du consentement éclairé 08 Le droit à une vie personnelle et familiale 27 La formalisation du consentement par le contrat de séjour 09 F· L e droit à la propriété 28 Le droit à une information claire, La responsabilité des établissements 28 compréhensible et adaptée 10 La maltraitance financière 29 Le droit à la désignation d’une personne de confiance 10 G· L e droit au recours effectif et à la protection 30 B· L e droit à une prise en charge et à un Réclamation du résident 30 accompagnement adaptés 12 Signalement d’actes de maltraitance La mise en place du projet personnalisé 12 envers un résident 31 Les freins institutionnels à la prise en Gestion des événements indésirables charge et à l’accompagnement adaptés 13 en EHPAD 32 Les conséquences sur la prise en charge Évaluations et contrôles du respect et l’accompagnement des résidents 13 des droits fondamentaux des résidents 32 C· L e droit à la santé 17 La coordination des soins 17 La prise en charge médicamenteuse 18 La prise en charge nocturne et les transferts aux urgences 19 La santé bucco-dentaire 19 L’accompagnement de la fin de vie 20 2
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 II. L’impact de la crise sanitaire sur Récapitulatif des recommandations 46 les droits et libertés des personnes Principe du libre choix, du consentement éclairé accueillies en EHPAD 35 et droit à l’information de la personne accueillie46 A· L a faible lisibilité des normes en vigueur 35 Le droit à une prise en charge et à un B· L’absence de cadre normatif permettant de accompagnement adaptés 47 fonder les restrictions spécifiques 36 Le droit à la santé 48 C· L es entraves aux droits et libertés liées au recours accru au « droit souple » 37 La liberté d’aller et venir 49 Une illustration de la limitation du droit de sortie des personnes résidant en Le droit à la vie privée, à l’intimité et au EHPAD au cours du premier confinement 37 maintien des liens familiaux 50 Une illustration de la suspension du principe de libre arbitre de la personne Le droit à la propriété 50 accueillie 38 L’assouplissement attendu des mesures Le droit au recours effectif et à la protection 50 postérieurement à la campagne nationale de vaccination contre la COVID-19 40 L’impact de la crise sanitaire sur les droits et libertés des personnes accueillies en EHPAD 51 D· L’élargissement des limitations de sortie et des restrictions de déplacement 41 Annexe : contexte et cadre normatif E· L es entraves à la vie privée et familiale 42 de la crise sanitaire 53 Limitations de visites 42 Sentiment d’isolement et dégradation Rappel des dates clés 53 de l’état de santé 42 Fin de vie 43 Cadre légal 54 F· L’absence de continuité des soins 43 Cadre réglementaire 55 Panorama du 1 janvier au 11 mai 2020 er 55 G· L es difficultés d’accès aux droits et au recours effectif 44 Panorama du 11 mai au 10 juillet 2020 55 Du 10 juillet au 16 octobre 2020 : au cours de la période transitoire 56 Du 17 octobre 2020 au 31 décembre 2020 : au cours de l’état d’urgence sanitaire 56 Notes 58 3
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 introduction Le Défenseur des droits, autorité et, d’autre part, le respect de leurs droits administrative indépendante chargée par et libertés. la Constitution de veiller au respect des Toutes les personnes accueillies en EHPAD droits et libertés, est régulièrement saisi ont le droit au respect de leur dignité et à la de réclamations de personnes accueillies protection contre toute forme de maltraitance. en établissements d’hébergement pour Le respect de la dignité de la personne personnes âgées dépendantes (EHPAD) humaine constitue la base même des droits portant sur les atteintes à leurs droits et fondamentaux. Ce principe implique de ne libertés. Il a été particulièrement interpellé à ce pas réduire l’être humain à son corps en le sujet depuis le début de la crise sanitaire liée à traitant comme un objet et que la personne l’épidémie de la Covid-19. humaine ne soit pas instrumentalisée ni Sur les six dernières années, le Défenseur des « utilisée simplement comme un moyen, mais droits a ainsi instruit plus de 900 réclamations toujours comme une fin »6. Il exige également de personnes contestant les modalités de leur que les besoins vitaux de la personne soient accompagnement médico-social ou celui de assurés. Pourtant, les situations portées à leurs proches1. 80%2 de ces dossiers mettent la connaissance du Défenseur des droits en cause un EHPAD. montrent que la réalité n’est pas toujours conforme à ce principe. Lieux de vie collectifs dédiés à l’accompagnement médico-social des En dépit de la reconnaissance juridique personnes âgées, les EHPAD ne cessent du droit de toute personne humaine au d’évoluer afin de répondre aux défis de respect de sa dignité et de son intégrité7, le l’allongement de l’espérance de vie et du Défenseur des droits constate au travers nombre croissant de personnes âgées en des réclamations dont il est saisi, qu’il arrive situation de perte d’autonomie ou de handicap. que les comportements adoptés pendant l’accompagnement quotidien du résident La France est l’un des pays européens négligent ces droits fondamentaux, en qui compte la proportion la plus élevée de particulier lorsque les considérations d’ordre personnes âgées en EHPAD (8,8 % des 75 ans organisationnel et budgétaire deviennent et plus)3. Près de 7 600 EHPAD accueillent prédominantes. La grande majorité des plus de 600 000 personnes âgées en professionnels font de leur mieux, avec un perte d’autonomie ou handicapées qui sont engagement qui doit être salué, mais souvent majoritairement des personnes en situation le manque de moyens ne leur permet pas de vulnérabilité : 80% sont classées en GIR toujours d’accompagner les résidents comme 1 à 44, 260 000 souffrent d’une maladie ils le devraient et le souhaiteraient. neurodégénérative et 28% sont sous régime de protection juridique des majeurs5. Les Le Défenseur des droits a ainsi eu besoins en soins et les niveaux de dépendance connaissance de plusieurs situations des résidents continuent à progresser. Selon dans lesquelles, pour pallier le manque les projections de la DREES, en 2050, les plus de personnel, des couches étaient de 60 ans seront 25 millions, dont 4 millions en systématiquement mises aux personnes situation de perte d’autonomie ou de handicap. âgées, sans considération de la réalité de leur situation. De la même manière, les horaires de Le défi des EHPAD consiste dès lors à garantir lever et de coucher des résidents sont parfois un juste équilibre entre, d’une part, la sécurité fixés uniquement pour s’adapter aux emplois et la protection de leurs résidents, notamment du temps des personnels. ceux en situation de particulière vulnérabilité 4
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 A également été relevé à plusieurs reprises La crise sanitaire liée à la pandémie de la le non-respect des protocoles concernant Covid-19 a mis en exergue les difficultés l’hygiène, la fréquence des douches et des récurrentes auxquelles sont confrontés les toilettes. EHPAD et les défaillances constatées par le Défenseur des droits. Depuis le début de De tels actes, qui sont facilités voire rendus la crise, l’institution est encore davantage possibles par la vulnérabilité liée à la perte interpellée sur les atteintes aux droits et d’autonomie des personnes accueillies en libertés des résidents en EHPAD, concernant EHPAD8, sont constitutifs de maltraitance9 et plus particulièrement leur droit au maintien de discrimination10. des liens familiaux, leur liberté d’aller et venir Les situations dont le Défenseur des droits et le respect de leur consentement. Certains est saisi montrent que la maltraitance résidents n’ont pas pu recevoir de visite et provient parfois d’actes individuels, plus ou ont ainsi été maintenus au sein de l’EHPAD moins conscients, mais aussi et surtout de pendant plusieurs mois, en dépit de leur carences de l’organisation liées à la pénurie demande ou de celle de leurs proches, de de personnel, à la rotation importante, à sorties à proximité de l’établissement. l’épuisement des professionnels ou au manque Face à l’ampleur du sujet, le Défenseur des d’encadrement. droits a procédé à une analyse de l’ensemble Confrontées à des situations de maltraitance, des réclamations adressées à l’institution et les directions d’établissement sont parfois réalisé, depuis le début de l’année 2019, des tentées de chercher un coupable unique afin entretiens et des auditions d’associations, de de les réduire à des actes individuels. Or, syndicats, de fédérations, d’institutions et de la maltraitance institutionnelle s’ajoute à la professionnels des secteurs médico-social et maltraitance individuelle ; elle ne dilue pas les sanitaire, mais également des visites au sein responsabilités individuelles mais souligne les de plusieurs EHPAD. Dans le cadre de ses responsabilités propres de l’institution dont la relations avec la société civile, il a consulté raison d’être est la protection des personnes son comité d’entente sur l’avancée en âge, vulnérables. composé d’associations investies sur le sujet du vieillissement, pour faire le point de la Il est en effet important de faire la distinction situation en matière de respect des droits entre les actes de violence ou de négligence des personnes âgées accueillies en EHPAD. individuels en milieu institutionnel et la En complément, le Défenseur des droits a violence institutionnelle, où l’établissement sollicité toutes les agences régionales de santé lui-même engendre la violence ou la (ARS), qui lui ont transmis un état des lieux négligence11. La maltraitance peut être des réclamations et signalements qui leur qualifiée d’institutionnelle chaque fois que avaient été adressés ainsi que la synthèse des l’institution laisse les faits perdurer sans inspections qu’elles avaient réalisées au cours réagir, notamment après de multiples des trois dernières années. signalements des familles des victimes. Les actes ou situations résultant du manque de Partant de ces constats, la Défenseure des moyens de l’établissement peuvent également droits a décidé d’établir le présent rapport être constitutifs de faits de maltraitance sur les droits et libertés fondamentales des institutionnelle12. personnes âgées accueillies en EHPAD et de formuler des recommandations afin d’en Dans un contexte budgétaire contraint, les assurer l’effectivité. EHPAD organisent le plus souvent leur offre de services selon une logique gestionnaire qui génère une standardisation des conditions de prise en charge. Or, une telle prise en charge ne peut pas répondre efficacement aux besoins individuels des personnes âgées vulnérables13 dans le respect de leurs droits et libertés. 5
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 I· L es droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD La protection des droits fondamentaux des effective participation à la société sur la base personnes âgées accueillies en EHPAD repose de l’égalité avec les autres »19. sur un ensemble de textes internationaux et La plupart des personnes âgées accueillies en européens ratifiés par la France et destinés EHPAD, même si elles ne jouissent pas d’une à protéger tous les êtres humains, et en reconnaissance administrative au titre du particulier les plus vulnérables d’entre eux. handicap, répondent à cette définition. S’il n’existe à ce jour aucun instrument La CIDPH fait d’ailleurs référence à l’âge international en matière de droit de la concernant, par exemple, la mise en place personne qui traite spécifiquement des droits d’aménagements adaptés en fonction de des personnes âgées, l’ensemble des traités l’âge, l’importance de services d’assistance internationaux relatifs aux droits humains14 et de protection adaptés à l’âge ou encore s’applique à tous de la même manière, y dans le cadre des services de soins de santé compris aux personnes âgées. destinés à réduire et à prévenir les nouveaux En ce sens, notamment, le Pacte international handicaps20. des droits civils et politiques (PIDCP) et le Ratifiée par la France en 2010, la CIDPH vise Pacte international des droits économiques, à réaffirmer le caractère universel, indivisible, sociaux et culturels (PIDESC) imposent aux interdépendant et indissociable de tous les États l’obligation de garantir à tous l’exercice droits de l’homme et de toutes les libertés des droits qu’ils énoncent, parmi lesquels, le fondamentales, et la nécessité d’en garantir la droit à un recours effectif, à la protection de pleine jouissance aux personnes handicapées la vie privée et familiale et à la jouissance du sans discrimination. meilleur état de santé physique et mentale possible15. Cette Convention se fonde, entre autres, sur le respect de la différence, de la dignité Plus spécifiquement, même si la vieillesse intrinsèque, de l’autonomie individuelle et de n’est pas synonyme de handicap, il n’en l’indépendance des personnes, la participation reste pas moins que les personnes âgées et l’intégration pleines et effectives à la société, en situation de handicap ou de perte et l’égalité des chances. Elle proclame la d’autonomie16 peuvent se prévaloir de prohibition des discriminations fondées sur le la protection offerte par la Convention handicap, la reconnaissance de la personnalité des Nations Unies relative aux droits des juridique des personnes handicapées dans personnes handicapées (CIDPH)17. des conditions d’égalité, le droit d’être protégé En effet, au sens de la CIDPH, on entend par contre la maltraitance et le droit de jouir du personnes handicapées les « personnes meilleur état de santé possible. qui présentent des incapacités18 physiques, Au niveau européen, les personnes mentales, intellectuelles ou sensorielles accueillies en EHPAD peuvent se prévaloir durables dont l’interaction avec diverses de la Convention européenne de sauvegarde barrières peut faire obstacle à leur pleine et des droits de l’Homme et des libertés 6
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 fondamentales (CESDH) qui consacre, respectant son consentement éclairé ; à la notamment, le droit de toute personne confidentialité des informations la concernant ; au respect de sa vie privée et familiale, à l’accès à l’information relative à sa prise l’interdiction de toute discrimination ainsi que en charge ; à une information sur ses droits le respect de la propriété21. fondamentaux et les protections légales et contractuelles dont elle bénéficie, ainsi que La Charte sociale européenne révisée affirme sur les voies de recours à sa disposition ; à également le droit à la protection de la la participation directe au projet d’accueil et santé et le droit des personnes âgées à une d’accompagnement. protection sociale incluant, pour celles vivant en établissement, la garantie d’une assistance En vue d’assurer l’exercice effectif de ces appropriée dans le respect de la vie privée et la droits « et notamment de prévenir tout risque participation à la détermination des conditions de maltraitance »23, une Charte des droits et de vie dans l’institution. Ces droits doivent être des libertés de la personne accueillie (ci-après exercés sans discrimination22. « la Charte des droits ») a été établie24, laquelle doit être communiquée à chaque résident En droit interne, l’exercice des droits et libertés et affichée dans l’établissement. Y sont individuels est garanti par l’article L. 311-3 du proclamés, notamment, les droits à la non- code de l’action sociale et des familles (CASF) discrimination, à une prise en charge adaptée, à toute personne prise en charge par des à l’information, et le principe du libre choix, du établissements et services sociaux et médico- consentement éclairé et de la participation de sociaux. la personne accueillie. Il est ainsi précisé que la personne accueillie Il existe donc un cadre juridique contraignant a droit : au respect de sa dignité, de son qui offre une protection élevée aux personnes intégrité, de sa vie privée, de son intimité, âgées accueillies en EHPAD. Toutefois, il de sa sécurité ; à aller et venir librement ; au ressort nettement de l’examen des situations libre choix entre les prestations adaptées qui portées à la connaissance du Défenseur des lui sont offertes notamment dans le cadre droits que l’effectivité de ces droits n’est pas d’une admission au sein d’un établissement assurée. spécialisé ; à une prise en charge et un accompagnement individualisé de qualité, 7
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 A· Elle peut également se traduire par un accueil dans un établissement, certes plus proche Principe du libre choix, du consentement de la famille, mais dont la prise en charge est inadaptée aux besoins de la personne âgée. éclairé et droit à l’information de la Enfin, peu d’établissements développent personne accueillie l’hébergement temporaire qui permet à la personne d’alterner les séjours en EHPAD et Toute personne, quel que soit son degré au domicile. Pourtant, ce court séjour offrirait à d’autonomie, a le droit d’exercer son libre la personne la possibilité d’être accueillie pour arbitre et son droit de regard pour toutes une durée limitée, de se familiariser avec son les décisions qui concernent sa vie, avec futur lieu de vie et, ce faisant, de prendre une le maximum d’autodétermination et décision davantage éclairée. d’indépendance au sein de la société25. La recherche du consentement éclairé Le libre choix du lieu de résidence L’article L.311-3 du CASF pose le principe Les personnes âgées en perte d’autonomie du libre choix de la personne accueillie doivent avoir la possibilité de choisir leur en établissement entre les prestations lieu de résidence et de mener une existence qui lui sont offertes et du respect de son indépendante dans leur environnement consentement éclairé quant aux conditions et habituel aussi longtemps qu’elles le souhaitent aux modalités de sa prise en charge et de son et que cela est possible26. accompagnement. Choisir librement son lieu de vie suppose, pour L’article 4 alinéa 2 de la Charte des droits la personne âgée en perte d’autonomie, une oblige à rechercher le consentement éclairé offre couvrant un large spectre de réponses de la personne en l’informant, par tous les adaptées à ses besoins, allant du logement moyens adaptés à sa situation, des conditions individuel, avec ou sans accompagnement et des conséquences de la prise en charge par des services spécialisés, jusqu’à l’accueil et de l’accompagnement et en veillant à sa en EHPAD, en passant par d’autres formules compréhension. intermédiaires, tel le logement collectif ou inclusif. Conformément à l’article 12 de la CIDPH, les personnes placées sous un régime de Or, aujourd’hui la décision de vivre en EHPAD protection juridique doivent bénéficier d’un résulte moins souvent d’un libre choix régime de décision assistée qui respecte leur de la personne âgée, que de contraintes autonomie, leur volonté et leurs préférences, liées à l’impossibilité pour elle de rester de sorte que leur consentement doit être à son domicile en raison, notamment, de recherché dès lors qu’elles sont dans la l’insuffisance des réponses apportées en capacité d’exprimer leur volonté28. matière de compensation aux personnes âgées en situation de perte d’autonomie ou Dans les faits, les possibilités de recueillir le handicapées27. consentement effectif de la personne et de s’assurer des conditions d’un libre choix sont Le droit au libre choix du lieu de résidence d’autant plus complexes à mettre en œuvre s’entend également de la possibilité pour la que l’entrée en établissement a souvent lieu personne âgée en perte d’autonomie de choisir en urgence, sans préparation préalable. La l’établissement dans lequel elle souhaite demande émane fréquemment des proches être hébergée. Or, là aussi, ce choix est mis familiaux, ou des professionnels si la personne à mal par l’insuffisance de l’offre adaptée. âgée est isolée. L’indisponibilité de places dans les structures peut en effet conduire à un éloignement géographique et par conséquent familial. 8
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 Par ailleurs, les EHPAD accueillent une et, le cas échéant, son représentant légal population de plus en plus dépendante, dont peuvent signer le contrat de séjour31. une proportion non négligeable de personnes Dans les situations dont il est saisi, le atteintes de troubles cognitifs, ce qui Défenseur des droits observe un non-respect représente une difficulté supplémentaire au fréquent de la procédure de conclusion du recueil du consentement et à la participation contrat de séjour telle qu’établie par la loi. des résidents. La faculté à consentir librement Indépendamment de la capacité à consentir apparait ainsi « inversement proportionnelle du résident, son consentement n’est pas à la vulnérabilité des personnes. Lorsque les formalisé et de nombreux contrats ne sont pas capacités physiques et cognitives déclinent signés ou le sont par une personne autre que ou sont altérées, les individus ne sont plus en le résident ou son représentant légal32. mesure d’exprimer et de faire respecter leurs choix »29. Concernant la procédure de conclusion du contrat de séjour, l’alinéa 5 de l’article L. 311-4 Face aux difficultés liées au recueil du du CASF prévoit un entretien du futur résident consentement des personnes âgées à avec le directeur de l'établissement, ou toute un hébergement en EHPAD – processus autre personne formellement désignée par qui peut s’avérer long et qui nécessite un lui, et « chaque fois que nécessaire », avec accompagnement –, le Défenseur des la participation du médecin coordonnateur droits constate un recours très fréquent de l’établissement. Le but de cet entretien à des demandes de mise sous protection est d’informer la personne « de ses droits et juridique du futur résident – sans analyse s'assure[r] de leur compréhension » ainsi de l’opportunité ni de la proportionnalité de que de rechercher le consentement. Il doit cette mesure – se traduisant notamment par se faire « hors de la présence de toute autre des mesures de mise sous tutelle, par nature personne, sauf si la personne accueillie choisit restrictives de droits. de se faire accompagner par la personne de En outre, la question du libre choix et du confiance ». consentement de la personne accueillie « se Compte tenu de l’asymétrie d’information et de pose dans des termes d’autant plus complexes pouvoir évoquée plus haut, le Défenseur des que les relations entre résidents et soignants droits considère que l’accompagnement de la sont marquées par une profonde asymétrie personne doit être privilégié. Dès lors qu’une d’information et de pouvoir, ce qui peut inciter personne de confiance est désignée, elle les premiers à s’en remettre à la volonté des devrait par conséquent être invitée à participer seconds »30. à l’entretien sauf si la personne accueillie s’y oppose. La formalisation du consentement par Par ailleurs, si la recherche du consentement de la personne à son admission en EHPAD le contrat de séjour se matérialise par la signature du contrat de séjour, la délivrance d’informations erronées Lors de son admission, le consentement du par le biais de stipulations abusives affaiblit la futur résident sur les objectifs et la nature de protection offerte par l’instrument contractuel. sa prise en charge et de son accompagnement doit être recueilli. En effet, il ressort des saisines du Défenseur des droits que certaines clauses abusives Afin de formaliser le consentement, l’article perdurent dans les contrats de séjour : clause L.311-4 du CASF dispose qu’un contrat de indiquant que l’établissement ne peut être séjour doit être conclu avec la participation de tenu responsable en cas de vol, perte ou la personne accueillie ou de son représentant détérioration des biens des résidents33, clause légal. concernant la date de départ de la facturation Par ailleurs, en application de l’article D.311, I des prestations d’hébergement34 ou encore du CASF, seule la personne qui sera accueillie celle ayant trait à la facturation automatique de frais de remise en état des lieux. 9
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 La rétention de la caution pour cause de Le droit à la désignation d’une personne dégradation est au surplus fréquente alors qu’aucun état des lieux contradictoire n’a été de confiance réalisé, ni à l’entrée, ni à la sortie du résident, obligation pourtant prévue à l’article L.311-7-1 Depuis la loi relative à l’adaptation de la société du CASF35. au vieillissement du 28 décembre 2015, la personne âgée accueillie en EHPAD dispose du droit de désigner une personne de confiance Le droit à une information claire, qui dispose d’attributions propres dans le secteur médico-social : accompagner le compréhensible et adaptée résident et veiller au respect de ses droits dans le cadre de sa prise en charge médico-sociale. Si le consentement libre et éclairé du La personne de confiance peut ainsi résident constitue le fondement de la relation être consultée par le résident lorsque ce d’accompagnement, il ne peut y avoir de dernier rencontre des difficultés dans la véritable consentement sans information. Or, le connaissance et la compréhension de ses Défenseur des droits remarque que la prise de droits ; l’accompagner lors de l’entretien en vue décision est souvent entravée par le manque de la conclusion du contrat de séjour afin de d’informations du résident. s’assurer de la validité de son consentement ; Le droit à l’information sur les modalités proposer des modifications de l’éventuelle de prise en charge du résident, ses droits, annexe au contrat de séjour dédiée aux les protections particulières, légales et aménagements des conditions d’accueil. De contractuelles, ainsi que sur les voies de plus, le résident peut lui confier expressément recours à sa disposition est consacré à l’article les attributions classiques de la personne de L.311-3 alinéa 6 du CASF et à l’article 3 de la confiance dans le secteur sanitaire, telles que Charte des droits. Cette information doit être prévues à l’article L.1116-1 du code de la santé claire, compréhensible et adaptée aux besoins publique (CSP) : l’assister dans ses démarches, de la personne. en tant que patient, et l’accompagner aux entretiens médicaux afin de l’aider dans les L’article L.311-4 du CASF traduit notamment décisions sur la prise en charge de sa santé. ce droit par l’obligation de remise, au moment de l’admission, d’une copie des documents Conformément à l’article L. 311-5-1 du CASF, suivants : le livret d’accueil, la Charte des droits l’établissement doit l’informer, avant la et des libertés de la personne accueillie, le conclusion du contrat de séjour, de son droit règlement de fonctionnement et le contrat de désigner une personne de confiance. Les de séjour. Lors de la conclusion de ce contrat, conditions dans lesquelles l’information sur le directeur de l’établissement doit informer ce droit doit être fournie sont établies par le le résident de ses droits et s’assurer de leur décret du 18 octobre 201636. compréhension. Or, le Défenseur des droits perçoit, au fil de Or, le Défenseur des droits constate que ces l’instruction des réclamations dont il est saisi, documents ne sont pas systématiquement que le résident n’est souvent pas informé de remis. Plus spécifiquement, l’information ce droit et, surtout, que le rôle de la personne sur la tarification mise en place et les aides de confiance n’est pas bien compris par les auxquelles la personne peut prétendre est parties prenantes, fréquemment confondu rarement délivrée ou accessible. Ce défaut avec celui du représentant légal. d’information concerne également le droit pour la personne accueillie de désigner une personne de confiance. 10
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 La Défenseure des droits recommande La Défenseure des droits recommande au ministre des Solidarités et de la Santé aux agences régionales de santé (ARS) et Recommandation n°1 aux conseils départementaux (CD) De veiller à ce que les directions de tous les Recommandation n°7 EHPAD planifient, dans les meilleurs délais, un audit externe portant sur la validité des De veiller à ce que les directions des EHPAD contrats de séjour de toutes les personnes renforcent l’information du résident et de ses accueillies et de procéder, le cas échéant, à proches sur les modalités de prise en charge, leur régularisation. les prestations proposées, les mesures de protection, les voies de recours ainsi que le Recommandation n°2 droit pour la personne accueillie de désigner une personne confiance. D'inciter les directions des EHPAD à proposer, lorsque cela possible, au futur résident Recommandation n°8 d’alterner, dans un premier temps, les séjours en établissement et au domicile, afin de D'inciter les directions des EHPAD à désigner permettre un choix éclairé. un référent chargé de veiller à la recherche effective du consentement des résidents, la Recommandation n°3 nomination de ce référent « consentement » s’inscrivant dans le projet d'établissement. D'inscrire dans une disposition réglementaire l’obligation d’intégrer dans le livret d’accueil, la Charte des droits, le règlement de La Défenseure des droits recommande fonctionnement et les contrats de séjour de l’EHPAD, un volet en « facile à lire et à au ministre de l’Economie, des Finances et comprendre » (FALC) pour tous ceux qui rencontrent des difficultés de compréhension. de la Relance Recommandation n°4 Recommandation n°9 D'engager des actions de sensibilisation De renforcer les contrôles des EHPAD par auprès des professionnels, des résidents et la Direction générale de la Concurrence, de de leurs proches sur le rôle de la personne de la Consommation et de la Répression des confiance dans le secteur médico-social. fraudes (DGCCRF) portant sur la vérification de l’absence de clauses abusives dans les Recommandation n°5 contrats de séjour. De prévoir, par une disposition réglementaire, l’obligation d’inscrire le nom et les coordonnées de la personne de confiance désignée par le résident dans son dossier administratif. Recommandation n°6 De modifier l’article L. 311-4 du CASF relatif à la présence de la personne de confiance lors de la conclusion du contrat de séjour afin que la personne de confiance désignée soit systématiquement invitée à participer à l’entretien sauf si la personne accueillie s’y oppose. 11
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 B· règlementaire contraignant précisant les conditions et modalités de sa mise en œuvre. Le droit à une prise en charge Seules existent des recommandations de bonnes pratiques formulées par l’Agence et à un accompagnement adaptés nationale de l’évaluation et de la qualité des L’article 19 de la CIDPH garantit aux personnes établissements et services sociaux et médico- âgées en situation de handicap, résidant sociaux (ANESM), aujourd’hui intégrée à la en établissement, l’accès aux services Haute Autorité de santé (HAS)38. Ce cadre nécessaires pour « leur permettre de vivre apparaît insuffisant. dans la société et de s’y insérer et pour Le Défenseur des droits observe en effet empêcher qu’elles ne soient isolées ou que, bien que les établissements élaborent victimes de ségrégation ». La Charte sociale des documents nommés « projets européenne assure quant à elle, dans son personnalisés », ces derniers sont souvent article 23, « aux personnes âgées vivant en réalisés unilatéralement par les professionnels, institution l'assistance appropriée dans le sans la participation du résident. Les EHPAD respect de la vie privée, et la participation à publics, en particulier ceux rattachés à un la détermination des conditions de vie dans établissement hospitalier associent ainsi l'institution ». rarement les résidents au projet personnalisé39, Tout comme l’article L. 311-3 3° du CASF, probablement en raison de la prédominance l’article 2 de la Charte des droits affirme de la culture sanitaire. le droit à une prise en charge ou à un En conséquence, ce projet est souvent accompagnement adapté de la personne inadapté aux besoins de la personne accueillie qui doit se voir proposer une prise accueillie et est loin de constituer un contrat en charge individualisée et la plus adaptée d’accompagnement traduisant la volonté et les possible à ses besoins, dans la continuité des choix exprimés par la personne elle‑même. interventions. De surcroît, alors que les règles de bonnes pratiques établissent que l’actualisation des projets personnalisés des résidents devrait La mise en place du projet personnalisé être réalisée chaque année40, dans la majorité des cas, ces projets ne sont pas réévalués, Le droit à une prise en charge et à un même en cas de dégradation de l’état de santé accompagnement adaptés se traduit par du résident41. la mise en place, pour chaque personne accueillie en EHPAD, d’un projet personnalisé Pourtant, impliquer le résident dans qui comprend différents volets, tels que l’élaboration de son projet personnalisé et être vie quotidienne, vie sociale, soins, soutien à son écoute dès lors que ce dernier souhaite psychologique et accompagnement en fin de qu’il soit réévalué est déterminant. En effet, vie. différentes études mettent en évidence le fait qu’encourager les personnes à exprimer Le projet personnalisé permet de poser leurs attentes et les faire participer aux prises clairement les termes du compromis entre le de décisions non seulement renforcent leur respect de la liberté de choix des prestations satisfaction mais « favorisent même leur par le résident et la mission de protection rétablissement »42. des personnes qui relève de l’institution. Son élaboration doit être l’occasion de proposer un accompagnement et des activités en adéquation avec les attentes et les besoins de chaque résident. Alors que les EHPAD sont tenus d’élaborer un projet personnalisé pour chaque résident37, cette obligation n’est assortie d’aucun texte 12
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 Les freins institutionnels à la prise reste un facteur important des difficultés chroniques en matière de recrutement48. Les en charge et à l’accompagnement adaptés établissements se voient dès lors trop souvent contraints d’embaucher du personnel non Une prise en charge individualisée suppose formé et non qualifié. une formation ou au minimum une sensibilisation du personnel et, dans le cas L’absence de formation continue du personnel, où le personnel est habitué à une prise en notamment en matière de lutte contre la charge sanitaire de type hospitalier, un certain maltraitance, se surajoute à ces difficultés. Or, renversement de perspective est nécessaire. la formation des professionnels sur des sujets tels que les spécificités du public accueilli, la Le Défenseur des droits constate que le droit bientraitance, la douleur… permet de répondre à l’accompagnement individualisé et adapté de manière plus adéquate aux besoins des est compromis par le manque de moyens, personnes accompagnées. Elle favorise humains et financiers, des établissements. une consolidation des compétences et des Même certains soins, comme ceux qui relèvent pratiques professionnelles sur les aspects de la toilette, sont organisés dans une logique complexes de l’accompagnement. comptable pour réduire les effectifs du personnel. Au grand nombre de postes vacants s’ajoute un important taux d’absentéisme qui touche En vertu du II de l’article D.312-155-0 du massivement les métiers du grand âge49, CASF43, les EHPAD doivent, pour assurer en lien avec la pénibilité des postes et le leurs missions, disposer d’une équipe découragement lié aux conditions de prise pluridisciplinaire comprenant – outre le en charge des résidents. Sont rapportés au directeur et le personnel administratif – Défenseur des droits des témoignages de au moins un médecin coordonnateur, un professionnels qui affirment préférer quitter professionnel infirmier, des aides-soignants, leur poste plutôt que continuer à travailler dans des aides médico-psychologiques (AMP), des des conditions qui les rendent eux-mêmes accompagnants éducatifs et sociaux et des maltraitants ou complices de certains actes. personnels psycho-éducatifs. Or, le Défenseur des droits remarque qu’une telle équipe n’est pas toujours mise en place au sein des Les conséquences sur la prise en charge et établissements, ce qui compromet la qualité de la prise en charge, notamment paramédicale, l’accompagnement des résidents de la personne accueillie. Au regard des réclamations dont est saisi le Le Défenseur des droits souligne l’existence Défenseur des droits, plusieurs aspects de d’un décalage important entre les besoins la prise en charge du résident, affectés par des résidents et les effectifs réellement l’insuffisance des moyens des EHPAD, doivent proposés par les EHPAD. La présence humaine faire l’objet d’une vigilance particulière. – mesurée à travers le taux d’encadrement44 – est largement insuffisante pour une prise Le glissement des tâches en charge respectueuse des droits du résident45. Ces taux d’encadrement ne sont Afin de pallier le manque de personnel, pas satisfaisants et ne correspondent pas aux d’importants glissements de tâches – besoins réels de la prise en charge. De plus, attribution de nouvelles tâches sans que les le ratio comprend le personnel soignant mais fiches de poste n’aient évolué – se mettent en aussi le personnel administratif de l’EHPAD, place dans plusieurs établissements. qui n’accompagne pas directement les résidents46. Il est fréquent d’observer des aides-soignants effectuant des actes infirmiers, des aides Par ailleurs, le manque d’attractivité des médico-psychologiques exécutant des métiers du secteur du grand âge (conditions de tâches d’aides-soignants au lieu d’animer travail difficiles, salaires trop faibles, manque des activités culturelles, sociales, des loisirs, de reconnaissance, formation insuffisante...)47 13
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 ou encore des « dames de compagnie »50 se Le Défenseur des droits a pu également substituant au personnel de l’établissement relever que l’alimentation proposée aux (aide au repas, toilettes, changes), voire même résidents n’est pas toujours adaptée à leur s’immisçant dans les soins aux résidents, degré d’autonomie. Par exemple, certains sans aucun contrôle de la part de certaines proches de résidents regrettent que les repas directions d’établissement. soient servis moulinés ou mixés plutôt qu’une aide humaine soit octroyée au résident qui Ces glissements de tâches sont facilités par ne peut plus couper seul ses aliments. Les les nombreuses défaillances dans la gestion régimes alimentaires sont aussi rarement des ressources humaines, comme le manque pris en compte. Or, le manque de qualité d’élaboration des fiches de poste ou leur et l’inadéquation de la nourriture ainsi que imprécision, la non vérification des diplômes, l’insuffisance d’apport hydrique sont à l’origine un défaut de planning, des entretiens annuels de nombreux cas de malnutrition et de d’évaluation insuffisants et non formalisés, déshydratation, quand ils ne viennent pas plus comme le soulèvent certaines ARS dans leur directement dégrader l’état de santé. contribution écrite au Défenseur des droits. Concernant les rythmes alimentaires, La sécurité alimentaire des résidents certaines ARS ont confirmé les informations issues des réclamations dont est La protection du résident nécessite, tout destinataire le Défenseur des droits : d’abord, la satisfaction de ses besoins les plus certains établissements ne respectent pas fondamentaux. La sécurité alimentaire est les recommandations de bonnes pratiques primordiale. relatives aux intervalles entre les repas – S’agissant de l’organisation de la distribution intervalle minimum de 12 heures entre le dîner des repas, selon les informations transmises et le petit déjeuner et intervalle minimum au Défenseur des droits par plusieurs ARS, de 3 heures entre le gouter et le dîner51. Il certains EHPAD s’exposent à des risques en semble pourtant évident que l’organisation ne disposant pas de protocoles définissant des repas doit être centrée autour des les échanges entre l’équipe de cuisine, le besoins des résidents et non des contraintes diététicien et les services sécurisant la chaîne organisationnelles de l’établissement. alimentaire, notamment pour les personnes qui doivent suivre des régimes spéciaux. 14
Rapport | Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD 2021 L’accès aux aides techniques perspective de favoriser son autonomie personnelle, suppose une diversification Le Défenseur des droits constate des des activités proposées, le financement de difficultés récurrentes concernant l’obtention, l’accompagnement de la dépendance en la réfection ainsi que l’entretien des aides établissement, prévu par le décret du 21 techniques nécessaires à la compensation du décembre 2016, est basé sur la grille nationale handicap ou de la perte d’autonomie (lunettes, AGGIR (autonomie-gérontologie-groupe iso appareils auditifs, prothèses dentaires…) ressources). Cette grille permet d’évaluer le de nature à porter atteinte à la dignité et à degré de perte d’autonomie mais l’évaluation l’autonomie des personnes concernées. La se limite à l’accomplissement des actes déficience visuelle ou auditive, bien qu’elle ne essentiels à la vie quotidienne53 : s’habiller, soit pas visible, peut avoir des conséquences faire sa toilette, se déplacer à l’intérieur du importantes sur la qualité de vie des résidents lieu de vie, en dehors du lieu de vie. Ainsi, les en EHPAD ainsi que sur leurs fonctions difficultés d’accès à d’autres droits – activité cognitives. culturelle, inclusion dans la cité – résultant de leur perte d’autonomie ne sont pas En pratique, l’accès à ces aides techniques compensées par ce financement. dépend principalement de l’action individuelle, en particulier des familles. Les besoins des Dès lors, le Défenseur des droits constate résidents isolés, n’ayant pas de proches que c’est davantage une prise en charge pouvant se charger de ces démarches, standard, non individualisée, avec des activités sont rarement pris en compte par les définies uniquement en fonction des moyens établissements. Les fréquentes pertes et de l’établissement qui sont proposées. parfois vols d’appareils, suivis des difficultés Les contraintes organisationnelles et les de réfection, aggravent la situation, d’autant contingences du quotidien ne permettent que le déplacement de la personne âgée est pas, en général, une personnalisation de la plupart du temps nécessaire (pour réaliser l’accompagnement. Si la personne accueillie des empreintes chez le dentiste, consulter est écoutée dans ses choix et habitudes, l’ophtalmologue …). une distorsion se produit dès lors que les professionnels doivent y adjoindre l’impératif L’accès à la vie culturelle et aux activités de continuité du service. En conséquence de de loisirs cette offre inadaptée, près de la moitié des résidents ne participe pas chaque semaine aux La personne accueillie en EHPAD a le droit activités proposées54. de participer, sur la base de l’égalité avec les autres, à la vie culturelle et à des activités de loisirs52. La participation des personnes âgées aux activités culturelles et de loisirs est d’autant plus importante que ces activités sont créatrices de liens sociaux. Des personnes ayant différents niveaux d’autonomie se côtoient au sein d’un même EHPAD. Il revient dès lors à l’établissement de proposer des activités compatibles avec l’état de santé et le degré d’autonomie de chaque résident. La palette des activités proposées doit donc être suffisamment variée. De plus, les activités n’ont pas vocation à se dérouler exclusivement dans l’EHPAD. Or, dans la pratique, les obstacles sont nombreux. Si l’individualisation de l’accompagnement du résident, dans la 15
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