État des lieux sur l'accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.

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État des lieux sur l'accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.
É tat des lieux sur l’accès des étudiants
aux soins psychiatriques et
psychologiques en Île-de-France.

Rapport de la mission effectuée à la demande de l’ARS Île-de-France par le Dr Jean-Christophe Maccotta et le
Pr Maurice Corcos.

Mai 2017

Département de Psychiatrie de l’Adolescent et du Jeune Adulte de l’Institut Mutualiste Montsouris.
Pr Maurice Corcos

T 01 56 61 69 23                          jean-christophe.maccotta@imm.fr          42, bd Jourdan 75674 Paris cedex 14
État des lieux sur l'accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.
T 01 56 61 69 23   jean-christophe.maccotta@imm.fr   42, bd Jourdan 75674 Paris cedex 14
État des lieux sur l'accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.
Table des Matières.
Résumé.                                                                                                                            5
La population des étudiants en Île-de-France.                                                                                      7
     Statistiques démographiques et évolution.                                                                                     7
     Lieux d’étude et lieux de vie.                                                                                                7
     Spécificité des étudiants.                                                                                                    9
Quelques éléments sur la santé psychique des étudiants en France.                                                             11
     La prévalence des troubles.                                                                                              11
     L’accès aux soins.                                                                                                       13
Les études évaluant les programmes de prévention à destination des étudiants.                                                 15
Etat des lieux de l’offre de soins psychologiques et psychiatriques pour les étudiants en Île-de-
France.                                                                                                                       17
      Les Bureaux d’Aide Psychologique Universitaires.                                                                        17
      Les Services Inter-Universitaires et Universitaires de Médecine Préventive et de Promotion de la Santé                  19
      La psychiatrie du secteur public et du secteur privé participant au service public.                                     21
      La psychiatrie du secteur privé.                                                                                        22
      Des psychologues et des psychiatres au sein des Grandes Ecoles.                                                         22
      Les « points écoutes ».                                                                                                 23
            La Cité Internationale Universitaire de Paris.                                                                    23
            L’Institut Catholique de Paris.                                                                                   24
            Les points écoutes d’APASO dans les résidences du CROUS.                                                          24
        L’accompagnement pédagogique et l’orientation vers les soins.                                                         25
            Le Bureau Interface professeurs étudiants (B.I.P.E.) de la Faculté de Médecine Pierre et Marie Curie.             25
            Le Dispositif d’Accompagnement aux Enseignants (DAE) et le Dispositif d’Accompagnement Renforcé
            d’Education (DARE) de SciencesPo Paris :                                                                          26
        L’aide par les Pairs.                                                                                                 27
            Le dispositif « Happy Doors » de la LMDE.                                                              27
            Le dispositif « NightLine » au sein de Paris Sciences et Lettres (PSL).                                28
            Le Programme des Etudiants Invité de l’ENS et programmes similaires du RESOME (Réseau Etudes Supérieures
            et Orientation des Migrant.e.s et des Exilé.e.s).                                                      28
        Les réseaux.                                                                                                          29
            L’Association Santé Grandes Ecoles (ASGE).                                                                        29
            Le RÉseau de Soins Psychiatriques et Psychologiques pour les ÉTudiants (RESPPET).                                 29
        L’implication de la Mairie de Paris.                                                                                  29
        Les projets restés sans suites.                                                                                       30
            La maison de santé Paris-Saclay                                                                                   30
            Le Centre Didier Anzieu à l’Université Paris Ouest Nanterre la Défense.                                           30

Préconisations.                                                                                                               31
     La prévention primaire.                                                                                                  34
            Les préventions ciblées.                                                                                          34
            Lutte contre la précarité.                                                                                        35
            Lutte contre l’isolement, l’aide à l’intégration et aide sociale.                                                 35
            Organisation des études et adaptations pédagogiques, prévention du stress.                                        36
        La prévention secondaire.                                                                                             37
            Cadre général.                                                                                                    37
            La demande d’aide, la première rencontre.                                                                         37
            La chaine d’aide et la place du psychologue ou du psychiatre à l’université.                                      38
            Description du dispositif de prévention secondaire.                                                               39
            Proposition d’organisation.                                                                                       41
            La place des SIUMPPS et SUMPPS.                                                                                   41

T 01 56 61 69 23                                jean-christophe.maccotta@imm.fr              42, bd Jourdan 75674 Paris cedex 14
État des lieux sur l'accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.
Création progressive des dispositifs.                                                                                 42
        La prévention tertiaire, les soins.                                                                                       44
            L’offre psychiatrique du secteur public et du secteur privé participant au service public.                            44
            L’offre psychothérapeutique, sans avance de frais.                                                                    45
            L’offre de soins psychologiques et psychiatriques du secteur privée.                                                  46
        La recherche.                                                                                                             48
        Les réseaux.                                                                                                              49
        La formation.                                                                                                             49
Les investigations à poursuivre.                                                                                                  51
      Poursuivre la mission.                                                                                                      51
      A propos de l’articulation entre l’enseignement secondaire et supérieur.                                                    51
En conclusion,                                                                                                                    53
Synthèse des préconisations.                                                                                                      54
Bibliographie.                                                                                                                    56
Annexes.                                                                                                                          59
     Lettre de Mission.                                                                                                           59
     Les membres du Comité de Pilotage de la mission.                                                                             60
     Les rédacteurs.                                                                                                              60
     Les rencontres effectuées.                                                                                                   61
     Le dispositif de prévention secondaire de l’Ecole Normale Supérieure à Paris.                                                62
            Description.                                                                                                          62
            Objectifs.                                                                                                            63
            Avantages.                                                                                                            63
            Limites.                                                                                                              64
            En conclusion,                                                                                                        64
        Le DAE le DARE de SciencesPo Paris.                                                                                       65
        Le BIPE de la Faculté de Médecine Pierre et Marie Curie.                                                                  68
        Le Centre Didier Anzieu à l’Université Paris Ouest Nanterre la Défense.                                                   70
        Un exemple des soins à destination des étudiants proposés par un dispositif soins-études : la clinique
        Dupré                                                                                                                     71
        Synthèse des études sur les prévalences des troubles.                                                                     74

T 01 56 61 69 23                                    jean-christophe.maccotta@imm.fr              42, bd Jourdan 75674 Paris cedex 14
État des lieux sur l’accès des étudiants aux soins
               psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.

Résumé.
Un tiers des étudiants montrent des signes de souffrance psychologique.

Les difficultés psychologiques d’un étudiant peuvent entrainer, très rapidement, une rupture de sa trajectoire
de vie puis une installation dans un état pathologique. Ces difficultés prennent souvent la forme d’une
prolongation d’une problématique psychique de l’adolescence.

Seuls 30 % des étudiants exprimant un mal-être consultent un médecin généraliste, un psychiatre ou un
psychologue. Les 70 % qui ne consultent pas, sont freinés par la méconnaissance de la souffrance, des prises
en charge possibles, des lieux de soins, et par l’idée que le coût serait trop élevé.

L’offre de soins est le plus souvent insuffisante, de plus, les étudiants et leurs encadrants (enseignants,
personnels des écoles et des universités) ne savent pas où s’adresser en cas de difficultés psychologiques. Par
manque de moyens et de disponibilités des structures de soins, l’offre de soins est quasi exclusivement orientée
vers la prise en charge des états pathologiques constitués.

La prévention des troubles psychologiques et psychiatriques est très peu développée.

Des expériences originales et certaines études internationales commencent à montrer que certains dispositifs
sont plus pertinents que d’autres. Même dans les territoires où l’offre de soins pourrait-être considérée comme
suffisante, les étudiants consultent peu. Il ne suffit pas de multiplier l’offre de soins, et/ou de la faire
connaitre pour favoriser l’accès aux soins psychiques.

Afin d’augmenter le recours aux soins psychiques lorsqu’ils sont nécessaires, il nous semble indispensable
« d’aller chercher » les étudiants où ils se trouvent, si possible le plus tôt lors de l’apparition d’une difficulté
psychologique ou d’une décompensation psychiatrique. La prévention des troubles psychiques doit être
intégrée au parcours de soins, voici une description de la chaine d’aide « idéale » :

- Les points d’entrée doivent être multiples, au sein des structures universitaires, des structures d’hébergement
   du CROUS et des internats, ils doivent être tenus par des professionnels de santé.

- Chaque professionnel (universitaire, administratif) en contact avec les étudiants est susceptible de percevoir
   très tôt leurs difficultés, il est le premier maillon de la chaine d’aide. Il doit pouvoir être accompagné lorsqu’il
   repère un étudiant en souffrance selon une pratique qui respecte la place de chacun, et qui respecte
   l’étudiant. Cet accompagnement du professionnel doit être réalisé par un psychiatre ou un psychologue qui
   connait bien la structure universitaire. Nous devons développer une culture du « care » à l’université.

- Le professionnel de la santé psychique intégré à la structure universitaire occupe une place intermédiaire
   entre l’intérieur et l’extérieur, il doit être en relation avec les structures d’aval, et après une évaluation de
   l’étudiant, s’occuper de l’adressage à ces structures et en assurer le suivi en position de tiers, d’interface
   entre les soins et le suivi pédagogique assuré par les enseignants.

État des lieux sur l’accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.              5# /#74
- Les structures d’aval doivent être organisées de façon à pouvoir proposer une palette élargie de soins et
   recevoir tous les étudiants qui en ont besoin.

La mise en place d’un tel dispositif permettrait une prévention efficace à la fois des troubles psychologiques
et psychiatriques, ainsi que de leur aggravation. Il pourrait aussi permettre une réduction des échecs dans les
cursus universitaires grâce à des soins très précoces et à l’articulation de ces soins avec l’accompagnement et/
ou les adaptations pédagogiques. On peut espérer aussi qu’une prévention efficace des maladies
psychiatriques et de leur conséquences sociales permettrait de réduire leurs coûts pour la société.

Dans ce rapport, nous présenterons d’abord des éléments démographiques, puis les éléments sur la santé
psychique des étudiants et quelques études scientifiques qui ont évalué des dispositifs de prévention des
troubles psychologiques des étudiants. Enfin, nous présenterons l’offre de soins actuelle en mettant en exergue
à la fois les dispositifs originaux, fonctionnels et ses insuffisances.

A partir de l’analyse de ces informations, nous présenterons une synthèse des préconisations recueillies auprès
des différents acteurs que nous avons rencontrés, en les organisant selon les différents types de prévention :

- La prévention primaire : soutenir les initiatives, en particulier celles portées par les étudiants eux-mêmes,
    qui luttent, entre autres, contre l’isolement et la précarité des étudiants.

- La prévention secondaire : Il s’agit de mettre en place une hybridation des actions d’aide,
    d’accompagnement pédagogique puis de soins au sein des structures universitaires.

- La prévention tertiaire : développer l’offre de soin psychologique et psychiatrique pour les étudiants, au
    niveau des secteurs, des services universitaires de psychiatrie, des services « soins-études », des BAPU et
    du secteur privé.

Nous préconisons aussi la professionnalisation et le développement de la recherche scientifique et de la
formation sur la santé psychique des étudiants.

État des lieux sur l’accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.       6# /#74
La population des étudiants en Île-de-France.

      Statistiques démographiques et évolution.

Lors de l’année universitaire 2014-2015, on comptait presque 2,5 millions d’étudiants en France, dont
646 172 (26,15%) en Île-de-France : 332 247 (13,45%) inscrits à Paris, 178 763 (7,24%) inscrits à Versailles
et 135 162 (5,47%) inscrits à Créteil 1 .

Entre 2008 et 2013, le nombre d’étudiants en Île-de-France a augmenté de 9,3% (590 117 en 2008, 645 071
en 2013) pendant que le nombre d’étudiants en France augmentait de 8,8% (2 234 338 en 2008 et 2 430 069
en 2013) 2

Les projections du Ministère de l’Enseignement Supérieur prévoient une augmentation du nombre
d’étudiants de 13,6 % entre 2014 et 2024, soit 335 323 en France 3. Ce qui représentera environ 87 500
étudiants en Île-de-France.

Parallèlement, la population âgée de 15 à 29 ans en Île-de-France baissait de 1,57 % entre 2008 et 2013 (2,464
millions en 2008 et 2,426 millions en 2013). Les prévisions de l’INSEE prévoit une augmentation de 0,83 % de
cette même population entre 2014 et 2024 (2,429 millions en 2014 et 2,449 millions en 2024)4.

Le nombre d’étudiants augmente malgré la stabilité de leur classe d’âge au niveau démographique
en Île-de-France.

      Lieux d’étude et lieux de vie.

Nous reprenons deux cartes tirées de la note 109 de l’Atelier Parisien d’URbanisme (APUR) : Les étudiants
dans la Métropole du Grand Paris - Premiers éléments 5 , montrant pour la première les lieux d’études des
étudiants, et pour la deuxième les lieux de vie.

Dans l’étude de l’APUR, en 2012, 504 000 jeunes de 16 à 29 ans ont déclarés être étudiants de l’enseignement
supérieur dans la Métropole du Grand Paris.

322 000 (64 %) sont inscrits dans un établissement parisien, dont 146 000 (29%) sur les territoires des 5ème,
6ème, 13ème, 15ème et 16ème arrondissements. La densité en étudiants est la plus forte dans les 5ème et
6ème arrondissements avec respectivement 138 et 114 étudiants inscrits à l’hectare pour une moyenne
parisienne de 37. Les 5ème et 13ème arrondissements accueillent 30 000 étudiants chacun.

Cependant, cette étude note qu’un certain nombre de pôle universitaires d’importance se trouvent en dehors
de Paris : Nanterre (35 000 étudiants), Saint-Denis (25 000 étudiants) et Créteil (35 000 étudiants). En grande
couronne, d’autres centres importants existent : Evry (12 000), Champs-sur-Marne (12 000), Cergy (17 000),
Orsay (13 000 étudiants) ou encore Versailles (9 000 étudiants).

1   Note d’Information 15.08 du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.
2   ATLAS RÉGIONAL ● 2013-2014 du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.
3   Note d’Information 16.01 du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.
4   INSEE - Pyramide des âges et Projection régionales de population à l’horizon 2040.
5   APUR (2016) Note 109 - Les étudiants dans la Métropole du Grand Paris - Premiers éléments.

État des lieux sur l’accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.      7# /#74
Environ 25% des étudiants inscrits dans un établissement du supérieur de la Métropole du Grand Paris résident
en dehors de ses limites, soit 116 000 jeunes.

Pour les autres, les lieux de résidences restent très centraux, avec près de 200 000 jeunes qui habitent Paris
(46%) et 230 000 dans les autres territoires de la Métropole du Grand Paris.

État des lieux sur l’accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.     8# /#74
La densité d’étudiants habitants est très élevée dans 13 arrondissements parisiens, et un peu moins dans
quelques communes limitrophes à l’ouest de Levallois-Perret au Kremlin Bicêtre et à l’est : Saint-Mandé,
Vincennes et le Pré-Saint-Gervais

Les étudiants restent donc assez concentrés, même si le mouvement centrifuge va s’accentuer avec la création
du campus Paris-Saclay.

     Spécificité des étudiants.

A leur arrivée dans les établissements d’enseignement supérieur, les jeunes adultes sont dans une période de
réaménagement de leur construction psychique. La nécessité d’abandonner certains investissements pour se
concentrer sur un petit nombre voire sur un seul, les renoncements nécessaires au choix d’orientation font des
premières années après le bac une période pendant laquelle l’organisation psychique de l’étudiant est mise à
rude épreuve. De plus, c’est aussi la période de séparation d’avec le foyer familial, souvent du fait de la
nécessité d’aller étudier dans une autre ville, ou par choix d’autonomisation.

Durant cette période, tout change : leurs investissements intellectuels, leur environnement et leurs réseaux
relationnels. Les investissements qui ont soutenu leur organisation psychique jusqu’alors, leur semblent
disparaitre, s’éloigner ou être remis en cause par leur propre choix ou un choix qui leur a été imposé. Des
phases de désorganisation psychique avec plus ou moins de symptômes (dépressions, troubles des conduites
alimentaires, toxicomanies, psychoses), parfois très inquiétantes, peuvent apparaitre. Le plus souvent, elles
laissent place à des phases de réorganisation avant que de stabilisation, liées à de nouvelles rencontres et/ou
de nouveaux investissements.

La question du choix d’orientation, et donc du renoncement aux autres choix, est particulièrement exacerbée
de nos jours car elle se combine avec la pression sociale/parentale concernant le parcours idéal afin de pouvoir
avoir la meilleure situation professionnelle possible qui devient un élément essentiel de l’identité en temps de
crise.

Les conditions de vie des étudiants sont souvent précaires, 24% des étudiants déclarent ne pas avoir de
revenus suffisants pour subvenir à leurs besoins, et 26% déclarent avoir des difficultés financières importantes.
Ces conditions aboutissent au fait que les étudiants gagnent en autonomie sans toutefois pouvoir devenir
indépendants, restant fortement liés matériellement à leurs parents puisque pour 73% des étudiants, la cellule
familiale constitue la principale source de revenus. De nombreux étudiants (28%) déclarent exercer une activité
rémunérée, et 20% de ceux-ci pensent que cela nuit à leurs études 6 .

Les étudiants sont pris dans les rets d’une véritable contradiction, celle d’une autonomisation, qu’ils
souhaitent, que la société demande et attend, sans en avoir les moyens matériels, ni le pouvoir de
les acquérir. Cette dépendance, non résolue en phase de confrontation à ses idéaux personnels,
peut prendre la forme d’une prolongation d’une problématique psychique à l’adolescence.

Ces différentes sources de tension se combinent et provoquent un mal-être chez plus d’un tiers des étudiants.

Par ailleurs, une autre période de la vie estudiantine peut être porteuse d’une grande fragilisation, il s’agit de la
fin des études et de la transition avec la vie professionnelle. En effet, nombre d'étudiants décompensent au

6   LMDE / IFOP, 2011

État des lieux sur l’accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.            9# /#74
moment de quitter le statut étudiant et d'aborder ce qui est convenu d'appeler "la vie active", le devenir adulte. Il
s'agit en fait de la sortie de la post-adolescence, qui se révèle parfois pleine de dangers. Il conviendra d’intégrer
une attention particulière à cette transition dans la construction des dispositifs de prévention.

Sans études spécifiques, nous ne pouvons parler des étudiants étrangers en Île-de-France qu’en nous
référant à notre expérience. L’isolement social est en général plus prononcé. Les différences culturelles, la
rupture avec le milieux d’origine, le manque de soutien provoquent souvent des difficultés amenant à un échec
universitaire, et parfois à des troubles psychologiques longtemps ignorés du fait de la méconnaissance des
réseaux d’aide et de soutien.

État des lieux sur l’accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.           10
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Quelques éléments sur la santé psychique des étudiants en
France.
La santé des étudiants, et en particulier la santé psychique, est une préoccupation de plus en plus partagée.
Les études de l’OMS parues en mai 2014, de l’Observatoire de la Vie Etudiante (2010, 2013, 2016), des
mutuelles étudiantes comme celles de la LMDE (2005, 2008, 2011, 2014) et du réseau EMEVIA (2015) ont
alerté le grand public sur l’état de santé des jeunes et des étudiants.

Les études de l’OVE sont les plus alarmistes, la dernière publiée en 2016 montrant :

                                                  illustration tirée du dossier de presse de l’OVE

      La prévalence des troubles.

Les études scientifiques synthétisées en annexe et les études des mutuelles permettent d’avoir une idée de la
prévalence des difficultés psychologiques présentées par les étudiants. Même si les méthodologies, les durées
d’observation et les échantillons des différentes études sont assez disparates, nous pouvons en déduire que :
      - 27 à 38 % des étudiants présentent un syndrome dépressif léger parfois appelé souffrance
          dépressive.7
      - 4 à 9 % des étudiants présentent un syndrome dépressif majeur.                                  8

                                                                                           9
      - 5 à 15 % des étudiants présentent un trouble anxieux.

7LS Rotenstein & coll. 2016 ; OVE 2016 ; LMDE / IFOP, 2011 ; E. Boujut & coll., 2009 ; Eisenberg & coll., 2007 ; Lafay N. &
coll., 2003
8   P. Verger & coll., 2010 ; E. Boujut & coll., 2009 ; Eisenberg & coll., 2007 ; Lafay N. & coll., 2003
9   N. Kanuri & coll. 2015 ; P. Verger & coll., 2010 ; Eisenberg & coll., 2007

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- 6,5 à 7,5 % des étudiants présentent un trouble des conduites alimentaires.                     10

      - 3 à 13 % des étudiants consomment régulièrement de l’alcool. 11
      - 3 à 17 % des étudiants consomment régulièrement du cannabis. 12
      - 4 à 15 % des étudiants ont ou ont eu récemment des idées suicidaires. 13
      - 5 % des étudiants, et 16,5 % de ceux qui présentent un syndrome dépressif majeur, ont effectué une
          tentative de suicide. 14
      -   Le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les 18-25 ans,15 et la première si l’on tient
             compte des accidents et des prises de toxiques.

Le suicide est une cause majeure de décès prématurés : plus de 11 000 décès par suicide ont été enregistrés
en France métropolitaine en 2011 et près de 200 000 personnes ont été accueillies aux urgences après une
tentative de suicide. Un Observatoire national du suicide a été créé en septembre 2013, son objectif est de
mieux connaître cette réalité afin de mieux la prévenir.

Actuellement, les statistiques sur le suicide ne permettent pas d’extraire des données spécifiques concernant
les étudiants. Dans le premier rapport de l’Observatoire national du suicide, on relève que chez les
jeunes de 8 à 24 ans, les troubles mentaux, et en particulier les troubles dépressifs et psychotiques,
sont 7,3 fois plus associés au suicide qu’aux autres décès dans cette tranche d’âge. Ce qui est
nettement supérieur à ce qui est mesuré pour les autres classes d’âge. Dans le cadre de la prévention du
suicide, il est donc essentiel, à coté des actions sur les autres facteurs de risque, de mettre en place une
prévention efficace des troubles mentaux, en particulier chez les adolescents et les jeunes adultes.

A part pour les étudiants en médecine, nous n’avons pas trouvé d’études spécifiques selon les filières
universitaires.

L’étude « La santé des étudiants et jeunes médecins » effectuée en 2016 par le Conseil National de l’Ordre des
Médecins, si elle est orientée sur la question du Burn Out, nous donne quand même des indications sur cette
population. Un quart des étudiants en médecine ayant répondu à cette enquête ont déclaré être en état de
santé moyen ou mauvais. Ce taux est particulièrement élevé chez les étudiants de 2ème cycle, puisqu’ils
représentent plus de 30% de cette catégorie. 14 % de l’ensemble ont déclaré avoir eu des idées
suicidaires.

10   J. Tong & coll. 2014 ; E. Boujut & coll., 2009
11   LMDE / IFOP, 2011 ; P. Verger & coll., 2010 ;
12   LMDE / IFOP, 2011 ; P. Verger & coll., 2010 ; E. Boujut & coll., 2009 ; LMDE / IFOP, 2005
13   LS Rotenstein & coll. 2016 ; CNOM, 2016 ; LMDE / IFOP, 2011 ; E. Boujut & coll., 2009 ; LMDE / IFOP, 2005
14   LMDE / IFOP, 2005 ; Lafay N. & coll., 2003
15   OMS, 2014

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                                                                                                                 # /#74
La consommation de psychotropes en auto-prescription semble problématique dans cette population, en
particulier chez ceux qui vont le plus mal :

                                         Etat de santé              Etat de santé                Etat de santé      Ensemble
                                     Mauvais ou Moyen             Mauvais ou Moyen              Bon ou Excellent
                                     et Idées suicidaires

            Anxiolytiques                            36,8 %                         20 %                    7,4 %              11 %

            Antidepresseurs                          20,7 %                         10 %                    2,2 %              4%

            Somnifères                               26,5 %                         19 %                     6%            9,2 %

              Taux d’étudiants qui déclarent consommer, en auto-prescription, parfois ou souvent des psychotropes.

Parmi ceux qui déclarent avoir un état de santé mauvais ou moyen et déclare avoir eu des idées suicidaires
(n=578 sur 7858) plus d’un tiers déclare consommer de l’alcool tous les jours ou plusieurs fois par semaine.

LS Rotenstein & coll. (2016) ont effectué une méta-analyse de 195 études portant sur 129 123 étudiants en
médecine dans 47 pays. Ils ont démontré que 27,2 % (de 9,3 % à 55,9 %) des étudiants présentaient une
dépression et que 11,1 % (de 7,4 % à 24,2 %) déclaraient des idées suicidaires.

Ces prévalences, chez les étudiants en médecine, sont tout à fait similaires à celles relevées chez l’ensemble
des étudiants.

Donc une part non négligeable des étudiants présentent des difficultés psychologiques qui, même
lorsqu’elles sont «légères», ont un coût important pour l’individu et la société. En effet, tous les troubles à cet
âge peuvent avoir des conséquences importantes sur la trajectoire de vie de l’étudiant et provoquer un échec
universitaire voire une désorganisation psychique plus importante.

      L’accès aux soins.

Certaines études se sont intéressées à l’accès aux soins. Seul un nombre restreint des étudiants en
souffrance accèdent à des soins psychologiques ou psychiatriques. Les études françaises relèvent un
taux de consultation maximum de 30 % 16 chez ceux qui présentent une difficulté psychologique, c’est dire que
70 % des étudiants en souffrance ne consultent pas.

De plus, fait majeur en terme de risque de chronicité, seuls 23,3 % des étudiants présentant des troubles
psychiatriques sévères ont bénéficié d’une consultation spécialisée 17.

P. Verger & coll. (2010) montrent que 30,5 % parmi ceux qui présentent un trouble psychiatrique consultent un
professionnel de la santé (16,7 % un généraliste et 17,8 % un psychologue ou un psychiatre), et encore plus
inquiétant, seulement 35 % de ceux présentant les troubles les plus sévères consultent (19,6 % un généraliste
et 23,3 % un psychologue ou un psychiatre).

16   P. Verger & coll., 2010 ; E. Boujut & coll., 2009 ; LMDE / IFOP, 2011
17   P. Verger & coll., 2010 ;

État des lieux sur l’accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.                                 13
                                                                                                                                      # /#74
L’étude de la LMDE (2011) montre d’une part que le taux de consultation n’est que de 16 % parmi ceux en
situation de « mal être », essentiellement auprès des généralistes, mais aussi que seulement 8 % des
étudiants connaissent les Bureaux d’Aide Psychologique Universitaires.

L’étude de LS Rotenstein & coll. (2016) déjà cité plus haut, montre que seulement 15,7 % des étudiants en
médecine présentant une dépression auraient bénéficié d’une prise en charge.

Une étude américaine, effectuée par Eisenberg & coll. (2007), montre des taux d’accès aux soins plus élevés :
de 16 à 63 % en fonction de la pathologie. Les étudiants présentant des troubles anxieux consultent en plus
grand nombre. Ces auteurs montrent que les freins à l’accès aux soins sont essentiellement liés aux
représentations des difficultés psychologiques et à l’absence de disponibilité des étudiants. Il n’y a pas de frein
financier car les soins psychiatriques de première intention sont gratuits et bien repérés dans l’Université où a
été effectuée cette étude.

Pour Eisenberg & coll., les représentations conscientes sous-tendant la résistance à aller consulter un
psychiatre ou un psychologue sont les suivantes :
   - « Le stress est normal à l’université » : 51 %,
    -    « Ne pense pas avoir besoin de soins » : 45 %,
    -    « Les symptômes disparaîtront tout seuls » : 37 %,
    -    « N’a pas le temps » : 32 %,
    -    « Ne pense pas que quelqu’un pourrait comprendre ses difficultés » : 20 %,
    -    « S’inquiète de ce que les autres vont penser de lui » : 20 %.

Dans l’enquête nationale Conditions de vie des étudiants en 2013 de l’Observatoire de la Vie Etudiante, les
renoncements aux soins (tous soins confondus) représentent 27,2 %, et ont comme raisons principales :
   - « J'ai préféré attendre que les choses aillent mieux d’elles-mêmes » : 54,9 %
    -    « Je n’en avais pas les moyens financiers » : 48,6 %
    -    « Je me suis soigné par moi-même » : 46,5 %
    -    « Mon emploi du temps ne me le permettait pas » : 35,4 %

Les freins aux consultations psychologiques ou psychiatriques sont multiples. La méconnaissance des troubles,
les représentations liées à la psychiatrie, le sentiment honteux de ne pas « y arriver » comme les autres, de ne
pas répondre à l’injonction de réussite portée par la société et aussi, en France, la méconnaissance des réseaux
de soins et les conditions financières ne permettent pas une prise en charge suffisamment adéquate.
Contrairement aux Etats Unis, les soins sont très difficiles d’accès en France, même pour les
étudiants en grande souffrance.

Donc, étant donné qu’environ un tiers des étudiants présentent au moins un trouble modéré, et tenant compte
du fait qu’il s’agit d’une extrapolation, sur l’ensemble des inscrits (645 000) dans l’enseignement supérieur en
Île-de-France, il y aurait 215 000 (33 %) étudiants en souffrance avec un risque d’aggravation, et 150 500
(70 %) d’entre eux n’accèderait pas à des soins dans ce moment crucial de leur construction identitaire
personnelle et sociale.

État des lieux sur l’accès des étudiants aux soins psychiatriques et psychologiques en Île-de-France.         14
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Les études évaluant les programmes de prévention à destination
des étudiants.
Nous n’avons pas retrouvé d’études françaises s’intéressant aux dispositifs de prévention à destination des
étudiants. Probablement car ceux-ci, contrairement à ce qui existe dans les pays anglo-saxons, sont encore
embryonnaires et disparates. De plus la recherche scientifique sur la population des étudiants n’est pas encore
organisée en France.

Aux Etats-Unis, en Angleterre et en Australie, les universités ont développé depuis de nombreuses années des
centres de soins intégrés aux campus, avec des actions de prévention.

Il est très difficile d’évaluer l’intégralité d’un dispositif de prévention. Deux articles              18   récapitulent les études
anglo-saxonnes qui ont évalué un programme de prévention des troubles psychiques auprès des étudiants
durant leurs premières années d’études (« higher education students »). Toutes les études rapportées
concernent des programmes de prévention cognitivo-comportementaux, d’éducation à la santé ou de
relaxation. La plupart des programmes sont effectués en groupe, les évaluations s’effectuant sur de petits
échantillons.

N. Reavley & coll. (2010) ne trouvent pas de preuve probante d’une efficacité des différents programmes de
prévention. En revanche, C.S. Conley & coll. (2013), intégrant aussi des études faites sur les lycéens, les
classent par ordre décroissant d’efficacité : interventions axées sur les habiletés (si la pratique est supervisée),
puis interventions axées sur les compétences et enfin programmes d’éducation à la santé mentale. En d’autres
termes, les interventions prévoyant des rencontres avec un professionnel sont plus efficaces.

N. Reavley & coll. (2013) ont mené une étude dont l’objectif était d'évaluer si une intervention d’éducation à la
santé, améliorant les connaissances en santé mentale des étudiants, pouvait faciliter la demande d'aide
psychologique et réduire la détresse psychologique ainsi que l'abus d'alcool chez les étudiants d'une université
du campus de Melbourne, en Australie. Les interventions comprenaient des emails, des affiches, des
événements sur le campus, des fiches techniques ou livrets et des cours de formation en premiers soins de
santé mentale. Il n’ont trouvé aucun effet sur la détresse psychologique et la consommation d'alcool. Ils
concluent que, même si l’éducation et la sensibilisation peuvent jouer un rôle dans l'amélioration des
connaissances des étudiants sur la santé mentale, ce n’est pas suffisant pour amener les étudiants à consulter,
ni à améliorer leur état psychologique. Ils proposent des interventions plus personnalisées et intensives.

D. Thompson & coll. (2012) ont évalué sur un petit nombre d’externe en médecine de l’Université d’Hawaï (USA)
l’impact sur les symptômes dépressifs et les idées suicidaires d’un programme consistant en une amélioration
des propositions de consultation d’aide individuelle et de thérapie, des cours magistraux sur les troubles
psychologiques et leurs facteurs de risque, une campagne de sensibilisation sur la prévalence des troubles
dépressifs et sur les idées suicidaires. Sur leur échantillon de 44 étudiants, 26 (59,1 %) présentaient des
symptômes dépressifs, 13 (30,2 %) rapportaient avoir des idées suicidaires la première année. Après une année
d’application de ce programme, l’évaluation faite sur 58 étudiants montrait que 14 (24,1 %) rapportaient des
symptômes dépressifs et un seul (3 %) rapportait avoir des idées suicidaires. Les différences sont significatives.

18   N. Reavley & coll., 2010 ; C.S. Conley & coll., 2013.

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Seule cette dernière étude a inclus le renforcement d’une offre de soins et la facilitation de l’accès
aux soins dans son programme, associées aux autres actions spécifiques pour des étudiants en médecine,
même si l’échantillon est de petite taille, elle montre un effet positif de ces actions.

LT Wasson & coll. (2016) ont effectué une méta-analyse des études ayant évalué les effets sur le bien-être des
étudiants en médecine, des adaptations du cadre pédagogique et des programmes de prise en charge de leurs
difficultés psychologiques. Ils concluent ceci : « Il est essentiel d'aborder les problèmes de santé mentale avec
un programme formel qui inclut les services de prise en charge, et un programme pluridisciplinaire visant à
améliorer la sensibilisation, à réduire la stigmatisation et à améliorer l'accès aux professionnels de la santé
mentale. Cela semble être une approche efficace et est associé à des taux de dépression et d'idées suicidaires
plus faible. » Quant aux soins proprement dits, ils relèvent que les étudiants en médecine ont déclaré avoir
préféré l'aide d'un spécialiste de la santé mentale, de leur famille ou des amis plutôt que venant du personnel
de la faculté de médecine. Ils ont déclaré préférer accéder aux services de santé mentale dans un autre
lieu que le bureau des affaires étudiantes.

LT Wasson & coll. (2016) notent aussi que la mise en place de programmes de réduction du stress ont montré
des effets positifs dans plusieurs études, même si certaines n’ont pas montré une persistance de ces effets
positifs à moyen terme. Ils relèvent aussi que quelques études ont montré que la mise en place de tutorats a
permis une amélioration du bien-être des étudiants en médecine.

Ces études semblent montrer que les interventions de prévention sans rencontre duelle ou en petit
groupe avec un professionnel n’ont que peu d’effet sur l’accès aux soins et sur la santé psychique
des étudiants.

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Etat des lieux de l’offre de soins psychologiques et psychiatriques
pour les étudiants en Île-de-France.
L’offre de soins psychologiques et psychiatriques est quasi-exclusivement orientée vers la prise en
charge des pathologies constituées. Les préventions primaire et secondaire sont peu développées
alors que l’ensemble des praticiens en santé mentale savent l’importance de celles-ci pour éviter
aggravation des troubles, toxicomanie, suicide et désinsertion socio-professionnelle.

Les points d’entrée dans le parcours de soins sont peu repérés par les étudiants ou les enseignants et les
personnels administratifs en contact avec eux.

Avec le temps dont nous disposions pour effectuer cette mission, nous avons été contraint de limiter nos
rencontres. Nous avons fait le choix de ne rencontrer que les équipes des quatre plus importants SIUMPS et
SUMPS. Étant depuis de nombreuses années membre de l’ASGE et du réseau RESPETT, nous avions une
connaissance très précise des dispositifs en grandes écoles, et des BAPU, nous avons décidé de ne rencontrer
individuellement que la directrice du BAPU Luxembourg, les autres professionnels de ces structures ont été vus
au cours des réunions des réseaux. Nous avions sélectionné aussi trois directions d’universités afin de recueillir
leur point de vue, mais une nous a renvoyé sur le SUMPS et les deux autres ne nous ont pas répondu, et nous
n’avons pas pu prendre le temps d’en contacter d’autres. Nous n’avons rencontré qu’une mutuelle étudiante
car elle proposait un dispositif innovant pour la prévention des difficultés psychologiques. Nous nous sommes
aussi intéressé aux autres dispositifs originaux.

Les membres du comité de pilotage ont, en plus de leur soutien, apporté de nombreuses suggestions et
préconisations qui ont été intégrées à ce rapport, nous les en remercions chaleureusement.

Nous remercions aussi les personnes qui nous ont aidé dans la rédaction du rapport, citées en annexe.

Vous trouverez en annexe la liste des personnes rencontrées (p. 55) ainsi que la liste des membres du comité
de pilotage (p. 54).

    Les Bureaux d’Aide Psychologique Universitaires.

Ils sont au nombre de six en région parisienne :

        - Le BAPU Luxembourg situé dans le 5ème arrondissement de Paris, il est géré par la Croix Rouge
            Française,
        - Le BAPU Pascal situé dans le 5ème arrondissement de Paris, avec une antenne à la Cité Internationale
            Universitaire de Paris (14ème), il est géré par la Fondation Santé des Étudiants de France,
        -   Le BAPU Claude Bernard situé dans le 5ème arrondissement de Paris, a eu une antenne dans le
            20ème qui n’est plus active depuis 2012, a une antenne dans le 16ème, il est adossé à un CMPP, et
            géré par l’Association du Centre Claude Bernard de Paris,
        - Le BAPU de la Grange Batelière situé dans le 9ème arrondissement de Paris, il est adossé à un CMPP,
            et géré par l’Association de Réadaptation Psychopédagogique et Scolaire,
        - Les BAPU du Val-de-Marne situés à Cachan, Créteil et Saint-Maur, ils sont adossés à des CMPP, et
            gérés par l’Association de Prévention Soins et Insertion,

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- Le BAPU Claparède, Centre de consultation et de traitement Henri Sauguet, situé à Neuilly-sur-Seine, il
            est adossé à un CMPP, une unité petite enfance, et géré par l’institut Edouard Claparède.

D’après les données de leurs rapports d’activité, leur file active cumulé pour l’année 2015 est d’environ
1400 étudiants et le nombre d’acte de 25 000 environ. La majorité des étudiants s’adressant à eux viennent
spontanément (jusqu’à 80% pour certains BAPU).

Ils sont tous saturés, et ont un délai d’attente pour une première consultation compris entre 1 et 3 mois
tout au long de l’année. Même si certains proposent des prises en charge psychiatriques et la mise en place
d’un consultant, ils ne proposent le plus souvent que des psychothérapies.

L’expérience de la psychothérapie psychanalytique en institution des professionnels des BAPU est riche et
pourrait être plus souvent mise à profit pour étayer nos connaissances à propos de la psychopathologie des
jeunes adultes.

Même si le nombre d’étudiants qui y sont pris en charge est relativement faible, les BAPU sont souvent décrits
par les autres acteurs comme un maillon essentiel de la prise en charge des étudiants, en particulier car
les soins y sont proposés sans avance de frais.

Cependant, les critiques qui leur sont adressées sont nombreuses :
    - « Il est difficile de leur adresser des patients, les délais sont trop long »
        - « Les contacts entre professionnels sont difficiles, ils ne se placent qu’en tant que psychothérapeutes et
            ne souhaitent pas échanger avec les autres professionnels. »
        - « Ils n’ont que peu de liens avec les universités. »
        - « Ils ne proposent que des psychanalyses, ce n’est pas adapté pour certains étudiants. »

Nous notons un paradoxe : seulement 8 % des étudiants connaissent l’existence des BAPU 19, mais tous
sont saturés et l’essentiel de leurs patients viennent d’eux mêmes. Nous en déduisons que la demande de
soins psychothérapeutiques est très importante, et que seuls les étudiants qui ont la capacité de trouver
les informations et qui n’ont pas trop de représentations négatives de la psychologie et de la pathologie mentale
arrivent à consulter.

La clinique Dupré a créé en 2012 un centre de psychanalyse (centre Henri Danon-Boileau) qui sans avoir le
statut de BAPU permet à un public adolescent, et notamment étudiants, non hospitalisés à Dupré, d’être suivi
en psychothérapie et psychanalyse.

19   LMDE / IFOP, 2011

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                                                                                                               # /#74
Les Services Inter-Universitaires et Universitaires de Médecine Préventive
et de Promotion de la Santé

L’Île-de-France compte deux Services Inter-Universitaires de Médecine Préventive et de Promotion de la Santé
(SIUMPPS), et neuf Services Universitaires de Médecine Préventive et de Promotion de la Santé (SUMPPS).

Nous avons rencontré les équipes ou les représentants des quatre premiers cités ci dessous :

Le SIUMPPS Sorbonne Université reçoit les étudiants des universités suivantes :
        - Paris II, Université Panthéon Assas,
        - Paris IV, Université Paris Sorbonne,
        - Paris VI, Université Pierre et Marie Curie - Sciences et Médecine.

Cela représente environ 75 000 étudiants, il dispose de 3 ETP de psychologues, répartis sur 9 personnes, et de
0,1 ETP de psychiatre.

Ce n’est pas un centre de santé.

Le SIUMPS Paris Descartes reçoit les étudiants des universités et écoles suivantes :
        -   Paris I, Université Panthéon-Sorbonne,
        -   Paris III, Université Sorbonne Nouvelle,
        -   Paris V, Université Paris Descartes,
        -   Paris VII, Université Paris Diderot,
        -   Paris IX, Université Paris Dauphine,
        -   SciencesPo,
        -   Ecole des Beaux Arts,
        -   EHESS,
        -   INALCO.

Cela représente environ 120 000 étudiants, il dispose de 4,1 ETP de psychologue, répartis sur 8 personnes, et
de 0,4 ETP de psychiatre.

C’est un centre de santé.

Le SUMPPS de l’université Paris sud reçoit les étudiants de 9 IUT et UFR sur 3 départements (91,92 et 94).
Cela représente environ 32 000 étudiants, il dispose de 0,7 ETP de psychologue réparti sur 2 personnes, 0,2
ETP sur le site d’Orsay et 0,1 ETP sur chacun des 5 autres sites.

Ce n’est pas centre de santé.

Le SUMPPS de l’Université Paris-Nanterre propose ses services aux 33 000 étudiants de l’université. Il
dispose de 0,6 ETP de psychologue, pour une personne, et va recruter un psychiatre pour 0,1 ETP.

C’est un centre de santé depuis 2000, ce sont les médecins généralistes qui sont amenés à prendre en charge
les patients dans ce cadre.

Les autres services sont :

        - le SUMPPS de l’Université Paris VIII pour 22 000 étudiants.

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-   le SUMPPS de l’Université Paris-Est Créteil Val de Marne pour 25 000 étudiants.
        -   le SUMPPS de l’Université Paris XIII pour 21 000 étudiants.
        -   le SUMPPS de l’Université Paris-Est Marne-la-Vallée (UPEM) pour 11 000 étudiants.
        -   le SUMPPS de l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines pour 16 000 étudiants.
        -   le SUMPPS de l’Université d’Evry-Val-d’Essonne pour 10 000 étudiants.
        -   le SUMPPS de l’Université de Cergy-Pontoise pour 15 000 étudiants.

Les SIUMPPS et SUMPPS sont peu connus des étudiants, seul un tiers des étudiants en licence ont
effectué leur visite obligatoire et seulement 2 % des étudiants malades consultent les centres de
santé des SUMPPS 20. La place des troubles psychologiques dans leurs actions de prévention et dans leurs
offres de soins sont limitées et très disparates.

Les effectifs de psychologues et de psychiatres semblent corrects dans les deux SIUMPPS, mais très bas dans
les SUMPPS. Cependant, les positionnements sont très variés, allant de la proposition d’entretiens de
« dépistage », de bilans psychologiques complets, à de véritables thérapies analytiques. Tous font part d’un
accroissement important des demandes ces dernières années.

Hormis pour un service, ils ne semblent pas avoir de liens institutionnels avec les enseignants, les
directions d’études et l’administration de l’université concernant les difficultés psychologiques des étudiants.

Ils décrivent tous des difficultés d’articulation avec les structures d’aval, que ce soit avec les BAPU du fait
de leur saturation, de leur accueil ou les services de psychiatrie. Ils regrettent l’absence de structures
psychiatriques dédiées aux étudiants. Les bonnes expériences de collaboration avec un secteur, avec une
structure publique ou privée sont toujours basées sur des initiatives et rencontres individuelles de deux
professionnels, et ont beaucoup de mal à s’institutionnaliser.

Ces services nous sont apparu isolés des réseaux de soins psychologiques et psychiatriques existants,
surtout lorsqu’ils ne sont pas spécifiques pour les étudiants.

Nous avons eu des informations contradictoires concernant la constitution en centre de santé. Certains
défendent cette idée, avec comme argument principal la gratuité des soins pour l’étudiant. Mais d’autres en
pensant aux spécificités de fonctionnement d’une consultation psychiatrique, à la nécessité de recevoir tout
patient en faisant la demande, étudiants ou non, à l’absence de moyens supplémentaires y étaient opposés
pour les soins psychiatriques.

Les actions de prévention sont essentiellement basées sur les consommations de tabac, alcool et drogues.
Certains commencent à mettre en place des programmes d’information et d’éducation à la santé sur les
modèles de la prévention somatique qui ne nous semble pas opérant pour les troubles psychologiques 21 . Des
« Étudiants Relais Santé » sont aussi mis en place.

Des actions de prévention du suicide sont organisées selon des modèles qui restent à questionner,
comme le fait de « convoquer » un étudiant signalé par un enseignant sans qu’il ait été informé de ce
signalement. Ou encore par la formation d’étudiants chargés de repérer ceux qui pourraient passer à l’acte sur

20Rapport d’information fait au nom de la commission des affaires sociales du Sénat par le groupe de travail sur la sécurité
sociale et la santé des étudiants. 12 décembre 2012
21   N. Reavley & coll., 2010 ; N. Reavley & coll., 2013 ; C.S. Conley & coll., 2013.

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