Les stratégies de communication des ONG environnementales : le cas de Greenpeace et de WWF
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Université lumière Lyon 2 Institut d'Études Politiques de Lyon Les stratégies de communication des ONG environnementales : le cas de Greenpeace et de WWF Lebourgeois Mathilde Mémoire de Séminaire Séminaire Economie du Développement Durable Sous la direction de : Abdelmalki Lahsen Membres du jury : - Mr Lahsen Abdelmalki - Mme Valérie Colomb
Table des matières Remerciements . . 5 Introduction . . 6 Partie I : Importance et spécificité de la communication dans les ONG . . 9 Chapitre A : Le développement durable : un nouveau défi pour la société civile . . 9 Chapitre B : Différents moyens de communication pour les ONG . . 11 1. Importance de la participation et de la pédagogie . . 12 2. Des stratégies tous azimuts . . 13 Chapitre C : Un « répertoire d'actions de 3e génération » : l'importance des médias . . 14 1. Le répertoire d'actions . . 14 2. Les médias et Internet . . 15 Partie II : Deux modèles de communication : Greenpeace et WWF . . 18 Chapitre A : Greenpeace : une stratégie de contestation . . 18 1. Présentation de l'ONG . . 18 2. Les actions médiatiques et les autres méthodes . . 21 3. Les limites et les critiques de la communication de Greenpeace . . 25 Chapitre B : W WF : une stratégie de dialogue . . 26 1. Présentation et fonctionnement de l'ONG . . 26 2. La communication de WWF : Internet, la marque, les évenements, les partenariats . . 27 Chapitre C : Éléments de comparaison . . 29 1. Des identités et des préoccupations différentes . . 29 2. Des moyens différents . . 30 3. Des exemples concrets . . 33 Partie III : Environnement et communication : les nouveaux enjeux et problèmes . . 39 Chapitre A : Portée et limites de la communication des ONG . . 39 1. Rôles et légitimité importants mais remis en cause . . 39 2. Une insuffisance de résultats concrets . . 40 Chapitre B : Évolution de la communication : vers des techniques empruntées au marketing d'entreprises . . 42 Chapitre C : Vers une mesure des performances de la communication environnementale .. 43 1. Utilité de l'évaluation . . 44 2. Des méthodes quantitatives . . 45 3. L'exemple de l'évaluation de Greenpeace . . 45 Conclusion . . 48 Bibliographie . . 50 Sur le développement durable . . 50 Sur la communication . . 50 Livres . . 50 Revues . . 50 Mémoire . . 50
Site Internet . . 51 Sur les ONG notamment environnementales . . 51 Livres . . 51 Revues . . 51 Thèse . . 52 Site Internet . . 52 Sur Greenpeace . . 52 Livres . . 52 Revues . . 53 Reportages vidéos . . 53 Mémoire . . 53 Publications de Greenpeace . . 53 Site Internet . . 53 Entretiens . . 54 Annexes . . 55 Première annexe : Sites Internet de Greenpeace et WWF . . 55 Deuxième annexe : Magazines de Greenpeace et WWF . . 55 Troisième annexe : Rapport financier et d'activité de Greenpeace . . 55 Quatrième annexe : Documents de Greenpeace sur le thon rouge . . 55 Cinquième annexe : Linkscape : présence de Greenpeace et WWF sur Internet . . 55 Sixième annexe : Analyse de la présence médiatique de WWF . . 55 Mots Clés . . 55 Résumé . . 56
Remerciements Remerciements Je remercie M. Abdelmalki pour sa présence, ses conseils tout au long de mon travail et pour la bonne ambiance et l'entraide qu'il a instaurées dans le séminaire Économie du Développement Durable. Je tiens à remercier Adélaïde Colin et l'équipe de communication de Greenpeace pour leur gentillesse, leur confiance, et leur aide lors de mon stage. J'adresse mes remerciements à Bruno Rebelle, à Jacques Olivier Barthes, ainsi qu'à Camille Lajus pour les entretiens qu'ils m'ont accordés, et qui m'ont beaucoup servi. Merci à Valérie Colomb pour ses remarques, et pour sa présence dans le jury. Et enfin un grand merci à Cécile, et aux autres relecteurs. Lebourgeois Mathilde - 2010 5
Les stratégies de communication des ONG environnementales : le cas de Greenpeace et de WWF Introduction L'environnement est de nos jours un sujet omniprésent. Tout le monde : entreprises, hommes politiques, organisations internationales communiquent énormément sur le développement durable. En effet il y a eu une réelle prise de conscience environnementale, relayée par un écho médiatique puissant. Déforestation, réchauffement climatique, montée des eaux, fonte des glaciers, pollution... ce sont tous des sujets qui semblent préoccuper l'opinion publique. L'environnement a ainsi tenu une place considérable lors des débats pour l'élection présidentielle de 2007. Il suffit également de voir le nombre de films, de livres qui sortent sur le sujet avec un écho non négligeable. Home ou La Terre vue du ciel de Yann Arthus Bertrand, Le Pacte Écologique de Nicolas Hulot, Une vérité qui dérange de Al Gore ont tous plus ou moins récemment nourri cette sensibilisation. Les Organisations Non Gouvernementales (ONG) ont eu un rôle à jouer dans cette montée en puissance. En parallèle la multiplication des catastrophes industrielles et naturelles a également interpellé la société civile, il suffit de penser par exemple au naufrage de l'Amoco-Cadiz en 1978, à l'explosion de Tchernobyl en 1986... Mais pour communiquer sur le développement durable, il faut d'abord être capable de le définir. A nne Versailles (2005 p1),chercheuse à Etopia (Centre d'animation et de recherches en écologie politique), nous explique que « le développement durable apparaît comme un concept flou dans lequel on peut tout mettre, son contraire et n’importe quoi. Et c’est vrai qu’en fonction du regard que chacun porte sur le monde, de son origine sociogéographique, de son milieu socioprofessionnel, de ses référents philosophiques, de ses intérêts individuels ou corporatistes, chacun y place des dimensions et des priorités différentes ». Il est en effet utilisé à outrance par différents acteurs mais en réalité il reflète un monde qui n'existe pas encore. On peut également citer la définition issue du Rapport Brundtland, intitulé Notre avenir à tous, de 1987. C'est « un développement qui répond aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le concept de « besoins », et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis à qui il convient d’accorder la plus grande priorité, et l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et à venir. » C'est lors du Sommet de la Terre de Rio en 1992 qu'une définition consensuelle va s'institutionnaliser. Les ONG jouent un rôle prépondérant dans la mise sur l'agenda médiatique de cette problématique, notamment par leur présence aux conférences internationales, par leur pouvoir de dénonciation, de sensibilisation, de pression. Les Organisations Non Gouvernementales sont aussi un concept flou. Le terme est apparu en 1945 dans la charte des Nations Unies. Cependant on prend en compte souvent plusieurs critères : les ONG sont censées être indépendantes, non lucratives, internationales, d'intérêt général... Elles agissent là où les États sont absents ou interviennent de façon inadaptée. Elles constituent un contre pouvoir, censé incarner la 6 Lebourgeois Mathilde - 2010
Introduction société civile internationale, visible surtout depuis 1999 et la Conférence de l'Organisation Mondiale du Commerce à Seattle. Elles sont très diverses selon leur taille, leur statut et peuvent donc avoir des registres d'actions différents selon leur histoire. Les premières ONG environnementales apparaissent à la fin du 19ème siècle, début du 20ème siècle. On les appelle les conservationnistes, elles sont issues d'une tradition anglo-saxonne de protection de la nature, et appuient des politiques visant à conserver la nature en la préservant de toutes activités humaines. C'est le cas de World Wildlife Fund (WWF) ou de l'UICN (Union mondiale pour la nature). Une deuxième vague de mobilisation environnementale a lieu dans les années 60, 70, avec les ONG environnementalistes, qui ressemblent aux nouveaux mouvements sociaux avec un mode d'action plus contestataire. On peut citer Greenpeace ou les Amis de la Terre. Avec la mondialisation et la multiplication des ONG, leur visibilité et leur pouvoir d'influence augmentent. En effet, au début écartées des lieux de pouvoirs, elles deviennent un partenaire essentiel. De plus, elles sont un des agents dans lequel le citoyen a le plus confiance. Cette montée en puissance des ONG les oblige à évoluer, s'adapter et se professionnaliser. De plus, dans une société mondialisée où les Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication (NTIC) priment, la communication devient pour elles un enjeu stratégique important. L'image est essentielle. Il est primordial pour elles de se différencier de la concurrence des autres ONG. Elles sont aussi dans l'obligation de diversifier leurs sources de financement et de chercher un maximum de donateurs. La communication est ainsi un outil indispensable pour promouvoir le développement durable et pour que l'ONG remplisse correctement ses missions. Elle répond à deux objectifs principaux : favoriser une prise de conscience et une action en faveur de l'environnement, accroitre la notoriété de l'ONG. La communication et les Organisations Non Gouvernementales sont deux domaines dans lesquels j'aimerais travailler. Le développement durable est un sujet qui m'intéresse. Dès le début de mes recherches, j'ai donc voulu étudier la communication à propos du développement durable à partir d'un acteur : les entreprises, les villes ou les ONG. Les ONG environnementales en tant que partie prenante de la société civile sont de nos jours prises en compte comme de véritables acteurs du développement durable. Leur communication est essentielle, et différente de celle des autres acteurs institutionnels en raison de la spécificité de l'objet environnemental, et de l'acteur particulier l'ONG. De plus, c'est une communication plurielle qui varie en fonction des ONG. Elle pose également de nombreuses questions car malgré une prise de conscience certaine, il n'y a pas de réel engagement concret. Est-ce parce que la communication est inefficace, inadaptée à la spécificité du sujet environnemental, est-ce parce que les ONG manquent de légitimité? Nous avons donc travaillé sur les stratégies de communication des ONG environnementales. Parmi celles-ci on distingue souvent celles de dialogue et celles plus revendicatrices. Greenpeace parait dès le départ l'ONG la plus médiatique et la plus active du point de vue de la communication. Beaucoup de livres existent à ce sujet, car c'est aussi elle qui est la plus controversée. L'histoire de l'organisation est importante, dès le début elle commence par un mythe fondateur où les médias ont un rôle fondamental. Il a semblé utile de la comparer avec l'autre type d'ONG environnementales, symbolisé par WWF, la première ONG mondiale. Dès lors plusieurs questions se sont posées : Comment se caractérise la stratégie de communication d'une ONG environnementale? Quelles différences entres les stratégies des ONG et celles des autres acteurs? Est-elle efficace? Il est nécessaire d'observer d'abord l'importance et la spécificité de la communication des ONG avec les différents moyens Lebourgeois Mathilde - 2010 7
Les stratégies de communication des ONG environnementales : le cas de Greenpeace et de WWF d'actions possibles, leurs évolutions, l'importance notamment des médias. Puis nous pourrons voir sa diversité en l'illustrant par les différences entre deux ONG : Greenpeace et WWF. Et enfin nous tenterons de retirer les enjeux de la communication notamment la question de la légitimité et de l'évaluation de l'efficacité. Les lectures de spécialistes de l'environnement, de la communication, d'anciens directeurs des organisations, de journalistes critiques ont été fondamentales dans ce travail. Il était aussi important d'analyser le site Internet, les documents de communication et d'avoir des entretiens avec des directeurs de communication des ONG. 8 Lebourgeois Mathilde - 2010
Partie I : Importance et spécificité de la communication dans les ONG Partie I : Importance et spécificité de la communication dans les ONG Associer communication et ONG peut sembler contradictoire à première vue, si on rapproche la communication de la publicité, du marketing des entreprises, de l'objectif de vendre sur le marché. Il y a dans le monde associatif en général, une suspicion envers la communication, qui peut être synonyme de manipulation. Les ONG représentent l'intérêt général, la défense de grandes causes qui sont donc dans l'espace public non marchand. Elles s'adressent aux citoyens et non aux consommateurs. Cependant dans une société où la communication et la médiatisation sont omniprésentes, les ONG ont dû s'adapter, même si ce n'était pas au départ leur fonction première. Elle est devenue essentielle, en raison aussi de la montée de la concurrence et de la nécessité de trouver des ressources financières. En effet, elle constitue un moyen pour l'association de remplir ses missions et ses objectifs. Nous verrons donc comment la montée du développement durable et de l'environnement dans la société civile explique le renforcement de la communication des ONG. Celle-ci reste cependant spécifique par rapport à la communication d'autres acteurs. La participation et la pédagogie sont particulièrement présentes, par exemple. Nous verrons également que les ONG ont un grand choix de moyens pour leur stratégie de communication, parmi lesquels les médias et Internet ont de plus en plus une part importante. Chapitre A : Le développement durable : un nouveau défi pour la société civile Depuis le sommet de la terre de Rio de 1992 et la montée du développement durable, toute la société doit prendre en compte cette nouvelle problématique, autour des trois piliers : une économie viable, une société équitable, un environnement vivable. La protection de l'environnement, étant intégrée dans cette question globale de développement durable, bénéficie d'une mobilisation plus grande. En effet, l'environnement devient un sujet omniprésent à travers les débats politiques, les films, les livres, les positionnements idéologiques de personnalités célèbres, les sommets internationaux, les formations universitaires... Tous les acteurs ont une part de responsabilité. On oppose souvent l'État, les entreprises et la société civile. Celle-ci est un ensemble de groupes ou d'organisations qui s'organisent en dehors du cadre étatique et commercial. Elle regroupe les citoyens, les organisations syndicales, les ONG, la communauté scientifique... Elle a vu, avec notamment les ONG, son poids se renforcer. Selon Chartier et Ollitrault (2006 p 102) « il y aurait 10 à 40 000 associations intéressées plus ou moins directement aux problèmes d'environnement, et environ 3% de Français adhérant à une association d'environnement ». Elles se sont Lebourgeois Mathilde - 2010 9
Les stratégies de communication des ONG environnementales : le cas de Greenpeace et de WWF présentées comme les acteurs privilégiés du développement durable. Elles ont rempli les espaces vides laissés par les corps intermédiaires traditionnels. Mais tous se sont saisis de la thématique. Selon Chartier et Ollitrault (2006 p 106) le développement durable est devenu «à la fois un référentiel de politiques publiques, un justificatif d'action collective, et une entrée possible pour construire une critique sociale mondialisée ». Les entreprises sous la pression, se doivent de conjuguer les performances économiques, environnementales et sociales. Les politiques doivent agir à toutes les échelles : internationale, nationale, locale. Les collectivités territoriales ont elles aussi des capacités d'agir à prendre en compte, c'est elles qui sont au plus proche des citoyens. On peut citer l'exemple de l'Agenda 21, c'est un guide de mise en œuvre du développement durable établi lors du Sommet de la Terre de Rio en 1992. Chaque collectivité l'adapte pour appliquer des recommandations dans divers domaines. Mais en réalité la coopération est nécessaire face aux défis que posent l'enjeu environnemental. Changer de mode de production, changer de mode de vie, changer de gouvernance mondiale, c'est changer nos habitudes, nos mentalités. Et cela dans tous les domaines, dans toutes les actions quotidiennes, dans le logement, les transports, l'alimentation... Ces problématiques ont une dimension planétaire. Les progrès dépendent de la capacité de nos sociétés à mobiliser toutes les parties prenantes qui sont donc interdépendantes les unes aux autres. L'échange d'expériences, la diffusion de bonnes pratiques sont utiles. Les ONG sont ainsi entrées dans le champ politique en participant à des conférences internationales et nationales. Elles sont des interlocuteurs réguliers des organisations internationales. Traditionnellement leurs relations avec le pouvoir institutionnel étaient plutôt tendues. Elles dénonçaient l'incapacité des gouvernements à agir, mais en réalité elles ont compris que le changement se faisait avec eux, en les incitant à créer de nouvelles régulations, et en vérifiant leur respect. Jusque là les politiques environnementales ont plutôt échoué, elles étaient complexes donc mal comprises, elles n'étaient pas vraiment appliquées faute de sanctions et de contrôle... Les gouvernements ont eux aussi intérêt à intégrer les ONG dans les négociations pour asseoir la légitimité des décisions prises, et éviter la contestation. Les ONG doivent apporter leur capacité d'expertise, en plus de leur seul pouvoir de lobbying et de pression. Chartier et Ollitrault (2006 p 108) expliquent qu' « elles deviennent des partenaires indispensables quant à la diffusion des programmes qu'elles ont d'abord appelés de leurs vœux ». L'exemple du Grenelle de l'environnement peut être cité. En 2007, un débat a été organisé avec des groupes de travail sur des thématiques environnementales différentes (la biodiversité, le réchauffement climatique..), composés des différents acteurs du développement durable (l'Etat, les collectivités locales, les ONG, les employeurs, et les salariés). Cela était au départ une très bonne initiative mais au final l'institutionnel a repris la main et les associations ont perdu du terrain après le Grenelle, lors de sa mise en application qui a échouée. Dans les ONG figuraient WWF, Greenpeace, la fondation Nicolas Hulot... Cette dernière s'est retirée du Grenelle en mars quand la Taxe Carbone a été reportée. Tous dénoncent la nouvelle loi, trop amendée, qui n'est plus qu'un ensemble de mesurettes, vidé de toute substance. Les ONG ont aussi multiplié les contacts avec les entreprises, qui au départ sont leurs adversaires naturels. Au delà de leur action de dénonciation des pratiques abusives des entreprises, les ONG ont compris qu'elles pouvaient les aider et les accompagner dans leur démarche de changement. Cependant les relations restent très différentes selon les ONG. WWF a ainsi une politique très poussée de partenariat avec les entreprises. Tandis que Greenpace y est opposée. Dans tous les cas les contacts avec elles restent primordiaux. En parallèle, sous la pression sociale, les entreprises ont elles aussi compris qu'elles devaient agir pour lutter contre leur impact négatif. Elles doivent prendre en 10 Lebourgeois Mathilde - 2010
Partie I : Importance et spécificité de la communication dans les ONG compte des préoccupations sociales et environnementales, tandis que jusque là seul l'objectif de rentabilité et de profit financier était prioritaire. C'est d'ailleurs inscrit dans la loi notamment des Nouvelles Régulations Économiques, où les entreprises doivent rendre des comptes, doivent être transparentes sur les effets de leurs activités sur l'environnement. La Responsabilité Sociale des Entreprises est devenue une thématique très à la mode C'est ainsi que des postes de responsable environnement ont été créés. Les problèmes environnementaux sont un défi planétaire qui nécéssite une régulation mondiale. Ils peuvent être complexes à comprendre car constitués d'éléments scientifiques. Les citoyens peuvent se sentir impuissants face à ce défi. Cependant ces derniers doivent comprendre que cela ne doit pas les empêcher d'agir eux-mêmes à leur propre niveau, même si cela peut leur paraître inefficace. Les ONG ont là un rôle primordial d'information et de sensibilisation pour montrer que des changements dans les petits gestes de tous les jours peuvent, eux aussi, avoir une répercussion sur le défi planétaire. Les ONG doivent donc lutter contre ce sentiment de résignation et le phénomène Not In My BackYard (pas dans mon jardin). Le NIMBY consiste à ne pas tolérer de contraintes dans son environnement proche. Les citoyens sont d'accord sur le principe avec les ONG environnementales, mais ils ne veulent pas se voir imposer les efforts à subir. Cela peut être expliqué par la montée de l'individualisme. Le terme est apparu à la fin des années 60 aux Etats Unis pour désigner les oppositions des populations riveraines à l'implantation de nouvelles installations. La participation de la société civile est essentielle car c'est elle qui peut permettre de faire pression sur les décideurs politiques et sur les entreprises. Elle possède un pouvoir de sanction par le vote ou par l'action d'acheter. Actuellement l'opinion publique demande de plus en plus une transparence et une diffusion de l'information de la part de tous les acteurs, ainsi qu'une éthique et un dialogue plus importants. Les Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication doivent être mobilisées pour faciliter l'accès et la participation. Les ONG ont un rôle pour réaffirmer l'importance du défi environnemental face à ceux qui semblent le minimiser. On peut penser par exemple, aux climato-sceptiques remettant en cause les travaux du GIEC (Groupe d'Experts Intergouvernementaux sur l'Evolution du Climat) et la réalité du réchauffement climatique. Le monde de la recherche a aussi un rôle essentiel, comme nous l'expliquent Arnaud et Berger (2005 p 134) "il produit les connaissances qui permettent de fournir les bons diagnostic, de donner les alertes", ainsi que d'élaborer des solutions. Les scientifiques se regroupent dans des réseaux, publient des rapports. Les ONG interviennent avec eux pour les mêmes objectifs. En 1993 par exemple des ONG ont travaillé avec des professionnels forestiers pour créer le label FSC (Forest Stewardship Council), qui garantit la préservation des ressources naturelles et les droits des peuples indigènes et des salariés de l'industrie du bois. Après avoir expliqué la montée de la communication dans les ONG et son importance. Nous pouvons voir comment elles communiquent . Chapitre B : Différents moyens de communication pour les ONG Nous avons pu le voir, beaucoup d'acteurs communiquent sur l'environnement. C'est un sujet particulier. La sauvegarde de l'environnement est vue comme un bien collectif, comme Lebourgeois Mathilde - 2010 11
Les stratégies de communication des ONG environnementales : le cas de Greenpeace et de WWF un intérêt général. La communication des ONG environnementales est complexe en raison de son objet, spécifique en raison des particularités d'une ONG. Elle est également plurielle, en effet il n'existe pas un modèle unique de communication, les cibles et les moyens utilisés diffèrent. 1. Importance de la participation et de la pédagogie Tout d'abord, nous pouvons identifier les objectifs de la communication. Garrault (2008), nous explique qu'elle vise à valoriser son image, à crédibiliser son efficacité. Elle sert aussi à prouver sa transparence et mobiliser des acteurs de terrain et des partenaires. En synthèse, la communication des ONG environnementales a trois objectifs principaux : accroître la notoriété de l'association, assurer son financement et favoriser une prise de conscience et une action en faveur de l'environnement. Faire changer les mentalités, ce n’est pas simple. Selon Camille Lamouche, consultante en communication à l’agence Stratis, (citée par Dudouble 2007) « régularité, pédagogie, professionnalisme, crédibilité et cohérence semblent être des axes primordiaux pour mener à bien la diffusion d’un message en faveur du Développement Durable auprès du grand public. » La communication environnementale et celle des ONGimpliquent fortement la participation. C'est en effet, surtout une communication de proximité.Le relationnel est fondamental car on tente d'impliquer l'individu, de dialoguer avec le citoyen. Elle vise le changement de comportement, d'habitudes, c'est un élément d'évaluation de l'efficacité d'une communication. Dans cet objectif, la communication doit être construite sur lelong terme avec un réel engagement. Ce qui peut entraîner des difficultés à communiquer sur un sujet qui peut paraître si lointain. Il y a aussi une grande part à la pédagogie, la sensibilisation et la responsabilisation. Le rôle de l'école pour éduquer les jeunes à une citoyenneté environnementale est important. Ainsi, des options environnementales dans le cursus scolaire peuvent s'ouvrir. La modification des mentalités doit être apprise dès le plus jeune âge. La communication n'est pas qu'informative ou seulement descendante, elle ne doit pas juste donner des chiffres et s'appuyer ainsi sur des compétences spécifiques. Elle doit être incarnée, donner des actions concrètes dans un langage accessible à tous. Les différents acteurs doivent échanger entre eux. En effet, des discours globaux, abstraits, trop éloignés n'ont aucun effet. La communication doit permettre une identification et favoriser l'action. Un bon exemple est celui de Nicolas Hulot et de nombreuses ONG qui publient des guides comme « le petit livre vert de la planète», présentant les gestes à faire en faveur de l'environnement. Ou encore l'exemple de l'empreinte écologique, popularisée par WWF, qui après quelques questions sur nos pratiques quotidiennes (transport, nourriture...), permet de connaître notre impact personnel sur l'environnement. Le résultat donne accès au nombre de planètes nécessaires si tout le monde consommait comme nous. C'est donc un outil qui évalue la surface nécessaire à une population pour répondre à sa consommation de ressources et à ses besoins d'absorption de déchets. Ces types d'initiatives permettent de développer une écocitoyenneté. L'éco-citoyen a conscience d'appartenir à une entité globale, l'environnement, qui garantit son existence, ce qui implique des droits et des devoirs envers lui. 12 Lebourgeois Mathilde - 2010
Partie I : Importance et spécificité de la communication dans les ONG 2. Des stratégies tous azimuts Les cibles de la communication sont très diverses : les citoyens, les hommes politiques, les entreprises... A chaque cible, une méthode de communication peut être préférée. Mais dans tous les cas la communication doit faire face à un budget restreint. En effet généralement les associations n'ont pas les ressources pour faire de la publicité. Mais elles peuvent utiliser d'autres moyens et sont ainsi obligées d'être créatives, ce qui est leur force. Les moyens utilisés par la communication sont très divers, les acteurs qui y participent aussi. Une coopération entre différents services est nécessaire. La grande partie du budget de la communication est attribuée aux « hors médias » : marketing direct, relations publiques, évènementiel, sponsoring... Mais les relations presses avec les médias sont aussi fondamentales nous le verrons un peu plus tard. La communication interne prend une part importante dans les stratégies de communication des ONG. Les salariés ont déjà une motivation importante, ils sont sensibles à la cause de l'ONG, et n'y travaillent pas par hasard. Ils sont peut être prêts à s'investir plus que dans une entreprise, ce qui est une force pour l'ONG, comme nous l'explique Camille 1 Lajus (responsable presse de WWF) . Cependant un travail sur l'image, l'adhésion, et la mobilisation interne est quand même nécessaire. Cela permet de convaincre les employés, d'établir un climat favorable. Les ONG développent ainsi un Intranet pour une meilleure circulation de l'information. Elles multiplient les réunions internes pour une meilleure coordination. Il faut également fidéliser les adhérents en leur proposant de s'investir et en continuant de les informer par des magazines ou newsletter. Il faut entretenir la mobilisation et la motivation des bénévoles en leur déléguant certaines responsabilités, et en organisant des réunions. La communication externe est évidemment la plus importante. Elle a une fonction de notoriété, d'incitation, de diffusion. Thierry Libaert (2009) nous explique qu'il est nécessaire de prendre en compte les différentes identités de l'association, celle physique qu'on peut observer à travers le résultat de ses actions, son rapport annuel. Ensuite, il y a, l'identité psychologique, plus visuelle à travers son logo, son slogan; celle relationnelle à travers son travail de sensibilisation et de collecte de fonds; et enfin celle culturelle liée à son histoire. L'action de communication doit être dans tous les cas cohérente. Les premiers éléments de la communication d'une ONG sont le slogan (ou baseline) et le logo. Les deux doivent être simples, mémorisables, durables, cohérents, valorisants, déclinables sous différentes formes. Le choix de la typographie est important. Ils permettent de construire l'image, l'identité graphique de l'ONG, et ainsi de se démarquer des autres et de s'inscrire dans l'imaginaire collectif. Souvent on confie ce travail à un graphiste professionnel. L'information doit aussi être correctement transmise, pour cela, elle doit être simple, précise, complète, utile, véridique. Le langage utilisé se veut compréhensible et adapté au public. Des tableaux ou un glossaire peuvent faciliter la compréhension. Le contexte et le canal de transmission doivent être bien choisis pour faciliter la réceptivité du message. Il est préférable par exemple d'utiliser une communication directe plutôt que de multiplier les relais. L'attitude du communicant est aussi importante, il doit être attentif et à l'écoute. Lesrelations publiques pour les ONG sont importantes. L'objectif est de développer une relation de confiance avec ses publics. Elles exercent beaucoup le lobbying et le plaidoyer, notamment sur les politiques. En effet elles veulent les influencer, intervenir dans les lieux de 1 Entretien téléphonique avec Camille Lajus responsable presse de WWF réalisé le 12 août 2010 Lebourgeois Mathilde - 2010 13
Les stratégies de communication des ONG environnementales : le cas de Greenpeace et de WWF décision dans le but de modifier les pratiques, de mettre en place des solutions. Ce sont des moyens de pression. Elles choisissent ainsi soit l'opposition par le boycott, la mobilisation ou au contraire la coopération par des stratégies d'alliance. Dans les deux cas, elles veulent se montrer experte et témoin. Le marketing direct s'est renforcé avec les nouvelles techniques de collecte de fonds. Nous le verrons dans la dernière partie. Les ONG pour susciter le don, peuvent passer par les médias, ou par un courrier de sollicitation, le mailing. Le street fundraising (collecte dans la rue) et le phoning se sont également beaucoup renforcé. Le donateur bénéficie d'incitations fiscales. La prospection de nouveaux donateurs est la première étape, il faut ensuite les fidéliser. Il est donc nécessaire de faire un suivi, de remercier, de relancer, de favoriser une relation directe. Chapitre C : Un « répertoire d'actions de 3e génération » : l'importance des médias Parmi ces nombreux moyens de communication, l'usage des médias est essentiel. En effet les ONG en ont forcément besoin. Cela est une caractéristique des nouveaux mouvements sociaux et du répertoire d'actions de 3ème génération. Cela s'explique aussi par notre société médiatisée, par la concurrence entre les ONG, et par leur professionnalisation. 1. Le répertoire d'actions Concrètement comment une ONG peut convaincre de futurs donateurs, comment peut elle faire passer son message? Sylvain Lefevre dans son mémoire (2008) explique bien l'utilisation par les ONG de jeux d’enrôlement rhétorique, et de travail de cadrage. Il cite Snow et Benford qui définissent la notion de cadres comme des éléments qui « attribuent du sens, interprètent des événements et des conditions pertinentes, de façon à mobiliser des adhérents et des participants potentiels, à obtenir le soutien des auditoires». Pour susciter l’engagement, quatre opérations dites de « cadrage » et d'alignement sont identifiées. Lilian Mathieu, cité par Sylvain Lefevre (2008 p 257) les a ainsi synthétisées : « La connexion de cadres (frame bridging) est le travail réalisé par une organisation à l’égard de personnes partageant déjà son point de vue, mais qui ne la connaissent pas ; son action consiste donc à fournir un schéma interprétatif unifié et une base organisationnelle à ses futures recrues, mais sans agir sur leurs convictions ou perceptions. L’amplification de cadre (frame amplification) consiste à clarifier ou à développer un schéma interprétatif déjà existant chez les individus en insistant sur des valeurs ou des croyances préexistantes mais n’ayant pas débouché sur une volonté d’engagement ; il s’agit également de permettre à l’individu que l’on vise à recruter de faire le lien entre ses préoccupations quotidiennes et les objectifs de l’organisation. L’extension de cadre (frame extension) intervient lorsque les individus ne partagent pas les valeurs ou objectifs de l’organisation ; celle-ci doit alors élargir son discours en y intégrant des éléments qui a priori n’en font pas partie mais qui sont pertinents pour sa cible de recrutement potentiel. La transformation de cadre 14 Lebourgeois Mathilde - 2010
Partie I : Importance et spécificité de la communication dans les ONG (frame transformation), enfin, consiste dans une logique de conversion à modifier radicalement les points de vue, croyances ou valeurs des individus de manière à les rendre conformes à ceux de l’organisation. » Charles Tilly a définit la notion de répertoire d'actions pour expliquer que les mouvements sociaux ont recours à des moyens d'actions prédéfinis, institutionnalisés, « routinisés » pour se faire entendre et faire avancer leurs intérêts. Cependant les registres d'actions des ONG restent multiples. Ils diffèrent selon leur histoire, leurs objectifs, leurs cibles, leurs actions, mais ils diffèrent aussi au sein d'une même ONG entre différentes campagnes. Sylvie Ollitrault et Denis Chartier, (2006)distinguent six registres d'action principaux : l'action militante de terrain, l'action coup de poing (celle typiquement de Greenpeace pour réveiller l'attention du public et faire pression sur les décideurs), le lobbying direct ou indirect, l'expertise, l'action juridique (le recours au contentieux judiciaire permet de ralentir ou faire annuler une décision administrative) et enfin l'information. D'une façon différente, Eric Dacheux (2002), distingue les actions de non coopération pour rejeter une décision (boycott, désobéissance civile, sabotage..), les actions de légitimation publique pour légitimer l'association (pétition, manifestation, marche nationale, recours aux experts et aux procès), les actions directes défensives (occupation, sit in, interposition..), les actions directes offensives pour faire pression et prouver qu'un changement social est possible, les actions de sensibilisation pour provoquer une prise de conscience nécessaire à toute participation (actions conviviales de bals, ou actions d'informations de colloques). Cependant pour l'auteur « la notion même de répertoire pose problème puisqu'elle tend à fixer définitivement une invention sociale quotidienne » (p 135). Sylvie Ollitrault (1999), explique que le répertoire d'actions des écologistes, a évolué. On est passé d'une « mobilisation de consensus », où l'information est le plus important, à « une mobilisation de l'action » (terme de Klandermans et Oegema), où les campagnes sont plus actives et où les médias sont importants. Cela peut être dû à l'émergence des NTIC, à la professionnalisation des ONG, à l'appel plus fréquent aux experts. De même pour Eric Neveu (2005), on est passé à une troisièmegénération de répertoire, avec une dimension internationale forte, une montée des logiques d'expertise et aussi une dimension symbolique importante avec une mise en scène de l'action. Les ONG s'inscrivent en effet dans une temporalité proche de la télévision c'est à dire, une temporalité immédiate, ce qui facilite la scénarisation de l'action, et l'information spectacle. 2. Les médias et Internet Le mouvement écologiste fait partie des Nouveaux Mouvements Sociaux. Ces derniers sont caractérisés par une rupture avec les actions routinières des syndicats et par un rôle important des médias. Ils privilégient aussi des actions immédiates pour faire évoluer les choses à court terme. Jean Marc Salmon (cité par Jacques Ion, 2005, p 31) parle même de « médias-association ». En effet les médias sont comme une « caisse de résonance » (Vitral, 2008, p 146) pour relayer le mouvement, les actions et les faire durer plus longtemps. Ils ont aussi une influence sur la façon dont le message est transmis et reçu par les citoyens. En effet pour Mc Combs et Shaw, les médias ont d'abord un pouvoir de mise sur l'agenda (agenda setting), ils indiquent les sujets préoccupants, ils hiérarchisent les priorités auxquelles il faut penser. Iyengar et Kinder rajoutent un pouvoir d'amorçage, de saillance (priming), les médias ont une influence sur les critères d'après lesquels l'opinion publique évalue les problèmes, et enfin un effet de cadrage (framing), qui amène le citoyen Lebourgeois Mathilde - 2010 15
Les stratégies de communication des ONG environnementales : le cas de Greenpeace et de WWF à attribuer la responsabilité d'une situation à un acteur plutôt qu'à un autre en la présentant sous un angle particulier. Éric Dacheux (2002 p 129) explique que « le soutien de l'opinion publique est un facteur qui accroit l'efficacité des actions politiques. Or les médias de masse permettent de s'adresser à l'ensemble des citoyens (...) Dès 1984 Patrick Champagne notait que les résultats politiques d'une manifestation se jouaient dans la rue et les médias ». On peut dire qu'il en est de même pour les ONG. Une nouvelle forme de manifestation s'est donc développée, ce que Champagne appelle des « manifestations de papier». Celles ci cherchent à produire du spectaculaire, elles sont explicitement conçues pour les médias et le plus important est la façon dont ces derniers en parlent. Dans ces manifestations, une part importante est accordée à l'expression des sentiments : la colère, le désarroi... Ce qui explique que les NMS et notamment le mouvement altermondialiste insistent sur ce slogan : « Don't hate the media be the media ». Comme l'affirme Eric Neveu (2005), les médias ne sont pas un simple support mais sont parties prenantes du mouvement social. Pour ces raisons, les relations avec les journalistes sont très importantes, il est nécessaire de garder le contact, d'installer la confiance. Une base de données avec les contacts médiatiques doit être mise à jour régulièrement. Il faut aider les journalistes en leur fournissant toutes les informations nécessaires, ainsi que des communiqués ou dossiers de presse. Garrault (2008) nous explique que l'information a plus de chance d'être relayée si elle est d'actualité, ou d'intérêt général avec un caractère exceptionnel. Il faut en effet apprendre et maitriser les règles des médias. Cependant l'utilisation des médias peut aussi avoir des effets négatifs. Dans leur course à l'audience, ils peuvent privilégier le sensationnalisme, les émotions, les images chocs. Dans leurs conditions de travail, ils peuvent passer outre la phase d'investigation qui est pourtant nécessaire pour vérifier les données transmises par les ONG et les différents acteurs. Les journalistes se recopient ou reprennent les communiqués de presse tels quels sans les contrebalancer par des experts. Tout cela peut conduire à un risque de désinformation, de plus les médias ne sont pas forcément indépendants. Les associations sont également dépendantes des médias pour l'organisation et le succès de leurs actions. Elles doivent par exemple faire attention à ce que les journalistes aient le temps de publier l'article ou la vidéo avant le bouclage pour qu'on en parle dans le JT le plus rapidement possible. La communication des ONG a évolué aussi avec Internet, qui permet un meilleur accès à l'information, une transmission plus rapide, et une participation accrue. C'est utile pour diminuer les frais de communication interne, pour monter rapidement des évènements internationaux, pour sensibiliser un public plus jeune. Cela facilite les dons en ligne. Internet est vu comme un outil d'information, d'interactivité, comme un relais. C'est donc un espace de débat, de « conscientisation politique » (Vitral, 2008, p 132). On observe beaucoup le développement de l'hacktivisme, avec la multiplication de manifestations ou de pétitions par voie électronique. Il permet ainsi de renforcer les listes de diffusion et les échanges. Dans ce sens, il favorise « le désenclavement des luttes » (Sommier 2003 p 198), et le rapprochement des différentes ONG. Avec l'utilisation des multiples réseaux sociaux (Facebook, Twitter..), cela permet de toucher un maximum de personnes et d'être à leur écoute. Les associations ont ainsi leur propre page, créent des groupes. Des réseaux sociaux spécialement écologiques existent aussi, tel que Planète Attitude, lancé par WWF. Également cela remet en cause les frontières entre « savoirs profanes » et « savoirs savants ». Chantal Aspe, (2009), explique que Internet a permis d'ouvrir un nouvel « espace public » au sens d'Habermas, « Cette facilitation de l’accès aux données a conduit les 16 Lebourgeois Mathilde - 2010
Partie I : Importance et spécificité de la communication dans les ONG mouvements environnementaux contestataires à produire avec encore plus d’assurance les controverses nécessaires aux débats auxquels ils participent aujourd’hui de plus en plus.». Cependant l'entretien d'un site Internet nécessite une mise à jour régulière et des compétences techniques donc un coût d'investissement important. Dacheux (2002) explique ainsi que la majorité des sites des associations ne font que redonner une information qui est déjà disponible sur d'autres supports, notamment papier. De plus, avec Internet, l'ONG risque de perdre le contact direct, humain. Internet doit être un outil mais pas une finalité. Cependant il n'est pas nécessaire de passer systématiquement par les médias. Ils peuvent être inefficaces, en effet les citoyens n'ont pas toujours confiance en eux, donc ils ne modifient pas forcément leur comportement, ou ne se mobilisent pas plus. Ils peuvent aussi avoir des effets négatifs, car ils ont une logique différente que celle des associations et ne sont pas toujours objectifs. Pour Dacheux (2002 p 119) il faut « relégitimer l'espace public non médiatique », y accéder en contournant les médias et cela passe selon lui par une approche qui insiste beaucoup plus sur la participation. La communication reste indispensable mais avec des techniques inventives, comme l'utilisation de communications symboliques (le détournement de slogans, la parodie...), de mises en scènes (qui passe par le spectaculaire, la victimisation...), de médias alternatifs associatifs, de communications directes (spectacles, porte à porte..). Toutes ces techniques sont plus créatives et moins onéreuses. Nous avons donc pu voir que la communication des ONG s'est renforcée avec l'importance du développement durable dans la société civile. Elle est devenue essentielle. Les stratégies sont spécifiques et plurielles. De nombreuses méthodes existent, elles ont évolué avec la multiplication des ONG, le poids des médias et des NTIC. Il est utile de voir maintenant, comment ces techniques sont concrètement appliquées. Lebourgeois Mathilde - 2010 17
Les stratégies de communication des ONG environnementales : le cas de Greenpeace et de WWF Partie II : Deux modèles de communication : Greenpeace et WWF Parmi les nombreuses ONG environnementales on distingue souvent les ONG de dialogue et celles plus revendicatrices, qui ont donc des identités, des préoccupations et des méthodes différentes. Les anglo-saxons distinguent les environnementalistes et les conservationnistes. Il est ainsi utile de pouvoir les comparer et observer leur stratégie de communication concrètement. Malgré leur différence, elles réussissent à travailler aussi ensemble, ce qui permet de toucher un maximum de personnes. Chapitre A : Greenpeace : une stratégie de contestation Greenpeace est l'ONG la plus médiatique en France. Du point de vue de la communication, c'est elle qui est la plus active. Sylvie Ollitrault et Denis Chartier (2006) la classent dans la deuxième vague de mobilisation environnementale, c'est à dire celle des ONG qui dénoncent l'accumulation de richesses et une croissance économique incontrôlée, qui prônent un changement dans les relations sociales et politiques comme préalable à la résolution des problèmes environnementaux. Dans ces associations environnementales plus revendicatives, on classe aussi Les amis de la Terre, Earth First, et Sea Shepherd. Ces deux dernières sont plus violentes, illégales, et réactives. Greenpeace a un rôle considérable dans de nombreux succès pour une meilleure prise en compte de l'environnement. Mais c'est aussi elle la plus controversée, notamment en raison de certaines de ses actions. On trouve ainsi de multiples livres et films critiques. Pour Bruno 2 Rebelle, elle n'est pas une association extrémiste ou violente comme on peut parfois l'entendre. Elle est juste radicale, c'est à dire qu'elle prend les problèmes à la racine. 1. Présentation de l'ONG Le mythe fondateur Dès l'acte de naissance de Greenpeace, dès son mythe fondateur, les médias sont présents, et sa stratégie d'opposition est adoptée. Jim Bohlen, Irwing Stowe, Paul Cote, sont tous des écologistes de l'association, Sierra Club. Ils sont également quakers, pacifistes, hippies. En 1971, à Vancouver, ces aventuriers se regroupent dans le comité « Don't make a wave » pour protester contre les essais nucléaires américains sur le site d'Amchitka en Alaska. Pour empêcher ces essais, ils embarquent à bord d'un vieux chalutier le Phyllis Cormack, avec le capitaine John Cormack, d'autres militants, et des journalistes comme Paul Watson, Bill 2 Entretien réalisé le 18 juin 2010 avec Bruno Rebelle dirigeant de Greenpeace France de 1997 à 2003, directeur des campagnes à Greenpeace International de 2003 à 2006, et actuel directeur de Synergence, agence de conseil en développement durable 18 Lebourgeois Mathilde - 2010
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