Littérature française - Éric Fottorino Maylis de Kerangal Boualem Sansal
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
www.gallimard.fr | facebook.com/gallimard Littérature française Éric Fottorino Maylis de Kerangal Boualem Sansal Littérature étrangère Roberto Saviano Zadie Smith La Pléiade Jean d’Ormesson Franz Kafka Lais du Moyen Âge Connaissance Alexandre Jollien Gilles Kepel Quarto Albert Cohen Série Noire Jo Nesbø 524 Bulletin n° août-septembre-octobre 2018
Les grandes questions d’actualité et de société vues par les dessinateurs de presse du monde entier Préface de Christiane Taubira Hors série grand format 144 pages • 19,50 € Parution octobre En partenariat avec Amnesty International Gallimard Les droits d’auteur de ces livres sont reversés à Cartooning for Peace pour soutenir les dessinateurs de presse menacés. Parutions septembre Petits formats • 116 pages • 10 € Couvertures provisoires Le sexe à la Une Préface de Maryse Wolinski Les inégalités dans la balance Préface de Thomas Piketty
Bulletin n° 524 août-septembre-octobre 2018 Rendez-vous sur www.gallimard.fr LITTÉRATURE FRANÇAISE LITTÉRATURE ÉTRANGÈRE COLLECTION BLANCHE 4 DU MONDE ENTIER 26 Meryem Alaoui, Anton Beraber, Christian Bobin, Kader Abdolah, Alonso Cueto, György Dragomán, Lisa Halliday, Jean Clair, Laurence Cossé, Louise de Coligny-Châtillon, Stefan Hertmans, Bodo Kirchhoff, Eskhol Nevo, Benoît Duteurtre, Éric Fottorino, Paul Greveillac, Roberto Saviano, Zadie Smith Jean Hatzfeld, Emmelene Landon, Franck Maubert, ARCADES30 Michel Onfray, Mona Ozouf, Hervé Prudon, Dominique Rolin, Jorge Luis Borges Andrea Salajova, Boualem Sansal ENTRETIENS JOËLLE LOSFELD 31 Roddy Doyle, Lisa McInerney Éric Fottorino 5 Boualem Sansal 7 POLICIER L’INFINI14 SÉRIE NOIRE 32 Mathieu David, Michaël Ferrier Antoine Chainas, Mons Kallentoft & Markus Lutteman, Jo NesbØ L’ARBALÈTE15 Michèle Audin, Carole Fives L’ARPENTEUR16 CONNAISSANCE Clémentine Haenel BIBLIOTHÈQUE ILLUSTRÉE DES HISTOIRES 34 Thomas Gaehtgens CONTINENTS NOIRS 16 Aminata Aidara HORS SÉRIE CONNAISSANCE 34 Jérémie Gallon, Alexandre Jollien, Gilles Kepel, Manon Pignot SYGNE (NOUVELLE COLLECTION)17 et Yann Potin, Amos Oz, Emmanuel Pierrat Fabrice Caro, Marion Muller-Colard ENTRETIEN VERTICALES18 François Begaudeau, Maylis de Kerangal, Gilles Kepel 39 Gabrielle Wittkop LA SUITE DES TEMPS 35 François Dosse JOËLLE LOSFELD 20 Denis Soula NRF BIOGRAPHIES 36 LE SENTIMENT GÉOGRAPHIQUE 20 Molière par Georges Forestier Marianne Rötig L’ESPRIT DE LA CITÉ 36 Marcel Gauchet HAUTE ENFANCE 20 Gilles Paris NRF ESSAIS 40 Thomas W. Laqueur, Dominique Schnapper QUARTO21 Albert Cohen TEL40 René Descartes L’IMAGINAIRE22 Hector Bianciotti, René Depestre, Arthur Rimbaud, LE DÉBAT 41 Nathalie Sarraute Nathalie Heinich, Luuk van Middelaar HORS SÉRIE LITTÉRATURE 23 CONNAISSANCE DE L’INCONSCIENT 42 Nathacha Appanah, DOA Jean-Claude Lavie, Patrick Merot ART ET ARTISTES 42 LA PLÉIADE Philippe Duboÿ Jean d’Ormesson, Kafka, Lais du Moyen Âge 24 REVUES LA NRF / Le débat / Les Temps Modernes 43 FOLIO Folio / Poésie Gallimard 44 Photos des auteurs pages 5, 7 et 39 : Francesca Mantovani © Gallimard.
LITTÉRATURE FRANÇAISE r r re i e Meryem Alaoui o ma m p n La vérité sort de la bouche du cheval Dès que mon mari est parti, je lui ai dit que je resterai à Casablanca pour faire des ménages. Pas que j’étais une vulgaire bonne, non. Mouy photo D. R. n’aurait jamais avalé que sa fille nettoie la crasse des gens en se faisant traiter comme une esclave. Pour Mouy, je fais du nettoyage propre. Pas de serpillère, pas de balai. J’ai une machine, je m’assois dessus et c’est Meryem Alaoui est née et a grandi comme ça que le nettoyage se fait. Un travail de société, quoi. J’ai vu à Casablanca. Elle vit aujourd’hui à New York. La vérité sort de la ça dans un film. Et je lui ai dit qu’à côté — pour dépanner — je fais du bouche du cheval est son premier commerce de contrebande, avec des produits qu’on me ramène du Nord roman. et que je revends ici. C’est ce que j’ai dit. Et c’est passé. ” Jmiaa, prostituée de Casablanca, vit seule avec sa fille. Femme au fort caractère et à l’esprit vif, elle n’a pas la langue dans sa poche pour décrire son amoureux Chaiba, brute épaisse et sans parole, ou Halima, sa comparse dépressive qui lit le Coran entre deux clients, ou encore Mouy, sa mère à la moralité implacable qui semble tout ignorer de l’activité de sa fille... Sa vie bascule quand elle ren- contre Chadlia, dite « Bouche-de-Cheval », qui veut réaliser son premier film sur la vie d’un quartier populaire de Casa et cherche des actrices. Très vite, Chadlia est séduite par la personnalité détonante de Jmiaa. Mais celle-ci n’est pas facile à manier : bien qu’elle soit totalement inexpérimentée, rien ne l’impressionne et elle a un avis sur tout... Jmiaa nous offre une peinture haute en couleur de la vie quotidienne dans un Maroc populaire où chacun fait face aux difficultés à force de vitalité et de débrouillardise. PARUTION AOÛT • PREMIER ROMAN • 9782072777929 • 272 PAGES • 21 € r r re i e o ma Anton Beraber m p n La Grande Idée photo F. Mantovani © Gallimard L’éclairage électrique prenait le pas sur le jour, commençait de creuser les visages. Gagné par l’idée que quelque chose allait se dire, quelque chose d’inédit, d’inespéré, qui soixante ans plus tard explique- rait tout, j’ai rallumé le magnétophone, appelé l’homme. J’ai demandé si lui, il regrettait d’avoir admiré Kaloyannis. Anton Beraber est né en 1987. Lentement, comme s’il émergeait d’un rêve, il s’est retourné. Il vit au Caire. La Grande Idée est son premier roman. Il a levé les yeux vers moi. Il pleurait. Il partit en suivant le rivage, les chaussures à la main, et je restai là, sous le monument aux morts, la bande enregistrant le cauchemar silencieux des soldats de bronze et ce vieux fond de mer vivante qui gangrène toujours, dans ce pays, les enregistrements. ” Son nom parcourt le livre comme une incantation, et pourtant Saul Kaloyannis reste une énigme. Qui était-il, cet homme aux yeux emplis de ténèbres : un idéaliste, un traître, ou le dernier des héros ? Dans les années 70, un étudiant part à la recherche de ce survivant d’une guerre perdue un demi-siècle auparavant. Les témoins qu’il retrouve, tous des laissés- pour-compte de l’Histoire, se succèdent pour retracer le destin de Kaloyan- nis, son voyage sans retour des confins de l’Orient à la baie de New York. En ces temps où les régimes répriment l’extraordinaire, la légende galopante du contestataire embrase déserts, îles des Cyclades, forêts de sauges géantes, villes sous les vagues... Ce roman d’aventures déployant un imaginaire infini est porté par une écriture magnifique, ample, visionnaire, qui dans son fleuve obstiné allie le trivial et le précieux, le réalisme et la poésie. PARUTION AOÛT • PREMIER ROMAN • 9782072791901 • 576 PAGES • 22 € 4
ENTRETIEN Éric Fottorino Dix-sept ans Tout se passait dans son regard. Il ne va pas trouver, ou il ne veut pas ? Le regard de Lina. J’en connaissais Il a peur de découvrir une réalité douloureuse ou les nuances, les reflets, les défaites. décevante. Il faudra qu’un témoin comme Betty Legrand Je lisais son trouble à sa façon de croise sa route pour comprendre que sa mère l’a vraiment plisser les paupières. Une ombre aimé, comme toute jeune maman qui a un enfant. passait dans ses yeux, une ombre dure qui fanait son visage. Elle était Ce personnage et quelques autres vont donner au là mais elle était loin. Je ne compre- narrateur des clés inattendues… nais pas ces sautes d’humeur, ces Tous sont des instruments du destin qui vont lui ouvrir sautes d’amour. La petite fille était les yeux, perturber sa conscience, l’interpeller sur ses ori- invisible à mes yeux. Elle crevait gines juives. Il réalise qu’il a été privé d’un père, et aussi les tiens. Chaque jour j’étais là, et d’une religion, tout au moins d’une culture. chaque jour confirmait son absence. J’étais ton garçon, ” je n’étais que ça, mais j’avais pris toute la place. Le symbole du boomerang traverse le livre… L’important dans ce boomerang, c’est celui qui le lance, que le narrateur va découvrir presque aussi proche qu’un S’agit-il d’un récit autobiographique ou d’un roman ? frère. Ce boomerang, aussi, correspond à mon idée du C’est une fiction, et j’y tiens. Depuis trente ans que j’écris temps : non pas une flèche, mais un élément circulaire. des livres qui résonnent avec ma propre vie, j’ai toujours On est amené à revivre certaines événements, et à mieux eu à cœur de mettre à distance les matériaux vrais. Je n’ai les comprendre en les revivant. pas connu ma mère quand elle avait dix-sept ans, donc, d’une certaine manière, j’ai tout inventé. Mais c’est peut- Le deuxième voyage à Nice, en compagnie de sa mère, être encore plus vrai que le vrai. semble presque onirique… Justement, c’est un voyage dans le temps, où passent Le roman débute par la révélation d’un secret des paysages, des souvenirs, à travers les regards qu’ils de famille. Cette pièce manquante vient-elle portent l’un sur l’autre. Elle souffre d’une affection parachever le puzzle ou tout remettre en question ? visuelle qui lui fait voir tout en double. Ce dédoublement Lorsque ce secret a surgi, le roman était terminé depuis fait qu’elle a simultanément le sentiment d’être avec son plus d’un an. Soudain, cette révélation d’un chaînon fils et de vivre ce qu’elle aurait aimé vivre avec Moshé, le manquant éclairait tout ce que je sentais d’impalpable, de père naturel caché de ce fils. mystérieux, parfois d’inquiétant dans ma relation avec ma mère. Effectivement, cela m’a obligé à reconstruire le Est-ce un livre de réconciliation qui met un terme à roman en reconsidérant la réalité. trente ans de questionnement ? Je suis devenu écrivain parce que je ne savais pas qui Le narrateur va mener l’enquête à Nice, à la fois sa j’étais. Avec certains de mes livres, j’ai cru avoir comblé ce ville natale et une ville inconnue… gouffre du vertige identitaire. Mais ma mère n’apparais- Lui qui a grandi et vécu dans l’ombre, l’ombre des secrets sait jamais de face. Là, j’ai voulu qu’elle soit l’héroïne, une et les ombres de Bordeaux, découvre cette ville dont il ne héroïne solaire. Je pense aussi à Kundera, qui dit en subs- sait rien comme une ville de lumière. Mais cette jeune tance qu’un roman n’a pas réponse à tout, mais question femme qui a été si peu sa mère n’y a laissé aucune trace. à tout. L’écriture de Dix-sept ans a provoqué une foule de Il se perd dans cette ville parce qu’il sent qu’il ne va pas questions. Donneront-elles naissance à des livres ? Je ne trouver ce qu’il cherche. sais pas, mais elles sont là, à attendre leurs réponses. Du même auteur en Folio Journaliste et romancier, Éric Fottorino est né en 1960. Il a notamment publié Korsakov, L’homme qui m’aimait tout bas, Questions à mon père, Chevrotine, Trois jours avec Norman Jail. PARUTION SEPTEMBRE • ROMAN • 9782070141128 • 272 PAGES • 20,50 € DERNIÈRE PARUTION : TROIS JOURS AVEC NORMAN JAIL • FOLIO N°6389 • 224 PAGES • 6,60 € 9782070458189 9782070459360 9782070465729 9782072720147 5
LITTÉRATURE FRANÇAISE Laurence Cossé Nuit sur la neige photo F. Mantovani © Gallimard Nous montions entre les sapins, des flocons plein les yeux, dans le froid, l’humidité, le silence. Pour la première fois de ma vie, je compre- nais ce que veut dire mettre un pied devant l’autre en n’ayant que cela en tête. Sans le bruit du torrent, je ne suis pas sûr que j’aurais distingué les gorges. Laurence Cossé est l’auteure J’avais les cils couverts de givre lorsque le grand gars dit Nous voilà, et de romans, dont Le coin du voile, La femme du premier ministre, Au Bon je vis confusément apparaître, de part et d’autre du chemin, un toit bas Roman, de nouvelles, de pièces pour recouvert de neige, un autre, un abreuvoir, une grange, enfin ce qui sem- le théâtre et la radio. Elle a obtenu blait un vieux village. Cela sentait l’étable à plein nez. ” en 2015 le Grand Prix de Littérature de l’Académie française pour l’ensemble de son œuvre. Septembre 1935. Robin sort de l’adolescence. Il est né après la mort de son père, comme de nombreux enfants de sa génération, venus au monde pendant la Grande Guerre. La vie politique est alors particulièrement violente, mais, à dix-huit ans, qui n’accorde pas plus d’importance à ses tourments intimes qu’à l’actualité collective ? En la personne d’un de ses camarades de classe prépara- toire, Robin découvre que l’amitié est un des noms de l’amour, autrement dit de l’inquiétude. Conrad est la séduction même et l’énigme incarnée. En avril 1936, alors que la tension politique est à son comble, tous les deux vont skier dans un vieux et pauvre village de Haute Tarentaise du nom de Val-d’Isère, dont quelques visionnaires imaginent qu’il pourrait devenir une grande station de ski alpin. Les six jours qu’ils y passent marqueront Robin à vie : son existence entière va être éblouie par une jeune fille. PARUTION AOÛT •ROMAN • 9782072801273 • 144 PAGES • 13,50 € DERNIÈRE PARUTION : LA GRANDE ARCHE • FOLIO N° 6343 • PRIX DU LIVRE D’ARCHITECTURE 2016 • PRIX FRANÇOIS-MAURIAC 2016 • 400 PAGES • 7,80 € Jean Hatzfeld Deux mètres dix photo F. Mantovani © Gallimard Quand elles longèrent une des rives du lac Issyk Kul, la lumière accentua le jaune de la bande de sable qui sertit les eaux bleues. À une bifurcation, Tatyana hésita, tourna en direction de Balakchy et s’arrêta devant un ancien potager bouffé par les mauvaises herbes accolé à un entrepôt. Elle observa le bâtiment à l’abandon : verrières Jean Hatzfeld est l’auteur de brisées, carcasses de voitures squattées par des poules. romans et récits récompensés par plusieurs prix littéraires dont — Voilà notre centre d’entraînement.[…] On l’appelait l’Institut péda- le Médicis en 2007. gogique du sport. C’est là qu’on a travaillé votre Fosbury, en cachette, comme des comploteuses anarchistes. À l’époque soviétique, tout ce qui venait d’Amérique devait rester clandestin. — Mon Dieu, si Fosbury apprenait que des filles communistes s’échinaient à l’imiter dans un hangar… ” Histoire de quatre sportifs de très haut niveau, entre les jeux Olympiques de 1980 et aujourd’hui : deux champions haltérophiles, un Américain et un Kirghize ; deux sauteuses en hauteur exceptionnelles, une Américaine et une Kirghize. Leurs rivalités sont mêlées d’admiration et d’incompréhension réciproques. Des années plus tard, une profonde amitié naîtra entre les deux femmes. Jean Hatzfeld ne se contente pas de raconter l’univers sportif et ses rapports avec l’époque (guerre froide, répression politique et vie quotidienne dans le bloc soviétique...). Il porte une attention très aiguë aux gestes des champions jusqu’à les rendre poétiques et captivants, montrant les corps délivrés de la pesanteur, les peignant dans la puissance héroïque de leur musculature, telles des créatures fabuleuses. Quatre destins qui se croisent, quatre portraits inoubliables. PARUTION AOÛT • ROMAN • 9782072799914 • 208 PAGES • 18,50 € DERNIÈRE PARUTION : UN PAPA DE SANG • FOLIO N° 6352 • 304 PAGES • 7,80 € 6
ENTRETIEN Boualem Sansal Le train d’Erlingen ou La métamorphose de Dieu Le lecteur jugera en fonction près, les déconstruire et chercher dans les interstices des de ce qu’il voit autour de lui. Au explications plus vraies. La raison n’a pas disparu, il faut bout, il tirera de ce récit l’une ou bien la chercher. l’autre morale : la première est que le monde est un, il s’y déroule la En écrivant « Nulle odeur n’est plus mortifère que celle même éternelle histoire, la quête de l’argent et de l’encens réunis », qui visez-vous ? du bonheur qui jette les gens sur Je vise davantage des milieux que des pays. Je pointe ces les routes de la vie où les attend oligarchies sectaires détentrices d’un pouvoir absolu plus souvent le malheur que la féli- obtenu par la manipulation de l’argent et de la religion. cité ; l’autre leçon est que l’Histoire Elles sont en Amérique et dans le Golfe mais pas seule- ne sait rien de l’avenir et qu’il peut ment, la sainte alliance gagne du terrain. arriver n’importe quoi, les mêmes ingrédients ne font pas forcément la même soupe, un Vous évoquez un mystérieux « Livre des trois train peut en cacher un autre et il n’est pas prouvé, loin imposteurs : Moïse, Jésus, Mahomet ». Peut-on de là, que Dieu est le meilleur secours. ” voir là une condamnation des monothéismes, qui seraient par essence vecteurs de fanatisme ? Le train d’Erlingen ou La métamorphose de Dieu, pour- Les religions sont des épines dans la conscience de quoi ce double titre ? l’homme. Leur bilan historique n’est guère reluisant. Le choix d’un titre est difficile. J’étais parti sur le titre La Il est temps de changer d’angle de vue, et de se mon- métamorphose de Dieu. C’était grandiloquent, ça me gênait. trer très méfiants à leur égard, elles sont terriblement Puis j’ai opté pour Le train d’Erlingen. Trop prosaïque, ça malignes. L’homme doit accomplir son destin et non me gênait aussi. Ensemble, ça marchait bien. Le fait que celui des dieux. ça renvoie à l’Allemagne par le nom Erlingen et à la Shoah par le train, posait quelque part la question de Dieu et de Vous convoquez au fil des pages de nombreux écri- sa responsabilité. Ça résume bien le livre. vains, mais vous placez Thoreau au-dessus de tous. Pensez-vous qu’il nous indique une voie pour sortir Vous définissez le roman comme une « chronique de l’impasse ? sur les temps qui courent ». Qu’entendez-vous par Thoreau est un champion de l’écologie de la vie. Notre cette formule ? temps dramatiquement perclus d’addictions a un besoin Rien de nouveau sous le soleil. Nous vivons les mêmes urgent de ce genre de héros. Je milite pour qu’on le redé- événements qui ont conduit aux grandes migrations du couvre. Michel Onfray lui a consacré un livre et Philippe passé, à la montée des fascismes, aux guerres mondiales, Djian un site, c’est bien. aux folies religieuses, aux grandes défaites morales. Le roman en fait la recension. Peut-on lire le roman comme un avertissement sévère à tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, Vous renvoyez dos à dos les fanatiques et les « mau- acceptent la soumission ? viettes » de la « mondialisation matérialiste heu- Il faut avertir les gens avant qu’ils tombent dans la sou- reuse ». Est-ce aussi simple ? mission. Après, c’est trop tard. Le roman appelle de même Mon idée n’est pas d’ignorer les choses parce que je ne à combattre les vendeurs de soumission et les idiots les comprends pas. Je veux au contraire y regarder de utiles qui les encouragent par leurs sourires obséquieux. Du même auteur en Folio Né en 1949, Boualem Sansal vit à Boumerdès, près d’Alger. Il a récemment publié aux Éditions Gallimard Rue Darwin (2011), Gouverner au nom d’Allah (2013), 2084. La fin du monde, Grand Prix du Roman de l’Académie française (2015). En 2013, Boualem Sansal a reçu le Grand Prix de la Francophonie de l’Académie française. PARUTION AOÛT • ROMAN • 9782072798399 • 256 PAGES • 20 € DERNIÈRE PARUTION : 2084 LA FIN DU MONDE • GRAND PRIX DU ROMAN DE L’ACADÉMIE FRANÇAISE 2015 • FOLIO N° 6281 • 336 PAGES • 7,80 € 9782072697005 9782070450503 9782070396993 9782072713989 7
LITTÉRATURE FRANÇAISE Paul Greveillac Maîtres et esclaves phot F. Mantovani © Gallimard À quatre pattes, Kewei tournait sur lui-même comme un serpent qui se mord la queue. On avait disposé, à portée de sa main aux ongles noirs, de menus objets, qu’il saisissait sans y prêter attention, qu’on l’encourageait ou le dissuadait à grands cris de conserver. Car de l’objet qu’il choisirait découlerait sa vocation. Son avenir. Le bonheur ou bien Paul Greveillac est né en 1981. l’opprobre. Et Xi Yan avait interdit à son mari tout ustensile se rappor- Après un premier roman sur la censure littéraire et tant, de près ou de loin, à la peinture. […] cinématographique dans l’URSS Mais Kewei, au grand dam de tous, ne choisit finalement aucun des post-stalinienne (Prix Roger- objets qui lui étaient proposés. Il remarqua, non loin, un court morceau Nimier), puis le récit-portrait de bois. Et de ce stylet improvisé, il commença à tracer des traits, à gri- d’un compositeur soviétique en ” délicatesse avec le régime (Prix bouiller des formes dans la terre battue… Pelléas-Radio Classique), il retrace ici le destin vibrant d’un artiste Kewei naît en 1950 dans une famille de paysans au pied de l’Himalaya, dans chinois. la vaste campagne chinoise. Au marché de Ya’an, sur les sentes ombragées du Sichuan, aux champs et même à l’école, Kewei, en dépit des suppliques de sa mère, dessine du matin au soir. La collectivisation des terres bat son plein et la famine décime bientôt le village. Repéré par un garde rouge, Kewei échappe au travail agricole et à la rééduca- tion permanente. Sa vie bascule. Il part étudier aux Beaux-Arts de Pékin, lais- sant derrière lui sa mère, sa toute jeune épouse, leur fils et un village dont les traditions ancestrales sont en train de disparaître sous les coups de boutoir de la Révolution. Dans la grande ville, Kewei côtoie les maîtres de la nouvelle Chine, obtient la carte du Parti. Devenu peintre du régime, son ascension ne connaît plus de limite. Mais l’Histoire va bientôt le rattraper. PARUTION AOÛT • ROMAN • 9782072797248 • 464 PAGES • 22 € DERNIÈRE PARUTION : CADENCE SECRÈTE • 176 PAGES • 16,50 € Louise de Coligny-Châtillon dite Lou Lettres à Guillaume Apollinaire On connaissait une dizaine de lettres de Lou à Guillaume Apollinaire. Grâce Louise de Coligny-Châtillon à une découverte récente dans les archives du poète, c’est désormais près de (1881-1963) a été l’une des premières aviatrices françaises. cinquante nouvelles lettres qui sont accessibles. Objet de l’amour fou de Guillaume Lou, amante volage d’Apollinaire, assume sans culpabilité libertinage et liberté Apollinaire de fin septembre 1914 d’expression mais ne reste pourtant pas indifférente aux silences de Guillaume. à mi-février 1915, elle lui inspira Le poète apparaît alors moins comme le jouet d’une maîtresse frivole que les Poèmes à Lou. Les dernières lettres connues datent de janvier comme celui qui a choisi de vivre discrètement une nouvelle aventure avec 1916. Madeleine Pagès, sa fiancée d’Oran. Aussi, l’image de Lou comme celle du poète d’« Ombre de mon amour » se voient enrichies et sensiblement modifiées par ces lettres, qui appellent une relecture des Lettres à Lou dont blancs et silences sont enfin comblés. PARUTION OCTOBRE • CORRESPONDANCE • 9782072818738 • SOUS PRESSE 8
Christian Bobin La nuit du cœur photo C. Hélie © Gallimard J’ai perdu ma vie et c’est une profonde satisfaction. Si vous vivez, vous perdez. Il n’y a pas moyen de faire autrement. J’ai adoré un visage de terre cuite que la mort a brisé. J’ai lu des livres sortis des presses du paradis. Les livres sont comme la vie : ils s’éloignent après nous avoir Poète, romancier et essayiste, parlé. De leur passage demeure une couleur, la déclaration de guerre Christian Bobin est né en 1951. d’un rire, l’intelligence d’un silence, un détail. Ce détail se referme sur ” Il vit dans un village de Saône-et- Loire et se consacre à l’écriture. le tout et le protège. Le Très-Bas, prix des Deux-Magots 1992, lui vaudra un large succès. Tout commence à Conques dans cet hôtel donnant sur l’abbatiale du xie siècle Aujourd’hui l’auteur d’une œuvre où l’auteur passe une nuit. Il la regarde comme personne et voit ce que, aveu- importante, il a publié récemment Les ruines du ciel, Un assassin glés par le souci de nous-mêmes et du temps, nous ne voyons pas. Tout ce blanc comme neige, La grande vie, que ses yeux touchent devient humain – vitraux bien sûr, mais aussi pavés, Noireclaire. nuages, verre de vin. C’est la totalité de la vie qui est embrassée à partir d’un seul point de rayonnement. De retour dans sa forêt près du Creusot, le poète recense dans sa solitude toutes les merveilles « rapportées » : des rêves, des visions, mais aussi le désir d’un grand et beau livre comme une lettre d’amour, La nuit du cœur. C’est ainsi, fragment après fragment, que s’écrit au présent, sous les yeux du lecteur, cette lettre dévorée par la beauté de la création comme une fugue de Jean-Sébastien Bach. PARUTION OCTOBRE • 9782072742187 • SOUS PRESSE DERNIÈRE PARUTION : NOIRECLAIRE • FOLIO N° 6498 • 144 PAGES • 6 € Jean Clair de l’Académie française Terre natale photo C. Hélie © Gallimard Contes du crépuscule Ces « Carnets du crépuscule » succèdent à La part de l’ange (2016), Les der- niers jours (2013), Dialogue avec les morts (2011) dans la « Blanche », et aussi à Historien d’art, Jean Clair a été Lait noir de l’aube (2007) et Journal atrabilaire (2006) parus dans la collection Couverture provisoire conservateur du musée Picasso « L’un et l’autre ». à Paris jusqu’en 2005 et membre de l’Académie française depuis Jean Clair continue ainsi son œuvre de diariste en se penchant d’abord sur lui- 2008. Il est l’auteur de très même. « J’habite un corps qui m’est si étranger que je ne sais plus comment en nombreuses études et essais sur sortir — ni comment y rentrer. » l’art contemporain en général et Il évoque à nouveau son enfance en Mayenne, ses parents dont il dresse des Picasso en particulier. portraits émouvants, presque déchirants, la campagne des années quarante et cinquante qui a disparu comme les haies qui la scandaient, revenant ainsi à des thèmes dont ses lecteurs sont familiers. Souvenirs et réflexions s’égrènent le long de séquences aux titres mystérieux et évocateurs comme « L’intrus », « La vitre », « Les papillons », « Le suaire », « La Terre », « Personne »… dans des pages souvent éblouissantes, sur le corps vieilli, les absences, les insomnies, l’Italie, le souvenir des femmes aimées. Jean Clair a un don étonnant pour faire ressentir le tactile, la peau, les pay- sages, et aussi les réactions et émerveillements de l’enfant qu’il fut et que nous, lecteurs, fûmes. PARUTION OCTOBRE • 9782072818882 • SOUS PRESSE DERNIÈRE PARUTION : LA PART DE L’ANGE • COLLECTION BLANCHE • 416 PAGES • 26 € 9
LITTÉRATURE FRANÇAISE Benoît Duteurtre En marche ! photo F. Mantovani © Gallimard À 28 ans, Thomas faisait partie du bataillon de nouveaux élus déci- dés à transformer le pays. Porté par l’ardeur des missionnaires, il désirait se rendre dans les usines et dans les quartiers populaires pour expli- quer les nécessaires évolutions. […] Rien ne le faisait souffrir comme ces regards hostiles d’irréductibles adversaires qui dédaignaient ses Journaliste, producteur de radio et élans parce qu’il était jeune et puissant, tandis qu’eux-mêmes étaient écrivain, Benoît Duteurtre est né à Sainte-Adresse en 1960. Il vit et pauvres et anonymes. […] Quant à cette « mondialisation » qui effrayait travaille à Paris. Il a récemment tout le monde, ne permettait-elle pas à chacun d’acheter un complet publié Le voyage en France, Zara, d’avoir son téléphone, son ordinateur et de voyager en avion ? Il y Service clientèle, La petite fille et avait mille raisons de se révolter, mais pas au point d’oublier les progrès la cigarette, Les pieds dans l’eau, L’été 76, L’ordinateur du paradis et accomplis. L’important était de se prendre par la main et de travailler Livre pour adultes. « tous ensemble ». ” Thomas, jeune député curieux et constructif, entreprend un voyage d’études en Rugénie. Réformé sous la houlette de l’économiste Stepan Gloss, ce pays est devenu la vitrine du meilleur des mondes possibles entre services privati- sés, cités sans voitures et championnats de la Diversité. Une valise à roulettes en guise de bâton de pèlerin, Thomas s’enchante puis s’étonne devant les contradictions de ce décor idéal : où la pollution des villes est rejetée dans les banlieues ; où la campagne n’est plus qu’un décor vendu à la découpe ; où les vieux Rugènes et leurs habitudes s’opposent aux hipsters épris de tri sélectif… Un clin d’œil à Voltaire et à Orwell inspire cette fable de plus en plus grinçante : quand la déréglementation de l’économie va de pair avec l’hyper- réglementation des libertés individuelles, et quand la guerre s’invite dans le jeu de la communication. Après La petite fille et la cigarette et L’ordinateur du paradis, Benoît Duteurtre réussit le pari de nous faire rire de notre époque. PARUTION OCTOBRE • 9782072705076 • 224 PAGES • 18,50 € DERNIÈRE PARUTION : LIVRE POUR ADULTES • FOLIO N° 6466 • 272 PAGES • 7,25 € Emmelene Landon Marie-Galante photo F. Mantovani © Gallimard Marie-Galante, c’est l’histoire de deux personnes sur une île, de deux voyages, et d’une année qui s’écoule entre les deux. C’est un livre d’amour écrit au présent, dans le présent vif et aigu d’un échange continuel. Le premier voyage à Marie-Galante a lieu en 2016. Paul et Emmie aiment les îles, leur géographie, leur solitude, et poursuivre là pour l’un, la lecture et l’écoute, pour Née en Australie en 1963, l’autre, la peinture et l’écrit. Ils décident de revenir l’année suivante, exactement au ancienne élève de L’École des Beaux-Arts de Paris, Emmelene même endroit. Dans une continuation. Dans le bonheur du dernier amour. Landon vit et travaille à Paris L’année entre ces deux voyages est retranscrite à travers leurs dialogues. Les depuis 1981. Écrivain, peintre, joies, les contrariétés, les activités, leur plaisir à se retrouver, se réveiller le matin traductrice et vidéaste, elle a ensemble, à parler de cinéma, de peinture, d’édition, de musique, dans un flux réalisé des films et publié six livres parmi lesquels Le Tour du monde ininterrompu de pensées et de désir. en porte-conteneurs, La Tache Avec le deuxième voyage, nous retrouvons le premier. Et si Marie-Galante était aveugle et La baie de la Rencontre. une Utopie, une sorte de Youkali, comme dans l’opéra Marie-Galante de Kurt Emmelene Landon est écrivain Weill ? Mais il n’y a pas de Youkali. de Marine. Le livre s’arrête au seuil. PARUTION OCTOBRE • RÉCIT • 9782072821028 • 96 PAGES • 10,50 € DERNIÈRE PARUTION : LA BAIE DE LA RENCONTRE • COLLECTION BLANCHE • 224 PAGES • 18 € 10
Franck Maubert L’eau qui passe photo F. Mantovani © Gallimard Certains jours de chaleur, à la vue des herbes brûlées sous le soleil, ou dans les arbres dépouillés du cœur de l’hiver, dans les eaux scel- lées, je sens monter en moi quelque chose de déchirant, un sentiment de solitude. Alors, il peut m’arriver de parler aux poissons privés de Franck Maubert, né en 1955, parole. Je ne quitterai donc pas cette enfance, cette grande maison de vit à Paris et en Touraine. Il est l’enfance. Comme autrefois, je pourrais danser sous le cerisier. Juste l’auteur de romans et d’essais sur l’art, dont Le Dernier modèle, prix précipiter le temps. Attendre. Attendre comme j’attendais Irmina ren- Renaudot essai 2012, traduits en trer du Paraclet. Attendre comme j’attendrai longtemps un père qui plusieurs langues. n’est jamais venu. Attendre comme j’attendais la visite de ma mère. PARUTION OCTOBRE • RÉCIT • 9782072786563 • 144 PAGES • 13 € ” Michel Onfray photo Jean-Luc Bertini © Flammarion La pensée qui prend feu Artaud le Tarahumara Comme il l’avait fait précédemment avec Gauguin et Segalen aux Marquises, Michel Onfray a suivi les traces d’Artaud au pays des Tarahumaras. En 1936, Artaud cherche au Mexique un remède à l’inéluctable décadence de l’Occident et de Né en 1959, Michel Onfray est l’Orient civilisés, en même temps qu’à ses propres tourments. Pourquoi cet esprit docteur en philosophie. Après libre et souffrant s’intéresse-t-il au Popol-Vuh à une époque où seul Le Capital et avoir enseigné vingt ans dans un lycée technique, il démissionne Freud captivent l’intelligentsia ? Artaud, qui rêve de trouver dans les rites préco- de l’Éducation nationale en 2002 lombiens un moyen de rédemption, rentrera chez lui les mains vides et le cœur pour créer l’université populaire de brûlé au spectacle d’une civilisation anéantie par la chrétienté et la modernité. Caen. Il est l’auteur de plus d’une Quatre-vingts ans plus tard, Michel Onfray découvre à son tour ce qui reste des centaine d’ouvrages traduits dans une trentaine de pays. Tarahumaras et de leurs rites : un peuple acculturé, détruit par la tuberculose et l’électricité, vidé de sa mémoire, promis à la disparition — comme tant d’autres peuples « premiers » décimés par les conquêtes coloniales et religieuses. On retrouve ici la méthode de pensée de Michel Onfray, et sa ligne directrice : marcher sur les pas des grands réfractaires, dans les lieux de leurs visions fonda- mentales et prolonger leur réflexion sur la décadence et la mort des civilisations. PARUTION OCTOBRE • 9782072821073 • SOUS PRESSE La stricte observance Avec Rancé à la Trappe L’abbé de Rancé a vécu un deuil marquant : celui de sa maîtresse, la duchesse de Montbazon, grande libertine morte à l’âge de quarante-cinq ans. Bien des légendes courent autour de cet épisode, rapportées par Chateaubriand et par les chroniqueurs de la Trappe. Ce qui est certain, c’est que l’abbé a rompu bru- talement avec ses pratiques hédonistes, s’est dépouillé de tous ses biens et a refondé l’ordre des Trappistes sur une règle d’une dureté inouïe. Michel Onfray, séjournant à l’abbaye de la Trappe, interroge l’étrange relation à la mort et à Dieu qui motive, encore aujourd’hui, le retrait du monde et l’ex- trême sévérité de la discipline que s’imposent les moines trappistes. Ce texte, d’une vitalité impressionnante, amène également Michel Onfray à évoquer ses propres deuils, celui de son père et celui de sa compagne, compa- rant les effets de la perte sur sa vie d’athée convaincu et sur celle d’un croyant forcené comme Rancé. PARUTION OCTOBRE • 9782072821127 • SOUS PRESSE DERNIÈRES PARUTIONS : NAGER AVEC LES PIRANHAS. CARNET GUYANAIS • COLLECTION BLANCHE • 96 PAGES • 12 € LE DÉSIR ULTRAMARIN. LES MARQUISES APRÈS LES MARQUISES • COLLECTION BLANCHE • 128 PAGES • 13 € 11
LITTÉRATURE FRANÇAISE Mona Ozouf L’autre George photo C. Hélie © Gallimard À la rencontre de George Eliot « Ce livre raconte une rencontre, annoncée, tout au long de la vie, par divers signes énigmatiques. Le plus explicite m’est venu de mon professeur de troisième, Renée Guilloux. À ses élèves adolescentes elle recommandait chaleureusement la fréquentation d’une romancière anglaise, George Eliot, Agrégée de philosophie, directrice et de ses héroïnes. de recherches au CNRS, Mona Ozouf a consacré une bonne J’ai mis longtemps à transformer ce conseil en livre. Celui-ci n’est pas une bio- part de ses recherches à l’école graphie. Mais une promenade dans la forêt des romans, en compagnie d’une publique en France et à la femme supérieurement intelligente, assez brave aussi pour affronter, dans Révolution française. Elle s’est la société victorienne, l’ostracisme social que lui vaut sa liberté de mœurs intéressée aussi à la littérature, notamment dans ses rapports et d’esprit. En gardant, présente à la mémoire, celle qui avait emprunté des avec l’histoire. Mona Ozouf a chemins parallèles : une George encore, Sand, à laquelle Eliot vouait une reçu le prix de la BNF 2014 pour affection passionnée. l’ensemble de son œuvre. Ce voyage buissonnier m’a réservé la surprise de retrouver les questions qui font toujours le vif de nos débats du jour : que dit la morale dans un monde déserté par l’intervention divine ? Comment, entre appartenances et liberté, se construit une identité ? Et peut-on, quand on est une femme, à la fois revendiquer l’égalité et chérir la dissemblance ? Ce sont de grandes interrogations. La merveille est qu’en cheminant avec l’autre George, elles n’ont plus rien d’intimidant. Elles portent des noms, elles ont des visages. Elles font entendre des voix, et celles-ci, toutes discordantes qu’elles puissent être, aident à mieux déchiffrer la vie. » M. O PARUTION OCTOBRE • 9782072802027 • SOUS PRESSE DERNIÈRE PARUTION : DE RÉVOLUTION EN RÉPUBLIQUE . LES CHEMINS DE LA FRANCE • QUARTO • 1376 PAGES • 33 €. Hervé Prudon Devant la mort Hervé Prudon est mort en 2017 d’un cancer annoncé. Les deux derniers mois Écrivain, journaliste et scénariste. de sa vie, il les a consacrés à écrire des poèmes qui témoignent avec lucidité de Hervé Prudon (1950-2017) est l’auteur d’une vingtaine son dernier combat : revendication de la solitude, détachement, conscience de de romans, notamment des la mort qui vient, souci de celle qui reste seule. Ils dessinent au-delà de la mort romans policiers. Il a reçu le prix la personnalité d’un homme radical, porteur d’une douleur existentielle qu’il Louis Guilloux 1995 pour Nadine cherchait à conjurer. Mouque (Série Noire). Écrits dans l’urgence, ces textes brefs et nerveux acquièrent un supplément de vigueur, de force et d’acuité. En dépit des circonstances, des traits d’humour viennent tempérer la sèche gravitée du propos, loin de tout cynisme, de tout pathos. Ce court testament est à la fois une leçon de stoïcisme et un morceau de tendresse humaine à vif. PARUTION OCTOBRE • POÉSIE • 9782072819841 • SOUS PRESSE DERNIÈRE PARUTION : LA LANGUE CHIENNE • SÉRIE NOIRE • 352 PAGES • 16,75 € 12
Dominique Rolin Lettres à Philippe Sollers photo J. Sassier © Gallimard 1958-1980 Je pense à toi avec un émerveillement qui fait comme un point brillant à chaque minute. Nous avons réussi un coup double éton- nant : amour-écriture. En réalité, nous nous aimécrivons, ou bien nous Dominique Rolin (1913-2012) est l’auteure de près de quarante nous écrivaimons. Le renversement peut se faire en toute occasion. Ta ouvrages, principalement des main-moi, ma main-toi, ton stylo sur mon feuillet-corps, mon stylo sur romans parus aux Éditions Denoël ton cahier-corps. Interchangeabilité prodigieuse, rieuse, fantastique et aux Éditions Gallimard. Elle a de tous nos envers et nos endroits mélangés. Chance unique. Aucun ” reçu le prix Femina en 1952 pour Le Souffle. Elle a été juré du prix exemple comparable au nôtre. Femina et du prix Roger-Nimier et Dominique Rolin, lettre du 13 juillet 1976 membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises Quand ils se rencontrent le 28 octobre 1958, elle a quarante-cinq ans, lui, de Belgique, où elle a succédé à Marguerite Yourcenar. vingt-deux. Il est l’auteur d’un récit et d’un roman célébrés par Mauriac et Aragon, elle a publié en 1942 son premier roman salué par Cocteau et Max Jacob. L’attirance est immédiate et réciproque. Tout va très vite. Cette différence d’âge, impensable, semble-t-il à l’époque, scelle entre les amants un pacte de clandestinité. Ils ne se montreront jamais ensemble ; personne ne se doutera de la nature et de la force de leur relation. Dans ce deuxième volume, l’envers du premier qui présente les lettres de Philippe Sollers, nous donnons près du quart des 892 lettres écrites par Dominique Rolin à Philippe Sollers entre 1958 et 1980. C’est le caractère roma- nesque de cette passion hors du commun qui a guidé notre choix. Nous avons tout simplement voulu raconter une grande histoire d’amour épistolaire. PARUTION OCTOBRE • CORRESPONDANCE • 9782072795428 • SOUS PRESSE DERNIÈRES PARUTIONS : PLAISIRS • FOLIO N° 4008 • 288 PAGES • 8,30 € PHILIPPE SOLLERS, LETTRES À DOMINIQUE ROLIN • BLANCHE • 400 PAGES • 21 € Andrea Salajova En montant plus haut Née en 1974, Andrea Salajova Ce roman nous transporte en 1955 dans la Tchécoslovaquie communiste. vit et travaille à Paris. Passée de Jolanna, une résistante slovaque dont le régime se méfie, se voit confier la déli- l’écriture cinématographique à la littérature, son premier roman, cate mission de mettre au pas un village de montagne rétif à la collectivisation Eastern, est paru en 2015 aux des terres. On lui adjoint un de ses vieux amis dans la résistance au nazisme, un Éditions Gallimard. Tzigane aussi suspect qu’elle aux yeux du régime communiste. Réussiront-ils à convaincre le village ou, dans le cas contraire, à sortir vivants du piège tendu par les commissaires politiques lancés à leur trousse ? Axée autour du personnage central de Jolanna, femme de caractère, intègre et indomptable, pour laquelle le lecteur ne peut que prendre fait et cause, l’his- toire est passionnante, le portrait de femme saisissant et le climat politique de cette période remarquablement rendu. PARUTION OCTOBRE • ROMAN • 9782072801839 • SOUS PRESSE DERNIÈRE PARUTION : EASTERN • COLLECTION BLANCHE • 240 PAGES • 17,90 € 13
LITTÉRATURE FRANÇAISE L’INFINI Michaël Ferrier François, portrait d’un absent photo F. Mantovani © Gallimard Ça arrive comme une vague. Cette nuit-là, j’ai compris ce qu’était une voix blanche. La voix de Jérôme était blanche. Maintenant, les souvenirs affluent. Ça arrive comme une vague. Michaël Ferrier vit à Tokyo où La voix est blanche et la chambre est noire. La maison est endormie il enseigne la littérature. Il est l’auteur de plusieurs essais dans le froid de décembre. L’hiver de Tokyo est toujours sec et froid : il et romans, dont Tokyo : Petits ne te protègera pas. Le téléphone sonne. La mort surgit souvent ainsi, portraits de l’aube, Sympathie pour en pleine nuit. C’est un hurlement, ou un appel. L’écran lumineux m’in- le fantôme, Fukushima : Récit d’un dique que c’est Jérôme et que l’appel vient de Paris, mais la voix au bout désastre et Mémoires d’outre-mer, parus dans la collection « L’Infini ». du fil semble n’appartenir à personne et n’être reliée à rien. Elle est étrange, cette voix, elle n’est pas tout à fait calme, elle garde son calme, ce qui n’est pas la même chose. Elle est aux prises avec quelque chose d’immense et de profond — quelque chose comme une lame de fond. ” Une voix blanche, surgie au milieu de la nuit, annonce à Michaël Ferrier la mort de son ami François et de sa fille Bahia. Dans la dévastation, la parole reprend et les souvenirs reviennent : comment deux solitudes, jeunes, se rencontrent, s’écoutent et se répondent ; les années d’études, d’internat ; la passion du cinéma, de la radio : la mémoire se déploie et compose peu à peu une chronique de l’amitié, un tombeau à l’ami perdu. Entre France et Japon, Michaël Ferrier redonne vie aux fantômes, aux absents, aux disparus. Il confère aux choses et aux êtres une sombre beauté, celle de la passion de l’amitié. PARUTION AOÛT • L’INFINI • 9782072801426 • 256 PAGES • 20 € DERNIÈRE PARUTION : MÉMOIRES D’OUTRE-MER • L’INFINI • PRIX FRANZ-HESSEL • 352 PAGES • 21 € Mathieu David Barcelone brûle “ D’après toi, pourquoi Barcelone est une ville libertaire ? ” me demande Edgar. Cette ville a une énergie folle, dis-je, un feu anime ses photo D.R. rues baignées de soleil. Elle a l’expérience des rébellions. Les femmes sont à l’aise, le regard fier. Le climat est favorable. La jeunesse s’y réjouit… Barcelone, grande enchanteresse ! Mathieu David est né au Québec. Port ouvert sur la Méditerranée, elle a brûlé plusieurs fois au cours de Il a atterri à Paris en 2002. Après ” quelques semaines passées ses 2 000 ans, elle brûlera encore… à la Sorbonne, il fait le pari de l’aventure. Il vit actuellement Ces chroniques sont l’œuvre d’un voyageur qui habita à Barcelone au début à Florence en Italie. Barcelone brûle du xxie siècle. Un jeu de chapitres où des expériences vécues alternent avec des est son premier livre. tableaux de la ville ardente. On y trouvera un relevé condensé de l’histoire de la cité, un portrait de Picasso adolescent crayon en main, une vision d’avant- guerre de Georges Bataille, des réflexions sur la révolution de Simone Weil, le déploiement anarchiste en 1936 et ses suites pratiques, leurs homonymes d’aujourd’hui dans le feu de la répression, le coup d’œil d’Orwell, une église moderniste, ainsi qu’une promenade avec Jean Genet dans les bas-fonds disparus du Barrio Chino. En contrepoint, je raconte ma découverte de Barcelone en 2003, au soleil d’une ruelle pavée d’Africaines alors que je débutais un long voyage ; puis mon retour plus durable en 2007, plongé dans une ville en fête. S’y joignent des lectures, quelques amis et des filles florissant mon style de vie barcelonais. M. D. PARUTION OCTOBRE • CHRONIQUES • 13 ILLUSTRATIONS • 9782072786938 • SOUS PRESSE 14
L’ARBALÈTE Carole Fives Tenir jusqu’à l’aube photo F. Mantovani © Gallimard Puis ç’avait été la colère, pourquoi le père de l’enfant ne restituait-il pas les clés d’un logement dont il ne payait plus le loyer depuis des mois ? Se croyait-il encore chez lui ? Pensait-il qu’on pouvait entrer et surtout sortir d’ici comme dans un moulin ? Que rien ne pouvait chan- Carole Fives est l’auteure ger en son absence, qu’ils n’avaient pas une vie eux aussi ? […] de plusieurs romans et d’un recueil Il fallait régler cette histoire de clés, car après tout, les clés apparte- de nouvelles. Tenir jusqu’à l’aube est son quatrième roman. naient à ceux qui les utilisaient, comme les enfants appartenaient à ceux qui s’en occupaient, et depuis tout ce temps, elle pouvait elle aussi décider quelque chose. […] Elle avait encore ce pouvoir-là, celui de choisir que sa clé à lui désormais n’ouvrirait plus aucune porte. ” Une jeune mère célibataire s’occupe de son fils de deux ans. Sans crèche, sans famille à proximité, sans budget pour une baby-sitter, ils vivent une relation fusionnelle. Pour échapper à l’étouffement, la mère s’autorise à fuguer certaines nuits. À quelques mètres de l’appartement d’abord, puis toujours un peu plus loin, toujours un peu plus tard, à la poursuite d’un semblant de légèreté. Comme la chèvre de Monsieur Seguin, elle tire sur la corde, mais pour combien de temps encore ? PARUTION AOÛT • ROMAN • L’ARBALÈTE GALLIMARD •9782072797392 •192 PAGES • 17 € DERNIÈRE PARUTION : UNE FEMME AU TÉLÉPHONE •FOLIO N° 6450 •112 PAGES • 6 € Michèle Audin Oublier Clémence photo F. Mantovani © Gallimard « Clémence Janet est née le 2 septembre 1879 à Tournus (Saône et Loire). Sa mère était couturière et son père tailleur de pierres. Elle était ouvrière en soie. Elle s’est mariée le 27 février 1897 à Lyon (5e arrondissement) et a donné naissance à deux enfants, Antoine (29 août 1897 – 14 septembre 1897) et Louis Michèle Audin est (13 février 1900 – 23 juin 1977). Elle est morte à Lyon (2e arrondissement) le mathématicienne et écrivain. 15 janvier 1901. » Elle a publié dans la collection « l’Arbalète » Une vie brève (2013) Cent vingt et un jours (2014), Ces cinq phrases sont les traces laissées dans l’état civil par une ouvrière morte Mademoiselle Haas (2016), à l’âge de vingt et un ans au début du vingtième siècle. Comme une rivière bleue (2017). Michèle Audin s’arrête sur chacun des mots de ce court texte et tente de lui faire dire ce qu’il peut lui apprendre du temps, du travail, des lieux, des amis, de la vie de cette femme, ignorée, oubliée comme des millions d’invisibles de son espèce. À chaque mot, elle consacre une page, souvent très courte. Les renseigne- ments infimes qu’elle a recueillis permettront-ils de ne pas oublier Clémence ? PARUTION OCTOBRE • RÉCIT • 9782072821172 • 72 PAGES • 10 € DERNIÈRES PARUTIONS : COMME UNE RIVIÈRE BLEUE • L’ARBALÈTE/GALLIMARD • 400 PAGES • 23,50 € UNE VIE BRÈVE • FOLIO N° 6048 • 192 PAGES • 7,25 € 15
Vous pouvez aussi lire