Livrer les urbains 30/ - n 413 - aua/Toulouse
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LA REVUE www.urbanisme.fr PROJET Marseille, le nord a du ressort 15/ PLANÈTE Miami, métropole tropicale 22/ n° 413 avril juin mai L’INVITÉ Alexandre Chemetoff 70/ 2019 20 * villes / sociétés / cultures Ce numéro est celui de Yann Cabrol DOSSIER Livrer les urbains 30/
LA REVUE villes / sociétés / cultures ÉDITO 176, rue du Temple 750 03 Paris Tél. : (33) 01 45 45 45 0 0 w w w.urbanisme.fr urbanisme@urbanisme.fr La nécessaire adaptation Directrice de la publication Sophie Vaissière Rédacteur en chef au changement climatique Antoine Loubière urba.loubiere@orange.fr Rédacteur en chef adjoint et responsable du développement L orsque nous avons rencontré Alexandre Chemetoff, le 5 juin dernier, dans son Jean-Michel Mestres urba.mestres@orange.fr atelier de Gentilly pour notre rubrique « L’invité », la pluie tombait d’abondance Secrétaire de rédaction et résonnait sur la serre horticole qui lui sert de bureau. Il faisait presque et responsable d’édition frais et le paysagiste nous expliquait que, par grande chaleur, l’arrosage de la Frédérique Chatain urba.chatain@orange.fr terre et des plantes autour permettait de rafraîchir l’atmosphère… Entretemps, Les titres, inter titres et nous l’avons croisé aux Entretiens de l’aménagement à Toulouse (cf. page 6), où chapeaux relèvent de la seule il a plaidé une nouvelle fois pour « ménager le territoire » et fonder les projets à responsabilité de la rédaction. partir du « déjà-là ». Deux jours plus tard, la France était à moitié paralysée par la Gérante Sophie Vaissière canicule. Le changement climatique est entré Ser vice abonnements dans nos vies et il n’est pas près d’en ressortir. Ce numéro est celui de Yann Cabrol et publicité Le Club Ville Aménagement l’avait bien anticipé Emmanuelle Lebrun en intitulant sa séance plénière de clôture « Les Ligne directe : 01 45 45 4 0 0 0 urbanisme.abos@orange.fr aménageurs face au changement climatique ». Abonnement Un débat introduit par une vidéo choc de Valérie Tarif 1 an : 110 euros Masson-Delmotte, paléoclimatologue française, w w w.urbanisme.fr membre du Haut Conseil pour le Climat, qui Conception graphique, réalisation copréside le groupe n° 1 du GIEC. Plaidant pour Etat d’Esprit-Stratis « une transition éthique et juste », la chercheuse 35, boulevard de Strasbourg 75010 Paris exhortait l’assistance à repenser l’aménagement w w w.etat-desprit.fr des villes, en insistant sur le fait que « chaque Président choix compte ». Pour Pierre Ducret, président Grégoire Milot de l’Institute for Climate Economics (I4CE1), la Chef de projet Julie Teurnier conclusion est claire : même si le réchauffement était limité à + 1 °C ou + 1,5 °C – ce qui est peu Création et direction ar tistique Catherine Lavernhe probable –, la priorité est « l’adaptation » au Mise en page changement climatique qui en découle. Or, « la Hélène Doukhan France est en retard sur la question de l’adap- Diffusion en librairie tation », comme le souligne le récent rapport Dif ’Pop 81, rue Romain Rolland des sénateurs Ronan Dantec et Jean-Yves Roux 93260 Les Lilas pour la Délégation à la prospective du Sénat 2 . Tél. : 01 43 62 08 07 Télécopie : 01 43 62 07 42 Certes, des collectivités ont pris le problème Impression à bras-le-corps, mais, en dernière instance, a Imprimeries SNAG & Centrale souligné Pierre Ducret, « le facteur principal sera Avenue du Cantipou Parc de l’Estuaire la cohésion sociale ». D’où la nécessité d’une 7670 0 Har fleur transition « juste », comme le mouvement des Origine du papier : Belgique 29 juin 2019, Toulouse « gilets jaunes » l’a rappelé à sa manière. Taux de fibres rec yclées : 0 % © Alain Pitton/NurPhoto/AFP Forum Dans ce cadre, les aménageurs peuvent contri- Eutrophisation : Ptot 0 k g /tonne buer à « nous faire atterrir », pour reprendre les termes de Bruno Latour3 . Ceux présents au débat, Henri Specht (Solideo), Roman Champy (Oppidea) et Virginie Vial (Samoa), ont revendiqué la prise de conscience, mais reconnu qu’ils étaient parfois « mal à l’aise » et que « le lieu du débat », en particulier avec les habitants, n’avait pas encore été trouvé. Bref, des acteurs pleins de bonne volonté, mais confrontés à une question qui les dépasse. Pourtant, chaque choix compte, y compris pour les acteurs de la logistique urbaine à laquelle nous est éditée par la SARL consacrons, pour la première fois, un dossier. / Antoine Loubière Publications d’architecture et d’urbanisme au capital de 532 50 0 euros ! Think tank ayant vocation à fournir aux décideurs publics et privés une expertise sur les (actionnaire : Caisse des Dépôt s) RCS Paris : 572 070 175 questions économiques et financières liées à la transition énergétique et écologique. Commission paritaire n° 1020 T 87 217 Pierre Ducret est contrôleur général et conseiller climat du groupe Caisse des Dépôts. ISSN : 124 0 - 0 874 @ Cf. la synthèse du rapport en ligne : www.senat.fr/rap/r18-511/r18-511-syn.pdf Code T VA : FR-1357-2070175 Dépôt légal : à parution # Cf. son ouvrage Où atterrir ? Comment s’orienter en politique, La Découverte, 2017. 3 no 413
17 PORTFOLIO SOMMAIRE En Inde, un quartier signé Balkrishna Doshi par Arthur Crestani (textes et photos) 22 PLANÈTE Miami, métropole tropicale par Éric Firley © Gilles Bassignac/Divergence 6 BRUITS DE VILLE Des Entretiens « pas chiants » par Antoine Loubière 8 Notre-Dame de Paris, Ce numéro est celui de Yann Cabrol éloge de la lenteur par Jean-Michel Mestres © Qiazi Chen 10 GRAND PRIX DE L’URBANISME Patrick Bouchain 10 HOMMAGE Max Querrien (1921-2019) 11 RECHERCHE DOSSIER Popsu Métropoles, séminaires en série par Antoine Loubière 12 PROJET 30 Livrer les urbains « Réparer la ville » 31 Édito par Antoine Loubière par Jean-Michel Mestres 13 Scinder les grandes copropriétés par Nicolas Binet © François Lafite/Divergence 15 Marseille, le nord a du ressort par Laure Portalé et Lina Raad © Philippe Conti En couverture : © Alistair Berg/GettyImages 4 no 413
58-60 La livraison des derniers mètres par Alia Verloes, François Adoue, Alina Bekka et Nicolas Louvet 61 Les hyper lieux de la logistique par Christine Chaubet, Neïla Saidi et Antoine Maréchal 62-65 Une bande dessinée de Laetitia Dablanc, Neïla Saidi et Antoine Maréchal (IVM–Vedecom) © Vailog-Segro 32-34 Le paysage mondial de la logistique urbaine par Jean-Paul Rodrigue 35-38 Les interventions encore timides des villes européennes par Laetitia Dablanc Ce numéro est celui de Yann Cabrol 39-41 Analyser les flux par Mathieu Gardrat et Florence Toilier © Antoine Maréchal 42-45 La dualisation logistique du Grand Paris par Adeline Heitz 66-68 La ville lisse, flux et points d’ancrage © Sogaris de l’e-commerce à Buenos Aires par Andrea Gutiérrez, Laura Ziliani (photos) et Andrés Borthagaray 69 Références 46-47 « L’outil ferroviaire doit enlever des camions à la route » Entretien avec Guillaume Aubert (Sogaris) 48 « La balle est dans le camp des transporteurs » Entretien avec Michel Duchène (Bordeaux Métropole) 49 Un parc logistique XXL dans le Cambraisis par Jean-Michel Mestres 50-53 Les innovations technologiques réorganisent la logistique urbaine par Jérôme Libeskind © Cyrille Robin © VNF 70 L’INVITÉ Alexandre Chemetoff 78 LIBRAIRIE 83 AUTEURS 54-57 Livrer par la Seine par Jean-Michel Mestres 5 noo 413
BRUITS DE VILLE / Des Entretiens « pas chiants » La 9e édition des Entretiens de l’aménagement, organisée à Toulouse les 20 et 21 juin, a permis de larges échanges sur la fabrication de la ville, à l’heure des « gilets jaunes » et du changement climatique. A riella Masboungi, architecte et urbaniste (Grand des no where, seraient plutôt des in between au cœur Prix de l’urbanisme 2016), a réussi son pari : la finalement d’un zapping territorial, qui a un coût social, « ville pas chiante » était sur toutes les lèvres spatial et écologique élevé. durant les deux jours des Entretiens de l’amé- Face à ces constats quelque peu pessimistes, Jean-Luc nagement. Cette notion provient d’un groupe de travail du Moudenc, le maire de Toulouse, président de la Métropole Club Ville Aménagement, que nous avions pudiquement de Toulouse et de l’association France urbaine, a plaidé appelé « Comment générer une ville plus stimulante ? » lors résolument pour le développement de la coopération entre Ce numéro est celui de Yann Cabrol de sa constitution en 20161. Car le Club a pour particularité les métropoles et les territoires ruraux et périurbains, de définir tous les trois ans un programme de travail en proposant que l’ingénierie métropolitaine puisse être avec des groupes thématiques réunissant aménageurs, mise à leur disposition. experts et chercheurs pour approfondir la réflexion. Ce De son côté, Gisèle Rossat-Mignod, directrice du réseau sont les conclusions de ces groupes de travail qui sont de la Banque des Territoires (Caisse des Dépôts) 3 a assuré mises en débat lors des Entretiens de l’aménagement en que l’établissement financier s’intéressait désormais à tous même temps que des questions plus liées à l’actualité. les territoires, et pas seulement aux grandes villes, avec Cette année, à Toulouse, les séances plénières ont porté, le souci d’identifier « des projets qui ont du sens » et la pour celle d’ouverture, sur « Faire projet à l’échelle des volonté de les soutenir, notamment en termes d’ingénierie. grands territoires périurbains » et, pour celle de clôture, sur « Les aménageurs face au changement climatique ». LA « VILLE PAS CHIANTE » Entre les deux, un programme très dense d’ateliers à la Pour cette 9 e édition, les Entretiens de l’aménagement carte, dont nous ne retiendrons ici que ceux sur la « ville avaient fait évoluer leur format, multipliant les ateliers pas chiante » et les appels à manifestation d’intérêt (AMI). liés aux thématiques des groupes de travail : « économie », « ville pas chiante », « ville et travail », « réparer la ville » LES « GILETS JAUNES » (cf. page 12), « fabrique réglementaire », « ville numérique », L’animatrice, la journaliste Catherine Sabbah, a placé le « ville incluante 4 ». Sans oublier un atelier très interrogatif, premier débat sous le signe des « gilets jaunes » et des « La forme urbaine est-elle déterminée par les conditions franges des territoires métropolitains, là où justement les économiques de sa réalisation ? », et un autre consacré à aménageurs publics regroupés dans le Club n’interviennent la ville colombienne de Medellín, où le Club avait organisé pas ! Au grand regret de Laurent Théry, ancien président un voyage d’étude l’été 2018. du Club 2 , qui constate qu’on « a fait la ville de qualité dans En ouverture, Éric Bazard, le président du Club, avait les grandes opérations urbaines », au sein des périmètres incité les aménageurs à avoir « les pieds dans la glaise institutionnels des grandes agglomérations. Les « gilets et la tête dans les étoiles ». Pari tenu, notamment pour jaunes », eux, sont des « figures de l’étalement la filière « ville pas chiante » qui s’articulait urbain », victimes indirectes de l’émiettement en différents débats. Celui animé par Ariella communal, confrontés à l’augmentation des Il y a bien Masboungi avec la participation de Philippe coûts des trajets domicile-travail, à l’absence « crise de Close, le dynamique et imaginatif maire de d’équipements publics et aux centralités par l’entre-deux Bruxelles, des paysagistes Jacqueline Osty et défaut que sont les centres commerciaux et territorial » Alexandre Chemetoff, était plutôt du côté des les ronds-points qui y mènent. Pour Aurélien étoiles avec des concepteurs qui ont une capa- Delpirou, enseignant chercheur à l’École d’urbanisme cité à proposer un imaginaire. D’autant que les définitions de Paris, il y a bien « crise de l’entre-deux territorial » ; proposées par la conceptrice des ateliers Projet urbain des enquêtes sociologiques permettent de mieux cerner de ladite « ville pas chiante » accumulent les qualificatifs les ressorts de la révolte des « gilets jaunes », la grande sympathiques : « évolutive », « permissive », « productive, diversité sociale des personnes occupant les ronds-points équitable et inclusive », « où le calme est une valeur et (classes moyennes et populaires), la surmotorisation de la règle dépassable », « qui joue des temporalités sans ces ménages. perdre de vue le long terme », « qui combine le grand Or « ces multimobilités ont un coût ». Et alors que les ter- et le petit »… En fait, « une ville qui n’est jamais finie », ritoires français peuvent se définir comme des « chaînes selon la formule de Bernard Reichen, pour échapper aux d’interdépendances », les « gilets jaunes », loin d’être modèles génériques. 6 no 413
Des Entretiens « pas chiants » /BRUITS DE VILLE Au pupitre, Philippe Close, le maire de Bruxelles ; à la tribune (de g. à d.), Alexandre Chemetoff, Jacqueline Osty et Ariella Masboungi © Thibaut Plaire/CVA L’atelier « Les AMI : accélérateurs de la “ville pas chiante” ? » avait le mérite de rentrer plus précisément dans ces proces- sus concrets de fabrication de morceaux de villes, qui font aujourd’hui l’actualité, comme vient d’en témoigner la proclamation des lauréats de la consultation « Inventer la Métropole du Grand Paris 2 ». Lors de cet échange animé par l’architecte urbaniste Antoine Petitjean, Jean-Luc Charles, direc- teur général de la Samoa – qui aménage l’île de Nantes –, a reconnu que « les AMI bousculent les aménageurs » et offrent aux pouvoirs publics des moyens de renouveler leurs approches. Il y voit une reprise du Ce numéro est celui de Yann Cabrol montage financier des PPP (partenariats public-privé) et des pratiques de la nouvelle économie (rôle ces Entretiens de l’aménagement particulièrement riches, de start-up). Mais certains aspects l’inquiètent, notamment suivis par une assistance nombreuse. D’ici la prochaine le fait que « les propositions fixent une intention, sur- édition – en 2022 ? –, le Club a du travail devant lui pour gissent d’une image dont les groupements lauréats sont cerner le futur rôle des aménageurs dans la fabrication ensuite prisonniers ». De son côté, Max Castro, directeur d’une ville certes « pas chiante », mais surtout partie pre- des grands projets urbains de la Compagnie de Phalsbourg nante de la transition écologique./ Antoine Loubière – un des opérateurs révélés par les AMI –, défend évi- demment ces démarches « qui ont rebattu les cartes de ! Cf. « La fabrique de la ville en quête de nouvelles pratiques », Urbanisme, la hiérarchie des acteurs de l’immobilier ». Selon lui, s’il n° 402, automne 2016. @ Laurent Théry, Grand Prix de l’urbanisme 2010, a notamment dirigé la y a bien une forme de délégation de fonctions publiques société d’aménagement de l’île de Nantes (Samoa) et la SEM Euralille. Il au privé, elle se fait dans le cadre d’un vrai cahier des a été préfet délégué au projet de création de la Métropole Aix-Marseille charges. L’investisseur-promoteur souligne également que Provence de 2012 à 2016. « les AMI ont remis les architectes au cœur du projet », # La Banque des Territoires était avec le Puca un des principaux partenaires d’où la qualité architecturale des propositions. des Entretiens. $ Sous le titre Aménager sans exclure, faire la ville incluante, le Club a publié aux LES AMI, FAUX AMIS ? éditions du Moniteur un ouvrage réalisé sous la direction de Jean Badaroux, Gwenaëlle d’Aboville, Jean Frébault et François Ménard (cf. Urbanisme, n° 410, Sur la base de son expérience de l’île de Nantes, Jean-Luc automne 2018). Charles relève que « la présence de collectifs, d’associa- tions, de start-up – élément déterminant des offres – a du mal à tenir dans la durée » (la livraison d’une opération Le Club Ville Aménagement prend 48 mois !). D’où un risque « de dégradation des projets » avec « une mise en usage non conforme à la Présidé par Éric Bazard, directeur général de la Société publique locale promesse initiale » (exemple des copropriétés). Ce qui (SPL) des Deux-Rives à Strasbourg, le Club Ville Aménagement a été doit conduire l’aménageur « à repousser les limites de son fondé en 1993. Il regroupe une quarantaine de structures publiques activité vers l’aval ». Pour Max Castro, « tous ces groupe- d’aménagement, ainsi que des organismes associés (fédérations ments sont confrontés au passage d’une économie de la professionnelles et entreprises). Il accueille en tant que partenaires subvention à une économie réelle ». Mais le sujet le plus de droit un représentant de la Direction générale de l’aménagement, compliqué lui paraît « la traduction juridique des inten- du logement et de nature (DGALN), un du Plan urbanisme construction tions ». Débat passionnant qui n’en est qu’à ses prémices. architecture (Puca) et un du Conseil général de l’environnement Avec, comme conclusion provisoire de Jean-Luc Charles : et du développement durable (CGEDD), liés au ministère de la Cohésion « Les AMI sont un outil polymorphe où le contexte est des territoires. Son nouveau secrétaire général est Stanislas Mahé, déterminant. » L’aménageur doit les avoir dans sa panoplie, 41 ans, qui anime depuis quinze ans des réseaux d’acteurs publics en tout cas pour un certain type d’opération, à des échelles et privés, principalement dans la métropole nantaise. Il a succédé assez petites (reprise de friches, d’anciens bâtiments…), et à Marie-Claude Dalibard. pour le déploiement de nouveaux usages, en particulier Outre les Entretiens de l’aménagement, le Club organise des séances dans le cadre d’un urbanisme provisoire. de débats, les « 5 à 7 », préparées et animées par Ariella Masboungi. L’interrogation sur les AMI n’est qu’une illustration des Le prochain « 5 à 7 » aura lieu le 24 octobre 2019 avec, comme invité, réflexions conduites à Toulouse. La dernière séance Patrick Bouchain, Grand Prix de l’urbanisme 2019. plénière sur le changement climatique, le 21 juin – avant www.club-ville-amenagement.org/index.php la canicule qui a suivi –, a ajouté son lot d’incertitudes à 7 no 413
/ Notre-Dame de Paris, éloge de la lenteur Dix jours après l’incendie de Notre-Dame de Paris, le centre Pompidou organisait un débat sur la reconstruction. Ces échanges n’ont rien perdu de leur pertinence. L e 25 avril, l’émotion ne s’est pas éteinte. Pas simple les relations que ces objets créent entre eux. Il voit dans de prendre de la distance au cœur de ce que la reconstruction de Notre-Dame l’occasion formidable Jean-Marie Durand, l’animateur du débat, désigne d’imaginer non pas un projet d’objet, mais un projet de comme « l’émotion patrimoniale », reprenant à vécu. « Partons de l’expérience du croyant, du Parisien, son compte l’expression de l’anthropologue Daniel Fabre. du visiteur, du touriste et considérons que le site fait Ce numéro est celui de Yann Cabrol Deux jours après l’incendie, alors que les promesses de 4 ha, 7 ha si on compte l’Hôtel-Dieu, aujourd’hui vide. dons affluent, le président de la République fixe comme Si on prend le temps, ce devrait être le périmètre de la objectif une reconstruction en cinq ans et le Premier consultation plus que l’objet architectural lui-même. » ministre avance l’idée d’un concours international d’ar- Pour Umberto Napolitano, architecte cofondateur de chitecture pour reconstruire la flèche de Notre-Dame. l’agence LAN, l’urgence est de remettre en fonction le Il est question de créer un établissement public pour monument, avec une toiture, de prendre le temps de la mener l’opération et un projet de loi est en préparation. réflexion et « d’attendre le bon projet, peut-être aussi Des annonces qui rassurent certains et en une vision plus large qui insère Notre-Dame inquiètent d’autres. Quelques jours plus tard, dans un projet urbain ». Pour le Grand un millier d’experts internationaux signent La trace de la Palais, dont il assure la restauration, les une pétition appelant à une restauration catastrophe peut études ont commencé en 2012, et le chantier « sans précipitation ». être sublimée dans ne finira pas avant 2024, alors qu’il est moins Cette même tonalité domine au centre la reconstruction complexe que celui de Notre-Dame et qu’il Pompidou. Marie-Jeanne Dumont, archi- ne fait pas suite à un accident. « Ce temps est tecte et historienne, ancienne secrétaire générale de nécessaire pour nouer le dialogue avec les institutions, la Commission du Vieux Paris 1 , a été bouleversée par l’État, les occupants, les citoyens. » Il reste serein : « Le l’incendie, puis « consternée » par les premières annonces. débat va se calmer car les procédures sont très longues. Elle espère que « le temps des experts va venir, ceux qui Aujourd’hui, on en est à faire les expertises pour com- restaurent tous les jours des monuments et connaissent le prendre les origines de l’incendie. Cela va prendre six problème ». Le sociologue Jean-Louis Violeau, chercheur mois. Ensuite, il y aura le temps de l’organisation d’un en architecture, s’attarde sur la fonction collective de concours. Le temps de la réflexion viendra de lui-même. » l’événement et la réversibilité de ses modalités : « C’est au moment même où on la rénovait, et du fait même de sa TOUT LE MONDE rénovation, qu’elle a été détruite. » Cette rénovation étalée A UNE OPINION dans le temps et cette destruction incarnent la difficulté Rares sont ceux qui défendent la possibilité d’une « Notre- à donner un sens à un destin collectif et nous renvoient à Dame des ruines 2 ». « Une ruine, c’est un processus, notre vulnérabilité : « Le patrimoine n’existe pas, il n’est explique Marie-Jeanne Dumont. Pour la conserver, il faut qu’une construction collective », reprend Jean-Louis la restaurer en tant que ruine. » Jacques Ferrier juge Violeau. La gémellité des tours de Notre-Dame et la simi- sinistre l’idée de rester face à l’accident. « En revanche, la larité avec les tours du World Trade Center lui rappellent la durée du chantier peut être l’occasion plus joyeuse d’en phrase de Baudrillard : chaque ville présuppose la forme garder la trace. Faisons du temps du chantier l’occasion de la catastrophe qui lui arrive. de restaurer une relation entre la technique, la construc- De son côté, l’architecte Jacques Ferrier est frappé « par tion, le monde manuel, l’architecture et le grand public. la confrontation entre l’accélération du temps dans les La trace de la catastrophe peut être sublimée dans la discours, et le temps de l’architecture ». S’inspirant du reconstruction du moment qu’on se donne le temps de géographe Michel Lussault, il voit dans Notre-Dame un la faire. » hyper lieu. « C’est l’occasion de repenser l’insertion de la La difficulté, note Jean-Louis Violeau, est que Notre-Dame cathédrale dans la ville. Était-elle réussie ? » À son avis, de Paris coche toutes les cases : « l’affectif, les amoureux pas du tout. « L’expérience de la visite était chaotique et de Paris, le cyclique, l’esthétique, la technique et même inconfortable », avec 12 millions de visiteurs par an. Plus le kilomètre zéro à partir duquel sont calculées les dis- que de concevoir des objets, l’architecture doit imaginer tances au départ de Paris ». Sauf que le débat se cristallise 8 no 413
Notre-Dame de Paris, éloge de la lenteur /BRUITS DE VILLE déjà de manière caricaturale entre anciens et modernes, frileux contre courageux, conservateurs contre innovateurs. « On est obligé de prendre position, regrette Jacques Ferrier. Le projet doit être l’occa- sion de nommer les choses, de poser les questions dans d’autres termes que ceux du xix e siècle. Donnons de l’ampleur, de la profondeur et de la transversalité à ce débat. Ne prenons pas le mauvais côté de l’accélération. » Une voix pas simple à faire entendre dans le brouhaha médiatique. « Tout le monde a une opinion et un projet dans le tiroir. C’est absurde », regrette Umberto Napolitano. C’est faire fi des efforts entrepris depuis quelques années pour réutiliser massive- ment le bois dans la construction et pousser à la création d’une filière. « Au xix e siècle, on a reconstruit Chartres en acier, à une époque où il était à la mode. Reims a été Ce numéro est celui de Yann Cabrol refaite en béton après la Première Guerre Notre-Dame de Paris, mai 2019 © Gilles Bassignac/Divergence mondiale », rappelle Jean-Louis Violeau. Aujourd’hui, le bois a le vent en poupe. C’est sur la charpente (la fameuse « forêt ») que se cristallise une devient collectif, c’est qu’il ne raconte pas ses origines. partie du débat. Ce n’est rien à côté de la flèche ajoutée Notre-Dame ne parle pas du Moyen Âge, elle est cette par Viollet-le-Duc, dont la chute a frappé les esprits. stratification de moments qui dépassent l’architecture et racontent la société », remarque Umberto Napolitano. LAISSER MÉTABOLISER Le débat qui s’installe, regrette Jacques Ferrier, est orphe- LE PHÉNOMÈNE lin du lien entre l’architecture et les grandes croyances Le débat n’échappe pas à la bataille du goût. « Il faut être collectives. D’où l’importance de la lenteur. « Il faut laisser honnête, de mon point de vue, la flèche était horrible. métaboliser le phénomène : reconstruire a minima et Pourtant, plein de gens l’adorent », reconnaît Umberto voir ensuite où l’on va », insiste Umberto Napolitano. Napolitano qui cite Roland Barthes : « Il faut accepter « Évidemment, il faut dire qu’on va reconstruire, qu’on Notre-Dame, celle de Victor Hugo et celle de Paris, avec va faire un concours. Mais la contingence est autre. » sa vulgarité et son génie. » Dans son livre L’Architecture Marie-Jeanne Dumont émet un souhait : que le public de la ville, l’architecte italien Aldo Rossi parle des per- se saisisse du sujet. « C’est une affaire de démocratie manences que sont les monuments qui s’assemblent pour citoyenne. » S’agissant d’un monument qui porte le devenir la ville : « Elles passent par un système formel beau nom de Notre-Dame de Paris, c’est bien le moins./ qui exprime une force par lui-même », résume Umberto Jean-Michel Mestres Napolitano. « Moi, j’adore Viollet-le-Duc, répond Jacques Ferrier. Beaucoup de choses fausses ont été dites sur lui, ! Comité consultatif présidé par la maire de Paris. on l’a accusé de pastiche. Il n’a jamais revendiqué de @ Par exemple, le philosophe Paul B. Preciado dans Libération du 19 avril 2019. reproduire à l’identique. Il est génial parce qu’il arrive à innover, à exprimer l’esprit du xix e siècle – c’est pour cela que je veux conserver cette flèche – et à se couler Franck Riester : pas de précipitation habilement dans l’histoire anonyme de cette cathédrale sans auteur. » À l’occasion du lancement de la Biennale de l’architecture « Il ne faut pas séparer la flèche du reste, ajoute Marie- et du paysage (BAP), à Versailles, le 3 mai, Franck Riester a voulu Jeanne Dumont. Elle est le couronnement d’une cathédrale rassurer les professionnels, les architectes en premier. « Oui, nous que Viollet-le-Duc a largement réinventée, sur des bases restaurerons Notre-Dame de Paris, mais ne confondons pas vitesse historiques. Il a passé sa vie à étudier le Moyen Âge. Il et précipitation. » Le projet de loi pour la restauration et la conservation n’invente pas ex nihilo. Certes, il a réécrit la cathédrale de Notre-Dame est actuellement examiné par le Parlement, et, de notre point de vue d’aujourd’hui, c’est un geste très en procédure accélérée. Le ministre de la Culture annonçait à la BAP violent. Il en a fait la mère de toutes les cathédrales, et il le lancement prochain d’un concours d’architectes pour a demandé que les autres suivent ce modèle. » la reconstruction de la flèche et invitait les architectes et les écoles Umberto Napolitano l’admet : « L’intervention de Viollet-le- à y participer. « Restaurer à l’identique ou faire quelque chose Duc a créé le monument, en faisant ressortir Notre-Dame de nouveau, comme Viollet-le-Duc à l’époque l’avait fait, ce sera du village qui existait autour. » Quand à la réinvention de au maître d’ouvrage de décider. Nous saurons prendre en compte l’avis la flèche, Jacques Ferrier alerte : « Elle sera très difficile à des professionnels : les architectes que vous êtes et les architectes réaliser à une époque où le branding a tout envahi, y com- en chef des monuments historiques »./ J.-M. M. pris l’architecture. » « Ce qui est beau, quand un bâtiment 9 no 413
BRUITS DE VILLE/ / GRAND PRIX DE L’URBANISME Patrick Bouchain Architecte et scénographe, le lauréat 2019 est une figure singulière, rétive aux diplômes et aux classements. A près l’agence TER en 20181, le projets, en particulier pour changer la explicitant ses conceptions. Un jury du Grand Prix de l’urba- conception du logement social. ouvrage paru en novembre 2018, nisme 2019, réuni le 8 avril à Depuis, Patrick Bouchain – asso- Patrick Bouchain, l’architecture l’initiative du ministère de la Cohésion cié avec Nicole Concordet et Loïc comme relation 3 , propose u n des territoires et des Relations avec Julienne dans l’agence Construire inventaire inédit de quelque cent les collectivités territoriales, a choisi – n’a pas cessé de militer pour un cinquante projets qu’il a conçus un tout autre profil avec Patrick ass oup liss ement des normes et le entre 1967 et 2017. C’est la meilleure Ce numéro est celui de Yann Cabrol Bouchain, « figure de proue de la développement de l’expérimentation introduction à l’étonnante créativité transformation de friches indus- en matière architecturale et urbaine. de cet inclassable concepteur, qui est trielles en lieux culturels et pionnier Il a notamment contribué à l’inscrip- la référence de nombreux collectifs de la valorisation des lieux urbains tion du « permis de faire » dans la loi de jeunes architectes, en quête de délaissés », selon les termes du LCAP (liberté de création, architec- pratiques alternatives, et soucieux commun iq ué de presse. Longuement ture et patrimoine) de juin 2016. Pour de coproduire des lieux avec celles interviewé en 2011 dans Urbanisme 2 , « rendre ce permis concret, il a mis en et ceux qui vont les habiter ou les Patrick Bouchain, né en 1945, racontait place une démarche expérimentale utiliser./ A. L. une enfance très marquée par un père d’urbanisme et d’architecture, intitu- décorateur, ses études aux Beaux-Arts lée “La preuve par 7”, en travaillant avant Mai 68, son refus des diplômes, avec sept territoires d’échelles dif- son travail avec Jack Lang au minis- férentes (du bourg au département) ! L’agence TER est composée de trois paysagistes : tère de la Culture, ses chantiers de afin de faire émerger des opérations Henri Bava, Michel Hössler et Olivier Philippe. @ Entretien mené par Thierry Paquot, « L’invité », référence (le Lieu unique à Nantes, sur mesure avec les acteurs de ces Urbanisme, n° 381, nov.-déc. 2011. la Condition publique à Roubaix, la sites », souligne le ministère. # Patrick Bouchain, l’architecture comme relation, piscine Les Bains à Bègles, le pavillon Directeur de la collection « L’impensé » sous la direction d’Abdelkader Damani, postface français à la Biennale d’architecture aux éditions Actes Sud, Patrick de Pierre Frey, Frac Centre-Val de Loire/Actes Sud, de Venise en 2006…) et ses nombreux Bouchain a (co)écrit plusieurs livres 2018, 288 p., 400 ill. HOMMAGE / Max Querrien (1921-2019) G rand serviteur de l’État, directeur de l’architecture Querrien a fait partie du « comité des quatre », groupe au ministère des Affaires culturelles de 1963 à 1968, de hauts fonctionnaires réunis autour du préfet de Paris, sous l’autorité d’André Malraux, Max Querrien, Maurice Doublet, chargé de préfigurer l’Apur. décédé le 29 mars 2019, a été un « personnage clé de la Max Querrien aurait été sensible à ces hommages, car il question architecturale et indirectement de l’urbanisme avait le souci de la transmission. Deux de ses filles, Anne durant la Ve République », soulignait Thierry Paquot en et Gwenaël, ont joué un rôle dans ce sens, l’une dans la introduction d’un long entretien avec lui1. Franck Riester, recherche urbaine 2 , l’autre dans l’information sur l’archi- le ministre de la Culture, ne s’y est pas trompé. Il sou- tecture et les architectes. Haut fonctionnaire non confor- ligne que « l’engagement de Max Querrien en faveur de miste, il sera à l’origine de la réforme de l’enseignement l’architecture et du patrimoine a perduré toute sa vie de l’architecture, qui ne se concrétisera qu’après Mai 68. dans ses fonctions de président de la Caisse nationale des Né à Concarneau, Max Querrien est mort à Paimpol, dont monuments historiques et des sites (1981-1986), aujourd’hui il avait été maire de 1961 à 1995. Une table ronde animée Centre des monuments nationaux, de président de l’Institut par François Chaslin lui rendra hommage le 15 octobre à français d’architecture, ou à travers les ouvrages qu’il l’Académie d’architecture./ A. L. avait consacrés à chacune de ces politiques publiques ». En outre, comme l’a rappelé un communiqué de l’Atelier ! « L’invité », Urbanisme, n° 311, mars-avril 2000. parisien d’urbanisme (Apur), entre 1966 et 1967, Max @ Cf. l’entretien avec Anne Querrien, « L’invitée », Urbanisme, n° 408, avril 2018. 10 no 413
/BRUITS DE VILLE RECHERCHE / Popsu Métropoles, séminaires en série Les quinze métropoles du programme de recherche ont commencé leurs travaux, avec des séminaires comme celui organisé par Rouen Normandie Métropole. A près u n for u m n ation a l nouvelle centralité métropolitaine », En conclusion, Hélène Peskine, la le 18 ja nv ier der n ier à un sujet que les lecteurs d’Urbanisme 3 secrétaire permanente du Puca, a Strasbourg, le programme connaissent déjà. souligné que si l’ensemble des métro- Popsu Métropoles 1 porté par le Plan Mais au-delà du dialogue avec les poles apparaissent en quête d’un urbanisme construction architecture concepteurs de cette recomposition récit, il y a des différences de matu- (Puca) prend toute son ampleur avec urbaine – Jacqueline Osty pour les quais rité entre les projets métropolitains. Ce numéro est celui de Yann Cabrol un cycle de rencontres « Métropoles rive gauche et l’écoquartier Flaubert, Les travaux du Popsu ont vocation en transition », qui se déroule actuel- Jacques Ferrier pour le siège de la à en rendre compte, en s’attachant lement dans les quinze métropoles Métropole, Marc Mimram pour le futur part ic ul ièr ement à la relation entre concernées 2 . Certains intitulés sont bâtiment « 105 » –, cette rencontre a per- « la métropole et les autres ». Le col- révélateurs des préoccupations affi- mis de s’interroger sur « la métropole loque international « Métropoles en chées, d’autres restent à un niveau performative ». Ce concept est proposé transition », programmé pour début prudent de généralités. par les chercheurs Jean Debrie et Xavier 2020, donnera un premier aperçu sur La Métropole européenne de Lille s’est Desjardins 4 après un premier travail l’ensemble de ces recherches./ A. L. interrogée sur « Ressources, échanges, d’entretiens avec une trentaine d’acteurs gouvernances et interdépendances locaux autour de la question : « Se dire territoriales », Clermont Auvergne métropole, est-ce la faire advenir ? » ! Cf. « Recherche/Trois Popsu », Urbanisme, n° 406, Métropole sur « Documenter pour Les chercheurs répondent positivement automne 2017. Jean-Marc Offner est le président faire métropole », l’Eurométropole de car « le mot oblige à se mettre à sa hau- du conseil stratégique du Popsu, Marie-Christine Strasbourg sur le passage « Du port teur ». La transformation des rives de Jaillet est la responsable scientifique du programme au système métropolitain portuaire », Seine en témoigne, en s’inscrivant dans Popsu Métropoles et Jean-Baptiste Marie est Montpellier Méditerranée Métropole une « reconnexion » entre la ville et son directeur de programme. sur « Métropole, métropolisation et port, soulignée par Jean Debrie. Pour @ Aix-Marseille, Bordeaux, Brest, Clermont Auvergne, Dijon, Grand Lyon, Grenoble, Lille, Montpellier, territoires ». Toulouse Métropole a Frédéric Sanchez, le président de Rouen Nantes, Nice, Orléans, Rouen, Strasbourg, Toulouse. jumelé son séminaire « L’évolution des Normandie Métropole, non seulement # Cf. Urbanisme, hors-série n° 65, novembre 2018. mobilités dans et depuis le périur- il y a eu un effet métropole cinq ans $ Xavier Desjardins est le responsable scientifique bain » avec une journée technique après la loi MAPTAM, mais « le concept du programme Popsu de la Métropole Rouen du Réseau Paysage Occitanie sur de métropole nous aide à réfléchir ». Normandie. « Paysages, trames vertes et bleues, mobilités douces » sous le titre général « Les chemins de la métropole étalée ». À lire Grenoble Alpes Métropole planche sur « La métropole à l’âge du share », La Plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines (Popsu), alors que Dijon Métropole s’intéresse avec ses trois programmes – Métropoles, Territoires et Monde, s’accompagne aux « Regards croisés sur la transition d’un nouveau type de publications, en format de poche pour la version papier : numérique » et que Aix-Marseille- « Les conférences Popsu » proposent déjà quatre ouvrages : Provence Métropole consacre son Alain Bourdin, Être métropole dans un monde incertain ; séminaire inaugural aux « Paysages Jean-Marc Offner, Métropoles invisibles. Les métropoles au défi récits métropolitains ». Le Grand de la métropolisation ; Lyon explore le sujet « Métropoles Magali Talandier, Résilience des métropoles. Le renouvellement des modèles ; à la recherche de justice spatiale », Olivier Bouba-Olga, Pour un nouveau récit territorial. Orléans Métropole celui de la santé. « Les Cahiers Popsu » avec un premier ouvrage présenté à Rouen le 12 juin : D’autres rencontres sont en cours de Jean Debrie et Xavier Desjardins, La Métropole performative ? Récits et échelles finalisation. de la fabrique institutionnelle métropolitaine de Rouen. L e 1 2 j u i n , Rouen Mét r o p ole Ces ouvrages sont librement téléchargeables sur le site : Normandie a organisé un sémi- www.popsu.archi.fr/node/1149 naire sur « La Seine à Rouen, une 11 no 413
PROJET / « Réparer la ville » Lors des Entretiens de l’aménagement à Toulouse, l’atelier animé par Nicolas Binet était centré sur les copropriétés dégradées. A u sein du Club Ville Aménagement, Nicolas Binet, garant du processus, notamment pour la maîtrise des prix le directeur du Groupement d’intérêt public (GIP) de sortie face à des enjeux de gentrification. Marseille Rénovation Urbaine (MRU), milite pour Propos similaires du côté de Joëlle Boneu, directrice des que les aménageurs n’oublient pas le renouvellement Orcod à l’Établissement public foncier d’Ile-de-France urbain des quartiers en difficulté et, plus part ic ul ièr ement, (EPFIF), selon laquelle « tous les dispositifs de la politique les copropriétés dégradées. Comme en a témoigné l’atelier de la ville se sont cassé les dents sur les ensembles de « Réparer la ville » des Entretiens de l’aménagement. copropriétés en grande difficulté de Clichy-sous-Bois (93), La situation marseillaise, très médiatisée après les effon- en particulier les 1 500 logements du Chêne-Pointu, et drements d’immeubles de novembre 2018 faisant huit de Grigny 2 – 5 000 logements et 27 syndicats de copro- victimes, condense des questions parfois dramatiques, priété ». Il fallait un outil de portage massif pour racheter Ce numéro est celui de Yann Cabrol comme l’a rappelé Nadine Arnaldi, responsable de l’habitat les logements et stabiliser la dégradation. Dans ce but, la et de l’aménagement à la Métropole Aix-Marseille-Provence loi ALUR a créé les Orcod-IN (opérations de requalifica- (AMP). Dans cette métropole polycentrique de 3 500 km 2, tion des copropriétés dégradées d’intérêt national), dont Marseille, la ville la plus étendue et la plus peuplée, le pilotage est confié à un établissement public foncier accueille les ménages à faible revenu, y compris dans d’État, pour des interventions d’une durée de plus de son centre. Ces ménages logent souvent dans de vastes quinze ans – temps d’une déclaration d’utilité publique copropriétés qui représentent autant de logements que le (DUP) – comportant une gestion transitoire des logements parc HLM. Si le GIP MRU a pris à bras-le-corps la question pendant une dizaine d’années. dans les quartiers nord (cf. page suivante), « beaucoup De son côté, Arnaud Cursente a présenté la filiale dédiée reste à faire », comme le reconnaît Nicolas Binet. Car, du groupe CDC Habitat créée pour intervenir en direc- « hors du périmètre d’Euroméditerranée, les opérateurs tion des copropriétés dégradées, dont il est le directeur. ont peu travaillé sur le projet de territoire », selon les mots « Généreusement capitalisée » (100 M€) selon son expres- de Nadine Arnaldi. D’où une juxtaposition d’interventions sion, cette filiale interviendra à la demande des collectivi- dépendant de financements différents. C’est pourquoi le tés avec deux options : « recyclage après rachat complet GIP travaille avec l’Agence nationale de l’habitat (Anah) avec DUP » ou « portage dit de redressement incluant le et l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) rachat d’un pourcentage de logements pour mettre en sur l’adaptation du dispositif dans le cadre du contrat de place un système vertueux ». Arnaud Cursente a affiché ville et du NPNRU1. « beaucoup de modestie » dans ce type de démarche particulièrement complexe. DES OUTILS DÉDIÉS Au-delà de cette nécessité d’outils dédiés – Marseille Plusieurs intervenants ont défendu la nécessité d’outils envisage la création d’une société publique locale d’am én a dédiés pour l’intervention sur le parc ancien dégradé. À gement (SPLA) et d’une SEM immobilière –, les intervenants commencer par Sylvie Froissart, directrice de la Soreqa, ont insisté sur le rôle de l’État, notamment pour les ques- société publique locale spécialisée dans la requalification tions judiciaires et d’ordre public. En conclusion, Nicolas d’îlots ou de quartiers anciens à Paris, Est Ensemble et Binet a souligné la disproportion de l’investissement actuel, Plaine Commune 2 . La Soreqa a été créée en 2010 à la suite public et privé, dans « le neuf », alors que la question du de la mission de la Siemp – Société d’économie mixte (SEM) parc ancien interroge le devenir de quartiers entiers, de de la Ville de Paris – pour élargir cette intervention à la morceaux de ville. En outre, il faut prendre en compte petite couronne. Son action s’articule en deux volets : le volet sociétal, « la fissure de la propriété individuelle un appui aux propriétaires, autant que possible, et une dans le parcours de certains ménages », qui réclame des intervention publique pour se substituer aux propriétaires réponses difficiles à mettre en œuvre. D’où l’impératif défaillants (sécurisation, relogement, programmation de renforcer les équipes professionnelles actuelles, très urbaine après des démolitions ou des réhabilitations engagées, mais souvent mal outillées. Par ailleurs, Nicolas lourdes). « Un travail en finesse, à l’échelle de la parcelle, Binet pose une vraie question aux aménageurs : « Quels mais, comme au centre de Montreuil, dans un secteur enseignements tirons-nous des actions engagées pour inscrit dans une stratégie urbaine », a souligné Sylvie réparer la ville, afin de ne pas fabriquer aujourd’hui des Froissart. Une démarche différente de celle de Marseille, quartiers qui seront demain ingérables ? » La réponse qui intervient à l’îlot en recherchant une densité moindre n’est pas évidente./ Antoine Loubière et un changement de la perception du cœur d’îlot. Pour la ! Nouveau programme national de renouvellement urbain. directrice de la Soreqa, l’outil public s’est imposé du fait @ Est Ensemble et Plaine Commune sont des établissements publics territoriaux du coût des interventions et des expropriations, et comme de la Métropole du Grand Paris, réunissant chacun neuf villes. 12 no 413
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