AWK FOCUS Modèles d'affaires numériques - Maîtriser la transition vers l'ère numérique - AWK Group
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Éditorial « Les modèles d’affaires numériques changent les règles. » Dr Christian Mauz, Partner La voie vers le modèle d’affaires numérique Sommaire Le terme « numérisation » est omniprésent et fait partie du quotidien depuis longtemps. Il est donc d’autant plus étonnant que jusqu’ici, la différence sur le terrain entre modèles d’affaires 3 Qu’entendons-nous par traditionnels et numériques soit restée floue. Dans ce domaine, la gestion de la coexistence et de la transformation des modèles modèles d’affaires numériques ? d’affaires est la condition sine qua non de la maîtrise de la transition vers l’ère de la numérisation. 5 Modèles d’affaires basés sur l’utilisation ou la consommation Nous connaissons tous les exemples de succès d’entreprises totalement numériques, comme Amazon, Facebook, Google ou, pour rester dans le 5 Modèles d’affaires basés sur contexte suisse, Galaxus, eat.ch et Zattoo. Et on ne manque jamais de citer la plus grande entreprise de taxis sans taxis (Uber) ou la plus grande l’expérience entreprise hôtelière sans le moindre hôtel en propriété (Airbnb). Mais qu’est-ce qui fait qu’un modèle d’affaires est numérique et comment 6 Modèles d’affaires basés sur modifie-t-il la valeur ajoutée et l’interaction avec le client ? Comment une une plateforme entreprise qui n’est pas une « terre vierge » doit-elle aborder la numérisa- tion ? Comment peut-on mettre à profit les modèles d’affaires numériques 8 Transformation et Lessons Learned lorsqu’on n’est pas une modeste start-up agile ? La numérisation touche toutes les branches, même si sa maîtrise est plus 9 L’identité numérique, base des urgente pour certaines d’entre elles, alors que d’autres disposent de plus modèles d’affaires numériques de temps pour s’adapter. Dans ce numéro d’AWK FOCUS, nous souhaitons Entretien avec un client vous proposer des modèles permettant de réussir l’identification et la mise en œuvre de modèles d’affaires numériques. Nous y expliquons par ailleurs comment de tels modèles sont mis en œuvre dans des sociétés existantes et non seulement sur des « terres vierges ». Nous vous souhaitons une enrichissante lecture. 2
Fondamentaux Qu’entendons-nous par modèles d’affaires numériques ? Alors que, durant longtemps, la nu- des secteurs expérience client, technologies mérisation des modèles d’affaires ne de l’information, écosystème & plateforme, concernait que les branches propulsées Internet des objets (IdO) et analyse des don- par la technologie, comme les télécom- nées sont des éléments-clés de la création de munications, les médias ou les logiciels, valeur. Ce qui est nouveau, c’est que les possi- les branches traditionnelles telles que bilités technologiques poussent le modèle la santé, le tourisme et l’administration d’affaires (du bas vers le haut ou bottom-up) publique ont été entraînées elles aussi et qu’il en résulte un renforcement de l’inter- dans le tourbillon numérique. Les mo- action entre les niveaux. L’innovation naît dèles d’affaires traditionnels et numé- de plus en plus de nouvelles capacités et riques y sont en concurrence directe. de nouvelles idées de modèles d’affaires, Adrian Anderegg, Dr Pascal Bettendorff, Dr Boris Ricken la stratégie ne fixant que le cadre général. A l’ère de la numérisation, il n’est guère éton- Les processus stratégiques peuvent « étouffer » nant que l’expression modèle d’affaires nu- l’innovation par la sophistication des budgé- mérique soit sur toutes les lèvres. 42 % de tous tisations et le détail des mises en cascades les directeurs d’entreprises veulent orienter des objectifs. Pour générer des avantages leur activité « prioritairement sur le numérique » concurrentiels, il faut trouver des moyens de ou même « totalement sur le numérique », déployer des approches innovantes. Les alors qu’ils ne sont que 17 % à cultiver des trois étapes exposées ci-après conduisent ambitions numériques modestes. Par ailleurs, rapidement à des options stratégiques. 47 % des PDG se sentent mis sous pression par leur conseil d’administration pour réaliser des progrès dans les affaires numériques.1 Stratégie Les modèles d’affaires décrivent comment les entreprises créent de la valeur. Ils servent de lien entre la stratégie et le modèle de gestion Modèle d’affaires numérique (Operating Model) (cf. ill. 1). Le modèle d’affaires est traditionnellement défini à partir de la stra- tégie et le modèle de gestion en découle natu- rellement « du haut vers le bas » (top-down). Modèle de gestion numérique Capacités Un modèle d’affaires numérique se distingue par le fait que les technologies et les processus Ill. 1 : positionnement d‘un modèle d‘affaires 1 Gartner (2017) : CEO Survey : CIOs Must Scale Up Digital Business. 3
Fondamentaux Famille technologique Exemples de technologies Pertinence Applications mobiles, portails clients, Expérience clients e-commerce, omnicanal Technologies de l‘information Collaboration, Workflow Engines OpenData, OpenGovData, API, Ecosystème & plateforme Blockchain, Smart Contracts Internet des objets Connectivity, senseurs, acteurs, Smart Analyse de données Data Analytics, Business Intelligence Ill. 2 : exemple d’analyse de la pertinence de technologies Étape 1 : analyse de la perspective du client • Technologies de l’expérience client : Étape 3 : options stratégiques et modèle Les approches centrées sur le client jouent un comment les portails pour clients, les omni- d’affaires idéal rôle essentiel et remplacent les méthodes canaux ou les applications clients influent-ils Les étapes nécessaires à la transformation sont d’analyse traditionnelles axées sur les finances, sur notre proposition de valeur, la forme de définies sur la base des lacunes existantes ; on les ressources et les capacités. Qu’est-ce qui notre relation avec le client, le segment de définit également un portefeuille de mesures caractérise le client et qu’attend-il de l’entre- clientèle et le canal ? et une feuille de route. Afin d’établir les prio- prise ? Les analyses des Customer Journey ou rités, les premières options stratégiques Rapid Prototyping fournissent de précieux • Technologies de l’information : quels peuvent être déduites de l’analyse, évaluées enseignements ; la Data Analytics offre par sont les chances et les risques des plate- et intégrées dans le modèle d’affaires idéal ailleurs un aperçu très utile du comportement formes de collaboration, de backoffice et sur la base de technologies numériques. du client. Comme le point de vue du marketing d’achats pour notre activité principale ? s’arrête souvent au portefeuille de produits, il A ce propos, la gestion de la coexistence des faut procéder à de nouvelles segmentations • Technologies d’écosystème et de plate- modèles d’affaires traditionnels et numériques de la clientèle. Au bout de ce modèle théo- forme : comment les technologies d’éco- dans le portefeuille est essentielle. La trans- rique, il existe un portefeuille de produits idéal, système comme Open Government Data formation d’un modèle d’affaires existant en ventilé par modèles de clients avec des Use ou API-Management2 influent-elles sur les modèle d’affaires numérique est très exigeante Cases schématiques. partenaires-clés existants ou nouveaux de pour une entreprise et ses collaborateurs. Les notre modèle d’affaires ? facteurs de réussite sont l’utilisation de mé- Il est recommandé aux entreprises avec un thodes Lean et Agile, d’un Lightweight Business portefeuille de produits existant de procéder • Technologies de l’Internet des objets : Case et du Rapid Prototyping avec intégration durant cette étape à une analyse Fit Gap. Des comment les possibilités de relier entre eux précoce des clients. Le plus simple est de instruments tels que le Business Model Canvas des actifs physiques, des machines ou des mettre en place lentement le modèle d’affaires aident à répondre à la question essentielle : biens de consommation influent-elles sur numérique parallèlement au modèle tradi- à quelles exigences du client peut-on répondre nos propres ressources ? tionnel. Mais les entreprises de branches ou pas (encore) avec les capacités actuelles ? hautement compétitives, comme le commerce • Technologies d’analyse des données : ou la construction de machines, ne peuvent Étape 2 : analyse de l’influence technolo- quelles chances et quels risques les techno- pas se payer ce luxe, tandis que les fournis- gique logies d’analyse des données entraînent- seurs d’énergie, les transports publics et les Les technologies numériques comblent des elles du point de vue des bases d’information administrations publiques ont tendanciellement lacunes de capacités. Il est en l’occurrence et de décision pour notre structure des coûts plus de temps à disposition pour s’adapter. conseillé de considérer des familles de et des revenus et pour d’autres éléments du technologies structurées plutôt que des modèle d’affaires ? Nous allons illustrer ci-après l’utilisation de technologies détaillées (cf. ill. 2). technologies pertinentes pour la mise en 2 Dans ce contexte, Application Programming Interface (API) ne doit pas être compris en tant qu’élément technique, mais place d’un modèle d’affaires numérique à mis en relation avec les interfaces avec des partenaires. l’aide de trois exemples. 4
Exemples Modèles d’affaires basés sur l’utilisation ou la consommation Souvent, lors de l’achat d’un produit, ce n’est Réduire de tels modèles à leurs aspects finan- jouent ainsi un rôle essentiel dans la maxi- pas sa possession qui est prioritaire, mais son ciers, c’est à dire un pur transfert des CAPEX misation de la durée d’utilisation. utilité. Si le prix est trop élevé pour le client (dépenses d’investissement) vers les OPEX au moment de sa décision d’achat, il ne va pas (dépenses d’exploitation), serait toutefois • Les modèles d’affaires basés sur l’utilisa- se décider pour ce produit. Les modèles de une erreur fatale, car on passerait ainsi à côté tion ou la consommation dépendent d’une location ou de leasing ne contournent que d’enjeux essentiels : disponibilité correcte des données. En partiellement ce problème, car le locataire ne l’occurrence, ce ne sont pas seulement les veut souvent pas assumer lui-même les risques, • Le produit doit convaincre quotidienne- erreurs d’enregistrement et de transmission par exemple en cas de contrat comportant ment, alors que l’acheteur traditionnel doit qui sont importantes, car il faut considérer une durée minimale de location ou si l’enga- être convaincu une seule fois d’acquérir le systématiquement et dans leur globalité gement global du client reste élevé. De telles produit. Souvent, le marketing est plus im- l’escroquerie et le piratage. réflexions sont aussi valables sur le marché portant que l’ingénierie. Dans les modèles des clients commerciaux, dans la mesure où d’affaires basés sur l’utilisation, la résiliation Les approches technologiques modernes les frais fixes sont prioritaires, car ils peuvent ne tient souvent qu’à un clic, alors que dans comme l’IdO, le cloud et les Data Analytics éventuellement occasionner une pénurie de les modèles basés sur la consommation, un sont par conséquent d’une importance parti- liquidités en cas de baisse des affaires. C’est produit peut être laissé de côté sans aucune culière pour les modèles d’affaires basés sur pourquoi, dans l’esprit d’une gestion des conséquence financière. l’utilisation et la consommation. risques, les entreprises sont disposées sans rechigner à accepter des coûts totaux plus • A l’avenir, ce sont les coûts totaux, entre- élevés quand les affaires marchent bien, pour tien compris, qui seront pertinents pour Modèles d’affaires basés sur autant qu’elles puissent les réduire en con- le fournisseur. Dans les modèles classiques, l’expérience séquence quand la situation se dégrade. la maintenance et les consommables gé- nèrent souvent des contrats complémen- Le commerce stationnaire subit une forte pres- Les modèles dans lesquels on ne facture que taires. Mais la logique change du tout au tout sion. Les commerçants en ligne ont pour atouts l’utilisation ou la consommation effective, sans dans les modèles d’affaires basées sur l’utili- un grand choix de marchandises, des possibi- seuil minimal artificiel, constituent une voie pro- sation ou la consommation, quand c’est au lités de comparaison et des prix avantageux. metteuse. Les services basés sur les TIC sont fournisseur de prendre en charge la main- Mais ce qui est plus dramatique, c’est que les prédestinés pour de tels modèles (cloud), mais tenance : une gestion déficiente des pièces clients considèrent que pour de nombreux des fournisseurs de produits classiques se con- de rechange, l’absence de planification des achats, la fréquentation d’un magasin est pé- vertissent aussi aux modèles d’affaires basés interventions des techniciens de service, nible et inutile. Ils voient certes les avantages sur l’utilisation ou la consommation. Au lieu de une mauvaise maintenabilité ou de longues offerts par les magasins, par exemple la possi- vendre un réacteur, une tour de forage ou un périodes d’arrêt jusqu’à la réparation gé- bilité d’essayer les produits. Cet élément reste chariot élévateur, ils facturent leur utilisation nèrent des coûts supplémentaires au lieu de important, notamment dans le commerce de ou leur consommation, soit des heures de vol, gains supplémentaires. La prévisibilité de la l’habillement. La clé du succès réside par con- des puits creusés ou des tonnages soulevés. maintenance et une télémétrie intelligente séquent dans la conjugaison du commerce sta- 5
Exemples tionnaire et du commerce en ligne. Une étude totalité du cycle de vie d’un client. Toutes les le client, applications d’accompagnement du de consommation reposant sur un vase échan- voies d’information et de décision d’achat produit pour collecter des données, portails tillon3 a d’ailleurs montré que 73 % des clients doivent être considérées ensemble et com- clients attrayants, plateformes Big Data et utilisent plusieurs canaux pour leurs achats. binées le plus étroitement possible, afin que outils d’analyse pour enregistrer et évaluer le client soit accompagné depuis la première les profils des clients. Un tel modèle d’affaires numérique n’englobe recherche d’information jusqu’à la conclusion pas uniquement le e-commerce (magasin en de la vente, voire lors de l’utilisation du produit. ligne), mais aussi le magasin stationnaire, qui La réussite de la mise en œuvre de modèles Modèles d’affaires basés sur doit jouer dans ce contexte un rôle différent. d’affaires basés sur l’expérience requiert le une plateforme Si le magasin renforce la marque en propo- respect de règles de conception du produit. sant par exemple des exclusivités, en offrant Il est essentiel que tous les produits, même Dans les modèles d’affaires classiques, on une expérience d’achat ou en fournissant un ceux qui ne contiennent pas d’éléments pense en termes de capacités fournies par une conseil compétent, les ventes en ligne et les technologiques, comme les vêtements ou la entreprise ou apportées par un fournisseur et ventes stationnaires augmenteront. nourriture, laissent des traces numériques, éventuellement améliorées. Des contrats et que ce soit via des programmes de fidélisa- des accords précis règlent ces relations, dont L’omnicanal est finalement la combinaison de tion du client, la répétition de prestations ad l’approche statique se reflète dans l’expres- tous les canaux de distribution entrant en ligne hoc (p. ex. entretien, consommables) ou des sion « chaîne logistique ». de compte, ainsi que la planification, la gestion applications qui enrichissent l’expérience et le contrôle du Customer Touchpoint. L’objectif client avec des informations de base ou des Dans les approches basées sur une plate- à court terme est d’empêcher que le client possibilités de configuration (et du Up Selling). forme, ces relations rigides sont supprimées. change de fournisseur en changeant de canal. La plateforme multilatérale est un écosystème A long terme, il s’agit d’offrir au client la plus- L’omnicanal suppose une réflexion centrée dynamique dans lequel plusieurs entreprises value la plus forte possible et de le fidéliser au sur le client et utilise les informations le con- coopèrent afin de créer de la plus-value pour mieux. Dans le commerce omnicanal, le client cernant, lui et son cycle de vie. Chaque trace les clients. Les entreprises participantes peut s’informer au magasin puis commander en de donnée laissée par un client existant ou attendent de la plateforme qu’elle leur apporte ligne, dans le magasin d’e-commerce de l’entre- potentiel sur son Customer Journey est un plus d’affaires ou d’autres affaires que leurs prise. En l’occurrence, il est essentiel de tenir élément permettant d’en établir le profil. canaux existants. Ce qui est déterminant pour compte dans ces réflexions de l’influence sur les la participation des entreprises, c’est, d’une modèles de rémunération dans les magasins. L’omnicanal est vital pour le commerce, mais part, l’attractivité de l’écosystème dans son les banques, les assurances, les administrations ensemble et, d’autre part, le fait qu’au sein de Le point de mire se déplace toujours plus de publiques et les transports publics sont égale- la plateforme, on met à disposition d’autres la vente unique sur la Customer Value, soit la ment concernés. Les administrations publiques ou de meilleures capacités qu’une entreprise valeur que l’entreprise peut générer durant la ne sont certes pas soumises à une pression seule ne pourrait le faire. concurrentielle directe, mais elles sont pous- 3 Harvard Business Review (2017) : A Study of 46,000 sées par leurs « clients » – qui sont aussi pour L’approche basée sur une plateforme permet Shoppers Shows That Omnichannel Retailing Works. la plupart des citoyens – à prendre davantage de résoudre les problèmes pratiques de telles en considération leur réalité quotidienne. situations : alors qu’une des parties met à dis- position la plateforme, les autres parties pro- Les éléments technologiquement pertinents posent des services à valeur ajoutée sur celle-là. sont notamment les suivants : systèmes de La plateforme remplit diverses fonctions et magasins web centrés sur le client, système garantit finalement un marché fonctionnel : puissant de Point of Service (POS) et Customer Relationship Management (CRM), technologies • Elle crée de la cohérence en assimilant les d’interaction mobiles (Beacons) pour identifier modèles d’affaires des entreprises partici- 6
Exemples pantes, auxquels appartiennent aussi les marché mises à disposition par Zalando, Une plateforme relie les entreprises et les aspects contractuels. siroop et Amazon. Les canaux de vente clients, mais aussi les clients entre eux. Ces existants peuvent aussi être transformés en derniers peuvent ainsi revendre chez Digitec • Elle garantit la compatibilité technique plateforme via l’intégration de produits des articles d’occasion ou proposer à la concernant les données, les identités et les concurrents. Par ailleurs, il est facile d’inté- vente ou en location sur le portail immobilier processus de commandes. grer dans des plateformes des services à de la Neue Aargauer Bank (NAB) des valeur ajoutée potentiellement lucratifs mais immeubles financés avec une hypothèque de • Elle fait office de lien de transmission entre plutôt rares (cf. ill. 3), comme des assurances la NAB. La mise en réseau dépasse ainsi les groupes de clients et les fournisseurs, si pour les articles de sports ou des prolonga- l’approche Facebook et augmente encore bien que les clients peuvent éviter la création tions de garantie et des contrats de service l’attrait de la plateforme. permanente de nouveaux comptes chez pour l’électronique domestique. Dans les divers fournisseurs. modèles classiques, le travail nécessaire pour Tous les éléments de la plateforme sont en les contrats et les interfaces techniques ne changement constant. Les entreprises qui • Elle assume la garantie de la confiance vaut toutefois la peine, la plupart du temps, intègrent la pensée plateforme de façon co- numérique, ce qui englobe notamment la que pour des grands volumes. hérente ne vont pas exclure sélectivement des gestion de la sécurité, des paiements, de la concurrents de la plateforme, mais s’exposer fraude et des réclamations. La plateforme multilatérale est toujours simul- en permanence à la concurrence de meilleures tanément fournisseur, vendeur et concurrent. idées. Toutefois, même les pionniers comme Pour profiter d’un modèle de plateforme, il n’est Une autre entreprise participant à la plate- Amazon ou Google ne sont pas à l’abri d’un pas nécessaire de déléguer l’intégralité de son forme crée éventuellement une meilleure ca- retour à la vieille pensée, comme le montrent modèle d’affaires. La plupart des partenaires pacité que notre entreprise, ce qui représente les discussions en cours sur l’intégration de participent d’ailleurs à plusieurs plateformes. une chance comme un risque. On considère services Google dans Amazon Alexa. souvent la blockchain comme un pôle pré- Dans le commerce de l’habillement, la con- sumé opposé à la plateforme multilatérale. Les technologies d’expérience client, d’éco- quête des divers segments de clientèle passe En réalité, elle est une plateforme dispersée système et d’analyse des données sont parti- par les canaux de vente de l’entreprise, mais qui constitue également un écosystème. culièrement importantes pour la mise en également par l’intégration des places de place de plateformes. C2C B2C B2C Plateforme Plateforme B2B Commerce Complément avec Commerce Plateforme classique services suppl. avec plateforme multilatérale Evolution vers l’écosystème Ill. 3 : diverses formes de modèles d’affaires numériques avec une plateforme 7
Perspectives Modèle d’affaires numérique • IT & Business Alignment • Agilité et rapidité Partenaires & fournisseurs Clients & produits/services • Initiatives suprasectorielles • Processus centrés client • Digital Ownership Organisation (Rapid Prototyping, Processus (CDO, Digital Service Units) & gouvernance Customer Journey, etc.) • ICP (KPI) numériques • Automatisation intelligente Modèle de gestion numérique • Forte focalisation techno- • Fort accent sur le recrutement logique (p. ex. IdO, éco- et la fidélisation de talents systèmes, expérience client, Infrastructure Personnes numériques analyse des données) & technologie & Skills • Développement continu • Commandes marchandises des capacités internes Ill. 4 : modèle de gestion numérique Transformation et Lessons Learned L’utilisation de technologies numériques peut seules l’action et la responsabilité transver- intégrateur de système extérieurs, ou de générer un avantage concurrentiel durable. sales rendent la transformation possible. collaborer avec une université ou un institut Mais comment réussir la transition vers un de recherche. nouveau modèle d’affaires numérique ? La • Les processus de l’entreprise se distinguent condition est l’établissement d’un modèle par une agilité et une rapidité élevées. La • Le domaine M&A est sollicité via l’acquisi- de gestion numérique (cf. ill. 4). forte focalisation sur le client est favorisée tion d’une activité numérique existante ou par des méthodes telles que le Customer la création d’une coentreprise avec un La gestion stratégique doit concilier les mo- Journey ou le Rapid Prototyping. Les pro- partenaire numérique. Le choix du parte- dèles d’affaires traditionnels et numériques. cessus normalisés sont automatisés de naire, l’équilibre des intérêts au sein de la Les indicateurs clés de performance (ICP ou façon intelligente et cohérente. coentreprise et l’intégration constituent en KPI) numériques mesurent et gèrent les progrès l’occurrence des enjeux particuliers. en direction de la numérisation, par exemple • L’infrastructure & la technologie occupent en calculant le pourcentage du chiffre d’affaires une place importante dans l’entreprise. Les • Les PDG considèrent que le recours à un réalisé par les activités numériques ou le éléments différenciés sont produits à l’interne fonds de capital-risque est très prometteur, pourcentage de processus numérisés. et les produits normalisés commandés à car il permet d’investir dans de petites entre- l’extérieur (cf. AWK FOCUS « TIC 4.0 »). prises innovantes et technologiquement •O rganisation & gouvernance sont caracté- agiles, comme les start-ups. Le transfert risées par un IT & Business Alignment de haut • Dans le secteur Personnes & Skills, on met dans de plus grandes unités des compé- niveau et des initiatives suprasectorielles. Le fortement l’accent sur le recrutement et la tences technologiques acquises s’avère choix ultérieur de technologies de soutien du fidélisation de talents numériques. Les toutefois exigeant. modèle d’affaires choisi n’est pas nécessaire. capacités internes sont parallèlement En revanche, les technologies sont intégrées développées en permanence. • La création d’un incubateur, étroitement liée dès le départ dans la conception des modèles aux investissements dans les start-ups, permet d’affaires numériques. En l’occurrence, la ré- Outre le développement orienté vers l’intérieur à ces dernières d’accéder aux précieuses res- flexion confinée en silo est contreproductive ; d’un modèle de gestion numérique, il y a lieu sources d’une entreprise de plus grande taille. de mettre en place des mesures stratégiques En retour, les groupes investisseurs ont accès dirigées vers l’extérieur pour établir des aux nouveautés numériques et bénéficient modèles d’affaires numériques : d’une option d’achat ultérieur de la start-up. • On a le plus souvent recours à des partena- Les entreprises qui réussissent profitent des riats stratégiques technologiques et numé- chances offertes par les modèles d’affaires riques. Il peut s’agir, par exemple, de faire numériques et se lancent dans la transforma- intervenir une entreprise de conseil ou un tion nécessaire de leur organisation. 8
Interview L’identité numérique, base des modèles d’affaires numériques Entretien avec un client Andreas Gumann, chef de section chez AWK, s’entretient avec Markus Naef, PDG de SwissSign Group SA. L’identité numérique « SwissID » permet- En Suisse, l’identité numérique n’est pas Ce qui signifie que les solutions promet- tra bientôt de réaliser numériquement mise en œuvre comme dans d’autres pays teuses ne sont pas uniquement propulsées tous les actes juridiques. Markus Naef, tels que la Lettonie, l’Estonie ou le Dane- par les pouvoirs publics ? PDG de SwissSign Group SA, nous donne mark. Pourquoi ? des informations sur ce projet ambitieux. Exactement. On l’a particulièrement constaté Les pays comme la Lettonie ou l’Estonie ont une dans la sphère nordique. Les systèmes d’identité Monsieur Naef, pourquoi la Suisse a-t-elle autre histoire que la Suisse. Après l’effondrement qui ont réussi ont été développés sur la base besoin d’une identité numérique ? de l’Union soviétique, elles avaient de toutes d’une approche de partenariat public-privé autres raisons de créer relativement rapidement et sont également nés en collaboration avec Markus Naef : l’identité numérique est la base une identité numérique. Par ailleurs, les diffé- les banques. La participation des banques qui permettra à l’avenir la réalisation numérique rences culturelles jouent aussi un rôle. Au Dane- est un immense avantage, car elles ont déjà et intégrale de nombreux actes juridiques sans mark, par exemple, on constate une implication identifié leurs clients. Les personnes intéres- discontinuité. Dans le secteur du commerce beaucoup plus forte de l’Etat dans la création sées n’ont donc pas besoin de commencer électronique, on est déjà relativement avancé de l’identité numérique. En Suisse, on a égale- par chercher un point de vente pour procéder dans ce domaine. Pour les assurances-vie, les ment tenté de le faire au début ; la création de à leur identification. C’est pourquoi nous contrats de communication mobile ou les rela- l’ancienne identité numérique SuisseID n’avait considérons qu’il existe avec les banques tions bancaires, il faut en revanche que l’identi- certes pas été décidée par les pouvoirs publics, une grande chance de pouvoir injecter dans fication soit soumise à des normes de sécurité mais elle était encouragée au plus haut niveau le système un relativement grand nombre plus sévères. C’est pourquoi de tels actes juri- de l’Etat. Toutefois, elle a été faiblement ac- d’identités déjà contrôlées. diques ne peuvent pas encore être réalisés de ceptée et ne s’est guère imposée. C’était il y a façon totalement numérique. Nous voulons dix ans. Il se peut que ses initiateurs étaient à Quels sont les éléments essentiels pour le créer les conditions pour que ce soit le cas. l’époque en avance sur leur temps. succès d’une identité numérique ? 9
L’User Experience (UX) est très importante. message est en cours de rédaction par le DFJP. juridique est une des nombreuses raisons Une application doit être intuitive, conforme Le projet actuel correspond à nos idées : des importantes qui incitent des entreprises à à l’état actuel de la technique et disponible fournisseurs privés proposent des solutions venir s’établir en Suisse. sur tous les supports existants. Le client et ses et l’Etat joue un rôle prépondérant dans la attentes doivent être au centre de l’attention. certification du système de e-ID. Par ailleurs, les nouvelles technologies (p. ex. C’est ce que l’on constate à peu près sur la blockchain) sont à l’ordre du jour. Certaines Facebook et Google : même si l’utilisateur a Où identifiez-vous le plus grand potentiel approches qui devraient favoriser l’établisse- quelques doutes sur ce que deviennent ses pour les modèles d’affaires numériques sur ment de ces technologies existent déjà. La données, il se sert des applications simples le marché suisse ? Suisse pourrait précisément affirmer sa position et intuitives. SwissID doit offrir la même expé- au niveau international grâce à l’identité numé- rience utilisateur. En revanche, nous n’allons Dans certaines branches, notamment les rique. Le conseiller fédéral Johann Schneider- pas monétiser les données des utilisateurs, assurances, il existe encore un besoin de Ammann m’a récemment rapporté que le qui garderont la haute main sur ces derrières. rattrapage ou un besoin de règlementation. représentant d’un gouvernement étranger lui J’entrevois un fort potentiel dans l’assurance- avait dit : « Switzerland is the centre of trust. » Où se situe la Suisse dans l’adaptation de maladie, où SwissID pourrait servir de base au Cette confiance accordée aux banques pour- modèles d’affaires numériques ? dossier électronique du patient. Il existe dans rait également être renforcée grâce à l’e-ID. ce domaine de bonnes possibilités d’écono- Nous avons comparativement deux ou trois ans mies. C’est pour cette raison que nous avons Quelle est votre source d’inspiration de retard en matière de numérisation. Les gens aggrégé des caisses-maladies renommées à personnelle et celle de votre équipe de sont clairement ouverts à cette nouveauté, mais notre consortium. J’identifie également un direction ? Est-ce encore la Silicon Valley ? il faut d’abord réduire la complexité de cer- potentiel élevé dans les affaires bancaires, taines tâches. En outre, il s’agit d’une question tout le secteur en ligne et, notamment, dans De mon point de vue, la Silicon Valley devient culturelle. La gestion agile ne s’est pas encore le commerce électronique. de plus en plus une sorte d’attraction touri- imposée partout dans les grandes entreprises. stique. Pour l’inspiration, il faut désormais Je pense que les conditions cadres pour la nu- Quelles sont les chances offertes par la voyager en Asie. Là-bas, la numérisation est mérisation sont correctes, car nous ne sommes Suisse dans le domaine des modèles beaucoup plus avancée. Désormais, tous les par encore surréglementés. Mais je crois que d’affaires numériques ? Indiens disposent d’un identité électronique. la pression n’était jusqu’ici pas suffisamment Pensons aussi à tous les processus commer- forte. En Suisse, on est généralement plutôt Grâce à l’EPFL et l’ETHZ, la Suisse se distingue ciaux numériques qui peuvent être réalisés enclin à attendre, avant de mettre en œuvre surtout par son niveau de formation élevé. en Chine avec une identité électronique : ainsi, des solutions qui ont fait leurs preuves. Plusieurs grands groupes sont en train d’établir la facturation pour l’utilisation d’un garage leur siège ou de grandes représentations en souterrain est aujourd’hui déjà effectuée Quelles sont les conditions dont SwissID a Suisse, ou l’ont déjà fait. directement via WeChat. besoin pour véritablement décoller ? Une autre chance, c’est notre sécurité juri- Quelles sont les exigences que doivent La loi fédérale sur les services d’identification dique. Ainsi, dans le champ numérique, il satisfaire les modèles d’affaires numériques électronique (Loi e-ID) est en gestation. Le n’existe pas de zone de non-droit. La sécurité en matière de protection des données ? 10
Vos interlocuteurs Adrian Anderegg MSc EPF MTEC Chef de section Banques & Assurances Ce qui me paraît le plus important, c’est la J’ai été très agréablement surpris par l’ouverture confiance que l’utilisateur accorde à la marque d’esprit et le rythme qui ont présidé à la créa- et à l’entreprise qui est derrière. Mais pour la tion du consortium. Peu après mon arrivée, mériter, nous devons tenir les promesses nous avons défini la nouvelle stratégie avec les faites en matière de traitement des données. propriétaires actuels. La rapidité avec laquelle L’utilisateur veut savoir à quelles fins et dans nous sommes parvenus à réunir autant d’entre- quelle mesure ses données sont utilisées. prises suisses de renom autour de la même table et la manière pragmatique de gérer tout Je pense que l’une des principales exigences cela sont vraiment uniques en Suisse. Il s’agit de l’utilisateur est la conservation des données maintenant d’harmoniser les différents points Pascal Bettendorff dans des centres de calcul suisses. C’est de vue et de prendre une direction commune pourquoi SwissSign Group SA s’appuie tout aux plans politique et économique. Dr sc. EPF, phys. dipl. EPF Senior Manager à fait sciemment sur le critère de qualité « Swiss Made Security ». Merci beaucoup pour cet entretien passion- nant et instructif. Avec SwissID, vous créez un nouvel écosystème numérique. Comment allez-vous gagner de l’argent grâce à lui ? A propos de Nous pensons que le service doit être gratuit SwissSign pour l’utilisateur. Notre modèle d’affaires pré- voit que les entreprises participantes, comme Group SA Andreas Gumann les magasins en ligne, nous rémunèrent pour chaque transaction ou chaque utilisation de SwissSign Group SA est une co- Dr sc. nat., phys. dipl., CAS HSG Chef de section Industrie, Commerce & Logistique nos services. De nombreux fournisseurs sont entreprise de CFF, La Poste Suisse, prêts à payer s’ils reçoivent en contrepartie Swisscom, Credit Suisse, Raiffeisen, des données fiables. Ils peuvent ainsi réduire Six Group, UBS, Zürcher Kantonal- les abus et créer davantage de processus nu- bank, Axa, La Bâloise, Helvetia, La mériques. SwissSign Group SA va prochaine- Mobilière, Swiss Life, Vaudoise ment mettre la priorité sur la mise à disposition Assurances, Zurich, CSS et SWICA. de ces services. A moyen terme, comme La structure de partenariat public- toute autre entreprise, nous devrons atteindre privé fédère les intérêts de la popu- nos objectifs de rentabilité. lation et de la politique. D’ici deux à trois ans, plus de quatre millions de Boris Ricken Qu’est-ce qui vous a le plus surpris depuis clients devraient pouvoir disposer votre entrée en fonction comme PDG de de leur identité numérique SwissID. Dr oec. publ. Chef de section Business Consulting SwissSign Group SA, en mai 2017 ? 11
A propos d‘AWK GROUP SA AWK est l’une des plus grandes entre- prises de conseil indépendantes pour les technologies de l’information et la digitalisation de Suisse. Nous sommes présents dans toute la Suisse avec nos sites de Zurich, Berne, Bâle et Lausanne. AWK GROUP SA Leutschenbachstrasse 45, CH-8050 Zurich T +41 58 411 95 00, www.awk.ch Nos prestations de services com- prennent le conseil, l’ingénierie et Zurich • Berne • Bâle • Lausanne la gestion de projets.
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