91 Notre colloque scientifique X fragile du vendredi 12 octobre
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P912521 Bureau de dépôt : Nivelles TRIMESTRIEL - OCTOBRE 2018 - N°91 Notre colloque scientifique X fragile du vendredi 12 octobre 91 Edité par l’AXFB asbl, avec l’aide de la Région Wallonne
AU SOMMAIRE... L’X presse, numéro 91, octobre 2018 Edito 3 Santé : Le syndrome FXPOI, un effet de la prémutation 4 Témoignage : Mon expérience en ETA 11 Importante nouvelle 12 Associations : La Plateforme Annonce Handicap 13 Notre colloque scientifique du 12 octobre 2018 15 Recherche : Que peut espérer l’X fragile de la technologie CRISPR ? 19 Enseignement : Mon expérience avec un enfant X fragile 24 Compte-rendu : Les 50 ans de l’IPG de Gosselies 27 Agenda 30 Vos réactions 30 Réseau X fragile et Facebook 31 Nous rejoindre, nous aider 32 Nouvelles coordonnées de l’asbl 32 AXFB asbl - N.E. 0674.767.830 Pachis du Capitaine 4 - 1457 Walhain (TSL) www.x-fragile.be - info@x-fragile.be Editeur responsable : Dominique DAMAS L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 2
EDITO L’été s’achève doucement. Les valises sont rangées. On reprend le chemin de l’école ou la route du travail. Joies de la rentrée et premières difficultés. Certains sont heureux de retrouver la routine rassurante, d’autres redoutent les premiers grains de sable dans l’engrenage de l’organisation familiale. Si vous reprenez le chemin de l’école, vous apprécierez sans doute le témoignage de Nathalie Monjoie, enseignante maternelle, sur son vécu avec Arno, petit bout porteur du syndrome. Lionel, quant à lui, revient sur son expérience personnelle en ETA (Entreprise de Travail Adapté) avec ses bons et ses mauvais côtés. Au niveau scientifique, cet X presse répond à toutes les questions que vous pouvez vous poser quant au colloque scientifique X fragile du mois prochain. Rendez-vous le 12 octobre à Bruxelles ! Et qui dit colloque, dit aussi recherche scientifique. L’occasion rêvée de faire le point sur l'insuffisance ovarienne précoce, soit le FXPOI, ainsi que sur le CRISP-CAS9 dont on entend de plus en plus parler. Bonne lecture à tous et au plaisir de vous rencontrer le 12 octobre ! Dominique Damas, Présidente Tous droits de reproduction réservés pour tous pays. La reproduction d’un article, même partielle, est soumise à l’approbation expresse du conseil d’administration de l’ASBL. L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 3
SANTÉ Le syndrome FXPOI, un effet de la prémutation, par Fr. Goossens « Quatre sœurs XFRA. Du drame de l’une (plus de règles à 18 ans) nous plongeons brutalement dans un drame collectif. L’XFRA devient la ménopause précoce pour mes sœurs et le handicap de notre fils. Comment gérer une telle multiplicité, diversité, complexité de répercussions à l’annonce d’un seul diagnostic ? ... D’abord mes sœurs. Lorsque l’une d’elles vient me voir à la maternité à la naissance de mon deuxième enfant en me demandant de cacher ma joie parce que l’une d’entre nous est stérile. Ensuite mes sœurs que j’accompagne dans ce rendez-vous avec un ponte de la gynécologie pour tenter de trouver une solution à l’infécondité supposée de ces ménopauses précoces. » (Un Cri - Emilie Weight - Fragile X France) Qu'est-ce que la ménopause ? La ménopause correspond à la fin de la période reproductive de la femme, habituellement vers l’âge de 50 ans (+/- 4 ans). Les ovaires cessent de fonctionner et les règles s’arrêtent. On sait qu’une femme est ménopausée après 12 mois consécutifs d’aménorrhée (absence de menstruations). L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 4
Les hormones sexuelles ne sont plus produites par les ovaires tandis que la sécrétion de gonadotrophines (FSH - hormone folliculo-stimulante) augmente et devient la cause principale des bouffées de chaleur symptomatiques. Les autres inconvénients immédiats sont : insomnie, sueurs nocturnes, irritabilité, sautes d'humeur, sécheresse oculaire, peau sèche, perte de libido, fatigue et articulations douloureuses. D’autres complications surviennent plus tard comme un profil de risque cardio- vasculaire et l’amincissement des os (ostéoporose), généralement après l’âge de 70 ans. Qu'est-ce que la ménopause précoce ? Quand des taux élevés de FSH sont observés chez des femmes plus jeunes - avant l'âge de 40 ans - ils peuvent indiquer une ménopause précoce. Il n'y a plus de cycles menstruels, car il n'y a plus de follicules ovariens dans les ovaires, ce qui entraîne une infertilité définitive. Plus la ménopause est précoce, plus tôt apparaîtront les complications tardives de la ménopause ; par conséquent les risques d’ostéoporose et de problèmes cardio-vasculaires sont accrus. Qu'est-ce que l’insuffisance ovarienne précoce (IOP) ? On qualifie d'insuffisance ovarienne précoce - IOP - le fait qu'une femme connaisse une absence de règles pendant 4 mois ou plus avant l’âge de 40 ans avec dans deux analyses espacées d'un mois des niveaux élevés de FSH, correspondant aux niveaux de la ménopause. Les cycles menstruels deviennent irréguliers entraînant une fertilité réduite ou une infertilité, les bouffées de chaleurs ... Ceci requiert quelques explications : les ovaires, organes reproducteurs féminins, libèrent à tour de rôle un ovule d'un de leurs follicules tous les mois, de la puberté à la ménopause. La FSH, citée ci-dessus, intervient dans la maturation des follicules ovariens en stimulant la production d'œstradiol par le follicule, par après elle permet l'ovulation en fragilisant la paroi de l'ovaire. Outre des causes liées à des traitements médicaux (chimiothérapie, radiothérapie, opération chirurgicale), l'IOP peut résulter de deux mécanismes principaux : * Les termes suivis d’un astérisque sont expliqués dans le glossaire en fin d’article. L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 5
1) un dysfonctionnement folliculaire : les follicules sont présents dans les ovaires mais un processus pathologique empêche leur fonctionnement normal ; 2) l'absence de follicules : les ovaires sont vides, dès la conception in utero ou par l'effet d'une expulsion accélérée ou d'une destruction toxique ou auto-immune. L'insuffisance ovarienne précoce associée à l'X fragile. Anciennement appelée insuffisance ovarienne prématurée ou primaire, le terme est traduit de l'anglais : Fragile X-associated premature ovarian insufficiency, en abrégé « FXPOI ». L'IOP diffère de la ménopause précoce car les ovaires présentent une fonction réduite provoquée dans le cas de FXPOI par une prémutation dans le gène FMR1 : le fonctionnement ovarien est variable et non prévisible chez 50% des femmes dans le cas. Etant une forme d'insuffisance ovarienne précoce résultant d'un dysfonctionnement folliculaire, le FXPOI peut provoquer des cycles menstruels irréguliers, une ménopause précoce, une incapacité à avoir des enfants (infertilité) et des niveaux élevés de FSH. Environ 1 femme sur 250 est porteuse de la prémutation FMR1, mais seulement 1 sur 1.000 à 1.200, développe une IOP. Par comparaison, dans la population générale seule une femme de moins de 20 ans sur 10.000 est atteinte d'une forme d'IOP mais le risque augmente avec l’âge : une femme de moins de 30 ans sur 1.000, une femme de moins de 40 ans sur 100. La longueur des répétitions de triplets CGG contribue aux variations observées dans l'âge où se manifeste le déclin de fertilité. Le risque d'un dysfonctionnement des ovaires est plus élevé chez les femmes prémutées dont les allèles comptent entre 62 et 99 répétitions de triplets CGG, un profil de fumeuse étant un facteur aggravant4. En revanche, au-delà de 100 répétitions de triplets, le risque n'augmente plus ou décroît, le seuil exact étant actuellement inconnu3. Les femmes atteintes de FXPOI subissent une ménopause en moyenne 5 ans plus tôt que les femmes non- affectées2, mais des cas de FXPOI ont aussi été rapportés chez des adolescentes. Actuellement le seuil de déclenchement de l'IOP est ambigu, L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 6
de telle sorte qu'on ne puisse plus parler d'insuffisance ovarienne primaire (ou primitive) - dès la naissance - mais d'insuffisance ovarienne précoce - avant l'âge - pour mieux qualifier cette pathologie3. La gravité du FXPOI est variable. Les femmes les plus sévèrement touchées ont une IOP manifeste. Ces femmes ont des règles irrégulières ou absentes et des taux élevés de FSH avant l'âge de 40 ans. D'autres femmes ont des IOP occultes : elles connaissent des périodes menstruelles normales mais une fertilité réduite car une absence d'ovulation n'implique pas nécessairement une absence de règles ; elles peuvent avoir aussi des niveaux élevés de FSH. La réduction de la fonction ovarienne provoquée par le FXPOI entraîne de faibles niveaux d'œstrogène et ce qui en découle - de nombreux signes et symptômes communs de la ménopause détaillés ci-dessus, mais avec un risque plus élevé d’ostéoporose et de maladies cardio-vasculaires en avançant en âge. Que faire après l'annonce du diagnostic ? Les femmes atteintes de FXPOI devraient tenir un calendrier menstruel et effectuer rapidement un test de grossesse en cas de menstruation tardive 2 car elles peuvent encore concevoir un enfant : on estime qu'environ 5 à 10% des femmes affectées débutent une grossesse après avoir été diagnostiquées. Il n'existe actuellement aucun traitement ou procédure permettant d'augmenter les chances de la survenance d'une grossesse pour une femme atteinte d'insuffisance ovarienne précoce4. Lorsque le désir d'enfant se fait ressentir, elle peut s'adresser à un conseiller en pathologie de la reproduction (dans un centre hospitalier, un centre de génétique ou un centre de procréation médicalement assistée). Lorsque le diagnostic d'une IOP est posé, il est recommandé de procéder à une analyse du caryotype, à des tests pour déceler une prémutation FMR1 ou une insuffisance surrénalienne auto-immune, un examen échographique pelvien et une mesure de la densité minérale osseuse2. Les femmes atteintes d'insuffisance ovarienne précoce doivent être encouragées à adopter un mode de vie leur permettant de préserver la santé de leurs os et de leurs artères, notamment en pratiquant L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 7
régulièrement des exercices musculaires, en maintenant un apport adéquat en calcium et en vitamine D, par une alimentation saine pour éviter l'obésité, et par un dépistage des facteurs de risques cardio- vasculaires2, 4. Un traitement hormonal prescrit par un gynécologue jusqu’à environ 50 ans peut soulager les problèmes uro-génitaux, réduire le risque d’ostéoporose et de maladies cardio-vasculaires et exercer un effet bénéfique sur le fonctionnement sexuel. En revanche, il peut aussi entraîner des effets secondaires : maux de tête, seins douloureux, pertes de sang vaginales et rétention d’eau. D’autres risques d’effets secondaires négatifs (accidents cardio-vasculaires ou thrombo-emboliques, pathologies de l’endomètre) doivent être examinés et suivis par le médecin prescripteur. L’infertilité non souhaitée, les inconvénients de la ménopause précoce exercent un effet sur le moral de la jeune femme qui peut avoir le sentiment de vieillir avant l’âge. De plus, si une grossesse se déclare, l’enfant risque d’être muté complet X fragile. La consultation d’un psychologue spécialisé dans les problèmes d’infertilité ou la fréquentation d’un groupe de soutien sont recommandées5. Les effets de la prémutation. Les mécanismes de cette maladie associée à la prémutation de l'X fragile et le déclin dans le temps de la réserve ovarienne chez les porteuses de la prémutation ne sont pas encore entièrement compris4. Par ailleurs, on a observé chez les porteuses de la prémutation FMR1 - non atteinte de FXPOI - un risque plus élevé de grossesse multiple (de jumeaux), de développer une maladie thyroïdienne (par exemple, une glande thyroïde sous-active) et d'être affectée de douleurs musculaires. On a aussi observé des similarités moléculaires avec une autre maladie (FXTAS) qui affectent les porteurs de la prémutation FMR1, à savoir : la surabondance de transcription de la protéine FMRP et la présence d'inclusions intranucléaires (voir l'article sur le FXTAS dans le numéro 89 de « L'X presse »). Comme dans le FXTAS, les ovocytes des modèles murins pour le FXPOI montrent des accumulations aberrantes de protéines ressemblant au mécanisme délétère de gain de fonction au niveau de la protéine FMRP soupçonné dans le FXTAS. Les produits L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 8
secondaires aberrant de la protéine FMRP avec de nombreux résidus de glycine formant des inclusions, appelées FMRpolyG pour polyglycines FMRP3 expliquent la pathologie du FXTAS, il reste à vérifier si on peut en déduire qu'un mécanisme similaire sous-tend aussi le FXPOI. Références : 1. ESHRE - Information for women with Premature Ovarian Insufficiency - Patient version 2016 - https://www.eshre.eu/Guidelines-and-Legal/ Guidelines/Management-of-premature-ovarian-insufficiency.aspx 2. Nelson L.M. - Primary Ovarian Insufficiency - N Engl J Med. 2009 Feb 5; 360(6): 606–614. PMCID: PMC2762081 3. Peprah E. - Understanding decreased fertility in women carriers of the FMR1 premutation: a possible mechanism for Fragile X-Associated Primary Ovarian Insufficiency Reproductive Health 2014 11:67. http:// www.reproductive-health-journal.com/content/11/1/67 4. Spath M.A., et al.- Predictors and risk model development for menopausal age in fragile x premutation carriers - Genetics in Medicine 2011 Jul; 13(7): 643–650. PMCID: PMC3132284 5. Fragiele X Vereniging Nederland, VSOP, Nederlands Huisartsen Genootschap - Informatie voor de huisarts over Fragiele X- dragerschapgerelateerde aandoeningen : FXTAS en FXPOI - Soest 2015 ; https://www.fragielex.nl/kennisbank/downloads/ (FXPOI) Glossaire Allèles : Une des formes que peut prendre un même gène, un état possible d’un marqueur génétique – par ex. : des formes différentes d’une séquence d’ADN ou diverses mutations d’un gène porteur d’une maladie. Au sein de la population on trouve plusieurs centaines d’allèles différents, à classer comme normaux, d’un gène ou d’une séquence d’ADN . Cependant on ne peut trouver tout au plus que deux allèles différents sur chaque emplacement de gène chez un sujet, car un individu en règle générale n’hérite que d’un allèle du gène de son père comme de sa mère. Les différences entre les allèles sont causées par des variations de séquence provoquées par des mutations. L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 9
Follicule ovarien : Un follicule ovarien est une enveloppe de forme sphérique localisée dans les ovaires et contenant un ovocyte*. Au cours du processus de maturation, le follicule se développe puis relâche l'ovocyte mature au moment de l'ovulation, ensuite il se transforme en corps jaune puis s'atrophie. Présents dans le corps de la femme dès la période fœtale (avant la naissance) à raison de plusieurs millions d'exemplaires, le nombre des follicules ovariens se réduit avec l'âge : moins de 500.000 à la puberté. Parmi ceux-ci 300 à 400 seulement parviendront à maturité les uns après les autres pour former et libérer un ovocyte au cours de la période fertile d'une femme. La réduction de leur nombre de la naissance à la ménopause est la cause principale de la diminution de la fertilité avec l’âge. Modèles murins : Modèles expérimentaux réalisés à l'aide de souris auxquelles on a enlevé le gène FMR1. Ovocyte : Ou oocyte. L'ovocyte est le nom donné à la cellule sexuelle féminine dont le processus de maturation et de division dans l'ovaire donnera un ovule. Expulsé du follicule au milieu de chaque cycle menstruel, l’ovocyte va cheminer le long des trompes de Fallope et se transformer en ovule lors de la rencontre éventuelle avec un spermatozoïde pour donner un embryon. Répétitions de triplets CGG : Plusieurs maladies neuro-dégénératives sont causées par la répétition d’un triplet CAG, CGG, CTG ou GAA. Une particularité de ce mécanisme de mutation est sa dynamique : dès que le nombre des répétitions de triplets a dépassé un seuil critique il peut s’accroître de génération en génération (mutation dynamique). L’amplification est d’autant plus grande et d’autant plus fréquente que le nombre de triplets est grand. Le degré de gravité et l’âge d’apparition des maladies sont également corrélés au nombre de répétitions des triplets. Au profit de l’AXFB asbl, c’est le samedi 23 février 2019 à 20h00 à l’Aula Magna de Louvain-la-Neuve Infos sur www.x-fragile.be/sbtt L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 10
TÉMOIGNAGE Mon expérience en ETA, propos recueillis par Paul Damas Nous avons publié dans le numéro 87 de « L’X presse » un reportage sur une ETA (entreprise de travail adapté), Village n°1 Entreprises. Nous donnons aujourd’hui la parole à un jeune porteur d’une déficience intellectuelle. Ce témoignage montre que les choses ne se passent malheureusement pas toujours bien. Lionel, 25 ans, est porteur du syndrome de Williams-Beuren. Il nous parle de sa triple expérience dans une ETA. « J’ai connu ma première ETA par un stage de trois semaines organisé par l’école où j’étais. Je devais avoir 16 ans environ, peut-être un peu plus. On m’avait mis avec une équipe chargée de reconditionner des cartons de bouteilles de bière. Mon rôle était d’écraser les anciens cartons devenus inutiles et de les mettre dans un conteneur poubelle. J’avais des difficultés à suivre le rythme des autres, qui se moquaient de moi. Ils insistaient pour que j’aille plus vite, mais je n’y arrivais pas. Ils n’étaient pas très sympas avec moi. Ils s’en foutaient de mes difficultés. Comme cela n’allait pas, on m’a alors affecté à une chaîne d’emballage. Je devais alimenter la L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 11
machine, mais là aussi je n’avais pas le rythme et j’étais trop lent. Je n’ai pas aimé cette expérience, parce que les gens n’étaient pas gentils avec moi et que l’ambiance était assez froide. Je n’ai pas osé parler à la direction de mes difficultés. Donc, ce premier essai n’a pas été concluant. « Plus tard, j’ai eu l’occasion de travailler pour un grossiste de nourriture. Je travaillais de 8h00 à 17h00. Je devais trier la marchandise dans les frigos, préparer des commandes et accompagner la camionnette qui faisait les livraisons. Nous allions jusqu’en France. J’ai bien aimé cette expérience qui a duré 3 ans. Malheureusement, la firme a fait faillite et j’ai dû la quitter. « Vers 21 ans, pour faire plaisir à ma maman, j’ai été travailler dans un restaurant tenu avec d’autres personnes handicapées. Je devais m’occuper de la décoration des tables, du service et du nettoyage, de 8h30 à 16h00. Il y avait environ 60 clients par jour. C’était assez sympa. Il y avait une bonne ambiance. Mais rester debout toute la journée était assez difficile pour moi, c’est pourquoi j’ai arrêté. « Aujourd’hui, je fais de la musique, du « métal extrême », comme batteur dans un orchestre. Cela m’occupe tous les lundis et mardis : on répète en vue de concerts à donner pendant l’été. On a prévu de faire une tournée en France. J’aime beaucoup. Les autres jours, je fais du dessin, j’ai un cours de musique et je fais de la kiné. « J’aimerais avoir un job comme celui chez le grossiste en nourriture. Ou bien travailler dans un magasin de musique. Ou encore travailler dans un garage pour retaper et transformer de vieilles voitures. » Importante nouvelle ! Par lettre en date du 05/07/2018, le Ministre fédéral des Finances nous a informé que notre association est agréée comme institution qui aide les personnes handicapées et que, de ce fait, les dons faits à notre association sont fiscalement déductibles. La décision prend effet au 1er janvier 2018. N’hésitez donc plus à nous aider par vos dons : les dons dont le montant annuel total atteint au moins 40 euros sont déductibles de vos impôts sur les revenus ! Qu’on se le dise ! Et merci d’avance ! L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 12
ASSOCIATIONS La Plateforme Annonce Handicap, par Paul Damas La Plateforme Annonce Handicap est une association sans but lucratif, apolitique et non confessionnelle, fondée en novembre 2010, qui pérennise les travaux de l’association de fait PAH créée suite à un séminaire tenu en mars 2008 à Bruxelles et aux groupes de travail qui ont suivi. Né d’une initiative personnelle de la Fondation Lou en septembre 2007, ce projet s’est rapidement développé dans une réelle volonté d’entendre toutes les compétences et de mutualiser toutes les énergies. C’est ainsi qu’un grand nombre de personnes (parents et professionnels), d’associations et de services se sont joints au projet, ainsi que les pouvoirs publics (dont la Commission subrégionale AWIPH de Liège qui avait déjà entamé un travail de réflexion en la matière). Suite au séminaire de mars 2008, plus de quatre-vingt personnes ont travaillé bénévolement sur ce vaste chantier, que ce soit dans l’organisation générale de la plateforme, dans la participation aux différents groupes de travail qui ont construit et nourri la réflexion, ou encore en acceptant d’analyser les conclusions et les fruits des travaux en qualité de lecteurs avertis. Quarante-deux associations et services ont aussi soutenu moralement ce projet, donnant ainsi du poids et une visibilité à la démarche. L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 13
Enfin, les ministères concernés et leurs administrations ont également apporté un soutien précieux à cette cause. Objectifs En vertu de ses statuts et de ses ambitions, l’association a principalement pour but d’améliorer la qualité de l’annonce du diagnostic d’un handicap et, dans son prolongement, l’accompagnement des personnes handicapées et de leur famille ainsi que l’organisation de la transition entre l’hôpital et le domicile. Elle vise également à : mettre en place une filière et des outils garantissant que toute personne concernée sache qu’elle peut obtenir du soutien et que la société a mis en place des réponses solidaires ; effectuer un travail de veille, d’information et de sensibilisation, en distribuant des livrets spécifiques s’adressant aux professionnels, aux parents, aux proches, aux fratries, etc., et en organisant des formations diverses, tant pour les professionnels que pour le public en général ; favoriser les collaborations en réseau (crèches, parents, personnes en situation de handicap) et les collaborations transversales avec tous les partenaires publics, en matière de santé, d’aide sociale, de santé mentale ainsi que l’ensemble des dispositifs d’intégration sociale. Elle dispose d’un site web (plateformeannoncehandicap.be) sur lequel on peut trouver gratuitement l’ensemble des publications (livrets) disponibles, soit en les commandant, soit en les téléchargeant. Ce site, dont la visite est chaudement recommandée, contient également beaucoup d’information utile pour toute personne intéressée, selon son profil (professionnels, parents ou proches, frères ou sœurs, personnes en situation de handicap, public). L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 14
Une initiative de l’Association X fragile Belgique asbl, avec le soutien de la Région Wallonne et du Kiwanis de Grez-Doiceau COLLOQUE X FRAGILE 2018 Vendredi 12 octobre 2018 de 8h30 à 17h UCL - Louvain-en-Woluwe - Auditoire Central Maisin Avenue E. Mounier 51 - 1200 Bruxelles Accès : Métro ALMA ou Parking Mounier Demande d’accréditation INAMI pour les pédiatres en cours Inscription obligatoire Inscription définitive après réception 0476 28 27 01 - info@x-fragile.be du paiement sur le compte de l’AXFB avant le 30 septembre 2018 BE81 7420 3520 9924 Plus d’infos : www.x-fragile.be Avec mention : « Colloque 2018 » PAF (inclus documentation, collations et sandwiches) Etudiants et membres en ordre de cotisation 2018 € 15,00 Autres familles et enseignants € 25,00 Professionnels € 50,00 Supplément de € 5,00 si paiement sur place. L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 15
PROGRAMME 8h30 - 9h00 Accueil - Café 9h00 - 9h15 Introduction, par Dominique DAMAS, présidente SESSION DU MATIN Présidence : Dr Nicolas DECONINCK, de l’HUDERF de Bruxelles 9h15 - 10h00 Présentation du syndrome X fragile Dr Aurore CURIE, neuropédiatre, de l’Université de Lyon 10h00 - 10h45 Nouvelles perspectives pour l’X fragile Dr Aurore CURIE, neuropédiatre, de l’Université de Lyon 10h45 - 11h00 Pause café 11h00 - 11h45 Description et manifestations cliniques du FXTAS Dr Chantal SELLIER, docteur en sciences de la vie et de la santé, de l’Université de Strasbourg 11h45 - 12h30 Mécanismes physiopathologiques responsables du FXTAS Dr Chantal SELLIER, docteur en sciences de la vie et de la santé, de l’Université de Strasbourg 12h30 - 14h00 Repas et échanges informels SESSION DE L’APRES-MIDI Présidence : Pr Christine VERELLEN-DUMOULIN, de l’IPG de Gosselies 14h00 - 14h45 Conseil génétique et diagnostic prénatal, Dr Delphine HERON, pédiatre généticienne, de l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière de Paris. 14h45 - 15h00 Pause café 15h00 - 16h15 Bonnes pratiques lors de l’annonce d’un handicap Dr Jean-François GRIMMIAUX, médecin généraliste, PAH et Dominique DAMAS, présidente de l’AXFB asbl, PAH. 16h15 - 16h30 Conclusions, par Dominique DAMAS, présidente. L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 16
LES INTERVENANTS Outre sa tâche d’enseignement et ses activités cliniques, la Dr Aurore Curie, neuropédiatre, est active depuis plus de 15 ans dans la recherche relative au X fragile, dans le cadre du centre de compétence dirigé par le Pr Vincent Desportes. Ayant étudié les neurosciences à Boston, elle cherche à comprendre les mécanismes de la déficience intellectuelle d’origine génétique et son impact sur le comportement des individus concernés. La Dr Chantal Sellier, docteur en sciences de la vie et de la santé, a effectué son doctorat à Lille, dans l’équipe du Professeur Villain. Son travail de recherche a consisté à étudier le rôle du pH intracellulaire dans la prolifération des cellules cancéreuses. Elle a ensuite choisi de développer ses recherches sur l’étude de maladies neurodégénératives et a, pour cela, rejoint l’équipe du Dr Nicolas Charlet à l’Institut de Génétique et Biologie Moléculaire de Strasbourg. Chargée de recherches INSERM, son travail se focalise sur l’analyse des mécanismes physiopathologiques impliqués dans les maladies neurodégénératives dues à des expansions de séquences répétées d’ADN dans le génome et plus particulièrement sur le syndrome d’ataxie et de tremblement lié à l’X fragile (FXTAS). Ce syndrome est dû à des expansions de répétions de L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 17
séquences d'ADN plus ou moins longues dans le gène FMR1. L'expansion de répétition anormale de ces séquences d'ADN est à l'origine de la maladie. A l’aide de modèles cellulaires et murins, ses recherches visent à comprendre comment et par quels mécanismes ces répétitions conduisent à la mort des neurones. Ainsi, elle vise à une meilleure compréhension des mécanismes conduisant au syndrome FXTAS, susceptible de mener au développement de nouvelles stratégies thérapeutiques. La Dr Delphine Héron, pédiatre généticienne, est spécialiste des déficiences intellectuelles de causes rares et du dépistage génétique prénatal. Outre son activité de clinicienne à l’Hôpital parisien de la Pitié Salpétrière, elle a publié plusieurs études relatives au dépistage et au conseil génétique associé. Elle a entre autres participé à l’expertise collective de l’INSERM relative à la déficience intellectuelle dont nous avons parlé dans le numéro 85 de « L’X presse ». Le Dr Jean-François Grimmiaux, médecin généraliste, ancien chef de service des soins palliatifs des Cliniques de l’Europe à Bruxelles, est médecin formateur à la SSMSG (société scientifique de médecine générale) pour l’ « Annonce de la mauvaise nouvelle ». Il est membre du conseil d’administration de la Plateforme Annonce Handicap. Dominique Damas, économiste de formation, est maman de trois enfants porteurs du syndrome X fragile. Présidente de l’association X fragile Belgique asbl depuis cinq ans, elle est aussi membre et formatrice de la Plateforme Annonce Handicap (PAH) pour l’ « Annonce de la mauvaise nouvelle ou du handicap ». Depuis le diagnostic, elle a à cœur de sensibiliser les professionnels et le grand public au vécu des familles touchées par le handicap. L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 18
RECHERCHE Que peut espérer l'X fragile de la technologie CRISPR ? La technologie CRISPR a récemment suscité beaucoup d’espoir parmi les familles X fragile. Cette technologie génétique révolutionnaire pourrait peut-être permettre, comme avec des ciseaux, de faire disparaître les répétitions CGG surnuméraires ! Nous faisons le point sur ce sujet, qui a déjà fait l’objet d’une présentation lors de notre dernière assemblée générale, à l’aide d’un extrait d’article paru sur le site de la fondation américaine FRAXA. 14 août 2018 Dave Bjork, directeur des relations avec les communautés chez FRAXA, a récemment rencontré Peter Todd, MD, PhD, professeur adjoint au Département de neurologie de la faculté de médecine de l’Université du Michigan. Il y a peu de temps le Dr Todd a reçu une subvention de recherche FRAXA pour la réactivation de gènes avec l'utilisation de CRISPR. On a beaucoup parlé de CRISPR dans la presse ces derniers temps. Vous utilisez CRISPR dans la recherche sur le syndrome de l'X fragile. Pouvez-vous nous en dire davantage ? La première étude avec le procédé CRISPR portant sur le syndrome de l’X fragile a été réalisée en utilisant le système CRISPR-CAS9 pour supprimer les répétitions de triplets CGG. Ce procédé a fonctionné dans les cellules L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 19
souches et les neurones dérivés de patients. Deux groupes de chercheurs ont pu utiliser ce procédé pour supprimer les répétitions, déclencher la transcription de l'ARNm en protéine FMR1 et obtenir une expression améliorée de la protéine FMRP (Park et al, 2015 et Xie et al, 2016). Cependant, toutes les cellules ciblées avec CRISPR-CAS9 ne subissent pas la correction - probablement à cause d’une inefficacité dans l’incorporation de ces complexes dans les cellules et des imperfections dans le ciblage du complexe sur le gène FMR1. Aucun des deux groupes n'a été en mesure de démontrer que ces techniques fonctionnaient dans un modèle animal et rien ne prouvait que la correction entraînerait un comportement normal des neurones. Cependant, ces études étaient importantes pour établir que le gène pouvait être ciblé et corrigé dans les cellules des patients en utilisant cette technique. Cette année, Rudolf Jaenisch et ses collègues du MIT ont démontré qu’ils pouvaient utiliser le système CRISPR-dCAS9 pour cibler une enzyme appelée TET1 dans les répétitions de triplets CGG afin de déméthyler le gène FMR1 (Liu et al, 2018). Après essai, la transcription du gène a été réactivée et la production de protéine X fragile a démarré dans les cellules dérivées du patient. Ils ont pu démontrer que cette réactivation de l'expression de la FMRP a conduit les cellules à se comporter plus normalement que les cellules X fragile dont elles étaient issues. Ils ont également pu démontrer que le gène s’est maintenu après la transplantation de ces cellules X fragile dans des souris. Notre propre groupe a généré des données indépendantes (avec une subvention FRAXA) qui complètent les conclusions du groupe de R. Jaenisch. Nous avons utilisé une protéine de fusion dCAS9 différente, appelée VP192, pour essayer de réactiver directement la transcription à partir du gène FMR1. Tant dans les cellules souches embryonnaires humaines X fragile et celles de contrôle, le ciblage de ce complexe CRISPR-dCAS9 sur les répétitions de triplets CGG conduit à une réactivation de la transcription de FMR1. Cependant, dans les cellules souches et les neurones présentant des expansions de répétitions très importantes (> 1000 CGG), cette réactivation de la transcription ne provoque pas une augmentation significative de la production de protéines FMRP. L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 20
Nous interprétons cela comme une indication que dans les cas de très grands nombres de répétitions, la réactivation de la transcription seule peut ne pas être suffisante pour corriger le déficit en FMRP observé chez les patients atteints du syndrome de l’X fragile. Ce travail est soumis pour publication et est en cours de révision (Haenfler et al, 2018, à l'étude). Est-il réaliste d'utiliser CRISPR pour réactiver sélectivement le gène X fragile chez les patients X fragile ? Je pense que les études réalisées à ce jour sont très prometteuses. Elles démontrent que le gène peut être réactivé, soit en éliminant les répétitions directement, soit en ciblant la méthylation et l’absence de transcription induite par les répétitions de triplets. Aussi, en principe, je suis très enthousiasmé par les perspectives de ces approches. Cependant, cette technologie est encore immature. A ce stade, nous corrigeons toujours les problèmes qui se présentent sur des cellules à l’intérieur d'une éprouvette. L'amélioration de l'efficacité de ces corrections est vraiment un problème d'ingénierie, mais de nombreuses personnes travaillent dans le monde entier pour y remédier. Réaliser la réactivation de l'expression de FMR1 à partir d'un gène humain chez des souris vivantes constituera une prochaine étape critique pour établir que ces approches pourraient être transférables cliniquement. Ces études seront difficiles étant donné que nos modèles animaux actuels ne possèdent pas ce mécanisme de désactivation du gène FMR1 qui survient chez les patients X fragile. Les autres étapes indispensables dans l’expérimentation seront d'établir que ces approches n'ont pas d'effets secondaires significatifs. Les répétitions de CGG sont courantes dans nos génomes, de sorte que cette approche peut avoir des impacts imprévus. L'édition de gènes avec CRISPR-CAS9 est spécifique, mais il apparait souvent qu’elle n’est pas parfaitement spécifique. Par conséquent, ces questions doivent être réglées sur le plan technique avant de pouvoir transposer le procédé sur des patients Je vois deux questions clés auxquelles il faut répondre à mesure que la recherche dans ce domaine progresse : Nous ne savons pas encore dans combien de cellules il faut réactiver l'expression de la FMRP pour obtenir des améliorations des symptômes L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 21
cliniques chez les patients X fragile ou même dans le modèle murin X fragile. Nous ne savons pas encore si la réactivation du gène FMR1 après le développement du cerveau (c'est-à-dire après la naissance) suffira à corriger les problèmes. Les expériences réalisées semblent indiquer qu’il faudra récupérer le plus possible d'expression de FMRP, mais reste à savoir combien pour être utile. Nous ne savons pas encore quel sera l'impact de la réactivation de l'expression d'une très grande répétition de CGG sur les patients X fragile ou dans les systèmes des modèles. Les répétitions de CGG transcrites peuvent être toxiques pour les neurones et peuvent elles-mêmes être traduites en protéines toxiques. Nous pensons que l’expression amplifiée de longues répétitions de CGG cause le FXTAS. Par conséquent, si nous essayons de rétablir le gène en présence de très grandes répétitions, cela peut s'avérer dangereux. Des efforts pour corriger ces effets peuvent s’avérer nécessaires si la réactivation des gènes devient une approche thérapeutique viable à l'avenir. Il est important de répondre à ces questions, peu importe l'approche qui sera utilisée pour rétablir l'expression de la FMRP. Beaucoup de familles croient qu’un traitement par CRISPR ne sera effectif que dans des décennies. Que leur diriez-vous? Que devraient savoir les familles X fragile sur l'état actuel et les implications futures de CRISPR ? Je suis d'accord avec le fait que nous sommes loin d'utiliser CRISPR pour corriger le défaut du gène ou pour corriger le gène chez les patients affectés par l’X fragile. Cependant, cette technologie se développe très rapidement, et ce qui semble être un plan sur la comète pourrait prendre forme dans un avenir pas trop lointain. La raison pour laquelle ces approches suscitent tant d’intérêt est que si nous pouvons déterminer les aspects pratiques de la transplantation et de la spécificité du procédé CRISPR, il pourra être utilisé pour traiter de nombreuses maladies, pas seulement l’X fragile. Donc, les progrès techniques se développeront rapidement. En outre, je pense que ces outils nous en apprendront davantage sur la façon dont le gène est désactivé et comment nous pourrions le réactiver en utilisant des approches plus simples - avec de petites molécules et des L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 22
médicaments. Même si CRISPR n'est pas le remède, il pourrait nous orienter dans la bonne direction. Selon vous, quel serait l’impact sur les adultes atteints de X fragile? Comme mentionné précédemment, je pense que nous ne le savons pas actuellement et c'est une question importante pour la recherche. J'espère que les chercheurs dans le domaine de l’X fragile vont s’y attaquer à présent que le concept de réactivation du gène sur un adulte est plus plausible. Si la réactivation du gène à l'âge adulte améliore les choses, alors nous devrions concentrer nos efforts de recherche dans ce domaine. Source : Fondation FRAXA, traduit par Françoise Goossens. Extrait de : https://www.fraxa.org/how-promising-is-crispr-for-fragile-x/. Qu’est-ce que la fondation FRAXA ? C’est une fondation américaine qui, comme son sigle l’indique, s’est donné pour mission de financer la recherche scientifique dans le domaine du syndrome X fragile. Son but est d’accélérer la recherche en vue de trouver finalement un remède pour le syndrome X fragile. De nombreuses études, au Etats-Unis bien sûr mais aussi en Europe et en Asie ont pu bénéficier de ses financements. Nous en avons recensé pas moins de 66, rien que pour la période 2011 - 2017, pour des montants de l’ordre de 800.000 à 1.000.000 dollars par an ! Pour être complets, nous mentionnerons encore que les projets de recherche ne concernent pas seulement le domaine génétique et biochimique, mais aussi le domaine médical et le domaine comportemental. Vous avez un peu de temps pour l’Association ? Nous cherchons des bénévoles pour des actions ponctuelles, par exemple pour tenir un stand. Aucune compétence particulière n’est requise. Contactez-nous par mail (info@x-fragile.be) ou par téléphone (0476.282.701) ! Merci d’avance pour votre aide ! L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 23
ENSEIGNEMENT Mon expérience avec un enfant X fragile, par Nathalie Monjoie Nathalie Monjoie, enseignante maternelle, a eu l’occasion d’intégrer dans sa classe Arno, un enfant porteur du syndrome X fragile, avec l’aide d’une logopède. De cette expérience, elle a rédigé un mémoire de fin d’études, dont nous n’avons pas résisté à vous reproduire ici les conclusions, en espérant que ce témoignage fasse tache d’huile. J’ai essayé de comprendre et d’analyser comment, dans une classe maternelle, collaborer avec une logopède et enrichir nos pratiques au service d’un enfant présentant le syndrome de l’X fragile. Pour éclairer cette question, j’ai choisi d’analyser une nouvelle forme de collaboration avec une logopède qui consistait à faire rentrer celle-ci en classe et à travailler ensemble avec l’enfant atteint de la maladie au service de tous les élèves. Ma recherche illustre qu’au niveau de l’apprentissage de l’enfant à besoins spécifiques plusieurs avantages sont à retenir. Être entouré d’enfants dans un petit groupe hétérogène tire celui-ci vers le haut. Il est plus souvent sollicité. Les interactions que les enfants ont entre eux sont toujours porteuses d’un bénéfice au niveau du langage et du comportement à adapter. Inclure l’enfant différent dans un petit groupe de travail avec les élèves de la classe et avec la logopède lui permet de participer, à son niveau, aux activités de la classe. En étant soutenu par la logopède dans les activités, il développe et évolue fortement dans son langage, sa syntaxe et sa conscience phonologique, ainsi que son autonomie. Il peut être repris dans ses erreurs tout de suite et toujours d’une manière bienveillante. Son apprentissage est porteur de sens car intégré dans une activité de classe partagée avec ses condisciples. En tenant compte de ses besoins et motivations du moment, il est possible L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 24
d’avancer avec lui dans des activités riches d’enseignements, en misant sur la qualité du travail de deux fois une demi-heure d’activité. La motivation est quelque chose de fondamental dans l’apprentissage que j’ai pu encore mieux percevoir avec Arno. Pour moi, grâce à ce dessin animé « Cars » et à la musique, deux choses qui lui tenaient à cœur, j’ai pu développer chez lui d’autres compétences. Faire rentrer une logopède dans une classe est une expérience enrichissante. L’enfant n’est plus montré du doigt en le sortant de la classe, au contraire il est très fier de « partager » sa logopède et de présenter ce qu’il fait avec elle. Les autres élèves sont très curieux de connaitre les activités. En ce qui concerne les autres élèves, avoir un enfant différent dans une classe apporte des habilités sociales et une ouverture d’esprit. Deux belles qualités se sont mises en place : la tolérance et la patience. Les parents de la classe ont ressenti auprès de leur enfant ce grand bénéfice : la différence. Les autres enfants en difficultés ont trouvé également une aide. Ils ont été soutenus régulièrement en petits groupes par deux professionnelles dans leurs difficultés. Pour les élèves qui étaient suivis par la logopède en individuel, ils avaient en plus cet appui en classe. Dans le groupe, les enfants s’aidaient, connaissaient parfois les réactions que Arno pouvaient avoir et ils anticipaient son attitude. Il y avait des comportements qui n’étaient pas toujours faciles à gérer mais j’ai chaque fois essayé d’en tirer profit afin de garder cette dynamique de coopération. La participation de la logopède dans la classe offre des privilèges également. J’ai pu lui faire découvrir une classe maternelle, mon travail de chaque jour. Aller à la rencontre de l’autre est toujours une expérience enrichissante. Elle a pu m’apporter des idées différentes grâce à ce qu’elle fait avec des enfants en individuel et qui fonctionne avec un groupe-classe. Comme elle est habituée à travailler avec des élèves en difficultés, elle possède d’autres manières d’aborder certains concepts. L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 25
Elle-même a vu Arno dans un autre contexte. La socialisation avec les autres élèves de la classe lui donne une information supplémentaire sur son développement global. Notre collaboration offre une aide professionnelle supplémentaire, elle connait les objectifs à atteindre. Sa présence permet de soutenir un petit groupe d’élèves en classe en plus de l’institutrice. C’est un appui complémentaire dans le bilan final de l’enfant. Nos échanges sont constructifs pour les parents de l’élève à besoins spécifiques. En ce qui me concerne, je trouve qu’elle m’a apporté énormément aussi. Sa discrimination auditive m’a contaminée, j’ai pu l’observer et comprendre comment corriger les enfants qui ont un souci de langage et un défaut de prononciation. Je me suis sentie aidée dans mon métier d’enseignante. Quand j’avais des doutes, je pouvais toujours me rassurer auprès d’elle. J’ai pu organiser plus d’activités riches d’apprentissages, les réflexions étaient basées sur les difficultés des enfants. En définitive, je trouve que c’est toute une classe qui est motivée et qui apprend, en mélangeant l’échange, l’énergie et la relance. J’ai pu vous montrer le cheminement parcouru par Arno. Je suis également convaincue que les enfants apprennent avec leurs émotions et leurs sens, Arno me l’a fait percevoir encore plus. L’importance du déjà-là, de la collaboration avec toute l’équipe qui accompagne l’enfant a été capital dans le développement d’Arno. Ce qui a été difficile pour moi, c’est ce combat de tous les jours, de reconnaître Arno comme un enfant avec des besoins spécifiques et de me justifier régulièrement auprès de mes collègues. Inclure des enfants différents dans nos classes reste encore quelque chose de difficile à accepter dans notre société d’aujourd’hui. Je ne perds cependant pas espoir quand je vois des petites semences qui se font dans certaines écoles… Je suis contente d’avoir vécu cette expérience et je me suis sentie grandie dans mon métier. L’X Presse 91 | AXFB asbl | octobre 2018 26
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