NUMÉRO 1 LE NOUVEAU DIMITRIJ OVTCHAROV - # 27 - Association Tennis de Table ...
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LA REVUE OFFICIELLE DE LA FÉDÉRATION FRANÇAISE # 27 DE TENNIS DE TABLE JANVIER-FÉV. 2018 DIMITRIJ OVTCHAROV LE NOUVEAU NUMÉRO 1 ACTUALITÉ ENTRETIEN DOSSIER LES MONDIAUX JEAN-RENÉ LES FRATRIES JUNIORS MOUNIÉ DU PING > Page 4 > Page 10 > Page 20
Le président Christian Palierne, les membres du Conseil fédéral de la Fédération française de tennis de table, la Direction technique nationale et le personnel fédéral vous adressent leurs Meilleurs Voeux pour 2018
ÉDITO / SOMMAIRE 3 4 ÉVÉNEMENT Championnats du Monde juniors UNE ANNÉE GRANDIOSE 10 ENTRETIEN Une année vient de se terminer, Jean-René Mounié une autre commence. Que nous réservent les prochains mois ? 16 BRÈVES FRANCE N’ayons pas peur de les imagi- 20 DOSSIER ner brillants et pleins de bonnes Les fratries du ping surprises. Avec une Coupe du Monde par équipes au mois de 26 CLUBS février, des Mondiaux par équipes Paris 13 Tennis de Table au printemps, puis le rendez-vous toujours très attendu des champion- 30 CULTURE PING Une année vient de se terminer. nats d’Europe individuels au mois Elle s’annonçait comme une sai- de septembre, l’équipe de France Ping diplomatique son de transition, après les fastes ne manquera pas d’occasions de vécus par le tennis de table français se frotter à la concurrence interna- 34 CONSEILS en 2016, avec l’historique finale tionale. Simon Gauzy et Emmanuel Le renforcement de l’épaule entre Emmanuel Lebesson et Simon Lebesson en tête, les Bleus ont pris Gauzy aux championnats d’Eu- confiance, ils ne craignent plus 36 AUTOUR DU MONDE rope. À l’heure de regarder dans d’afficher leurs ambitions. La réus- 40 PORTFOLIO le rétro, 2017 restera pourtant site les attend au bout de la route, un grand cru. L’équipe de France demain ou au plus tard après- Grandes finales du World Tour ITTF a confirmé son statut de grande demain. J’en ai la conviction. 48 DÉCRYPTAGE nation du ping européen, en rame- En 2018, la France recevra au nant du Luxembourg une médaille mois d’octobre la Coupe du La saison internationale de bronze par équipes chez les Monde masculine. L’événement est garçons. Avec un groupe en de taille, l’enjeu planétaire, le défi 50 PROFIL reconstruction, jeune et plein d’al- immense mais passionnant, pour Bernard Bousigue lant, les filles progressent. Quant les deux joueurs français qui pour- aux cadets et juniors, ils ne quittent raient y gagner leur billet, mais 52 ÉQUIPE DE FRANCE plus le sommet continental, mal- aussi pour la Fédération. Avec un Les grandes dates de l’année gré un changement de génération. tel programme, il est difficile de ne En 2017, surtout, Simon Gauzy a pas se montrer impatient. L’année 54 COUPE DU MONDE 2018 réussi le tour de force de pousser s’annonce sportivement grandiose. 56 VIE FÉDÉRALE d’une main décidée et volontaire Vivons-là pleinement, sans retenir la porte du top 10 mondial. En nos émotions ni bouder notre plai- 60 BANDE DESSINÉE novembre, il pointait au huitième sir. Bonne année pongiste. Very Bad Ping : Sous perf rang, une position que le tennis de table français n’avait plus connue Christian Palierne 62 RÉTRO depuis le temps de Jean-Philippe Président de la Fédération La Trinité Sports TT 1986 Gatien et des Mousquetaires. française de tennis de table 65 QUE SONT-ILS DEVENUS ? Zoran Primorac 66 AGENDA LA REVUE OFFICIELLE DE LA FÉDÉRATION FRANÇAISE Ce numéro est distribué avec deux encarts jétés : un cahier technique de 4 pages (20 x 28) et un poster (40 x 60 cm) DE TENNIS DE TABLE Association régie par la loi de 1901 Ont collaboré à ce numéro : Commission paritaire n°1120 G 80089 Siège social : Morgane Le Gall, Jérémy Vallée, Joël Chaillou, ISSN : 2270-7948 FFTT - 3, rue Dieudonné Costes - 75013 Paris Jean-François Kahn, Virginie Poupin, Françoise Lapicque. Dépôt légal à parution Tél. 01 53 94 50 00 - pingpongmag@fftt.email Photos et illustrations : Impression et flashage : Directeur de la publication : Christian Palierne Rémy Gros, ITTF, Last, Rémy Deluze, Manfred Schillings, Imprimerie ETC INN Directrice adjointe de la publication : Françoise Lapicque Vincent Kovacs, Jean-Marie Hervio, Archives FFTT avenue des Lions Rédacteur en chef : Alain Mercier (agence Alinéa) Sainte-Marie des champs - BP198 Rédaction : Camille Vandendriessche, Etienne Bonamy, Votre publicité dans Ping Pong Mag : 76196 Yvetot Cedex Alexandre Sarkissian pingpongmag@fftt.email ou 01 53 94 50 17 Secrétaires de rédaction : Marion Foissotte, Marie-Paule Montagut La reproduction des dessins, photographies Création graphique : Illustrasport et textes est interdite sans l’autorisation Réalisation : Emmanuel Simon écrite du magazine. Prix au numéro : 8€ Abonnement annuel (6 numéros) : France métropolitaine : 39€ / Etranger et Outre-Mer : 55€ # 27
4 ÉVÉNEMENT TOUT PRÈS ET TRÈS LOIN À Riva del Garda, les quelques coups d’éclat de l’équipe de France juniors n’ont pas suffi à créer la surprise tant espérée. Privés de podium, les six Bleuets présents en Italie ont pu mesurer le travail qu’il leur reste à accomplir pour combler l’écart avec le sommet mondial. Le tirage au sort avait annoncé la l’épreuve par équipes. Opposés dans une bataille pour le moins couleur : pour leur entrée en compé- à la Chine et ses têtes de série déséquilibrée. La suite n’a réservé tition, les juniors tricolores seraient numéro 1, 3 et 5, Irvin Bertrand aucune surprise. Les Français sont plongés dans le grand bain dès (n°15), Bastien Rembert (n°22) et certes restés à distance de leurs le premier match de poules de Jules Rolland (n°28), s’engageaient adversaires sur la feuille de résul- De gauche à droite : Léo de Nodrest, Irvin Bertrand, Jules Rolland et Bastien Rembert. # 27
ÉVÉNEMENT 5 La sensation est venue du Suédois Truls Moregard. © photos FFTT/Rémy Gros tats (défaite 3-0), mais ils ont su par moments s’en approcher de près. Contre le numéro 3 chinois, Jules LA CHINE, PUISSANCE IMPÉRIALE Rolland a mené deux sets à zéro, laissant planer l’espoir de recol- En raflant les sept titres mis en jeu en Italie, l’équipe de Chine a signé un retour ler à une manche partout face aux écrasant au sommet de la hiérarchie mondiale. En 2016, elle avait dû se contenter futurs vainqueurs du tournoi. Mais d’une seule médaille d’or, victime de la supériorité du Japon et de la Corée du Sud. à l’image de leurs championnats, Douze mois plus tard, les joueurs chinois ont su tirer profit de l’absence des Japonais les Bleuets ont trop souvent peiné à Tomakozu Harimoto et Miu Hirano, tous deux numéros 1 mondiaux, pour réaliser conclure. Lors du deuxième match leur cinquième sans-faute dans l’histoire de la compétition. «Les Chinois se sont rendu de poules, ils ont eu besoin de cinq compte qu’ils ne gagnaient pas tout s’ils n’envoyaient pas leurs meilleurs joueurs. Ils parties pour écarter l’Inde (3-2), et ont voulu rétablir les choses et l’ont bien fait», analyse Jean-Claude Decret. valider leur ticket pour le quart de Derrière l’intouchable Xue Fei, sacré à quatre reprises en individuels et par équipes, finale. «On gagne difficilement face la sensation est venue du Suédois Truls Moregard, tête de série n°17. Encore cadet, à l’Inde alors qu’on est meilleurs, le prodige de 15 ans a enchaîné les performances et les matchs-marathons pour confirme David Johnston, l’entraî- n’échouer qu’en finale. «Il faut que nos jeunes Français s’en inspirent pour se neur de l’équipe masculine. Sur la décomplexer et croire que c’est possible», note le directeur des équipes de France. première journée, on savait qu’il Avec la Suède, la Roumanie est la seule autre nation européenne à s’être hissée fallait monter le niveau de jeu pour sur un podium, s’emparant de trois médailles de bronze, en double dames et par espérer quelque chose.» équipes. Car derrière, le sort a une nouvelle C.V. fois mis un géant sur la route trico- # 27
6 ÉVÉNEMENT Leïli Mostafavi Lucie Gauthier lore : le Japon, champion du monde cela laisse des regrets. Ce n’est des duos russe et sud-coréen. «On en titre. Privés du prodigieux pas la première fois qu’on perd en est un peu passés à côté», recon- Tomakazu Harimoto, les Nippons quart de finale, mais comme aux naît Bastien Rembert, défait 3-1 en ont rapidement mené 2-0 avant deux derniers championnats d’Eu- compagnie de Jules Rolland. «Ça que Bastien Rembert ne sonne la rope, nous finissons à la cinquième s’est vraiment joué à rien, estime révolte. Face à Masaki Takami, place. C’est la médaille en choco- Irvin Bertrand, battu 3-2 aux côtés numéro 3 japonais, le nouveau lat, mais au moins les jeunes se sont de Léo de Nodrest. On a été moins venu à ce niveau de compétition a bien ressaisis. Il manque un peu bons sur les placements tactiques réussi la prouesse de s’imposer 3-2. d’expérience à cette équipe. Mis à à partir de 2-2. Quand ça a com- Quelques minutes plus tard, Irvin part Irvin, qui a déjà joué pas mal mencé à être serré, on a commis Bertrand disposait lui aussi de Yuto de matchs au niveau international, quelques fautes et ils ont été meil- Kizukuri, membre du top 100 mon- les trois autres sont encore un peu leurs sur la fin.» dial chez les seniors, sur le même en carence à ce niveau-là, notam- score, ramenant les deux équipes ment dans les moments importants. à égalité. À seulement une victoire Par équipes, c’est un coup l’un, un LES OCCASIONS des demi-finales, les Tricolores sont coup l’autre. Quand l’un joue bien, GÂCHÉES vite revenus à la dure réalité avec la les autres jouent moyennement. défaite de Jules Rolland contre Yuta Cela manque encore de stabilité. En double mixte, Jules Rolland et Tanaka à la belle (3-0). «On com- Mais les joueurs sont très sérieux, Lucie Gauthier étaient forcément mençait vraiment à y croire, mais le appliqués et professionnels. Ils sont attendus au tournant, quatre mois Japonais n’a laissé aucune chance sur la bonne voie, même s’il faut après leur titre européen chez les à Jules», confie Bastien Rembert. En continuer à travailler.» juniors. Seulement 28 e au clas- matchs de classement, les Français Dans les tableaux individuels, les sement d’avant-tournoi, la paire ont néanmoins su rebondir pour Bleuets n’ont, encore une fois, que tricolore a logiquement buté sur une venir à bout des Taïwanais et des trop rarement su profiter des oppor- équipe chinoise qui atteindra les Allemands sur le même score (3-1) tunités qui s’offraient à eux. Éliminés demi-finales du tableau. «Ils étaient grâce, entre autres, aux quatre suc- par trois joueurs asiatiques en sei- beaucoup plus forts, mais ça nous cès de Léo de Nodrest en autant de zième de finale du simple, Irvin montre ce qu’on doit travailler pour parties. Bertrand, Jules Rolland et Bastien atteindre ce niveau», relativise la Rembert n’ont pas réussi à élever Française. Associé à la Bulgare suffisamment leur niveau de jeu. Daria Trigolos, Bastien Rembert est, MANQUE Seul Léo de Nodrest a frôlé l’exploit quant à lui, passé tout près d’une DE STABILITÉ au premier tour, en menant 3 sets à qualification en huitièmes de finale 1 contre le Suédois Truls Moregard, face aux futurs finalistes coréens «Globalement, nous ne pouvions futur vice-champion du monde. En (défaite 3-2). «Nous avons eu des pas faire beaucoup mieux, même double, les paires françaises pou- occasions, on menait 9-6 à 2-0 ou si nous avons eu une chance en vaient également espérer mieux 2-1, mais sans pouvoir conclure», quart de finale face aux Japonais, que le deuxième tour. Têtes de série regrette le Nantais. analyse David Johnston. Quand on numéros 11 et 12, les Tricolores Côté féminin, peu d’espoirs étaient ne passe pas si loin de la médaille, ont été respectivement stoppés par permis eu égard au modeste clas- # 27
ÉVÉNEMENT 7 Xue Fei et Truls Moregard LES PODIUMS PAR ÉQUIPES Juniors garçons : 1. Chine, 2. Japon, 3. Corée du Sud, Roumanie Juniors filles : 1. Chine, 2. Japon, 3. Corée du Sud, Roumanie INDIVIDUELS Simple juniors garçons : 1. Xue Fei (CHN), 2. Truls Moregard (SWE), 3. Wang Chuqin (CHN), Niu Guankai (CHN) Simple juniors filles : 1. Sun Yingsha (CHN), 2. Wang Manyu (CHN), 3. Qian Tianyi (CHN), Miyu Kato (JPN) Double juniors garçons : 1. Wang Chuqin/ Xue Fei (CHN), 2. Jaehyun An/Hogyun Baek (KOR), 3. Yukiya Uda/Yuta Tanaka (JPN), Masaki Takami/Yuto Kizukuri (JPN) Double juniors filles : 1. Shi Xunyao/Sun Yingsha (CHN), 2. Qian Tianyi/Wang Manyu (CHN), 3. Miyu Kato/Miyu Nagasaki (JPN), © photos FFTT/Rémy Gros Miyuu Kihara/Mitsuho Kimura (JPN) Double mixte : 1. Xue Fei/Wang Manyu (CHN), 2. Jaehyun An/Jiho Kim (KOR), 3. Cristina Pletea/Adina Diaconu (ROU), Wang Chuqin/Sun Yingsha (CHN) Sun Yingsha Les Roumains Cristina Pletea/Adina Diaconu. sement des deux représentantes un premier set remporté face à la françaises. Respectivement 40e et troisième meilleure paire du tour- 50e des engagées, Lucie Gauthier noi, composée des Japonaises Miyu et Leïli Mostafavi sont parvenues à Kato et Miyu Nagasaki. Comme sortir de la phase de poules, mais leurs coéquipiers, elles disposent elles ont échoué dès le premier tour encore d’une dernière année en du tableau principal. Si la seconde juniors afin de combler leurs lacunes a logiquement cédé 4-0 face à la et de montrer un meilleur visage lors Roumaine Adina Diaconu, tête de des prochains Mondiaux de la caté- série numéro 6, la première admet gorie, prévus à Bendigo (Australie) ne pas avoir su saisir sa chance en 2018. «Nous pouvons y espérer contre la Taïwanaise Su Pei-Ling. mieux pour nous rapprocher d’un «J’ai quelques regrets sur ce match podium, en simple ou par équipes, parce que je peux le gagner, confie se projette David Johnston. Le Lucie Gauthier. Je mène souvent et niveau sera toujours aussi relevé, au final, je perds des sets serrés. mais on dispose d’une marge de Elle a été plus forte que moi dans manœuvre pour progresser.» les moments importants.» En double, les deux Tricolores n’ont Camille Vandendriessche pas franchi le premier tour malgré # 27
8 ÉVÉNEMENT « JE M’ATTENDAIS À PLUS DE RÉVÉLATIONS » Jean Claude Decret, directeur des équipes de France L’épreuve par équipes la compétition, en 16e de finale, dans (Adina Diaconu), qui était beaucoup «Cette cinquième place, au pied du les 32 meilleurs mondiaux. Cela situe plus forte. Elle doit aussi travailler sur podium, constitue un résultat cor- globalement leur niveau actuel, même des secteurs qui lui sont propres. rect. Nous partions moins forts que le s’ils jouent parfois mieux. On devrait En double mixte, les classements indi- Japon mais, sur le déroulé du match en retrouver au moins un en quart. viduels modestes de Jules (Rolland) et sur l’observation de la compétition, Léo (de Nodrest) a fait un super match et Lucie n’ont pas favorisé de bons nous aurions pu, avec un peu plus au premier tour face au Suédois (Truls tableaux. Quant aux doubles messieurs d’expérience et de clairvoyance, sans Moregard), il aurait mérité de l’empor- et dames, les Français ont assez rapi- s’en faire une montagne, attaquer le ter. Il est capable de jouer des gros dement disparu. Je ne suis pas vraiment match avec davantage de confiance. satisfait du bilan. Cela me semblait dif- Finalement, on s’est aperçu que les ficile de remporter une médaille, mais Japonais étaient forts, certes, mais on venait avec le secret espoir d’avoir qu’ils étaient prenables. À la belle, une bonne surprise. J’espérais qu’un quand Jules Rolland a l’occasion d’éga- garçon ou une fille se distingue, ou que liser à un set partout en menant 10-8 ça tourne un peu mieux par équipes. au deuxième set, il a des possibili- Je ne m’attendais pas à des médailles, tés. Sur le premier match, c’est pareil. mais à plus de révélations.» Face à Nizukuri, Jules a obtenu des occasions. Il perd 3-1, mais mène plu- Les perspectives pour sieurs sets. Avec plus d’expérience et l’édition 2018 de confiance, il était possible d’inver- «Le contexte s’annonce plus favorable ser la tendance. C’est un petit regret, en 2018, tant sur les Championnats comme celui d’être tombé sur les deux d’Europe des jeunes que sur les futurs finalistes (Chine et Japon). On n’a Mondiaux. Mais il va falloir mettre des © FFTT/Rémy Gros pas eu de chance à ce niveau-là. Dans choses en place, car la concurrence est un autre groupe, nous avions peut-être forte. Les cadets qui passent juniors, notre place sur le podium, comme la comme le Suédois Moregard et le Russe Roumanie et la Corée du Sud. Sidorenko, vont être très performants et Globalement, le comportement des viennent s’ajouter à l’opposition déjà garçons a été satisfaisant. Le problème Léo de Nodrest existante. Les Asiatiques seront tou- de cette équipe est qu’elle n’a pas de jours aussi bons, avec leur densité de leader. Nous avons trois-quatre bons matchs, mais reste très irrégulier. Quant joueurs. Les Français auront un an de joueurs sensiblement du même niveau, aux filles, on pouvait s’attendre à ce que plus, mais ce ne sera pas plus facile. mais pas exceptionnels. Aucun ne va Lucie (Gauthier) obtienne un résultat un Il va falloir travailler pour élever un ou nous faire gagner systématiquement peu meilleur après sa qualification aux deux joueurs à un statut de leader. Je un, voire deux matchs, pour emmener Jeux olympiques de la Jeunesse. Elle est reste assez positif par rapport à cela. le reste de l’équipe. Peut-être qu’ils le tombée sur une joueuse (Su Pei-Ling) Léo, Jules et Bastien (Rembert) sont deviendront, vu qu’ils ont encore une qu’elle pouvait battre, mais a été peu à des joueurs neufs. Ils n’ont pas beau- année en junior. On peut l’espérer pour peu rattrapée par ses défauts habituels. coup d’expérience et de métier derrière l’année prochaine, même si ça ne vient Lucie possède beaucoup de qualités eux, même en termes d’entraînement. pas d’un coup de baguette magique.» dans la raquette, mais la réussite s’ob- À cause de cela, ils sont parfois rattra- tient aussi avec des paramètres comme pés par un peu de fébrilité, mais ils sont Les tableaux individuels la ténacité, la concentration maximum volontaires. Avec un an de plus et du «En simples, cette problématique se et la confiance. Je sais qu’elle y travaille travail, j’espère que leur progression confirme un peu. Les trois meilleurs et progresse là-dessus. Leïli a perdu technique et mentale permettra de bien garçons ont perdu au même stade de contre la meilleure joueuse européenne gérer ces grands événements.» # 27
ENTRETIEN 11 Un homme se cache derrière l’ascension de Simon Gauzy vers le sommet du ping mondial. Un personnage peu connu, tout à la fois entraîneur, guide et conseiller. Son nom : Jean-René Mounié. Passionné et passionnant, il a raconté à Ping Pong Mag son rôle auprès du n°1 français, son approche du métier et son parcours personnel. À découvrir. JEAN-RENÉ MOUNIÉ ENTRAÎNEUR PAR VOCATION © FFTT/Rémy Gros # 27
12 ENTRETIEN Avec Hugo Calderano pendant les Jeux olympiques de Rio. MON MÉTIER : COACH PRIVÉ à Ochsenhausen. Ils jouent pour des deux joueurs, une autre partie. «Depuis un peu plus d’un an, après le club de la ville en Bundesliga. Le reste est assuré par la fédération les Jeux de Rio 2016, je suis devenu Mon rôle à leurs côtés est celui brésilienne de tennis de table, en coach privé. Je travaille aujourd’hui d’un entraîneur/coach. Je partage échange du suivi individuel d’Hugo exclusivement avec deux joueurs : le leur préparation avec deux autres Calderano, notamment sur le circuit Français Simon Gauzy et le Brésilien techniciens français, Michel Blondel des compétitions. Hugo Calderano. Le premier est et Mikael Simon, un préparateur Je passe environ une semaine par âgé de vingt-trois ans, le second physique. Le club d’Ochsenhausen mois avec eux en Allemagne, à l’en- avoue deux années de moins. Ils paye une partie de mon salaire, traînement. Et je les accompagne sur vivent et s’entraînent en Allemagne, l’équipementier Cornilleau, sponsor les tournois. Dans le cas d’Hugo, j’as- # 27
ENTRETIEN 13 © FFTT/Vincent Kovacs Avec Levallois en 2007. « Je travaille avec deux joueurs, Simon Gauzy et Hugo Calderano » MON PARCOURS DE JOUEUR je suis passé de l’autre côté et j’ai «J’ai commencé le tennis de table naturellement arrêté de jouer.» à douze ans, dans un petit club des Bouches-du-Rhône, la Voilerie, MA TRAJECTOIRE aux Pennes-Mirabeau. J’ai tout D’ENTRAÎNEUR de suite accroché. Mais j’étais © photos FFTT/Rémy Gros «J’ai toujours entraîné. J’ai com- surtout très intéressé par l’entraîne- mencé dans mon club, à l’époque ment. À quatorze ans et demi, j’ai où j’étais encore collégien puis passé mon premier diplôme pour lycéen. Après l’obtention de mon apprendre le ping aux enfants. À Brevet d’Etat d’éducateur sportif, quinze ans, je savais que je voulais j’ai été recruté par le comité dépar- devenir entraîneur et en faire mon temental des Bouches-du-Rhône. métier. Une hérédité familiale, sans J’y suis resté cinq ans. Mon pre- doute, car toute ma famille a tra- mier poste. Mais, en 2000, tout vaillé dans le social. J’ai continué s’est arrêté un peu brutalement à à jouer jusqu’à l’âge de vingt ans, cause de difficultés financières. Il à Aix-en-Provence, puis à l’ASAND m’est alors venu à l’idée de monter Marseille, à un bon niveau national. une structure privée pour organiser des stages et entraîner de façon © FFTT/Rémy Gros individuelle. L’expérience a duré « À seize ans, un an. Un jour, j’ai reçu un coup de téléphone de Michel Blondel. Il je voulais quitter rejoignait l’équipe de France et me l’école pour devenir proposait de lui succéder comme entraîneur à Levallois. J’ai accepté. entraîneur » Nous étions en 2001. J’y suis resté six ans. À l’époque, le club comp- tait dans ses rangs Jean-Philippe sure cette tâche en intégralité. Pour Entre 1995 et 1997, j’ai participé Gatien, Damien Eloi et Christophe Simon, j’ai un accord avec la FFTT à trois reprises aux championnats Legoût. Une formidable expérience. pour partager cette responsabilité de France. Je comptais alors parmi En 2007, j’ai quitté Levallois pour avec Patrick Chila et l’encadrement les 150 meilleurs joueurs français. rejoindre la FFTT. Pendant deux ou national. En 2017, par exemple, Mais l’enseignement m’intéressait trois ans, je me suis occupé des j’étais avec lui sur les Opens de plus. À seize ans, j’étais déjà entraî- cadets et juniors, entre le pôle France Corée du Sud, d’Australie et d’Au- neur régional. Je voulais quitter de Nantes et l’INSEP. Puis j’ai reçu triche. Je m’occupe de la gestion de l’école pour m’y consacrer à fond. une offre du Brésil pour prendre la leur carrière, des aspects logistiques, Puis j’ai passé mon Brevet d’État, responsabilité de la préparation de de la préparation mentale…» 1 er et 2 e degré. Progressivement, l’équipe nationale masculine. J’ai # 27
14 ENTRETIEN Jean-Philippe Gatien « J’ai été marqué par la réussite de Jean-Philippe Gatien » notamment en dehors du micro- chères. Il peut se construire une âme cosme du tennis de table. Je suis de champion qui est peut-être déjà très curieux de connaître ce qui enfouie en lui. Il faut être patient. se fait de nouveau et d’intéressant Les gens ne prennent pas toujours dans les autres sports, voire dans le conscience de la difficulté du par- business ou même dans l’art. cours. Ils voient un jeune joueur de Je lis beaucoup, je me documente. quatorze/quinze ans très promet- J’ai été marqué, plus jeune, par la teur, ils l’imaginent déjà dans le top réussite de Jean-Philippe Gatien. Il 10 mondial. Dans la réalité, au quo- avait été assez novateur et auda- tidien, la trajectoire se révèle moins cieux pour développer un système fluide et plus complexe. Dimitrij de jeu qui allait à l’encontre de la Ovtcharov, le numéro 1 européen, tendance de son époque. Il avait avait un peu plus de dix-neuf ans accompagné les Brésiliens sur deux pris de l’avance. Il a été rattrapé et quand il est entré pour la première olympiades, Londres 2012 et Rio copié, mais dans l’intervalle il a eu fois dans le top 20 mondial. Mais il 2016. J’allais au Brésil une dizaine le temps de décrocher une médaille a fallu attendre ses vingt-deux ans de fois par an, pour des séjours de olympique et remporter un titre pour le voir intégrer le top 10. dix à quinze jours. Quand je suis mondial. Je passe 200 à 220 jours par an arrivé, en 2009, le pays comptait Avec Simon Gauzy, on cherche en à suivre Simon Gauzy et Hugo seulement deux joueurs dans les permanence à s’ouvrir à d’autres Calderano, à l’entraînement et 200 premiers mondiaux. À mon disciplines. Le tennis, par exemple. en compétition. Je suis très positif départ, le Brésil en recensait deux Roger Federer est son idole. Il est quant à sa progression. Sa posi- dans le top 50 mondial.» même allé le voir jouer à Londres, tion actuelle dans la hiérarchie au mois de novembre, à l’occa- mondiale n’est pas usurpée. Il a MA MÉTHODE, sion du Masters. J’essaye de lui atteint les huitièmes de finale à UNE APPROCHE trouver des faits, des anecdotes, l’Open de Corée du Sud, la finale DE CHERCHEUR des exemples, pris ici ou là dans en Australie, les demi-finales en «J’ai quarante-quatre ans, mais le très haut niveau. Il existe toujours Autriche, avant de se classer à la j’entraîne depuis plus d’un quart quelque chose à en tirer, mais sans quatrième place à la Coupe du de siècle. Je ne suis pas un débu- pour autant vouloir les idéaliser.» Monde. Il s’est montré très régulier, tant. Surtout, je suis bien entouré. c’est sa force. Il est très accrocheur. Je l’ai toujours été. Pour la prépa- SIMON GAUZY, Quand les choses ne se passent pas ration mentale, par exemple, j’ai UN CRÉATIF EN FORMATION bien, il démontre une grande capa- longtemps travaillé avec François «Une chose est certaine : Simon cité à s’accrocher jusqu’à surmonter Ducasse, un spécialiste de la ques- Gauzy a le profil pour devenir un l’obstacle. En 2017, il a connu un tion, auteur de plusieurs ouvrages très bon joueur de tennis de table. mois de septembre difficile, mais il sur le sujet, très impliqué dans le Un champion, je ne sais pas. Je n’ai a su rebondir pour terminer l’année tennis. J’aime me définir comme un pas encore la réponse. J’y crois, en trombe. Je dois dire qu’il m’a sur- chercheur. Je cherche, je recherche, bien sûr, mais les places sont très pris. En avril et mai, il a connu une # 27
ENTRETIEN 15 Simon Gauzy © FFTT/Rémy Gros vraie progression technique dans son jeu. Mais il a fallu attendre plu- LA CHINE, UNE PUISSANCE À DÉFIER « Je suis reconnaissant sieurs mois avant de la concrétiser par des résultats en compétition. «Beaucoup de gens reprochent à la Chine d’écraser de sa supréma- à la Chine d’avoir amené À son niveau actuel, le mental joue tie le tennis de table mondial. Je le ping à son niveau actuel » un rôle déterminant. Les joueurs ne raisonne pas ainsi. Je suis au du top 10 mondial doivent s’ap- contraire reconnaissant aux Chinois puyer sur une structure de jeu très d’avoir amené le ping au niveau où forte et très avancée. Jusque-là, il se situe aujourd’hui. Mais il ne J’aime à croire qu’il existe des ce n’était pas son cas. Il est créa- me semble pas judicieux de cher- brèches dans la muraille et que tif, il peut faire preuve d’un talent cher à les copier. Un copié-collé les Français sauront les exploiter. dans le jeu très particulier, mais il n’est jamais meilleur que l’original. Nous devons profiter de nos qua- ne parvenait pas à maintenir son Aujourd’hui, les trois ou quatre meil- lités propres et les intégrer dans niveau de jeu match après match. leurs joueurs chinois sont au-dessus notre système de jeu de demain. Parfois, il n’était pas facile pour lui du lot. Mais je suis moins impres- Mentalement, notamment, certains d’appuyer sur les bons boutons. Il sionné par les autres. Ils bénéficient joueurs peuvent être supérieurs, possédait les atouts techniques, d’un système très solide, ils sont dont Simon et Hugo. J’y crois. mais pas encore la capacité men- forts dans le collectif, mais les Et cette croyance m’anime au tale à répondre aux exigences du seconds couteaux chinois ne sont quotidien.» très haut niveau. Aujourd’hui, il l’a pas du même niveau. Quant à leur acquise. Maintenant, il va falloir domination, rien n’est gravé dans le Propos recueillis stabiliser tout cela.» marbre. par Alain Mercier # 27
16 BRÈVES FRANCE © FFTT/Jean-Marie Hervio UN PARRAIN NOMMÉ LEBESSON La notoriété d’Emmanuel Lebesson ne se dément pas. Et l’impact de son titre européen en simple en 2016 se fait encore sentir. Le Français a été sélectionné comme l’un des vingt parrains des Étoiles du Sport, le rassemblement annuel des grands noms du sport français, organisé du 15 au 20 décembre 2017 au Club Med de la Plagne 2100. L’occasion pour le n°2 français au classement mondial de s’essayer à d’autres disciplines (tennis, football, boxe…), de participer à la Yéti Race, un trail de 10 km en montagne avec obstacles. L’occasion, surtout, de par- tager son expérience avec les jeunes espoirs invités tous les ans à la manifestation. Parmi eux, Alexandre Cassin, invité lui aussi par les organisateurs au titre d’espoir du sport français. Un double gagnant. UNE RAQUETTE À BASE DE TEXTILE RECYCLÉ L’initiative n’est pas seulement tendance, elle se révèle utile et pertinente. L’entreprise bretonne Armor-lux, qui fournit en vêtements professionnels plusieurs grandes sociétés nationales comme la Poste et la SNCF, a eu l’idée de recycler ses produits pour la fabrication d’une… raquette de tennis de table. Le fruit d’une collaboration entre trois partenaires. Le résultat : la nouvelle raquette Softbat, fabriquée en France par Cornilleau. Trois ans de recherche ont été néces- saires. Il s’agissait de trouver la solution technique pour faire entrer des fibres textiles dans la composition d’une matière plastique. Pas simple. Plastigray, un spécialiste de l’injection plastique très présent dans le secteur automobile, et Mapea, un spécialiste de la formulation, ont été sollicités. Un mélange a été proposé à Cornilleau. «La raquette composite Softbat est solide, elle est fabriquée en France au même coût qu’en Asie, son prix de vente est bas (une dizaine d’euros)», a expliqué François Robert, le directeur commercial de Cornilleau, au quotidien Ouest-France. À la fin de l’année 2017, 50 000 raquettes Softbat ont été produites par Plastigray, selon un design pensé par Cornilleau. # 27
BRÈVES FRANCE 17 PING TOUR 2018 EN MARCHE Suite au succès des années précédentes, la caravane du Ping Tour reprend la route en 2018. Les can- didatures sont à envoyer avant le 26 janvier à l’adresse suivante : pingtour@fftt.email De gauche à droite : Benjamin Brossier, Nolan Givone, Alexandre Cassin, Jules Rolland et Leïli Mostafavi. LA ROMAGNE ET LYS TABLEAU D’HONNEUR VIRENT EN TÊTE Le double projet n’est pas une expression en l’air pour les pongistes de l’INSEP. Pour preuve les brillants Rien n’est joué dans le championnat de Pro. Mais résultats scolaires obtenus en 2017 par les pension- deux clubs ont passé les fêtes de fin d’année le sourire naires du pôle France de l’INSEP. Benjamin Brossier a aux lèvres et la tête dans les nuages. Au terme de la décroché son diplôme en management des carrières dernière journée de championnat de l’année 2017, sportives. Nolan Givone a obtenu son bac ES avec La Romagne et Lys Lille Métropole ont conforté leur mention AB. Alexandre Cassin est désormais titulaire position en tête du classement, respectivement chez d’un bac pro en commerce. Jules Rolland a figure en les hommes et les femmes. Une excellente façon de bonne place au sommet du tableau d’honneur, grâce débuter l’année 2018 avec le plein de confiance. En à son bac S avec mention TB. Une prouesse égale- Pro B, Saint-Denis et Quimper jouent des coudes en ment accomplie par Leïli Mostafavi. tête du classement, avec la perspective de jouer dans quelques mois l’accession à l’échelon supérieur. À AUCH, ON PARLE CHINOIS On ne change pas une formule gagnante. Pour la troisième année consécutive, un stage, à vocation sportive et culturelle, de tennis de table en Chine est proposé par les deux entraîneurs Bruno Carvalho et Xu Jipeng. Les deux premiers voyages, en juillet 2016 et 2017, ont permis à une quarantaine de personnes de visiter la Chine centrale et la région de Pékin tout en découvrant les méthodes d’entraînement du ping chinois. Pour l’année 2018, trois formules sont proposées. Tous les rensei- gnements peuvent être obtenus auprès de Bruno Carvalho, le responsable de cette organisation : b_runo2004@hotmail.com # 27
18 BRÈVES FRANCE ROUEN OUVRE SES PORTES La billetterie pour les championnats de France 2018 organisés au Kindarena à Rouen du vendredi 2 au 4 mars est officiellement ouverte ! 1 jour : 10 € / Pass 2 jours : 18 € / Pass 3 jours : 20 € / -12 ans : 6 € par jour Groupe : à partir de 10 places achetées à 10 €, toutes les places suivantes à 6 € (en prévente uniquement) / Pass 3 jours : 16€ Pré-commandez vos places au tarif groupe à cette adresse mail : lntt@orange.fr Pour plus d’information : www.franceping.net SAINT-DENIS POUSSE SES MURS L’année 2018 commence en grand pour le SDUS 93, le club de la ville de Saint-Denis, en banlieue parisienne. Sa salle dédiée au tennis de table, la célèbre «Raquette», bénéficie depuis la fin de l’année passée d’une extension. Elle a été inau- gurée à la mi-décembre 2017 par Laurent Russier, le maire de Saint-Denis, accompagné de deux adjoints, Fabienne Soulas (Bâtiments municipaux), et Bally Bagayoko (Sports). Ces nouveaux locaux vont permettre à la section tennis de table d’orga- niser des formations théoriques et des séances vidéo avec les pongistes. L’extension devrait également offrir de meilleures conditions de travail aux salariés. Les dirigeants bénévoles, souvent présents au quotidien, bénéficieront d’espaces adaptés pour les différentes réunions de bureau et de commissions. # 27
20 DOSSIER Camille Lutz UNE AFFAIRE DE FAMILLE La passion du tennis de table se transmet souvent d’une génération à l’autre. Et elle se partage parfois entre frères et sœurs. Le ping français a toujours regorgé d’exemples de fratries, mais la tendance se renforce. Ping Pong Mag a ouvert le dossier. Philippe et Jean-Miche Saive Viktoria et Veronika Pavlovich Charlotte Lutz Quentin et Alexandre Robinot Noshad et Nima Alamiyan Le tennis de table n’a pas encore trouvé avec son frère Philippe sous les couleurs (championne d’Europe en 2010 et 2012) ses sœurs Williams. Dans ses tablettes, du Logis Auderghem, à Bruxelles. Les et Veronika. Originaires de Biélorussie, pas un seul équivalent aux deux frangines deux joueurs avaient déjà fait cause com- elles ont la particularité d’être jumelles. new-yorkaises, victorieuses à elles deux mune au début des années 90 au club En France, les exemples fourmillent. Aux de 30 titres en simple en Grand chelem, de La Villette Charleroi. En Iran, l’équipe derniers championnats d’Europe par plus 14 victoires en double dames. Le pal- nationale repose presque toute entière équipes, Quentin et Alexandre Robinot marès du ping mondial ne recense pas la sur les épaules des deux frères Alamiyan, avaient été choisis par l’encadrement moindre paire de frères ou sœurs sacrée Noshad et Nima. pour épauler Simon Gauzy et Emmanuel en double depuis les années d’après- Les sœurs Solja, Susan, Amelie et Petrissa, Lebesson. Ils ont longtemps fait leurs guerre. Même absence d’un double aux se croisent elles aussi au plus haut niveau classes à Maisons-Alfort, afin de sépa- deux noms identiques dans les archives international. Mais, curiosité, Petrissa rer leurs routes. Plus jeunes, les deux des championnats de France individuels. porte les couleurs allemandes, Amelie Alsaciennes Camille et Charlotte Lutz Il n’empêche, les fratries sont légion. En ayant préféré opter pour la sélection figurent en bonne place parmi les espoirs Belgique, l’ex numéro 1 mondial Jean- autrichienne. Toujours plus singulier, le du ping féminin français. Michel Saive fait équipe depuis l’an passé cas des deux sœurs Pavlovich, Viktoria Alain Mercier # 27
DOSSIER 21 AUDREY MATTENET : La soeur aînée d’Adrien Mattenet n’a pas le palmarès de son frère, ex sélectionné « NOUS SOMMES olympique. Elle a pourtant été la première à faire entrer le ping dans la famille. FUSIONNELS » Ping Pong Mag : Que vous inspirent vos styles Adrien a été très médiatisé, grâce à ses de jeu respectifs ? performances et son statut de numéro un Adrien est un attaquant, même s’il joue à mi-distance et français. On en oublierait presque que qu’il arrive à ramener beaucoup de balles. Je suis une vous êtes «la pionnière» de la famille... pure attaquante, en revanche, agressive. Je suis gau- Audrey Mattenet : J’ai commencé à jouer à l’âge de chère, bonne serveuse, bloqueuse/contreuse. On est sept ans, puis Adrien a suivi un an après. J’ai performé très opposés à ce niveau-là. assez rapidement. Mon premier titre de championne de France, je l’ai obtenu en benjamine. Au total, je Et dans la vie ? compte une dizaine de titres nationaux et une période Je suis d’un naturel pessimiste, Adrien le contraire. Et je passée avec le maillot de l’équipe de France. vais droit au but pour dire les choses, j’agis de manière directe, tandis qu’Adrien est plus discret. Nous sommes Vous partagez aussi avec Adrien le fait en tout cas fiers du parcours de chacun. Adrien m’a tou- d’avoir joué longtemps à Beauchamp. jours soutenue, il a toujours dit que j’étais la plus douée Que retenez-vous de ces années-là ? dans le sens où lui devait s’entraîner très dur pour avoir Nous avions tout au club, le niveau, les structures. une certaine technique, être performant alors que moi, À Beauchamp, les filles et les garçons s’entraînaient c’était plus naturel. ensemble. C’était la logique du club. Adrien me faisait déjà des balles hautes (rires). Un mélange de vos deux profils aurait été détonnant… Quels autres bons souvenirs On peut le dire, oui (sourires). Avec nos deux profils avez-vous gardés ? différents et nos deux systèmes de jeu, nous aurions été Pour Adrien, le titre de champion de France 2015. injouables (rires). Complémentaires et fusionnels, c’est C’est moi qui l’échauffais. Il courait après depuis long- ce qui pourrait nous décrire. Beaucoup de gens nous temps, et c’est une finale incroyable contre Stéphane prennent pour des jumeaux. Ouaiche. Il a sauvé beaucoup de balles de match. Je retiens aussi les championnats de France à Antibes en Propos recueillis par Alexandre Sarkissian 2008. On décroche quatre médailles à nous deux(*). C’est un sentiment très fort, celui de réussir au même moment. À titre personnel, je n’oublierai pas ma vic- * Audrey obtient le bronze en simple et en double. Adrien, lui, remporte le double toire contre la neuvième joueuse mondiale. avec Emmanuel Lebesson et monte sur la troisième marche en simple. # 27
22 DOSSIER JEAN-LUC GAUZY : « SIMON A MIS LA BARRE TRÈS HAUT » Le père du numéro 1 français se confie sans tabou sur le parcours pongiste de ses quatre enfants. Il évoque notamment la personnalité de Simon Gauzy, pas toujours facile pour ses frères. Ping Pong Mag : Comment vos enfants sont-ils arrivés au tennis de table ? Jean-Luc Gauzy : Simon étant l’aîné, c’est lui qui a montré la voie. Il y a eu une période où il pratiquait en même temps tennis et tennis de table. On l’a scolarisé à la maison. Cela permettait les entraî- nements dans la journée pour les deux sports. À la longue, matériel- lement, il n’était plus possible de faire les deux. La condition était qu’ils prennent tous le même sport. J’ai dit à Simon et Paul (son premier cadet, ndlr) : «Faites votre choix, ou je serai obligé de le faire.» Et ils savaient ce que je choisirai : le tennis. Que pensez-vous de leur décision ? Ils sont heureux dans leur sport. Mais on ne saura jamais. Aujourd’hui, Simon est huitième au classement mondial en tennis de table. S’il s’était trouvé à cette même place au tennis… Mais aucun regret, non. Ils sont bien dans ce qu’ils font. Pierre et Mathieu ont suivi. Ils n’ont pas eu trop le choix. C’était peut-être un peu dur pour eux, je pense, menta- lement et psychologiquement, dans la mesure où les grands mettaient la barre assez haut. Simon notam- ment. Il y a eu des moments un peu © FFTT/Rémy Gros pénibles. C’est-à-dire ? Nous ne vivions que pour le ping, toute notre vie tournait autour. Ils # 27
DOSSIER 23 étaient là-dedans et voyaient bien que la barre était haute. Ils n’ar- rivaient pas à faire aussi bien. Ils auraient été à l’aise dans un autre sport. Pierre, le dernier, avait quelques dispositions dans le ping. Il me paraissait pas mal et finalement, non. Simon a eu un pal- marès très riche. Il a mis la barre haut, très vite. Je pense qu’ils se sont découragés. Dans les compéti- tions régionales, celui qui battait un Gauzy était un phénix. Que font aujourd’hui Pierre et Mathieu, les deux plus jeunes ? Ils sont étudiants à Toulouse. Ils conti- nuent le tennis de table en loisirs et Pierre, Simon, Mathieu et Paul Gauzy dans des compétitions régionales. Quant à Paul, il est licencié à Istres, en Pro A. C’est un bon joueur et domaine. Mais je réagirais de la nait pas à quel point il avait besoin il a repris des études. Les quatre même façon s’il avait été question d’y être. Une vraie progression. s’entendent tous bien. Simon a un de menuiserie. La part d’investisse- regard de grand frère, dans tous les ment, quelle que soit la discipline, Quelles occasions domaines. Il s’intéresse beaucoup à est ce qui m’intéressait au départ. avez-vous de le voir ? ce que font ses frères. Il a toujours S’il y a une réussite après, comme Avec mon épouse, nous allons au un oeil sur eux, exigeant, comme il celle de Simon, tant mieux. club deux à trois fois par an. Pour les l’a toujours eu. Et nous, on suit tous compétitions, nous essayons d’être Simon. À quel moment avez- présents le plus souvent possible. vous su qu’il serait aussi Sinon, il y a les réunions de famille. Quel souvenir gardez-vous impliqué dans le sport ? Deux fois par an. Généralement à de son association avec Je peux le dire sans aucun doute : Noël, plus une quinzaine de jours Paul en compétition ? à l’âge de trois ans. Je savais que en été, avant la reprise de la saison. Ils ont fini derniers pour leur pre- c’était important dans sa vie. Le ten- mière participation aux interligues nis d’abord. À quel stade ? Je n’en On imagine votre bonheur en Midi-Pyrénées. Malgré ça, il était savais rien. Je ne pensais pas du quand vos quatre enfants clair qu’ils ne s’arrêteraient pas là, tout à une carrière de haut niveau. sont réunis en famille… car ils étaient plus jeunes que les À trois ans, avec sa raquette de Oui. Et ils ont la fibre toulousaine ! autres. La deuxième année, ils ont tennis, c’était assez démentiel. Il On parle beaucoup de foot, hand- terminé onzième. La troisième, ils pouvait passer quatre heures sur un ball, rugby bien sûr. On essaie ont gagné. court sans me demander d’arrêter. d’aller voir tous les six le Stade Toulousain. Un autre rituel, la sortie En tant que père, Comment jugez-vous cinéma, avec deux films, dont un de que ressentez-vous à l’égard la suite de sa carrière mon choix. En principe, ils ont peur de Simon et de sa carrière ? en Allemagne ? de ce que je vais choisir (rires). Je ne dirai pas que je ressens de À Ochsenhausen, il se trouve dans Mais ils font les efforts. Nous avons la fierté, car c’est lui qui accomplit la meilleure structure possible. En nos habitudes de famille… sa carrière, pas moi. J’éprouve de étant européen, je ne vois pas de la satisfaction de voir des enfants meilleur endroit. Avec le recul, je me Propos recueillis qui donnent le maximum dans ce dis qu’on avait raison. On n’imagi- par Camille Vandendriessche # 27
24 DOSSIER ET UN, ET DEUX, ET TROIS HENRIOT ! La famille Henriot est intimement liée au Berck TT. Les trois frères, Clément, Valentin et Corentin, œuvrent avec générosité pour le club dirigé par Denis, le papa. De gauche à droite : Corentin Henriot, Adam Hmam, Valentin et Clément Henriot Dans la famille Henriot, je demande le Berck TT évolue en Régionale 4. la descente de l’équipe première en l’aîné. Le responsable. Le chef de clan. «On s’est beaucoup investi pour le N3 n’a pas fragilisé ses ambitions. En Si la fratrie œuvre depuis une quinzaine club, en allant notamment chercher des témoigne la présence dans l’effectif d’années au club de Berck, Clément joueurs», raconte aujourd’hui Clément. actuel d’Adam Hmam, l’espoir tunisien. Henriot n’y est pas pour rien. Avec L’aîné ne s’en cache pas : Valentin et «Nous sommes parvenus à le prolonger un papa éducateur sportif de tennis, Corentin avaient quelque chose en malgré l’ascenseur, une belle aven- le jeune homme (27 ans aujourd’hui) plus. «À leur âge, je n’étais pas aussi ture», se réjouit Clément. n’était pas destiné à manier la petite bon qu’eux. Ils étaient tous les deux au L’objectif à court terme est de pérenni- balle blanche. Il délaisse la jaune un pôle espoirs. C’est là qu’ils ont franchi ser le club dans une N2 que les Berckois peu par hasard, vers 12 ans, sur les les étapes.» vont de nouveau fréquenter, grâce au conseils d’un copain. Le ping vient de «Grâce à mes frères, j’ai progressé succès obtenu devant Chilly-Morangis l’accrocher et il entraînera avec lui le mentalement, souligne Corentin. Notre à la fin du mois de novembre 2017. reste de la famille. solidarité nous a permis de grandir et Clément, quelque peu éloigné du ping Valentin, de trois ans son cadet, est de gagner des matches qui ne nous par ses projets personnels, avait réin- le premier à suivre. Corentin, le plus étaient pas promis.» Parmi les victoires tégré l’équipe afin de pallier quelques jeune, marche ensuite sur leurs traces. les plus marquantes, tous les succès défections. Pour la bonne cause, l’aîné Le père, Denis, devient le président du qui ont amené Berck à la montée en a répondu à l’union sacrée. club nordiste. À son arrivée en 2005, Nationale 2. À la fin de l’année 2016, A.S. # 27
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